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10 mars 2006 5 10 /03 /mars /2006 17:20

Dans Le Monde du 8 mars 2006 (4), en page débat, deux juristes de renom, Guy Carcassonne (1), ancien conseiller de Michel Rocard, et Olivier Duhamel (2), ancien député européen socialiste, tous les deux professeurs de droit constitutionnel, l’un à Nanterre (3) et l’autre à Science-Po Paris, s’inquiètent de la multiplicité de candidatures à droite comme à gauche, parmi les partis dits gouvernementaux.

À droite, les potentiels candidats sont entre autres : Nicolas Sarkozy, François Bayrou (déclaré), Dominique de Villepin, Alain Juppé (qui n’est plus inéligible et va bientôt faire sa rentrée politique), Philippe de Villiers (qui se désaxe considérablement de son électorat en adoptant les thèmes du FN), Christine Boutin... Jacques Chirac aussi pourrait figurer sur la liste, même s’il a pris un coup de vieux.

À gauche, la situation est encore plus chaotique : Ségolène Royal (reine des sondages mais haïe de ses contemporains apparatchiks), François Hollande, Laurent Fabius, Dominique Strauss-Kahn, Jack Lang, Martine Aubry, Henri Emmanuelli, Arnaud Montebourg... en oubliant le retour du revenant Lionel Jospin et sans prendre en compte les alliés des socialistes tels que les Verts (Yves Cochet, Dominique Voynet, Noël Mamère, Daniel Cohn-Bendit...).

Bref, au total, il y a un gros risque que face à ces ambitions plurielles et à l’absence de personnalités qui se dégagent, il y ait deux candidats UMP (exemple : Sarkozy et De Villepin) comme ce fut le cas en 1995 (Balladur et Chirac) et deux candidats PS (exemple : Royal et Fabius).

Le risque ? oui, un gros risque pour la démocratie. Nos deux constitutionnalistes estiment en effet que le phénomène du 21 avril 2002 se renouvellerait avec plus de certitude en raison de deux risques : celui de voir arriver au second tour deux candidats ayant rassemblé leurs extrêmes (exemple : Le Pen et José Bové pour l’extrême-gauche), ou, comme en 2002, un candidat d’extrême-droite (Le Pen) et un autre candidat d’un parti gouvernemental (UMP ou PS) qui aurait un score très proche du candidat de l’autre parti gouvernemental mais arrivé seulement en troisième position.

Cette perspective, plus que probable si la disciple d’une candidature unique ne jouait ni à droite ni à gauche, aurait de quoi inquiéter, car elle mettrait en valeur les arguments démagogiques.

Au moment de la rédaction de l’actuelle Constitution, le Garde des Sceaux de l’époque, Michel Debré (père de l’actuel président de l’Assemblée Nationale) avait déjà fait la proposition (en été 1958) d’une élection à un tour, faisant élire député le candidat arrivé en tête dès le premier tour. Cette méthode appliquée à l’élection présidentielle serait désormais désastreuse, d’une part en raison du manque de légitimité (Chirac, en tête du premier tour de 2002, n’a obtenu qu’à peine 20%) et d’autre part, ce candidat en tête pourrait bien être Le Pen (qui pourrait garder son capital de 17% alors que les autres candidats se situeraient bien en dessous de 15%).

Guy Carcassonne et Olivier Duhamel ont donc trouvé une solution. Hélas, qui relève plus de l’usine à gaz très peu lisible par les gens que d’une saine réflexion sur la représentation politique.

Ils proposent en effet que si au moins deux candidats n’obtenaient pas au moins 20% des voix au premier tour, alors, il y aurait un nouveau tour électoral avec pour candidats les quatre candidats arrivés en tête, puis, un troisième tour avec les deux arrivés en tête du second tour. Ainsi, ils remettraient dans la compétition uniquement les grosses pointures sans perte de voix provenant des petits candidats (fort nombreux en 2002).

Application.

Le cas s’est produit trois fois sous la Ve République (aucun ou un seul candidat avec plus de 20% des voix).

En 2002, un nouveau tour entre Chirac, Le Pen, Jospin et Bayrou, et les deux candidats finalistes auraient été sans doute Chirac contre Jospin qui aurait alors pu gagner.

En 1995, un nouveau tour entre Chirac, Balladur, Jospin, Le Pen, et là, tout aurait été possible pour les deux finalistes, puis le finaliste.

En 1988, un nouveau tour entre Chirac, Mitterrand, Barre et Le Pen, et là, Raymond Barre pouvait reprendre un avantage sur Chirac et avoir une plus grande probabilité de battre Mitterrand.

Quand nous regardons ce dernier exemple, on comprend alors un peu le pourquoi d'une telle proposition : conseiller proche de Michel Rocard, Carcassonne s’amuse à refaire l’élection fatale de 1988. Quant à Olivier Duhamel, qui avait soutenu Jospin, ce système aurait sans doute bien aidé Jospin en 2002.

Un peu simpliste dans les arrière-pensées ? sans doute le suis-je, puisque ces deux juristes semblent regarder plutôt vers l’avenir proche : 2007.

Mais à changer sans arrêt les règles, on ne peut qu’agacer les citoyens et renforcer les extrêmes, ceux justement contre lesquels ils proposent le changement de règles.




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(1) http://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_Carcassonne
(2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Olivier_Duhamel
(3) http://www.u-paris10.fr/78196432/0/fiche___pagelibre/
(4) http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-748326,0.html

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