(dépêche)
Le courant DSK vole en éclats
David Revault d’Allonnes
QUOTIDIEN : vendredi 26 septembre 2008
Grosse coupure de courant chez les amis de DSK. La haute tension qui régnait, ces derniers mois, au sein de sa sensibilité, «socialisme et démocratie» (SD), tourne à la scission. Entre ses deux lieutenants, Pierre Moscovici, rangé derrière Bertrand Delanoë, et Jean-Christophe Cambadélis, artisan du rassemblement des «reconstructeurs» derrière Martine Aubry, la rupture est consommée.
Tension. En témoignent deux lettres envoyées aux militants. «SD n’a pas résisté aux coups de boutoir de ceux qui ont confondu reconstruction et combinaison, indique Moscovici. Cette aventure-là est finie, j’en prends acte avec tristesse.» Réplique de Cambadélis : «Un nouveau courant veut donc se constituer […] Je le regrette, cela m’attriste.»
Et le député de Paris d’estimer que ce «ralliement [de Moscovici, ndlr] de dernière minute, à Delanoë [constitue] une rupture avec Dominique Strauss-Kahn»…
«Restez groupés», avait lancé DSK à ses troupes, en juillet 2007, avant d’aller prendre la tête du FMI. Mais, comme le rappelle le député du Finistère Jean-Jacques Urvoas, «quand le chat n’est pas là, les souris dansent». Très vite, les deux hommes divergent sur la stratégie.
Pierre Moscovici met en avant sa candidature à la succession Hollande. Jean-Christophe Cambadélis, lui, échafaude l’attelage des «reconstructeurs», qu’incarnera bientôt Aubry, mêlant, outre les amis de DSK, ceux d’Arnaud Montebourg et de Laurent Fabius. La tension atteint son paroxysme à la dernière université d’été de La Rochelle, avec «la mise en scène de la mise à l’écart de Moscovici», seul à une terrasse pendant que Cambadélis, Fabius, Montebourg et Aubry déjeunent juste à côté. Commentaire d’un strauss-kahnien : «On était au royaume de Florence, entre la dague et le poison des Médicis.»
Torts. La famille est bel et bien décomposée. Et dans les entourages des deux hommes, qui ne communiquent plus que par SMS, on se renvoie les torts du divorce. «Cambadélis a fait exploser le courant que lui avait confié DSK, accuse Michèle Sabban, proche de Mosco. C’est lui qui a tué SD en associant Fabius aux reconstructeurs.» Une allusion à l’aversion pour ce dernier qui aurait poussé les rocardiens du courant, comme le maire de Grenoble Michel Destot, le théoricien Alain Bergougnioux ou l’ancien ministre Alain Richard, à rejoindre le maire de Paris. Réplique des amis de «Camba» : «Moscovici a dans l’idée de créer sa propre boutique. Il ne fait plus une priorité du retour de DSK», estime Laurent Baumel. François Kalfon ajoute : «Certains se sont dit que c’était leur heure…»
«Intox, dénigrement, rumeur, désinformation. L’idée que je crée un nouveau courant à mon nom est un scandaleux mensonge», nie
Moscovici. Et, visant son camarade Cambadélis : «Je regrette cela de la part d’un homme que j’ai beaucoup aimé.» Mais alors, qui va garder les enfants ? «Pierre est à poil», jure un proche de «Camba». «Il faut arrêter de bluffer. La plupart des parlementaires et des fondateurs du courant sont derrière moi», répond Moscovici. Un élu strauss-kahnien tempère : «Chacun va faire les gros bras et aligner ses généraux chinois en terre cuite. Pas sûr que cela ait une capacité d’entraînement…»