(dépêche)
L'Assemblée "obamaniaque" s'interroge aussi sur la "diversité" en France
4 novembre 2008 - 19:25 -Tupac POINTU et Samir TOUNSI
A de très rares exceptions près, les députés français espéraient avec enthousiasme mardi la victoire de Barack Obama, révélatrice pour certains du "verrouillage" de la société française sur la question de la "diversité".
"Nous sommes enthousiastes en voyant que les Etats-Unis peuvent arriver à élire un homme métis mais très tristes de constater que, dans notre pays, il est encore tellement difficile d'émerger à des niveaux très modestes", constate George Pau-Langevin (PS, Paris), seule députée de couleur en métropole.
"Souvenez-vous, quand j'ai été candidate, on m'a dit que c'était du communautarisme. Pour une partie des cadres politiques, une candidate qui avait mon apparence ne pouvait intéresser que les gens qui lui ressemblaient", souligne cette élue de Paris.
"Obama a permis aux Américains de grandir. En deux ans, ils ont gagné deux générations", estime la députée PRG de Guyane Christiane Taubira, première candidate noire à une élection présidentielle en France, en 2002.
"Le parcours d'Obama a permis d'ébranler les clichés que l'on avait sur les gens de la diversité", poursuit-elle avant de pester contre une "classe politique française" qui "n'a pas soldé l'héritage colonial".
"Ce n'est pas la responsabilité d'Obama de déverrouiller la société française. Si on attend tranquillement, cela va prendre deux siècles", poursuit Mme Taubira en encourageant les Français de la "diversité" à secouer "les directions des partis politiques qui sont conservatrices".
"C'est à la fois une élection locale et tellement globale", s'extasie Noël Mamère (Verts). "Je regarderai avec beaucoup d'intérêt cette élection, un peu comme si je regardais une élection présidentielle en France".
"Obama arrive au carrefour de trois moments décisifs de l'histoire récente des Etats-Unis: l'esclavage, la grande dépression et la révolution néo-conservatrice", analyse le député-maire de Bègles.
A entendre certains députés français, une victoire du sénateur de l'Illinois "symbolisera une Amérique ouverte sur le monde et non pas repliée", comme l'estime François Sauvadet, patron des députés du Nouveau centre.
"Le choix Obama, c'est quand même important pour l'avenir de l'humanité", insiste pour sa part le député communiste André Chassaigne.
Le président UMP de la commission des Affaires étrangères, Axel Poniatowski, estime, lui, qu'Obama peut surmonter "la crise financière et morale": "c'est une personnalité exceptionnelle qui a une approche multilatérale sur les questions internationales".
Dans ce déluge de louanges, les députés pro-McCain, ou en tous cas critiques envers Obama, sont ultra-minoritaires.
"Je me méfie d'Obama. Il n'a rien démontré dans ses précédentes fonctions. Cette obamania est quelque chose d'un peu curieux", s'étonne Hervé Mariton, habituel poil-à-gratter libéral de la majorité.
Obama ou McCain? "Je m'en fous. Ni l'un ni l'autre", tonne le souverainiste Jacques Myard. Diplomate de formation, M. Myard estime que la victoire du démocrate ne "changera pas radicalement la donne internationale".
Certes mais le symbole de la diversité... "Et alors? On a eu Monnerville", lance M. Myard, en référence au président du Sénat français (1958-1968) d'origine guyanaise.