Petite analyse des sentiments suscités en France avant, pendant et après l’élection de Barack Obama, et leurs conséquences sur la vie politique française. Première partie.
C’est assez intéressant d’analyser les impressions et réactions des observateurs français à propos des élections américaines. Pour beaucoup, seul le manichéisme serait concevable.
Avant l’issue des primaires démocrates
Toutes les incertitudes étaient présentes. Le combat entre Hillary Clinton et Barack Obama était très difficile à appréhender tant les forces en présence étaient motivées et d’égale grandeur.
Parmi les observateurs, il y avait les laudateurs raisonnés de Hillary Clinton. Pour eux, c’est la compétence et le sérieux, l’expérience et l’assurance. Un bon moyen d’être sûr que le prochain Président américain fût un Démocrate (une ici).
En face, ceux qui voyaient en Barack Obama un petit espoir de renouveau étaient considérés comme des doux naïfs qui ne comprendraient pas qu’il allait perdre, tant dans les primaires que, le cas échéant, à l’élection elle-même. Pour preuve, certains Républicains chercheraient à favoriser Obama dans les primaires car il serait leur adversaire le moins redoutable.
Avant l’élection du 4 novembre 2008
Une fois connus les deux principaux candidats en compétition, les observateurs étaient de nouveau coupés en deux.
Bien sûr, en France, on estimait à une très large majorité (plus de 90% !) qu’il vaudrait mieux un Démocrate qu’un Républicain à la Maison Blanche, mais on abordait ce sentiment très différemment.
D’un côté, il y avait les Cassandre, les oiseaux de mauvais augure et les désabusés qui pourraient même être des conspirationnistes qui parlaient de trucages des élections, du vote électronique, et même de coups tordus visant à faire voter républicain au dernier moment avec une arrestation opportune de Ben Laden, ou un attentat islamiste, ou encore une déclaration de guerre à l’Iran. Les plus audacieux parlaient même de risques de coup d’État, d’une militarisation du pays…
Parmi les arguments qui n’avaient rien à voir avec un scrutin truqué, il y avait bien sûr le célèbre effet Bradley et les sondages qui se tromperaient toujours (en citant généralement les résultats de l’élection française du 21 avril 2002).
Une variante : à partir du moment où les sondages restaient ostensiblement en faveur d’Obama, certains commençaient à se dire que les Républicains (et Bush Jr en particulier) avaient misé sur Obama car, d’une part, ils détestaient MacCain, d’autre part, cela leur permettrait de revenir plus facilement en 2012 (mais alors, pourquoi le Parti républicain aurait-il financé la campagne de MacCain ?).
De l’autre côté, ceux qui croyaient encore (après tous ces arguments) en la victoire d’Obama parce qu’ils avaient compris l’élan populaire qui l’avait porté dès janvier 2008, restaient considérés comme des doux rêveurs, qui gobaient n’importe quoi, qui croyaient qu’Obama était le Messie et qu’il rendrait le monde gentil et joli.
Une troisième catégorie était un peu plus originale puisqu’elle pensait qu’Obama ou MacCain, c’était blanc bonnet et bonnet blanc (sans jeu de mots), qu’ils n’étaient que des marionnettes, éventuellement des vendus au grand capital, aux lobbies, à la haute finance, au pétrole et à je ne sais quoi d’autre. Pour preuve, l’argent récolté par Obama.
Malgré les nombreuses erreurs du camp républicain (inutile de les énumérer), une quatrième catégorie pensait que John MacCain serait quand même élu. Voire l’espéraient. Pourquoi ? Selon eux, rien à voir avec la couleur de la peau. Pourtant, cela semblerait être les mêmes qui pensaient que ceux qui préféreraient Obama le préféreraient en raison de la couleur de la peau aussi ! Sans imaginer un instant que les qualités intrinsèques de Barack Obama (charisme, culture du consensus, écoute, pertinence de la réflexion et de la décision) auraient pu faire partie des causes de cette préférence.
Qualités de leader
En début septembre 2008, pendant quelques jours, les courbes d’intentions de vote s’étaient inversées. La raison à cela : la désignation de Sarah Palin. Il était de bon ton en France de la considérer comme une parfaite cruche. Cela n’expliquait pas sa forte popularité en Alaska mais ça rassurait l’homme de la rue.
Pourtant, si Sarah Palin avait eu un rôle très contrasté dans la campagne de MacCain (relance de sa campagne, mais déclarations intempestives et gaffes nombreuses et risibles), Sarah Palin avait montré des capacités de leadership qui laisseraient entendre qu’on la retrouverait certainement dans les prochaines années.
On oubliait un peu trop aisément les stupidités de Présidents élus comme George W. Bush (bien sûr) mais aussi Ronald Reagan (qui décidait de ses dates de conférence de presse en fonction d’une voyante) ou du Vice-Président Dan Quayle incapable d’écrire le mot "patate" au pluriel.
Je rappellerais que les qualités de leader, celles demandées pour diriger un grand pays comme les États-Unis, ce n’est pas forcément une intelligence hors norme (les conseillers sont là pour cela), mais une capacité à bien s’entourer, à déléguer, à motiver une équipe (un gouvernement) et un peuple, et à prendre rapidement les bonnes décisions. Bref, des qualités de manager.
Obama avait montré certaines de ces qualités (mais il décide lentement, peut-être est-ce son point faible), Bush Jr aussi, alors qu’Al Gore comme MacCain avaient montré leur incapacité de bien s’entourer.
Dans le second article, sera étudiée la métamorphose des sceptiques après l’élection d’Obama.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (28 novembre 2008)
Pour aller plus loin :
Les résultats de l’élection présidentielle du 4 novembre 2008.
Pourquoi Obama ?
Boîte à outils pour mieux comprendre ces élections.
Communion mondiale.
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=47968
http://www.lepost.fr/article/2008/12/03/1345691_obama-au-plus-haut-des-dieux-1.html
http://www.centpapiers.com/obama-au-plus-haut-des-dieux-1/4043/
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