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12 décembre 2008 5 12 /12 /décembre /2008 08:02

C’est fait ! La nouvelle locomotive du Parti socialiste est lancée, et on peine à voir des différences avec la précédente direction de François Hollande, l’humour en moins.


Étrange titre du discours de plus d'une heure trente de la nouvelle première secrétaire du PS Martine Aubry le 6 décembre 2008 : "Donner un nouveau sens". Pourquoi vouloir changer de sens? Aller dans le sens contraire du PS de François Hollande ? Et on aurait pu imaginer plutôt un homonyme comme par exemple : "Donner du sang neuf".

Mais non, aucun sang neuf dans ce parti qui a 103 ans et qui a passé le cap du centenaire plus lourdement que la Parti radical.


On prend les mêmes…

Prenons le nouveau secrétariat national qui s'est réuni pour la première fois ce 9 décembre 2008. C'est en quelques sortes le gouvernement du PS. Ségolène Royal voulait même en faire un "shadow cabinet".

Qui y a-t-il ?

Quelques noms nouveaux certes, dont Bruno Julliard, mais Martine Aubry y a quand même nommé quelques vieux routiers de la politique : Élisabeth Guigou, Jean-Christophe Cambadélis, Claude Bartolone, Marylise Lebranchu (qui aurait pu devenir première secrétaire), Christian Paul, Patrick Bloche, Alain Vidalies, Michel Sapin, André Vallini, Didier Migaud, Alain Bergounioux...


Le "pentumvirat"

Le plus intéressant, ce sont les quatre super-conseillers qui entourent Martine Aubry. On y trouve d'abord François Lamy (49 ans), le député-maire de Palaiseau et bras droit de Martine Aubry, bombardé sans surprise "conseiller politique auprès de la première secrétaire".

Ensuite, un "secrétaire national chargé de la rénovation" avec
Arnaud Montebourg (46 ans) qui, finalement, depuis trois mois, a misé dans la bonne écurie ; il aura fort à faire avec la sclérose qui sort renforcée après le congrès de Reims.

Enfin, deux autres quadragénaires,
Harlem Désir (49 ans), l'ancien jeune prodige médiatique de SOS-Racisme et bras droit de Bertrand Delanoë, "chargé de la coordination" et, plus surprenant, Benoît Hamon (41 ans), dont le score de la motion de 18% lui a permis de s'imposer, comme... "porte-parole".

Pour un partisan de l'aile gauche qui a toujours condamné le "social-centrisme" de ses trois autres concurrents (Royal, Delanoë et Aubry), devenir porte-parole de l'un d'eux est pour le moins étonnant.



Où est donc Vincent Peillon ?

Mais la chose qui frappe, ce n'est pas dans la présence mais dans l'absence du secrétariat national des proches de Ségolène Royal et notamment de Vincent Peillon. Une erreur capitale pour prétendre rassembler un Parti socialiste en miettes depuis Reims. Pourtant, Martine Aubry l'a encore réaffirmé : « Nous devons être fiers d'être socialiste ! Je le dis à cette tribune. Je le redis devant vous, je n'aurai de cesse de travailler à la réunification de la famille socialiste. ».

Une telle contradiction entre les paroles et les actes montre une chose certaine : c'est que Martine Aubry sait manier avec dextérité la langue de bois.


Langue de bois et antipodes

Mais on ne s'en formalisera pas, puisqu'elle avait déjà habitué à cette dichotomie classique du "faites ce que je vous dis, pas ce que je fais" concernant le thème des alliances. Le président du MoDem François Bayrou a d'ailleurs rappelé cette hypocrisie à Arnaud Montebourg dans l'émission d'Arlette Chabot "À vous de juger" ce 11 décembre 2008.

En effet, alors que le MoDem tenait le même jour son propre conseil national dans des conditions médiatiques nettement plus discrètes, le PS a évacué définitivement la question de son éventuelle alliance avec le MoDem : « Nous refusons toute alliance avec le MoDem qui prône aujourd’hui une politique économique et sociale qui se situe aux antipodes de nos orientations. ».

Antipodes ? Mais alors, pourquoi Martine Aubry, maire de Lille, a-t-elle fait alliance au second tour des municipales avec le MoDem ? Et Michel Destot, rocardo-delanoïste récupéré par Martine Aubry en le nommant président du conseil national du PS (poste d’animateur sans grand intérêt sinon honorifique, poste qu’avait obtenu misérablement Ségolène Royal en 1997 pour la consoler d’avoir laissé le perchoir à Laurent Fabius), maire de Grenoble, pourquoi a-t-il fait alliance avec le MoDem dès le premier tour des municipales ? (Philippe de Longevialle, président du MoDem de l’Isère, est maintenant adjoint à Grenoble).

La phrase que j’ai citée et qui évoque les antipodes, elle provient du document final de ce conseil national : le texte d’orientation politique 2008-2011 du PS. Neuf pages bien policées (avec gras, soulignés et mots en bleus) qui énumère ce que ferait Martine Aubry si elle était à la place de Nicolas Sarkozy.


Texte d’orientalisation

Beaucoup de mots creux, d’expressions ressassées, dans ce texte : "donner une nouvelle direction à l’Europe" (en a-t-elle déjà au moins une, l’Europe d’aujourd’hui, de direction ?), "inventer un nouveau modèle de développement économique, social et écologique" (oui, mais lequel ?), "repenser la croissance" (on imaginerait plutôt : repanser la croissance), "assurer l’égalité réelle des chances" (et en quoi cette "égalité réelle" serait-elle différente de l’égalité des chances tout court ?), "refonder la politique agricole commune" (pas besoin de le proposer, cela fait plusieurs années qu’il faut le faire)… mais je l’ai dit juste avant, Martine Aubry est une virtuose de la langue de bois.

Sur la forme du document, c’est aussi curieux de voir que "faire renaître le Parti socialiste" correspond à l’une des seulement quatre priorité du PS… un document donc très égocentré.


Démocratie interne très virtuelle

Et que lit-on dans ce chapitre justement ? Que « le Parti socialiste doit être exemplaire dans ses pratiques démocratiques ». Avec une première application dans la pitoyable adoption de ce propre texte.

Et là, c’est déjà la catastrophe : Michel Destot (qui présidait donc la séance du conseil national) avait promis à Martine Aubry qu’elle pourrait prononcer son discours de clôture à midi et demi afin de passer dans les journaux télévisés de treize heures.

Hélas pour lui, les débats ayant été plus longs que prévu, à midi quinze, aucun amendement n’avait encore été présenté ni voté. Destot décida alors de faire voter au pas de charge chaque amendement, puis par paquet sans explication de ce que chacun recouvrait (notons au passage que le texte initial d’orientation n’était connu des conseillers nationaux que le matin même).

Les royalistes ont alors demandé une suspension de séance. Seulement cinq minutes leur ont été accordées, soit la moitié du temps nécessaire pour aller jusque dans une salle pour se réunir. Du coup, ils étaient absents quand la séance a repris et Michel Destot a fait voter dans la foulée ce texte d’orientation (en l’absence donc des royalistes), permettant à Martine Aubry de faire son discours à temps.

Heureusement, même si la logique est absurde (le discours de clôture doit… clore le conseil national !), un nouveau vote fut effectué après le discours de Martine Aubry : 146 voix pour et 72 abstentions sur plus de trois cents, soit un texte approuvé par une minorité seulement !

Évidemment, les royalistes ont considéré ce conseil national comme un véritable causus belli contre Ségolène Royal : aucun royaliste au secrétariat national, aucune concertation pour la rédaction du texte d’orientation, et débat malmené par les aubryistes.


Retraite des royalistes

Dans la matinée, en effet, Michel Destot avait pressé François Rebsamen, maire de Dijon, de conclure alors qu’il s’inquiétait de la remise en cause de la désignation du candidat socialiste à l’élection présidentielle par les militants (un mode qui avait largement favoriser Ségolène Royal en novembre 2006).

De son côté, David Assouline se préoccupait de l’absence totale d’ouverture vers le MoDem, ce qui pourrait faire perdre à la gauche entre dix et quinze régions aux prochaines élections régionales de 2010.

Delphine Batho, celle qui a repris la circonscription de Ségolène Royal en juin 2007, disait clairement les choses, qu’il n’y a pas de changement : « Je n’ai pas la conviction que le texte proposé soit plus clair ou plus anguleux que certaines synthèses passées. ».

Conclusion ? Le camp de Ségolène Royal est plus que jamais séparatiste. Jean-Louis Bianco l’a déclaré après ce conseil national : les royalistes vont maintenant s’organiser avec "Désirs d’Avenir".

Seraient-ils tentés de créer un Parti socialiste bis ? Sorte de parti royaliste parallèle, avec une leader, Ségolène Royal, un pied dehors et un pied dedans.


Sarkozy, Bayrou et Besancenot applaudissent

On dirait que les socialistes le font exprès : même une fois les décisions prises, ils font tout pour perdre les prochaines échéances électorales, et pas seulement les élection présidentielle et législatives de 2012, mais aussi les européennes de 2009 et les régionales de 2010.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (12 décembre 2008)


Pour aller plus loin :

Les nouvelles instances dirigeantes du PS.
Quelques documents du conseil national du PS du 6 décembre 2008.
Magouilles au PS ?
Cuisine d’appareil au PS.
Chronologie capricieuse de l’élection de Martine Aubry.
Encore plus pour comprendre le PS.





http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=48658

http://www.lepost.fr/article/2008/12/15/1357492_sang-dessus-dessous.html




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