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5 mars 2009 4 05 /03 /mars /2009 19:00

Les attentats du 11 septembre 2001, la guerre en Irak, les ambitions nucléaires de l’Iran : c’est le troisième et dernier volet d’un excellent documentaire sur les relations entre l’Iran et l’Occident à l’occasion du trentième anniversaire de la Révolution islamique. Une occasion de montrer de bien grandes inconséquences des gouvernements américains. Seconde partie.


Suite de la première partie de "Incompréhension américaine".

Une nouvelle proposition des Iraniens (secrète et révélée par John Sawers, mais jamais démentie par l’Iran) visait à mettre fin aux attentats islamistes contre les soldats occidentaux en Irak en échange de l’abandon de toute protestation contre leur programme nucléaire civil. Une proposition inacceptable (accueillie à la Maison Blanche avec la conviction que la seule issue serait militaire) mais qui confirmait, pour ceux qui en doutaient encore, que l’Iran était bien à l’origine des difficultés en Irak (et même pour la formation du gouvernement irakien, les Iraniens faisant pression par chiites interposés).


Du nouveau avec Condoleezza Rice

En février 2005, Colin Powell quitta le Département d’État et c’est Condoleezza Rice qui reprit la direction de la diplomatie américaine. Beaucoup plus intelligente, elle a demandé à un fidèle, Nicholas Burns, de faire l’inventaire des compétences sur l’Iran. Ce dernier raconte : « J’ai fait mon enquête et je lui ai dit qu’il n’y a personne dans ce ministère qui se consacre à ce pays alors que c’est le pays actuellement l’un des plus importants. Elle a été atterrée. ».

Malgré ses bonnes relations avec Condoleezza Rice, Jack Straw dut quitter le Ministère britannique des Affaires Étrangères le 5 mai 2006 à la demande de Tony Blair (les travaillistes venaient de subir une grave défaite aux élections locales ; Jack Straw sera ensuite nommé Ministre de la Justice le 28 juin 2007 par Gordon Brown ; au Foreign Office, il fut remplacé par Margaret Beckett).

À la stupéfaction des diplomates européens, après la réunion du groupe de travail USA-Europe du 9 mai 2006, Condoleezza Rice annonça le 31 mai 2006 l’accord des Américains pour renouer avec les Iraniens et proposa même des contreparties beaucoup plus audacieuses. Pour la première fois depuis trente ans, les États-Unis renonçaient à renverser le régime iranien.

Pendant tout l’été, Javier Solana pour l’Union Européenne et Ali Laridjani pour l’Iran entamèrent des discussions.

Les premières négociations en direct entre Américains et Iraniens devaient se faire concrètement en septembre 2006 à l’occasion de la session de l’ONU à New York. Au dernier moment, juste avant le week-end, les Iraniens demandaient des visas à trois cents Iraniens qui devaient faire partie de la délégation. Rice mobilisa le consulat américain à Berne pour les faire obtenir à temps.

Le lundi 18 septembre 2006, l’avion de ces trois cents diplomates iraniens n’avait pourtant pas décollé de Téhéran. À la place, le lendemain, le Président iranien en personne, le nouveau, conservateur et populiste, élu en 2005, Ahmadinejad, prenait la parole sur le sol américain et fit une déclaration fortement anti-américaine se moquant des États-Unis en Irak et défendant le programme nucléaire civil iranien.

Juste avant, George W. Bush avait tenu au contraire des propos mesurés en disant son admiration et son respect pour le peuple iranien (« Vous méritez d’avoir la chance de décider de votre propre avenir, d’avoir une économie qui récompense votre intelligence et vos talents et une société qui vous permette d’utiliser votre énorme potentiel. ») et en déclarant : « Nous cherchons une solution diplomatique pour qu’un jour, vous puissiez vivre en liberté quand l’Amérique et l’Iran seront amis et œuvreront pour la paix. ».

George W. Bush avait également adressé ce message aux musulmans du monde entier : « Mon pays veut la paix. (…) Nous respectons l’islam. » après avoir dénoncé « les extrémistes qui veulent faire croire que l’Occident est engagé dans une guerre avec l’islam pour justifier leurs actes de terreur. », ce qui changeait de mots comme "croisades" ou "axe du mal" qui semblaient plus dans le registre guerrier.

Ali Laridjani (qui fut candidat à l’élection présidentielle iranienne et considéré comme un modéré), chargé des négociations à propos du nucléaire iranien, fut remplacé par un plus dur, Saïd Jalili, vice-Ministre iranien des Affaires Étrangères, le 20 octobre 2007.

Alors qu’entre 2002 et 2005, sous l’impulsion du modéré Khatami, l’Iran était demandeuse de relations avec les États-Unis, ces derniers les refusaient. À partir du moment où ils ont compris l’importance stratégique de renouer, il était trop tard, les durs avaient pris le pouvoir à Téhéran et tout était à recommencer.

Khatami avait pourtant prévenu : « Plus on attend, et plus les ultras gagnent du terrain. ».


Et pour 2009-2012 ?

Le documentaire finit donc par une note très pessimiste : l’échec d’un début d’accord pacifique entre Américains et Iraniens, tant sur le nucléaire iranien que sur l’embargo américain.

Pourtant, une nouvelle fenêtre d’opportunités s’ouvre à l’horizon : l’élection de Barack Obama et la prochaine élection présidentielle en Iran, le 12 juin 2009.

Quel sera donc le quatrième volet pour plus tard ? La situation va évoluer beaucoup dans les prochains mois.


De nouveaux émissaires occidentaux en Iran

D’abord, l’élection de Barack Obama et l’arrivée de Hillary Clinton vont bouleverser la politique moyen-orientale des États-Unis. La désignation de Dennis Ross comme émissaire en Iran ne semble peut-être pas convenir aux dirigeants iraniens mais a le mérite de tenter de renouer le dialogue.

Un échange de dépêches le 10 février 2009 a montré un nouveau climat de détente entre l’Iran d’Ahmadinejad et les États-Unis d’Obama, à confirmer bien évidemment.

L’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder a, quant à lui, déjà rencontré fin février le Président iranien Ahmadinejad lors d’un séjour de deux jours à Téhéran.

Pour rester dans le jeu, le Président français Nicolas Sarkozy a lui aussi envoyé un émissaire en Iran en la personne de Gérard Araud, directeur des affaires politiques au quai d’Orsay (l’un des postes les plus influents), considéré par le journaliste Bernard Guetta comme le diplomate le plus capable même s’il est contesté par les pro-Palestiniens parce qu’il a été ambassadeur en Israël.


Une élection cruciale en Iran

L’autre élément-clef, c’est que l’Iran va également changer ses dirigeants. On sait que le chef suprême restera Khamenei, mais la vision du Président iranien est cruciale dans les relations entre l’Iran et l’Occident. En 2005, l’élection d’Ahmadinejad a cassé les espoirs de dialogue que venaient enfin d’envisager les Américains.

Le 12 juin 2009, Ahmadinejad va chercher à se faire réélire mais son impopularité grandissante (en raison de la situation sociale et aussi de son opposition théologique avec les mollahs) pourrait faire le jeu de son prédécesseur Khatami, beaucoup plus ouvert, ou de son successeur à la mairie de Téhéran, le conservateur Mohamed Baqer Qalibaf (13,9% en 2005), ou encore du diplomate conservateur modéré Ali Laridjani (5,8% en 2005) ou encore le réformateur Mehdi Karroubi (3e de peu en 2005 avec 17,2% derrière Rafsandjani 21,1% et Ahmadinejad 19,4%), candidats en 2009 selon la BBC.

Étonnant régime d’ailleurs que celui de l’Iran qui fait cohabiter à la fois une démocratie réelle (les résultats du premier tour du 17 juin 2005 l’attestent avec sept candidats qui ont obtenu de 4,4 à 21,0% avec une participation de 62,7% et prise en compte des 4,2% de votes blancs ou nuls) et une théocratie dont la clef de voûte est le Guide de la Révolution islamique, coopté à vie et en haut de l’édifice institutionnel.


Next…

Espérons donc pour conclure qu’il n’y aura plus autant d’occasions ratées que dans ces dix dernières années. Question d’unité de temps, sans doute.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (3 mars 2009)


Pour aller plus loin :

De quoi fouetter un Shah (18 février 2009).

N’oubliez pas le Guide (20 février 2009).

Incompréhension Américaine (1) et (2).

Émission de France 3 "L’Iran et l’Occident" (17-18 février 2009).

Session de septembre 2006 à l’ONU : Bush, Ahmadinejad, Chirac.

Dennis Ross et les Iraniens.

Un émissaire français à Téhéran.

Gérard Araud.

Stanislas de Laboulaye.

Khatami candidat pour juin 2009.

Détente entre Américains et Iraniens ?





http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=52558

http://fr.news.yahoo.com/13/20090305/tot-incomprehensions-americaines-2-le-nu-89f340e.html

http://www.lepost.fr/article/2009/03/20/1464154_incomprehensions-americaines-2-le-nucleaire-iranien.html

http://rakotoarison.lesdemocrates.fr/article-13

http://www.centpapiers.com/incomprehensions-americaines-2-le-nucleaire-iranien/5944/

http://www.kydiz.com/article/2192-Incomprehensions-americaines-2-le-nucleaire-iranien.htm




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commentaires

A
<br /> Pendant ce temps-là, la délégation de l'AIEA, qui s'est déjà rendue dimanche sur le chantier de l'usine de Qom  , à une centaine de kilomètres au sud de Téhéran, devait y retourner de nouveau<br /> lundi. Fin septembre, la révélation de l'existence de cette usine avait enflammé le G20 de Pittsburgh. Les inspecteurs, qui n'ont fait aucun commentaire à la presse depuis leur arrivée en Iran,<br /> doivent vérifier les informations fournies par Téhéran et le caractère civil du site de Qom. Un responsable militaire iranien, Gholamreza Jalali, a indiqué lundi que le site de Qom avait été<br /> construit de façon à être "sûr face à toutes les menaces militaires des ennemis<br /> <br /> <br />
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