(dépêche)
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2009/03/barroso-putain-dix-ans-.html
20/03/2009
Barroso: « putain, dix ans ! »
L'affaire est conclue : José Manuel Durao Barroso décrochera fin juin un second mandat de cinq ans à la tête de la Commission européenne, sauf déculottée sévère bien improbable des partis conservateurs du PPE (parti populaire européen) lors des élections européennes du 7 juin prochain. Non seulement parce que les socialistes ont renoncé à s'opposer à l'ancien premier ministre portugais, mais parce que les leaders conservateurs européens y compris allemand, français et italien lui ont apporté, hier, leur soutien.
Ainsi, Nicolas Sarkozy, qui avait semblé hésiter à le soutenir franchement lors du Conseil européen du 1er mars, est rentré dans le rang. Aujourd'hui, lors de sa traditionnelle conférence de presse de fin de Sommet, le chef de l'État a déclaré qu'il ne serait « pas gêné de le soutenir » : « j'ai toujours eu une appréciation positive de son travail. Je n'ai pas changé d'avis ». Pourtant, à l'Élysée, en privé, on ne cache guère le peu d'enthousiasme que suscite la reconduction de Barroso dont on n'a guère apprécié les pinaillages sur les plans de sauvetage hexagonaux des banques et du secteur automobile alors qu'il a immédiatement donné sa bénédiction aux mesures britanniques...
Cela étant, Sarkozy estime toujours qu'il est impossible de nommer formellement Barroso en juin prochain : « si on prend une décision définitive, ce sera sur la base du traité de Nice ». Pourtant, il est possible que le traité de Lisbonne entre en vigueur en novembre si les Irlandais et le Sénat tchèque le ratifient, à l'automne. Or, remarque le chef de l'État, si on nomme la Commission sur la base du traité de Nice, elle ne pourra compter que 26 commissaires... « Il faudra dire qui n'a pas droit à un commissaire », s'est-il exclamé. « Cela va beaucoup nous aider en Irlande », surtout si les Vingt-sept décident que l'Irlande en sera privée... Pour Sarkozy, la nomination juridique de la Commission ne peut donc intervenir qu'après le référendum irlandais, même si les Vingt-sept se mettent politiquement d'accord sur un nom en juin. D'autant, qu'il y aura d'autres postes à pourvoir si Lisbonne entre en vigueur : président du Conseil européen, ministre des Affaires étrangères, répartition des postes de commissaires, secrétariat général du conseil des ministres. « Ce sera une discussion d'ensemble », a insisté Sarkozy. En clair : il n'est pas question que Barroso soit reconduit définitivement si les autres postes ne sont pas répartis.
Le problème est que le Parlement européen ne l'entend pas de cette oreille : Hans-Gert Pöttering, son président, a annoncé aux vingt-sept chefs d'États et de gouvernement, jeudi soir, qu'il voulait que le Conseil européen des 18 et 19 juin désigne le Président afin qu'il soit confirmé le 15 juillet, lors de la session inaugurale du nouveau Parlement. Quitte à ce que l'ensemble de la nouvelle Commission ne soit nommée qu'après le référendum irlandais. Bref, un beau pataquès juridico-politique s'annonce.
Reste que cette reconduction quasi inéluctable est pour le moins déprimante, les chefs d'État et de gouvernement semblant se moquer comme d'une guigne de l'opinion des citoyens européens. Dès lors, pourquoi voter si cela n'a aucune influence sur la composition de l'exécutif européen ?
Photo: Thierry Monasse
Rédigé le 20/03/2009 à 20:17 | Lien permanent