Elle a eu lieu tôt le matin du 7 novembre 2006.
C’est un étrange destin que celui-là, JJSS pour simplifier à l’époque, les gens (journalistes) étant souvent trop paresseux pour donner le nom en entier (comme PMF, VGE, DSK etc.).
JJSS (je vais le faire aussi !), c’était vaguement un homme politique. Je dis vaguement, car finalement, son très fort potentiel doté de charisme et de pouvoir de conviction n’est jamais resté que virtuel.
Mais qui est JJSS ?
JJSS, c’est avant tout l’aventure de L’Express avec Françoise Giroud. Mais c’est aussi intégrer l’X en pleine guerre, puis rejoindre De Gaulle en se faisant pilote de chasse (à 19 ans)
Dix ans plus tard, sans jamais avoir été ingénieur comme sa formation initiale le supposait, passionné par les États-Unis et le débat politique, il crée le célèbre hebdomadaire qui devient son meilleur attaché commercial jusqu’à ce qu’il le revende en 1977 à Jimmy Goldsmith pour financer ses campagnes électorales.
Wikipédia (1) souligne qu’à 30 ans, JJSS réussit le tour de force de rassembler parmi ses rédacteurs Albert Camus, Jean-Paul Sartre, André Malraux et François Mauriac.
Très introduit dans la famille Kennedy (avant même l’élection de JFK), JJSS a de plus en plus d’influence auprès des personnalités du pouvoir : Pierre Mendès France, Giscard d’Estaing et Mitterrand, mais il se brouille ensuite avec ces trois responsables.
Débordant de mettre en oeuvre ses idées (notamment sur la décolonisation), il s’engouffre dans l’arène électorale. Il se parachute en juin 1970 à Nancy où le député du coin démissionne pour gueuler contre le tracé de l’autoroute A4 (Paris-Strasbourg) qui passe par Reims et Metz et pas par Nancy (j’aurais bien gueulé aussi, mais à l’époque, j’avais pas assez de voix !). Il gagne haut la main face au sortant résistant bien établi et deux mois après, il saute à Bordeaux pour récupérer une autre circonscription, mais il échoue cette fois-ci (vouloir se faire élire dans plein de circonscriptions un peu partout en France ?... eh oui, le général Boulanger (2) aussi le faisait à la fin du XIXe siècle !).
Bref, boulimique des élections et des coups médiatiques, il se consume très vite. Il partage en effet avec le professeur Léon Schwartzenberg le record de brièveté au gouvernement en y siégeant pendant seulement treize jours ! (Il doit démissionner quand il explique qu’il est contre les essais nucléaires).
Bref, il se ruine électoralement et financièrement pendant près d’une décennie (les années 1970) sans beaucoup influencer avec ses idées. Il prend alors du large et se consacre à sa nouvelle passion, l’informatique.
JJSS, une personnalité complexe. Un journaliste créatif et détonant. Un homme politique qui a raté son ascension kennedienne (la famille Servan-Schreiber, son père, son oncle, son frère, sa soeur, ses enfants, a beaucoup compté). Un sociologue, penseur sur les USA et sur l’incidence des sciences sur la société.
La fin de sa vie est hélas très difficile. Atteint de la maladie de Alzheimer, il perd sa mémoire et se cache des médias depuis le début des années 1990, rompant cette attitude par deux furtives apparitions publiques, l’une en hommage au général de Bollardière, son compagnon en Algérie, et l’autre en hommage à Françoise Giroud.
La saga familiale se poursuit avec le grand succès de son fils aîné David qui a déjà vendu 700 000 exemplaires de son bouquin "Guérir le stress et la dépression, sans médicaments ni psychanalyse". Mieux que Jonathan Littell ! (3)
(1) http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Jacques_Servan-Schreiber
(2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Général_Boulanger
(3) http://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Littell
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