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19 avril 2007 4 19 /04 /avril /2007 21:13

Je vais dire, sur ce sujet, forcément, en raison de l'heure, des choses rapides, mais je vous assure que ces choses sont, à mon sens, au centre de la crise que les Français vivent avec l'Europe.

Les Français ont inventé l'idéal Européen. Ils l'ont fait partager autour d'eux. Je suis heureux de représenter, dans la vie politique française, le parti de Robert Schumann. Je suis heureux.

En tout cas, sachant ce que la Gauche est devenue, je suis assuré de représenter, à la fois, le mouvement d'idée de Robert Schumann et celui de Jean Monnet. Je suis certain que, désormais, entre ce chrétien et ce laïque, ces deux démocrates et ces deux humanistes, nous avons réussi à proposer une synthèse qui soit contemporaine.

Votre présence, à elle seule, est, s'il en fallait, une preuve.

L'Europe, mes chers amis, l'idéal Européen que nous avons inventé, cet idéal est aujourd'hui abîmé dans le cœur de beaucoup de Français. Je vais vous dire les choses comme je les pense. Je pense qu'il était juste et légitime, après le marché commun, après l'acte unique Européen, que l'on demande à la Commission européenne d'assurer la meilleure circulation possible des biens et des services au sein de notre Union.

Je comprends parfaitement cela. Je pense que cela se justifiait, mais cela a donné à beaucoup de Français le sentiment que l'Europe s'occupait principalement de concurrence et de finances, alors que nous avons besoin que l'Europe s'occupe de sujets qui sont essentiels pour nos valeurs, pour la défense de notre société et de notre civilisation.

Jusqu'à présent, nous nous sommes beaucoup occupés de concurrence, à raison dans la plupart des cas, bien que je sois parfois un peu plus sceptique concernant certaines décisions que l'on nous a amenées à prendre, notamment, et je vais me faire des amis encore si je continue cette phrase, mais, comme j'en ai déjà un certain nombre, concernant le 12.









 


Je ne suis pas absolument persuadé que cela ait été un grand progrès de la civilisation que de nous faire passer du 12, pour les numéros des renseignements téléphoniques, aux innombrables 118 … que nous appelons en ayant bien du mal à nous remémorer le numéro et sans savoir qui nous avons au bout du fil. À ce sujet, nous n'avons qu'une certitude, c'est que des centaines d'emplois ont disparu du territoire national et sont partis dans des call centers à l'étranger.

Cette petite réserve ayant été avancée, je pense qu'il faut, désormais, que l'Europe s'occupe de l'essentiel. Il faut qu'elle s'occupe de défense et de sécurité. Nous ne pouvons pas porter, seuls, le poids d'une défense nationale et de la sécurité en face des nouveaux risques qui se présentent. Il faut que l'Europe s'occupe d'actions diplomatiques.

Si les diplomaties française et britannique et toutes les autres, mais je pense spécialement aux diplomaties française et britannique, en raison du sujet que je vais évoquer, étaient unies et soudées, comme elles devraient l'être, nous aurions, au Darfour, une influence plus importante que celle que nous avons aujourd'hui.

Si les diplomaties européennes étaient actives, ce génocide n'aurait pas été accepté, comme il l'a été, pendant tant de mois et d'années. Je pense nécessaire que nous bâtissions cette action diplomatique. Si l'Europe était unie, elle pourrait être, au Proche-Orient, le garant ou l'un des garants d'une politique de paix, garant que les États-unis ne peuvent plus être en raison du déclenchement, que nous avons condamné, de la guerre en Irak et des conséquences désastreuses qui s'en sont suivies.

Il s'agit, là, pour moi, d'une occasion de dire que, au moment de cette crise du déclenchement de la guerre en Irak, j'ai été heureux et fier que le Président de la République française, Jacques Chirac, ait eu l'attitude qui a été la sienne à l'époque, qu'il ait défendu, en notre nom et au nom de millions d'hommes et de femmes en Europe et dans le monde, des valeurs qui, sans lui, n'auraient pas été défendues.

J'ai été fier qu'il ait adopté cette attitude et je suis fier que nous l'ayons soutenu sans la moindre hésitation, de manière publique et à la tribune de l'Assemblée Nationale, quand tant, dans son camp, doutaient du choix qui était le sien.

Tant que j'en suis à tout dire, puisqu'une élection présidentielle, étant donné le tour qu'elle a pris, est le moment, en effet, de mettre tous les sujets sur la table, je veux vous dire que je ne suis pas assuré que, si, à ce moment, Nicolas Sarkozy avait été Président de la République, la France aurait eu l'attitude qui a été la sienne. Je suis persuadé qu'elle aurait été du côté de Tony Blair, du côté de José Maria Asnar et du côté de Berlusconi, puisqu'il a été leur ami.

Je suis heureux qu'il y ait eu, dans le peuple français, une immense majorité pour soutenir l'attitude qui a été, alors, celle de Jacques Chirac, exprimée aux Nations Unies par Dominique de Villepin.

Il faut que l'Europe s'occupe d'énergie, car nous subissons un certain nombre de menaces sur l'autonomie énergétique de l'Europe. Je suis, en tout cas, pour que nous bâtissions un plan en matière d'autonomie énergétique de notre continent.

En outre, il faut que l'Europe s'occupe de recherche, car nous avons besoin que notre continent fasse le même effort, avec la même rigueur qui a été conduite par les États-unis, qui a fait que les investissements de ce pays en matière de recherche lui ont donné une capacité, une réactivité, une inventivité sans aucune correspondance, hélas, dans les pays qui sont les nôtres.

Il faut, enfin, que l'Europe s'occupe de deux sujets essentiels, qui commandent la vision qui va être la nôtre, du XXIème siècle, deux sujets qui ne concernent pas uniquement la France ou les pays européens, mais qui concernent l'humanité.

Il faut que nous convainquions la France, tout d'abord, et l'Europe, ensuite, de s'occuper du problème du réchauffement de l'atmosphère, de la crise climatique qui est en train de naître et des menaces sur la biodiversité.

Bien sûr, il existe, sur ce sujet, des dispositions nationales à prendre. Je suis, ainsi, heureux d'avoir été l'un des premiers signataires du pacte qu'a proposé Nicolas Hulot et je respecterai ces engagements, mais je suis également heureux que Corine Lepage nous ait proposé l'idée d'un plan d'adaptation au réchauffement climatique pour l'ensemble de la société française. Je trouve, en effet, qu'elle a été avisée de le faire.

Je pense qu'il existe, à ce sujet, non pas une menace de décroissance, mais des ressources de croissances nouvelles pour la société française, des parts de marché à prendre, notamment en matière industrielle, afin que nous puissions faire face à tous ces grands changements que nous allons rencontrer.

Toutefois, il demeure que, au-delà des décisions nationales, cela ne peut être qu'une démarche internationale. Même si la France réussissait admirablement à réduire de moitié, des deux tiers ou des trois quarts ses émissions de gaz à effets de serre, cela ne changerait pas d'un millième de millième la composition de l'atmosphère et de l'air que nous respirons, car, comme vous le savez, l'air se déplace à la surface de la planète et il ne connaît pas nos frontières !…

C'est donc un engagement international qu'il faut, désormais, construire et il peut être et sera porté, si nous le proposons, par l'Union européenne, tant les opinions de nos pays sont sensibles à ce sujet. C'est une question d'agenda international. C'est une question d'engagements qui sont très compliqués à prendre, car ce sont les pays riches qui vont les porter, eux qui ont été les plus grands pollueurs, et ce sont les pays pauvres qui vont devoir les accomplir et les accompagner, eux qui n'ont pas participé à l'émission de ces gaz à effets de serre.

Il s'agit donc d'une très difficile question internationale. C'est l'Union européenne qui doit la porter. L'Europe doit s'occuper de l'essentiel et pas de l'accessoire.

Enfin, l'Europe doit s'occuper, avec nous, du sujet qui est probablement l'un des plus explosifs et des plus dangereux qui menacent aujourd'hui l'équilibre de la planète. L'Europe doit s'occuper du développement de l'Afrique misérable. L'Europe doit s'occuper de restituer un équilibre.

Voyez-vous, je sais bien qu'il est nécessaire d'avoir une politique de régulation de l'immigration. Même si j'aperçois l'aspect obsessionnel qu'un certain nombre de candidats sont en train de donner à ce sujet, je sais qu'il faut une politique de régulation, mais je sais aussi, de la même manière, qu'il n'existe qu'une politique efficace dans le moyen et le long terme pour maîtriser l'immigration et c'est de faire en sorte que les femmes et les hommes, qui sont originaires de ces pays misérables et abandonnés, puissent trouver, chez eux, le moyen de vivre, de travailler, de s'implanter, d'élever des familles.

C'est donc une politique de co-développement que nous avons l'urgence historique de construire avec l'ensemble du continent africain, dont je suis certain que, un jour, il suivra l'exemple créé par l'Union européenne.

Si l'Union européenne sait être à la hauteur de sa mission, il y aura, un jour, une Union africaine, puis une Union sud-américaine. Un jour, dans le monde, des piliers à égalité de droits et de devoirs feront en sorte que le monde soit, en effet, comme l'on dit, multipolaire, c'est-à-dire respectueux du droit, refusant la prééminence des uns sur les autres, exigeant que nous traitions ensemble des problèmes qui concernent la survie de l'humanité et son développement.

Or, pour que l'Europe mette en place ces politiques nouvelles, il est nécessaire qu'elle sorte de la crise institutionnelle dans laquelle elle est malheureusement enlisée depuis le 29 mai 2005.

Je propose que nous regardions en face les raisons pour lesquelles le peuple français a voté non. Il l'a fait, à mon sens, pour trois raisons. La première et la principale est que le texte qu'on lui soumettait était illisible et incompréhensible pour un citoyen. C'était un texte pour juriste et pas un texte pour citoyen.

Nous aurions dû prendre garde, et ceux qui l'ont écrit auraient dû prendre garde, à sa lisibilité, car, lorsque les Français l'ont reçu et l'ont ouvert, comme des femmes et des hommes de bonne foi et, l'ayant ouvert, ils ont voulu le lire. Ils en ont lu, parfois une page, parfois deux, mais, quoi qu'il en soit, beaucoup d'entre eux, à la troisième page, se sont arrêtés. Ils ont considéré que ce texte n'était pas pour eux.

Or, le peuple français, s'il a le sentiment qu'un texte n'est pas pour lui, considère qu'il y a un piège et il a eu l'impression que, ce piège, c'était que l'on voulait lui imposer un projet de société qu'il n'avait pas choisi. Il a eu l'impression que l'on voulait, pour faire vite, lui imposer un projet de société ultra libéral, alors que, lui, peuple français voulait un projet républicain et solidaire.

Cela était, selon moi, la principale raison et explication du non.

J'ai combattu et milité pour que cette raison ne l'emporte pas. Je suis naturellement fier de l'avoir fait, mais je dis qu'il faut, aujourd'hui, conjurer ce risque, de même qu'il faut conjurer le deuxième risque qui touchait au patrimoine de la civilisation européenne, étant donné la manière dont on avait, sans même tenir compte de l'avis du Parlement et sans même lui demander son avis, décidé d'ouvrir, de but en blanc, sans précautions, les négociations d'adhésion avec la Turquie, après toute une série d'adhésions et d'élargissements qui étaient, sans doute, trop rapides.

Et, donc, je dis qu'il faut conjurer ces dangers, ces menaces et ces risques et il n'y a qu'une manière de le faire : obtenir de nos partenaires que nous écrivions ensemble, à partir des mêmes principes démocratiques, un texte dont le seul sujet sera de dire comment fonctionnent les institutions européennes, quels sont les droits des citoyens en face de ces institutions, comment ils seront informés des décisions et de quelle manière ils pourront influer sur la façon dont ces décisions sont prises.

Court, lisible, compréhensible par tout le monde, sans ambiguïté, un texte que, une fois écrit, je soumettrai au référendum du peuple français, parce que je ne veux pas prendre la même voie que d'autres candidats qui ont décidé qu'après le résultat du référendum, il suffirait, pour sortir de la crise, de court-circuiter le peuple français en faisant voter, à la va vite, en quelques semaines, au parlement un texte sur lequel le peuple souverain n'aurait pas été consulté.

Le seul moyen pour moi de réconcilier les Français avec l'Europe, ce n'est pas de faire l'Europe dans leur dos, c'est de faire l'Europe les yeux dans les yeux, avec le peuple des citoyens français, d'expliquer, de défendre, devant le peuple des citoyens, les raisons profondes, les raisons historiques, les raisons impossibles à éluder qui font que, chacun d'entre nous, comme père de famille, comme mère de famille, comme chargé plus tard de famille, nous avons besoin de l'Europe pour porter notre voix et la faire entendre dans le monde et que nous pesions tous ensemble sur l'avenir de la planète.

Ceci, je suis absolument certain qu'un président de la République, qui aura la confiance des Français et qui s'engagera devant eux, obtiendra de leur part une réponse favorable à l'idéal européen qui n'aurait jamais dû cesser d'être le nôtre.

A ce prix, nous cicatriserons et, si nous ne faisions pas cela, alors, nous creuserions la fracture. Un jour ou l'autre, cela se retournerait gravement contre cet idéal Européen.

Je suis au terme de cette intervention. Il me reste à répondre à une dernière question et trouver une dernière rime. Je veux faire rimer France avec chance. Nous devons saisir la chance du changement. Pourquoi ce changement est-il possible aujourd'hui et ne l'était-il pas hier ? Pourquoi ce changement est-il certain ? Parce que l'élection présidentielle est la seule qui puisse arracher le pouvoir au régime des partis qui voudraient le garder entre leurs mains. C'est la seule qui arrache le pouvoir au régime des partis et des dignitaires.

Voici le calendrier : le 22 avril, dimanche prochain, les Français renversent l'une des deux citadelles, celle qu'ils voudront. Ils prennent l'une des deux bastilles, celle qu'ils voudront et ils nous mettent, en finale de l'élection présidentielle, le 6 mai,... applaudissements... laissez d'abord se dérouler le deuxième tour !... Le 6 mai, ils prennent et ils renversent la deuxième bastille.

Le nouveau président de la République entre en fonction le 15 ou le 16 mai. Le 17 mai, il nomme un gouvernement de changement et de rassemblement. Le 25 mai, il fête son anniversaire.

Et, dans cette séquence du changement, le 10 et le 17 juin, le peuple français donne à ce gouvernement une majorité, comme il l'a fait chaque fois qu'il a jugé qu'il était d'urgence nationale de faire arriver une majorité nouvelle et de renvoyer les sortants qui refusent de se joindre à ce mouvement de rassemblement et de reconstruction.

J'ai une petite histoire à vous raconter, encore ! Cette majorité, à la différence des majorités précédentes, ce ne sera pas la majorité d'un seul parti qui veut tous les pouvoirs entre ses mains, ce sera une majorité qui associera des sensibilités différentes par un contrat de législature pour les faire travailler ensemble.

Alors, bien entendu, à la tête du Parti Socialiste et de l'UMP, on en est encore dans la vieille histoire racornie de la droite contre la gauche. Ils ne se sont pas aperçu que le mur de Berlin était tombé ! Mais, même quand on est aux premières loges, et c'est cela l'histoire que je voulais vous raconter pour finir, on a beaucoup de mal à s'apercevoir que le mur de Berlin est en train de se fissurer et de disparaître.

Mon ami, notre ami que j'aime tant, Bronislav Geremek, m'a souvent raconté une merveilleuse histoire à laquelle je pense toujours quand j'entends les Caciques des deux partis qui nous entourent nous expliquer que, jamais, on ne pourrait faire disparaître cette frontière d'un autre temps entre la droite et la gauche. Cette histoire est celle-ci, elle est intégralement vrai et Bronislav Geremek vous la racontera, lui qui a été le grand inspirateur de Solidarnosc en Pologne. Il vous la raconterait, si vous lui posez la question.

Un jour, Walésa et Bronislav Geremek, qui était son ministre des Affaires étrangères, sont en réunion à Varsovie, avec Elmut Kohl. Ils sont assis autour de la table et, à un moment donné, Bronislav Geremek dit : "M. Kohl, est-ce que vous ne pensez pas qu'un jour on pourrait imaginer que l'Allemagne se réunifie et que le mur de Berlin disparaisse ? On entend des bruits qui disent que, après tout, peut-être quelque chose pourrait changer dans ce qui fait le plus douloureux de la réalité de l'Europe depuis si longtemps".

Et Helmut Kohl lui dit : "Monsieur  Gueremek, vous serez un vieillard, moi, je ne serai plus là et, Walésa ne sera plus là non plus, que le mur de Berlin sera toujours là".

A ce moment-là, on a frappé à la porte. Un monsieur l'air affairé et inquiet, un jeune collaborateur de Kohl, est entré et lui a chuchoté quelque chose à l'oreille. Le mur de Berlin était en train de tomber…

C'est une formidable histoire et, comme toutes les formidables histoires, personne n'aurait osé l'inventer, c'est une histoire vraie.

Eh bien nous, nous savons que le mur de Berlin est tombé. Nous ne voulons pas construire la France du siècle dernier. Nous voulons construire la France du nouveau siècle. Nous, nous avons décidé d'être de notre temps. Nous ne vivons pas de haines recuites. Nous aimons l'avenir. Nous sommes pleins d'énergie et nous avons l'intention, de surcroît, d'être plein de gaieté, parce que c'est avec gaieté qu'il faut marcher vers cette élection présidentielle.

Pierre Mendès-France disait ceci, et c'est une phrase formidable : "Il n'y a pas de politiques sans risques, mais il y a des politiques sans chances".

La novation que nous proposons à la France, ce n'est même pas un risque, c'est sa seule chance et les autres qui refusent cette novation croient qu'ils choisissent une politique sans risques. En réalité, ils choisissent une politique sans chances.

Eh, bien, nous, nous qui allons écrire cette page qui vient de notre histoire nationale, nous allons, en effet, faire rimer France avec croissance, France avec confiance, France avec assurance, France avec chance. Nous allons faire rimer France avec espérance.

Je vous remercie.


Vive la République et Vive la France !


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