(dépêche)
Simone Veil est la sixième femme admise à l'Académie française
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18.03.2010
La femme préférée des Français est devenue «immortelle». Simone Veil, grande dame politique, rescapée des camps de la mort, ardente féministe et européenne convaincue, a fait jeudi son entrée à l'Académie française. Vêtue d'un habit vert Chanel et ceinte de son épée d'académicienne, sur la lame de laquelle est gravé son numéro de déportée, elle occupe désormais le treizième fauteuil de la vénérable institution, laissé vacant par l'ancien Premier ministre Pierre Messmer. «L'esprit de la France libre semble planer sur ce fauteuil», a-t-elle déclaré rendant hommage à celui qui fut aussi le ministre des Armées du général De Gaulle, un «héros de notre temps». Avant Pierre Messmer, Maurice Schumann, un des père de l'Europe, occupait cette treizième place, a souligné la nouvelle académicienne qui fut la première femme présidente du Parlement européen en 1979. Dans son discours de réception, elle a rappelé avec émotion que son père, «disparu dans les pays baltes (...), révérait la langue française», rappelant aussi le sort de sa mère, décédée dans «l'enfer de Bergen-Belsen, quelques jours avant la libération des camps». «Plus encore que je ne le suis, il serait ébloui que sa fille vienne occuper ici le fauteuil de Racine», a assuré l'ancienne ministre de la Santé, déportée avec sa famille à Auschwitz-Birkenau en 1944, à l'âge de 16 ans. Jean d'Ormesson salue une «icône» «Une large majorité voue une sorte de culte à l'icône que vous êtes devenue», a lancé l'écrivain Jean d'Ormesson dans son discours d'accueil. «Vous avez des convictions, mais elles ne sont jamais partisanes. Vous êtes loyale envers vos adversaires comme vous êtes loyale envers vos amis. Vous êtes un modèle d'indépendance, a-t-il ajouté à l'adresse de la nouvelle académicienne. Il y a en vous comme un secret: vous êtes la tradition même et la modernité incarnée (...) Je considère votre parcours et je vous vois comme une de ces figures de proue en avance sur l'Histoire». «Comme l'immense majorité des Français, nous vous aimons Madame, a conclu un Jean d'Ormesson charmeur. Soyez la bienvenue au fauteuil de Racine qui parlait si bien de l'amour.» Sous les yeux de Chirac, VGE et... Sarkozy Trois présidents de la République assistaient à la cérémonie : Jacques Chirac, qui lui a remis mardi son épée, Valéry Giscard d'Estaing, académicien depuis 2003, et Nicolas Sarkozy, finalement présent après avoir annoncé mercredi qu'il ne se rendrait pas sous la Coupole. Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, et le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, avaient tenu à rendre hommage à Simone Veil, qu'entouraient son mari Antoine et plusieurs de ses petits-enfants. Simone Veil, qui fit voter en 1975 la loi légalisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG), rejoint ainsi les quatre femmes portant déjà l'habit vert, sur 40 membres élus par leurs pairs : l'helléniste Jacqueline de Romilly, l'historienne Hélène Carrère d'Encausse et les écrivains Florence Delay et Assia Djebar. Disparue en 1987, Marguerite Yourcenar avait été la première à être élue sous la Coupole en 1980. Quelque 150 militants anti-IVG, selon la police, ont manifesté à proximité de l'Académie pendant la cérémonie.