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21 septembre 2015 1 21 /09 /septembre /2015 06:19

« Les programmes de la scolarité obligatoire repose sur une conception nouvelle. Ils ne sont plus la simple juxtaposition de programmes disciplinaires annuels imposant aux professeurs les contenues, les démarches, les méthodes et les progressions, visant un élève abstrait. Ils s’inscrivent dans un projet global, s’adressant à tous les élèves, plus attentif à la totalité de leur expérience d’apprentissage et faisant davantage confiance à la professionnalité des professeurs. » (Conseil supérieur des programmes).


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Après une première version présentée en avril 2015, le Conseil supérieur des programmes a publié sa seconde (et dernière) version ce vendredi 18 septembre 2015. Une actualité que n’a pas manqué de saluer la Ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem qui en a assuré le service après-vente : la matinale sur Europe 1 le 18 septembre 2015 et une tribune dans le journal "Le Monde" du 18 septembre 2015.

Voici ce qu’elle a dit dans "Le Monde" : elle veut une « maîtrise des fondamentaux, consolidation des apprentissages, pédagogie de l’entraînement quotidien et de la répétition. Nombreuses sont les recherches démontrant l’impact des exercices fréquents pour fixer les fondamentaux, qui consolident les savoirs les plus simples avant de développer les plus complexes. (…) C’est aussi la raison des entraînements quotidiens à l’écriture, à la lecture, au calcul mental, que les nouveaux programmes rendent obligatoires. (…) Car, oui, la pratique répétée de la lecture et de l’écriture, la discipline exigée par des dictées quotidiennes sont indispensables, comme dorénavant le travail sur le langage oral, essentiel pour la compréhension de la lecture et la capacité à présenter de façon claire et ordonnée une pensée. » (18 septembre 2015).

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J’ai eu souvent l’occasion de critiquer ce gouvernement, notamment en matière d’éducation, et plus précisément contre cette réforme stupide du collège qui va ruiner la culture latine, grecque et même historique dans les  prochaines décennies, pour me permettre de saluer les bonnes décisions prises par la Ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem. Je ne doute pas que dans cette mesure, il y a une dose d’habileté politique visant à faire diversion et à enfumer. Mais bon, comme c’est une bonne mesure, il faut avoir l’honnêteté de le dire.

Quelle est-elle ? Celle de rétablir, je dis bien rétablir puisque j’ai eu la chance d’être biberonné avec cela, la dictée, le calcul mental, la lecture et l’écriture en classes de l’école primaire. En fait, cela me paraît toujours étonnant de parler de "rétablir" parce que cela signifie que ces exercices avaient été supprimés. Comment un gamin peut-il réussir sans faire ces gammes ? Je me demande franchement quels ministres ont eu la stupidité de supprimer la dictée, le calcul mental et la lecture des classes de primaires alors que cela fait des décennies qu’on s’aperçoit que les écoliers sont incapables de lire correctement, d’écrire correctement et de calculer correctement lorsqu’ils arrivent en classe de sixième. À moins que ceci n’explique cela.

Alors que la société historiquement est passée de l’oral à l’écrit, notamment par les premières civilisations de l’écriture (Babylone, Égypte, Phénicie, etc.), que les traditions orales furent ensuite gravées sur des supports écrits (comme Homère et la Bible), avec le développement extraordinaire de l’écrit grâce à Gutenberg, l’oral était redevenu la norme au XXe siècle grâce au développement du téléphone, d’abord fixe puis mobile, et à celui de la radio et de la télévision.

Paradoxalement, le développement du smartphone depuis une quinzaine d’années, parallèlement à celui de l’ordinateur individuel et surtout de l’Internet, a remis en valeur l’écrit par l’envoi de SMS, d’emails ou encore par la participation à des sites web intéractifs où chaque lecteur (internaute) a la possibilité d’exprimer son point de vue… par écrit.

Or, il est maintenant clair que la maîtrise de la langue écrite laisse de plus en plus à désirer. Ou, plus exactement, les carences sont de plus en plus visible du fait d’Internet. Au milieu des années 1980 (ce n’est pas nouveau), j’avais demandé au directeur d’une école d’ingénieur pourquoi il avait supprimé dans son concours d’entrée l’épreuve de français. Il m’avait répondu que cette épreuve n’était pas en mesure de discriminer les candidats car ils étaient tous nuls dans cette matière et cette épreuve était donc aussi inutile que coûteuse à l’école.

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Il faut bien le reconnaître. J’ai connu plusieurs ouvriers qui sont de la génération qui a maintenant dans les 75 ans, qui n’ont pas eu l’occasion de faire des études très poussées mais qui savaient parfaitement écrire, qui connaissaient parfaitement l’orthographe et la grammaire, qui connaissaient les départements, le nom des préfectures (il faut se dépêcher avant de les supprimer), le nom des fleuves, de leurs affluents, qui savaient faire du calcul mental, etc. Aujourd’hui, je n’ose pas dénombrer le nombre d’ingénieurs voire de personnes de niveau doctorat incapables d’écrire trois lignes sans aucune faute ou de faire des additions sans calculatrice. Le pire, c’est qu’aujourd’hui, je lis régulièrement des fautes de français assez graves sur des messages publicitaires (bonjour l’image de l’entreprise !), et même sur les titres qui se faufilent sur les chaînes d’information continue (peut-être choisir un peu mieux ses pigistes ?).

Car il y a là un véritable défi. On se dit, avec la technologie, qu’il devient inutile de savoir puisque la machine est capable de compenser. Pourquoi savoir calculer si les calculatrices sont capables de le faire à sa place, souvent plus rapidement ? Pourquoi connaître l’orthographe des mots alors que la plupart des traitements de texte ont un correcteur orthographique qui fait le travail à sa place ?

Oui, mais le problème, si l’on ne sait pas ce que fait la machine (pour la calculatrice, c’est assez sioux d’ailleurs, puisque souvent, elles donnent des résultats de développements limités), on n’est plus autonome intellectuellement. Pire, on est assisté, et rien de pire d’être assisté par une machine, car la machine ne pense pas et ne s’émeut pas (quoi qu’on en dise et malgré les derniers développements de l’intelligence artificielle). Car évidemment, personne n’est à l’abri d’une erreur de frappe, par exemple, et proposer un pot de yaourt pour le prix d’un million de francs (comme cela s’est vu dans des copies au baccalauréat), c’est quand même faire preuve d’un peu trop de mansuétude et d’un peu trop de confiance en la machine.

Même si l’informatique réussit à faire gagner beaucoup de temps et de commodité (notamment pour les vues en trois dimensions), les logiciels de CAO, CFAO, DAO etc. ne remplaceront jamais la connaissance élémentaire du dessin industriel par l’utilisation basique d’une table à dessin et d’un rotring. Tout comme l’apprentissage de l’alphabet se fera toujours avec un crayon et du papier (ou une ardoise) et pas avec un clavier ni une tablette (les régions du cerveau sollicitées ne sont pas les mêmes).

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On peut se permettre d’accélérer seulement quand on sait déjà rouler au pas. Le vélo est un bon moyen d’apprendre le code de la route et on imagine mal un pilote d’avion ne sachant pas conduire une automobile sur la terre ferme.

Bref, le retour au basique, même si ce n’est pas trop sexy, même si c’est rébarbatif (quel musicien a-t-il vraiment réussi sans avoir appris le solfège ? Certes, cela peut exister, mais c’est très rare), est une nécessité aussi utile que l’entraînement sportif pour les athlètes.

Au-delà du modernisme, il y a eu aussi un courant contre un certain élitisme qui rendrait inégalitaire la société coupée entre ceux qui savent l’orthographe et les autres. Mais la discrimination se fait naturellement. Et elle ne sépare pas une société entre riches et pauvres, entre élite et soi-disant "plèbe", mais plutôt entre méritants et paresseux.

Car je suis bien désolé de constater que l’orthographe, c’est juste une question d’effort et de travail. Soit par la lecture de livres, soit par la consultation de dictionnaires (un gros mot pour certains), l’orthographe des mots n’est jamais connue à la naissance. Il faut donc l’acquérir. Comme je le disais plus haut, ce n’est pas forcément les plus hauts diplômés qui ont la meilleure orthographe. Ce sont les plus exigeants avec eux-mêmes. Eux-mêmes et respectueux éventuellement de leurs lecteurs.

Car quoi de pire que de lire un texte pourri de fautes en tout genre ? Son message est illisible. On a beau être indulgent (ne serait-ce que parce qu'on peut faire soi-même des fautes, nul n'est à l'abri d'une faute d'inattention), quand un texte est trop mal écrit, on abandonne rapidement sa lecture et tant pis pour le message. La discrimination est là. Que ce soit une lettre accompagnant un CV ou un texte de pétition, etc. Les règles classiques de l’écriture (orthographe, grammaire, conjugaison, etc.) sont comme le code de la route, c’est le moyen de permettre à un ensemble de personnes, dans une société, de se comprendre le plus précisément possible.

J’ajoute, en ces temps mouvementés intellectuellement, que les diatribes supposées nationalistes qui veulent défendre la France et les Français, en rejetant les autres, les étrangers, l’anglais, etc. et qui sont bourrées de fautes de français, me font un peu sourire. Car le meilleur patriotisme français, ce serait d’abord de savoir correctement écrire le français avant de s’en prendre aux autres. D’autant plus que j’ai l’expérience que c’est souvent les étrangers qui rehaussent le niveau de la langue française car ils l’ont apprise de façon traditionnelle et classique (c’est le cas de nombreux Africains, mais pas seulement).

Alors, oui, je ne peux être que d’accord avec une mesure de bon sens qui rappelle qu’aucun résultat ne peut être obtenu, aussi talentueux soit-on, sans un minimum d’effort. Rétablir la dictée, le calcul mental, la lecture et l’écriture en classe, c’est une bonne idée et il faut surtout la soutenir pour nos générations futures.

Mais que l’on soit bien clair : cela ne retire rien à l’opposition qu’il convient de dresser contre la réforme lamentable du collège qui devrait être appliquée pour la rentrée 2016. Une réforme qui empêchera l’acquisition du latin et du grec pour les élèves les plus capables.

D’ailleurs, le Conseil supérieur des programmes s’est étonné lui-même de la manière dont la ministre a communiqué, considérant que le retour de la dictée, du calcul mental, de la lecture et de l’écriture à l’école n’était pas l’élément essentiel de leurs travaux.

L’élément essentiel, c’est la logique par cycles et par compétences. C’est notamment la fin des objectifs pédagogiques sur une année scolaire rapportés à un cycle de trois années : le cycle 2 (CP, CE1 et CE2), le cycle 3 (CM1, CM2 et 6e) et le cycle 4 (5e, 4e et 3e). Ce partage en cycles casse définitivement le découpage entre école primaire et collège, ce qui reste très incohérent lorsqu’on sait que l’élève ne suivra probablement pas la même équipe pédagogique tout au long du cycle 3.

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Si le langage ésotérique des sciences de l’éducation semble avoir été supprimé (en fait, pas vraiment), il n’en reste pas moins que les enseignants et les parents qui voudraient vraiment consulter ce nouveau document (téléchargeable ici) devront quand même se farcir pas moins de …375 pages ! Autant dire que l’étude approfondie de ce document n’est réservée qu’à une infime proportion de la population concernée.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 septembre 2015)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
À télécharger, les nouveaux programmes scolaires (18 septembre 2015).
Réforme du collège.
La langue française.
Najat Vallaud-Belkacem.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20150921-dictee.html

http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-dictee-le-calcul-mental-la-172088

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2015/09/21/32657541.html


 

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