« Accepter de mourir pour que vivent des innocents, tel est le cœur de l’engagement du soldat. Être prêt à donner sa vie parce que rien n’est plus important que la vie d’un concitoyen, tel est le ressort intime de cette transcendance qui le portait. Là était cette grandeur qui a sidéré la France. » (Emmanuel Macron, le 28 mars 2018 aux Invalides à Paris).
Cela fait un an qu’un terroriste islamiste a tué quatre personnes et blessé quinze autres à Carcassonne et à Trèbes. Parmi les victimes, la France a découvert et honoré le colonel Arnaud Beltrame, qui a succombé dans la nuit du 23 au 24 mars 2018, des suites de ses blessures. Le gendarme avait 44 ans et avait donné sa vie pour sauver celle d’une otage. Il avait réussi à convaincre le terroriste de libérer l’otage et de le prendre à la place.
L’émotion très forte de ces moments fut planétaire. La France mais aussi le monde entier ont honoré la mémoire d’Arnaud Beltrame qui a montré un sens du sacrifice exceptionnel, presque inconcevable dans une société consumériste où l’égoïsme et l’égocentrisme prévalent souvent sur le sens du don et du sacrifice. Il n’était pas un téméraire, et avait cru qu’il aurait été capable de désarmer l’islamiste.
Ayant passé trois heures avec le terroriste, Arnaud Beltrame n’a manqué ni de courage ni de devoir face au danger. Son épouse insista par la suite sur la foi du gendarme : « Il savait fédérer ses hommes, leur insuffler son élan, les amener à donner le meilleur d’eux-mêmes. Il était animé de très hautes valeurs morales, des valeurs de service, de générosité, de don de soi, d’abnégation. Il avait une force de volonté hors du commun, toujours capable de se relever après les épreuves. Pour lui, être gendarme, ça veut dire protéger. Mais on ne peut comprendre son sacrifice si on le sépare de sa foi personnelle. C’est le geste d’un gendarme et le geste d’un chrétien. Pour lui, les deux sont liés, on ne peut pas séparer l’un de l’autre. (…) Les obsèques de mon mari auront lieu en pleine Semaine sainte, après sa mort un vendredi, juste à la veille des Rameaux, ce qui n’est pas anodin à mes yeux. » ("La Vie", propos recueillis le 26 mars 2018 par Jean-Pierre Denis).
L’héroïsme d’Arnaud Beltrame appartient à la République tout entière. Si le Président de la République Emmanuel Macron a présidé personnellement l’hommage aux Invalides le 28 mars 2018, ce fut notamment l’un de ses opposants à la dernière élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, qui lui a rendu le plus grand hommage lors de la séance des questions au gouvernement le mardi 27 mars 2018, dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale, comme évidemment d’autres de ses collègues de tout bord, et il fut ovationné sur tous les bancs.
François de Rugy, le Président de l’Assemblée Nationale : « Vendredi dernier, près de Carcassonne, notre République avait un visage : celui du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame. Il a consenti le sacrifice suprême, lui qui, pour sauver des vies, n’hésita pas à exposer la sienne. ».
Christian Jacob, président du groupe LR à l’Assemblée Nationale : « Les noms de quatre innocents vont s’ajouter à la liste de ceux qui sont tombés par la haine d’individus qui exècrent l’héritage judéo-chrétien de la France et les valeurs de la République. Le sacrifice du lieutenant-colonel Beltrame décuple la colère des Français. Car il est insupportable de penser qu’un officier supérieur de la gendarmerie a été poignardé par un homme, surveillé depuis 2014, fiché S, radicalisé notoire, et que la nation a accueilli en son sein par la naturalisation. ».
Marc Fesneau, président du groupe MoDem à l’Assemblée Nationale : « Les actualités se télescopent et nous laissent stupéfaits. À Trèbes, vendredi dernier, Arnaud, Jean, Hervé et Christian sont morts dans les circonstances que nous connaissons. À Paris, le même jour, Mireille, rescapée du Vél d’Hiv, a été assassinée par antisémitisme. Ces deux actes ont la même origine : l’ignorance, la haine et la cruauté, se rejoignant toutes les trois en la plus infâme barbarie. (…) L’acte d’Arnaud Beltrame nous oblige et nous honore : il répond par l’honneur et la vertu à l’égoïsme et à l’obscurantisme. ».
Jean-Christophe Lagarde, président de l’UDI : « Je vous dis (…) notre admiration sans borne pour le sacrifice du lieutenant-colonel Beltrame. ».
Olivier Faure, président du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale : « Face au crime abject, il y a eu l’abnégation d’un homme, Arnaud Beltrame. Alors, je le dis à tous les enfants de France : entre celui qui sacrifie sa vie pour les autres et celui qui sacrifie celles des autres, il y a la différence entre l’héroïsme et la lâcheté, entre le courage et l’indignité. ».
Jean-Luc Mélenchon, président du groupe FI à l’Assemblée Nationale : « Alors que le pire était en place, le mal a été vaincu, j’ose le dire, parce que la scène a été inversée : le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame a remis le monde humain en ordre ; il a réaffirmé la primauté de la compassion ; il a assumé la primauté d’un altruisme absolu, celui qui prend pour soi la mort possible de l’autre, illustrant ainsi les valeurs de foi et de philosophie auxquelles il était attaché personnellement. En ce sens, le lieutenant-colonel Beltrame est un héros de la condition humaine. Certes, son sacrifice n’efface ni la douleur, ni le sang, ni la mort, mais il nous prescrit un devoir impératif et impérieux : à notre tour de refuser à l’ennemi quelque victime que ce soit, à commencer par celle de la division, de la confusion et de la polémique qui viendraient à nous déchirer. ».
André Chassaigne, président du groupe communiste à l’Assemblée Nationale : « Nous saluons solennellement le dévouement et le courage exemplaires du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame. La force de son choix conscient, si admirable, va bien au-delà d’un simple acte héroïque personnel. Il est la marque d’une culture forte qui est celle de notre gendarmerie nationale. ».
Édouard Philippe, Premier Ministre, leur répondant : « Dans ce temps qui est encore celui du deuil, la mémoire très vive encore de cet attentat et l’image de son auteur abattu par les forces de l’ordre s’effacent derrière celle d’un héros, le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame. Il incarne (…) la République. Il est son image, son corps et il s’inscrit dans une longue histoire de Françaises et de Français civils ou militaires qui se sont tenus droit au moment où le pire survenait. Cette image, ce courage m’impressionnent, nous impressionnent et ils nous renvoient, au fond, à un sentiment non pas paradoxal mais mêlé d’immense fierté et de très grande humilité. ».
Les municipalités françaises ne sont pas restées inertes pour honorer la mémoire d’Arnaud Beltrame puisqu’en un an, une cinquantaine d’entre elles ont baptisé une voie publique avec son nom, ce qui est sans précédent depuis la Libération. L’exemple du colonel Beltrame appartient à toute la nation et aucun parti politique ne peut en revendiquer "l’exclusivité", ce qui exclut tout risque de "récupération politique".
C’est difficile de ne pas mettre en parallèle ce comportement exemplaire du colonel Beltrame dont la postérité, je le souhaite, perdura au-delà de la vie de ses contemporains, ce que permettent justement les noms des rues et avenues, et les comportements de délinquants, voire de criminels, des casseurs de l’avenue des Champs-Élysées, samedi 16 mars 2019.
Le vandalisme des Champs-Élysées n’a rien d’idéologique, il suffit, pour s’en rendre compte, de voir ces casseurs vaguement gilets jaunes piller sans scrupules les boutiques de luxe. Ce sont des voleurs, pas des militants. Ils cassent par jalousie, pas par idéologie. Ils sont aussi des graines d’assassins, car mettre le feu à un immeuble habité par des familles, ce s’appelle tentative d’assassinat.
Le 16 mars 2019, il y a eu donc plus grave que la destruction du Fouquet’s, de kiosques et de boutiques, qui n’ont été que des dommages matériels. Il y a eu la dégradation de la plaque commémorative du policier Xavier Jugelé, assassiné par un terroriste islamiste le 20 avril 2017 aux Champs-Élysées, un acte probablement guidé par l’homophobie de son auteur. Un symbole vandalisé comme fut insultée la mémoire de Simone Veil le 9 février 2019 à Paris, par un acte de vandalisme antisémite. Mais il y a surtout eu la mise en danger d’une mère et de son enfant, au deuxième étage du bâtiment d’une agence bancaire incendiée. Et aussi plus d’une dizaine de personnes blessées par des bâtiments en feu.
Alors, oui, Olivier Faure, d’habitude moins percutant, avait trouvé effectivement l’idée forte, ce mardi 27 mars 2018 à l’Assemblée Nationale, il faut choisir son camp, choisir ses modèles : « entre celui qui sacrifie sa vie pour les autres et celui qui sacrifie celles des autres ». Le colonel Arnaud Beltrame appartient à la République, les casseurs des Champs-Élysées agissent selon des valeurs contraires à celles de la République. N’oublions pas le colonel Beltrame ! Il doit rester vivant dans les mémoires comme le modèle et le héros des générations montantes. C’est cette image-là de la France que je veux pouvoir garder jusque dans les livres d’histoire.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (21 mars 2019)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
N’oublions pas le sacrifice du colonel Arnaud Beltrame !
Strasbourg : la France, du jaune au noir.
La France d’Arnaud Beltrame.
Discours du Président Emmanuel Macron aux Invalides le 28 mars 2018 (texte intégral).
La gendarmerie nationale.
Arnaud Beltrame, la foi et la République.
Que faire des djihadistes français en Syrie ?
L’attentat du Super U de Trèbes le 23 mars 2018.
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190323-arnaud-beltrame.html
https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/n-oublions-pas-le-sacrifice-du-213684
http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/03/18/37188715.html
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