« En voilà un qui ne trompe pas son monde ! Ce Président massif, on discerne du premier coup d’œil ce qu’il incarne : il y a du lingot dans cet homme-là. » (François Mauriac le 14 novembre 1954). Seconde partie partie.
Après trente-quatre années de carrière politique, tant locale que nationale, Joseph Laniel est arrivé au sommet de sa puissance lors de son investiture, le 26 juin 1953, comme Président du Conseil.
Il dirigea l’un des gouvernements les plus longs de la Quatrième République (après Guy Mollet), du 28 juin 1953 au 12 juin 1954. Sa composition fut approuvée par les députés le 30 juin 1953. Il y avait trois Vice-Présidents du Conseil, son mentor Paul Reynaud (CNIP), Henri Queuille (radical) et Pierre-Henri Teitgen (MRP), et on pouvait retrouver (certains étaient simplement reconduits du ou des gouvernement précédents) notamment : François Mitterrand (UDSR) au Conseil de l’Europe, Georges Bidault (MRP) aux Affaires étrangères, secondé par Maurice Schumann (MRP), René Pleven (UDSR) à la Défense nationale et Forces armées, aidé notamment de Pierre de Chevigné (MRP) à la Guerre, Edgar Faure (radical) aux Finances et Affaires économiques, André Marie (radical) à l’Éducation nationale, Louis Jacquinot (CNIP) à la France d’Outre-mer et Paul Coste-Floret (MRP) à la Santé publique et Population. Quatre députés venus du RPF ont fait leur entrée, ce qui était nouveau.
Formellement, il y a eu deux gouvernements, car l’investiture du nouveau Président de la République imposait la démission du gouvernement le 16 janvier 1954, qui fut immédiatement et intégralement reconduit, pratiquement sans aucun changement (à noter l’apparition furtive du député des concierges parisiens, Édouard Frédéric-Dupont, comme Ministre des Relations avec les pays associés du 3 au 9 juin 1954, il avait là l’étiquette CNIP, il avait été élu sous l’étiquette RPF, et il avait voté les plein pouvoirs à Pétain en 1940).
Toute l’attention de Joseph Laniel pendant le temps de son gouvernement fut portée sur les problèmes économiques et financiers. La situation économique était mauvaise, elle se dégradait : la croissance s’essoufflait, le chômage redémarrait. Sur le plan extérieur, il s’était engagé à préserver la continuité de la politique de la France (menée par Georges Bidault). Il y a eu deux éléments perturbateurs pour son gouvernement : la guerre d’Indochine et le projet de la Communauté européenne de défense (CED) qui divisait profondément tant le peuple français que la classe politique.
L’été 1953 fut particulièrement dense dans la vie politique et sociale en France. En effet, profitant des vacances estivales, Joseph Laniel, droit dans ses bottes, a voulu adopter quelques réformes sociales à l’arraché. Le 8 juillet 1953, il a obtenu des députés, par 329 voix contre 277, la possibilité de légiférer par décrets-lois (on dirait "ordonnances" maintenant) pendant trois mois pour réformer (déjà !) l’âge de départ à la retraite des fonctionnaires et les conditions d’avancement, également pour réformer la Banque de France. L’idée annoncée était de faire la rigueur budgétaire pour relancer l’économie. Pour la gauche, c’était le détricotage annoncé du programme du CNR.
Alors que Joseph Laniel pensait pouvoir légiférer en toute quiétude durant l’été, profitant notamment de la division structurelle des forces syndicales (scission de la CGT avec FO), ce fut tout le contraire qui arriva, et cela venant de la base. Avant même que les textes fussent rédigés et présentés, une grande grève commença dans les services publics, à partir du 4 août 1953 (les premiers furent les postiers bordelais). La grève était motivée notamment par des rumeurs sur une harmonisation par le bas des régimes spéciaux de retraites, des licenciements d’auxiliaires, un blocage des salaires, une prolongation de deux ans de l’âge de la retraite, etc. Toutes ces mesures devaient être présentées au Conseil supérieur de la fonction publique, ce qui était prévu d’abord le 4 août puis le 7 août 1953 (ce qui expliquait la grève à partir du 4). Les syndicats ont boycotté la réunion de ce conseil supérieur. Le 9 août 1953, le conseil des ministres a adopté la dernière version des réformes de la fonction publique, faisant quelques concessions aux syndicats mais c’était trop tard, le mouvement était lancé.
Cette grève illimitée a été très suivie, avec une unité syndicale à la base : éboueurs, postiers PTT, cheminots SNCF, électriciens EDF, gaziers GDF, RATP, Air France, personnels de santé, etc. ont fait grève (seuls les enseignants étaient absents du mouvement pour cause de vacances scolaires). 4 millions de grévistes le 13 août 1953 ! On interdisait même aux ministres de téléphoner, les agents coupaient leurs communications privées !
La réaction du gouvernement fut également très forte, refusant de céder à la pression des grévistes (Joseph Laniel l’a martelé plusieurs fois le 12 août 1953 à la radio nationale) : perquisitions, arrestations, inculpations (notamment d’André Le Léap, secrétaire général de la CGT, l’autre secrétaire général Benoît Frachon étant passé dans la clandestinité !), réquisition de l’armée et de détenus, etc.
Dans "Le Monde diplomatique" d’août 2017, l’historien Michel Pigenet a expliqué : « Acteur et observateur lucide à son poste de Ministre des Finances, Edgar Faure décrit un climat de "défoulement" et de "bonne rigolade, presque comme un canular". Le sentiment d’invincibilité métamorphose la colère initiale en enthousiasme bon enfant. Août 1953 diffère de novembre-décembre 1947, où les "grèves rouges" s’étaient soldées par la mort de quatre ouvriers et plus de 1 300 arrestations. ».
Le 21 août 1953, finalement, le gouvernement réussit à trouver un accord avec les syndicats FO et CFTC, aucune réforme n’aura été vraiment entérinée, et les retours au travail se sont fait très lentement (les grévistes CGT se sentant trahis). Les personnes arrêtées furent libérées si bien que même la CGT appela à la reprise du travail le 25 août 1953.
Ce qui reste étonnant, c’est que cette grève d’août 1953, qui fut générale et illimitée, n’a pas marqué ce qu’on pourrait appeler la "mémoire collective" ou la "mémoire nationale". Pourtant, elle était mémorable, et surtout, elle n’est pas sans rappeler, aujourd’hui, la crise des gilets jaunes, selon ce qu’a exprimé Michel Pigenet pour août 1953 : « Confronté à l’État patron, le mouvement acquiert une signification politique, mais n’a ni les moyens ni l’ambition de s’ériger en solution de rechange. S’y engager le perdrait. » ("Le Monde diplomatique", août 2017).
Cette crise sociale a cependant fait date à court terme dans l’esprit des parlementaires socialistes, et l’idée d’une résurgence de la Troisième force (SFIO-MRP-radicaux) sous l’égide de Pierre Mendès France allait refaire son chemin. Au congrès du parti radical le 23 septembre 1953, Pierre Mendès France lança : « Nous sommes en 1788 ! » et analysa : « Les grèves récentes n’étaient pas des grèves politiques ni exactement des grèves professionnelles. Certains grévistes étaient incapables de définir avec précision leurs revendications. C’étaient les grèves de la tristesse, du désespoir, du découragement. ». Cela fait en effet penser aux gilets jaunes.
Mais aussi à long terme : elle a tétanisé tous les gouvernements pendant un demi-siècle en les dissuadant de faire des réformes (comme la fin des régimes spéciaux des retraites), nous sommes en pleine actualité ! et aussi dans la structuration de la vie politique. En effet, dès le 22 juillet 1953, un mouvement allait s’opposer aux grévistes qui mettaient en danger l’économie française, notamment les petits entrepreneurs et les commerçants, l’UDCA (Union de défense des commerçants et artisans). Ce mouvement fut celui de Pierre Poujade qui entra massivement à l’Assemblée Nationales aux élections législatives suivantes du 2 janvier 1956 avec 52 élus (dont Jean-Marie Le Pen) et 12,9% des voix (2,7 millions d’électeurs !).
Dans la politique gouvernementale, la crise a aussi eu un effet sur Edgar Faure, aux Finances, qui prôna une volonté de reprise de l’économie française avec une expression qui lui était très particulière : "l’expansion dans la stabilité" (en février 1954). Les salaires des fonctionnaires allaient d’ailleurs augmenter de 14% sur les deux années qui suivaient.
Parmi les mesures économiques et sociales du gouvernement Laniel, il faut citer l’instauration de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) le 10 avril 1954 et l’adoption de la loi n°54-439 du 15 avril 1954 sur le traitement des alcooliques dangereux pour autrui. Toujours dans le domaine social, il faut rappeler que l’abbé Pierre (qui fut député MRP de Nancy de 1945 à 1951) a fait son fameux appel contre la misère le 1er février 1954.
Le 20 août 1953, Joseph Laniel a eu aussi à réagir sur la décision sans concertation du résident général au Maroc de déposer le sultan Mohammed Ben Youssef. Joseph Laniel a finalement entériné à son compte le fait accompli, entraînant des protestations polies d’Edgar Faure et la démission de François Mitterrand le 4 septembre 1953. Plus tard, après avoir quitté le pouvoir, Joseph Laniel s’expliqua sur ce dossier le 8 octobre 1955 devant les députés, ce fut d’ailleurs sa seule intervention publique dans l’hémicycle après sa démission jusqu’à la fin de la législature.
Dans son "Bloc-notes" du 14 novembre 1954, François Mauriac a écrit, sans complaisance : « Il faut rendre justice à monsieur Joseph Laniel : en voilà un qui ne trompe pas son monde ! Ce Président massif, on discerne du premier coup d’œil ce qu’il incarne : il y a du lingot dans cet homme-là. Sans doute ignore-t-il "le grand secret de ceux qui entrent dans les emplois" que nous livre le cardinal de Retz, et qui est "de saisir d’abord l’imagination des hommes". On ne saurait moins parler à l’imagination que monsieur Joseph Laniel. Ce Président-là nous ferait découvrir de la fantaisie chez monsieur Doumergue, et chez monsieur Lebrun, de la verve. » Il est cependant revenu le 29 janvier 1966 sur cette réflexion en regrettant d’avoir employé le mot "lingot".
La grande affaire politique du moment était la Communauté européenne de défense (CED), dont le traité fut signé le 27 mai 1952, mais dont les débats allaient se terminer bien plus tard, le 30 août 1954 avec le rejet par 319 députés français contre 264. Cependant, le clivage sur la CED (qui, comme les autres traités européens par la suite, en 1992 ou en 2005) se faisait à l’intérieur de la plupart des partis (sauf par exemple le MRP qui était proeuropéen de manière homogène) allait se traduire lors de la très difficile élection présidentielle de décembre 1953.
Le mandat de Vincent Auriol s’achevait effectivement et il ne se représentait pas. Le Président de la République était élu par l’ensemble des parlementaires (députés et "conseillers de la République", équivalents de sénateurs). Cette élection présidentielle s’est déroulée dans la plus grande confusion, puisqu’il a fallu treize tours avant de connaître l’élu, pire qu’un pape ! En effet, le Président devait être élu à la majorité absolue, quel que soit le tour, pas seulement à la majorité relative après le premier ou deuxième tour.
Elle a eu lieu du 17 au 23 décembre 1953 et a donné une très mauvaise image de la classe politique et de la Quatrième République. Joseph Laniel s’est présenté à cette élection, dès le premier tour, et fut considéré comme le favori. Il se présenta aux dix premiers tours et il aurait dû, en toute logique arithmétique, être élu. Mais son soutien à la CED, ses manières assez brutales de gouverner ("à la tête de bœuf"), et son "origine industrielle" qui reste toujours effrayante dans la classe politique française (on le voit pour Emmanuel Macron et sa furtive incursion dans une banque d’affaires) lui ont retiré quelques soutiens qui auraient pu être déterminants dans l’élection. Sans compter l’enlisement politique et militaire en Indochine.
Par ailleurs, le Président du Congrès, André Le Troquer (SFIO) a tout fait pour éviter son élection (selon l’historien Jean-Pierre Rioux), jusqu’à retirer, dans la comptabilisation des votes favorables, les bulletins où n’était indiqué que son patronyme "Laniel" sans son prénom Joseph, pouvant ainsi laisser un doute sur la destination du bulletin car il y avait aussi un René Laniel, son frère, qui siégeait au Sénat (il n’était pas nécessaire d’être candidat pour recueillir des voix).
Même si les institutions n’étaient pas comparables, cette élection a montré à quel point il est difficile et, pour l’instant, impossible, à un chef du gouvernement d’être élu Président de la République (à l’exception de De Gaulle le 21 décembre 1958) : en effet, sous la Cinquième République et après la réforme de 1962 du suffrage universel direct pour élire le Président de la République, aucun candidat Premier Ministre en exercice n’a pu se faire élire : ni Jacques Chirac en 1988, ni Édouard Balladur en 1995, ni Lionel Jospin en 2002. Georges Pompidou avait été obligé de démissionner l’année précédant son élection (pour être "en réserve de la République") et Jacques Chirac avait refusé de diriger un nouveau gouvernement de cohabitation en 1993 avant l’élection présidentielle de 1995. Quant aux autres Présidents de la Cinquième République, ils n’ont jamais occupé Matignon.
Le premier tour du 17 décembre 1953 laissait entendre un match entre le socialiste Marcel-Edmond Naegelen, ancien ministre, qui bénéficia aux autres tours du report des voix communistes, et le chef du gouvernement Joseph Laniel. Naegelen a eu 160 voix et Laniel 155 voix, ce qui représentait seulement un sixième des voix et pas la majorité absolue. La raison, c’était la présence d’autres candidats, surtout du centre droit : Georges Bidault représentait le MRP avec 131 voix, Yvon Delbos les radicaux avec 129 voix, même le CNIP était divisé avec un second candidat Jacques Fourcade qui ramassait 62 voix, et un radical indépendant, Jean Médecin (père de Jacques Médecin) a récolté aussi 54 voix. Quant aux deux ailes exclues du pouvoir, les communistes avec Marcel Cachin (113 voix) et les gaullistes avec Paul-Jacques Kalb (114 voix), ils faisaient jeu égal. On voit qu’il y avait une grande dispersion des voix.
Dès le deuxième tour, la gauche a réussi à s’unir, les communistes se sont désistés, et Naegelen a rassemblé 299 voix, frôlant le tiers de voix. Laniel s’est renforcé à 276 voix (30%) mais le maintien de Bidault (143 voix) et Delbos (180 voix) l’ont empêché d’être élu. Après l’abandon de Georges Bidault, du troisième au dixième tours, Joseph Laniel est parvenu à être en tête du scrutin, mais jamais assez pour atteindre la majorité absolue, tandis que Marcel-Edmond Naegelen a consolidé sa position de challenger en deuxième place, oscillant entre 300 et 400 voix.
Au huitième tour, le 20 décembre 1953, Joseph Laniel n’était pas loin de l’élection avec 430 voix (47,3%), il lui manquait 24 voix, et Antoine Pinay et Louis Jacquinot, du même parti que lui, CNIP, ont eu respectivement 25 et 14 voix. Il faut comprendre que ces deux candidats n’étaient pas forcément candidats voulus par eux, c’étaient des parlementaires qui ont pu voter spontanément pour eux.
L’élection de Laniel était donc possible, mais au neuvième tour, un autre candidat CNIP a rassemblé 103 voix, lui faisant perdre mécaniquement une quinzaine de voix. À partir du huitième tour inclus, face au socialiste Naegelen, il n’y avait plus que des candidats CNIP, mais plusieurs, pas un seul. Le centre droit estimait en effet que l’Élysée devait revenir à ce parti, mais visiblement, au sein de la majorité de centre droit, certains refusaient l’élection de Joseph Laniel, trop atlantiste, trop proeuropéen, trop cassant dans son caractère.
Joseph Laniel l’a compris à la fin du dixième tour. Il abandonna la partie, laissant la porte ouverte à un autre candidat CNIP. Louis Jacquinot et René Coty se sont disputé cette candidature dans les trois derniers tours qui ont eu lieu le 23 décembre 1953. Au onzième tour, Louis Jacquinot, beaucoup plus connu des parlementaires que Coty et soutenu par Laniel, a eu une grande avance (338 voix) sur René Coty (71 voix).
Mais ce fut la candidature de René Coty qui s’imposa. Pourquoi ? Parce qu’il était vice-président du Sénat (on n’a pas voulu du Président du Sénat, qui était d’habitude élu sous la Troisième République, probablement parce que c’était Gaston Monnerville). J’écris Sénat mais il faut comprendre Conseil de la République. Et René Coty avait dû s’absenter lors d’un vote au Sénat à propos de la CED, si bien qu’il n’avait pas indiqué de préférences et n’a donc pas suscité de rejet dans ce clivage. René Coty fut élu au treizième tour avec 477 voix (54,8%). Son élection fut cruciale, puisque, quatre ans plus tard, il appela De Gaule à revenir au pouvoir. Qu’en aurait-il été si Joseph Laniel ou Louis Jacquinot avait été élu Président de la République ? Uchronie inutile mais passionnante.
L’année 1954 fut dominée par la guerre en Indochine. Joseph Laniel continua à solliciter l’aide américaine pour construire une armée vietnamienne face à l’armée Vietminh tout en poursuivant les tentatives de dialogues. Ainsi, il fut décidé de faire du camp de Dien-Bien-Phu un piège pour l’ennemi, mais ce fut l’inverse qui arriva, un immense piège pour les Français. Le camp fut encerclé le 2 février 1954. Joseph Laniel et René Pleven, Ministre de la Défense, furent conspués à l’Arc-de-Triomphe le 4 avril 1954 par d’anciens combattants d’Indochine. La Conférence de Genève s’est ouverte le 26 avril 1954 avec ce climat très hostile, et Dien-Bien-Phu tomba le 7 mai 1954.
Pendant trois jours, le gouvernement a cherché à justifier sa politique tout en mettant en garde contre une crise gouvernementale au moment où la France devait négocier à Genève. Le 12 juin 1954, les députés ont rejeté la confiance au gouvernement par 306 voix contre 296, insuffisamment constitutionnellement, mais politiquement, le sort était jeté. Joseph Laniel remit à René Coty la démission de son gouvernement le jour même.
Ce fut alors l’heure de Pierre Mendès France, qui fut investi le 15 juin 1954 et qui mit fin à la guerre d’Indochine le 20 juillet 1954 avec l’Accord de paix de Genève. Joseph Laniel n’a pas pris part au vote pour l’investiture de son successeur ni pour la ratification de l’Accord de Genève, mais il vota en faveur de la CED le 30 août 1954, une position proeuropéenne qui lui avait probablement coûté l’Élysée.
Aux élections législatives du 2 janvier 1956, il fut réélu de justesse, sa liste, avec seulement 7,8% des voix, est arrivée en cinquième position dans le Calvados, bien après celles du PCF, de la SFIO, du MRP et des gaullistes. Pendant cette législature (entre 1956 et 1958), il n’est intervenu que deux fois, le 2 mai 1956 pour prôner la rigueur budgétaire, exprimer son soutien à Robert Lacoste et Max Lejeune et sa foi en l’Algérie française, et le 5 mars 1957 pour interpeller le gouvernement sur sa politique agricole. Après avoir voté les pouvoirs spéciaux au gouvernement de Guy Mollet, la loi-cadre de Gaston Defferre sur l’Outremer et la ratification du Traité de Rome, il apporta son soutien au retour au pouvoir du Général De Gaulle en votant l’investiture de son gouvernement le 1er juin 1958 ainsi que les pouvoirs spéciaux et la révision constitutionnelle le 2 juin 1958.
Balayé par la Cinquième République, Joseph Laniel s’est retiré de la vie politique à la fin de l’année 1958 (il avait 69 ans) et est mort à Paris le 8 avril 1975 (à l’âge de 85 ans), après avoir publié "Le Drame indochinois" en 1957 (éd. Plon), "Jours de gloire et jours cruels", ses mémoires, en 1971 (éd. Presse de la Cité) et "Réflexions après l’action" en 1973 (éd. Plon).
Soucieux des équilibres budgétaires, promoteur d’une croissance économique et de la puissance industrielle qui ne pouvait se développer que dans le cadre de la construction européenne, Joseph Laniel n’a probablement pas laissé une grande trace dans la mémoire historique en raison de son caractère bourru, bougon, peu tourné vers la communication et l’explication, dans le mode des patrons paternalistes tout-puissants du XIXe siècle (management directif). Pourtant, peut-être même plus qu’Antoine Pinay et Edgar Faure, il symbolisait sans doute le mieux la volonté de reconstruction du pays (il était très attentionné sur l’indemnisation des victimes de guerre) que l’on a appelée les "Trente Glorieuses" dont certains pourraient avoir la nostalgie dans cette époque de crises durables et multiples.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (06 octobre 2019)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Dictionnaire des parlementaires français (La Documentation française).
Joseph Laniel.
Georges Bidault.
Débarquement en Normandie.
Libération de Paris.
Général De Gaulle.
Général Leclerc.
Jean Moulin.
Daniel Cordier.
Le programme du Conseil National de la Résistance (CNR).
Jean Monnet.
Joseph Kessel.
Maurice Druon.
André Malraux.
Maurice Schumann.
Jacques Chaban-Delmas.
Daniel Mayer.
Edmond Michelet.
Alain Savary.
Léon Blum.
Pierre Mendès France.
Édouard Herriot.
Vincent Auriol.
René Coty.
Maurice Faure.
Gaston Defferre.
Edgar Faure.
René Cassin.
Édouard Bonnefous.
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20191012-joseph-laniel-2.html
http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/10/12/37706807.html