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10 décembre 2019 2 10 /12 /décembre /2019 03:38

« Face au vieillissement, nous devons rebâtir un système de retraite juste par points. C’est l’engagement que j’ai pris pendant la campagne présidentielle, c’est ce à quoi travaille (…) Jean-Paul Delevoye depuis le début du quinquennat. Cette refondation profonde (…), elle se fera sur plusieurs années, mais c’est une transformation radicale qui doit remettre de la confiance, de la justice, de l’efficacité dans notre système de retraite. » (Emmanuel Macron, conférence de presse du 25 avril 2019).


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Comme il est loin, le temps où la réforme des retraites était placée dans un (plus ou moins) lointain horizon ! La formulation du Président Emmanuel Macron, lors de son unique conférence de presse le 25 avril 2019 (texte intégral ici), visant à conclure définitivement la période du grand débat, fut en elle-même un oxymore. Comment pouvait-il croire remettre de la confiance dans un projet de "transformation radicale" (qui concerne donc tout le monde) et déjà rendre brumeux la motivation première d’une telle réforme.

Car comme présentée à cette conférence de presse (il y a seulement six mois et demi), cette réforme était nécessaire pour équilibrer les comptes publics, puisqu’il a abordé ce sujet en parlant du vieillissement. Un peu plus loin, d’ailleurs, il a confirmé la motivation première de la réforme : son équilibre budgétaire. À partir du moment où la population vieillit, où il y a plus de retraités et moins d’actifs, le nombre d’actifs par retraité s’effondre et il faut bien travailler plus. L’idée n’est pas choquante et finalement, on est encore loin de la situation d’avant 1982, avec un âge légal de 65 ans, à une époque où l’espérance de vie avait environ dix années de moins.

Pourtant, c’est tout le contraire qui est présenté aujourd’hui : la réforme de la retraite par points n’a aucun rapport avec une quelconque opération de réajustement budgétaire. Certes …mais dès lors qu’il est convenu que le système actuel sera déficitaire à brève échéance, ne serait-il pas plus judicieux de se préoccuper de le rééquilibrer avant d’imaginer toute révolution systémique qui mettrait la France dans une paralysie économique de plusieurs semaines voire plusieurs mois ? Dans le rapport Delevoye (qu’on peut télécharger et lire ici), il est pourtant indiqué que pour "démarrer" l’application du nouveau système, il faudrait qu’il soit équilibré au temps zéro.

Rien que ce seul sujet rend déjà flou toute le projet gouvernemental et opaques les intentions réelles ou supposées, arrière-pensées honteuses ou assumées. Puisque la réforme des retraites est considérée comme l’une des promesses électorales symptomatiques d’Emmanuel Macron, revenons à l’origine.

Dans son projet présidentiel publié le 2 mars 2017, il a été indiqué effectivement : « Nous mettrons fin aux injustices de notre système de retraites. » et on oublie peut-être de rappeler la deuxième promesse qui est collée à la première : « Nous ne toucherons pas à l’âge de départ à la retraite, ni au niveau des pensions. ».

Promettre de ne pas toucher à l’âge de départ à la retraite était particulièrement casse-cou, c’est comme promettre de baisser les impôts sans savoir qu’en cours de mandat, une crise financière, une catastrophe écologique ou d’autres événements imprévus pourraient alourdir les budgets. L’astuce, la créativité des théoriciens est sans limites, c’est d’introduire un "âge pivot" qui permet de ne pas toucher à l’âge de départ tout en touchant à l’âge de départ effectif.

Mais cette seconde promesse était double : pas de modification de l’âge de départ à la retraite, mais non plus, on ne touche pas au niveau des pensions. Or, toutes les réflexions actuelles sur la réforme des retraites laisse entendre qu’une très large majorité de citoyens va y perdre (c’est le cas des Suédois qui ont mis en œuvre la retraite par points en 2001). Ou alors, la promesse voulait dire : on ne touche pas au niveau des pensions actuelles, celles de ceux qui sont actuellement à la retraite (ce qui, d’ailleurs, est inexact en raison de leur désindexation et la hausse de la CSG, mais là, on pourrait interpréter : on ne touche pas au niveau des pensions …brut).

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L’imprudence des promesses électorales, surtout lorsqu’elles sont démagogiques, peut faire des dégâts. Rappelons aussi la promesse de réduire voire de supprimer la taxe d’habitation : comment un contribuable peut-il considérer que ce serait positif s’il sait que les collectivités territoriales devront bien, d’une manière ou d’une autre, retrouver une marge de manœuvre fiscale (par exemple, en considérant les propriétaires de biens immobiliers comme les nouvelles vaches à lait, ou moutons à tondre ?).

Revenons plutôt à l’actualité. Ce lundi 9 décembre 2019, la région parisienne a connu à 8 heures 50 un nouveau record de bouchons : 630 kilomètres ! C’était prévisible. Le jeudi 5 voire le vendredi 6 décembre 2019, beaucoup, en prévisions des grèves, s’étaient préparés, avaient pris des congés, ou essayé de faire du télétravail. Mais il arrive bien un jour où il faut quand même se rendre à son lieu de travail.

La grève du 5 décembre 2019 a été beaucoup plus suivie qu’en 1995, et le nombre de manifestants a été nettement supérieur à celui des premières manifestations en 1995. De quoi réjouir en particulier Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, surplombant de sa moustache reconnaissable les autres centrales, en particulier la CFDT, pourtant premier syndicat de France, déconsidéré depuis toujours par Emmanuel Macron (déjà à l’époque où ce dernier était le Secrétaire Général adjoint de l’Élysée auprès de François Hollande) et pourtant toujours prêt à négocier pour le principe du système à points.

Si Jean-Paul Delevoye est une personne à la fois sincère, scrupuleuse dans la concertation et honnête (son oubli dans sa déclaration d’intérêts l’a fait immédiatement démissionner, le 9 décembre 2019, d’un conseil d’administration d’une organisation en rapport avec des assureurs et donc, ayant un vague lien potentiel avec les retraites), le projet de réforme des retraites pêche par son côté brouillon, son illisibilité, les hésitations, les injonctions contradictoires provenant même du gouvernement ainsi que par un véritable amateurisme.

Une illustration parmi d’autres : un des conseillers d’un cabinet ministériel (il me semble) a confié, à un journaliste de la chaîne LCI, ceci : « On voit Jean-Paul Delevoye quasiment toutes les semaines depuis dix-huit mois et pourtant, je ne comprends toujours rien à ce qu’il raconte. ».

En mélangeant toutes les considérations, on noie le poisson, le pêcheur, le cuisinier et celui qui le mange. On est très loin de la simplification. Au contraire, on instaure un climat anxiogène durable et l’on encourage même la multiplication des désinformations (qu’on nomme maintenant "fake news").


L’équilibre budgétaire ?

L’équilibre budgétaire des retraites ? Quel que soit le système adopté, ancien, nouveau, imaginaire, etc., la pérennité financière d’une retraite par répartition (heureusement que ce principe reste à peu près unanime) signifie que les pensions des retraités actuels sont payées par les actifs actuels (par capitalisation, c’est très différent : les pensions des retraités actuels seraient payées par ces mêmes retraités lorsqu’ils étaient actifs et les actifs actuels cotiseraient pour leur propre retraite à venir).

Pour que le système par répartition tienne debout, il faut que le rapport actifs sur retraités tienne lui aussi debout. Il était de quatre actifs pour un retraité il y a une cinquantaine d’années, il est actuellement de 1,6 actif pour un retraité aujourd’hui et demain, le risque est clairement qu’il y ait plus de retraités que d’actifs capables de cotiser (actifs ayant vraiment un emploi). C’est mathématique et incompressible. C’est provisoire car dans une génération (trente ans), avec la baisse de la natalité des années 1980, le ratio pourrait se redresser (à condition d’encourager la natalité par des incitations fortes).

Et le seul moyen d’améliorer le ratio actifs sur retraités, c’est de faire travailler plus longtemps les actifs. Ce n’est pas choquant si on prend la précaution de différencier les professions épuisantes des professions qui peuvent allègrement franchir les soubresauts de l’âge (il suffit de compter chez les journalistes le nombre de septuagénaires voire d’octogénaires pour s’en rendre compte).

Cette considération budgétaire doit être prise en compte par une réforme paramétrique mais certainement pas systémique, sinon, il n’y a plus aucune capacité de comparaison pour tous les futurs retraités que nous, les actifs, serons un jour.


L’injustice des régimes spéciaux ?

Franchement, ce n’est pas le sujet de vouloir bouleverser tout le système pour "fondre" les régimes spéciaux. D’une part, il restera toujours des régimes spéciaux, à moins de demander aux militaires de faire le parcours du combattant encore à 62 ans. D’autre part, c’est une conception de justice (la suppression des régimes spéciaux) qui s’apparente au sentiment de jalousie. Il y a eu beaucoup de causes et de raisons pour tels ou tels régimes spéciaux des retraites. Que l’État, et donc le contribuable, y compris celui qui ne bénéficiera pas des régimes spéciaux, souhaite modifier ces régimes parce que leurs caisses sont déficitaires, est évidemment raisonnable.

Mais comme pour l’équilibre budgétaire, il s’agit de régler ce sujet spécifiquement. D’ailleurs, il m’avait semblé que le projet de la SNCF du printemps 2018 s’y était déjà (un peu) attelé (pour la seule SNCF, évidemment). En outre, certaines caisses sont forcément déficitaires pour des raisons démographiques : on emploie beaucoup moins de cheminots qu’il y a cinquante ans, donc le ratio actifs sur retraités est forcément en baisse. L’une des convergence naturelle, c’est d’augmenter l’âge légal de départ à la retraite, lorsque la réalité du métier ne correspond plus à la pénibilité dont il était question au moment de la création de ces régimes.

De plus, de tous les régimes spéciaux, seulement quelques-uns sont déficitaires. D’autres, au contraire, sont bénéficiaires et ceux qui sont concernés commencent à protester car ils ne veulent pas qu’on leur dérobe leur "cagnotte" accumulée par leurs propres cotisations et la rigueur de leur gestion.

Là encore, cette réforme des régimes spéciaux pourrait et devrait être seulement une réforme périphérique n’impactant pas sur le régime général.

Venons-en au cœur de la réforme systémique.


La retraite par points

Les arguments utilisés pour soutenir cette réforme systémique qui impacterait tout le monde sont : la justice (ou plutôt l’égalité), la simplicité et la confiance. La confiance, c’est clair qu’elle n’est pas au rendez-vous, la confiance ne se décrète pas, elle est ou elle n’est pas, et il est clair qu’elle n’est pas là. Les raisons ont déjà été partiellement précisées : illisibilité, anxiété, complexité et incrédulité.

Incrédulité car on soupçonne le gouvernement des pires arrière-pensées, et si c’est à tort (à mon avis), cette réforme ouvre la brèche à un champ des possibles dangereux pour l’avenir (quand on aura oublié depuis longtemps le gouvernement actuel).

L’égalité est un slogan vide de sens concret et entièrement idéologique, ce qui est étonnant pour un quinquennat Macron en principe pragmatique.

Trois avantages sont avancés pour cette réforme.

Premièrement, lorsqu’on travaille au cours de sa carrière sous différents statuts, on n’a pas la pension espérée car chaque statut est différent. En n’ayant qu’une seule règle universelle, cela permet de cotiser malgré les changements de carrière. Corollaire : ce n’est plus le nombre de trimestres qui compte mais le nombre de points. Même quelques heures en intérim seraient prises en compte dans le calcul de la retraite, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Deuxièmement, l’effet de simplicité par son universalité : un euro cotisé correspond à la même pension à la fin. Cette simplicité me paraît cependant d’autant plus intrigante que la situation de l’emploi est complexe, diversifiée et très inégale.

Troisièmement, l’effet d’égalité ou de justice, qui, je le répète, ne répond pas à un besoin sinon de jalousie du voisin. Je me moque bien du montant de la retraite des voisins, et si on fait un nivellement par le bas, tout le monde sera "égal" mais personne ne sera content. L’argument ne me paraît pas recevable, et cela dans l’hypothèse théorique haute, puisqu’en pratique, il restera (heureusement) des spécificités pour de nombreuses professions.

Ces avantages, ils me paraissent bien maigres par rapport aux grands inconvénients d’une telle réforme.


Inconvénient majeur n°1 : la transition

Elle sera longue et compliquée. Le seuil à partir duquel cette réforme sera appliquée sera complètement arbitraire. On a d’abord parlé des personnes nées en 1963, certains imaginent de le repousser aux personnes nées en 1978 (cela fait quinze de différence !). Dès lors que ce seuil est arbitraire, il est injuste. L’arbitraire secrète l’injustice. Que dire lorsque le voisin a six mois de plus ou de moins et que le nouveau système s’applique ou ne s’applique pas à lui ? La clause du grand-père qui vise à ne faire appliquer la réforme qu’à ceux qui entrent sur le marché du travail ferait de la réforme une réforme purement virtuelle. Et cela n’empêcherait pas les grands-parents de s’inquiéter de la future retraite de leurs petits-enfants.

Cet inconvénient est majeur car dans tous les cas, le mode de transition, sa méthode, ses objectifs, seraient en fait la réforme elle-même. Et une telle transition est extrêmement complexe et anxiogène. Or, pour l’instant, rien n’a été donné comme éléments concrets pouvant rassurer sur ce point-là.


Inconvénient majeur n°2 : les carrières chaotiques

Bizarrement, ce point a été très peu abordé jusqu’à maintenant, mais il est désormais l’un des arguments forts de la CGT pour demander le retrait pur et simple de la réforme systémique. Le gouvernement estime que la retraite par points permettrait  de "lisser" une carrière avec différents statuts. Certes, parce qu’il n’y aurait plus à "traverser" plusieurs régimes différents (avec des seuils jamais atteints). Mais cela ne prend pas en compte les carrières réellement chaotiques, et celles-ci sont maintenant très nombreuses, c’est-à-dire, lorsqu’il y a des "trous" dans la carrière, qui peuvent être volontaires et surtout involontaires : périodes de chômage, de formation pour une reconversion, de congé maternité (ou paternité), de congé de proche aidant (pour accompagner une personne en perte d’autonomie), etc.

Tous ces "accidents" de carrière vont être considérablement impactés par la retraite par points car la traduction, finalement, de ce système avec le langage du système actuel (régime général), c’est que le montant de la pension ne serait plus calculé à partir des vingt-cinq meilleures années (ce qui est déjà désavantageant), mais à partir des quarante-deux années de carrière (voire plus), donc, y compris les trous (où l’on cotise a minima ou pas du tout).

Mais les syndicats mettent plutôt la focalisation sur le troisième inconvénient majeur.


Inconvénient majeur n°3 : la valeur du point

D’après ce que j’ai compris, on pourrait obtenir un point dès qu’on a cotisé 10 euros. Et que ce point vaudrait …1 euro pour le montant de la pension. En fait, aujourd’hui aussi il n’y a pas corrélation entre le montant effectivement payé en cotisations (et lesquelles, pourquoi seulement salariales et pas patronales ?) et le montant de la pension. Bref, cela ne me choquerait pas qu’un calcul avec un taux soit fixé ainsi.

En revanche, ce qui serait impactant, ce serait l’évolution de la valeur du point au fil de temps. Il devrait nécessairement suivre le coût de la vie, sinon, les retraités s’appauvriraient.

Ce qui resterait, dans tous les cas, anxiogène (et pas seulement pendant la durée de l’adoption, éventuelle, de la réforme), ce serait la possibilité de diminuer la valeur du point (ou de seulement la laisser stagner malgré l’inflation). Or, jusqu’à maintenant, une fois que la retraite est commencée, le retraité est fixé jusqu’à la fin de sa vie sur ses rémunérations.

Le gouvernement actuel aura beau garantir que la valeur du point sera indexé, on sait très bien, et ce gouvernement l’a même déjà prouvé pour les pensions en 2018, que ce qu’un gouvernement fait, un autre peut le défaire. Dans dix ans, dans vingt ans, un gouvernement, pour une raison nécessairement honorable, pourra faire baisser la valeur du point. On aura oublié Emmanuel Macron, Édouard Philippe, Jean-Paul Delevoye, mais certainement pas le système à points qui aura été imposé. Je dis "imposé" puisque, à ce jour, un sondage indiquait que 68% des sondés étaient opposés à la réforme et soutenaient le mouvement de grève même si ce mouvement les pénalisait.

On peut se rappeler les précédents. Par exemple, la CSG, impôt très créatif, subtilement imaginé par le gouvernement de Michel Rocard. À l’origine, en 1991, seulement 1% (environ), aujourd’hui, combien ?

Certains systèmes adoptés sont devenus irréversibles. Par exemple, la retenue à la source de l’impôt sur le revenu. Actuellement, c’est la plus grande réforme concrète du quinquennat, et pourtant, elle a été décidée par le quinquennat précédent. Cette retenue à la source permettra d’autres évolutions, comme intégrer la CSG en impôt progressif ou alors, au contraire, créer (pour simplifier) une sorte de taxe universelle sur le revenu (ce qui serait fiscalement très rentable même si elle paraîtrait moins "juste").

Faire une retraite par points, c’est donner aux gouvernements futurs un outil particulièrement performant et puissant qui pourrait menacer le devenir des pensions de retraite à long terme. Au même titre que plafonner les dépenses des retraites en % du PIB n’a pas plus de sens que de plafonner les dépenses de santé, sauf à vouloir mutualiser la précarité.


Inconvénient majeur n°4 : la déresponsabilisation des prochains gouvernements

Ce que j’ai compris de la réforme, c’est qu’un organisme (paritaire) serait créé qui gérerait les différents "paramètres" du nouveau système, et en particulier, de la valeur du point avec des règles précises. Il pourrait aussi être chargé d’allonger l’âge légal de la retraite.

Si c’était le cas, ce serait une grave déresponsabilisation des futurs gouvernements qui seraient ainsi exonérés de leur responsabilité dans leur politique sociale. Ce serait très habile puisque l’idée serait de faire adopter par ceux qui, justement, y seraient opposés, toutes les mesures "paramétriques" que la conjoncture imposerait plus ou moins.

Là aussi, il y a des précédents. Celui qui me vient en tête est la fixation du taux d’intérêt pour le Livret A de la Caisse d’Épargne. Chaque fois que le gouvernement devait le changer, c’est-à-dire, le baisser, il devait assumer, expliquer et c’était évidemment très impopulaire. En rationalisant l’évolution du taux, le gouvernement du moment se déresponsabilise par la même occasion (règlement du Comité de la réglementation bancaire n°86-13 du 14 mai 1986). Inversement, cela n’empêche pas le gouvernement d’assumer les mesures populaires, comme le gel du taux du Livre A (au lieu d’une baisse) entre le 1er février 2018 au 31 janvier 2020, ce qu’a fait l’arrêté du 27 novembre 2017 signé par le Ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire.

C’est beaucoup plus facile de prendre des décisions impopulaires lorsque cela émane d’un comité Théodule à partir de règles technocratiques complexes que lorsque c’est une décision clairement assumée par un gouvernement. Faire cela pour les paramètres du système des retraites serait une grossière erreur car le réglage des paramètres relève avant tout d’un choix politique et le gouvernement, issu démocratiquement d’élections libres et sincères, est le seul organe à avoir la légitimité pour faire de tels choix politiques.


Et maintenant ?

Le Premier Ministre Édouard Philippe a annoncé le 6 décembre 2019 à Matignon qu’il allait présenter le projet du gouvernement « dans son intégralité » ce mercredi 11 décembre 2019 à 12 heures au Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE), instance qu’avait présidée Jean-Paul Delevoye. Édouard Philippe y avait déjà prononcé un discours le 12 septembre 2019 sur le thème : "Bâtir ensemble un système universel de retraite".

Il est fort probable que les grèves ne s’arrêteront pas à ce stade. La CGT est partie pour arrêter seulement après le retrait du projet et le pouvoir exécutif fait de ce projet un symbole de sa capacité à réformer. Il est donc probable qu’il y aura peu de trains pour les vacances de Noël. L’affrontement social risque d’être durable.

Réformer de façon aussi massive sans le consentement populaire serait une erreur stratégique. Comme si la leçon des gilets jaunes avait déjà été oubliée ! La seule solution vraiment correcte et honorable pour sortir de l’impasse, ce serait ce que François Mitterrand n’avait pas eu la possibilité constitutionnelle de faire en juillet 1984 avec sa réforme de l’école : soumettre le projet de réforme universel de retraite du gouvernement au référendum. Ainsi, la campagne référendaire permettra un réel débat et ce sera au peuple d’être le véritable arbitre, ce qui, finalement, serait normal pour une réforme de cette envergure.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (09 décembre 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La retraite, comme l’emploi, source d’anxiété extrême.
Grèves contre la réforme des retraites : le début de l’hallali ?
Rapport de Jean-Paul Delevoye sur la réforme des retraites remis le 18 juillet 2019 : "création d’un système universel de retraite" (à télécharger).
Faut-il encore toucher aux retraites ?
Le statut de la SNCF.
Programme du candidat Emmanuel Macron présenté le 2 mars 2017 (à télécharger).
La génération du baby-boom.
Bayrou et la retraite à la carte.
Préliminaire pour les retraites.
Peut-on dire n’importe quoi ?
La colère des Français.
Le livre blanc des retraites publié le 24 avril 1991.

_yartiReformeRetraitesA01

http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20191209-greves-retraites.html

https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-retraite-comme-l-emploi-source-219850

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/12/09/37853201.html


 

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