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12 juillet 2022 2 12 /07 /juillet /2022 05:05

« Il n’est plus question de dénoncer un texte ou une décision, mais seulement de censurer pour censurer. » (Élisabeth Borne, le 11 juillet 2022, dans l’hémicycle).





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En application de l’article 49 alinéa 2 de la Constitution, le groupe FI a déposé le 6 juillet 2022 une motion de censure signée par quasiment l’ensemble des groupes de la Nupes, soit 150 députés (sur 151 députés Nupes au total). Cependant, elle a été décidée dès le 19 juin 2022, au soir du second tour des élections législatives, par Jean-Luc Mélenchon, qui n’est plus député. Elle a été examinée par les députés ce lundi 11 juillet 2022 à partir de 16 heures.

Si les élus de FI peuvent être satisfaits d‘avoir mélenchonisé toute la gauche au-delà de leurs espérances, ils ont d’abord montré leur volonté de blocage, de désordre, d’obstruction, d’opposition systématique puisque leur intention de déposer leur motion de censure date d’avant même de connaître la confirmation de la Première Ministre Élisabeth Borne à Matignon et de connaître le contenu de son discours de politique générale. Ils ont montré leurs réelles intentions institutionnelles, celles, sous prétexte de faire une prétendue sixième république, de retourner aux poisons et délices de la Quatrième République.

Malheureusement pour eux (et heureusement pour le peuple français), nous sommes sous la Cinquième République qui a été rédigée pour éviter justement ce genre de blocage : pour renverser un gouvernement, il faut rassembler la majorité absolue des voix. Or, les députés de la Nupes ont recueilli seulement le quart des voix. Ils n’ont même pas fait le plein des voix de leurs groupes, puisque seulement 145 députés de la Nupes ont voté la censure, il a manqué à l’appel six socialistes (Joël Aviragnet, Bertrand Petit, Dominique Potier, Valérie Rabault, Hervé Saulignac et Cécile Untermaier ; pourtant, à part Dominique Potier, les autres étaient signataires de cette motion de censure). À eux, il faut rajouter très étrangement l’unique voix de Nicolas Dupont-Aignan. 146, c'est très loin des 289 voix minimales pour faire adopter la motion de censure.

En fait, oui, cette motion de censure tend à clarifier la situation politique, mais pas comme l’entendaient les mélenchonistes : d’une part, ils sont en quelque sorte "’l’idiot utile" du gouvernement qui, grâce à eux, peuvent désormais revendiquer leur pleine et entière légitimité parlementaire puisque l’Assemblée Nationale ne l’a pas renversé ; d’autre part, ils démontrent leur volonté d’obstruction que justement les Français ont rejetée pour obliger la classe politique à négocier des majorités d’idées et de projets ; enfin, ils ont raté leur démonstration de force d’une unité absolue. Bien au contraire, la fissure est claire et béante au sein du parti socialiste, dont Valérie Rabault semble s’éloigner de plus en plus de la direction de l’excité Olivier Faure (excité, car j’y reviens plus loin).

Par-dessus le marché, les mélenchonistes ont donné une occasion supplémentaire à Marine Le Pen et ses 88 députés RN de montrer, en revanche, leur esprit de responsabilité et d’ordre en refusant la politique de la terre brûlée de FI. Du reste, l’addition des voix mélenchonistes et lepénistes n’aurait pas suffi à atteindre le seuil des 289 voix (au maximum, 240). La position du groupe RN est simple : cela ne servirait à rien de renverser le gouvernement, si ce n’est soit de retrouver un autre gouvernement de même type, soit de connaître une dissolution et des élections anticipées, auquel cas la loi sur le pouvoir d’achat va prendre plusieurs mois de retard alors qu’il y a urgence. Donc, pour eux, il vaut mieux entrer dans le vif du sujet.

D’ailleurs, tant le texte de la motion de censure que la présentation que Mathilde Panot, présidente du groupe FI, en a faite en introduction du débat, surprennent par leur vacuité politique : rien sur les sujets nationaux, juste de la petite politique politicienne contre le gouvernement, contre Emmanuel Macron en reniant la réalité des urnes et en usant d’une mauvaise foi qui devient désormais la première caractéristique du mélenchonisme parlementaire.

Pour Élisabeth Borne, la Première Ministre, c’était même mieux que prévu : elle a su s’extirper de son rôle de technocrate sage et rationnelle et aller sur le terrain de la joute parlementaire qu’elle va sans arrêt rencontrer dans cette législature. Ainsi, sa réponse à la députée mélenchoniste a été un discours bien léché avec quelques formules et un répondant qu’on ne lui connaissait pas.

Alors, évidemment, c’était un petit jeu, ces trois heures de postures, de procédures, de joutes politiciennes complètement stériles, complètement déconnectés de la situation réelle des citoyens, manœuvre dont l’issue (l’échec) était prévisible, puisque les Français n’ont pas voulu, par quatre fois ce printemps, de Jean-Luc Mélenchon, ni à l’Élysée ni à Matignon, un jeu qui coûte cher aux Français qui sont dans l’attente de connaître une réponse à leurs problèmes, qu’ils soient économiques ou écologiques. Ils sanctionneront très sévèrement tous ceux qui retardent le travail parlementaire pour apporter des solutions à leurs problèmes.

Dans ce débat, je propose de citer son instigatrice, Mathilde Panot (par procuration pour Jean-Luc Mélenchon), la Première Ministre Élisabeth Borne qui a étonné par son ton polémique, sa défense face aux outrances des mélenchonistes, l’excellente intervention de l’orateur du MoDem Philippe Vigier, l’odieuse saillie d’Olivier Faure qui a complètement débloqué, enfin j’évoquerai les interventions de Thomas Mesnier (Horizons), Aurore Bergé (Renaissance) et Alexandre Loubet, le représentant du RN.

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S’adressant à Élisabeth Borne, Mathilde Panot a hurlé : « Le Président vous a maintenue en poste, alors même que vos idées sont minoritaires dans le pays. (…) En d’autres termes, vous êtes, à cette fonction, une anomalie démocratique. (…) Votre déclaration, c’est l’insoutenable continuité de votre projet, entre autosatisfecit et congratulations. (…) Alors, voici le moment de vérité : cette motion de défiance tiendra lieu de clarification politique. (…) À l’inverse d’une posture, cette motion de défiance vise à démasquer les impostures. (…) Ceux qui ne voteront pas cette motion de défiance seront les partisans de votre politique. (…) Le vote sur cette motion mettra au jour ceux qui veulent livrer la guerre sociale et écologique avec vous et ceux qui mèneront la bataille contre vous. Collègues, choisissez ! ».

Le mot d’ordre de Jean-Luc Mélenchon, repris par tous les orateurs de la Nupes (et pas seulement de FI), c’est de parler de "motion de défiance" (cela n’existe pas dans la Constitution, il s’agit de motion de censure) et c’est de prétendre scandaleusement qu’il y aurait une collusion entre la majorité présidentielle et le RN.

Ainsi, Mathilde Panot a accusé : « Depuis, vous êtes aux abois et peinez à dissimuler votre alliance objective avec l’extrême droite ; alors vous renvoyez dos à dos ceux que vous appelez désormais les extrêmes. Malgré tout, vous vous improvisez arbitre des élégances. Nous serions des zadistes, des brailleurs. Vous suintez le mépris. (…) Peut-être votre intention était-elle de masquer votre lune de miel avec le rassemblement national, union déjà consommée aux yeux de tous ? ». Et ainsi de suite… En fait, ce sont bien les députés mélenchonistes, par leurs tenues négligées, leurs vociférations, qui méprisent les institutions et les électeurs qui les ont élus. Ce sont bien eux qui braillent et vocifèrent sans arrêt sans rien bâtir et qui, par comparaison, apportent une respectabilité nouvelle aux députés RN.

Sur la sellette, Élisabeth Borne a répondu à Mathilde Panot avec une forte combativité : « Nous nous retrouvons. J’aurais aimé que ce soit pour parler du pouvoir d’achat (…). Dit simplement, j’aurais aimé vous parler des sujets qui préoccupent les Français, qui pèsent sur leur quotidien et pour lesquels ils nous demandent des réponses. Malheureusement, aujourd’hui, ce n’est pas du quotidien des Français que nous parlons. Le travail parlementaire vient à peine de commencer, le nouveau gouvernement est en place depuis une semaine, et certains veulent déjà le censurer. Aujourd’hui, mesdames et messieurs les députés, nous pourrions être en train d’agir pour les Français. Au lieu de ça, nous débattons d’une motion de censure cousue de procès d’intention qui fait obstacle au travail parlementaire et, de ce fait, à la volonté des Français. (…) Les Français en ont assez des dialogues stériles et des lois de postures. ».

Et de poursuivre : « Alors, aux censeurs du jour, j’ai quelques questions à poser. La première : que censurez-vous ? (…) J’ai une deuxième question à vous poser : que proposez-vous ? (…) Mais je vous le dis : malgré les invectives et les postures, je ne renoncerai pas à vous écouter, à chercher ce qui pourrait nous rassembler. (…) Je suis certaine que, texte après texte, que ce soit en regardant vers la droite ou vers la gauche de cet hémicycle, le compromis nous permettra d’agir. Car je vous le redis du plus profond de mes convictions, le compromis, ce n’est pas une ambition rabaissée ou une action empêchée. Le compromis, c’est une volonté de bâtir, d’avancer. Voilà pourquoi je chercherai toujours à écouter vos propositions, à les examiner loyalement, à ne jamais les balayer d’un revers de main. Voilà pourquoi j’ai lu attentivement le texte de votre motion de censure. Mais, là encore, aucune proposition ! Madame la présidente Panot, j’ai écouté votre discours avec la plus grande attention : rien, toujours rien ! L’avenir en commun a été remplacé par l’invective en commun. La motion de posture a remplacé la motion de censure ! ».

Fâcheries : « En vous lisant, en vous écoutant, la seule chose que je perçois, c’est que vous êtes, passez-moi le mot, fâchés. Je ne parle pas seulement de votre ton, de vos invectives, que ce soit aujourd’hui ou mercredi dernier. Fâchés, vous l’êtes avec la Constitution : vous cherchez à dissimuler votre tentative de blocage sous le nom de motion de défiance. Assumez donc votre motion de censure ! Fâchés, vous l’êtes avec notre histoire, en affirmant que je me déroberais à la tradition républicaine. Je ne vous ferai pas l’affront de vous citer tous les Premiers Ministres qui ont agi comme moi ; parmi eux, Édith Cresson, que, désormais, la gauche n’applaudit plus. Fâchés, vous l’êtes surtout avec la démocratie et le résultat des urnes. Votre motion de censure parle de légitimité. Je suis bien d’accord avec vous pour défendre ce principe. Alors, je vous l’apprends peut-être : vous n’avez pas gagné ni la présidentielle, ni les législatives. En démocratie, ce n’est pas celui qui a moins de voix, moins de sièges, qui est habilité à gouverner. En démocratie, on ne compte pas les voix qu’on aurait pu avoir, on compte les voix qu’on a ! Cela m’amène à ma troisième question : quelle majorité auriez-vous pour gouverner ? Pas celle des urnes, assurément. Si le gouvernement était censuré, quelle serait votre majorité alternative ? Avec quels groupes voudriez-vous gouverner ? (…) Votre censure, c’est finalement un appel à la dissolution ! Eh bien, madame la présidente Panot, contrairement aux signataires de votre motion de censure, nous promouvons des solutions, pas la dissolution ! (…) D’après le texte de votre motion, le gouvernement n’aurait pas été suffisamment élargi, changé ; or c’est vous qui m’avez indiqué que vous ne souhaitiez ni coalition, ni accord de gouvernement ! (…) Nous pourrions dialoguer. Par cette motion de censure, vous nous opposez une fin de non-recevoir. ».

Et de conclure en rétablissant le bon sens de la confiance : « Sachez, pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté, que je ne considère pas, et personne ne pourra considérer, que ceux qui ne joindraient pas leurs voix à cette motion accorderaient de fait une forme de confiance au gouvernement. Rejeter cette motion de censure, c’est respecter le vote des Français, c’est refuser l’instabilité, c’est accepter de juger le gouvernement sur les faits, sur ses actes. ».

L’orateur du MoDem, Philippe Vigier, a répondu aussi à Mathilde Panot : « Ce que je conteste, ce sont vos propos lorsque vous avez dit que la Première Ministre était une anomalie démocratique. Elle a été élue députée, vous ne pouvez pas dire le contraire, et votre candidat a été défait. ».

Et de faire des comparaisons électorales : « Quelle défiance du peuple vis-à-vis des élus et de vous-mêmes ! Nous sommes loin, chers collègues de la Nupes, de la situation de 1993 : malgré la bérézina qu’elle avait connue, la gauche avait obtenu 800 000 voix de plus que vous ! Nous sommes loin aussi de 2007 : je me souviens que sous Nicolas Sarkozy, il y avait quand même 227 parlementaires de gauche, Olivier Faure s’en souvient très bien aussi. Ces chiffres rappellent, je crois, que l’on peut toujours, avec beaucoup de talent et d’audace, essayer de rendre les défaites victorieuses. (…) Il n’est pas possible, chers collègues de la Nupes, d’utiliser les hologrammes comme pendant la campagne présidentielle pour compter les députés. Une motion de censure consiste à démontrer qu’une alternative politique est possible. Mais vous ne l’incarnez pas : vous n’avez pas de majorité absolue ! ».

Sur le fond de la motion de censure : « J’ai lu votre motion avec intérêt (…). Pas un mot sur la crise sociale liée au pouvoir d’achat ! Pas un mot sur la pandémie à laquelle nous faisons face chaque jour ! Pas un mot sur le soutien à l’éducation, pas un mot sur la transition écologique, pas un mot sur la crise internationale ! La Première Ministre n’a pas demandé un vote de confiance (…). Vous lui avez donc offert un vote de confiance implicite. ».

Enfin, Philippe Vigier a salué le retour du Parlement : « Il appartient désormais à tous les responsables politiques, aux parlementaires, de penser à leur pays plutôt qu’à leur parti, en établissant des compromis sans compromission. (…) Cette situation politique inédite signe le retour du parlementarisme. (…) C’est une bonne nouvelle, une belle nouvelle : oui, le Parlement est de retour ! (…) En déposant une motion de censure pour démarrer cette législature, chers collègues de la Nupes, vous posez un acte de défiance pas seulement contre le gouvernement, mais contre le Parlement lui-même ! (…) La loi, moins bavarde, devra être simple et compréhensible : arrêtons de légiférer pour un oui ou pour un non. Cessons d’entasser les lois, les règlements et les normes parfois inapplicables et souvent inappliquées (…). Le peuple nous donne une chance inédite, celle de rendre le Parlement incontournable. (…) Nous sommes condamnés à nous supporter, comme l’a bien dit Claude Malhuret (…). Les Français n’accepteront pas le chaos. Ils sauront parfaitement identifier qui a fait quoi, qui a dit quoi et qui, en définitive, est responsable d’une situation de crise de régime. Croyez-vous, mes chers collègues, que les réponses visant à garantir le pouvoir d’achat des plus fragiles, actifs et retraités, ne peuvent être écrites à plusieurs mains ? Nous, en tout cas, nous n’attendrons pas la longue marche qui démarre en septembre avec M. Mélenchon ! ».

L’intervention du premier secrétaire du PS Olivier Faure a été, quant à elle, stupéfiante de mauvaise foi et de postures, en accusant Élisabeth Borne, l’écoutant bouche bée mais cachée par le masque, de collusion avec l’extrême droite : « Cette motion de défiance aura un grand mérite, celui de sortir du confusionnisme nourri par le Président de la République, qui cite volontiers Jaurès le lundi, De Gaulle le mercredi et même Maurras le dimanche. (…) Il y a (…) une majorité tacite, celle que vous formez avec Les Républicains. Et il y a même le risque d’une majorité d’opportunité que vous formez avec le rassemblement national. Vous pouvez hurler, mais ce n’est pas moi qui suit l’auteur des propos de M. Dupond-Moretti, de M. Bayrou, de Mme Calvez et autres, qui ont exprimé une préférence pour l’extrême droite plutôt que la gauche ! C’est inédit dans l’histoire de la République ! Vous êtes les premiers à le faire ! Alors, taisez-vous, maintenant ! Vous fissurez toutes les digues solides qui, depuis le gouvernement provisoire du Général De Gaulle, ont protégé la République du nationalisme. Cela fait cinq ans que l’eau entrait, goutte à goutte. Vous pouvez crier, mais regardez les 200 voix que vous avez apportées à l’extrême droite la semaine passée ! Regardez-vous ! (…) Il est vrai qu’avec le rassemblement national, vous avez un partenaire facile, trop heureux d’acheter à bas prix sa respectabilité par son abstention. Votre responsabilité est désormais immense. Si vous vous entêtez à vouloir imposer votre programme au prix de la banalisation de l’extrême droite parlementaire, vous lui ouvrez les portes du pouvoir ! ».

Ces propos volontairement polémiques ont heurté de nombreux députés et pas seulement de la majorité. Pendant toute son intervention, complètement délirante car elle suppose une collusion qui n’existe pas, de nombreux députés ont réagi, écœurés. En voici un petit aperçu. Bruno Millienne : « Oui, les socialistes sont soumis aux insoumis ! ». Rémy Rebeyrotte : « Scandaleux ! ». Erwan Balanant : « Ça suffit ! Arrête ton cirque ! ». Rémy Rebyrotte : « C’est monstrueux ! ». Erwan Balanant : « Tu n’as pas honte ? ». Laurent Croizier : « Quelle honte ! ». Erwan Balanant : « Ils ont été élus par le RN ! ». Perrine Goulet : « Bérégovoy doit se retourner dans sa tombe à t’écouter ! ». Stella Dupont : « Pitoyable ! ». Erwan Balanant : « Arrête tes fantasmes ! ». Bruno Millienne : « Et vous n’êtes qu’un collaborateur de Mélenchon ! ». Rémy Rebeyrotte : « Honteux ! ». Laurent Croizier : « Le parti socialiste est mort aujourd’hui ! ». Rémy Rebeyrotte : « C’est honteux ! Ce sont les voix de la Nupes qui vont au RN ! ». Caroline Parmentier : « Monsieur 2% ! ». Bruno Millienne : « Je n’ose pas croire que tu as été marabouté ! ». Rémy Rebeyrotte : « Mélenchon vous a-t-il mangé ? ».

Dans son envolée lyrique, Olivier Faure a refusé de quitter la tribune à la fin de son temps de parole, la Présidente de l'Assemblée Nationale Yaël Braun-Pivet a dû couper le micro mais il a continué encore à parler (inaudible). Lui a succédé pour le groupe Horizons le député Thomas Mesnier : « M. Mélenchon, battu au premier tour, absent au second tour, invente un troisième tour qu’il perd encore une fois. Et voilà que vous proposez maintenant une motion de censure en guise de quatrième tour. Il serait peut-être temps d’admettre que les Français ne l’ont pas élu ; il serait peut-être temps de respecter la démocratie. ».

Puis répliquant à Olivier Faure : « J’ai entendu la présidente Panot et Olivier Faure déclarer tour à tour que nous ferions des alliances avec le rassemblement national. Il n’en est évidemment rien ! Pardon, mais il est juste fou d’en venir à dire de telles choses à cette tribune. Quelle indignité, monsieur Faure ! Quand on vous écoute, on comprend pourquoi le parti socialiste ne récolte plus que 2% des suffrages. Que faut-il comprendre d’une motion dont l’adoption dépendrait de la participation du rassemblement national, groupe avec lequel je ne crois pas que la Nupes veuille travailler ? Cette motion stérile ne montre en réalité qu’une chose : vous cherchez à diviser les Français. (…) Nous ne céderons rien face à l’obstruction et aux manœuvres politiciennes. (…) Le modèle d’opposition que propose la Nupes, façon IVe République ou XXe siècle, nous paraît déboucher sur une opposition d’arrière-garde, ni constructive, ni courageuse, probablement même assez dangereuse en se faisant le marchepied de l’extrême droite. Je veux m’adresser ici aux collègues socialistes, à ces élus engagés héritiers de Blum, Mitterrand et Rocard. Vos illustres prédécesseurs ont été à la hauteur des défis de leur temps. Ils ont travaillé, composé, sans jamais se renier. Je peine à imaginer que vous poursuiviez dans la voie de cet asservissement aux insoumis. Il est encore temps de changer. ».

La présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, qui disposait de 50 minutes de temps de parole (proportionnel à l’importance du groupe), a été aussi ferme contre la Nupes : « Nous examinons aujourd’hui une motion de censure, et non une motion de défiance. Si nous sommes ici, c’est parce que l’autoproclamé "tribun du peuple", selon ses propres termes, qui ne siège même pas à l’Assemblée, en a décidé ainsi : il vous a intimé l’ordre, madame la présidente et messieurs les présidents de l’opposition de gauche, de transformer nos débats en une affaire de procédure grâce au dépôt d’une motion de censure. Il vous met même en gade, vous, ses alliés politiques : il vous "en coûtera cher" de ne pas suivre ses directives. La réalité, c’est qu’en bon démocrate, le tribun du peuple n’accepte le résultat des urnes que lorsqu’il lui est favorable. Par quatre fois, pourtant, les Français lui ont dit non ; à deux élections présidentielles consécutives, il a été éliminé dès le premier tour de scrutin [en fait, à trois élections présidentielles consécutives] ; à deux élections législatives consécutives, il n’a pas obtenu la cohabitation tant espérée. Le naufrage aux législatives, c’est le vôtre : les Français ont dit non, non, et encore non. Alors oui, monsieur Mélenchon, vous avez raison d’affirmer que le déni de réalité va tuer la démocratie ; mais la seule anomalie démocratique, c’est de refuser le verdict des Français. Nous avons un Président fort, le premier Président qui ait été réélu en dehors d’une période de cohabitation. Réélire le Président, tel a été le choix des Français. ».

Elle est revenue sur les relations avec le RN : « Penchons-nous justement sur les compromissions dont vous ne cessez de nous accuser. Qui déclare dans une interview : "Pourquoi la Nupes est-elle seule à voter une motion de censure, quand c’est le seul choix fidèle au vote des électeurs ?". C’est votre tribun du peuple, encore lui, toujours lui !, qui appelle ainsi les voix du rassemblement national à soutenir votre motion. Le porte-parole de la Nupes ne disait pas autre chose hier soir dans une interview, en affirmant : "Nous n’avons pas inscrit dans la motion de censure le SMIC à 1 500 euros pour que le rassemblement national puisse la voter". Voilà ce que vous êtes, et voilà avec qui vous souhaitez vous allier. Votre lune de miel, les Français en payeraient l’addition ! Je le dis et je le répète : pour la majorité, c’est non ; les compromis, oui ; la compromission, jamais, ni avec l’extrême droite, ni avec l’extrême gauche. ».

Et de décrire le programme de la Nupes : « La réalité de votre programme est claire : la démocratie à la cubaine, un scénario économique à la grecque, la transition écologique du Sri Lanka et la diplomatie russe ! Je ne doute pas que votre tribun du peuple compense le bilan carbone de ses nombreux voyages d’étude, mais ici, oui, nous croyons fermement à notre démocratie, à notre indépendance et à l’affirmation de notre souveraineté. Au-delà de vos vociférations, cette motion de censure a une vertu, et une seule : celle de rappeler, par votre vote minoritaire, que Jean-Luc Mélenchon a perdu une fois encore la présidentielle, que vous avez perdu une fois encore les législatives et que si notre majorité est relative, vous êtes, quant à vous, en minorité absolue. Par ce vote, nous tournons définitivement, et c’est heureux, la page des élections et nous nous engageons dans la seule voie qui compte, celle qui consiste à travailler avec toutes les forces de l’arc républicain pour les Français, pour améliorer leur quotidien. ».

Quant à la position du RN, Alexandre Loubet, son représentant, a expliqué pourquoi il s’abstiendrait : « Nous traversons déjà une crise sociale, économique et sécuritaire. Nous n’avons pas besoin d’une crise de régime. C’est pourquoi les députés du rassemblement national ne soutiendront pas cette motion de censure. Je veux m’adresser aux députés de l’extrême gauche Nupes : l’heure n’est pas aux basses manœuvres politiciennes mais à l’action au service des Français. (…) Vous voulez faire sauter les institutions, vous voulez l’anarchie, l’impuissance des pouvoirs publics et la violence de la rue ! Vous êtes les héritiers de cette extrême gauche qui ne veut pas gouverner, qui a toujours détesté les institutions de la Ve République et qui veut la détruire. ».

Tous ces extraits du débat parlementaire du lundi 11 juillet 2022 sont donc des aperçus des rapports de forces dans l’hémicycle pour cette législature. Il faut insister sur la stratégie de respectabilité adoptée par Marine Le Pen : cette stratégie a un allié de poids en la personne de Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier et ses sbires de la Nupes (y compris le PS) sont les alliés objectifs du RN car leur excessive et délirante opposition rend comparativement plus "sage" le RN, ils reprennent le rôle du polémiste Éric Zemmour pendant la campagne présidentielle, dont les excès de langage laissaient croire que Marine Le Pen serait devenue une modérée (qu’elle n’est évidemment pas).

Mais, seuls juges, les Français ne seront pas dupes des manœuvres politiciennes des extrémismes d’un bord ou de l’autre. Le gouvernement, lui, a choisi de s’occuper sincèrement et honnêtement des Français et les oppositions populistes seront face à leurs responsabilités : s’occuper des Français… ou s’en moquer royalement.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (11 juillet 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
L’invective en commun : la motion de posture de Mélenchon est rejetée !
Examen de la motion de censure le 11 juillet 2022 à l’Assemblée Nationale (vidéo et texte intégral).
Baptême du feu pour Élisabeth Borne : et maintenant, au travail !
Discours de politique générale d’Élisabeth Borne le 6 juillet 2022 à l’Assemblée Nationale (vidéo et texte intégral).
L’Assemblée Nationale en ordre de bataille pour la XVIe Législature.
Gouvernement Élisabeth Borne II : resserrement des liens de la majorité présidentielle (Ensemble).
Composition du gouvernement Élisabeth Borne II du 4 juillet 2022 (communiqué de l’Élysée).
Yaël Braun-Pivet.
Pap Ndiaye.
Emmanuel Macron demande aux députés clarté, transparence et responsabilité.
Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
Jacques Julliard dans "Marianne" le 6 mai 2022 : "Oui à l’union, non à Mélenchon".
Allocution du Président Emmanuel Macron le 22 juin 2022 (texte intégral et vidéo).
Législatives 2022 (11) : la vie politique n’est pas un long fleuve tranquille.
La marque Le Pen fonctionne toujours aussi bien.
Législatives 2022 (10) : un train peut en cacher un autre.
Résultats du second tour des élections législatives du 19 juin 2022 (Ministère de l’Intérieur).
TVA : Mélenchon, champion du monde de la mauvaise foi.
Législatives 2022 (9) : procès d’intention, soupçons, fake-news, calomnie : le complotisme mélenchonien.
Législatives 2022 (8) : aucune voix ne doit manquer à la République !
Allocution du Président Emmanuel Macron le 14 juin 2022 à Orly (texte intégral et vidéo).
Législatives 2022 (7) : Liberté, Égalité, Choucroute.
Résultats du premier tour des élections législatives du 12 juin 2022 (Ministère de l’Intérieur).
Législatives 2022 (4) : sous la NUPES de Mélenchon.
Élysée 2022 (53) : la composition sans beaucoup de surprises du premier gouvernement d’Élisabeth Borne.
Pour Jean-Louis Bourlanges, c’est la capitulation et la bérézina !
Législatives 2022 (3) : Valérie Pécresse mènera-t-elle Les Républicains aux législatives ?
Législatives 2022 (2) : la mort du parti socialiste ?
Législatives 2022 (1) : le pari écolo-gauchiste de Julien Bayou.
Élysée 2022 (49) : vers une quatrième cohabitation ?
Élysée 2022 (44) : la consécration du mélenchonisme électoral.
Élysée 2022 (43) : le sursaut républicain !

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220711-motion-censure.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/l-invective-en-commun-la-motion-de-242714

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2022/07/11/39554664.html





 

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