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13 décembre 2024 5 13 /12 /décembre /2024 12:56

« Un certain nombre de personnalités politiques éminentes l'ont dit : qui a la capacité à parler à tous aujourd'hui ? Qui a tenu des propos, à pousser des idées selon lesquelles chacun doit trouver sa place ? Qui, parmi les premiers, a défendu le redressement des finances publiques ou la réindustrialisation du pays ? La liste n'est pas si longue. » (Jean-Noël Barrot, le 9 décembre 2024 sur franceinfo).




 


Après de laborieuses réflexions, le Président de la République Emmanuel Macron a nommé François Bayrou à Matignon ce vendredi 13 décembre 2024 à 12 heures 40 (je reviendrai certainement sur les conditions rocambolesques de cette nomination). Le Premier Ministre du vendredi 13 ! Beaucoup attendaient une surprise du chef de l'État et finalement, il est la personne qui était la plus probable à ce poste de toutes celles qui avaient été nommées depuis l'adoption de la motion censure, le 4 décembre 2024, contre le gouvernement Barnier. Dans un journal breton, l'ancien ministre Jean-Yves Le Drian a confirmé ce vendredi matin qu'il avait été contacté et qu'il avait refusé Matignon à cause de son âge. Hier, la nomination (fantaisiste) de Roland Lescure était (sérieusement) évoquée, peut-être pour l'abandonner aussi vite (pas si vite que cela, apparemment).

Pour l'avoir connu dès 1989, je peux dire évidemment que ce jour est, pour François Bayrou, la consécration d'une carrière politique d'une petite cinquantaine d'années, un peu moins longue que celle de Michel Barnier même s'ils ont à peu près le même âge (73 ans). Il y a une certaine émotion à écrire ces lignes. Mais c'est mal le connaître que de croire qu'il se croirait "arrivé" ! Au contraire, tout commence, il part, il n'arrive pas. Il part dans une aventure incertaine, limitée dans le temps, peut-être, au mieux, jusqu'à mai 2027, la prochaine élection présidentielle, plus probablement jusqu'en automne 2025, les potentielles prochaines élections législatives après nouvelle dissolution, si ce n'est quelques semaines ou mois. Au contraire de Michel Barnier qui n'avait plus de relais au sein de l'hémicycle, François Bayrou est un homme qui connaît encore bien les parlementaires actuels qui seront les éléments clefs de sa stabilité.

François Bayrou est actuellement maire de Pau, président du MoDem et Haut Commissaire au Plan. Il avait donc déjà un bureau à Matignon. Un pied à Matignon. Son objectif n'est pas de durer, bien sûr, mais d'éviter les erreurs de Michel Barnier, trop confiant sur sa capacité de négociation. On ne négocie pas à l'Assemblée avec un temps court comme on négocie en Europe avec un temps long.

 


Un membre de l'entourage de Nicolas Sarkozy a démenti le fait que l'ancien Président se serait mobilisé auprès de l'Élysée pour éviter François Bayrou à Matignon. Certes, les deux hommes ne s'apprécient pas beaucoup et Nicolas Sarkozy a souffert de l'opposition irréductible de son ancien alter ego des années 1990 (Nicolas Sarkozy secrétaire général adjoint du RPR et François Bayrou secrétaire général adjoint de l'UDF) lors des élections présidentielles de 2007 et de 2012 : dans la première, François Bayrou s'est abstenu au second tour (contrairement à ce qu'affirment certains journalistes à la mémoire défaillante, il n'a pas voté pour Ségolène Royal) et dans la seconde, il a voté pour François Hollande au second tour, sans retour puisque l'ancien premier secrétaire du PS est resté obstinément dans une majorité dite de gauche (étriquée à cause des frondeurs).

En revanche, il ne faut pas oublier que les dirigeants de LR ne détestent pas tous François Bayrou qui, entre autres, avait fait alliance avec Valérie Pécresse en Île-de-France, Xavier Bertrand aux Hauts-de-France et Laurent Wauquiez en Auvergne-Rhône-Alpes aux élections régionales en 2015.

On a reproché à François Bayrou, qui n'a été "que" Ministre de l'Éducation nationale de mars 1993 à juin 1997 (il aurai voulu les Affaires étrangère en mai 1995 ; et il est resté à la Justice un mois et demi en mai-juin 2017), de n'avoir rien fait. Peut-être. Mais en l'occurrence, en décembre 2024, c'est un avantage ! Dans une Assemblée aussi impossible que celle sortie des urnes le 7 juillet 2024, il est impossible d'avoir l'ambition des grandes réformes. Parce qu'il n'y aurait aucune majorité pour les faire adopter. L'urgence, c'est donc le budget.

Or, la dette était son dada. Je me souviens très bien que pendant sa première campagne présidentielle, en 2002, il prêchait déjà dans le désert sur la gravité de la dette et les conséquences sur les Français et les générations à venir. Ce n'était pas très sexy et il a su se distinguer des "petits candidats" par une gifle spontanée (et publique) qu'il a donnée à un gamin qui lui faisait les poches (il est arrivé en quatrième position derrière Jacques Chirac, Jean-Marie Le Pen et Lionel Jospin, mais devant Jean-Pierre Chevènement, ce dernier surnommé un moment "le troisième homme" avec des sondages faussement flatteurs.

Bien entendu, à l'époque, la situation budgétaire était bien moins grave que par la suite, mais cette gravité de la dette semble avoir maintenant été entendue en 2024, même si la classe politique en général joue hypocritement. Le PS et le RN dénoncent le trop fort endettement de la France, mais n'hésitent pas à prôner des dépenses publiques en plus (en particulier la gauche qui veut abroger la réforme des retraites de 2023 alors qu'il faudrait en refaire une nouvelle pour assurer la pérennisation de leur financement).

Son autre aspect particulier, c'est de pouvoir discuter avec tout le monde. S'il y a une personne capable de cultiver l'art du compromis dans la classe politique, c'est bien lui. Sans doute son caractère est difficile, ce qui veut dire que la cohabitation avec Emmanuel Macron ne sera pas de tout repos pour le Président : au contraire de ses précédents Premiers Ministre, Michel Barnier compris (qui était en retrait politique depuis 2021), François Bayrou a toujours existé politiquement de manière autonome et indépendamment d'Emmanuel Macron. Il a été un candidat à l'élection présidentielle qui a recueilli 18,5% des suffrages en 2007, ça compte dans la vie politique.


 


En particulier, le président du MoDem a été assez sévère contre la méthode de la réforme des retraites et l'idée de remettre en chantier certains éléments de cette réforme semble possible, sans remettre en cause l'essentiel, son financement, mais ce petit pas peut être un grand pas pour obtenir la non-censure du PS pour qui c'est un marqueur politique et électoral fort.

Si des réformes structurelles pour réduire durablement les dépenses de l'État semblent assez peu probables, François Bayrou sera amené à faire des réformes qui pourraient obtenir des consensus pour aider les agriculteurs, pour relancer le logement et pour réfléchir sur la transition énergétique, notamment par le redémarrage du programme nucléaire. Ce sont des sujets qui sont peu des marqueurs politiques et qui concernent la vie concrète des Français. C'est ce qu'ils attendent.

On imagine toutefois mal François Bayrou capable d'obtenir l'accord d'une majorité de députés sur une nouvelle loi sur l'immigration. Apparemment, il serait partisan de maintenir Bruno Retailleau à l'Intérieur afin de donner de gages à LR, tandis que des personnalités comme Bernard Cazeneuve pourraient entrer au gouvernement avec des ministères importants.

Pour beaucoup dans la classe politique, il est le plus grand commun diviseur, j'insiste sur le plus "grand" et pas le plus petit ! En classe de cinquième, j'ai appris ce qu'étaient le PGCD et le PPCM, que tous les journalistes, qui ne comprennent rien à ce qu'ils disent, relisent leurs anciens cours de mathématiques ! Le PGCD, en politique, c'est le compromis le plus grand qu'on peut avoir dans une situation de division généralisée. Ou la personne qui le porte.


Ce qui est clair, c'est que François Bayrou sera indépendant d'Emmanuel Macron. C'est mal le connaître de croire qu'il se serait qu'un fondé de pouvoir de l'Élysée. Du reste, c'était le cas aussi pour Michel Barnier. Reste à voir si la méthode Bayrou sera plus concluante que la méthde Barnier. La passation des pouvoirs avec Michel Barnier, retenu à l'Élysée en fin de matinée pour une décoration, est en train de se faire dans la foulée de la nomination de François Bayrou. Bonne chance à lui et à la France !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (13 décembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le tour de François Bayrou !
Le paysage politique français postcensure.
Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
Emmanuel Macron face à ses choix.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
L'émotion de censure de Michel Barnier.
La collusion des irresponsables.
Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
PLF 2025 : la majorité de rejet !
Michel Barnier : déjà deux mois !
François Guizot à Matignon ?
5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
Doliprane : l'impéritie politique.
Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.

 


https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241213-bayrou.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-tour-de-francois-bayrou-258146

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/13/article-sr-20241213-bayrou.html


 

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10 décembre 2024 2 10 /12 /décembre /2024 03:51

« Ce qui est en jeu, c’est notre capacité à faire des pas les uns vers les autres, à dépasser les tensions et les clivages qui font tant de mal à notre pays, à n’avoir comme boussole que l’intérêt général. Ce qui devrait nous rassembler, c’est la politique, au sens où je l’entends, qui consiste à créer du progrès collectif, parfois de petits progrès, parfois de grands progrès pour les Français, et de la stabilité. Les citoyens, les entreprises, les acteurs sociaux et économiques en ont tant besoin et si forte envie. » (Michel Barnier, le 4 décembre 2024 dans l'hémicycle).




 


Contrairement à ceux des députés censeurs qui ont tenté de dédramatiser l'adoption de la motion de censure, le 4 décembre 2024 contre le gouvernement Barnier, cette adoption a provoqué un bouleversement politique majeur et beaucoup de choses changent dans la situation politique. C'est ce paysage politique français postcensure qui est assez différent de celui d'avant la censure. Pour autant, ce n'est pas un paysage apocalyptique postnucléarisé.

Comme je l'indiquais précédemment, cette motion de censure a remis sur le devant de la scène politique le Président de la République Emmanuel Macron, par nécessité puisqu'il doit, constitutionnellement, nommer le nouveau Premier Ministre. C'est paradoxale car la collusion des populistes irresponsables et cyniques, d'extrême droite et d'extrême gauche, avait justement pour but de mettre hors-jeu le Président de la République. C'est raté !

Au contraire, Emmanuel Macron s'est investi à la tâche. Après avoir rencontré individuellement la plupart des partis politiques, hors extrêmes, ce lundi 9 décembre 2024, c'est au tour, le lendemain à 14 heures à l'Élysée, d'une réunion collective dans un format "Saint-Denis". Les partisans d'un régime exclusivement parlementaire pourraient s'offusquer que cette réunion ait lieu sous l'autorité du Président de la République, mais ces députés pouvaient depuis le 7 juillet 2024 se réunir à l'Assemblée Nationale. Comme ils en étaient incapables par eux-mêmes, il a bien fallu que le Président de la République, à la fois le véritable arbitre des élégances et le de nouveau maître des horloges, s'en occupât lui-même.

 


Les journalistes qui, la veille de la censure, avaient cru comprendre d'un conseiller du Palais que le Président de la République nommerait le nouveau Premier Ministre en vingt-quatre heures, ont visiblement été mal informés. Non seulement Emmanuel Macron prend du temps, mais à l'heure actuelle, si le nouveau locataire de Matignon était nommé à la fin de cette semaine, ce serait déjà un bel exploit. On sait qu'Emmanuel Macron a toujours voulu prendre son temps dans les nominations, et en plus, se tromper pourrait ici avoir de graves conséquences institutionnelles.

De plus, le fait qu'un conseil des ministres a été convoqué pour le 11 décembre 2024, malgré le caractère démissionnaire du gouvernement, pour adopter le projet de loi spéciale qui reconduira pour le 1er janvier 2025 la loi de finances pour 2024, ce qui permettra de continuer à collecter les impôts et à payer les fonctionnaires sans nouveau budget, dans l'attente de celui-ci, laisse ainsi un peu de temps à la nomination du prochain gouvernement, car il n'y aura plus d'urgence budgétaire.

Du reste, le casting n'est pas la principale tâche du Président de la République. Son objectif est plutôt de conclure un accord de non-censure avec l'ensemble des formations politiques de l'arc de gouvernement, de LR au PCF en passant par EPR (macronistes) et le PS, en sachant qu'à eux deux, le RN et FI ne pourraient pas faire adopter une motion de censure (140 députés RN et alliés et 71 députés insoumis ne font pas 289).

 


Au-delà de cette remise à l'avant-scène d'Emmanuel Macron, ce dernier a quand même réussi un double voire triple exploit le samedi 7 décembre 2024 avec la réouverture de Notre-Dame de Paris. D'une part, c'est un exploit diplomatique car il a réussi à convaincre Donald Trump de venir à Paris, et cela a montré à l'évidence que malgré ses déboires intérieurs, Emmanuel Macron n'était pas isolé. C'est d'ailleurs à peu près l'un des rares chefs d'État ou de gouvernement que Donald Trump connaît bien à son retour à la Maison-Blanche, avec Georgia Meloni et Viktor Orban (et Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan, bien sûr). D'autre part, le délai respecté de cinq ans pour reconstruire la cathédrale a montré que le volontarisme politique pouvait fonctionner, même avec des défis audacieux, et disons-le, un peu fous, et cela a apporté la confirmation d'une composante jupitérienne au chef de l'État, quoi qu'on en dise. Enfin, ce week-end a été l'occasion pour les Français d'être fiers d'eux-mêmes, d'être à nouveau le centre du monde, et dans ce climat de dénigrement généralisé, c'est toujours bon à prendre, et avec la trêve des confiseurs qui va se profiler rapidement à partir de mi-décembre jusqu'au début de janvier prochain, cela fait repenser à la trêve olympique qui a mis le monde politique en suspension pendant tout l'été.

 


En face du Président de la République, il y a eu des évolutions notables dans la classe politique. Si LR a confirmé son esprit de responsabilité déjà démontré avec la nomination de Michel Barnier à Matignon (on aurait aimé que LR l'adoptât dès juin 2022, ce qui aurait évité la dissolution), d'autres partis ont évolué énormément dans leur approche du problème. La fable insoumise d'une victoire de la nouvelle farce populaire (NFP) a été enfin jetée à la poubelle pour prendre en compte la réalité arithmétique de l'Assemblée.

C'est le parti socialiste qui a bougé le plus ses lignes, en acceptant l'idée d'un accord de non-censure avec le reste de l'arc de gouvernement. Sur son sillon, il a amené également les écologistes et les communistes, ce qui a pour conséquence d'isoler politiquement les insoumis. Jean-Luc Mélenchon enrage actuellement de ne plus rien contrôler du NFP. Il enrage mais il n'est pas non plus si mécontent que cela, car il sait que cela l'aidera à l'élection présidentielle pour convaincre qu'il serait la seule "alternative" possible à gauche, au contraire des "sociaux-traîtres".

 


Le premier secrétaire du PS Olivier Faure, pourtant considéré comme ultramélenchonisé, a lui aussi changé de pied : la perspective du prochain congrès socialiste et sa forte impopularité parmi les militants et surtout parmi les grands élus territoriaux (maires de grandes villes et présidents de conseils régionaux) l'ont incité à modifier sa tactique.

Comme l'a expliqué Carole Delga, la très écoutée présidente du conseil régional d'Occitanie, qui est favorable à un accord de gouvernement, dans "La Tribune Dimanche" le 8 décembre 2024 : « Face à une crise exceptionnelle, et à un haut niveau d'irresponsabilité de beaucoup de politiques (…), nous devons être à la hauteur pour notre pays. Les Français nous en veulent. Ils sont déboussolés, désespérés par le spectacle que donne la classe politique, inquiets de l'avenir sur les plans social, économique et climatique. Loin des jeux d'appareils et des ambitions présidentielles, tout doit être mis en œuvre pour l'adoption du budget de la France dans les prochaines semaines. ».


La pire irresponsabilité est sans doute la censure d'un ancien Président de la République, d'autant plus que François Hollande aurait même été à mélenchoniser dans une réunion socialiste en expliquant que le Président de la République devrait partir après l'adoption d'une motion de censure (ce sont des propos rapportés et pas confirmés par l'intéressé). L'emmurement (au sens propre) de sa permanence électorale en Corrèze par des agriculteurs en colère l'a un peu refroidi : aujourd'hui, il n'ose plus beaucoup intervenir dans le débat public.

À l'extrême droite, la situation aussi a évolué. Comme le disait Gabriel Attal, qui vient d'être élu secrétaire général de Renaissance : « Chassez le naturel, il revient au chaos ! ». L'évolution date en fait des réquisitoires très sévères du parquet contre Marine Le Pen et ses sbires dans le procès fleuve des assistants parlementaires du RN. Elle risque l'inéligibilité immédiatement exécutoire. Le vote de la motion de censure des insoumis, qui fustigeait une nouvelle loi Immigration et la remise en cause de l'aide médicale d'État, en évoquant les « plus viles obsessions » du RN, a rendu un peu dubitatifs, sinon dérouté, les militants du RN. Surtout, ceux qui avaient cru que la respectabilité, la tactique de la cravate, devait les mener au pouvoir. Les agriculteurs en colère en veulent aux députés RN d'avoir voté la censure car les mesures qu'ils avaient obtenues ont été éliminées par la censure.


 


Pour preuve les résultats de la première élection législative partielle depuis le 7 juillet 2024. C'est intéressant car ce sont des signaux faibles qui ne sont pas sans signification. Actuellement, trois sièges de députés sont vacants et deux autres élections législatives partielles seront organisées au début de 2025 (pour les circonscriptions d'Hugo Prevost à Grenoble et de Stéphane Séjourné à Boulogne-Billancourt). Celle qui a eu lieu les 1er et 8 décembre 2024 concerne la première circonscription des Ardennes, celle de Charleville-Mézières.

En juin 2022, cette circonscription a été conquise par Lionel Vuibert, candidat macroniste, alors que la députée sortante, qui ne se représentait pas, était LR. Le candidat LR a obtenu près de 300 voix de moins que son concurrent macroniste au premier tour et s'est désisté en sa faveur. Au second tour, Lionel Vuibert a gagné avec 200 voix d'avance sur le candidat RN pour une participation de 45,1%.

Cet été 2024, Lionel Vuibert a perdu largement le second tour avec plus de 2 500 voix de retard sur son jeune concurrent RN Flavien Termet, avec une participation de 67,5%, alors que le candidat macroniste n'avait plus de candidat LR sérieux au premier tour (la candidate officielle de LR n'a fait que 3,8% au premier tour). Flavien Termet, le benjamin de l'Assemblée que certains députés sectaires de gauche n'ont pas voulu saluer au moment de voter pour l'élection au perchoir, a démissionné le 30 septembre 2024 pour des raisons médicales graves. Il aurait aussi quitté le RN en mauvais termes (selon certains journalistes).

En décembre 2024, la participation a chuté, comme dans les partielles en général, néanmoins, c'est important de noter le résultat. Le candidat RN a fait mieux au premier tour en pourcentages que Flavien Termet en juin (39,1% au lieu de 38,3%) tandis que Lionel Vuibert a fait un peu moins en pourcentages qu'il y a cinq mois (25,4% au lieu de 26,2%), cette fois-ci, concurrencé par un candidat LR qui a fait 16,0% au premier tour (avec une participation de seulement 30,5%). Au second tour, Lionel Vuibert a réussi néanmoins à reconquérir la circonscription en gagnant face au candidat RN avec près de 400 voix d'avance. Il a bénéficié du soutien de LR au second tour. Certes, la participation au second tour était très faible aussi, 30,9%, mais la différence en nombre de voix est quand même notable puisqu'il a gagné avec plus d'écart en voix en décembre 2024 qu'en juin 2022 avec une participation 50% plus grande.


On ne peut bien sûr pas généraliser au niveau national, mais cela montre cependant que le RN n'a pas su mobiliser ses propres électeurs pour l'emporter, sans doute en raison d'une censure qui est peu compréhensible : pourquoi avoir joué le jeu de la respectabilité pendant trois mois, puis tout d'un coup, se ranger comme Jean-Luc Mélenchon, c'est-à-dire enrager ? Il faut aussi rappeler que depuis plusieurs années, l'abstention nuit au RN au contraire des décennies précédentes où c'était le contraire.

 


Mais retour à la situation du moment. Les noms des possibles successeurs de Michel Barnier à Matignon passent à une vitesse folle : Sébastien Lecornu, François Bayrou, Bruno Retailleau, François Baroin, Catherine Vautrin, Bernard Cazeneuve, Manuel Valls (oui, on a parlé de lui !!), Pierre Moscovici, Didier Migaud, Laurent Berger, Thierry Beaudet, et même... François Villeroy de Galhau, supposé être de gauche et gouverneur de la Banque de France depuis novembre 2015. J'ai l'intuition que si c'est ce dernier, son gouvernement sera très impopulaire...


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (10 décembre 2024)
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Pour aller plus loin :
Le paysage politique français postcensure.
Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
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Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
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Michel Barnier : déjà deux mois !
François Guizot à Matignon ?
5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
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Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
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Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.

 




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241209-paysage-politique-postcensure.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-paysage-politique-francais-258081

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6 décembre 2024 5 06 /12 /décembre /2024 03:55

« À partir d’aujourd’hui, c’est une époque nouvelle qui doit commencer où tous devront agir pour la France et où il faudra bâtir des compromis nouveaux. Parce que la planète avance, parce que les défis sont nombreux et parce que nous devons être ambitieux pour la France. Nous ne pouvons nous permettre ni les divisions ni l’immobilisme. C’est pourquoi je nommerai donc dans les prochains jours un Premier Ministre. Je le chargerai de former un gouvernement d’intérêt général représentant toutes les forces politiques d’un arc de gouvernement, qui puissent y participer ou à tout le moins qui s’engagent à ne pas le censurer. Le Premier Ministre aura à mener ces consultations et former un gouvernement resserré à votre service. » (Emmanuel Macron, allocution du 5 décembre 2024).




 


Le gouvernement Barnier censuré, on retourne à la case départ du 7 juillet 2024 avec le même problème : comment désigner un gouvernement alors qu'à l'Assemblée, divisée en trois blocs de même taille, aucune majorité ne semble possible ? Quel Premier Ministre ?

L'adoption de la motion de censure
le 4 décembre 2024 a été un événement institutionnel majeur de notre histoire politique. Depuis le début de la Cinquième République, c'est la seconde fois qu'un gouvernement a été censuré. La première fois, c'était le 5 octobre 1962 avec le Premier Ministre Georges Pompidou (on a retrouvé des images des deux seuls Premiers Ministres censurés).

Mais la censure de 2024 est incomparable avec celle de 1962. En effet, la censure de 1962 était fondatrice d'une certaine pratique institutionnelle. L'adoption de la motion de censure a eu pour conséquence la dissolution de l'Assemblée. Ainsi, le Président de la République avait le dernier mot et si aucune motion n'a jamais été encore adoptée de nouveau, jusqu'en 2024, c'était par cet équilibre de la terreur : en cas d'adoption d'une motion de censure, la conséquence la plus probable est le retour aux urnes, la dissolution, pour permettre au peuple de départager le conflit entre l'exécutif et le législatif. Le problème de 2024, c'est que l'arme de la dissolution s'est dissoute avec l'Assemblée puisqu'il ne peut pas y avoir de nouvelle dissolution avant l'été prochain.


 


En quelque sorte, 2024 est absolument l'inverse de 1962, c'est la dissolution du 9 juin 2024, qui a abouti à l'élection d'une Assemblée impossible le 7 juillet 2024, ce qui a entraîné une motion de censure le 4 décembre 2024. La dissolution a eu pour conséquence la censure. Et le problème, c'est que les mêmes causes risquent d'avoir les mêmes effets.

Du reste, Marine Le Pen, dans un entretien dans "Le Figaro", a confirmé ce vendredi qu'elle pourrait toujours voter une nouvelle motion de censure dans les prochaines semaines ou prochains mois, montrant par là la même irresponsabilité et le même cynisme que Jean-Luc Mélenchon. C'est aussi pour cela que le PS du mou Olivier Faure, soumis aux insoumis, a un peu bougé dans sa posture.

Un accord de non-censure pourrait être conclu dans « l'arc de gouvernement », comme le souhaiterait Emmanuel Macron, à savoir avec la gauche, le centre, la droite républicaine et le macronisme. Le PS réclame encore un Premier Ministre « de gauche » tandis que LR censurerait une politique de gauche. La porte est étroite, comme dirait André Gide, mais elle s'est ouverte pour éviter la dépendance du futur gouvernement aux caprices lepénistes.

Mais qui pourrait être nommé à Matignon ? On l'a vu, la personnalité, son expérience politique, parlementaire, sa recherche de consensus, sa clarté dans les idées et dans les négociations, ont dans de tels moments une influence capitale. La personnalité de Michel Barnier était pourtant intéressante et même adaptée aux difficultés des temps, mais à un moment donné, sentant le ridicule d'être mené ainsi par le RN, il y a eu arrêt des discussions. Sans doute saura-t-on dans les années ou décennies à venir ce qui s'est réellement passé pour arriver à une motion de censure, mais il fallait bien comprendre que dans la configuration de la nomination de Michel Barnier, le 5 septembre 2024, chaque jour qui passait était un jour de miracle. La vie est une création continue.


 


Malgré la posture un peu différente du PS, tant que les socialistes ne se désolidarisent pas très clairement des insoumis, aucun réel accord ne pourra aboutir avec les formations politiques de l'actuel socle commun. Cela signifie surtout qu'un accord d'appareil paraît peu probable, tant les positions sont divergentes, et que seul, le Premier Ministre, par son rayonnement, son talent de négociateur et son réseau, pourra vraiment fédérer une équipe hétéroclite. Rappelons enfin que l'obstacle du budget n'est toujours pas franchi et qu'en janvier ou février 2025, il restera encore à se mettre d'accord sur les lois de finances pour 2025, ce qui avait provoqué la motion de censure il y a deux jours.

On a dit que les potentiels Premiers Ministres ne seraient que des hommes. Eh bien, non ! Il y a deux femmes et commençons par elles, et, chose étrange car en général, les plus ambitieux sont plutôt les hommes, ce sont les deux seules candidates clairement autoproclamées à Matignon.


La première est déjà connue depuis le 23 juillet 2024 : Lucie Castets, non contente des humiliations successives dont elle a été victime de la part de ses "amis" de la nouvelle farce populaire (NFP), s'est déclarée préparée à exercer les fonctions de Première Ministre. On aurait dit un titre du Gorafi, a pensé un journaliste influent sur Twitter ! Elle n'a jamais été élue, elle dit n'importe quoi sur le budget depuis quatre mois et demi (bien qu'ancienne directrice financière de la ville de Paris, certes hyper-endettée), elle a été "répudiée" (y a-t-il un autre terme pour la secte ?) par les insoumis pour une possible candidature à Grenoble... mais, comme les Poilus de 1914 avec leur pantalon bien rouge, elle est montée sur le front surtout pour prendre les coups et faire guignol.

La deuxième candidate à Matignon est finalement la version féminine de Manuel Valls dans l'arrivisme : Ségolène Royal a fait acte de candidature auprès du Président de la République. L'ancienne candidate à l'Élysée, qui a un certain charisme, c'est vrai, ne représente pourtant plus rien sinon l'antenne de BFMTV. Elle se verrait bien à tous les postes possibles depuis qu'elle a quitté son ministère en 2017. La preuve qu'elle veut repousser l'âge de la retraite à au-delà 70 ans, comme le gourou de FI.

Plus sérieusement (quel dommage de dire cela parce qu'il manque des femmes à stature), le nom de Sébastien Lecornu, l'actuel Ministre des Armées et premier-ministrable déjà en janvier 2024 (avant la dissolution), considéré comme le chouchou du Président, revient relativement souvent. Il a pour lui d'être originaire du parti Les Républicains, et aussi d'avoir organisé des rencontres entre Édouard Philippe, Marine Le Pen et Jordan Bardella. Homme particulièrement lisse, il est sans aspérité et peut donc plaire. Ou plutôt, ne pas se faire détester.

D'autres noms reviennent régulièrement aussi : si Xavier Bertrand en meurt beaucoup d'envie, il sait que seul un accord en bonne et due forme avec le PS lui éviterait la censure du RN. Bruno Retailleau fait aussi partie des favoris car il a incarné très politiquement sa nouvelle fonction de Ministre de l'Intérieur (c'était à peu près le seul ministre qu'étaient capables de citer les Français en général), mais sa nomination renforcerait le schéma perdant de l'expérience Barnier. On parle aussi de Jean Castex dont la convivialité consensuelle mettrait un peu de chaleur dans une Assemblée tendue (et la réussite des Jeux olympiques et paralympiques plaide en faveur du patron de la RATP). Ou encore de François Baroin, maire de Troyes, ancien président de l'influente Association des maires de France, qui avait accueilli Emmanuel Macron lors des congrès des maires de France dans une atmosphère très tendue. Ce dernier avait toutefois trouvé des activités plus juteuses (et tranquilles) que la vie politique.


 


Le nom de Thierry Breton circule aussi, mais à mon avis à tort. Avec lui, il s'agirait de former un gouvernement technique, mais dès lors qu'il faut construire un budget, même les moins politiques deviennent des politiques ; c'est la fonction même du gouvernement. La principale responsabilité des élus demeure le vote des budgets, quelle qu'en soit les collectivités (l'État comme les collectivités territoriales). C'est l'acte politique par excellence. Parler d'un gouvernement technique, c'est laisser croire qu'il y a des solutions rationnelles qui peuvent se passer des passions politiciennes. Dans une Assemblée aussi fragmentée, c'est impossible.

Reviennent enfin deux noms qui paraissent être les clefs de ce moment politique. Il s'agit de Bernard Cazeneuve et François Bayrou. Cela a été déjà évoqué par Daniel Cohn-Bendit dès le 1
er décembre 2024 sur LCI : François Bayrou serait en train de constituer un gouvernement resserré autour de plusieurs personnalités représentatives du front républicain. Concrètement, les deux hommes se sont rencontrés récemment et ce 6 décembre 2024, Bernard Cazeneuve a affirmé que François Bayrou ferait un très bon Premier Ministre. Rappelons d'ailleurs que l'ancien Premier Ministre socialiste a été l'invité de François Bayrou à l'université de rentrée du MoDm le 29 septembre 2024 à Guidel. Enfin, François Bayrou a déjeuné avec Emmanuel Macron le 5 décembre 2024, au lendemain de la censure et juste avant l'allocution présidentielle.
 


En quoi François Bayrou pourrait-il être l'homme de la situation ? D'abord, son expérience, équivalente à celle de Michel Barnier, avec moins d'international et plus de politique intérieure, et une différence de taille : il a été peu au gouvernement, mais il a été trois fois candidat à l'élection présidentielle, dont une fois en 2007 où il avait suscité beaucoup d'espoir en frôlant la qualification au second tour. Son positionnement a souvent été courageux : loin de se laisser enfermer dans l'UMP en 2002, il a perdu de nombreuses occasions d'être ministre entre 2002 et 2012, par son refus de soutenir Nicolas Sarkozy.

À Emmanuel Macron, il est quasiment le seul responsable politique suffisamment proche mais aussi suffisamment indépendant d'esprit pour dire franchement ses quatre vérités. Emmanuel Macron lui doit aussi sa première élection grâce au ralliement du président du MoDem. Refusant de voter pour Nicolas Sarkozy en 2007, votant pour François Hollande en 2012 (une sacrée erreur, et il n'a reçu qu'ingratitude de le part du nouvel élu), soutenant Emmanuel Macron en 2017, et encore récemment, dans la discussion budgétaire, le MoDem a pris souvent des positions de gauche, il est le plus apte à mettre d'accord des personnalités de droite et de gauche, car il n'est ni l'un ni l'autre.

L'épisode de février 2024 est un peu oublié, c'est pourtant récent, et peut s'expliquer à la lumière des événements actuels. François Bayrou, acquitté par la justice, blanchi avec l'honneur retrouvé, pouvait revenir au gouvernement à un moment où l'on cherchait un nouveau Ministre de l'Éducation nationale. Or, le haut commissaire du plan avait obstinément refusé de rentrer au gouvernement, préférant se mettre en réserve pour plus tard.

Enfin, François Bayrou garde une autre caractéristique : il est également lepénocompatible, ce qui pourrait paraître très surprenant. Toute sa vie politique a montré qu'il ne transigeait pas sur les valeurs et qu'il a toujours combattu l'extrême droite, mais toujours sur le terrain politique et pas sur le terrain moral. Ainsi, il a aidé Marine Le Pen à recueillir des parrainages pour se présenter à l'élection présidentielle de 2022 en lui apportant le sien et celui d'une trentaine d'élus du MoDem. Par ailleurs, il a aussi déploré qu'une décision de justice puisse empêcher la leader du RN d'être candidate à la prochaine élection présidentielle, d'autant plus qu'il ressent une certaine solidarité à cause du procès des assistants parlementaires, même s'il correspond à des sommes dont les montants n'ont rien à voir avec ceux du procès du MoDem.


 


Disons-le clairement : François Bayrou rêverait de devenir ce Premier Ministre de consensus qui consacrerait toute sa vie politique. Longtemps persuadé qu'il serait élu Président de la République (le cynique François Mitterrand le lui avait dit dans l'oreille dans les années 1990, et il l'avait cru !), il est prêt depuis longtemps à diriger la France. Un peu comme Ségolène Royal mais à la grande différence que le maire de Pau a des troupes, un groupe politique à l'Assemblée, et surtout, il a une cohérence politique sur le long terme dont peu de responsables politiques peuvent se vanter.

Je ne suis pas d'accord sur tout ce que dit François Bayrou, en particulier, je suis fondamentalement opposé à la proportionnelle et ce serait une faute grave de vouloir l'instaurer en ces moments troubles (j'y reviendrai), mais je pense qu'il est l'homme de la situation parce qu'il n'y a plus d'autres personnes prêtes à remonter les manches sans arrière-pensées présidentielles et avec une volonté sincère d'apaisement. L'intérêt général l'emporte chez lui sur les postures cyniques et irresponsables (et puis, c'est son tour, dans l'ordre alphabétique, après Barnier et avant Cazeneuve !).

Terminons encore par un sourire où l'antimacronisme est servi (et compensé) par le talent d'hilarant, une autre séance de pédopsychothérapie présidentielle, cette fois-ci juste après l'avant-dernière allocution télévisée où le Président a annoncé la fameuse dissolution de l'Assemblée. Par la talentueuse Nicole Ferroni, dont j'adore les prestations même si je ne suis pas du tout d'accord avec elle : le sens de l'humour est un tout, on l'a complètement (à ses risques et périls) ...ou pas du tout.



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (06 décembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le Premier Ministre de la Saint-Nicolas.
Emmanuel Macron face à ses choix.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
L'émotion de censure de Michel Barnier.
La collusion des irresponsables.
Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
PLF 2025 : la majorité de rejet !
Michel Barnier : déjà deux mois !
François Guizot à Matignon ?
5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
Doliprane : l'impéritie politique.
Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.









https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241206-premier-ministre.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-premier-ministre-de-la-saint-258004

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6 décembre 2024 5 06 /12 /décembre /2024 03:32

« Si j’ai toujours assumé toutes mes responsabilités, une bonne chose comme parfois les erreurs que j’ai pu faire, je n’assumerai jamais l’irresponsabilité des autres, et notamment des parlementaires qui ont choisi en conscience de faire tomber le budget et le gouvernement de la France, à quelques jours des fêtes de Noël. » (Emmanuel Macron, le 5 décembre 2024).




 


Le Président de la République Emmanuel Macron s'est adressé aux Français ce jeudi 5 décembre 2024 à 20 heures au cours d'une allocution télévisée (dont on peut lire le texte intégral ici).

Passons rapidement aux pseudo-polémiques : fallait-il qu'il parlât ? pourquoi n'a-t-il rien dit d'essentiel ? Comme le sport national depuis 2017, c'est de dénigrer du Macron (tout est bon dans le Macron pour le dénigrer !), quoi que fasse ou dise ou ne dise pas ou ne fasse pas Emmanuel Macron sera un sujet d'insatisfaction, de critique, de reproche. Il ne se serait pas adressé aux Français, on le lui aurait reproché.


À la première question, donc : oui, bien sûr. C'était même très important. L'adoption d'une motion de censure est un événement institutionnel majeur et exceptionnel dans notre histoire, et seul, le Président de la République, garant de la stabilité des institutions et de la continuité de l'État, pouvait s'adresser aux Français pour les rassurer et aussi pour leur donner des perspectives d'avenir.

Emmanuel Macron n'avait plus parlé aux Français de la situation politique depuis le 23 juillet 2024, avant les Jeux olympiques et paralympiques et surtout avant la nomination du gouvernement Barnier. Au contraire de son tempérament, il a gardé le silence et laissé Michel Barnier et l'Assemblée gouverner tant bien que mal, sans y mettre son grain de sel en public (hors micro, je doute qu'il n'ait pas tenté d'influencer certaines choses). On ne peut donc pas dire que l'expérience Barnier, d'une manière ou d'une autre, a été "polluée" par des initiatives hasardeuses de l'Élysée, il a laissé une très grande autonomie au Premier Ministre. En revanche, dans ce moment particulier de crise politique, il fallait qu'il parlât aux Français.

Pourquoi n'a-t-il rien dit d'essentiel ? En quelque sorte, il a écouté Marine Tondelier, secrétaire nationale de EELV, qui lui suppliait le matin de ne pas donner le nom du futur Premier Ministre au cours de cette allocution, pour éviter le réflexe jupitérien. C'est ce qu'il a fait, dont acte. Il a préféré se donner un peu de temps pour que les lignes bougent par rapport à cet été.

Alors, qu'a-t-il dit vraiment ?

Cinq choses.

D'abord, Emmanuel Macron a remercié Michel Barnier et son gouvernement. C'était une bien dangereuse aventure que celle-ci. Michel Barnier lui-même avait remercié à Matignon, la veille, ses ministres, remercié d'avoir fait partie de cette aventure si périlleuse. Il faut noter que les ministres qui avaient des mandats d'exécutifs locaux avaient pu les conserver, et donc, ils vont les retrouver. Certains seront peut-être reconduits, ou pas, au gouvernement. Ce remerciement présidentiel n'est pas anodin, Michel Barnier n'avait rien de macroniste : « Je veux ici remercier Michel Barnier pour le travail qu’il a accompli pour le pays, pour son dévouement et pour sa pugnacité. Lui comme ses ministres se sont montrés à la hauteur du moment quand tant d’autres ne l’ont pas été. ».
 


Ensuite, le Président de la République a rappelé une évidence : il est responsable de la dissolution de l'Assemblée et il l'a toujours assumé : « Je dois bien le reconnaître cette décision n’a pas été comprise. Beaucoup me l’ont reprochée et je sais, beaucoup continuent de me le reprocher. C’est un fait et c’est ma responsabilité. Cependant, nul ne peut dire qu’en faisant cela, je ne vous ai pas redonné la parole. Je crois que c’était nécessaire. ».

Mais il n'est pas responsable de ses conséquences, à savoir, du vote des Français : « Vous avez pris vous-même votre responsabilité en allant massivement voter aux élections législatives en juin et juillet dernier. Et ce vote ainsi que les désistements réciproques décidés par plusieurs partis ont composé une Assemblée Nationale sans majorité. Aucun parti, aucune coalition présentée aux électeurs en effet ne peut prétendre avoir seul la majorité. et cette situation exige une nouvelle organisation politique. C’est inédit mais c’est ainsi. ». Il a bien rappelé que son choix du Premier Ministre était le résultat du vote et qu'ensuite, il l'avait laissé gouverner : « Mon choix s’est porté sur Michel Barnier, un responsable d’expérience jusqu’alors dans l’opposition. Parce qu’il était en effet susceptible de rassembler la majorité la plus large à l’Assemblée et au Sénat, de la droite républicaine au centre, en passant par les radicaux et les forces indépendantes et des territoires. J’ai laissé le Premier Ministre gouverner, le Parlement légiférer. ».


Sur la situation politique actuelle au lendemain de la censure, Emmanuel Macron a rejeté fermement la responsabilité, ou plutôt, l'irresponsabilité sur les forces politiques en jeu : « [Le gouvernement Barnier] a été censuré, ce qui est inédit depuis soixante ans, parce que l’extrême droite et l’extrême gauche se sont unies dans un front anti-républicain et parce que des forces qui hier encore gouvernaient la France ont choisi de les aider. Je sais bien que certains sont tentés de me rendre responsable de cette situation, c’est beaucoup plus confortable. Mais si j’ai toujours assumé toutes mes responsabilités, une bonne chose comme parfois les erreurs que j’ai pu faire, je n’assumerai jamais l’irresponsabilité des autres, et notamment des parlementaires qui ont choisi en conscience de faire tomber le budget et le gouvernement de la France, à quelques jours des fêtes de Noël. ».

Cette dernière phrase est sans doute la plus importante de l'allocution et vise bien sûr les socialistes qui ont joué un jeu dangereux, irresponsable et cynique : « Pourquoi tous ces députés ont-ils agi ainsi ? Ils ne pensent pas à vous, à vos vies, à vos difficultés, à vos fins de mois, à vos projets. Soyons honnêtes. Ils ne pensent qu’à une seule chose : à l’élection présidentielle. Pour la préparer, pour la provoquer, pour la précipiter. Et cela avec le cynisme, si c’est nécessaire, et un certain sens du chaos. ».

Troisième point, justement, la prochaine élection présidentielle : non seulement la démission du Président ne résoudrait rien mais elle irait à l'encontre de la volonté populaire de 2022. Oui, les journalistes présentent tellement mal les choses, plus par paresse intellectuelle qu'arrière-pensées politiques, mais il était important, même si un peu tardif, que le Président de la République rappelât quelques évidences : « D’abord ils se gardent bien de vous rappeler la réalité de notre Constitution ; quoi qu’il advienne, il ne peut pas y avoir de nouvelles élections législatives avant dix mois. Et dans ces conditions, l’Assemblée a le devoir de faire ce pour quoi vous l’avez élue : travailler ensemble, au service de la France et des Français. Ensuite, personne, ne peut en fait se permettre d’attendre, pour agir, pour être utile. Le monde, l’Europe avancent et nous avons besoin d’un gouvernement qui puisse décider et trancher. Enfin le mandat que vous m’avez démocratiquement confié est un mandat de cinq ans, et je l’exercerai pleinement jusqu’à son terme. Ma responsabilité exige de veiller à la continuité de l’État, au bon fonctionnement de nos institutions, à l’indépendance de notre pays, et à votre protection à tous. Je le fais depuis le début, à vos côtés, à travers les crises sociales, l’épidémie de covid 19, le retour de la guerre, l’inflation et tant d’épreuves que nous avons partagées. ».


 


La suite ? C'est le quatrième point. Calendrier et objectif : « Je nommerai donc dans les prochains jours un Premier Ministre. Je le chargerai de former un gouvernement d’intérêt général représentant toutes les forces politiques d’un arc de gouvernement, qui puissent y participer ou à tout le moins qui s’engagent à ne pas le censurer. Le Premier Ministre aura à mener ces consultations et former un gouvernement resserré à votre service. ».

Le fait d'avoir parlé des "prochains jours" au pluriel laisserait entendre que la nomination n'interviendrait pas avant lundi prochain, sachant que ce week-end est consacré à la réouverture de Notre-Dame de Paris et de la rencontre des dizaines de chefs d'État et de gouvernement, en particulier Donald Trump et Volodymyr Zelensky. La précision de "l'arc républicain", qui n'est pas défini, est importante, elle signifie a priori que les socialistes sont conviés à entrer au prochain gouvernement tandis que dans tous les cas, avec ou sans participation, le groupe Les Républicains a déjà annoncé dans la matinée du jeudi qu'il ne censurerait pas la prochain gouvernement. Un petit mot aussi sur le qualificatif "d'intérêt général" : c'est le propre de chaque gouvernement d'être d'intérêt général. Pas un gouvernement, en principe, n'est censé se préoccuper d'intérêts particuliers, il est toujours d'intérêt général.

Dans la foulée de la nomination du nouveau gouvernement qui devrait quand même être rapide (au contraire de cet été), Emmanuel Macron a donné les urgences pour ne pas inquiéter les partenaires financiers de la France qui va devoir bientôt emprunter 300 milliards d'euros pour renouveler sa dette. Le Président de la République a donc voulu rassuré avec les outils qui se présentent dans les institutions : vote d'une loi spéciale pour permettre de passer le début d'année sans budget puis vote des lois de finances pour 2025 en janvier prochain : « Les services publics fonctionneront, les entreprises pourront travailler, nos obligations seront tenues, nos maires pourront évidemment là aussi continuer de fonctionner, je les remercie encore de leur dévouement pour la Nation. ».

Emmanuel Macron a cité en particulier cinq domaines où le vote d'un nouveau budget était crucial : « pour permettre au pays d’investir comme c’était prévu, pour nos armées, notre justice, nos forces de l’ordre, mais aussi aider nos agriculteurs en difficultés qui attendaient ce budget ou venir en soutien de la Nouvelle-Calédonie ». L'évocation de la Nouvelle-Calédonie, en grandes difficultés depuis le printemps dernier, est intéressante et certains pourraient y voir une relation avec le refus de voter la censure d'Emmanuel Tjibaou (membre du groupe communiste), le fils de Jean-Marie Tjibaou, le leader du FLNKS assassiné il y a trente-cinq ans.

Et cinquième et dernier point, après le court terme, l'urgence budgétaire, le moyen terme : « Vous le savez, je ne pourrai pas me représenter en 2027. C’est pourquoi le seul calendrier qui m’importe n’est pas celui des ambitions, c’est celui de notre Nation, au fond celui qui compte pour vous, pour nous. Nous avons devant nous trente mois, trente mois jusqu’au terme du mandat que vous m’avez confié. Trente mois pour que le gouvernement puisse agir. Agir pour faire de la France un pays plus fort et plus juste : innover, produire, investir dans les transitions technologiques et environnementales, instruire nos enfants et nos jeunes, prévenir et soigner, protéger. Au moment où les guerres en Europe et au Moyen-Orient nous déstabilisent, continuer de préparer nos armées mais aussi toute la société, et agir pour la paix. Avoir une France plus forte dans une Europe plus forte, plus indépendante et prête peut être à de nouveaux conflits et à résister à toutes les pressions. ».

 


Face à la situation apocalyptique de la vie politique française, Emmanuel Macron a voulu, dans sa conclusion, apporter une autre vision de la France aux Français : « Regardez, samedi, devant le monde entier, nous allons célébrer la réouverture au public de Notre-Dame-de-Paris. La cathédrale sera rendue aux Parisiennes et aux Parisiens, à nous tous, aux catholiques du monde entier et aux cultes. Et ce chantier qu’on croyait impossible, rappelez-vous, nous tous, ce soir d’avril 2019. Eh bien nous l’avons fait. Comme nous avons réussi nos Jeux olympiques et paralympiques. Nous l’avons fait car il y a eu un cap clair, une volonté et parce que chaque femme et chaque homme ont travaillé dur : responsables publics, fonctionnaires, salariés, compagnons, bénévoles… chacun a eu un rôle essentiel pour une cause plus grande que nous tous. C’est la preuve que nous savons faire de grandes choses, que nous savons faire l’impossible Et d’ailleurs le monde entier, à deux reprises cette année nous admire pour cela. Eh bien c’est la même chose qu’il faut pour la Nation : avoir un cap clair pour ces trente mois : l’école, la santé, la sécurité, le travail, le progrès, le climat, l’Europe. ».

C'est essentiel que le Président de la République puisse donner une vision optimiste de la France et positive de son avenir. Nous, Français, manquons cruellement de confiance en nous, nous pensons que nous sommes incapables de grandeur et surtout, nous attendons que ce soient nos dirigeants qui doivent être grands : mais un grand pays, ce n'est pas seulement un pays dont les dirigeants font de grandes choses (la classe politique a, à cet égard, cette grande faiblesse de l'irresponsabilité et du cynisme), c'est aussi aux citoyens eux-mêmes d'être grands par eux-mêmes et de montrer l'exemple. C'est le sens de cette conclusion présidentielle, il ne faut aussi s'investir personnellement : « Partout où elle est fragilisée, rebâtir la Nation ; partout où il y a des emportements de l’insulte, remettre de la sagesse et partout où il y a de la division vouloir l’unité ; partout où les uns cèdent à l’angoisse, vouloir l’espérance. ».

Depuis quatre mois, cette parole présidentielle manquait beaucoup aux Français pour remettre quelques horloges à l'heure. Et d'ailleurs, conséquence presque cocasse de la censure, les censeurs ne le voulaient certainement pas, Emmanuel Macron est redevenu le maître des horloges. Étonnant, non ?

Allez, pour sourire et parce que l'humour est toujours indispensable quand il y a tension, en vidéo à la fin de cet article, un vision différente de cette allocution par l'humoriste psychologue Nicole Ferroni...



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Sylvain Rakotoarison (06 décembre 2024)
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Pour aller plus loin :
Emmanuel Macron face à ses choix.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
L'émotion de censure de Michel Barnier.
La collusion des irresponsables.
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Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
PLF 2025 : la majorité de rejet !
Michel Barnier : déjà deux mois !
François Guizot à Matignon ?
5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
Doliprane : l'impéritie politique.
Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.






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4 décembre 2024 3 04 /12 /décembre /2024 20:46

« Voter la motion de censure aggraverait la crise démocratique. En effet, que vont penser les Français d’une Assemblée Nationale incapable d’adopter une loi de finances et une loi de financement de la sécurité sociale ? Le rejet de la démocratie parlementaire peut déboucher sur un régime autoritaire. Le dernier sondage Ipsos rappelle que seulement 22% des Français font encore confiance aux députés de la nation, quand 63% considèrent le personnel politique comme corrompu, 78% comme non représentatif et 83% comme agissant pour ses intérêts personnels. C’est une catastrophe démocratique. (…) Seul un large rassemblement de l’arc républicain permettrait de gouverner notre pays en évitant les risques liés à des solutions extrêmes. » (Charles de Courson, le 4 décembre 2024 dans l'hémicycle).




 


Charles de Courson n'a pas été écouté. Sans surprise. La motion de censure déposée par 185 députés de la nouvelle farce populaire (NFP) le 2 décembre 2024 à la suite de l'utilisation de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution a été adoptée ce mercredi 4 décembre 2024 à 20 heures 26 par 331 députés. Le Premier Ministre Michel Barnier va donc remettre la démission de son gouvernement au Président de la République le 5 décembre 2024 à 10 heures à l'Élysée. Emmanuel Macron s'adressera aux Français le même jour à 20 heures.

Bien que prévisible depuis trois jours, des députés du socle commun ont tenté d'éviter l'inéluctable en pensant pouvoir faire changer d'avis certains députés socialistes. C'était peine perdue : avec 331 voix, la motion de censure a très largement dépassé le seuil pour être adoptée, à savoir 288 (il y a deux sièges vacants actuellement).


Non seulement la gauche a suivi les insoumis dans leur excitation politicienne (71 FI sur 71, 65 PS sur 66, 38 EELV sur 38, 16 PCF sur 17), mais le RN et ses alliés ont rejoint l'extrême gauche dans leur désir de désordre institutionnel (123 RN sur 124, 16 ciottistes sur 16) ainsi que 1 député LIOT sur 23 et 1 non-inscrit. Il faut bien intégrer que parmi les votants de cette motion de censure contre Michel Barnier, il y a un ancien ami politique de Michel Barnier, Éric Ciotti, et aussi un ancien Président de la République François Hollande, censé en principe assurer la stabilité des institutions et pour qui les responsabilités sont un trop vieux souvenir.

 


Comment en est-on arrivé là ? Simplement par la collusion des irresponsables et une sorte de machiavélique complémentarité du cynisme avec l'irresponsabilité. On n'a que la classe politique qu'on mérite et c'est bien le peuple qui a élu les 577 députés de l'actuelle législature.

Évidemment, j'éprouve de la tristesse ce soir, non pas pour Michel Barnier qui avait été à Matignon comme une sorte de divine surprise qui a ponctué sa très longue carrière politique qu'il croyait déjà achevée, mais pour la France, et les Français. La France est un merveilleux pays avec des Français capables d'excellence et d'organisation, et on peut le dire très clairement en 2024 avec l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, et aussi la restauration de Notre-Dame de Paris en cinq ans, saluée par une très grande cérémonie ce samedi 7 décembre 2024, et en même temps, capables d'anachronismes idéologiques, d'auto-dénigrement et de manque de confiance en eux ; les Français font tout pour se mettre des bâtons dans les roues... au grand plaisir de tous ceux qui ne nous veulent pas que du bien.


 


Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, l'une de façon un peu moins véhémente que l'autre, réclament aujourd'hui la démission d'Emmanuel Macron pourtant élu par le peuple, qu'ils disent tant adorer, pour cinq ans. Depuis juillet 2024, Emmanuel Macron ne s'est pas adressé aux Français et a laissé le gouvernement agir à sa guise, mais ce silence médiatique n'a pas suffi à redorer son blason dans les sondages. Il devra trouver les mots pour convaincre un peuple en déshérence et surtout inquiet, inquiet pour lui mais aussi pour son pays dans un contexte international particulièrement en crise.

 


Michel Barnier a vécu sa dernière journée de Premier Ministre avec un certain panache, et il a fait honneur à la France et à son histoire. Hélas pour lui, il n'aura rien marqué dans l'histoire de son pays comme Premier Ministre, sinon d'avoir été le plus bref chef d'un gouvernement de la Cinquième République, avec seulement trois mois d'exercice.

C'est plutôt le fait d'avoir été renversé par une motion de censure qui est historique. On parle de la seconde motion de censure adoptée sous la Cinquième République, la première ayant été adoptée le 5 octobre 1962 contre le premier gouvernement de Georges Pompidou à la suite de la décision de De Gaulle de proposer aux Français d'élire leur Président de la République au suffrage universel direct. Georges Pompidou a été victime d'une conjonction des non, en clair, du syndicat des anciens de la Quatrième République et des proches de l'OAS.

À la différence de Michel Barnier, le cas de Georges Pompidou s'est relativement bien passé : De Gaulle a dissous l'Assemblée, les députés gaullistes étaient persuadés avoir perdu la bataille mais une majorité gaulliste (la première en majorité absolue avec les alliés indépendants) a été élue et Georges Pompidou a été confirmé et a été d'ailleurs le Premier Ministre le plus long de l'histoire républicaine (plus de six ans !).

 


Ce 4 décembre 2024, la situation est complètement différente : le Président de la République a déjà dissous l'Assemblée le 9 juin 2024 et ne pourra pas dissoudre avant le 9 juin 2025, c'est-à-dire dans au moins six mois. Comme en 1962, il n'y a pas de majorité mais cette non-majorité va perdurer encore au moins six mois (que le Président de la République démissionne ou pas, insistons sur ce point).

Le cynisme, c'est Marine Le Pen et ses sbires de l'extrême droite qui votent une motion qui dit explicitement : « Alors qu’une large majorité de nos concitoyennes et concitoyens a fait le choix du barrage à l’extrême droite lors des élections législatives, le Premier Ministre a cédé à leurs plus viles obsessions, avec une nouvelle loi immigration, qui poursuivrait la faillite morale et politique de l’année dernière et une remise en cause de l’Aide Médicale d’État, qui apporte humanité et dignité à ceux qui foulent notre sol et est une mesure essentielle pour tous de santé publique. ». Maso les députés RN ? Non, simplement cyniques : ils n'ont jamais voulu le bien commun, ils n'ont jamais voulu l'intérêt général. Quelles que fussent les concessions du gouvernement Barnier, le RN l'aurait censuré parce que c'est le caprice de la diva qui n'a pas trouvé d'autres réactions pour réagir à sa probable condamnation le 31 mars 2025.

Le cynisme, c'est bien entendu le PS et en premier lieu François Hollande qui a totalement oublié l'intérêt général. J'ai au moins la fierté de n'avoir jamais voté pour cet homme mou et soumis (électoralement) aux insoumis, ce qui me permet de me regarder dans une glace sans jamais avoir honte de mes choix dans l'isoloir. Le cynisme, c'est aussi celui de Boris Vallaud qui a le toupet de dire que le gouvernement Barnier n'a pas tenté de discuter avec le PS alors qu'il avait lui-même refusé toute rencontre et annoncé le dépôt d'une motion de censure avant même que Michel Barnier n'ait ouvert sa bouche et même n'ait nommé son gouvernement !


Voici ce que disait le sénateur Claude Malhuret, toujours pertinent, heureusement lucide et réaliste, le 3 décembre 2024, à l'approche de l'adoption de la motion de censure : « Après avoir voté pendant un mois, souvent ensemble, des mesures irresponsables qui menaient le pays à un budget de faillite, l'extrême gauche et l'extrême droite ont décidé, en alliant leurs voix sur une motion de censure, d'engager la France dans une aventure sans issue. Ils prétendent que ce vote est une simple péripétie, qu'il n'aura pas de graves conséquences. Ils mentent. Et ils savent qu'ils mentent. Il vont plonger le pays dans l'inconnu, sans budget, sans gouvernement et sans majorité. Les premières victimes seront les classes populaires et les classes moyennes qu'ils prétendent défendre, tout comme les entreprises fragiles, les agriculteurs, les retraités. 400 000 foyers nouveaux paieront l'impôt sur le revenu, 17 millions d'autres verront celui qu'ils paient déjà augmenter. La hausse des taux d'intérêt rendra insoutenable la dette de l'État et plombera tous les acteurs économiques. Les investisseurs qui avaient retrouvé confiance en la France repartiront. De la part de la France insoumise, rien d'étonnant. Leur but depuis toujours est la chute du régime et de la démocratie. Cette motion de censure n'est que la suite logique de la bordélisation de l'Assemblée Nationale et du discrédit du Parlement qu'ils organisent depuis des années. Pour le Rassemblement national, la farce de la dédiabolisation et des députés cravatés vient d'exploser en plein vol. Ils sont prêts à mettre le chaos dans le pays pour détourner l'attention de leurs turpitudes financières pour lesquelles leur patronne est menacée d'inéligibilité devant un tribunal. Il faut qu'ils n'aient aucune dignité pour s'apprêter à voter une motion de censure dont le texte les insulte copieusement. Que les populistes mêlent leurs voix une fois de plus n'est pas une surprise. Ils sont d'accord sur tellement de choses : la haine de l'Europe, de l'OTAN, de la démocratie, l'anti-américanisme, le soutien à tous les dictateurs et, chez nous, l'obsession de saborder la Cinquième République et toutes ses institutions et tous ses dirigeants. La surprise, et même l'effarement, est de voir un parti jusqu'alors respectable qui comptait dans ses rangs un ancien Président de la République se prêter à ce scénario délétère. Depuis 2022, le PS n'est que l'ombre de lui-même. Pour le plat de lentilles de quelques circonscriptions, il a vendu son âme à une secte gauchiste qui a sombré depuis les massacres du 7 octobre dans l'antisémitisme et le soutien aux islamistes. Ses dirigeants s'apprêtent, contre l'avis d'une bonne partie de leurs adhérents, à plonger le pays dans une crise qui fera le malheur de tous les Français et le bonheur de deux factions populistes qui les détestent. Il ne leur reste que quelques heures pour se raviser et ne pas mêler leurs voix à une manœuvre dont les conséquences laisseront une tache sur leur écharpe tricolore. Chacun va devoir prendre ses responsabilités. Pour ma part, ma conviction est claire : dans la période de grande incertitude où nous vivons, entourés de dictateurs dans le monde, de régimes illibéraux en Europe et de l'imprévisibilité de l'Amérique, la France a besoin de stabilité et d'apaisement. La question qui se pose aujourd'hui à l'ensemble des responsables politiques est simple : choisir entre les calculs de boutiquiers et l'intérêt général. ».

 


Je reviendrai plus longuement sur cette journée qui restera dans les annales de la République comme une journée noire. Les responsables du socle commun n'ont pas non plus beaucoup soutenu le gouvernement Barnier dans les médias ces derniers jours et c'est aussi ce manque d'enthousiasme et cette focalisation vers la cohésion interne qui ont empêché Michel Barnier de prendre en compte les propositions de l'ensemble des députés.

Inutile d'énumérer les noms qui circulent pour les potentiels successeurs de Michel Barnier : le choix du Président de la République, qui devra être rapide, sera entre reprendre un socle commun bloc central et LR et aller vers la gauche. Dans le premier cas, le RN resterait toujours en position de maître-chanteur et les mêmes causes faisant les mêmes effets, il y aurait un grand risque qu'une motion de censure soit adoptée dans les semaines qui suivent la nomination du nouveau gouvernement. Dans le second cas, il y aurait quand même un préalable qui paralyse actuellement tout : il faut que le PS ait le courage de quitter cette alliance insensée avec les insoumis qui eux ne veulent pas du tout la responsabilité, mais détruire nos institutions et notre république, au prix d'une paix civil et même civilisationnelle.

Merci à Michel Barnier, la République vous salue, mais nul n'est tenu à être un super-héros dans ce microcosme de voyous et de menteurs. On parlera de l'expérience Barnier, à défaut d'autre chose. Restera une citation proposée par le Premier Ministre avant de quitter les lieux, elle est de Saint-Exupéry : « Chacun est responsable de tous. Chacun est seul responsable. Chacun est seul responsable de tous. ». À méditer.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (04 décembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
L'émotion de censure de Michel Barnier.
La collusion des irresponsables.
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Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
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Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
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Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.

 



https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241204-censure.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/l-emotion-de-censure-de-michel-257975

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2 décembre 2024 1 02 /12 /décembre /2024 03:29

« J’ai entendu parler d’une épée de Damoclès qui pèserait sur la tête du gouvernement mais la véritable épée de Damoclès, est dès aujourd’hui là sur la tête de la France et des Français et faute d’actions, faute de courage maintenant, je suis sûr d’une chose : elle pèsera beaucoup plus gravement demain sur nos enfants et nos petits-enfants. La véritable épée de Damoclès, c’est notre dette financière colossale : 3 228 milliards d’euros. Si l’on n’y prend garde, elle placera notre pays au bord du précipice. (…) Il y a une autre épée de Damoclès, tout aussi redoutable, celle de la dette écologique. Nous n’héritons pas la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants. » (Michel Barnier, le 1er octobre 2024 dans l'hémicycle).



 


Dans une perspective de récession en Allemagne, mais surtout, d'instabilité politique durable en Allemagne (de nouvelles élections législatives sont prévues pour le 23 février 2025), la situation politique française est observée très attentivement par le monde. Cette semaine, et probablement les semaines à venir, vont être cruciales non seulement pour le gouvernement Barnier, mais aussi pour l'avenir économique de la France.

L'enjeu est très important : serons-nous, Français, dans la situation de la Grèce en 2010 ou en 2015 ? Notre super-endettement sera-t-il encore absorbé par la confiance que les milieux financiers portent à la France ? Pour l'instant, le Premier Ministre Michel Barnier s'est assez bien débrouillé. Il a su convaincre la Commission Européenne, et je pense qu'il était le seul Premier Ministre possible à pouvoir le faire, que la trajectoire budgétaire, même si elle a pris un peu de retard, restait dans la bonne direction et que la France ne sera pas sanctionnée pour manquement à ses engagements (ce n'est pas la dictature de Bruxelles, il s'agit ici de la parole de la France à honorer).


Petite cerise sur le gâteau, l'agence de notation Standard & Poor's n'a pas abaissé la note de confiance de la France ce vendredi 29 novembre 2024, ce qui montre que la crédibilité financière de la France reste intacte malgré toutes les difficultés. En effet, l'agence a communiqué : « Malgré l'incertitude politique, nous nous attendons à ce que la France se conforme avec un délai au cadre budgétaire européen et consolide progressivement ses finances publiques. ».

Le renversement du gouvernement Barnier et donc le rejet du projet de loi de finances, c'est-à-dire le vote d'une motion de censure, serait un événement qui mettrait en danger la crédibilité de la France et même de l'Europe alors qu'il n'y existe plus beaucoup de pôle stable. Le scénario catastrophe peut être envisagé mais le pire n'est jamais sûr non plus, et c'est important de résister aux défaitismes ambiants.

Par exemple, quand les journalistes disent avec une panique surjouée (ça va faire de l'audience) que la France désormais emprunte de l'argent au même taux d'intérêt que la Grèce, à savoir 3%, ils oublient de dire que c'est le taux d'intérêt de 2024, pas celui de 2010 qui devait être (je n'ai pas vérifié) entre 15 et 20% ! Entre-temps, la Grèce a adopté une politique pour le coup qu'on peut appeler d'austérité, qui n'a rien à voir avec le budget à peine rigoureux présenté depuis deux mois par Michel Barnier.


A priori, le RN a annoncé qu'il voterait une motion de censure. Rien ne dit que c'est la même motion de censure que celle que déposera inévitablement la nouvelle farce populaire (NFP) puisque dans les motions de censure, il y a les motivations qui déterminent la politique que les signataires veulent conduire, or le RN est loin du NFP en termes programmatiques.
 


En revanche, on peut se demander quelle est la motivation réelle de Marine Le Pen à vouloir censurer le gouvernement. Jusqu'à maintenant, elle avait adopté une attitude responsable afin de montrer que son parti était en mesure de gouverner bientôt la France. Cela a été un très lent processus, qui a commencé dès son accession à la tête du FN le 16 janvier 2011. En votant une motion de censure alors que le gouvernement a reculé sur le pouvoir d'achat en renonçant à augmenter la taxe sur l'électricité (soit dit en passant, ce n'est pas augmenter, mais c'est supprimer la réduction de la taxe qu'avaient voulue les gouvernements précédents pour faire face à l'inflation), le RN risquerait fort de ne plus être compréhensible. D'ailleurs, Jordan Bardella serait plutôt sur la ligne de responsabilité au contraire de sa mentor.

On peut imaginer que Marine Le Pen sente sa carrière cramer à court terme avec sa probable condamnation le 31 mars 2025. Alors, elle peut jouer comme Jean-Luc Mélenchon et vouloir la tactique du chaos pour bénéficier d'une élection présidentielle anticipée. Mais il ne faut pas qu'elle se leurre, même en cas de démission du Président de la République (fort peu probable, mais la dissolution était tout aussi improbable), l'élection présidentielle ne serait pas organisée avant avril ou mai 2025, soit après une possible condamnation et inéligibilité exécutoire immédiatement. On peut alors imaginer plutôt une politique de la terre brûlée, ce qui est très étrange pour le RN à qui il manquait encore des électeurs de responsabilité pour atteindre une majorité absolue.

Je ne suis pas madame Soleil ni madame Irma, et donc, à part dire que le pire n'est jamais certain, je suis bien incapable de prédire l'avenir politique très proche, avec un élément à prendre en compte, du 2 au 4 décembre 2024, le Président de la Républiqe sera absent du territoire français puisqu'en visite d'État en Arabie Saoudite.


En revanche, je voudrais revenir sur ce qu'on entend depuis une semaine (depuis cinq mois en fait) sur les institutions et sur les critiques contre Emmanuel Macron. Comme 99,999% de la population, je n'ai pas compris la dissolution le 9 juin 2024 et j'ai été particulièrement choqué par celle-ci, sidéré plutôt, mais il ne faut pas exagérer : une dissolution, c'est le retour au peuple, c'est redonner la parole au peuple et s'il n'avait pas dissous, Emmanuel Macron aurait été critiqué de ne pas l'avoir fait, d'autant plus que le RN hurlait à la dissolution depuis une bonne année.

 


On a tendance à faire des comparaisons avec De Gaulle. Comparaison n'est jamais raison et puis, De Gaulle était De Gaulle et personne ne l'est dans la classe politique depuis 1970, il ne faut donc pas, là non plus, exagérer : la démission de De Gaulle le 28 avril 1969, c'était aussi la retraite anticipée d'un vieillard de 78 ans (âge qu'aura Jean-Luc Mélenchon au milieu du prochain quinquennat), il s'est sabordé lui-même, car il savait très bien où il allait quand il a annoncé son référendum. Mais surtout, personne ne l'a contraint à démissionner, c'était un choix personnel sans pression extérieure, celui d'un vieux monsieur qui a fait l'histoire et qui ne comprenait plus son pays depuis une année (mai 68).

De plus, la comparaison avec la pratique institutionnelle de De Gaulle s'arrête généralement à sa démission, mais c'est incomplet, on oublie aussi qu'il a dissous deux fois l'Assemblée, une fois en 1962 à une époque où les députés gaullistes ont considéré que c'était de la folie et anticipaient un désastre électoral majeur (qui n'a heureusement pas eu lieu), et une seconde fois en 1968 à une époque où c'était le "foutoir" de mai 68. Les deux "paris" de De Gaulle ont été gagnés, mais ils auraient pu être perdus, et dans ce cas, la faute n'en aurait pas été imputable à De Gaulle mais au peuple qui a voté.


D'autres Présidents de la République ont subi de graves revers électoraux, parfois très graves, et j'en citerai deux : François Mitterrand, le 16 mars 1986 et surtout le 28 mars 1993, deux échecs de son parti aux élections législatives, et Jacques Chirac, le 1er juin 1997, échec aux élections législatives (provoquées par une dissolution !) et le 29 mai 20065, échec du référendum sur le TCE. Aucun de ces deux Présidents de la République n'a démissionné et personne, à part quelques excités du bocage, n'a réclamé leur démission.

En 2024, Emmanuel Macron a fait mieux (et pas pire) que Jacques Chirac en 1997. À l'évidence, il n'a pas réussi puisqu'il a obtenu moins de sièges de sa majorité à la fin qu'au début, comme en 1997, mais au contraire de 1997, aucune opposition n'a réussi à obtenir une majorité absolue pour autant. C'est cette situation de no-man's-land politique qui rend la situation actuelle très incertaine et, répétons-le, elle ne finirait pas avec la démission du Président de la République puisqu'il serait constitutionnellement impossible de dissoudre avant une année (s'il y avait bien une réforme institutionnelle à faire, ce serait de réduire ce délai).


Le seul message clair des électeurs le 7 juillet 2024, c'est qu'ils ne voulaient pas d'un gouvernement dirigé par le RN alors que tous les prescripteurs d'opinion le pronostiquaient. Et c'était donc aux groupes qui ont fait élire leurs députés sous cette bannière du front républicaine de s'entendre pour gouverner. Au lieu de cela, Jean-Luc Mélenchon a pris en otage toute la gauche, et celle-ci, curieusement, s'est laissée faire. Cela coûtera très cher à la France.

Car le plus sot (on ne prête qu'aux riches), c'est qu'on impute à Emmanuel Macron une responsabilité qu'il n'a pas. Il a eu la responsabilité de dissoudre l'Assemblée mais c'est sa décision souveraine et constitutionnelle et personne n'a à la discuter, éventuellement on peut la commenter, mais c'était son droit souverain et constitutionnel de dissoudre. En revanche, on ne peut pas le rendre responsable du résultat des élections législatives de 2024 : ce sont les Français, souverainement, démocratiquement, par leur vote libre, sincère et secret, qui ont donné à la France cette Assemblée impossible.

Ce n'est pas Emmanuel Macron qui a mis les institutions en surpression, ce n'est même pas les institutions qui l'ont voulu alors que les constituants de 1958 avaient tenté de chercher toutes les causes d'ingouvernabilité, et ils avaient un bon modèle avec la Quatrième République. Mais ils n'ont pas imaginé la situation de 2024. Ce sont les Français qui l'ont voulu, et eux seuls.


Alors, dans cette situation, plus qu'Emmanuel Macron seul qui n'a fait qu'amorcer un processus, je vois le peuple principale cause de cette difficulté à gouverner en choisissant trois forces politiques d'égale représentation (au lieu de deux). Ce choix est là, est un fait. On peut le regretter (tout le monde le regrette), mais quoi faire ? Ce n'est pas destituer Emmanuel Macron ou le pousser à la démission qui résoudra quelque chose, ou alors, dans cette logique, il faudrait plutôt destituer le peuple !

 


Mais je vois un autre responsable, la classe politique dans sa globalité, ou plutôt, celle représentée à l'Assemblée Nationale, l'ensemble des groupes politiques qui montrent une absence totale de responsabilité face aux grands défis qui attendent la France dans une conjecture internationale particulièrement inquiétante au moment où Vladimir Poutine évoque la possibilité d'envoyer des missiles nucléaires en Europe. Et en France, pour d'obscures ambitions présidentielles des uns et des autres, on ergote sur un budget, on veut encore moins travailler, raser encore plus gratis, etc. Société de paresse alors qu'on devrait plutôt remonter ses manches.

Assurément, nous ne sommes plus en 1933 avec l'expression enflammée des extrêmes. C'est déjà du passé. Nous sommes maintenant en 1936, avec les grèves, avec les congés payés, avec l'espoir de la belle vie... sans voir un seul moment que se profilait 1939 et 1940. Décidément, j'ai parfois l'impression que l'histoire repasse les plats, mais alors les plus réchauffés...



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Sylvain Rakotoarison (01er décembre 2024)
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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241201-gouvernement-barnier.html

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6 octobre 2024 7 06 /10 /octobre /2024 03:44

« Par patriotisme, par égard pour nos compatriotes qui souffrent, par respect envers nos institutions, et compte tenu de la tâche ingrate qui vous incombe en ces circonstances, ramasser l’action publique que certains ont laissé choir, je vous le dis, monsieur le Premier Ministre : le mouvement national n’entend pas entraîner le pays vers le chaos, vers cette politique du pire qui est la pire des politiques. Voilà pourquoi le Rassemblement national a fait un choix responsable : refuser de censurer a priori votre gouvernement pour lui donner une chance, si infime soit-elle, d’engager enfin les mesures de redressement nécessaires. » (Marine Le Pen, le 1er octobre 2024 dans l'hémicycle).



 


Contrairement à la rumeur publique, Michel Barnier et ses ministres ne sont pas les otages de Marine Le Pen et de son groupe RN à l'Assemblée Nationale. Le groupe RN et ses alliés ne comptent que 142 députés sur 577 et pour faire adopter une motion de censure, il en faut au moins le double, 289. Illustration par l'absurde : les premiers à tirer, c'est la gauche.

En effet, les 192 membres des partis de la
nouvelle farce populaire (NFP) ont déposé ce vendredi 4 octobre 2024 une motion de censure contre le gouvernement. Sa rédaction semble quasiment sortie d'une école primaire, sur le fond et même sur la forme, puisqu'on y relève quelques fautes d'orthographe (c'est vrai que, dans une sorte de comble de l'idéologie gauchiste, certains de ces députés considèrent que la connaissance de la langue française dépendrait du niveau de son compte en banque ; cela pourrait bien s'appliquer au gourou Jean-Luc Mélenchon).

Les motivations de cette motion de censure reprennent la fable urbaine selon laquelle le NFP aurait gagné les élections : eh bien, non, 192 députés ne constituent pas une majorité, pas même relative. Si cela avait été le cas, le candidat du NFP André Chassaigne aurait été élu au perchoir puisqu'il suffisait, au troisième tour, de n'avoir qu'une majorité relative. Si
Yaël Braun-Pivet a été brillamment réélue, c'est parce qu'une autre coalition, plus importante que le NFP, soutient aujourd'hui le gouvernement, avec une majorité relative très faible, certes, de 213 députés, mais supérieure aux troupes du NFP.

On n'insistera pas sur les nombreux exemples de mauvaise foi politicienne dont est truffé le texte de cette motion de censure, comme le fait que le Président de la République
Emmanuel Macron n'a pas voulu nommer l'inconnue de la dette abyssale de la ville de Paris Lucie Castets à Matignon : « Le Président de la République aurait dû nommer à Matignon la personnalité proposée par le nouveau front populaire. ». Truffé aussi de procès d'intention comme celui-ci : « Michel Barnier semble se contenter de vaines paroles sur la défense de l’environnement et du climat. Ainsi, le ministère de la Transition écologique a par exemple hérité d’un périmètre d’action fortement rogné. ». Ce qui est très maigre pour donner une raison de tuer le gouvernement.

Sur le sujet environnemental, Michel Barnier a déjà répondu à Cyrielle Chatalain, la présidente du groupe écologiste à l'Assemblée : « Madame la présidente Chatelain, vous avez parlé d’effets de manche mais je ne vois pas où vous en avez trouvé dans mon discours. Je n’en ai pas fait et je n’en ferai pas, on dit d’ailleurs souvent de moi, je le sais bien, que je suis trop sérieux et pas marrant. Je me suis exprimé sincèrement et sobrement et je continuerai ainsi. Je suis attentif, vous le savez, à la transition écologique. J’étais même engagé avant vous sur ces questions. (…) Je rappellerai ici que j’ai la fierté d’avoir créé, il y a trente ans, le fonds Barnier, dont il est beaucoup question. Je continue à suivre son développement et je vais avec la ministre compétente augmenter les moyens dont il est doté. J’estime en effet que la prévention coûte toujours moins cher que la réparation et qu’une réparation anticipée et organisée est plus efficace et moins coûteuse qu’une réparation improvisée. ».

Ce qui est désolant avec cette motion de censure, c'est que ceux des députés socialistes supposés s'être opposés à la mainmise des insoumis sur la gauche ont finalement tous signé ce texte de censure, en particulier Jérôme Guedj, Aurélien Rousseau, ancien ministre d'
Élisabeth Borne, et même François Hollande, ancien Président de la République, qui n'a vraiment pas peur de l'humiliation publique. Tous ceux-là viennent de montrer, en s'associant aux délires mélenchonesques, qu'ils ne souhaitent plus gouverner la France, ils ne souhaitent plus être responsables ni crédibles.

Incontestablement, ceux qui risquent de faire sauter le gouvernement Barnier ne sont pas d'extrême droite mais de la gauche ultradicalisée. Si cette gauche ne voulait pas censurer le gouvernement, le RN n'aurait aucun poids politique, ne pourrait rien exiger, puisqu'il serait dans l'incapacité de réunir 289 voix pour faire adopter une motion de censure.


D'ailleurs, il était très instructif (et risible) de voir Manuel Bompard, le représentant des insoumis, sur France 2 le soir du 3 octobre 2024, faire la danse du ventre devant la représentante du RN, la suppliant de voter pour sa motion de censure, alors qu'il se prétend la locomotive du combat contre le RN (sauf quand il a besoin de lui). La réponse a été très claire. Laure Lavalette, députée RN, a rejeté les appels du pied des insoumis : « Je pense que la situation est suffisamment grave pour ne pas censurer en amont déjà ce gouvernement. On va, j'allais dire, donner la chance au produit (…). On ne peut pas ajouter du chaos comme vous le faites. ». Le RN en situation d'être responsable alors que François Hollande joue au pyromane de la République : postures improbables.

Cette motion de censure sera examinée en séance publique l'après-midi du mardi 8 octobre 2024, après l'hommage solennel à
Louis Mermaz, ancien Président de l'Assemblée Nationale, et les questions au gouvernement. Son issue prévisible est le rejet, faute d'avoir convaincu les députés RN de se joindre à la gauche (pour une collusion des non, mais certainement pas pour un gouvernement commun).
 


Mais revenons sur la position du RN qui peut étonner. Marine Le Pen, dans un discours très grandiloquent, écrit avant d'avoir écouté la déclaration de politique générale de Michel Barnier, en a donné quelques éléments de compréhension le 1er octobre 2024.

La chose principale, qui ne coûte pas un rond, c'est d'avoir de la considération : représentante de millions d'électeurs, Marine Le Pen veut que les 142 députés RN et alliés soient reconnus comme tels, comme des élus de la République et soient ainsi respectés comme tels, puissent participer aux concertation, puissent aussi participer à la gestion de l'Assemblée (le 19 juillet 2024, ils ont été exclu du
bureau de l'Assemblée au contraire de la législature précédente qui comptait deux vice-présidents RN de l'Assemblée). Sa revendication a été ainsi formulée : « Je le dis ici de manière solennelle, à l’intention de chacun des ministres, de tout détenteur de l’autorité publique issue de ce gouvernement : nous entendons que les 11 millions de patriotes qui ont voté pour notre coalition d’union nationale soient respectés, que cessent ces attaques inutiles et injustes qui procèdent tant du mépris de classe que de l’intolérance caractéristique des totalitarismes. Ces attitudes n’honorent ni surtout ne servent le pays, son unité, son modèle démocratique. ». Devant les députés, Michel Barnier n'a pas arrêté d'annoncer qu'il écouterait tous les groupes, qu'il n'exclurait aucun groupe politique. Il a donc tout bon !

Sans s'empêcher de fustiger le Président de la République à de nombreuses reprises, Marine Le Pen a voulu se montrer responsable et annoncé qu'elle ne s'opposerait pas pour s'opposer. C'est vrai qu'en procès depuis le 30 septembre 2024, avec vingt-six autres dirigeants du RN, sur une suspicion de fraude de 7 millions d'euros, pour une durée très longue de deux mois, la potentielle candidate du RN préférerait attendre que cette affaire soit oubliée avant un prochain scrutin.

Elle a ainsi interpellé Michel Barnier : « Ma première demande, monsieur le Premier Ministre, est simple : faites preuve de volontarisme dans tous les domaines, et pas seulement dans celui des finances. Il ne s’agit pas de vous concilier votre "aile gauche", votre "aile droite" ou vos "partenaires exigeants", bref, toutes ces périphrases qui vous permettraient de justifier votre inaction par le respect de médiocres équilibres partisans : il s’agit de produire un impact rapidement perceptible par tous les Français. Or, en vous écoutant, j’entends des constats, mais tout de même bien peu de solutions. ».

Voulant montrer sa bonne volonté, Marine Le Pen a encouragé le gouvernement à faire preuve de courage : « Vous avez sur ce point, monsieur le Premier Ministre, une possibilité considérable : sans mandat électif à défendre aujourd’hui ou demain, vous pouvez faire preuve de courage en réalisant les économies dont le gisement a été identifié depuis des années, dans les observations de la Cour des Comptes comme dans d’autres rapports publics portant sur le sujet. Une étude américaine publiée fin 2023 évalue à quatre points de PIB les pertes causées en France par la suradministration. ». Il faudra donc rappeler à ses éventuels électeurs venant de la gauche que le RN est pour restreindre l'intervention de l'État, comme le souhaite également son allié ultralibéral
Éric Ciotti. Ce qui est tout à fait dans la tradition du FN dont le fondateur, son père Jean-Marie Le Pen, voulait supprimer l'impôt sur le revenu.

Elle a même proposé à Michel Barnier les clefs de sa popularité : « Vous le savez, nous avons trois priorités, au sujet desquelles notre vigilance s’exercera de manière accrue : le pouvoir d’achat, l’immigration et la sécurité. Ce faisant, nous vous rendrons service, puisqu’elles correspondent aux exigences des Français et que vos mesures en la matière, peut-être, vous rendront populaire ; la France aussi y trouvera son intérêt, puisque ces urgences, trop longtemps négligées, ne peuvent plus l’être davantage. ».

La dirigeante du RN a donc donné sa règle du jeu très clairement, les trois « lignes rouges sur lesquelles notre groupe pourrait, demain, fonder un vote de censure ». C'est habile : elle n'a réduit sa "surveillance" que sur trois sujets et pas plus, parce qu'elle veut obtenir des avancées concrètes sur les mesures que proposera le gouvernement. En cela, elle joue le jeu de l'écoute et de la coconstruction de la loi quand la gauche joue l'opposition systématique et l'obstruction (jusqu'à vouloir
destituer le Président de la République pour des raisons de cour de récréation).


La première ligne rouge : baisser la pression fiscale


Le choix des priorités du RN est intéressant : « La première d’entre elles réside dans l’évolution de la pression fiscale, déjà insupportable, qui s’exerce sur les Français, en particulier sur les classes populaires et moyennes. Toute hausse d’impôt touchant les plus fortunés, entreprises ou ménages, devra être compensée par du pouvoir d’achat rendu à nos concitoyens modestes, qui travaillent et ont vu leur reste à vivre fondre depuis trois ans. ».

Le meilleur moyen de réduire le déficit, pour le RN, est donc de s'attaquer aux dépenses publiques, ce qui, pour de nombreux membre de la majorité, est du bon sens (mais n'est pas facile à pratiquer). Elle a même apporté son soutien à venir pour toutes les décisions courageuses de réduction des dépenses : « Soyez-en sûr : dans cette mission, nos députés ne vous seront pas des obstacles, mais des soutiens, si vous savez faire preuve de courage. ». Le gouvernement n'en demandait pas tant !


La deuxième ligne rouge : baisser la pression migratoire

Sans surprise, après le pouvoir d'achat, l'immigration est le thème par excellence du RN pour racoler des électeurs (et il y parvient !) : « Notre deuxième ligne rouge serait l’absence du sursaut migratoire, sécuritaire et pénal qu’attendent des millions de Français. Nous vous demandons, à vous qui teniez il y a quelques années un discours si ferme à ce sujet, de remettre à votre agenda, dès le premier trimestre de 2025, un projet de loi "immigration" restrictif, reprenant au minimum les
dispositions censurées en janvier par le Conseil Constitutionnel. De plus, puisqu’une tragique actualité a encore une fois mis en lumière la question des obligations de quitter le territoire français (OQTF) et des laisser-passer consulaires, je vous suggère une règle simple : en l’absence de laissez-passer, zéro visa. ».
 


Notons quand même que cette dernière règle n'aura aucune efficacité, et l'ancien Ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin est bien placé pour le savoir car il avait essayé et il se trouve que les ressortissants des pays en question, faute de visa français, demandent un visa espagnol et avec Schengen, peuvent arriver en France en toute légalité. En clair, ces pays se moquent bien d'une politique de zéro visa. Il faut trouver autre chose pour être efficace.

Comme on le dit généralement, les solutions les plus simplistes sont les moins efficaces (sinon, on les aurait mises à l'œuvre depuis longtemps). Les responsables politiques ont toujours cette tentation prétentieux qu'avant eux, la lumière était éteinte et qu'avec eux, tout va réussir, alors que, ici, les idées du RN ne sont pas vraiment innovantes, c'est le moins qu'on puisse dire.


Marine Le Pen a réclamé d'autres mesures sur le plan sécuritaire et pénal, qui semblent recevoir un écho favorable pour la majorité des députés (et ne devraient donc pas être la cause d'un renversement possible du gouvernement).


La troisième ligne rouge : le scrutin proportionnel

Je cite cette troisième et dernière condition pour ne pas censurer le gouvernement Barnier, qui est le
mode de scrutin. J'y reviendrai très prochainement plus en détails.

Quand on analyse les deux premières conditions, elles ne sont pas insurmontables. En quelque sorte, Marine Le Pen a choisi d'emballer convenablement son choix de ne pas censurer le gouvernement et de tenter d'y donner son influence. Tout ce tralala pour garder la face. C'est sans doute une stratégie payante à moyen terme, sauf si le gouvernement réussit trop bien.


Ainsi, Marine Le Pen s'est positionnée totalement à l'opposé de l'affrontement permanent voulu par la gauche : « Si je prends l’engagement aujourd’hui de ne jamais céder, un seul instant, aux médiocres sirènes de la comédie des menaces de censure qui seraient fondées sur autre chose que l’observation impartiale de vos actes, c’est parce que c’est à vous, et à vous seul, qu’il appartient, par la juste prise en considération des mesures que je viens d’évoquer, de faire de cette période, autant que possible, un temps de construction et de service de l’intérêt général. Cet esprit d’ouverture ne doit pas être interprété comme un blanc-seing, pas plus que notre esprit républicain ne doit être assimilé à de la faiblesse, de l’irrésolution, voire une forme d’allégeance à un gouvernement que nous considérons davantage de circonstances que de convenance. ».

Elle a même donné un argument patriotique à sa non-censure : « L’absence de direction gouvernementale signifierait mécaniquement, pour notre pays et pour les Français, une double servitude technocratique, française et surtout bruxelloise. Or le pays a besoin de décisions politiques, parfois fortes et exigeantes, qui ne peuvent émaner que de politiques et non d’administratifs, aussi dévoués soient-ils, ni, encore moins, d’instances supranationales, acquises à d’autres intérêts. ».

À la fin de son discours, Marine Le Pen a été ovationnée, tous les membres de son groupe et de celui d'Éric Ciotti se sont levés, montrant aussi une manifestation de force dans l'hémicycle face à un Premier Ministre qui, à la fin de sa déclaration de politique générale, n'a eu que les membres du groupe LR (Droite républicaine) pour se lever et le saluer, les membres de l'ancienne majorité macroniste étant restés ostensiblement assis (ce qui, à mon sens, n'est politiquement pas très malin).

Comme celui qui tombait du haut d'un immeuble, dans le film "La Haine" (de Mathieu Kassovitz, sorti le 31 mai 1995), Michel Barnier peut se dire à la veille du délicat débat budgétaire : "Jusqu'ici, tout va bien !". Mais, ne soyons pas trop rapide, regardons d'abord précisément qui votera (ou ne votera) pas la motion de censure ce mardi 8 octobre 2024. La première motion de censure, évidemment, car la gauche n'hésitera pas à en déposer régulièrement.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (05 octobre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
La quadrature du cercle de Michel Barnier.
 




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241001-marine-le-pen.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-3-lignes-rouges-de-marine-le-257018

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/10/02/article-sr-20241001-marine-le-pen.html



 

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25 septembre 2024 3 25 /09 /septembre /2024 03:09

« Personne, rigoureusement personne, n’a voté pour avoir Michel Barnier à Matignon. Ni même pour une coalition macroniste et droite LR, qu’aucun leader n’envisageait. Les électeurs RN (…) voulaient Bardella à Matignon : ils n’ont eu que les trois premières lettres ! Ceux du centre votaient pour y garder Gabriel Attal. Ceux de gauche voulaient le virer et voir appliquer le programme du NFP. Ceux de LR disaient "ni Macron, ni Mélenchon, ni Bardella", mais sans espoir d’un retour de la droite. Et au second tour, c’est sans les LR que les électeurs de gauche et du centre ont mêlé leurs voix pour empêcher une majorité RN de gouverner le pays. » (Patrick Cohen, le 24 septembre 2024 sur France Inter).



 


Le gouvernement de Michel Barnier s'est réuni en conseil des ministres ce lundi 23 septembre 2024 sous la présidence du Président Emmanuel Macron. Il est, pour nos institutions, un véritable OVNI, une sorte de chose dont on a encore du mal à donner un nom tellement c'est inédit dans notre histoire de la Cinquième République.

Ce n'est pas un gouvernement ordinaire d'un Président avec sa majorité présidentielle à l'Assemblée, mais ce n'est pas non plus un gouvernement de cohabitation avec l'opposition présidentielle devenue majoritaire. Ce n'est même pas un gouvernement de coalition tel qu'on l'entend dans certaines démocraties parlementaires européennes où des partis parfois opposés se mettent d'accord pour gouverner ensemble faute de majorité pour gouverner tout seul, car le gouvernement Barnier ne jouira que d'un capital d'environ 220 sièges sur les 577 que compte l'Assemblée, soit loin de la majorité absolue (il manque environ 70 députés !). Alors, au début, certains ont appelé cela coalitation, d'autres parlent de coexistence plus ou moins pacifique. Aucun mot ne semble à ce jour satisfaire les commentateurs.

Ce qui est clair, c'est que la légitimité de Michel Barnier n'émane pas du Président de la République, pas plus de l'Assemblée puisqu'il ne peut pas se reposer sur une majorité absolue, il est issu d'un parti qui n'a obtenu que 47 sièges sur 577, mais sans doute (le sans doute visant à attendre la suite pour s'en convaincre) sa légitimité vient de sa capacité à esquiver (ou pas) toutes les motions de censure qui ne manqueront pas d'être déposées contre lui. Dès lors que l'Assemblée ne le censure pas, il est par définition d'essence démocratique, qu'on le veuille ou pas.

 


Certes, la nomination de Michel Barnier à Matignon provient de l'aboutissement (long) d'une analyse du Président de la République, mais il faut noter que Michel Barnier n'était pas son premier choix et si les premiers choix (Bernard Cazeneuve, Xavier Bertrand, Thierry Beaudet) ont été écartés, c'est bien parce qu'il y avait une probabilité de 100% pour qu'une motion de censure soit adoptée à très brève échéance (quelques jours). Dans ce jeu de dupes (tous sont des dupes : le Président, le nouveau gouvernement, mais surtout, tous les groupes et partis représentés à l'Assemblée), le couple de l'exécutif Macron-Barnier est déséquilibré et c'est Michel Barnier qui a aujourd'hui l'ascendant, comme dans les gouvernements de cohabitation. La preuve, c'est que pour finaliser la composition de son gouvernement, Michel Barnier a dû menacer (semble-t-il) de jeter l'éponge et cette démission aurait été catastrophique pour les institutions et le pays.

Le plus cocasse, et c'est le chance de Michel Barnier, c'est que (presque) tout le monde a intérêt à ce qu'il dure : le Président de la République et les membres du gouvernement, bien sûr, les groupes politiques à l'Assemblée qui le composent, mais aussi le RN qui n'est pas encore prêt au grand remplacement politique (il doit d'abord y avoir la phase du grand déballement, euh, enfin, du grand déballage au tribunal), et gauche est bien rassurée de ne pas avoir à gérer le pays. Seuls les insoumis de Jean-Luc Mélenchon auraient intérêt au blocage complet de nos institutions pour renverser notre République. Je rappelle que démission d'Emmanuel Macron ou pas, destitution d'Emmanuel Macron ou pas, l'Assemblée Nationale ne pourra pas être dissoute avant le 7 juin 2025. Le gouvernement Barnier devra donc tenir ces quelques mois si on veut un pays gouverné.

 


Parmi les idées reçues, il y a que c'est un gouvernement de droite ou très à droite. Pauvre Didier Migaud que j'ai connu député de l'Isère pourtant bien à gauche dans les années 1990 (face à Alain Carignon dans l'agglomération grenobloise et en Isère), j'espère que son appétit institutionnel ne prendra pas ombrage de ces procès en trahison que ne manquent pas de lui faire ces potentats de la nouvelle farce populaire (NFP), à commencer par le NFP lui-même. Pour fonder cette idée reçue (gouvernement le plus à droite), on se réfère aux nouveaux ministres LR qui, quand ils étaient parlementaires, n'avaient pas eu l'honneur de voter pour les lois progressistes voire transgressives (pires, ils auraient voter contre). C'est pourtant un mauvais procès puisque la plupart des parlementaires de droite avaient voté contre et on n'a pas dit avant 2012 que c'étaient des gouvernements d'extrême droite. Quant aux intentions, Michel Barnier a déjà confirmé qu'il ne toucherait pas à ces réformes, et de toute façon, ce ne serait pas son intérêt de remettre dans l'actualité des sujets clivants alors qu'il doit d'abord faire adopter les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.

L'idée que ces réformes sociétales risquent d'être abrogées a été véhiculée par l'ancien Premier Ministre Gabriel Attal, qui préside le groupe EPR, qui a besoin de marquer son territoire. Tout le monde, d'ailleurs, à l'intérieur ou à l'extérieur de la majorité gouvernementale, va marquer son territoire. On peut même imaginer un mini-clash entre Michel Barnier et Emmanuel Macron, sans conséquence sinon de mousse médiatique, pour bien montrer que l'un n'est pas l'autre et réciproquement.

Autre critique et inquiétude dans les milieux sociaux, l'absence supposée de ministère du handicap. D'une part, c'est faux, le ministre chargé du handicap, c'est Paul Christophe, Ministre des Solidarités, de l'Autonomie et de l'Égalité entre les femmes et les hommes, c'est inclus dans l'Autonomie. D'autre part, on critique toujours le trop grand nombre de ministres (ce qui est le cas ici, 39 membres) et on critique l'absence de certains ministères, en créer de nouveaux. Les critiques sont toujours très contradictoires.


On a dit aussi que les nouveaux ministres étaient des inconnus, mais ceux qui l'ont dit étaient généralement des éditorialistes politiques nationaux arrogants et paresseux qui, au contraire de leurs prédécesseurs, ne travaillent plus leur carte électorale ni leur carte politique. Heureusement, j'en ai entendu au moins un qui a relevé l'honneur de la profession, Patrick Cohen, qui, dans sa chronique à la matinale de France Inter du 23 septembre 2024, insistait sur le fait que tous ces nouveaux ministres étaient d'abord des élus locaux qui sont très connus de leurs administrés et jamais un gouvernement n'a représenté autant et aussi bien les territoires de la France que celui-ci, des ministres profondément ancrés dans leurs territoires, connaissant parfaitement la vie quotidienne des Français.

C'est le contraire des gouvernements précédents qu'on disait hors sol, pas implantés, technocratiques, parisiens... Un journal (je ne sais plus lequel) a calculé la distance moyenne entre le lieu de naissance des ministres et Paris, dans le gouvernement Barnier, c'est autour de 200 kilomètres quand, pour les précédents gouvernements, c'était de l'ordre de 10 à 20 km (j'aurais préféré le calcul de la distance entre Paris et la collectivité locale dans laquelle étaient implantés les ministres).


Patrick Cohen dit notamment : « Ces "inconnus" à Paris ne le sont pas à Lorient, à Valence, Châteauroux, Bordeaux, Le Havre, Mont-de-Marsan, Fécamp, Valenciennes, Oullins, Châteaugiron, Zuydcoote, Aubergenville… toutes ces villes où les nouveaux ministres œuvrent ou ont œuvré comme maire, maire-adjoint ou président de métropole. Il y a là un afflux inédit d’élus de terrain, qui répond aux procès en "déconnexion" régulièrement intentés à ceux qui nous gouvernent. ».

Je dois d'ailleurs avouer bien modestement que je n'aurais pas été capable de situer deux des trois dernières communes citées : Châteaugiron près de Rennes (Françoise Gatel en a été la maire de 2001 à 2017) ; Zuydcoote, en revanche, je savais que c'est près de Dunkerque, grâce au film "Week-end à Zuydcoote" d'Henri Verneuil (sorti le 18 décembre 1964) avec Jean-Paul Belmondo et Jean-Pierre Marielle (Paul Christophe en a été le maire de 2008 à 2017) ; Aubergenville, dans les Yvelines, près de Flins-sur-Seine à cheval sur la cité jardin Élisabethville (Sophie Primas en a été la maire de 2014 à 2017).

Et Patrick Cohen a souligné dans sa chronique que certes, la légitimité démocratique du nouveau gouvernement reste faible, mais aucun autre gouvernement n'aurait toutefois une meilleure légitimité démocratique : « Guère plus faible que celle de la gauche. Qui compte 20 députés de moins que l’alliance du centre et de LR. 193 contre 213. Pour le même nombre de voix au premier tour des législatives. Un peu moins de 9 millions. Et pour mémoire, 9 millions 3 pour le RN. ».


Le plus fort de café sont ces gens de gauche qui fustigent le caractère droitier du gouvernement. Évidemment ! La gauche a refusé de gouverner. Ce n'est pas faute d'avoir essayé. Michel Barnier a proposé à Stéphane Le Foll, François Rebsamen, Karim Bouamrane, Philippe Brun, Jérôme Guedj, Carole Delga, Bernard Cazeneuve, etc. d'entrer au gouvernement et tous ont refusé, tous sauf Didier Migaud qui ne représente que lui-même, d'ailleurs (on peut prédire pour lui une démission spectaculaire dans quelques mois à la Nicolas Hulot). Forcément, dès lors que la gauche et en particulier le parti socialiste se défile pour prendre ses responsabilités et penser à l'intérêt national, le barycentre, mécaniquement, se déplace vers la droite. Rappelons et insistons, martelons : Emmanuel Macron était prêt à nommer Bernard Cazeneuve à Matignon, le seul accepté de gauche par le bloc central, susceptible de recueillir jusqu'à une majorité absolue, sans "surveillance" des extrêmes (tant du RN que de FI). C'est le PS qui l'a lourdé, comme un malpropre, et aujourd'hui, ses anciens soutiens au sein du PS (33 au bureau national, contre 38), font machine arrière et condamne la droitisation du gouvernement. Ils auraient pu sortir de la nasse de mélenchonisme d'Olivier Faure. Ils ont préféré l'hypocrisie des postures aux actes sincères. Au lieu d'avoir un programme de gauche édulcorée, ils ont un programme de droite droite... de leur fait ! De le volonté de ne pas vouloir l'intérêt des Français mais le leur.
 


Amusant d'ailleurs de voir la manifestation révolutionnaire des insoumis contre Emmanuel Macron et Michel Barnier le samedi 21 septembre 2024. Quelques milliers de manifestants sur toute la France, tellement pitoyable qu'il n'y a pas eu de prétentions dans les chiffres des organisateurs ! C'est rassurant : les Français ne sont pas remacronisés ni barniérisés, mais ont le respect des responsables et attendent de juger sur les actes, sur les projets avant de critiquer, avant de lyncher.

Prenons encore une autre idée reçue : le gouvernement Barnier serait à la merci du RN. En clair, il faut que le gouvernement Barnier obéisse aux injonctions du RN sinon, ce parti le censurerait. C'est encore une idée fausse : le RN n'a que 146 députés et il faut 289 voix pour faire tomber le gouvernement. Il n'est donc pas à la merci du RN ou plutôt, c'est le NFP qui le rend à la merci du RN puisque le NFP a déjà annoncé qu'il voterait systématiquement la censure. Si le PS, par exemple, négociait avec le gouvernement sa non-censure en échange de mesures concrètes, le PS pourrait avoir une influence bien plus grande que le RN. Le gouvernement Barnier est à la merci du RN uniquement parce que c'est la gauche qui le veut bien. C'est donc de l'imposture de le fustiger en même temps. Il est donc faux de dire que le gouvernement est l'otage du RN : il est l'otage du RN et du NFP à la fois.

 


L'exemple le plus flagrant, qui montre que cela va être très difficile de gérer tous les ministres, s'est produit le 24 septembre 2024. Le nouveau Ministre de l'Économie et des Finances Antoine Armand a téléphoné à tous les partis sauf le RN. Michel Barnier s'est senti alors obligé d'appeler le RN pour ne pas l'exclure de la concertation. Marine Le Pen en a profité pour déclarer : « Quand j'entends Antoine Armand dire que sa porte est fermée au RN alors que le budget arrive, je pense que le Premier Ministre doit aller expliquer à ses ministres la philosophie de son gouvernement car il semblerait que certains n'aient pas encore totalement compris. ». Là encore, pas de quoi se trouver scandalisé : ceux qui sont choqués sont ceux qui ont mis le gouvernement dans cette situation. S'il donnait sa chance au gouvernement Barnier de trouver des compromis, c'est-à-dire de ne pas le censurer systématiquement, le NFP, surtout le PS, se trouverait en position d'arbitre et de faiseur de roi. Mais l'intérêt national ne les intéresse pas, ce qui rend le dialogue du gouvernement avec le RN crucial pour son existence.

Je termine sur cet exercice de grand équilibriste que devra faire en ce moment Michel Barnier. Heureusement, il est sportif. Entre le lundi 23 septembre 2024 à 16 heures, fin du premier conseil des ministres à l'Élysée, et le vendredi 27 septembre 2024 à 15 heures, début du premier séminaire gouvernemental à Matignon (donc sans Emmanuel Macron), où le Premier Ministre va se mettre d'accord avec ses ministres sur leur programme gouvernemental, c'est la foire à la saucisse ! Il y a là une fenêtre de tir unique, pour les ministres, de faire avancer les dossiers qui leur tiennent à cœur, car après le discours de politique générale, la feuille de route aura été fixée et le gouvernement la prendra en référence en excluant tout autre projet.


C'est pourquoi cette semaine, quelques ministres médiatiques annonceront leurs propres souhaits de réforme. Par exemple, Rachida Dati espère presser le pas pour poursuivre sa réforme en profondeur de l'audiovisuel public (par le regroupement de Radio France et France Télévisions, ce qui serait une erreur grave). Alors que le RN veut purement et simplement privatiser l'audiovisuel public et que la gauche veut augmenter les dépenses pour l'audiovisuel et donc, augmenter les impôts, Michel Barnier n'a aucun intérêt à poursuivre cette réforme qui, du reste, n'est pas d'une absolue urgence. Je lui souhaite bien du plaisir à circonscrire les ardeurs réformatrices de ses ministres !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (24 septembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Législatives 2024 (50) : les premiers pas du gouvernement Barnier.
Composition du Gouvernement Michel Barnier I nommé le 21 septembre 2024.
Législatives 2024 (49) : les socialistes crient au secours la droite revient !
Législatives 2024 (48) : les adieux de Bruno Le Maire à Bercy.
Législatives 2024 (47) : le dur accouchement du gouvernement Barnier.
Législatives 2024 (46) : les socialistes entraînés dans la destitution...
Gérard Larcher, protecteur des institutions.
"À vendre" Lucie Castets 9 000 €/mois !
Législatives 2024 (45) : Michel Barnier, le choix de l'apaisement.
Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre.
Édouard Philippe massivement candidat.
Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
Appel aux sociaux-démocrates.
Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
Sidération institutionnelle.
Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240923-gouvernement-barnier.html

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21 septembre 2024 6 21 /09 /septembre /2024 20:25

« Une équipe ! Maintenant, au travail ! » (Michel Barnier, le 21 septembre 2024 sur Twitter).



 


Le plus important de ce très laconique tweet du Premier Ministre (qui est plutôt un taiseux et peut-être tant mieux), ce sont les deux petits drapeaux en guise de point final : drapeau français et drapeau européen. Certes, chaque ministre, chaque assemblée arbore désormais ce double symbole de la France et de l'Union Européenne, mais cela signifie bien la détermination du chef du gouvernement à ne pas céder à toute sorte de compromission contraire à ses valeurs. Il est un Européen convaincu et il le demeurera, comme il est un amoureux de la France.
 


Donc, oui, ça y est !Juste avant le début de l'Automne. Accouchée dans la douleur, la composition du gouvernement Barnier a été annoncée ce samedi 21 septembre 2024 peu avant 19 heures 50 par le Secrétaire Général de l'Élysée Alexis Kohler, comme le veut la tradition républicaine.

Ce qui n'était pas traditionnel, c'était la gestation de ce gouvernement pour remplacer le gouvernement de Gabriel Attal démissionnaire le 16 juillet 2024. Plus d'un mois et demi pour trouver un Premier Ministre (la balle à l'Élysée), puis seize jours (plus de deux semaines) pour arriver à une liste de ministres (la balle à Matignon). Très atypique, cette annonce un samedi soir, en plein week-end. A fortiori un samedi de la Journée du patrimoine où même le Palais de l'Élysée était envahi de visiteurs jusqu'à 18 heures. Plus logique en revanche de faire l'annonce juste avant le journal de 20 heures, il est encore des grands-messes qui obligent.

Ce qui est, en revanche, ahurissant, c'est que cette composition a été élaborée à ciel ouvert, comme dans un gigantesque jeu de téléréalité. Au départ, Michel Barnier a fait des consultations en B to B (face-à-face) avec chaque parti prêt à s'engager et à s'investir dans cette aventure gouvernementale. Mais c'est vite devenu intenable, tant les caprices des uns, les calculs des autres, les lignes rouges, les irresponsabilités rendaient impossible toute solution.

 


Le Premier Ministre a alors eu un coup de sang et s'est dit prêt à jeter l'éponge, ce qui aurait plongé la France dans une véritable crise politique. Et a décidé de faire comme lors de l'élection du pape par les cardinaux : on se réunit et on libère les participants seulement lorsqu'il y a une fumée blanche. C'était le jeudi 19 septembre 2024. On a pensé que tout était réglé, mais il a encore fallu travailler deux jours. Et pleine transparence, jusqu'aux coups de fil du Premier Ministre au Président de la République, jusqu'aux ministres pressentis qui, finalement, n'en seraient pas (exemples, Violette Spillebout à l'Éducation nationale, ou encore Mathieu Lefèvre, ancien collaborateur de Gilles Carrez et très proche de Gérald Darmanin, au Budget), tandis que Laurent Wauquiez paradait devant les députés LR pour proclamer sa non-participation (il était pressenti à Bercy). Quant à la très conservatrice Laurence Garnier, pressentie à la Famille, elle a été sauvée mais à la Consommation. On imagine le stress dans un tel cas et sans doute fallait-il prier pour que son nom ne soit pas publié trop tôt et lâché aux chiens médiatiques et internautiques.

En tout cas, Michel Barnier a tenu son objectif de nommer tout son gouvernement avant dimanche soir pour un conseil des ministres le lundi 23 septembre 2024 à 15 heures, après les passations de pouvoir et avant le voyage du Président de la République à l'Assemblée Générale de l'ONU. Le prochain rendez-vous sera pour le 1er octobre 2024, date de rentrée parlementaire et surtout du crucial discours de politique générale (enfin, on va parler du fond après cet été surréaliste).

À l'issue de la lecture de la liste des ministres, les commentateurs politiques, qu'ils soient journalistes ou responsables politiques, était particulièrement pitoyables et vides (je sais qu'il ne faut pas attendre grand-chose un samedi soir, même si on peut quand même noter la participation exceptionnelle sur BFMTV de l'éditorialiste Alain Duhamel, que j'apprécie). Pourquoi ? Parce que le vide ne vient pas de rien, il vient d'un parisianisme qui ne connaît que les ultracélèbres et qui ignore la réalité territoriale de la (vraie) classe politique. Avant (dans l'ancien monde ?), les journalistes politiques connaissaient exactement la carte électorale, qui était député et maire d'où, et sans s'aider de l'antisèche parfois trompeuse Wikipédia. Maintenant, le creux l'emporte sur le travail : on se repose simplement sur des préjugés, des clichés, des impressions pour faire de commentaires peu pertinents... Exemple frappant : un éditorialiste proche du RN évoquait le choc idéologique entre Bruno Retailleau et Didier Migaud... sans connaître l'idéologie de ce dernier puisque ce dernier, fort discret depuis 2010 sur le plan politique, a quitté l'engagement militant.

Moi, je dis deux choses à propos de ce nouveau gouvernement. D'une part, et c'est ce qui suit, il y a des noms intéressants, des pépites, des personnalités peu connues qui méritent de l'être, et une construction beaucoup plus subtile et sophistiquée qu'on veuille bien le croire (ce qui justifie ce temps long et confirme que Michel Barnier est un vieux routard de la vie politique). D'autre part, et je pense que cette affirmation peut être partagée par beaucoup de Français, même s'ils ne sont pas de la même opinion politique que la coalition qui va gouverner, il faut que le gouvernement Barnier réussisse, car il faut que la France gagne. L'intérêt national commande la réussite, du moins pour quelques mois, de cette tentative désespérée de sortir de l'impasse. Laissons les ministres, le gouvernement gouverner, donnons-leur au moins la chance de montrer ce qu'ils vont faire, avant tout préjugé. À l'épreuve du pouvoir, les gens peuvent changer. Les Français doivent les juger sur les actes, pas sur les réputations (très faibles ici puisque la plupart des ministres sont inconnus tant du grand public que des journalistes autosatisfaits).

 


Et rappelons l'origine de l'impasse. L'impasse, ce n'est pas la dissolution par Emmanuel Macron. Certes, à sa place, je n'aurais jamais pris cette décision téméraire à ce moment précis de notre vie démocratique, mais c'est son choix, souverain, constitutionnel, et il n'y a pas à épiloguer sur le sujet. Du reste, le RN avait réclamé cette dissolution depuis plusieurs mois et on ne peut pas critiquer la dissolution et en même temps traiter Emmanuel Macron d'autocrate voire de dictateur. Il a fait appel au peuple français. Personne ne peut le lui reprocher !

L'impasse, elle ne vient pas de là. De cette dissolution, comme la précédente, en 1997, aurait pu survenir une majorité absolue claire, d'un camp ou d'un autre, on aurait été alors joyeux dans le camp des vainqueurs ou déçus dans le camp des vaincus, mais il y aurait des gagnants et des perdants et il y aurait un gouvernement stable pour appliquer une politique donnée. Si ces élections législatives anticipées n'ont pas abouti à cela, ce n'est pas la faute d'Emmanuel Macron, c'est celle du peuple ! Ce sont les électeurs qui ont choisi trois blocs, ou plutôt, qui ont choisi de manière à rejeter les deux autres blocs, si bien que l'Assemblée s'est retrouvée divisée en trois et pas en deux. C'est ce vote, pas collectivement conscient de la difficulté, mais résultat d'un véritable état de l'opinion, divisée en trois, qui a fait toute la difficulté et je trouve qu'Emmanuel Macron a réussi à trouver le bon Premier Ministre au bon moment. Il s'en sort bien.

De quoi est donc la cause de ce gouvernement ? D'une réflexion menée simplement : pas de majorité pour la nouvelle farce populaire (NFP), qui n'a que 193 députés sur 289, loin donc d'une majorité absolue ; pas de majorité pour le RN, mais avec 146 députés, ceux-là le reconnaissent bien volontiers et on peut louer leur lucidité. Le bloc central qui cumule le camp présidentiel et Les Républicains totalisent autour de 220 députés (soit plus que le NFP, d'où la victoire de Yaël Braun-Pivet sur André Chassaigne au perchoir). C'est nettement insuffisant pour une majorité absolue, mais mieux que le NFP. Faute d'un compromis à gauche, le compromis s'est déplacé à droite et à l'extrême droite. En gros, le RN a accepté l'idée de ne pas immédiatement censurer le nouveau gouvernement si on l'écoutait sur les noms à ne pas prendre (en l'occurrence Xavier Bertrand, Éric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin).

Pour avoir le détail des noms et des postes, on pourra lire la totalité de cette composition ici. La première chose qui frappe est le nombre pléthorique de ministres : contrairement à d'habitude, il n'y a pas eu l'affichage hypocrite d'une volonté d'un gouvernement resserré. Ce n'est même pas préférable (parmi les premières critiques, celle qu'il n'y a pas de ministère pour les personnes en situation de handicap alors que pourtant, il y a un ministère pour l'autonomie qui inclut bien sûr le handicap : c'est la schizophrénie française, on critique l'endettement et on veut toujours dépenser plus ; on veut un gouvernement resserré mais on voudrait avoir mille ministères de tout et de rien). Celui de Michel Barnier est très clairement pléthorique car il était impossible de faire autrement pour satisfaire tous les partis de la coalition. 40 membres si l'on compte le Premier Ministre (qui reste chargé de la Planification écologique comme ses deux prédécesseurs), 19 ministres pleins, 15 ministres délégués et 5 secrétaires d'État. Parité parfaite : 20 femmes, 20 hommes.

 


La première remarque évidente, c'est qu'il n'y a que des politiques, quasiment que des politiques, pour 39 sur 40 : d'après ma comptabilité (je ne tiens pas compte qu'une nouvelle ministre a quitté LR le 11 juin 2024 à cause de l'alliance d'Éric Ciotti), il y a 15 LR (dont 2 proches de Valérie Pécresse et 1 proche de Xavier Bertrand), 12 EPR (Renaissance), 3 UDI, 3 MoDem, 2 Horizons, 2 ex-LR, 1 radical, 1 ex-PS et 1 sans étiquette (Clara Chappaz, directrice de la French Tech de 2021 à 2024 nommée Secrétaire d'État chargée de l'Intelligence artificielle et du Numérique).

Seulement six ministres sortants sont reconduits, dont deux (voire trois) gardent leur ministère : Sébastien Lecornu aux Armées (on lui a rajouté les Anciens combattants), Rachida Dati à la Culture (on lui a rajouté le Patrimoine), éventuellement Agnès Pannier-Runacher qui hérite du grand Ministère de la Transition écologique, de l'Énergie, du Climat et de la Prévention des risques (elle était déjà dans ce ministère dans certains précédents gouvernement). Trois autres changent d'attributions : Catherine Vautrin (Territoires et Décentralisation), Jean-Noël Barrot (Quai d'Orsay) et Guillaume Kasbarian (Fonction publique entre autres). On pourrait rajouter une septième ministre sortante, mais sortie dès juillet 2023 : Geneviève Darrieussecq, qui devient Ministre de la Santé (elle est médecin). Enfin, deux autres ont été déjà ministres avant 2017 : Valérie Létard et Michel Barnier (sous Nicolas Sarkozy). En tout, donc, 9 ministres expérimentés sur 40, ou, à l'envers, 31 nouveaux ministres, noms nouveaux, sur 40.

Cette dernière remarque signifie qu'il y a un grand renouvellement des personnes. Mais le poids politique aussi est important. Les poids lourds actuels de cette coalition sont à l'extérieur du gouvernement : Gabriel Attal, Édouard Philippe, Gérald Darmanin, François Bayrou, Élisabeth Borne, Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse, Bruno Le Maire sont à l'extérieur. Si on veut donner le qualificatif de poids lourd au-delà de Michel Barnier, ce sera sans doute à Bruno Retailleau, très influent président du groupe LR au Sénat, qui aurait sans doute été le Premier Ministre de François Fillon en cas d'élection de ce dernier. Bruno Retailleau est nommé Ministre de l'Intérieur. Ce choix est crucial. L'opposition de gauche l'accuse déjà d'être "inhumain" (ce qui est un sacré argument politique !). Notons d'ailleurs (je ne suis pas le seul à faire ce constat) qu'Éric Ciotti, qui rêve d'être Ministre de l'Intérieur, aurait certainement été nommé dans ce gouvernement à ce poste s'il ne s'était pas jeté, trop confiant dans les sondages, dans les bras incertains de Marine Le Pen.

Autre remarque, les noms de ministères et leur architecture. Beaucoup de nouvelles appellations, parfois assez longues. Sur la structure, il faut noter l'indépendance du logement (une réelle politique du logement est nécessaire), mais aussi des transports par rapport à la transition écologique. C'est très intelligent de faire dépendre les transports des territoires. Le Ministère de l'Europe dépend à la fois du Quai d'Orsay (domaine du Président) et de Matignon (domaine du Premier Ministre). Les Outre-mer dépendent directement de Matignon et pas de l'Intérieur comme à l'époque de Gérald Darmanin (une des revendications des indépendantistes en Nouvelle-Calédonie). Au-delà d'une Ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement et d'une porte-parole du gouvernement, il y a aussi une Ministre déléguée chargée de la "Coordination gouvernementale". Enfin, on peut aussi s'étonner que le Ministère du Budget et des Comptes publics soit rattaché à Matignon et pas à Bercy.

Comme dans chaque gouvernement, beaucoup de personnalités sont de grande valeur, énarques, normaliens, ESSEC, IEP, etc. (de formation), avec une trajectoire personnelles très intéressante et diversifiée. On peut citer deux présidents de commission bombardés ministres : le président de la commission des affaires économiques Antoine Armand (EPR) nommé à 33 ans (il les a eus il y a onze jours) Ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie ; celui de la commission des affaires sociales Paul Christophe (Horizons) nommé Ministre des Solidarités, de l'Autonomie et de l'Égalité entre les femmes et les hommes (amusant de voir dans la défense des femmes... un homme).

 


Dernière remarque, anecdotique celle-ci : certains sont nommés alors qu'ils ont échoué aux élections législatives, c'est le cas notamment de François Durovray et Laurent Saint-Martin.

Trois critiques reviennent généralement dans les réactions à ce nouveau gouvernement, issues des extrêmes.

La première, c'est de dire, de croire, de faire croire que ce gouvernement est la suite du macronisme (elle provient de l'extrême gauche et de l'extrême droite). C'est ne rien comprendre à Michel Barnier de dire cela. C'est surtout factuellement faux. On reprochait à Emmanuel Macron de faire ses gouvernements (sauf le dernier) en se basant sur des non-personnalités politiques, sur des personnes dites de la "société civile", en somme, sur des ministres hors sol. Celui de Michel Barnier est exactement l'inverse. Comme je l'ai écrit, il est ultrapolitisé (chaque ministre a eu un engagement politique, une histoire politique parfois très ancienne, cinquante-deux ans pour le premier d'entre eux). Il est au contraire très axé sur les territoires : beaucoup de sénateurs (en particulier LR), et les sénateurs sont sur le terrain, connaissent parfaitement les communes, les départements, il y a aussi beaucoup de maires ou de présidents d'exécutif, comme Gil Avérous (maire de Châteauroux), Fabrice Loher (maire de Lorient), Nicolas Daragon (maire de Valence), François Durovray (président du conseil départemental de l'Essonne), etc. Si on prend les parlementaires qui ont dû quitter leur mandat exécutif mais qui y sont restés très attachés (comme Bruno Retailleau pour la Vendée et les Pays de la Loire, Valérie Létard pour le Nord et Valenciennes, Marie-Agnès Poussier-Winsback pour Fécamp, Alexandre Portier pour Villefranche-sur-Saône, Geneviève Darrieussecq pour Mont-de-Marsan, Sébastien Lecornu pour l'Eure et Vernon, François-Noël Buffet pour Lyon, Othman Nasrou pour Trappes, etc.), alors on a une France des territoires très diversifiée et aussi très connue localement.

Les Français ont voulu un réel changement dans leur gouvernance, et il l'ont obtenu avec le gouvernement Barnier. Les principaux ténors du gouvernement précédent sont hors des ministères, même certains, comme Gérald Darmanin, qui auraient bien voulu rester.

La deuxième critique, provenant exclusivement des insoumis, est de dire que ce gouvernement est vendu à l'extrême droite, ce qui est d'autant plus excessif et stupide qu'il suffit d'écouter l'opinion des députés RN sur ce gouvernement. Le RN n'a pas intérêt à un clash alors qu'à la veille de la rentrée parlement s'ouvre le procès du RN, mais la nature revient toujours au galop et on peut lire ici ou là l'absence d'approbation d'une telle composition (ce qui ne veut pas dire la censure).
 


Enfin, celle relayée le plus dans les médias, la troisième critique, provenant surtout des socialistes, qui condamnent ce gouvernement de droite ! Ce PS mélenchonisé définitivement n'est vraiment plus récupérable ! Ce sont les socialistes eux-mêmes qui ont refusé d'entrer au gouvernement, et après, ils critiquent le gouvernement qui n'a rien à gauche. C'est dément comme argumentation et les Français aiment bien un peu de logique dans les postures politiques. Emmanuel Macron avait pressenti Bernard Cazeneuve à Matignon, mais le PS l'a flingué en direct à Blois. Le plus hypocrite est François Hollande qui critique la nomination de Michel Barnier mais qui n'a pas levé son petit doigt pour aider son ancien Premier Ministre, de peur de contrarier le gourou des insoumis. Mais même après le choix du Premier Ministre, tout restait possible. Michel Barnier a proposé à de nombreux hiérarques socialistes d'entrer au gouvernement, notamment à Bernard Cazeneuve, Stéphane Le Foll, Jérôme Guedj, Karim Bouamrane, François Rebsamen, Carole Delga, Philippe Brun... Le PS a refusé de gouverner et ensuite, il critique le choix d'un gouvernement "de droite", quelle hypocrisie et quelle contradiction !

On a reproché à Michel Barnier de faire du casting avant de définir le fond de son programme. En termes de programme, son gouvernement sera certainement bien humble : s'il arrive à faire adopter les deux lois de finances avant le 31 décembre 2024, il sera bien content. Selon Matignon, Michel Barnier souhaiterait coconstruire son plan d'action avec les ministres. Si les socialistes avaient accepté d'être présents, ils auraient pu infléchir la politique de la nation à gauche. Ils ont préféré servir de serviles faire-valoir à Jean-Luc Mélenchon. Ils n'auront plus aucune influence, à l'image du 1,7% de leur score à la présidentielle.

Ce dimanche, le maître mot sera donc : PASSATION !



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 septembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Composition du Gouvernement Michel Barnier I nommé le 21 septembre 2024.
Législatives 2024 (49) : les socialistes crient au secours la droite revient !
Législatives 2024 (48) : les adieux de Bruno Le Maire à Bercy.
Législatives 2024 (47) : le dur accouchement du gouvernement Barnier.
Législatives 2024 (46) : les socialistes entraînés dans la destitution...
Gérard Larcher, protecteur des institutions.
"À vendre" Lucie Castets 9 000 €/mois !
Législatives 2024 (45) : Michel Barnier, le choix de l'apaisement.
Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre.
Édouard Philippe massivement candidat.
Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
Appel aux sociaux-démocrates.
Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
Sidération institutionnelle.
Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

 





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240921-gouvernement-barnier.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-49-les-256891

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/21/article-sr-20240921-gouvernement-barnier.html







 

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21 septembre 2024 6 21 /09 /septembre /2024 19:54




Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240921-gouvernement-barnier.html



La composition du Gouvernement résultant du décret signé ce jour par le Président de la République Emmanuel Macron sur la proposition du Premier Ministre, chargé de la Planification écologique et énergétique, Michel Barnier, est la suivante :

19 Ministres :

M. Didier MIGAUD (ex-PS), Garde des Sceaux, Ministre de la Justice ;

Mme Catherine VAUTRIN (ex-LR), Ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation ;

M. Bruno RETAILLEAU (LR), Ministre de l’Intérieur ;

Mme Anne GENETET (EPR), Ministre de l’Éducation nationale ;

M. Jean-Noël BARROT (MODEM), Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères ;

Mme Rachida DATI (ex-LR), Ministre de la Culture et du Patrimoine ;

M. Sébastien LECORNU (EPR), Ministre des Armées et des Anciens combattants ;

Mme Agnès PANNIER-RUNACHER (EPR), Ministre de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques ;

M. Antoine ARMAND (EPR), Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie ;

Mme Geneviève DARRIEUSSECQ (MODEM), Ministre de la Santé et de l’Accès aux soins ;

M. Paul CHRISTOPHE (HOR), Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes ;

Mme Valérie LÉTARD (UDI), Ministre du Logement et de la Rénovation urbaine ;

Mme Annie GENEVARD (LR), Ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt ;

Mme Astrid PANOSYAN-BOUVET (EPR), Ministre du Travail et de l’Emploi ;

M. Gil AVÉROUS (LR), Ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative ;

M. Patrick HETZEL (LR), Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ;

M. Guillaume KASBARIAN (EPR), Ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique ;

M. François-Noël BUFFET (LR), Ministre auprès du Premier Ministre, chargé des Outre-mer ;

M. Laurent SAINT-MARTIN (EPR), Ministre auprès du Premier Ministre, chargé du Budget et des Comptes publics.

15 Ministres délégués :

Auprès du Premier Ministre et du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères :

M. Benjamin HADDAD (EPR), chargé de l’Europe ;

Auprès du Premier Ministre :

Mme Nathalie DELATTRE (RAD), chargée des Relations avec le Parlement ;
Mme Maud BREGEON (EPR), porte-parole du Gouvernement ;
Mme Marie-Claire CARRÈRE-GÉE (LR), chargée de la Coordination gouvernementale ;

Auprès de la Ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation :

Mme Françoise GATEL (UDI), chargée de la Ruralité, du Commerce et de l’Artisanat ;
M. François DUROVRAY (LR), chargé des Transports ;
M. Fabrice LOHER (UDI), chargé de la Mer et de la Pêche ;

Auprès du Ministre de l’Intérieur :

M. Nicolas DARAGON (LR), chargé de la Sécurité du quotidien ;

Auprès de la Ministre de l’Éducation nationale :

M. Alexandre PORTIER (LR), chargé de la Réussite scolaire et de l’Enseignement professionnel ;

Auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères :

Mme Sophie PRIMAS (LR), chargée du Commerce extérieur et des Français de l’étranger ;

Auprès de la Ministre de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques :

Mme Olga GIVERNET (EPR), chargée de l’Énergie ;

Auprès du Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie :

M. Marc FERRACCI (EPR), chargé de l’Industrie ;
Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK (HOR), chargée de l’Économie sociale et solidaire, de l’Intéressement et de la Participation ;
Mme Marina FERRARI (MODEM), chargée de l’Économie du tourisme ;

Auprès du ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes :

Mme Agnès CANAYER (LR), chargée de la Famille et de la Petite enfance.

5 Secrétaires d’État :

Auprès du Ministre de l’Intérieur :

M. Othman NASROU (LR), chargé de la Citoyenneté et de la Lutte contre les discriminations ;

Auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères :

M. Thani MOHAMED SOILIHI (EPR), chargé de la Francophonie et des Partenariats internationaux ;

Auprès du Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie :

Mme Laurence GARNIER (LR), chargée de la Consommation ;

Auprès du Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes :

Mme Salima SAA (LR), chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes ;

Auprès du Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche :

Mme Clara CHAPPAZ, chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique.

Le Président de la République réunira l’ensemble des membres du Gouvernement pour un Conseil des ministres qui se tiendra le lundi 23 septembre à 15h00 au Palais de l'Élysée.


Source : Élysée
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20240921-composition-gouvernement-barnier-i.html



 





 

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