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31 juillet 2020 5 31 /07 /juillet /2020 09:57

« Quel homme vécut jamais une réussite achevée ? » (De Gaulle, 1954).


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L’ancien garde des sceaux Albin Chalandon est mort ce mercredi 29 juillet 2020 à l’âge de 100 ans. Il avait franchi le centenaire le 11 juin dernier et ce fut pour moi l’occasion de présenter sa trajectoire politique. Alban Chalandon faisait partie de ces personnages dont le Général De Gaulle aimait s’entourer, de hauts fonctionnaires, hauts techniciens issus de grandes écoles, compétents, opérationnels et, caractéristique indispensable aussi, qui avaient participé d’une manière ou d’une autre à la libération du territoire pendant la guerre.

Croix de guerre 1939-1945, ancien résistant, promu par le Président Nicolas Sarkozy au grade de grand-officier de la Légion d’honneur le 14 juillet 2009, Albin Chalandon fut de toute l’aventure gaullienne, et même gaulliste, du RPF au RPR, auprès de De Gaulle, de Georges Pompidou et de Jacques Chirac avec qui il a "terminé" sa carrière politique Place Vendôme entre 1986 et 1988 avec, pour une fois, une communauté de vues sur les choses de la sécurité et de la justice avec le Ministre de l’Intérieur (Charles Pasqua).

En 1959, Albin Chalandon a été le secrétaire général de l’UNR, donc, le chef du parti gaulliste juste au retour de De Gaulle au pouvoir, avec une majorité gaulliste à l’Assemblée Nationale. Il n’est resté que quelques mois car il n’était qu’un simple syndic de copropriété ; le véritable chef était De Gaulle lui-même. Le problème a d’ailleurs été pour tous les responsables du parti gaulliste quand un gaulliste était à l’Élysée, y compris lors du quinquennat de Nicolas Sarkozy où Philippe Devedjian, puis Xavier Bertrand et Jean-François Copé n’ont jamais été que des animateurs de la politique présidentielle, mais il faut néanmoins y ajouter une grosse exception sous le dernier mandat de Jacques Chirac, quand Nicolas Sarkozy avait conquis la présidence de l’UMP en 2004.

Albin Chalandon n’a quitté la vie professionnelle pour se consacrer (à titre temporaire) à la vie politique qu’au milieu des années 1960 où il fut élu député et nommé ministre sous De Gaulle et Pompidou, j’avais d’ailleurs fait remarquer en juin qu’il faisait partie des douze anciens ministres des deux premiers Présidents de la Cinquième République encore en vie, et des trois derniers ministres de De Gaulle encore en vie (dont fait partie aussi Valéry Giscard d’Estaing).

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C’est dans les mémoires et les notes d’un autre ministre de De Gaulle, Alain Peyrefitte ("C’était De  Gaulle") qu’on peut connaître quelques idées d’Albin Chalandon qui avait écrit en 1963 un article dans le premier bulletin du "Comité national pour la préparation de l’élection présidentielle", probablement mis en place par l’UNR après le référendum de 1962 sur l’élection du Président de la République au suffrage universel direct.

Dans ce bulletin de ce mystérieux comité (De Gaulle n’y était pour rien), Albin Chalandon a proposé une évolution constitutionnelle qu’il considérait poursuivre dans la logique de l’élection directe du Président, à savoir lier l’élection présidentielle et les élections législatives. C’est intéressant aujourd’hui de s’y intéresser, puisque depuis 2002, nous vivons avec cette respiration électorale d’une concomitance de ces deux scrutins nationaux qui a révélé plus d’inconvénients que d’avantages (aujourd’hui, la situation n’est pas statique et peut changer sans modifier la Constitution, il suffit d’une dissolution de l’Assemblée ou d’une démission du Président pour casser cette concomitance).

Cela voulait dire clairement américaniser les institutions françaises (ce que veut faire aujourd’hui François Hollande, lui qui n’avait eu aucune autorité à l’Élysée). En particulier, recourir au quinquennat au lieu du septennat, une mesure voulue par Georges Pompidou (pour qui la relégitimation plus fréquente du Président de la République lui apporterait plus de pouvoir et d’autorité, mais cette idée pouvait aussi être une conséquence très circonstancielle, sa maladie, comme l’âge a convaincu Jacques Chirac de le proposer en 2000).

Alain Peyrefitte, très soucieux de connaître l’avis de De Gaulle sur ce sujet crucial, l’a donc interrogé le 20 novembre 1963, après le conseil des ministres. À la question "qu’en pensez-vous ?", De Gaulle y est allé franco en parlant d’Albin Chalandon : « C’est une absurdité. C’est lui qui l’a écrit. Je ne lui ai jamais rien dit dans ce sens. Je ne sais pas d’où il a pu tirer ça. Je me demande d’ailleurs ce que c’est que ce Comité et de quoi il se mêle. ».

De Gaulle excluait "totalement" le recours au quinquennat : « Dans l’esprit de ceux qui le proposent, cette coïncidence des mandats ne pourrait avoir lieu qu’à la condition qu’on supprime et la censure et la dissolution. Ou alors, si l’on voulait que les deux mandats coïncident définitivement, il faudrait, soit que la dissolution entraîne le départ du Président, soit que la censure entraîne non seulement le départ du gouvernement, mais celui du Président et de l’Assemblée. Tout ça ne tient pas debout ! Ceux qui avancent ça ne se sont pas donné la peine de réfléchir. Ils ressassent des slogans. Le Président est là pour assurer la continuité de l’État. C’est sa mission essentielle. Il est la clef de voûte de l’État. Si vous lui ôtez ce rôle, le peuple souverain ne pourra plus jouer le sien, celui d’arbitre et de recours. Or, il faut que le Président puisse lui faire jouer ce rôle chaque fois qu’il en éprouve la nécessité, soit par référendum, soit par des élections. ».

Dans les soixante dernières années, Albin Chalandon n’a pas été le seul à proposer le régime américain (présidentiel pur), Édouard Balladur, notamment, y était favorable, ainsi que de nombreux autres responsables politiques, comme Jacques Barrot (qui a terminé sa longue carrière au Conseil Constitutionnel), Alain Madelin, etc.

De Gaulle était absolument contre toute américanisation des institutions : « Vouloir faire ce qu’on appelle quelquefois un régime présidentiel à l’américaine, ce serait organiser l’anarchie ! (…) Le conflit s’installerait entre [le Président et le Parlement] d’une façon endémique. (…) En France, ce serait affreux ! On s’enfermerait dans une situation sans issue ! ».

Et le Général a ajouté, justifiant le référendum de 1962 et montrant que cela n’a rien à voir avec la Constitution de 1848 (la Deuxième République) : « Dans un pays comme le nôtre, étant donné ce que nous sommes, le seul moyen d’en sortir, ce serait un coup d’État. C’est exactement ce qui s’est passé pour la Constitution de 1848, qui établissait un équilibre du même ordre. Cela s’est terminé par un coup d’État. C’est cela que vous voudriez voir revenir ? Ou bien alors, vous voudriez que ce soit le Parlement qui fasse partir le Président par un coup d’État parlementaire, ou par une pression qui lui rendrait la vie impossible ? [Comme ce fut le cas en 1877 et en 1924, note de moi-même, SR]. Ce serait une façon de retomber dans le désordre de la Troisième ou de la Quatrième République. Nous avons la chance d’en être sortis. Il ne faut rien faire pour y revenir. ».

Précisons que le "quinquennat sec" comme l’a voulu Jacques Chirac en 2000 sous la pression de Valéry Giscard d’Estaing et de Lionel Jospin (alors Premier Ministre), n’a pas placé la France dans le régime présidentiel ainsi décrit, puisqu’il reste toujours le droit de dissolution et celui de la censure. En revanche, la concomitance de fait de l’élection présidentielle et des élections législatives a renforcé l’autorité présidentielle sur les députés de la majorité élus grâce à l’élection du Président (c’était clair en juin 2017, mais aussi en juin 1981, en juin 2002, en juin 2007 et en juin 2012). Cela en fait des députés supergodillots (ils étaient déjà godillots entre 1958 et 2002, sauf entre 2014 et 2017 avec les "frondeurs", illustrant l’absence d’autorité de François Hollande).

Le commentaire personnel d’Alain Peyrefitte sur la réflexion de De Gaulle fut le suivant : « Il est clair qu’à ses yeux, la Constitution est bonne, parce qu’elle est à la fois solide et souple. Son texte laisse assez de jeu pour s’adapter aux circonstances. Mas la pratique le façonne, justement à cause de ce jeu. (…) Il a pu imposer aux partis une Constitution convenable ; il voudrait que l’usage la rendît excellente. ».

Quant à Albin Chalandon, probablement en serviteur trop zélé du Royaume de Gaulle, il a extrapolé trop loin la pensée du Général. Cela ne l’a pas empêché de devenir plus d’une vingtaine d’années plus tard Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, et à ce titre, le gardien vigilant et scrupuleux de la Constitution de la Cinquième République.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (30 juillet 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Albin Chalandon.
Comment devenir centenaire ?
Jacques Soustelle.
Valéry Giscard d’Estaing.
Raymond Barre.
Simone Veil.
La Cinquième République.
Olivier Guichard.
18 juin 1940 : De Gaulle et l’esprit de Résistance.
Philippe Séguin.
Michel Droit.
René Capitant.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200729-albin-chalandon.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/quand-albin-chalandon-se-faisait-226102

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/07/30/38456746.html






 

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26 juillet 2020 7 26 /07 /juillet /2020 20:26

« L’équipe est au complet. Avec eux, et pour vous, chacun des 600 prochains jours devra être utile au pays et à la hauteur de ses défis. C’est au plus près des Français que nous leur trouverons des solutions : nous irons à votre rencontre, partout sur le territoire. » (Jean Castex, Twitter le 26 juillet 2020).



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On aurait voulu la faire plus discrète, on n’aurait pas pu : le dimanche soir, en fin juillet, en plein été, dans la torpeur du soleil qui se couche. La nomination des onze secrétaires d’État a eu lieu ce dimanche 26 juillet 2020. Elle était attendue depuis la nomination du gouvernement de Jean Castex le 6 juillet 2020. Pourquoi autant de temps entre les deux ? On a dit que Jean Castex voulait attendre son vote de confiance pour être sûr que tous les députés de la majorité la votent et leur laisser l’improbable espoir d’une nomination au gouvernement.

La nouvelle équipe se réunira au complet à l’Élysée au prochain conseil des ministres du 29 juillet 2020 à 10 heures, avec les distances de sécurité. Seuls, ensuite, les ministres pleins assisteront à tous les conseils des ministres, et les "sous-ministres" n’y participeront que lorsqu’ils auront une communication à y faire. Gouvernement pléthorique plus que resserré : avec seize ministres, quatorze ministres délégués et douze secrétaires d’État, il y a donc quarante-trois membres du gouvernement, ce qui est beaucoup, frôlant le record du gouvernement de Michel Rocard. Point positif (à mon sens), pour la première fois de l’histoire politique, il y a un peu plus de femmes que d’hommes dans le gouvernement français.

On peut lire le décret présidentiel ici pour avoir le détail de la totalité des nouveaux membres du gouvernement. Six nouveaux membres du gouvernement ont été nommés le 26 juillet 2020, cinq députés et un membre du cabinet présidentiel. Quant à ceux qui sortent, ils sont seulement quatre secrétaires d’État (dont Sibeth Ndiaye, chargée maintenant à LREM de dénicher de nouveaux talents pour l’avenir…).

Je propose ici de saluer l’arrivée de deux nouvelles secrétaires d’État, Sarah El Haïry et Olivia Grégoire, deux jeunes députées énergiques et combattives, et je regrette le départ de deux secrétaires d’État sortantes du gouvernement précédent dirigé par Édouard Philippe, qui n’avaient pas démérité, à savoir Brune Poirson et Christelle Dubos.


Brune Poirson (37 ans)

À 37 ans, Brune Poirson a déjà un long parcours tant dans la vie professionnelle que dans la vie politique. Née à Washington et franco-américaine, diplômée notamment de l’IEP d’Aix-en-Provence et de Harvard, elle a eu l’occasion de travailler à l’étranger à de nombreuses reprises, et s’est intéressée au développement durable. Elle a participé notamment à des projets en Inde et à Boston. Soutenant la campagne présidentielle du futur Président Emmanuel Macron, elle fut recommandée par Hubert Védrine auprès de Jean-Paul Delevoye pour obtenir l’investiture LREM aux élections législatives.

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Élue députée du Vaucluse d’où sa famille est originaire le 18 juin 2017 (dans la circonscription de Marion Maréchal, elle a battu un candidat du FN avec 50,7% des voix), elle fut nommée dans la foulée, le 21 juin 2017, Secrétaire d’État à la Transition écologique et solidaire jusqu’au 3 juillet 2020, auprès des ministres Nicolas Hulot, François de Rugy puis Élisabeth Borne, plus particulièrement chargée de la biodiversité, de la mer et des océans, ainsi que de la plupart des projets européens.

Dans ses fonctions ministérielles, Brune Poirson s’est particulièrement préoccupée du projet de loi contre le gaspillage, qui est devenue la loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Cette loi a pour objectif de réduire l’obsolescence des biens de consommation, prolonger la vie des produits, réduire les emballages, pour protéger le consommateur et responsabiliser le producteur, améliorer le tri des déchets et leur recyclage. Un titre est consacré à la lutte contre les dépôts sauvages.

Elle a fait partie des membres du gouvernement qui ont souvent bataillé au Parlement, faisant preuve de combativité et de sens politique. Pour exemple, elle n’a pas hésité à polémiquer en répondant à deux questions d’opposants pour tourner en ridicule ses contradicteurs qui l’empêchaient de répondre. C’était une belle révélation du gouvernement, avec Julien Denormandie (aujourd’hui Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation), elle fait de la politique, arrive à suivre son fil malgré le brouhaha, etc.

Lors de la séance à l’Assemblée Nationale du 12 juin 2018, présidée par François de Rugy, elle déclarait effectivement, pantalon rose et veste noire : « Nous entendons donc trouver des solutions compatibles avec les règles du commerce mondial ! »

Puis elle s’est interrompue, sous les applaudissements des députés de la majorité et sous les huées des députés LR. Pas intimidée, elle ajouta : « Vous savez, mesdames et messieurs les députés de droite, je suis mère d’une petite fille de trois ans : sincèrement, vos réactions sont du même niveau que les siennes. C’est la réalité, vraiment ! Je doute, d’ailleurs, que vos électeurs soient très contents de vous voir vous comporter ainsi, désolée de le dire. Bref ! ». Remarque qui n’a fait qu’exacerber l’agitation des députés. Le champ parlementaire est un jeu de rôle et Bruce Poirson a su s’intégrer dans ce théâtre si particulier.

Un moment pressentie pour mener la liste LREM aux élections municipales à Avignon, Bruce Poirson fut élue vice-présidente de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (ANUE) le 20 mars 2019 pour un mandat de deux ans. Exclue du nouveau gouvernement, elle retrouvera son siège de députée au mois d’août 2020.


Christelle Dubos (44 ans)

Spécialiste des affaires sociales à l’échelon communal et intercommunal, Christelle Dubos, à 44 ans, quitte le gouvernement après avoir été nommée Secrétaire d’État aux Solidarités et à la Santé du 16 octobre 2018 au 3 juillet 2020, auprès des ministres Agnès Buzyn puis Olivier Véran, chargée plus particulièrement des politiques sociales et familiales. De centre gauche, Christelle Dubos fut élue adjointe au maire de Sadirac, une commune de 4 000 habitants en Gironde, chargée des affaires sociales, du logement et des solidarités, de mars 2014 à juillet 2017.

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Rejoignant la campagne d’Emmanuel Macron, elle fut investie par LREM et élue députée de Gironde le 18 juin 2017 avec 56,7% face à un candidat FI. À l’Assemblée Nationale, elle consacra son action au logement, à la cohésion des territoires et à l’insertion professionnelle. Elle a corapporté la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite loi ELAN), sur les parties logement et mixité sociale.

Au gouvernement, Christelle Dubos a été chargée d’organiser la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté proposée par Emmanuel Macron le 13 septembre 2018. Elle a aussi travaillé sur le service public de versement des pensions alimentaires en incluant les CAF comme intermédiaires entre conjoints, et a étudié la mise en place d’une refonte de toutes les aides sociales et d’un revenu universel d’activité. Elle a également mis en place de deux plans d’urgence d’aide alimentaire, un de 39 millions d’euros puis un autre de 55 millions d’euros pour soutenir les associations en pleine crise sanitaire.

Certains ont reproché sa trop grande rareté médiatique pendant la pandémie de covid-19, en particulier son absence de décision concernant les EHPAD qui relevaient de ses attributions, probable explication de son éviction du nouveau gouvernement.


Sarah El Haïry (31 ans)

Au contraire de Christelle Dubos, elle est très présente dans les médias. Beaucoup de gens ont pu voir Sarah El Haïry et sa combativité dans de nombreux débats télévisés, n’hésitant pas, sur les plateaux, non seulement à défendre la politique du gouvernement mais aussi, en même temps, à donner franchement ses points de vue, montrant ainsi une femme de caractère et une femme qui a une vision politique.

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C’est probablement l’une des meilleures nominations dans ce nouveau gouvernement. Nommée à 31 ans, le 26 juillet 2020, Secrétaire d’État auprès de Jean-Michel Blanquer, chargée de la Jeunesse et de l’Engagement, Sarah El Haïry est montée très vite en responsabilité au sein du MoDem à Nantes où elle a été élue conseillère municipale le 28 juin 2020 (elle avait été numéro deux de la liste MoDem en mars 2014, mais ne fut pas élue à l’époque ; elle fut opposée à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes).

D’origine franco-marocaine, née à Romorantin-Lanthenay, ayant passé une partie de son enfance à Metz et à Casablanca, elle a fait ses études à Nantes puis a eu une expérience internationale, notamment au Canada. Représentante du MoDem, elle participa à la liste de Bruno Retailleau (sénateur LR) aux élections régionales de décembre 2015 pour les Pays de la Loire, et fut désignée présidente du MoDem de Loire-Atlantique à partir février 2016 (porte-parole nationale à partir de février 2018).

Investie par le MoDem et soutenue par LREM, Sarah El Haïry fut élue députée de Nantes le 18 juin 2017 avec 61,0% des voix contre le député socialiste sortant. Membre de la commission des finances, elle a rendu un rapport le 9 juin 220 au Premier Ministre Édouard Philippe sur la philanthropie à encourager en France.


Olivia Grégoire (41 ans)

Licence d’histoire à Nanterre, IEP Paris (communication) et master en marketing à l’ESSEC pour Olivia Grégoire qui a commencé sa carrière professionnelle dans une agence de publicité puis dans un grand groupe privé avant de créer son propre cabinet de consultante.

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Proche des idées libérales d’Alain Madelin, Olivia Grégoire a travaillé dans les cabinets du Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin entre 2002 et 2005 puis du Ministre de la Santé Xavier Bertrand e 2005 à 2007. Responsable des questions de santé pendant la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron, elle fut investie par LREM et fut élue députée dans la douzième circonscription de Paris, battant le 18 juin 2017 le député LR sortant Philippe Goujon avec 56,4% des voix.

Une fois élue députée, Olivia Grégoire a été très active, tant dans son travail de parlementaire (vice-présidente de la commission des finances, présidente de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi Pacte), que dans son influence politique au sein du groupe LREM dont elle fut la porte-parole. Elle a soutenu en septembre 2018 la candidature de Gilles Le Gendre à la présidence du groupe LREM, pour remplacer Richard Ferrand élu au perchoir, et elle aurait pu lui succéder en septembre 2020 si elle n’avait pas été nommée au gouvernement.

Elle a été aussi engagée pleinement dans la bataille des municipales à Paris, comme responsable de communication de Benjamin Griveaux qui a cependant été amené à démissionner quelques semaines avant les élections.

N’hésitant pas à nourrir la polémique, Olivia Grégoire était l’une des rares membres du groupe LREM à savoir ce qu’être député de la majorité, à savoir batailler contre l’opposition, répondre aux arguments, les combattre au besoin, multiplier les interventions dans les médias pour porter la parole gouvernementale. Bref, être un "second couteau" capable de soutenir le gouvernement lorsqu’il y a la tempête.

Nommée à 41 ans, le 26 juillet 2020, Secrétaire d’État auprès de Bruno Le Maire, chargée de l’Économie sociale, solidaire et responsable, Olivia Grégoire a obtenu de façon méritée un strapontin ministériel sur un sujet qui lui tenait à cœur. Elle fait partie, avec Amélie de Montchalin, des "révélations" des députés LREM.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (26 juillet 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Secrétaires d’État du gouvernement Castex : des nouveaux et des partants.
Nomination des secrétaires d’État du gouvernement Castex I.
Gérald Darmanin, cible des hypocrisies ambiantes.
Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !
Discours du Premier Ministre Jean Castex le 16 juillet 2020 au Sénat (texte intégral).
Discours du Premier Ministre Jean Castex le 15 juillet 2020 à l’Assemblée Nationale (texte intégral).
La déclaration de politique générale de Jean Castex le 15 juillet 2020.
Interview du Président Emmanuel Macron le 14 juillet 2020 par Léa Salamé et Gilles Bouleau (retranscription intégrale).
Emmanuel Macron face aux passions tristes.
Gérald Darmanin, l'enfant terrible de la Macronie.
Composition du gouvernement Castex I.
Le gouvernement Castex I nommé le 6 juillet 2020.
Jean Castex, le Premier Ministre du déconfinement d’Emmanuel Macron.
Discours du Président Emmanuel Macron devant la Convention citoyenne pour le climat le 29 juin 2020 à l’Élysée (texte intégral).
Après-covid-19 : écologie citoyenne, retraites, PMA, assurance-chômage ?
Édouard Philippe, le grand atout d’Emmanuel Macron.
Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?
Convention citoyenne pour le climat : le danger du tirage au sort.
Les vrais patriotes français sont fiers de leur pays, la France !
Le Sénat vote le principe de la PMA pour toutes.
Retraites : Discours de la non-méthode.
La réforme de l’assurance-chômage.
Emmanuel Macron explique sa transition écologique.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200726-gouvernement-castex.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/secretaires-d-etat-du-gouvernement-226018

htp://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/07/27/38450651.html





 

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26 juillet 2020 7 26 /07 /juillet /2020 19:35

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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200726-gouvernement-castex.html
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200715-castex.html



Sur la proposition du Premier ministre, le Président de la République a pris ce dimanche 26 juillet 2020 un décret modifiant la composition du Gouvernement :

Sont nommés Secrétaires d’État :

    Auprès du Premier Ministre : 

    Mme Sophie CLUZEL, chargée des Personnes handicapées ;

    Auprès du Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères : 

    M. Jean-Baptiste LEMOYNE, chargé du Tourisme, des Français de l’étranger et de la Francophonie ; 
    M. Clément BEAUNE, chargé des Affaires européennes ;

    Auprès de la Ministre de la Transition écologique : 

    Mme Bérangère ABBA, chargée de la Biodiversité ;

    Auprès du Ministre de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports : 

    Mme Nathalie ELIMAS, chargée de l’Education prioritaire ; 
    Mme Sarah EL HAIRY, chargée de la Jeunesse et de l’Engagement ;

    Auprès du Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance et de la Ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales : 

    M. Cédric O, chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques ;

    Auprès du Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance : 

    Mme Olivia GREGOIRE, chargée de l’Economie sociale, solidaire et responsable ;

    Auprès de la Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion : 

    M. Laurent PIETRASZEWSKI, chargé des Retraites et de la Santé au travail ;

    Auprès de la Ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales : 

    M. Joël GIRAUD, chargé de la Ruralité ;

    Auprès du Ministre des Solidarités et de la Santé : 

    M. Adrien TAQUET, chargé de l’Enfance et des Familles.


Le Président de la République réunira le Conseil des ministres, avec l’ensemble des membres du Gouvernement, ce mercredi 29 juillet 2020 à 10h00.


Source : www.elysee.fr

http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200726-nomination-gouvernement-castex.html
 

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25 juillet 2020 6 25 /07 /juillet /2020 08:40

« C’est une lâcheté bien commune que celle d’immoler un bon homme à l’amusement des autres. » (Diderot).



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Dans une précédente vie, je m’étais retrouvé à enseigner en classe à des "grands" adolescents. Ce n’était pas forcément très facile, à tel point que les heures de cours s’appelaient dans cet établissement heures de "confrontation pédagogique" (!), car ce public était "difficile", je n’avais d’ailleurs pas moi-même accès à leur dossier mais c’était parfois du "lourd". Certains collègues revenaient de ces heures parfois en larmes, d’autres (ou les mêmes) faisaient des dépressions. Cependant, je me moquais de ces difficultés, en particulier de ces remises en cause personnelles systématiques qui pouvaient ébranler ceux des enseignants qui n’avaient pas beaucoup confiance en eux, car je savais ce que je valais ou pas, et j’avais tant bien que mal réussi à nourrir une relation personnelle avec ces élèves qui demandaient avant tout une attention soutenue et surtout, une considération personnalisée.

Un jour en fin de cours, en fin de matinée, un samedi (les élèves étaient en internat et retrouvaient leur famille le week-end), l’une des élèves m’a lancé "Monsieur, je vous kiffe grave !" avec un sourire mais aussi un peu d’appréhension. J’ai répondu par un petit sourire avant de les saluer et de m’en aller. Il est vrai que dans ce genre d’établissement, les relations ne pouvaient pas être distantes car il fallait vraiment s’adapter à chacun des élèves (peu nombreux d’ailleurs par classe), ce qui faisait que pour certains enseignants, un tel investissement psychologique était épuisant. J’avais plus de recul sans doute parce que je savais que je ne ferais pas cette activité toute ma vie.

Pourquoi cette anecdote ? Parce qu’on peut être confronté à des "occasions" qui peuvent paraître insensées. J’ai essayé d’évaluer la part de sincérité de l’élève qui, de plus, avait un peu plus de 18 ans (elle n’était donc plus mineure), et la part de vantardise par rapport à ses copines, la part aussi de provocation vis-à-vis de moi, mais au fil du temps, je pouvais me dire qu’il y avait autour de 50% de sincérité. C’est-à-dire, disons-le clairement, si j’étais un homme qui souffrait terriblement d’une solitude affective et qui cherchait une relation féminine, je pense qu’à cette époque, pour reprendre le mot de Michel Blanc dans les Bronzés, j’aurais pu "conclure". Je l’écris sans vantardise, car je n’aurais eu aucun mérite puisqu’un enseignant est souvent considéré comme un modèle et objet d’admiration ou de haine, bref, objet de diverses émotions à canaliser.

Dans mon esprit, ce n’était même pas envisageable, et l’histoire n’aurait pas duré, c’était plus du ressentiment que du sentiment, et si on parle de "morale" ou plutôt de "déontologie", il est fort peu recommandable (c’est un euphémisme !) qu’un enseignant tombe amoureux d’un élève, au même titre qu’un médecin tombe amoureux d’un patient (mes masculins sont du neutre, un ou une élève, un ou une patiente, désolé, je ne pratique pas l’écriture inclusive). Au-delà de la position de pouvoir (pour un enseignant, mettre une bonne note), il y a aussi cette position centrale de "star" (un qui parle au groupe) qui peut le rendre (à tort) rayonnant. Bref, évidemment qu’une telle relation était artificielle et je n’ai pas changé de comportement les jours d’après, mais j’ai bien compris qu’une personne moins scrupuleuse que moi aurait pu profiter de cette position "privilégiée" pour faire ses "petites affaires".

Toute cette longue introduction pour parler du nouveau Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin : mes propos ici ont pour but de le soutenir totalement. Parfois, il faut savoir se mouiller, et je prends le risque de le faire parce que je considère que Gérald Darmanin a montré, avec les premières semaines d’exercice, qu’il est un excellent Ministre de l’Intérieur et que le pays a besoin de lui. Gérald Darmanin est le symbole de l’esprit républicain, celui qui, par des origines diverses dont on se moque, se distingue par son seul mérite, et par l’amour de son pays. Ce sens du civisme est indispensable, couplé au sens politique, pour diriger une police qui a été particulièrement secouée par les différents traumatismes des dernières années (terrorisme, gilets jaunes, crise sanitaire). Le risque de communautarisme (que le Président Emmanuel Macron appelle séparatisme) est réel et s’est encore illustré lors des manifestations à propos d’Adama Traoré. Il fallait dès maintenant un Ministre de l’Intérieur fort et politique, capable de parler républicain à tous, forces de l’ordre et population.

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On a vu depuis longtemps qu’il était  très difficile de trouver un bon Ministre de l’Intérieur. Le dernier en date s’appelle …Bernard Cazeneuve, oui, un socialiste, qui a été essentiel (et excellent) au moment des attentats terroristes. Les suivants, entre décembre 2016 et juillet 2020, ont été particulièrement médiocres sinon mauvais, et d’ailleurs, savez-vous combien et qui ils étaient ? Si je ne compte pas l’intérim du Premier Ministre Édouard Philippe en octobre 2018, ils étaient quatre : Bruno Le Roux (vite démissionnaire pour les mêmes raisons que l’affaire Fillon), Matthias Fekl (à 39 ans, connu pour son anonymat !), Gérard Collomb (lessivé par l’affaire Benalla), et enfin, Christophe Castaner (l’inventeur du concept de "soupçon avéré").

Gérald Darmanin n’est pas de cette lignée, elle est plutôt de l’autre lignée, celle des Clemenceau, des Charles Pasqua, des Jean-Pierre Chevènement, des Nicolas Sarkozy dont on prête plus d’influence que la réalité (on ne prête qu’aux riches) à une période de résurrection éditoriale.

Cela dit, bien entendu qu’un "bon ministre" (dans le sens politique et gouvernemental du terme) ne doit pas être un "criminel". Venons-en aux "affaires". Il se trouve que les deux "affaires" de viol dont il est question ont déjà été classées sans suite par les juges. Si l’affaire "repart", c’est seulement par un vice de procédure (apparemment, un courrier qui ne serait pas arrivé à temps chez la plaignante), donc de pure forme, mais les juges avaient déjà jugé qu’il n’y avait pas lieu à être une "affaire". Le viol, c’est une relation non consentie, éventuellement avec violence ou surprise. Or, les faits étaient déjà établis, la plaignante comme le ministre, sur les faits, convergent vers les mêmes affirmations.

Si l’on regarde le dossier, il s’agit de 2009, à une époque où Gérald Darmanin avait 26 ans, permanent de l’UMP au siège à Paris, conseiller aux affaires juridiques du secrétaire général de l’époque, qui est son mentor en politique, Xavier Bertrand. L’UMP était au pouvoir, et une femme adhérente de l’UMP est venue le voir car elle voulait demander à l’UMP d’effacer son casier judiciaire et n’avait pas trouvé mieux comme argument qu’une "relation sans lendemain". Le futur ministre l’a reconnu, ce fut une belle c*nnerie d’avoir accepté, non pas le deal mais la relation, car justement, il n’a rien fait pour la dame (ce qui, pour le coup, aurait été un vrai scandale : qu’un parti majoritaire, pas même le Ministre de la Justice, intervienne sur le cours de la justice). Du coup, la dame profite d’un double contexte pour se venger, l’importance politique grandissante de Gérald Darmanin d’une part, et la vague MeeToo d’autre part. À l’époque, il n’était que simplement conseiller municipal de Tourcoing et n’imaginait probablement pas qu’il serait ministre seulement huit ans plus tard.

Je le répète, sur le plan de la morale du comportement, il aurait dû être un peu plus "froid" et "retenu" face aux avances de la dame, et le niveau de "résistance" dans ce domaine est très diversifié. Mais cela n’a rien à avoir avec un viol et les premiers juges l’avaient déjà exprimé.

Ce qui me choque dans ces manifestations hostiles et haineuses contre Gérald Darmanin depuis la nomination du nouveau gouvernement, c’est l’extrême hypocrisie de ceux qui le critiquent pour cette raison. Ce qui, entre nous, montre que sur le plan de son action ministérielle, on ne lui reproche (encore) rien.

Cette hypocrisie est claire puisque Gérald Darmanin n’est pas devenu ministre en juillet 2020 mais en mai 2017, cela fait trois ans qu’il est ministre et qu’on ne me dise pas que c’était un ministère mineur, il s’est occupé du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et, en passant, c’est lui qui a réalisé le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Pourquoi les ligues féministes extrémistes n’ont-elles pas critiqué ce ministre si important avant juillet 2020 plus tôt ? Pourtant, il pouvait montrer un très mauvais exemple pour la fonction publique, on aurait pu dire que sa présence à ce ministère encourageait le viol ou même les promotions canapé dans la fonction publique (voir le film "Promotion canapé" avec Thierry Lhermitte).

La vérité, c’est que Gérald Darmanin est aujourd’hui la cible de deux hypocrisies.

La première est celle des "féministes" que j’entoure de guillemets, car je me sens aussi féministe qu’une féministe en ce sens que toutes les inégalités par le sexe, la violence conjugale et tout ce qui a trait avec des comportements machistes ou sexistes m’insupportent, qui ont besoin de "proie" pour continuer à survivre médiatiquement. C’est Gérald Darmanin, cela aurait pu être un autre. Ce fut auparavant Denis Baupin. Très récemment encore, une autre victime, Christophe Girard, adjoint à la maire de Paris, qui a dû démissionner le 23 juillet 2020 pour une raison aussi hypocrite (sa supposée proximité avec Gabriel Matzneff). Là, on n’est pas loin, sur le principe, de la période d’inquisition la plus noire du maoïsme, la Révolution culturelle.

Cette hypocrisie n’est pas sans conséquence : elle discrédite complètement le combat de ces féministes extrémistes au point d’être complètement contreproductif pour cette noble cause de la défense des femmes face à la brutalité des hommes. Au même titre que la gestion désastreuse de la justice dans l’affaire d’Outreau, en condamnant voire en conduisant au suicide certains prévenus reconnus innocents par la suite, ont passablement discrédité le noble et indispensable combat contre la pédophilie parce qu’il insinue le doute et le trouble là où la fermeté devrait être de mise.

La seconde hypocrisie est plus classique, elle est dans la posture politicienne et se moque bien du féminisme : l’objectif est clairement de s’opposer au gouvernement par tous les moyens, et comme il n’y a plus d’argument de fond, on s’en prend aux hommes. Et Gérald Darmanin est impeccable comme "proie" pour ces opposants de pacotille, puisqu’il est le double symbole de tout ce qu’ils détestent, en un coup, ils font ce qu’ils croient être de l’antimacronisme et de l’antisarkozysme. Au-delà de la détestation (justifiée ou pas) d’Emmanuel Macron et de Nicolas Sarkozy, il y a aussi une évidente jalousie contre un homme qui, à 37 ans, a atteint des responsabilités régaliennes peu communes (du reste, la même jalousie que contre le jeunesse d’Emmanuel Macron).

Autant je considère que la première hypocrisie relève de la très mauvaise foi, de la manipulation et de l’instrumentalisation, autant la seconde me paraît de bonne guerre, c’est la règle des joutes politiques et si on n’a pas assez de cuir pour supporter cela, on fait autre chose (exemple, Michèle Barzach, etc.).

Je reviens sur la première hypocrisie. Celle-ci est indéfendable : il pourrait être Ministre du Budget mais pas Ministre de l’Intérieur. S’il était vraiment un violeur, ce ne serait pas possible qu’il soit l’un ou l’autre ! D’ailleurs, on parlait de lui comme Ministre du Travail, et là encore, pourquoi, à ce ministère, n’aurait-il pas été un signal désastreux pour l’égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle ? Et l’incohérence quand on accuse un ministre de viol alors qu’on n’ose pas s’attaquer aux problèmes récurrents de la violence sexiste issue d’une religion ? Alors même que ce ministre veut, pour la première fois dans le discours d’État, lutter contre l’islamisme politique qui veut imposer ses lois à la République ?

En outre, le discours d’inquisition actuel est très incohérent. Il laisse croire que le Ministre de l’Intérieur commande les juges du siège. C’est vraiment avoir une fausse idée des institutions réelles. Car la police judiciaire, celle qui mène l’enquête, est dirigée par un juge, pas par un policier. Et croire que le juge n’est pas indépendant, aujourd’hui, il va falloir le prouver. Je pense que l’affaire Fillon, l’affaire Sarkozy avec les écoutes illégales, l’histoire du "mur des c*ns" montrent au contraire que les juges seraient plutôt un peu trop indépendants du pouvoir politique !…

Je rappelle que le ministre est issu d’un gouvernement démocratiquement issu d’élections libres. Au contraire de tout fonctionnaire. La démocratie, c’est aussi des contre-pouvoirs, donc, je ne suis évidemment pas contre l’indépendance des juges, mais il faut aussi pouvoir les sanctionner, les fautes commises par des juges, que ce sût lors de l’affaire d’Outreau ou que ce fût l’affaire Grégory, ont montré qu’elles n’ont jamais été suivies de sanctions. De plus, pourquoi y aurait-il suspicion de trafic d’influence sur un juge si celui-ci décidait d’un nouveau non-lieu, alors que ce non-lieu ne serait que confirmé (déjà décidé auparavant pour la même plainte) ?

Je rappelle par ailleurs que je n’ai pas toujours soutenu le pouvoir ces dernières années quand certaines affaires médiatisées sont apparues : j’ai été choqué par l’affaire Benalla, j’ai aussi été choqué par l’histoire du homard, qui, pourtant, n’avait rien d’illégal mais je considérais que François de Rugy devait et allait démissionner (c’était il y a juste un an, cela fait déjà très loin !).

Tous ceux qui considèrent que le maintien de Gérald Darmanin à l’Intérieur est un mauvais symbole pour les femmes violées me font (disons-le) gerber car c’est complètement stupide de faire des symboles de ce genre. Ce seraient donc les même qui voudraient des fusillés pour l’exemple ? Qu’importe la personne de Gérald Darmanin, son honneur, même s’il est innocent, il est un "symbole" et à ce titre, il doit être condamné sur l’autel médiatique : c’est un raisonnement particulièrement affligeant.

Mais de qui se moque-t-on ? On bafoue les droits les plus élémentaires qui font que la justice doit être faite par des juges et pas par des militantes activistes assoiffées de visibilité médiatique. Il y a le droit à la présomption d’innocence qui vaut pour tout le monde. Les beaux esprits qui s’émeuvent de condamnés à mort innocentés aux États-Unis et qui sont les premiers procureurs à condamner un homme ici ont de quoi me faire vomir. Je comprends mieux (mais ce n’est pas nouveau, c’est récurrent) le processus intellectuel qui a progressivement abouti à la Terreur pendant la Révolution, dirigée par un homme supposé opposé à la peine de mort et qui fit de la guillotine l’outil privilégié de sa gouvernance. Il faut toujours se méfier des moralisateurs qui professent la vertu en politique, cela peut toujours mener très loin…

Alors oui, aux opposants de s’opposer à la politique du gouvernement, à la politique du Ministre de l’Intérieur, à ces derniers de la défendre, d’expliquer leur action pour réduire le fossé entre plusieurs France, comme l’a expliqué le Premier Ministre Jean Castex dans son discours de politique générale, mais laissons aux seuls juges la capacité de savoir qui est violeur ou pas, et cela sans considérer que la parole de femmes accusatrices vaudrait plus que celle d’un ministre qui n’a jamais rien eu à son casier judiciaire. Et avant d’avoir la preuve formelle qu’il y ait eu viol, ce dont je doute, soutien total au ministre Darmanin !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (24 juillet 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Gérald Darmanin, cible des hypocrisies ambiantes.
Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !
Discours du Premier Ministre Jean Castex le 16 juillet 2020 au Sénat (texte intégral).
Discours du Premier Ministre Jean Castex le 15 juillet 2020 à l’Assemblée Nationale (texte intégral).
La déclaration de politique générale de Jean Castex le 15 juillet 2020.
Interview du Président Emmanuel Macron le 14 juillet 2020 par Léa Salamé et Gilles Bouleau (retranscription intégrale).
Emmanuel Macron face aux passions tristes.
Gérald Darmanin, l'enfant terrible de la Macronie.
Composition du gouvernement Castex I.
Le gouvernement Castex I nommé le 6 juillet 2020.
Jean Castex, le Premier Ministre du déconfinement d’Emmanuel Macron.
Discours du Président Emmanuel Macron devant la Convention citoyenne pour le climat le 29 juin 2020 à l’Élysée (texte intégral).
Après-covid-19 : écologie citoyenne, retraites, PMA, assurance-chômage ?
Édouard Philippe, le grand atout d’Emmanuel Macron.
Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?
Convention citoyenne pour le climat : le danger du tirage au sort.
Les vrais patriotes français sont fiers de leur pays, la France !
Le Sénat vote le principe de la PMA pour toutes.
Retraites : Discours de la non-méthode.
La réforme de l’assurance-chômage.
Emmanuel Macron explique sa transition écologique.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200724-darmanin.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/gerald-darmanin-cible-des-225967

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/07/24/38447265.html





 

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7 juillet 2020 2 07 /07 /juillet /2020 03:50

« Le gouvernement a un bras long et un bras court ; le long sert à prendre et arrive partout, le bras court sert à donner, mais il arrive seulement à ceux qui sont tous près. » (Ignazio Silone, 1936).




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Le premier conseil des ministres a lieu ce mardi 7 juillet 2020 à 15 heures. Comme prévu, la nomination du gouvernement de Jean Castex, dont la composition a été annoncée ce lundi 6 juillet 2020 à 19h05, a pris plus de temps que prévu. Au-delà de sa composition, de la complexité de sa représentativité (parité, origine géographique, poids lourds politiques et "société civile", âge, etc.), il faut désormais vérifier que tout soit ok sur le plan fiscal, déclaration de patrimoine, de revenus, et je doute que les fonctionnaires de Bercy travaillent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Donc, comme prévu, retard.

Avant d’évoquer la composition du nouveau gouvernement, passons rapidement sur les premiers pas du nouveau Premier Ministre Jean Castex. Et c’est un sentiment très étrange qui vient rapidement à l’esprit, l’impression d’être retourné en arrière, vers les années 1960, voire la Quatrième République. À l’évidence, le look du nouveau chef du gouvernement n’est pas moderne : grosses lunettes, costumes stricts, gestes guindés, ton assez virulent, avec beaucoup de mouvements du buste, comme s’il ne tenait pas dans son fauteuil lors de son entretien dans le journal de 20 heures sur TF1 le 3 juillet 2020, comme si un plateau de télévision était un préau d’école. Guindé. Et distant. Quand il s’adressait à la journaliste, toujours un poli mais froid "Madame". Aucun sourire, comme si le technocrate l’avait largement emporté sur l’homme politique : il l’a d’ailleurs dit, il ne recherche pas la lumière, il veut des résultats. Il va rapidement savoir que diriger un gouvernement, c’est aussi chercher à séduire les Français. Sans un minimum d’adhésion populaire, il n’aura… aucun résultat.

Cela dit, le haut fonctionnaire qui est apparu le 3 juillet 2020 sur TF1 s’est vite effacé derrière le désormais poids lourd de la vie politique avec deux visites importantes sur le terrain avant même de connaître le nom de ses ministres, la visite d’une entreprise à Corbeil-Essonnes le 4 juillet 2020 et la visite du commissariat de La Courneuve le 5 juillet 2020, montrant ses deux préoccupations : la relance économique et le régalien (la police ici).

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Venons-en à la composition du gouvernement.

Les mauvaises langues diraient : "tout ça pour ça !" et elles auraient en partie raison. Précisons déjà une fois pour toutes que ce qui vient de se passer n’est pas un "remaniement" mais un changement de gouvernement, en principe plus imposant. Le remaniement concerne justement le changement de ministres sans démission du gouvernement (que le Premier Ministre soit reconduit ou pas). Or, s’il s’agit ici bien d’un changement de gouvernement, il n’y a pas eu une révolution.

Apparemment, l’Élysée et Matignon ont cherché pendant tout le week-end à "pêcher" des personnalités de droite et de gauche "connues". Exemples selon les indiscrétions de journalistes : Claude Bartolone aurait été approché, aussi Valérie Rabault (la présidente du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale). Ségolène Royal avait annoncé sur BFM-TV le week-end qu’elle avait été aussi contactée par l’entourage du pouvoir (mais l’Élysée n’a pas semblé donner suite à une éventuelle proposition). Même Hubert Védrine aurait pu être sollicité pour ...l'écologie (objet de son dernier ouvrage). À droite, il a été question de Guillaume Larrivé à la Justice, aussi de Damien Abad (président du groupe LR à l’Assemblée Nationale). Même des écologistes auraient été approchés, on a parlé de Pascal Canfin, aussi de Laurence Tubiana qui a coprésidé le Convention citoyenne pour le climat.

Il n’y a aucun ministre d’État dans le nouveau gouvernement. Emmanuel Macron a eu une mauvaise expérience avec ce concept qui, pourtant, est "pratique" pour honorer une personnalité sans que cela n’ait une réelle conséquence politique. Car tous ses ministres d’État ont démissionné plus ou moins rapidement : François Bayrou, Nicolas Hulot, Gérard Collomb, François de Rugy.

Globalement, la composition du gouvernement reflète peu de différence en termes d’étiquettes politiques et contrairement à ce qu’on dit, pas vraiment centre droit, il y a peu de centristes à partir les ministres du MoDem (aucun UDI, une radicale, Annick Girardin, depuis 2017), et surtout des personnalités anciennes marquées à LR ou au PS (Jean-Yves Le Drian, Olivier Véran, Olivier Dussopt, etc.).

Quant aux "société civile", c’est assez clair sur leur destinée. Ministre est une fonction éminemment politique. Soit le ministre "société civile" l’a compris et devient un grand politique, il n’est donc plus "société civile" (il y a eu beaucoup d’exemples dans le passé, notamment durant la période gaulliste), soit le ministre "société civile" ne l’a pas compris et il montre qu’il se montre assez mauvais (ce qui ne l’empêche pas, éventuellement, de rester, mais à ma connaissance, ce n’est pas le cas ici).

Dans cette nouvelle composition, il y a donc un pôle de stabilité, un groupe de nouveaux ministres importants, aussi des ministres promus, d’autres en reclassement, des nouveautés, et puis des ministres sortants, sans oublier d’autres hypothèses.


1. Le pôle de stabilité

Jean-Yves Le Drian reste en place comme Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères avec rang de numéro deux (certains avaient imaginé Manul Valls !), Jean-Michel Blanquer Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports (on avait parlé de lui à l’Intérieur, mais alors, qui aurait pu lui succéder à l’Éducation nationale ?), Bruno Le Maire à l’Économie, aux Finances et à la Relance (il supervise aussi le Budget), Florence Parly aux Armées, Jacqueline Gourault à la Cohésion des territoires et aux Relations avec les collectivités territoriales, Olivier Véran, qui a géré la crise sanitaire, aux Solidarités et à la Santé, Frédérique Vidal à l’Enseignement supérieur, à la Recherche et à l’Innovation (avec ParcourSup, elle a réussi à améliorer un système défaillant lors de son arrivée au gouvernement en 2017 et les étudiants et futurs étudiants ont pu le constater très positivement malgré la crise sanitaire), Marc Fesneau aux Relations avec le Parlement avec un rajout, aussi à la Participation citoyenne (il avait été cité pour l’Agriculture), Roxana Maracineanu aux Sports (qui est rétrogradée de ministre en ministre déléguée), Jean-Baptiste Djebbari aux Transports. À eux, il faut aussi rajouter Emmanuelle Wargon au Logement, Olivier Dussopt aux Comptes publics et Geneviève Darrieussecq à la Mémoire et aux Anciens combattants (c’est nouveau comme portefeuille, la "mémoire") qui ont à peine changé d’attributions.


2. Les nouveaux ministres qui vont compter

S’il fallait résumer le remaniement par un seul homme, ce serait évidemment Gérald Darmanin qu’il faudrait citer : en devenant Ministre de l’Intérieur à 37 ans, il est le vrai grand poids lourds politique de ce gouvernement. Dire qu’il est sarkozyste n’est pas faux mais c’est une erreur de s’y arrêter car personne n’imagine Nicolas Sarkozy revenir au pouvoir. Gérald Darmanin est plutôt le "chouchou" d’Emmanuel Macron. Il est sans doute le plus grand animal politique de la Macronie, ambitieux mais aussi efficace. En occupant les deux fonctions stratégiques au sein d’un gouvernement (fisc et agences de renseignement), il sait ou saura tout ce qui se passe en France. Nul doute que Gérald Darmanin, au-delà d’être sarkozyste, est avant tout sarkozyen, c’est-à-dire qu’il nourrit une ambition très haute et y met les moyens. Sa présence au Havre le 5 juillet 2020 pour assister à l’élection du maire du Havre, Édouard Philippe, a même montré sa puissance politique.

En revanche, l’arrivée de Barbara Pompili, qui a échoué au perchoir, présidente de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée Nationale, comme nouvelle Ministre de la Transition écologique, n’est ni une surprise ni une révolution. Il est faux de dire qu’elle est une écologiste, elle est LREM et elle a fait partie de ces écologistes arrivistes (comme François de Rugy) qui sont devenus hollandistes sous François Hollande pour être ministres puis macronistes sous Emmanuel Macron pour être ministres. Aucune colonne vertébrale. Un peu plus, et j’aurais cru que Jean-Vincent Placé aurait été nommé à ce poste pourtant important puisque numéro trois du gouvernement. De toute façon, la nomination de Nicolas Hulot n’a abouti à rien, comment imaginer qu’il y aurait une révolution écologique avec Barbara Pompili ? À mon sens, le seul qui aurait pu raisonnablement faire bouger les lignes aurait été Daniel Cohn-Bendit, macron-compatible mais probablement trop dilettante et trop âgé pour accepter une telle aventure qu’on ne lui aurait de toute façon pas proposée !

J’ai entendu Jérôme Jaffré sur LCI saluer (sans être contredit sur le plateau) la structure supposée nouvelle du Ministère de la Transition écologique qui englobe le Logement (Emmanuelle Wargon) et les Transports (Jean-Baptiste Djebbari)… mais ce n’est pas du tout nouveau, c’était déjà le cas dans le gouvernement précédent et on peut même remonter au deuxième gouvernement de François Fillon dans une telle structuration ministérielle : Dominique Busserau aux Transports rapportait à Jean-Louis Borloo, Ministre d’État, Ministre de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables, nommés le 18 juin 2007 !

La nomination de l’avocat célèbre Éric Dupond-Moretti au Ministère de la Justice est en revanche très surprenante et je ne sais qu’en penser sinon que cela va être un exercice très difficile pour lui de passer de l’état de "rebelle" ou "contestataire" (et, disons-le, de "grande gueule") à l’état de "représentant du pouvoir" avec la "langue de bois" associée. Quand son nom a circulé au début de l’après-midi, l’ancien ministre socialiste Jean-Marie Le Guen, recyclé à commenter l’actualité sur LCI, a éclaté d’un fou rire nerveux en se disant que c’était incroyable de penser que pour ce poste étaient évoquées des personnalités aussi différentes qu’Éric Dupond-Moretti, Guillaume Larrivé, François Molins et Laurence Vichnievsky (ancienne juge qui a classé l’affaire Robert Boulin, devenue élue locale écologiste puis députée MoDem en 2017). Il ne faut pas être surpris par la nomination d’un avocat, c’est assez courant et après tout, Robert Badinter était aussi un avocat et fut un excellent Ministre de la Justice. Certes, les juges du parquet national financier (PNF) peuvent s’inquiéter car leur nouveau ministre, encore avocat, voulait déposer une plainte contre le PNF…

Moins surprenante qu’on ne pourrait l’imaginer, l’arrivée de Roselyne Bachelot au Ministère de la Culture est une véritable reconnaissance de son talent politique. J’applaudis son retour au gouvernement pour plusieurs raisons. D’une part, son action comme Ministre de la Santé lors de l’épidémie de la grippe A en 2009 a été tellement injustement fustigée que son sens des responsabilités a été révélé par la crise du covid-19 : non, on n’est jamais trop prudent quand il s’agit de la santé et de la vie de ses compatriotes ! Sa nomination signe une sorte de reconnaissance (j’allais écrire posthume !) de son action il y a dix ans. Mais le choix de la Culture n’est pas anodin. Certes, on a dit qu’elle adorait l’art lyrique (elle faisait même une chronique hebdomadaire sur France Musique à une époque, son premier déplacement fut pour Radio France), mais ce n’est pas la raison, la Culture française ne se limite quand même pas à l’opéra français du XIXe siècle ! En revanche, elle est bien placée pour faire redémarrer tous les événements culturels après la crise sanitaire, car le secteur de la culture a été particulièrement saccagé (économiquement et socialement) par la crise sanitaire (notamment mettre aux nouvelles normes sanitaires les équipements culturels). Son discours de passation des pouvoirs est une perle de l’esprit politique : elle a dit qu’elle serait la ministre des artistes et des territoires. Son discours était excellent en ce sens qu’elle a dit ce qu’un excellent politique devait dire dans de telles circonstances, même si sa liberté personnelle a du mal à repasser au "vous" après avoir tutoyé tout le monde. D’après ce qu’elle a dit, elle connaissait sa nomination dès le vendredi soir, cela lui a donné du temps pour préparer son discours (qui devrait devenir un exemple et même un modèle pour ce genre de discours). Certains mauvais journalistes ont voulu voir en elle une "sarkozyste" (histoire de dire en simplifiant que le gouvernement est devenu sarkozyste), mais elle ne l’a jamais été même si elle a été ministre de Nicolas Sarkozy, elle était au contraire chiraquienne et très proche de François Fillon (aussi pour des raisons géographiques).


3. Des ministres promus

En plus des précédents (dont certains secrétaires d’État sont devenus ministres délégués), d’autres ministres ont été promus dans ce nouveau gouvernement. C’est le cas de plusieurs anciens "sous-ministres" devenus "ministres plein" : Sébastien Lecornu devient Ministre des Outre-mer, Julien Denormandie (dont on citait le nom pour l’Éducation nationale) Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation (cependant, il aurait fallu mettre, à mon sens, ce ministère sous la supervision de la Transition écologique, ou l’Alimentation supervisée par la Santé plus que par l’économie…) et Amélie de Montchalin Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques (ne pas oublier le "s" à publiques).

Parmi les ministres délégués, il faut aussi noter Agnès Pannier-Runacher, qui a encore de belles perspectives devant elle, à l’Industrie, Marlène Schiappa à la Citoyenneté (il faudra expliquer la différence avec la Participation citoyenne de Marc Fesneau, probablement tout ce qui a trait à la laïcité), et un Secrétaire d’État stratégique puisque porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.


4. Des ministres reclassés

Certains ministres ont dû laisser leur ministère pour diverses raisons plus ou moins impérieuses, mais comme ils n’ont pas démérité, ils changent d’attributions sans être vraiment promus. C’est le cas d’Élisabeth Borne qui est nommée Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion (un poste stratégique). Également Annick Girardin Ministre de la Mer. Franck Riester est rétrogradé en Ministre délégué, chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité, cette dernière attribution est nouvelle et importante. Ce qui est notable, c’est qu’il n’est pas rattaché à Bercy mais au Quai d’Orsay.


5. Les petits nouveaux et la parité

Je ne veux pas les citer tous, ou plutôt toutes, car j’ai l’impression qu’on a nommé beaucoup de nouveaux ministres déléguées "femmes" pour une question de parité. Comptons : hors Premier Ministre, les membres du gouvernement nommés le 6 juillet 2020 sont au nombre de 31 dont 16 ministres, 14 ministres délégués et 1 secrétaire d’État (a priori, d’autres secrétaires d’État seront nommés ultérieurement, ce qui fait déjà un gouvernement très peu resserré). Il y a 17 femmes dont 8 ministres et 9 ministres déléguées, donc plus de femmes que d’hommes pour l’instant (bravo !).

Je salue l’arrivée de Brigitte Bourguignon, anciennement socialiste et devenue l’un des piliers de la Macronie au Parlement, pressentie un moment pour le perchoir, et présidente de la Commission des affaires sociales, et à ce titre, présidente de la commission d’enquête sur la gestion de la crise du covid-19. Doublement : sa nomination au gouvernement est largement justifiée, et son attribution est à mon sens cruciale, puisqu’elle est nommée Ministre déléguée chargée de l’Autonomie, c’est sujet très important qui concerne tout le monde et que la crise sanitaire a encore plus révélé.

Plus généralement, on voit de nombreuses attributions "sociales" parmi les nouveaux ministres déléguées : Autonomie, Insertion (professionnelle) pour Brigitte Klinkert (ex-LR, présidente du conseil départemental du Haut-Rhin, suppléante du député Éric Straumann qui vient d’être élu maire de Colmar), la Ville pour Nadia Hai (jeune députée LREM de Trappes, la circonscription de Benoît Hamon) et l’Égalité femmes-hommes, Diversité et Égalité des chance pour Élisabeth Moreno (présidente de Hewlett-Packard Afrique et ancienne présidente de Lenovo France).

Des nouveaux, je veux aussi citer Alain Griset, chef d’entreprise, affecté aux PME. Le principe même d’un ministère délégué aux PME est contestable. L’ancien président du CNPF, Yvon Gattaz insistait plutôt sur les entreprises intermédiaires, celles qui manquent en France et qu’il faudrait encourager pour qu’elles deviennent des grandes entreprises. Le concept de PME est dépassé, car il n’y a aucun point commun entre une entreprise de 400 employés qui pourrait se développer et en avoir 4 000, et un petit artisan qui, éventuellement, salarie une personne ou deux.


6. Les ministres sortants

Je ne peux pas encore donner la totalité des ministres qui quittent le navire dans la mesure où des secrétaires d’État devraient encore être nommés, ce qui ferait que l’avenir par exemple de Brune Poirson, de Christelle Dubos, de Sophie Cluzel, de Jean-Baptiste Lemoyne, etc. n’est pas encore connu (j’ai cité des personnes qui n’ont pas démérité).

Quelques ministres étaient donnés partants pour le manque de sens politique. C’était notamment le cas de Nicole Belloubet, à la Justice, ministère très difficile ; elle n’a pas su imposer d’esprit politique. Elle est néanmoins remplacée par un non-politique dont la transformation sera intéressante à observer.

D’autres sont sortants parce qu’ils n’étaient pas faits pour le "job", c’est le cas de Christophe Castaner qui a été incapable de nouer des relations de confiance avec une police qui manifeste très souvent en ce moment. Sa proximité avec Emmanuel Macron n’aurait pas dû être le principal critère de sa nomination à l’Intérieur. Il ira probablement prendre la présidence du groupe LREM à l’Assemblée Nationale qui, actuellement, est très mal dirigé…

Le départ de Sibeth Ndiaye, qui a multiplié les gaffes orales, ne sera probablement pas non plus très regretté, tout comme celui de Didier Guillaume, ancien président du groupe socialiste au Sénat (le poste de Ministre de l’Agriculture est décidément aussi instable que la Transition écologique, l’Intérieur, la Culture et la Justice).

Le départ de Muriel Pénicaud est en revanche plus injuste dans la mesure où elle a fait rapidement et sans mouvements sociaux la réforme du code du travail, peut-être la seule réforme vraiment palpable qu’il y aura au bilan du quinquennat. Elle a fait partie de ces ministres "société civile" qui, comme Agnès Buzyn, ont montré qu’ils pouvaient avoir le sens politique.


La suite…

S’il y a d’autres secrétaires d’État susceptibles d’être nommés d’ici à la fin de la semaine, nul doute que certains sortants garderont leur poste. Certains journalistes ont évoqué l’entrée d’Aurore Bergé au gouvernement.

Puisque chacun y va de son casting, voici quelques députés de la majorité qui n’ont pas démérité et que je trouverais tout à fait justifié de voir au gouvernement : Sarah El Haïry (MoDem), Jean-Louis Bourlanges (MoDem), Bruno Joncour (MoDem), Olivia Grégoire (LRM), Marie Lebec (LREM), Bruno Bonnell (LREM), Sylvain Maillard (LREM), Émilie Chalas (LREM), malgré son échec à Grenoble, Jean-Michel Fauvergue (LREM), Anne Genetet (LREM), Cendra Motin (LREM)…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (06 juillet 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Composition du gouvernement Castex I.
Le gouvernement Castex I nommé le 6 juillet 2020.
Jean Castex, le Premier Ministre du déconfinement d’Emmanuel Macron.
Discours du Président Emmanuel Macron devant la Convention citoyenne pour le climat le 29 juin 2020 à l’Élysée (texte intégral).
Après-covid-19 : écologie citoyenne, retraites, PMA, assurance-chômage ?
Édouard Philippe, le grand atout d’Emmanuel Macron.
Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?
Convention citoyenne pour le climat : le danger du tirage au sort.
Les vrais patriotes français sont fiers de leur pays, la France !
Le Sénat vote le principe de la PMA pour toutes.
Retraites : Discours de la non-méthode.
La réforme de l’assurance-chômage.
Emmanuel Macron explique sa transition écologique.

_yartiCastexJeanA04



http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200706-gouvernement-castex.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/gouvernement-castex-i-vers-plus-de-225608

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/07/06/38415013.html





 

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6 juillet 2020 1 06 /07 /juillet /2020 18:32

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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200706-gouvernement-castex.html



COMPOSITION DU NOUVEAU GOUVERNEMENT

Sur la proposition du Premier ministre, le Président de la République a nommé :

M. Jean-Yves LE DRIAN, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères ;

Mme Barbara POMPILI, ministre de la Transition écologique ;

M. Jean-Michel BLANQUER, ministre de l'Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports ;

M. Bruno LE MAIRE, ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance ;

Mme Florence PARLY, ministre des Armées ;

M. Gérald DARMANIN, ministre de l'Intérieur ;

Mme Elisabeth BORNE, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion ;

M. Sébastien LECORNU, ministre des Outre-mer ;

Mme Jacqueline GOURAULT, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales ;

M. Éric DUPOND-MORETTI, Garde des Sceaux, ministre de la Justice ;

Mme Roselyne BACHELOT, ministre de la Culture ;

M. Olivier VÉRAN, ministre des Solidarités et de la Santé ;

Mme Annick GIRARDIN, ministre de la Mer ;

Mme Frédérique VIDAL, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation ;

M. Julien DENORMANDIE, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation ;

Mme Amélie de MONTCHALIN, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques.

Sont nommés ministres délégués :

Auprès du Premier ministre :
M. Marc FESNEAU, chargé des Relations avec le Parlement et de la Participation citoyenne ;

Mme Elisabeth MORENO, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances ;

Auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères :
M. Franck RIESTER, chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité ;

Auprès de la ministre de la Transition écologique :
Mme Emmanuelle WARGON, chargée du Logement ;

M. Jean-Baptiste DJEBBARI, chargé des Transports ;

Auprès du ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports :
Mme Roxana MARACINEANU, chargée des Sports ;

Auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance :
M. Olivier DUSSOPT, chargé des Comptes publics ;

Mme Agnès PANNIER-RUNACHER, chargée de l’Industrie ;

M. Alain GRISET, chargé des Petites et Moyennes Entreprises ;

Auprès de la ministre des Armées :
Mme Geneviève DARRIEUSSECQ, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants ;

Auprès du ministre de l’Intérieur :
Mme Marlène SCHIAPPA, chargée de la Citoyenneté ;

Auprès de la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion :
Mme Brigitte KLINKERT, chargée de l’Insertion ;

Auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales :
Mme Nadia HAI, chargée de la Ville ;

Auprès du ministre des Solidarités et de la Santé :
Mme Brigitte BOURGUIGNON, chargée de l’Autonomie ;

Est nommé secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre :
M. Gabriel ATTAL, Porte-parole du Gouvernement.

Le Président de la République réunira le Conseil des ministres, avec l’ensemble des membres du Gouvernement, ce mardi 7 juillet à 15h00.



Source : www.elysee.fr/

http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200706-composition-gouvernement-castex.html

 

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3 juillet 2020 5 03 /07 /juillet /2020 16:54

« Le Président m’a proposé de devenir Premier Ministre (…). Je mesure l’immensité de la tâche qui m’attend. » (Jean Castex, 3 juillet 2020).


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Tout s’est accéléré. Le jeudi 2 juillet 2020 dans la soirée, Édouard Philippe a été reçu par Emmanuel Macron à l’Élysée. Tout était dit. Il faut dire que la tête d’Édouard Philippe lors de la conclusion de la Convention citoyenne pour le climat, le 29 juin 2020, donnait déjà une idée de l’ambiance. Officiellement, Édouard Philippe a donné ce matin du 3 juillet 2020 la démission de son gouvernement qui a été vite acceptée par le Président de la République qui a nommé dès 12 heures 30 son successeur, Jean Castex. 17 heures 30, passation de pouvoirs à Matignon. 20 heures, interview au journal télévisé sur TF1. Le week-end pour la nomination du nouveau gouvernement et le lundi 6 juillet 2020, le premier conseil des ministres. Et peut-être auparavant, le dimanche soir, une intervention télévisée d’Emmanuel Macron (il a pris l’habitude de s’exprimer le dimanche soir).

Le choix de Jean Castex peut surprendre ou être prévisible, il est en tout cas intéressant à plus d’un titre.

Parlons d’abord rapidement d’Édouard Philippe. Il y a une certaine injustice à ce qu’il quitte maintenant Matignon. Il a été un excellent Premier Ministre, qui a fait le "job" comme très peu l’auraient fait en période de crise pandémique. Il a été sur tous les fronts et il a montré sa compétence d’homme d’État, d’homme de pouvoir, connaissant les rouages de l’État, sachant peser savamment ses mots à chaque parole publique pour éviter la polémique (au contraire d’Emmanuel Macron), ne manquant ni d’énergie ni de vision.

Quelle que soit l’opinion qu’on porte sur la gestion de la crise du covid-19, la comparaison avec les autres pays, tout aussi peu préparés à une telle catastrophe, montre qu’Édouard Philippe n’a pas démérité. Il est donc drôlement récompensé. Sa popularité plus forte que celle du Président ? Au contraire, cela permettait de tirer le tandem, tant qu’il y a loyauté, il n’y a pas de risque de jalousie, de compétition entre les deux têtes de l’État.

C’est en fait une certaine règle institutionnelle, cette ingratitude présidentielle, surtout lorsque le Premier Ministre commence à prendre de l’envergure, à avoir une stature politique propre, à exister par lui-même. Édouard Philippe n’est pas le seul. Georges Pompidou qui avait gagné les élections législatives de juin 1968, sauvant le gaullisme d’une crise inédite, a été remercié par le vieux Général pour préparer son "destin national". Jacques Chaban-Delmas, fort de sa Nouvelle société, qui venait de reconfirmer la confiance des parlementaires en 1972, s’est retrouvé aussitôt éjecté par un Georges Pompidou qui a changé de rôle. Michel Rocard, l’un des Premiers Ministres les plus populaires, devait immédiatement cesser de faire de l’ombre à François Mitterrand au bout de trois ans, en mai 1991.

Paradoxalement, Jean Castex a à peu près le même profil qu’Édouard Philippe : énarque (Cour des Comptes, Édouard Philippe était au Conseil d’État), connaissant parfaitement les rouages de l’État, "sympa", issu du parti de droite Les Républicains. Mais à une grande différence près : il n’existait politiquement pas. On a dit qu’Édouard Philippe était LR version Alain Juppé et Jean Castex LR version Nicolas Sarkozy. C’est à mon avis exagérer sur le contenu du CV : certes, Jean Castex a remplacé Raymond Soubie à l’Élysée comme conseiller aux affaires sociales à l’Élysée en novembre 2010, puis le 28 février 2011, bombardé Secrétaire Général adjoint de l’Élysée le 28 février 2011 (Emmanuel Macron lui a succédé quelques mois plus tard, le 15 mai 2012). Mais cette collaboration était temporaire, Jean Castex n’a jamais fait partie du "clan Sarkozy", de ses intimes, de ses plus proches collaborateurs.

Du reste, Jean Castex a choisi comme directeur de cabinet (un poste stratégique dans le fonctionnement du gouvernement) Nicolas Revel, qui était, comme Emmanuel Macron, Secrétaire Général adjoint de l’Élysée sous François Hollande.

Finies les hypothèses plus ou moins farfelues à Matignon, et hélas, oubliée l’idée de nommer une femme Premier Ministre : exit Florence Parly (qui, à mon sens, n’est pas assez "poids lourd" de la politique pour le poste), exit Jean-Yves Le Drian à la motivation fluctuante, exit Bruno Le Maire trop accroché à Bercy, exit Jean-Louis Borloo très médiatique, trop peu fiable, exit François Bayrou empêché à cause de sa mise en examen…

La grande différence entre Édouard Philippe (dit de droite économique) et Jean Castex (dit de droite sociale), c’est que Jean Castex n’a jamais été, avant Matignon, un acteur politique national comme Édouard Philippe qui était maire d’une grande ville (Le Havre), député, directeur de l’UMP en 2002, etc. Jean Castex n’est qu’un élu local, maire de Prades (très belle ville) depuis mars 2008, conseiller régional du Languedoc-Roussillon de mars 2010 à mars 2015 puis conseiller départemental des Pyrénées-Orientales depuis mars 2015. Il a bien sûr cherché à être député, mais il a été battu en juin 2012 par celle qui est devenue sous-ministre de François Hollande, Ségolène Neuville. Le virus de la politique est familial, car son grand-père était sénateur et maire sa commune natale, Vic-Fezensac, dans le Gers.

Peut-on être Premier Ministre sans avoir été ministre ? En fait, c’est très courant, et ce manque d’expérience ne l’est pas lorsqu’on a longtemps travaillé dans des cabinets ministériels, comme c’est le cas de Jean Castex qui était le directeur de cabinet du ministre Xavier Bertrand lorsque ce dernier était à la Santé et au Travail entre 2006 et 2008 (puis membre du cabinet à l’Élysée). Dans son cas, Premier Ministre sans avoir été ministre, on peut citer sous la Cinquième République : Georges Pompidou, Pierre Mauroy, Jean-Marc Ayrault et Édouard Philippe. Et avant la guerre, il y en avait eu certains aussi, comme Léon Blum.

Jean Castex va surprendre car il est le premier Premier Ministre de la Cinquième République à avoir un accent très fort, ce qui le rendra très convaincant sur la considération qu’il porte aux territoires. Et bien sûr, sympathique malgré ce trait qui le caractérise : c’est un technocrate, excellent technicien. Car à 55 ans, ce n’est pas sa trajectoire politique qui compte, c’est son rôle comme serviteur de l’État, haut fonctionnaire, et si certains Français le connaissaient avant sa nomination à Matignon, c’était parce qu’il a été du 2 avril au 5 juin 2020 le monsieur déconfinement du gouvernement (avec un rapport à la clef le 6 mai 2020, lisible ici).

Issu de la même promotion de l’ENA que Frédéric Salat-Baroux, ancien Secrétaire Général de la Présidence de la République et gendre de Jacques Chirac, Jean Castex a beaucoup travaillé pour le sport depuis quelques années, en cumulant trois fonctions : depuis septembre 2017, délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, depuis le 24 janvier 2018, délégué interministériel aux grands événements sportifs, et depuis le 20 avril 2019, président de l’Agence nationale du sport (nouvellement créée).

On le voit, Emmanuel Macron a pris un profil similaire et en même temps différent. Édouard Philippe a toujours été un animal politique, bien avant 2017, et c’est en qualité de politique LR qu’il a été nommé à Matignon, pour déstabiliser la droite parlementaire (un député LR, apprenant la nomination d’un autre LR, Jean Castex, a lancé sur France Info qu’Emmanuel Macron prenait les Français pour des andouilles !). Si Jean Castex est également LR, ce n’est pas en tant que tel qu’il a été nommé au contraire de son prédécesseur.

C’est aussi une règle non écrite de la Cinquième République qui veut que le premier Premier Ministre d’un mandat présidentiel soit surtout un politique apprécié de sa majorité parlementaire (Michel Debré pour De Gaulle, Jacques Chaban-Delmas pour Georges Pompidou, Jacques Chirac pour Valéry Giscard d’Estaing, Pierre Mauroy et Michel Rocard pour François Mitterrand, Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin pour Jacques Chirac, François Fillon pour Nicolas Sarkozy et Jean-Marc Ayrault pour François Hollande), et que le Premier Ministre suivant soit plus "l’homme du Président", quitte à n’être qu’un "haut fonctionnaire" (Georges Pompidou en 1962, Maurice Couve de Murville en 1968, Pierre Messmer en 1972, Raymond Barre en 1976, Laurent Fabius en 1984, Édith Cresson en 1991, Dominique de Villepin en 2005, Manuel Valls en 2014).

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Lors de la passation de pouvoirs à Matignon ce 3 juillet 2020 vers 18 heures, Édouard Philippe a été très longtemps applaudi par ses collaborateurs. Après avoir salué le courage et l’élégance de son prédécesseur, Jean Castex, avec une voix très déterminée, presque sortie de la Quatrième République, a parlé d’une « France que nous devons réconcilier » avec les valeurs qu’il a en commun avec Édouard Philippe, en particulier le fait que « le service de l’intérêt général et de l’État doive prévaloir sur tout autre considération ». Réconciliateur, ce serait la volonté d’être de Jean Castex après avoir été l’organisateur : « Il nous fera plus que jamais réunir le pays pour lutter contre la crise qui s’installe. ». Mais il a terminé son discours en rendant encore une fois hommage à Édouard Philippe et en lui disant une phrase qu’on rappellera sans cesse dans l’avenir : « Nul doute ici que vos immenses talents vont durablement rester service de la France ! ».

Au-delà de son accent des Pyrénées, Jean Castex est un homme aux relations chaleureuses et consensuelles, bon négociateur, très grand organisateur, apprécié autant par la majorité que par l’opposition. Et discret.

La grande question est donc : pourquoi un tel changement de Premier Ministre qui ne semble pas présager d’un grand changement dans l’orientation politique du quinquennat ? Sans doute une convenance personnelle : Jean Castex est très discret, inexistant politiquement et peu connu des Français (sinon inconnu). C’est une manière pour Emmanuel Macron de reprendre son quinquennat en main, en étant directement dans l’action et dans l’exposition. En somme, de s’organiser pour préparer efficacement l’élection présidentielle de 2022…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 juillet 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Jean Castex, le Premier Ministre du déconfinement d’Emmanuel Macron.
Discours du Président Emmanuel Macron devant la Convention citoyenne pour le climat le 29 juin 2020 à l’Élysée (texte intégral).
Après-covid-19 : écologie citoyenne, retraites, PMA, assurance-chômage ?
Édouard Philippe, le grand atout d’Emmanuel Macron.
Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?
Convention citoyenne pour le climat : le danger du tirage au sort.
Les vrais patriotes français sont fiers de leur pays, la France !
Le Sénat vote le principe de la PMA pour toutes.
Retraites : Discours de la non-méthode.
La réforme de l’assurance-chômage.
Emmanuel Macron explique sa transition écologique.

_yartiCastexJeanA02



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4 mai 2020 1 04 /05 /mai /2020 16:15

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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200504-claude-malhuret.html



Discours de Claude Malhuret le 4 mai 2020 au Sénat


Séance du 4 mai 2020 (compte rendu intégral des débats)


Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Françoise Gatel, M. Guy-Dominique Kennel.


2. Stratégie nationale du plan de déconfinement dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19. – Débat et vote sur une déclaration du Gouvernement

M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants.)

M. Claude Malhuret. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, déconfiner ou ne pas déconfiner, telle est la question !

Je suis fasciné de découvrir que nous avons autant d’experts pour y répondre sur toutes nos chaînes de télévision : les grands experts, très assurés ; les petits experts, qui manquent d’expérience sur Zoom et dont on ne voit que le nez, le menton et les lunettes en gros plan ; les soi-disant experts, qui répètent ce qu’ils ont entendu une heure avant sur une autre chaîne ou à la radio ; et, enfin, les faux experts qui lancent des craques en espérant faire le buzz.

À force de tous les regarder, j’ai découvert un théorème, que je vous propose : plus il y a d’experts, moins on comprend.

Heureusement, il reste les politiques ! J’ai suivi le débat à l’Assemblée nationale, mercredi dernier, monsieur le Premier ministre. Il y a là-bas des virtuoses du coronavirus. Ils vous ont expliqué ce qu’il fallait faire hier et ce qu’il n’aurait pas fallu faire, ce qu’il faut faire aujourd’hui et ce qu’il faudra faire demain.

Je revois encore le professeur Mélenchon, de la faculté de médecine de La Havane, pointer sur vous un doigt vengeur et vous lancer d’une voix de stentor : « Il y aura un deuxième pic de l’épidémie, et vous le savez ! » Impressionnant ! J’étais au bord du retweet !

Devant tant de recommandations de spécialistes, je n’ose pas vous proposer les miennes, moi qui ne suis qu’un simple médecin épidémiologiste.

Je voudrais juste me borner à quelques réflexions sur certaines idées qui me paraissent fausses.

La plus absurde, c’est que le libéralisme est la cause de la pandémie. Dans ce pays, où beaucoup préfèrent Robespierre à Tocqueville, où l’on préférera toujours se tromper avec Sartre qu’avoir raison avec Aron, c’est toujours le libéralisme qui porte le chapeau.

M. Vincent Segouin. Très bien !

M. Claude Malhuret. Même les plus ignares des antimondialistes, des populistes et des complotistes devraient pourtant savoir, puisque même Google le dit, que Périclès, mort de la peste en 429 avant Jésus-Christ, ou Saint Louis, mort du même mal en 1270, n’avaient jamais ne serait-ce qu’entendu les mots de capitalisme ou de libéralisme. Le Covid-19 n’est pas une maladie de la mondialisation ; c’est une maladie tout court.

Napoléon disait : « L’Histoire est une suite de mensonges sur lesquels on s’est mis d’accord. » Aujourd’hui, il dirait : « L’Histoire est une suite de mensonges qui ont le plus de likes. »

Il fallait trouver le responsable du complot. Au Moyen Âge, c’étaient la colère divine, les sorcières ou les juifs. Aujourd’hui, c’est la mondialisation.

La vérité est l’exact contraire. La grande nouveauté, c’est que c’est la science qui est aujourd’hui mondialisée. Jamais dans l’histoire on n’a donné une réponse aussi rapide à une nouvelle maladie : le génome du virus séquencé en une semaine, les premiers tests produits un mois plus tard, les essais cliniques de traitements et de vaccins déjà par centaines.

À ceux qui s’impatientent, il faut rappeler que les épidémies d’avant faisaient cent fois plus de morts, qu’il a fallu des milliers d’années avant que Pasteur, en 1885, ne découvre le vaccin contre la rage et que Yersin n’isole le bacille de la peste, et que c’est grâce à la démocratie libérale et à ses progrès scientifiques qu’elles ont été vaincues comme celle-ci le sera demain.

Deuxième idée qui traîne, celle des prophètes, qui nous expliquent que, demain, rien ne sera comme avant. Mais dès qu’on les écoute, on s’aperçoit que leur monde futur est celui qu’ils prêchaient avant : l’avenir radieux avec les lunettes du passé. Ils annoncent des révolutions, mais on s’aperçoit qu’ils profitent de la crise pour recycler des idéologies archidécédées : mort du capitalisme, haine de la technique, décroissance, éloge du populisme, retour des frontières, nationalisme. Ils courent les télévisions pour annoncer l’avènement d’un monde nouveau, mais leur besace ne contient que la poussière du prêt-à-penser qu’ils ressassent depuis des décennies.

La réalité, c’est que personne n’a jamais vu demain. C’est à nous de préparer l’avenir, et il sera sans doute différent. Mais, ce qui est certain, c’est qu’il ne ressemblera sûrement pas à un remake des thèses de Karl Marx, de Maurras ou de Malthus.

Troisième ineptie : les régimes autoritaires seraient les grands gagnants de cette pandémie, car les plus efficaces. C’est le contraire qui est vrai. La cause de la maladie est le virus. La cause du drame est le régime chinois, qui a caché la vérité pendant un mois. C’est pour cela qu’il y a aujourd’hui 25 000 morts en France et des centaines de milliers dans le monde.

Les seuls pays qui s’en sont bien sortis sont les quatre démocraties asiatiques : Taïwan, Hong Kong, Singapour et la Corée du Sud, qui bénéficiaient d’expériences antérieures. J’espère que personne ne va me dire : « Et la Chine ? » La Chine qui annonce 4 500 morts sans avoir jamais expliqué à quoi servaient les 50 000 urnes funéraires livrées en urgence, de nuit, dans la seule ville de Wuhan. La Chine dont on ne connaîtra le nombre de morts qu’un jour lointain, comme on n’a connu les 40 millions de morts du Grand Bond en avant que trente ans plus tard, à la mort de Mao.

Quant aux populistes en Occident ? Trump, qui restera comme le président du Make the virus great again, Bolsonaro, qui laisse s’infecter sans protection les habitants de ses bidonvilles, et Johnson, sauvé de peu de ses propres théories sur l’immunité et dont le pays détient désormais la palme européenne des victimes.

Je préfère l’exemple de l’Allemagne démocratique. C’est bien sûr un peu irritant, ces Allemands qui savent toujours où sont rangées les affaires. Mais attention : d’abord, l’Allemagne nous suit de dix jours dans l’épidémie et ses chiffres montent ; ensuite, les résultats allemands sont, hélas, beaucoup plus proches de ceux du reste de l’Europe que de ceux de l’Asie.

C’est bien dans les démocraties d’Asie du Sud qu’il nous faudra chercher les exemples si nous voulons réussir le déconfinement, et non pas chez les dictateurs.

Vous vous apprêtez, monsieur le Premier ministre, à prendre la plus grande décision de cette crise, parce que le déconfinement sera beaucoup plus difficile que le confinement. Vous serez tenté de le faire très prudemment. D’abord parce que, dans nos régimes libéraux, qui s’attachent à rendre impossibles leurs propres décisions, les épées de Damoclès politiques, juridiques et médiatiques vous menaceront à la moindre erreur – les sycophantes ont déjà ouvert leurs dossiers.

Mais votre Rubicon est là et vous n’avez d’autre choix que de le franchir sans trembler. Jusqu’à ce jour, entre laisser mourir des hommes et suspendre l’économie, nous n’avons pas hésité et nous avons choisi le confinement.

Le 11 mai, en ouvrant les rues, les maisons, les entreprises et les administrations, ne laissons personne dire que nous ferions le choix inverse, celui de l’économie contre les hommes. Au contraire, poursuivre le confinement ou déconfiner trop timidement ferait aujourd’hui beaucoup plus de victimes.

D’abord, les victimes, bien plus nombreuses qu’on ne le croit, d’autres pathologies, qui, depuis deux mois, ne se soignent plus. Ensuite, parce qu’une crise économique – et celle qui vient sera l’une des pires – fait bien plus de victimes que le virus, même si le fait de ne pas pouvoir les chiffrer permettra à tous ceux qui n’ont rien compris à l’économie et qui ne l’aiment pas – ils sont nombreux en France – de vous accuser de préférer les profits à la santé de nos concitoyens.

Il faut ouvrir les portes et le faire sans hésiter. Et cela veut dire faire confiance aux Français. Ils ont montré – personne ne l’aurait parié – qu’ils étaient capables, aussi bien que des Coréens ou des Allemands, de respecter un confinement drastique. Ils ont compris les gestes, la prudence et la distanciation. Ils ont aussi compris les risques, et c’est d’ailleurs pour cela que, s’ils souhaitent le déconfinement, ils le redoutent en même temps.

Il y aura des bosses sur la route, monsieur le Premier ministre, mais il faut prendre la route. Richelieu disait : « Il ne faut pas tout craindre, mais il faut tout préparer. » C’est la tâche qui vous attend aujourd’hui, c’est la tâche qui nous attend tous. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Indépendants, LaREM, UC et Les Républicains.)





Source : Sénat.

http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200504-discours-claude-malhuret.html

 

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16 mars 2020 1 16 /03 /mars /2020 19:24

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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200316-macron.html







Allocution présidentielle d'Emmanuel Macron du 16 mars 2020


Adresse aux Français du Président de la République Emmanuel Macron



Françaises, Français,

Jeudi soir, je me suis adressé à vous pour évoquer la crise sanitaire que traverse notre pays. Jusqu'alors, l'épidémie était peut-être pour certains une idée lointaine, elle est devenue une réalité immédiate, pressante.

Le Gouvernement a pris, comme je vous l’avais annoncé, des dispositions fermes pour freiner la propagation du virus. Les crèches, les écoles, les collèges, les lycées, les universités sont fermées depuis ce jour. Samedi soir, les restaurants, tous les commerces non-essentiels à la vie de la Nation ont également clôt leurs portes. Les rassemblements de plus de 100 personnes ont été interdits. Jamais la France n'avait dû prendre de telles décisions - évidemment exceptionnelles, évidemment temporaires - en temps de Paix. Elles ont été prises avec ordre, préparation, sur la base de recommandations scientifiques avec un seul objectif : nous protéger face à la propagation du virus.

Dans la journée de jeudi, un consensus scientifique et politique s'est formé pour maintenir le premier tour des élections municipales et j'ai pris, avec le Premier ministre, la décision de maintenir le scrutin. Hier dimanche, les opérations de vote ont donc pu se tenir. Je veux ce soir remercier les services de l'Etat, les maires, l’ensemble des services des mairies, tous ceux qui ont tenu les bureaux de vote et qui ont donc permis l’organisation de ce scrutin. Je veux aussi saluer chaleureusement les Françaises et les Français qui, malgré le contexte, se sont rendus aux urnes, dans le strict respect des consignes sanitaires, des gestes barrières contre le virus. Je veux aussi ce soir adresser mes félicitations républicaines aux candidats élus au premier tour. Environ 30 000 communes sur 35 000 ont après ce premier tour un conseil municipal. Mais dans le même temps, alors même que les personnels soignants des services de réanimation alertaient sur la gravité de la situation, nous avons aussi vu du monde se rassembler dans les parcs, des marchés bondés, des restaurants, des bars qui n’ont pas respecté la consigne de fermeture. Comme si, au fond, la vie n’avait pas changé.

A tous ceux qui, adoptant ces comportements, ont bravé les consignes, je veux dire ce soir très clairement : non seulement vous ne vous protégez pas vous - et l’évolution récente a montré que personne n’est invulnérable y compris les plus jeunes - mais vous ne protégez pas les autres. Même si vous ne présentez aucun symptôme, vous pouvez transmettre le virus. Même si vous ne présentez aucun symptôme, vous risquez de contaminer vos amis, vos parents, vos grands-parents, de mettre en danger la santé de ceux qui vous sont chers.

Dans le Grand Est, dans les Hauts-de-France, en Île-de-France, nos soignants se battent pour sauver des vies, avec dévouement, avec force. Au moment où la situation sanitaire se dégrade fortement, où la pression sur nos hôpitaux et nos soignants s’accentue, tout notre engagement, toute notre énergie, toute notre force, doivent se concentrer sur un seul objectif : ralentir la progression du virus.

Je vous le redis avec force ce soir : respectons les gestes barrières, les consignes sanitaires. C'est le seul moyen de protéger les personnes vulnérables, d'avoir moins de concitoyens infectés et ainsi de réduire la pression sur les services de réanimation pour qu'ils puissent mieux accueillir, mieux soigner.

Sans signe grave, contactons notre médecin traitant. N’appelons le Samu et ne nous rendons à l’hôpital qu’en cas de forte fièvre, de difficulté à respirer, sans quoi, ils ne pourront faire face à la vague de cas graves qui déjà se profile dans certaines régions.

Faisons preuve au fond d’esprit solidaire et de sens des responsabilités. Chacun d’entre nous doit à tout prix limiter le nombre de personnes avec qui il est en contact chaque jour. Les scientifiques le disent, c’est la priorité absolue. C'est pourquoi, après avoir consulté, écouté les experts, le terrain et en conscience, j'ai décidé de renforcer encore les mesures pour réduire nos déplacements et nos contacts au strict nécessaire. Dès demain midi et pour 15 jours au moins, nos déplacements seront très fortement réduits.

Cela signifie que les regroupements extérieurs, les réunions familiales ou amicales ne seront plus permises. Se promener, retrouver ses amis dans le parc, dans la rue, ne sera plus possible. Il s'agit de limiter au maximum ces contacts au-delà du foyer. Partout sur le territoire français, en métropole comme Outre-mer, seuls doivent demeurer les trajets nécessaires, nécessaires pour aller faire ses courses avec de la discipline et en mettant les distances d'au moins un mètre, en ne serrant pas la main, en ne s'embrassant pas, les trajets nécessaires pour se soigner, évidemment, les trajets nécessaires pour aller travailler si le travail à distance n'est pas possible et les trajets nécessaires pour faire un peu d'activité physique mais sans retrouver, là encore, des amis ou des proches. Toutes les entreprises doivent s'organiser pour faciliter le travail à distance, et quand cela ne sera pas possible, elles devront adapter dès demain leur organisation pour faire respecter ces gestes barrières contre le virus, c'est à dire protéger leurs salariés, ou, quand il s'agit d'indépendants, se protéger eux-mêmes. Le Gouvernement précisera les modalités de ces nouvelles règles dès ce soir, après mon allocution. Toute infraction à ces règles sera sanctionnée. Je vous le dis avec beaucoup de solennité ce soir, écoutons les soignants, qui nous disent : si vous voulez nous aider, il faut rester chez vous et limiter les contacts. C'est le plus important.

Evidemment, ce soir, je pose des règles nouvelles, nous posons des interdits, il y aura des contrôles. Mais la meilleure règle, c'est celle qu'en tant que citoyen, vous vous appliquez à vous-mêmes. Une fois encore, j'en appelle à votre sens des responsabilités et de la solidarité.

Dans ce contexte, après avoir consulté le Président du Sénat, le Président de l'Assemblée nationale mais également mes prédécesseurs, j'ai décidé que le second tour des élections municipales serait reporté. Le Premier ministre en a informé aujourd'hui même les chefs de parti représentés au Parlement. Cette décision a fait l'objet d'un accord unanime.

Mes chers compatriotes, je mesure l'impact de toutes ces décisions sur vos vies. Renoncer à voir ses proches, c'est un déchirement ; stopper ses activités quotidiennes, ses habitudes, c'est très difficile. Cela ne doit pas nous empêcher de garder le lien, d'appeler nos proches, de donner des nouvelles, d'organiser aussi les choses avec nos voisins, d'inventer de nouvelles solidarités entre générations, de rester, comme je vous l'ai dit jeudi dernier, profondément solidaires et d'innover là aussi sur ce point. Je sais que je vous demande de rester chez vous. Je vous demande aussi de garder le calme dans ce contexte. J'ai vu, ces dernières heures, des phénomènes de panique en tout sens. Nous devons tous avoir l'esprit de responsabilité. Il ne faut pas que les fausses informations circulent à tout va. En restant chez vous, occupez-vous des proches qui sont dans votre appartement, dans votre maison. Donnez des nouvelles, prenez des nouvelles. Lisez, retrouvez aussi ce sens de l'essentiel. Je pense que c'est important dans les moments que nous vivons. La culture, l'éducation, le sens des choses est important. Et évitez l'esprit de panique, de croire dans toutes les fausses rumeurs, les demi-experts ou les faux-sachants. La parole est claire, l'information est transparente et nous continuerons de la donner. Mais croyez-moi, cet effort que je vous demande, je sais qu'il est inédit mais les circonstances nous y obligent.

Nous sommes en guerre, en guerre sanitaire, certes : nous ne luttons ni contre une armée, ni contre une autre Nation. Mais l'ennemi est là, invisible, insaisissable, qui progresse. Et cela requiert notre mobilisation générale.

Nous sommes en guerre. Toute l'action du Gouvernement et du Parlement doit être désormais tournée vers le combat contre l'épidémie. De jour comme de nuit, rien ne doit nous en divertir. C'est pourquoi, j'ai décidé que toutes les réformes en cours seraient suspendues, à commencer par la réforme des retraites. Dès mardi, en Conseil des ministres, sera présenté un projet de loi permettant au gouvernement de répondre à l’urgence et, lorsque nécessaire, de légiférer par ordonnances dans les domaines relevant strictement de la gestion de crise. Ce projet sera soumis au Parlement dès jeudi.

J’ai vu tout à l’heure les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat afin que ces textes soient votés le plus rapidement possible, afin aussi que la vie démocratique et le contrôle du Parlement continue dans cette période. Je les en remercie et je remercie tous nos parlementaires en cet instant.

Nous sommes en guerre. J’appelle tous les acteurs politiques, économiques, sociaux, associatifs, tous les Français à s’inscrire dans cette union nationale qui a permis à notre pays de surmonter tant de crises par le passé.

Nous sommes en guerre. La Nation soutiendra ses enfants qui, personnels soignants en ville, à l’hôpital, se trouvent en première ligne dans un combat qui va leur demander énergie, détermination, solidarité. Ils ont des droits sur nous. Nous leur devons évidemment les moyens, la protection. Nous serons là. Nous leur devons des masques, du gel, tout le matériel nécessaire et nous y veillons et veillerons. Nous avons décidé avec les scientifiques de réserver les masques en priorité pour l’hôpital et pour la médecine de ville et de campagne, en particulier les généralistes, les infirmières désormais en première ligne aussi dans la gestion de la crise. Des masques seront livrés dans les pharmacies dès demain soir dans les 25 départements les plus touchés. Mercredi pour le reste du territoire national. J'ai aussi entendu le message des spécialistes, en particulier des chirurgiens-dentistes et beaucoup d'autres. Des solutions seront trouvées avec le Ministre de la Santé dans les prochaines heures.

Nous devons aussi aux soignants la garde de leurs enfants : un service minimum de garde est en place depuis ce jour dans les crèches et dans les écoles. Nous leur devons aussi sérénité dans leurs déplacements et repos. C'est pourquoi j'ai décidé que, dès demain, les taxis et les hôtels pourront être mobilisés à leur profit. L'Etat paiera.

Nous sommes en guerre, oui. Le pays accompagnera dans cette période les régions les plus touchées aujourd'hui comme celles qui le seront demain. A ce titre, je veux assurer les habitants et les personnels soignants du Grand Est que nous serons au rendez-vous pour les appuyer face à l'afflux de patients et à la saturation des hôpitaux. Je sais ce qu'ils vivent depuis des jours et des jours, nous sommes avec eux. J'ai décidé pour cela qu'un hôpital de campagne du service de santé des armées serait déployé dans les jours à venir en Alsace. Les armées apporteront aussi leur concours pour déplacer les malades des régions les plus affectées et ainsi réduire la congestion des hôpitaux de certains territoires.

Nous sommes en guerre. Comme je vous l'ai dit jeudi, pour nous protéger et contenir la dissémination du virus mais aussi préserver nos systèmes de soins, nous avons pris ce matin entre Européens une décision commune. Dès demain midi, les frontières à l'entrée de l'Union européenne et de l'espace Schengen seront fermées. Concrètement, tous les voyages entre les pays non-européens et l'Union européenne seront suspendus pendant 30 jours. Les Françaises et les Français qui sont actuellement à l'étranger et souhaitent rentrer pourront bien entendu rejoindre leur pays.

Nous devons prendre cette décision parce que je vous demande ce soir d'importants efforts et que nous devons, dans la durée, nous protéger. Je veux dire à tous nos compatriotes qui vivent à l'étranger que là aussi, en bon ordre, ils doivent se rapprocher des ambassades et consulats et que nous organiserons, pour celles et ceux qui le souhaitent et là où c'est nécessaire, leur rapatriement. Vous l'aurez compris, vous le pressentiez, cette crise sanitaire sans précédent aura des conséquences humaines, sociales et économiques majeures. C’est aussi ce défi que nous devons mener.

Je vous demande des sacrifices pour ralentir l’épidémie. Jamais ils ne doivent mettre en cause l’aide aux plus fragiles, la pérennité d’une entreprise, les moyens de subsistance des salariés comme des indépendants. Pour les plus précaires, pour les plus démunis, pour les personnes isolées, nous ferons en sorte, avec les grandes associations, avec aussi les collectivités locales et leurs services, qu’ils puissent être nourris, protégés, que les services que nous leur devons soient assurés.

Pour la vie économique, pour ce qui concerne la France, aucune entreprise, quelle que soit sa taille, ne sera livrée au risque de faillite. Aucune Française, aucun Français, ne sera laissé sans ressources.

S’agissant des entreprises, nous mettons en place un dispositif exceptionnel de report de charges fiscales et sociales, de soutien au report d’échéances bancaires et de garanties de l’Etat à hauteur de 300 milliards d’euros pour tous les prêts bancaires contractés auprès des banques. Pour les plus petites d’entre elles et tant que la situation durera, celles qui font face à des difficultés n’auront rien à débourser, ni pour les impôts, ni pour les cotisations sociales. Les factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que les loyers devront être suspendus.

En outre, afin que personne ne soit laissé sans ressources, pour les salariés, le dispositif de chômage partiel sera massivement élargi, comme je vous l’avais annoncé jeudi dernier et comme le Gouvernement a commencé à le préciser. Pour les entrepreneurs, commerçants, artisans, un fonds de solidarité sera créé, abondé par l'Etat, et auquel le Premier ministre proposera aux régions aussi de contribuer. Le Gouvernement, dès demain, précisera toutes ces mesures. Elles seront en fonction des besoins, des réalités économiques, des nécessités secteur par secteur, évidemment adaptées. Nous serons au rendez-vous pour que notre économie soit préservée dans cette période si dure et pour que l'ensemble des travailleuses et des travailleurs puissent avoir cette sécurité aussi en termes de pouvoir d'achat, de continuité de leur vie.

Mes chers compatriotes, la France vit un moment très difficile. Nul ne peut en prévoir précisément la durée. À mesure que les jours suivront les jours, que les problèmes succéderont aux problèmes, il faudra, en lien avec les éclairages donnés par les scientifiques, des expériences de terrain, il faudra nous adapter. Nous allons continuer aussi, pendant cette période, de travailler et de progresser sur les traitements.

Je sais le dévouement de plusieurs équipes partout sur notre territoire avec les premiers espoirs qui naissent, et nous continuerons aussi d'avancer sur le vaccin. Régulièrement, je m'adresserai à vous. Je vous dirai à chaque fois, comme je l'ai fait, comme le Gouvernement le fait, la vérité sur l'évolution de la situation.

J'ai une certitude : plus nous agirons ensemble et vite, plus nous surmonterons cette épreuve. Plus nous agirons en citoyens, plus nous ferons preuve de la même force d'âme, de la même abnégation patriote que démontrent aujourd'hui nos personnels soignants, nos sapeurs-pompiers, l'ensemble des acteurs de la sécurité civile, plus vite nous sortirons de cette vie au ralenti. Nous y arriverons, mes chers compatriotes, en étant unis, solidaires. Je vous demande d'être responsables tous ensemble et de ne céder à aucune panique, d'accepter ces contraintes, de les porter, de les expliquer, de vous les appliquer à vous-mêmes, nous nous les appliquerons tous, il n'y aura pas de passe-droit, mais, là aussi, de ne céder ni à la panique, ni au désordre. Nous gagnerons, mais cette période nous aura beaucoup appris. Beaucoup de certitudes, de convictions sont balayées, seront remises en cause. Beaucoup de choses que nous pensions impossibles adviennent. Ne nous laissons pas impressionner. Agissons avec force mais retenons cela : le jour d’après, quand nous aurons gagné, ce ne sera pas un retour au jour d’avant. Nous serons plus forts moralement, nous aurons appris et je saurai aussi avec vous en tirer toutes les conséquences, toutes les conséquences.

Hissons-nous individuellement et collectivement à la hauteur du moment.
Je sais mes chers compatriotes pouvoir compter sur vous.
Vive la République, vive la France !

Emmanuel Macron, Palais de l'Élysée, le lundi 16 mars 2020 à 20 heures.

Source : elysee.fr
http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200316-macron-allocution.html


 

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16 mars 2020 1 16 /03 /mars /2020 03:29

« Le temps, aujourd’hui, est à la protection de nos concitoyens et à la cohésion de la Nation. Le temps est à cette union sacrée qui consiste à suivre tous ensemble un même chemin, à ne céder à aucune panique, aucune peur, aucune facilité, mais à retrouver cette force d’âme qui est la nôtre et qui a permis à notre peuple de surmonter tant de crises à travers l’histoire. La France unie, c’est notre meilleur atout dans la période troublée que nous traversons. Nous tiendrons tous ensemble. » (Emmanuel Macron, le 12 mars 2020 à l’Élysée).


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Paysage de désolation. C’est comme si nous étions entrés au plein milieu d’un film catastrophe en oubliant de voir le début, les prémices. Rumeurs de confinement total. Pour ajouter à l’angoisse, un modèle mathématique (seulement mathématique) de l’Imperial College de Londres a projeté 300 000 à 500 000 morts en France du coronavirus Covid-19/SARS-CoV-2 "en absence de mesures de prévention d’endiguement". Il faut dire que ce week-end, le beau temps (balades et prélassements dans les parcs) et le premier tour des élections municipales n’ont pas été des facteurs très efficaces de confinement, c’est le moins qu’on puisse dire. Le Président Emmanuel Macron s’exprimera ce lundi 16 mars 2020 à 20 heures à la télévision. Une nouvelle étape ? Revenons à sa précédente communication aux Français, le 12 mars 2020.

Mesdames et Messieurs les candidats permanents à l’élection présidentielle, voulez-vous toujours vous présenter ? Car qui, aujourd’hui, voudrait se retrouver à la place du Président Emmanuel Macron et du Premier Ministre Édouard Philippe en pleine pandémie du coronavirus Covid-19 ? Niveau de responsabilité maximal.

Certes, diriger un pays, surtout un grand pays, c’est inévitablement se trouver dans des situations imprévues, graves et urgentes. Récemment, Nicolas Sarkozy et François Fillon s’étaient retrouvés en plein krach boursier mondial le 15 septembre 2008. Leurs successeurs, François Hollande et Manuel Valls, ont dû affronter les graves attentats islamistes, en particulier "Charlie Hebdo" (7 janvier 2015), Bataclan (13 novembre 2015) et Nice (14 juillet 2016). Mais ce que vivent Emmanuel Macron et Édouard Philippe est évidemment bien plus grave car c’est l’intégrité physique de tous Français dont ils ont la "garde", dont ils doivent assurer la protection, qui est en jeu. C’est en quelques sortes les deux imprévus graves de leurs prédécesseurs "en même temps" : un danger imminent pour chaque citoyen français et un risque de crise économique généralisée.

Il est bien trop tôt de tirer des leçons de l’épidémie du coronavirus SARS-CoV-2 (de la maladie Covid-19) car la tragédie n’est qu’à son début, mais peut-être oserais-je dire qu’il y a eu quelques semaines de retard de prise de conscience de la gravité ? Prise de conscience collective. Il y a eu juste des personnes qui ont perçu plus vite que d’autres la gravité. Notamment certains médecins en prise directe.

Emmanuel Macron a d’ailleurs proposé tout un programme révolutionnaire une fois le cauchemar terminé : « Mes chers compatriotes, il nous faudra demain tirer les leçons que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour, interroger les faiblesses de nos démocraties. ». Sur trois plans : la santé, la mondialisation et l’Europe.

La santé : « Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, notre État-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe. ». Exit l’idée de "pognon de dingue".

La mondialisation : « Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie au fond à d’autres est une folie. ». Le mot est fort : "une folie".

L’Europe : « Nous devons en reprendre le contrôle, construire plus encore que nous ne le faisons déjà une France, une Europe souveraines, une France et une Europe qui tiennent fermement leur destin en main. Les prochaines semaines et les prochains mois nécessiteront des décisions de rupture en ce sens. Je les assumerai. ». Là encore, le mot "rupture" est très fort.

Emmanuel Macron semble attirer les situations nouvelles imprévues. Certes, l’affaire Benalla, l'affaire De Rugy, l'affaire Griveaux etc. sont ordinaires et si la première a été le premier grain de sable de la Macronie triomphante, cassant la mécanique d’une réforme institutionnelle à l’origine bien mal conçue, les autres n’ont pas eu vraiment beaucoup d’effets sur le plan national. Mais que dire de la crise des gilets jaunes, mouvement social inédit et durable ? Que dire aussi de la forte intensité des grèves contre cette réforme systémique des retraites dans un pays qu’on disait apathique (mais les retraites touchent tous les Français, pas seulement une catégorie de Français) ? Et depuis deux mois, le coronavirus occupe l’esprit des gouvernants, à plein temps depuis quelques semaines. L’esprit des gouvernants et des gouvernés. Toutes les vies quotidiennes sont bouleversées, toutes les relations personnelles sont impactées.

L’importance d’une allocution présidentielle très formelle (texte intégral ici), prononcée en direct (au point que les sous-titres ont été inscrits en direct selon une méthode sténo impressionnante dont j’avais déjà eu l’occasion de voir l’efficacité lors d’une conférence parisienne), a été le véritable déclencheur d’une prise de conscience nationale : « Cette épidémie (…) est la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle. ».

On comprend très bien que le gouvernement a tout essayé pour préserver l’économie nationale des risques de récession, mais refuser la logique implacable des statistiques des épidémies était particulièrement optimiste : « Dans ce contexte, l’urgence est de protéger nos compatriotes les plus vulnérables. L’urgence est de freiner l’épidémie afin de protéger nos hôpitaux, nos services d’urgence et de réanimation, nos soignants qui vont avoir à traiter (…) de plus en plus de patients atteints. Ce sont là nos priorités. C’est pour cela qu’il nous faut continuer de gagner du temps et suivre celles et ceux qui sont les plus fragiles. Protéger les plus vulnérables d’abord. C’est la priorité absolue. ».

Ce fut la dernière semaine de février 2020 qu’on a invité les Français à se protéger par des gestes barrières, mais qui acceptaient facilement de les respecter ? Beaucoup, à l’époque, disaient qu’on en faisait trop, que les médias en faisaient trop, que le gouvernement en faisait trop, que le Covid-19 n’était qu’une grippette un peu plus sévère qu’une autre. Quelle erreur !

La réalité, c’est que l’Europe compte aujourd’hui plus de personnes infestées que n’a connues la Chine depuis le début de l’épidémie. La situation de l’Italie (+368 morts rien que pour la journée du 15 mars 2020, le nombre de morts est déjà égal à la moitié de ceux en Chine, et cela continue, hélas) et de l’Espagne est catastrophique, celle de la France, Allemagne, Royaume-Uni et États-Unis à peine plus enviable. Seulement un retard.

En trois jours, les mesures ont été de plus en plus contraignantes : le 12 mars 2020, Emmanuel Macron annonce la fermeture des écoles, collèges, lycées et universités à partir du 16 mars 2020. Le 13 mars 2020, les rassemblements de plus 100 personnes sont interdits (passage de 1 000 à 100), et le 14 mars 2020, Édouard Philippe n’attend même pas la fin du scrutin du premier tour des élections municipales pour fermer tous les commerces non essentiels (lire précisément l’arrêté ici).

Qu’en sera-t-il demain ? ce soir ? Ce lundi 16 mars 2020 matin sur France Inter, le directeur général de la santé, le professeur Jacques Salomon, a considéré que la situation était très grave et alarmante. Les rumeurs de confinement total sont persistantes. Le fait que depuis plus d’un mois, le gouvernement associe systématiquement ses décisions aux avis d’un "comité scientifique" aussi impersonnel qu’inquiétant n’est pas non plus de nature à rassurer. Il y a quelques jours, un médecin à qui l’on avait posé la question : "Faut-il quand même maintenir les élections municipales ?" avait sagement répondu : "Cela sort de mon domaine de compétence". Annuler une élection, c’est du ressort politique, pas sanitaire. Ce n’est pas le comité scientifique qui assumera politiquement les décisions prises par le gouvernement, alors pourquoi vouloir autant l’associer ?

Les mesures de confinement sont nécessaires puisque le coronavirus ne se retransmets que de personnes à personnes. Mais alors, pourquoi ne pas avoir reporté les élections municipales ? D’un point de vue technique, je peux assurer qu’il y a eu très peu de risque. J’ai tenu un bureau de vote, les votants étaient particulièrement concernés et avaient quasiment tous leur stylo pour émarger la liste électorale. Ils étaient raisonnables et faisaient tous attention. Malgré cela, on peut comprendre que certains y trouvent une contradiction, car parallèlement, on recommande aux personnes de plus de 70 ans de ne pas sortir de chez eux sauf extrême nécessité (comme acheter de quoi manger). De là à conclure qu’aller voter serait une extrême nécessité…

Le problème a été les partis d’opposition. Ni Gérard Larcher (Président du Sénat), ni Laurent Fabius (Président du Conseil Constitutionnel) n’ont voulu assurer le Président Emmanuel Macron de leur soutien en cas de contestation sur un éventuel report des élections municipales. Et pourtant, cela aurait été le plus sage. Surtout parce que toute la réorganisation sociale qu’implique la fermeture des écoles est réalisée avant tout par les familles, les employeurs mais aussi les élus locaux, ceux qui connaissent la réalité du terrain, or, dans quelques jours, ce sont des élus nouveaux qui vont devoir comprendre les leviers avant de pouvoir les manipuler. Les équipes sortantes étaient plus aptes à résoudre les mille et un problèmes que les mesures de confinement et de distanciation sociale ont provoqués ou vont provoquer à l’avenir.

Et pourtant, Emmanuel Macron avait besoin d’un consensus sur ce sujet du report des élections municipales, comme il l’a cité à plusieurs reprises à la fin de son allocution de "l’union sacrée", de la "France unie", du "tous ensemble". Il ne pouvait pas se permettre d’être pris pour un dictateur qui mépriserait le droit électoral. Une France désunie rendrait moins efficaces les mesures de restriction pour éviter la propagation du coronavirus. À l’issue du premier tour, ce sont ceux qui ont insisté pour ne pas reporter les élections qui sont les premiers à demander le report du second tour. Histoire de se dédouaner de leurs responsabilités. Le plus démonstratif est sans doute Jean-Luc Mélenchon qui a tenté de se justifier en disant que la situation sanitaire avait évolué… C’était pourtant dès depuis le début de ce mois qu’on aurait pu imaginer la catastrophe…

Cette épidémie a certes réduit à néant de nombreux mois ou années d’efforts difficilement acquis pour respecter l’environnement : retour aux bouteilles d’eau minérale en plastique, retour aux lingettes pour désinfecter, etc. Mais la force majeure est l’urgence dans la protection des vies humaines.

Emmanuel Macron a d’ailleurs changé aussi de paradigme sur son orthodoxie budgétaire affichée (mais peu appliquée dans les faits). Il est passé du "en même temps" au "quoi qu’il en coûte" : « Le gouvernement mobilisera tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies quoi qu’il en coûte. Beaucoup des décisions que nous sommes en train de prendre, beaucoup des changements auxquels nous sommes en train de procéder, nous les garderons parce que nous apprenons aussi de cette crise, parce que nos soignants sont formidables d’innovation et de mobilisation, et ce que nous sommes en train de faire, nous en tirerons toutes les leçons et sortirons avec un système de santé encore plus fort. ».

C’est dans l’adversité que les grands hommes (ou grandes femmes) ont rendez-vous avec l’histoire. Je ne sais pas si Emmanuel Macron en fera partie, c’est trop tôt pour l’écrire, mais je suis convaincu qu’il a conscience de cet enjeu-ci : l’année 2020 sera une année véritablement révolutionnaire…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (16 mars 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Communication du Président Emmanuel Macron le 16 mars 2020 à la télévision (texte intégral).
Toutes les mesures de restriction pour réduire la propagation du coronavirus en France (14 mars 2020).
Allocution du Président Emmanuel Macron le 12 mars 2020 au Palais de l’Élysée (texte intégral).
Les institutions à l’épreuve du coronavirus Covid-19.
La guerre contre le séparatisme islamiste engagée par Emmanuel Macron.
La 5e Conférence nationale du handicap le 11 février 2020 à Paris.
Emmanuel Macron et la France de 2020 en effervescence.

_yartiMacron2019050701



http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200312-macron.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-institutions-a-l-epreuve-du-222310

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/03/16/38104293.html




 

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