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8 février 2024 4 08 /02 /février /2024 21:17

« Le Président de la République réunira l’ensemble des membres du gouvernement pour un conseil des ministres qui se tiendra le mercredi 14 février 2024 à 10 heures. » (Communiqué de l'Élysée du 8 février 2024 dans la soirée).





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Un premier conseil des ministres à la Saint-Valentin, ça promet ! Comme souvent dans les nominations de nouveaux gouvernements, on a tendance à dire : tout ça pour ça ?! La montagne accouche d'une souris, de plusieurs souris, dont la plus grande, Gabriel Attal était de service spécial sur France 2 dans la soirée de ce jeudi 8 février 2024.

Il a donc fallu quatre longues semaines pour compléter le gouvernement étriqué nommé le 11 janvier 2024. On soupçonne ce temps long par l'attente de quelques décisions judiciaires, concernant Olivier Dussopt (qui était pressenti à l'Outre-mer et qui finalement reste sur le quai) et concernant bien sûr François Bayrou. La lenteur viendrait-elle du président du MoDem ? Peut-être. On le saura plus tard, dans des confidences ultérieures.

Pour l'instant, il n'y a pas beaucoup de nouveauté, il y a beaucoup de continuité avec le gouvernement d'Élisabeth Borne. Par exemple, on a repêché en ministre plein Stanislas Guérini (à la Fonction publique ; les fonctionnaires soufflent). On a repêché aussi Amélie Oudéa-Castéra qui retrouve son ancien Ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, attributions déjà bien lourdes pour assurer un été olympique réussi en France.

Du coup, la grande surprise est donc le retour de l'ancienne Garde des Sceaux, Nicole Belloubet (68 ans), qui a l'avantage d'être une femme et d'origine socialiste, deux caractéristiques assez rares dans ce gouvernement (malgré la parité). Elle a été nommée Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, ce qui est doublement étonnant : pour ce ministère de réformes, il fallait un poids lourd politique (ce qu'aurait été François Bayrou), or, ce n'est pas du tout le CV ni l'ADN de la nouvelle ministre ; par ailleurs, elle ne semble pas considérer les mêmes urgences que Gabriel Attal, ne paraît pas très convaincue par l'uniforme à l'école, par exemple.


Certes, elle connaît la communauté éducative à plusieurs titre. Elle est docteure en droit à la Sorbonne (1990), agrégée de droit public (1992), professeure en droit constitutionnel, elle a été nommée sous la gauche rectrice de l'académie de Limoges (1997-2000) puis rectrice de l'académie de Toulouse (2000-2005). Ce qui lui a permis d'avoir une carrière politique locale non négligeable au sein du PS à Toulouse : première adjointe à Toulouse de 2008 à 2010, vice-présidente du Grand Toulouse de 2008 à 2013, première vice-présidente du conseil régional de Midi-Pyrénées de 2010 à 2013, avant d'être nommée membre du Conseil Constitutionnel de 2013 à 2017, date de son entrée au Ministère de la Justice.

Même s'ils ont parfois un rôle important, je doute que les autres "nominés" soient connus, même des journalistes. Je me réjouis de la reconduite au gouvernement des ministres délégués Roland Lescure (Industrie et Énergie), Olivia Grégoire (Entreprises, Tourisme et Consommation), Sarah El Haïry (Enfance, Jeunesse et Familles), Jean-Noël Barrot (Europe) et Hervé Berville (Secrétaire d'État, chargé de la Mer et de la Biodiversité). Ainsi que Fadila Khattabi, ancienne présidente de la commission des affaires sociales à l'Assemblée Nationale, qui est confirmée aux Personnes âgées et aux Personnes handicapées (nommée le 20 juillet 2023). Précisons que l'Énergie ne dépend plus de la Transition écologique, mais de l'Économie et des Finances (ce qui a déjà suscité quelques protestations de la part d'organisations écologistes).

Je me réjouis également de l'entrée de Frédéric Valletoux, ancien maire de Fontainebleau, député Horizons et surtout, ancien président de la Fédération des hôpitaux de France, qui était très attendu au Ministère de la Santé et de la Prévention. D'ailleurs, s'il fallait résumer cette seconde vague de nominations, on pourrait juste dire : Nicole Belloubet à l'Éducation nationale et à la Jeunesse, et Frédéric Valletoux à la Santé et à la Prévention.


Notons également qu'au gouvernement depuis octobre 2018, Agnès Pannier-Runacher est reconduite dans le gouvernement Attal, sans affectation précise en tant que ministre déléguée auprès de Marc Fesneau. Elle fait partie des rares anciens ministres pleins à avoir été rétrogradés en ministres délégués, comme Aurore Bergé, et, auparavant, Olivier Véran (qui quitte le gouvernement) et Franck Riester (qui y reste).

Pour le reste, il y a quelques mini-changements, comme Patrice Vergriete, ancien maire de Dunkerque, qui passe du Logement aux Transports, l'arrivée du président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée Nationale Guillaume Kasbarian, un proche de Gabriel Attal, au Logement, poste également crucial dans la situation de la France en pleine crise du logement. Marina Ferrari, députée MoDem de Savoie et élue d'Aix-les-Bains, est nommée Secrétaire d'État chargée du Numérique (elle succède à un autre MoDem, Jean-Noël Barrot).


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On peut maintenant confirmer le limogeage du gouvernement notamment des ministres délégués et secrétaire d'État suivants : Olivier Véran, Clément Beaune (prévisible), Philippe Vigier, Carole Grandjean, Olivier Becht et Laurence Boone.


En tout, le gouvernement est composé de 35 membres, dont le Premier Ministre, 13 ministres, 16 ministres délégués et 5 secrétaires d'État. Comme prévu, le nombre a plus que doublé avec la nomination des ministres délégués. La parité est respectée avec 17 hommes et 18 femmes, même si peu de femmes occupent des postes essentiels. Sur le plan politique, il compte quatre membres issus du MoDem (François Bayrou en aurait voulu six), deux membres issus de Horizons, un membre issu du parti radical, et il faut ajouter deux ministres issues (et exclues) de LR. Le reste est pour Renaissance.

C'est clair que le changement de gouvernement n'a fait que mettre en avant un seul de ses membres, le Premier Ministre, Gabriel Attal, sur qui repose seul la relance de la politique présidentielle. Pour l'instant, par cette nomination aussi jeune, il a bondi en popularité, mais cela a des risques de ne pas durer. Dès sa nomination, il s'est montré comme un Premier Ministre de gestion de crises (inondations, agriculteurs, polémique sur l'enseignement privé, etc.). Au début, il sera d'une parfaite loyauté vis-à-vis du Président Emmanuel Macron. Changement de style ou changement de politique ? La réponse est déjà connue.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (08 févvrier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Les souris du gouvernement de Gabriel Attal.
Liste complète de tous membres du premier gouvernement de Gabriel Attal au 8 février 2024.
Mais quelle mouche a donc piqué François Bayrou ?!
Le capitaine Gabriel Attal fixe le cap du réarmement de la France.
Discours de politique générale du Premier Ministre Gabriel Attal le 30 janvier 2024 à l'Assemblée Nationale (texte intégral et vidéo).
Les 10 mesures de Gabriel Attal insuffisantes pour éteindre la crise agricole.
Gabriel Attal répond à Patrick Kanner sur les crédits pour l'hôpital.
Pour que la France reste la France !

Conférence de presse du Président Emmanuel Macron le 16 janvier 2024 à 20 heures 15 à l'Élysée (texte intégral et vidéo).
Gabriel Macron.
Tribune du Président Emmanuel Macron dans "Le Monde" du 29 décembre 2023.

Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
Élisabeth Borne remerciée !
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240208-gouvernement-attal.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-souris-du-gouvernement-de-252995

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2024/02/06/40198729.html






 

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8 février 2024 4 08 /02 /février /2024 20:11



Composition du premier gouvernement de Gabriel Attal
nommé le jeudi 11 janvier 2024 et complété le jeudi 8 février 2024



Premier Ministre :

Gabriel Attal, Premier Ministre, chargé de la Planification écologique et énergétique


Ministres :

M. Bruno LE MAIRE, Ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique
M. Gérald DARMANIN, Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer
Mme Catherine VAUTRIN, Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités
Mme Nicole BELLOUBET, Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse
M. Marc FESNEAU, Ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire
Mme Rachida DATI, Ministre de la Culture
M. Sébastien LECORNU, Ministre des Armées
M. Éric DUPOND-MORETTI, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice
M. Stéphane SÉJOURNÉ, Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères
M. Christophe BÉCHU, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
M. Stanislas GUERINI, Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques
Mme Amélie OUDÉA-CASTÉRA, Ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques
Mme Sylvie RETAILLEAU, Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche


Ministres délégués :

Auprès du Premier Ministre :

Mme Prisca THEVENOT, chargée du Renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement
Mme Marie LEBEC, chargée des Relations avec le Parlement
Mme Aurore BERGÉ, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les Discriminations

Auprès du Ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique :

M. Roland LESCURE, chargé de l’Industrie et de l’Énergie
Mme Olivia GRÉGOIRE, chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation ;
M. Thomas CAZENAVE, chargé des Comptes publics

Auprès du Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer
et du Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires :


Mme Dominique FAURE, chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité

Auprès du Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer :

Mme Marie GUÉVENOUX, chargée des Outre-mer

Auprès de la Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités,
de la Ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse
et du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice :


Mme Sarah EL HAÏRY, chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles

Auprès de la Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités :

Mme Fadila KHATTABI, chargée des Personnes âgées et des Personnes handicapées ;
M. Frédéric VALLETOUX, chargé de la Santé et de la Prévention

Auprès du Ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire :

Mme Agnès PANNIER-RUNACHER

Auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères :

M. Franck RIESTER, chargé du Commerce extérieur, de l'Attractivité, de la Francophonie et des Français de l'étranger
M. Jean-Noël BARROT, chargé de l’Europe

Auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires :

M. Patrice VERGRIETE, chargé des Transports
M. Guillaume KASBARIAN, chargé du Logement


Secrétaires d’État :

Auprès du ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique :

Mme Marina FERRARI, chargée du Numérique

Auprès du Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer
et du Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires :


Mme Sabrina AGRESTI-ROUBACHE, chargée de la Ville

Auprès du Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer :

Mme Sabrina AGRESTI-ROUBACHE, chargée de la Citoyenneté

Auprès du Ministre des Armées :

Mme Patricia MIRALLÈS, chargée des Anciens combattants et de la Mémoire

Auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères :

Mme Chrysoula ZACHAROPOULOU, chargée du Développement et des Partenariats internationaux

Auprès du Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires :

M. Hervé BERVILLE, chargé de la Mer et de la Biodiversité


Le gouvernement dans sa totalité se réunira le mercredi 14 février 2024 à 10 heures au Palais de l'Élysée.



Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240208-gouvernement-attal.html

 

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25 janvier 2024 4 25 /01 /janvier /2024 17:26

« Loi Immigration : le Conseil Constitutionnel valide l'intégralité du texte initial du gouvernement : jamais un texte n'a prévu autant de moyens pour expulser les délinquants et autant d'exigence pour l'intégration des étrangers ! Le gouvernement prend acte, comme j'ai pu l'indiquer lors des débats, de la censure de nombreux articles ajoutés au Parlement, pour non respect de la procédure parlementaire. » (Gérald Darmanin, le 25 janvier 2024 sur Twitter).




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Le Conseil Constitutionnel a livré sa décision ce jeudi 25 janvier 2024 à 16 heures 30 sur la constitutionnalité de la loi Immigration. Très attendue, cette décision n°2023-863 DC du 25 janvier 2024 a censuré 40% du texte adopté par le Parlement.

Ces invalidations étaient prévisibles, et achèvent un processus législatif particulièrement regrettable et chaotique à plus d'un titre (cf les épisodes précédents), qui n'honore finalement aucun parti parlementaire, le contre-exemple de ce que le législateur devrait faire pour construire correctement une loi. L'immigration est un sujet hypersensible, et la plupart des partis ont laissé la rationalité au vestiaire pour s'engager dans une bataille de postures en vue de l'élection présidentielle de 2027.

Seul, finalement, le texte du gouvernement était raisonnable, c'est-à-dire rationnel, au sens qu'il entend lutter efficacement contre l'immigration illégale et qu'il entend mieux intégrer les immigrés légaux. En d'autres termes, le texte d'origine du gouvernement était équilibré, et c'est finalement ce texte qui reste, dépouillé des mesures démagogiques du groupe LR du Sénat, et ce parti savait en conscience qu'elles étaient anticonstitutionnelles. Du reste, LR a joué un jeu très hypocrite puisque, d'un côté, ce parti a voulu montrer qu'il fallait réviser la Constitution sur ce sujet (en anticipant cette décision du Conseil Constitutionnel), et de l'autre, dans l'instruction du dossier devant le Conseil Constitutionnel, il argumentait sur leur conformité à la Constitution.

C'est clair que dans ce jeu, la majorité parlementaire a gagné sur le terrain législatif : le gouvernement voulait absolument un texte, de plus équilibré, et a accepté les conditions de LR (et aucune du RN) car c'était le seul passage possible pour le vote de la loi. Emmanuel Macron l'a d'ailleurs expliqué très clairement peu après ; il avait accepté ces mesures imposées par LR car sinon, il n'y aurait pas d'autre choix que l'abandon pur et simple du texte. Mais la majorité avait bien mis en garde LR que ces mesures imposées ne passeraient pas la validation par le Conseil Constitutionnel. Donc, aucune surprise à ce qui s'est passé ce jeudi soir.

Un peu plus loin, j'expliquerai plus précisément ce qui a été "censuré" (le mot est inexact, il faudrait dire "invalidé") par le Conseil Constitutionnel et pour quelle raison. Mais auparavant, je souhaiterais faire une petite analyse politique un peu plus précise.


Épargnons-nous d'abord la tarte à la crème du Conseil Constitutionnel qui seraient un gouvernement de juges censeurs sans légitimité démocratique. C'est simple, cela fait plus de cinquante ans que ça dure, les partis disent que la Conseil Constitutionnel fait de la politique quand il prend des décisions qui ne leur plaisent pas, et qu'il fait du droit quand ses décisions leur plaisent. D'où les appels à réviser la Constitution parce qu'elle ne permet pas de faire n'importe quoi ! Ou de faire des référendums qui iraient à l'encontre des droits fondamentaux !

Ainsi sur Twitter, le président de LR, Éric Ciotti, s'est faussement indigné : « Ils ont jugé en politique plutôt qu'en droit. (…) Une réforme constitutionnelle apparaît plus que jamais indispensable pour sauvegarder le destin de la France ! » (rien que ça !). Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat, n'était pas moins excessif : « En censurant la loi votée par le Parlement, le Conseil Constitutionnel vient de censurer la voix des Français. (…) C'est pourquoi je demande au gouvernement de soumettre d'urgence un nouveau texte qui permette de protéger vraiment les Français du chaos migratoire. » (rien n'interdit monsieur Retailleau de déposer une proposition de loi allant dans ce sens). Quant au président du RN, Jordan Bardella, l'excessif est toujours aussi insignifiant : « Par un coup de force des juges, avec le soutien du Président de la République, le Conseil Constitutionnel censure les mesures de fermeté les plus approuvées par les Français : la loi Immigration est mort-né. La seule solution, c'est le référendum sur l'immigration. ». La loi Immigration avait été adoptée le 19 décembre 2023 à l'Assemblée Nationale par la majorité, LR et le RN.

Rappelons donc que le Conseil Constitutionnel ne fait que du droit, et plus exactement, du droit constitutionnel. C'est une marche supplémentaire de la démocratie. Face aux excitations des temps actuels, aux majorités qui s'interchangent et qui peuvent décider le contraire de la précédente, la Constitution et son gardien, le Conseil Constitutionnel, servent à préserver un minimum de stabilité et de garantie pour les droits fondamentaux (liberté, égalité, fraternité, laïcité, etc.). En plus de cela, le Conseil Constitutionnel regarde scrupuleusement la manière dont les élus nationaux sont élus (validation ou invalidation d'une élection en cas de contestation) et la manière dont la loi est construite. Cela permet de préserver les droits fondamentaux quelle que soit la majorité en place.


Historiquement, l'existence du Conseil Constitutionnel, approuvée avec la Constitution par une très large majorité du peuple français, était une disposition qui n'était pas voulue par De Gaulle mais par les juristes, un échelon supplémentaire de la garantie des droits fondamentaux, qu'ont généralement toutes les démocraties. Au départ, soyons clairs, il ne servait pas à grand-chose, De Gaulle y nommait ses proches (Georges Pompidou par exemple).

Mais tout a changé à partir du début des années 1970. Réservée uniquement au Président de la République et aux présidents des deux assemblées, la saisine du Conseil Constitutionnel a été élargi aux membres de l'opposition par une réforme du Président Valéry Giscard d'Estaing en 1974 (60 députés ou 60 sénateurs peuvent saisir le Conseil Constitutionnel, en plus des trois personnages de l'État cités). Parallèlement, Alain Poher, Président du Sénat, a fait évoluer la pratique en intégrant dans la défense de la Constitution ce qu'on appelle le bloc de constitutionnalité, une ensemble de textes qui va au-delà du seul texte de la Constitution, y compris un loi simple, celle du 9 décembre 1905 sur la laïcité. Enfin, une grande révolution s'est opérée avec la dernière révision constitutionnelle, celle du 23 juillet 2008 initiée par le Président Nicolas Sarkozy, qui s'appelle la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui permet de contester la constitutionnalité d'une loi déjà promulguée (et parfois déjà ancienne), remettant ainsi en cause la stabilité de notre édifice juridique mais renforçant nos droits fondamentaux.

Pour la loi Immigration, le Conseil Constitutionnel a été saisi quatre fois : une fois par le Président de la République Emmanuel Macron lui-même, de ce qu'on appelle une "saisie blanche", c'est-à-dire sans préciser les points éventuellement litigieux, une deuxième fois par la Présidente de l'Assemblée Nationale Yaël Braun-Pivet, une troisième fois par les députés de la Nupes (ces trois saisines datant du 26 décembre 2023) et enfin, le lendemain, d'une quatrième saisine par les sénateurs de gauche.

Comme l'a bien décrit le député MoDem Bruno Millienne, la première faute incombe à la gauche (à la Nupes) qui a joué avec le feu en déposant le 11 décembre 2023 une motion de rejet. Quand la députée écologiste l'avait déposée, elle n'imaginait pas qu'elle serait adoptée : c'était une posture politicienne pour protester contre ce texte sur l'immigration. Le texte du Sénat, qui a été à peu près celui de la commission mixte paritaire (CMP) par la suite, avait été édulcoré par la commission des lois de l'Assemblée Nationale, et la motion de rejet a été adoptée grâce à l'apport des voix du RN et d'une majorité de voix de LR, si bien que le texte de base pour négocier un texte commun aux deux assemblées était le texte (durci) du Sénat. La gauche a fait la politique du pire et aujourd'hui, elle dit "ouf" alors qu'elle aurait pu éviter ces mesures censurées en agissant avec plus de sincérité politique.


La deuxième faute du chaos législatif provoqué par la loi Immigration provient du groupe RN qui a, lui aussi, joué la posture électorale : pourquoi a-t-il voté la motion de rejet le 11 décembre, puis le texte de la majorité, négocié uniquement entre Renaissance et LR, le 19 décembre ? Uniquement une manœuvre politicienne. Il est également responsable de cette grande partie censurée, tout simplement parce que le cynisme visait à vouloir des mesures en sachant très bien qu'elles ne seraient pas validées.


La troisième faute revient bien sûr à LR qui s'est agité avec ce thème de l'immigration à tort et à travers. Les élus LR sont affolés à l'idée que ce thème soit préempté par le RN. La réalité médiatique, c'est que LR a raté son coup politique dès lors que le RN avait annoncé qu'il voterait aussi le texte de la commission mixte paritaire. En somme, LR a été un idiot utile de l'idéologie véhiculée par le RN. Certes, ce soir reprend donc le concours de surenchères débilitantes entre le RN et LR, qui en veut du référendum, qui en veut de virer ces méchants juges, qui en veut de ces mesures qui sont contraires à la Constitution... et qui en veut de virer ces méchants étrangers.

Évidemment, il ne faut pas oublier la quatrième faute (j'aurai ainsi passé en revue tous les groupes politiques au Parlement), celle qui revient à la majorité qui a fait adopter un texte d'une manière très tordue mais qui a atteint son objectif puisque seul le texte initial du gouvernement a été validé. Du cynisme ? Peut-être. Mais surtout de la procédure (assez complexe à comprendre), qui n'a pas eu pour effet d'éclaircir les débats. Peut-être le gouvernement aurait-il dû défendre son texte équilibré avec une base de députés socialistes accessibles à la rationalité, plus que de faire confiance à une laborieuse alliance de circonstance avec des élus LR hystérisés ? En revanche, la décision du Conseil Constitutionnel efface l'argument que la majorité ferait la politique du RN, même si Olivier Faure a continué à éructer sur Twitter le 25 janvier 2024 : « Le gouvernement portera comme une tâche [sic] indélébile l'appel à voter une loi s'alignant sur les positions historiques de l'extrême droite sous la pression de LR. » (ce qui est contradictoire : extrême droite ou LR ? et corrigeons le mot "tache" qui, ici, ne prend pas d'accent).

Sans doute cette décision du Conseil Constitutionnel est la plus longue de son histoire. Pourquoi ? Parce que d'habitude, le Conseil Constitutionnel n'a pas à faire beaucoup de recherches : il suffit souvent de relire les débats parlementaires pour mettre en valeur un éventuel manque de conformité à la Constitution d'une disposition. Mais il n'y a pas eu de débat contradictoire, puisqu'à cause de la motion de rejet, les dispositions rajoutées par le Sénat n'ont jamais été débattues par l'Assemblée Nationale. Ce qui a été préjudiciable sur le fond à la gauche qui a pourtant initié la motion de rejet.


Dans son blog de cabinet d'avocats, maître Éric Landot écrit ainsi : « Il en résulte aujourd’hui un débat sur le point de savoir si la faute à ce nombre important d’inconstitutionnalité est à faire peser sur l’étrange alliance EELV-LFI-PS-div.G-RN qui a prévalu le 11 décembre 2023, ou sur le gouvernement ainsi que sur les membres de la CMP qui ne se seraient pas alors assez battus pour faire prévaloir des formulations plus aisément constitutionnelles. À chacun de se faire une religion sur ce point… ».

Et même si ce blog s'est trompé par distraction sur le vote des députés du MoDem et de Horizons (qui ont tous voté contre la motion de rejet du 11 décembre 2023), il pointe bien l'élément central du problème : « Une grande partie des votants de cette majorité de circonstance EELV-LFI-PS-div.G-RN-LR accusent le gouvernement de ne pas avoir défendu ces arguments constitutionnels en CMP. Alors même que certaines inconstitutionnalités étaient patentes (et elles l’étaient pour certaines d’entre elles). La majorité nationale riposte que cela n’était plus réellement possible faute pour les députés en CMP d’avoir eu un texte à défendre. Il est si difficile en pareil cas de trouver un accord en CMP que si l’accord se fait avec des formulations que l’on sait devoir être censurées… on peut sceller un tel accord sans se compromettre moralement. ».

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Venons-en donc au contenu (partiel) de la décision du Conseil Constitutionnel.


D'abord, 32 articles (sur 86) ont été censurés complètement ou partiellement pour une raison juridique simple : parce que chacune des dispositions en question était un cavalier législatif. Je rappelle ce que c'est : c'est une mesure qu'on rajoute au texte de loi par amendement sans rapport avec l'objet du texte. Souvent, cela permet de passer des mesures urgentes sans repasser par un autre texte (il suffit de ne pas saisir le Conseil Constitutionnel pour que celles-ci passent). L'article 45 de la Constitution l'interdit effectivement (« Tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis. ») car cela contrevient à une construction sincère de la loi. Ces censures n'ont donc aucune raison sur le fond, et sont encore moins politisées, mais simplement de droit. Rien n'empêche les parlementaires de reprendre ces mesures dans un ou plusieurs autres textes à débattre et faire adopter.

Les mesures touchées sont notamment : la réforme du regroupement familial, la modification de certaines conditions de délivrance d'un titre de séjour, les frais d'inscription des étudiants étrangers, l'exclusion des étrangers du bénéfice de la réduction tarifaire accordée en Île-de-France sous conditions de ressources, la création d'un délit de séjour irrégulier d'un étranger majeur, la condition de résidence en France d'au moins cinq ans pour avoir le bénéfice de l'aide au logement, de l'allocation personnalisée d'autonomie et des prestations familiales pour l'étranger non ressortissant de l'Union Européenne, la modification des conditions d'hébergement d'urgence de certaines catégories de personnes sans abri ou en détresse, etc.

Ensuite, trois autres articles ont été censurés sur le fond, dont deux portent sur des mesures emblématiques.

Une partie de l'article 1er : il s'agit d'obliger le Parlement à organiser un débat annuel où il fixerait le nombre d'étrangers autorisés à s'installer en France. Sur ce point précis, on a dit tout et n'importe quoi. Il ne s'agit pas d'interdire le Parlement de fixer des quotas (du reste, il n'y a pas besoin de loi, le gouvernement peut le fixer lui-même sans processus législatif), mais d'empêcher d'imposer un ordre du jour au Parlement, ce qui contrevient à la séparation des pouvoirs (donc, on pourra toujours réviser la Constitution, le principe restera le même). Le communiqué du Conseil Constitutionnel est très clair : « Une telle obligation pourrait faire obstacle aux prérogatives que le gouvernement ou chacune des assemblées, selon les cas, tiennent de la Constitution pour la fixation de l’ordre du jour. ». En revanche, imposer un rapport annuel de la situation dans un domaine n'est pas anticonstitutionnel.

L'article 38 : l'autorisation de relever les empreintes digitale et de photographier un étranger sans son consentement. Si l'objectif semble validé : « En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu faciliter l’identification des étrangers en situation irrégulière. Il a ainsi poursuivi l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière qui participe de la sauvegarde de l’ordre public, objectif de valeur constitutionnelle. », en revanche, deux éléments contreviennent aux droits fondamentaux : « D’une part, ces dispositions se bornent à prévoir que l’officier de police judiciaire qui décide de procéder à la prise d’empreintes ou de photographie sans le consentement de l’intéressé en informe préalablement le procureur de la République. Ces opérations ne sont ainsi ni soumises à l’autorisation de ce magistrat, saisi d’une demande motivée en ce sens, ni subordonnées à la démonstration qu’elles constituent l’unique moyen d’identifier la personne qui refuse de s’y soumettre. D’autre part, ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition ne prévoient que, lorsque la personne contrôlée ou retenue a demandé l’assistance d’un avocat, la prise d’empreintes digitales ou de photographie sans son consentement doit être effectuée en la présence de ce dernier. ».

Le communiqué du Conseil Constitutionnel a affirmé que parmi les dispositions déclarées conformes à la Constitution, il y a celle, contestée par les auteurs des saisines, relative à l'engagement de l'étranger à respecter les principes de la République (article 46) : « Le Conseil Constitutionnel juge notamment que, loin de méconnaître des exigences constitutionnelles, le législateur a pu, pour en assurer la protection, prévoir qu’un étranger qui sollicite la délivrance d’un document de séjour doit s’engager à respecter des principes, parmi lesquels figure la liberté d’expression et de conscience, qui s’imposent à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. À cette fin, c’est à bon droit qu’il a imposé désormais aux ressortissants étrangers, qui ne se trouvent pas dans la même situation que celle des nationaux, la souscription d’un contrat prévoyant l’engagement de respecter la liberté personnelle, la liberté d’expression et de conscience, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République au sens de l’article 2 de la Constitution, l’intégrité territoriale, définie par les frontières nationales, et de ne pas se prévaloir de ses croyances ou de ses convictions pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre les services publics et les particuliers. ».

Comme on le voit, cette décision n°2023-863 DC du 25 janvier 2024 est assez complexe à lire et à comprendre car c'est un texte essentiellement juridique. Ce qu'il faut retenir, c'est que de nombreuses dispositions ont été censurées parce que leur procédure d'adoption n'était pas conforme à la Constitution en étant des cavaliers législatifs, ces invalidations ne statuent pas sur le fond mais sur la manière dont elles ont été adoptées. D'autres dispositions, très peu nombreuses (trois, et deux autres conformes sous réserve d'interprétation) ont été invalidées sur le fond. Cette décision était prévisible car les rajouts effectués par le Sénat étaient constitutionnellement contestables. Il n'y a donc ni surprise ni indignation à avoir. Toutes les réactions de l'opposition, celle de droite comme celle de gauche, sont des jeux de rôle de bien tristes sires.

Du reste, les mesures invalidées auraient-elle pour effet une réduction de l'attractivité de la France pour les migrants ? C'est peu probable, car les candidats à l'immigration ne lisent pas les textes de loi et font encore moins de la veille juridique (quand la loi est changée). Ils sont dans l'urgence économique ou humanitaire et cherchent avant tout à sauver leur vie et leurs proches. Ils sont prêts à mourir dans la mer, alors les dispositions, censurées ou pas, de cette loi Immigration, c'est le cadet de leurs soucis.

Comme l'a affirmé le Ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin au journal de 20 heures de ce jeudi 25 janvier 2024 sur TF1, la loi Immigration retrouve sa forme originelle présentée par le gouvernement. Elle permettra au gouvernement des moyens plus efficaces. Elle ne résoudra probablement pas le "problème de l'immigration" dont le sentiment restera encore très vif quelle que soit la législation en cours. En revanche, le gouvernement devra honorer sa parole, du moins, celle d'Élisabeth Borne, à savoir de réformer l'aide médicale d'État, ce sera le travail de la nouvelle ministre Catherine Vautrin.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (25 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Loi Immigration : le Conseil Constitutionnel donne raison au gouvernement !
Bruno Millienne : la gauche piégée par une manœuvre de garçon de bain.
Loi Immigration : le service après-vente d'Emmanuel Macron.

Commission mixte paritaire et adoption de la loi Immigration.
Article 49 alinéa 3 et projet de loi Immigration.
Motion de rejet préalable et projet de loi Immigration.

Loi Immigration : le risque du couperet...
Des bleus à l'A.M.E. (aide médicale d'État) : entre posture et protection.
L'affaire Leonarda, dix ans plus tard...
La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
Aymen Latrous Aymen Latrous n’est pas Leonarda !
Mamoudou Gassama, un héros en France.
Leonarda sous le feu des projecteurs.
L’immigration irlandaise.
Immigration : l'occasion ratée de François Hollande.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240125-loi-immigration.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/loi-immigration-le-conseil-252740

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2024/01/25/40186520.html





 

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20 janvier 2024 6 20 /01 /janvier /2024 04:18

« Le délit de favoritisme n'est pas caractérisé. » (président de l'audience de la 32e chambre du tribunal correctionnel de Paris, le 17 janvier 2024).




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Depuis le 11 janvier 2024, Olivier Dussopt n'est plus le Ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion, oublié des premières nominations du gouvernement Attal. C'était prévisible mais il pourrait peut-être revenir à la seconde vague de nominations, celles des ministre délégués et secrétaires d'État. La raison en était simple : on attendait la décision de la 32
e chambre du tribunal correctionnel de Paris.

En effet, mis en examen pour le délit de favoritisme avec l'entreprise choisie en 2012 pour l'installation d'une microturbine hydroélectrique alors qu'il était encore maire d'Annonay, en Ardèche, Olivier Dussopt a comparu devant ce tribunal le 27 novembre 2023 et risquait jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 200 000 euros d'amende. Le procureur a alors requis 10 mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 euros d'amende. Le tribunal a finalement jugé ce mercredi 17 janvier 2024 qu'il n'y avait pas matière à condamnation et a relaxé Olivier Dussopt. Le ministère public peut encore faire appel.

Cela faisait des mois voire des années (trois ans de procédure !) qu'Olivier Dussopt vivait très mal d'être mis en accusation, proclamant partout son innocence et sa bonne foi, mais ce genre de propos est inaudible tant la défiance de la classe politique est grande. Paradoxalement, il n'est pas venu au tribunal pour entendre le verdict, étant souffrant, mais il a dû pousser un grand soupir de soulagement de voir son intégrité reconnue par le tribunal.

La supposée affaire (il n'y en a plus, désormais) a été révélée par le site Mediapart le 20 mai 2020 alors qu'Olivier Dussopt était encore Secrétaire d'État délégué aux Comptes publics et chargé plus particulièrement de la fonction publique, auprès de Gérald Darmanin.

Sa réaction a été, sur Twitter : « Après trois ans et demi de procédure, je suis heureux que mon innocence soit reconnue et que la justice m'ait été rendue. ». Selon "Le Figaro", il aurait fait savoir à Emmanuel Macron qu'il ne souhaitait toutefois pas revenir au gouvernement.

En moins de deux mois, deux ministres importants mis en examen ont finalement été relaxés par la justice. Et pourtant, ces deux informations ont été beaucoup moins médiatisées que leur mise en examen. Cette seconde relaxe, après celle du Garde des sceaux Éric Dupond-Moretti le 29 novembre 2023, rappelle une fois encore que la présomption d'innocence n'est pas vaine notion et que l'honneur d'une personne doit être respecté tant que la justice n'a pas tranché, et de nos jours, pour les politiques, la justice est très rarement clémente (il suffit de regarder la longue liste des condamnations judiciaires).

Cette bonne nouvelle pour l'ancien ministre lui donnera-t-elle quelque chance d'accéder encore au gouvernement, mais par la petite porte des sous-ministres ? Ou au contraire, souhaite-t-il pleinement consacrer sa liberté pour envisager d'autres défis, comme diriger la liste de la majorité présidentielle aux élections européennes de juin 2024 ou encore envisager une candidature aux élections régionales d'Auvergne-Rhône-Alpes prévues en 2027 (peut-être reportées ou ravancées en raison d'une année électorale très dense) ? Sur ces deux défis électoraux, il se trouve en concurrence avec Olivier Véran, lui aussi sorti du gouvernement et élu grenoblois.

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Revenons rapidement sur la carrière politique d'Olivier Dussopt, chouchou du Président de la République au point d'être le ministre qui a vaillamment défendu la réforme des retraites. Une sorte de bouc émissaire de toutes les oppositions au Palais-Bourbon.

Même si sa personnalité ne semble pas en faire un poids lourd national de la politique française, Olivier Dussopt est cependant un petit génie de la vie politique, et de sa vie active, il n'a connu que la politique. Il s'est engagé en 2000 au sein de l'aile gauche du parti socialiste et appréciait notamment Henri Emmanuelli, Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon (à l'époque au PS), Marie-Noëlle Lienemann et aussi Martine Aubry. D'une famille peu aisée, il a poursuivi des études au sein de l'IEP de Grenoble où il a obtenu un DESS. Il a commencé comme collaborateur parlementaire entre 2002 et 2006 d'un sénateur socialiste également président du conseil général de l'Ardèche, Michel Teston.

Candidat sur la liste socialiste aux élections régionales de Rhône-Alpes en mars 2004, il fut élu au conseil régional en juillet 2006 après la démission d'une élue de sa liste. Il avait alors 27 ans. Il n'allait rester qu'un an et demi au conseil régional de Rhône-Alpes alors présidé par le socialiste (et ancien ministre) Jean-Jack Queyranne, car sa carrière a eu deux coups d'accélérateur pendant ce temps.


En effet, en juin 2007, Olivier Dussopt fut élu député de l'Ardèche, battant avec 53,7% le député sortant, également maire UMP d'Annonay, Gérard Weber (1948-2016), profitant d'une division à droite. En mars 2008, dans la foulée, il fut élu maire d'Annonay, sa ville natale, ville de 16 000 habitants, la plus peuplée de l'Ardèche, succédant à Gérard Weber qui ne se représentait pas après sa défaite de 2007. Olivier Dussopt a ensuite été sans discontinuité réélu député et maire, abandonnant la mairie en 2017 pour des raisons de cumul des mandats, et réélu député en juin 2017 avec l'étiquette du PS.

Il faisait d'ailleurs partie des socialistes les plus critiques contre la réforme des retraites de 2010 engagée par Éric Woerth, celle qui a fait passer l'âge légal de 60 à 62 ans. À l'époque, le 5 mai 2010, il disait au gouvernement : « Cette volonté de reculer l'âge de la retraite est doublement injuste. D'une part, elle écarte d'emblée la recherche d'autres recettes, notamment la mise à contribution de l'ensemble des revenus et en particulier de ceux issus du capital. Entre les niches fiscales et le bouclier du même nom, beaucoup pourrait être fait pour que l'effort ne porte pas une fois de plus sur les seuls salariés. D'autre part, elle fera porter l'effort sur les générations nées après 1970, aujourd'hui plus préoccupées par leur situation actuelle, par leur entrée sur le marché du travail que par la question de leur retraite. À la précarité et au taux de chômage historique qu'ils connaissent, vous allez ajouter l'infliction d'une double peine aux moins de trente ans en éloignant toujours plus le moment de leur départ en retraite. ».

Homme de dossiers, travailleur, capable d'expliquer simplement des choses compliquées, Olivier Dussopt s'est fait apprécier très rapidement par sa bonne connaissance des sujets techniques qu'il étudiait. Le Premier Ministre Manuel Valls l'a rapidement repéré et a voulu l'intégrer à son gouvernement à deux reprises, sans succès pour diverses raisons. Lors de la primaire socialiste de janvier 2017, Olivier Dussopt a soutenu Manuel Valls, et après l'échec de ce dernier, n'a pas soutenu la candidature de Benoît Hamon mais celle d'Emmanuel Macron. Néanmoins, au printemps 2017, il n'était pas encore "macronisé" et restait dans l'opposition, au sein du groupe socialiste (réélu en juin sous cette étiquette).

Cependant, pendant ces premiers mois de la Macronie, Olivier Dussopt a travaillé dans plusieurs groupes de travail initié par le gouvernement et il fut finalement nommé membre du gouvernement le 24 novembre 2017. Il resta ministre plus de six ans, dans des postes souvent exposés : d'abord Secrétaire d'État auprès de Gérald Darmanin (alors Ministre de l'Action et des Comptes publics) chargé (implicitement) de la Fonction publique du 24 novembre 2017 au 6 juillet 2020 dans le gouvernement d'Édouard Philippe, Ministre délégué auprès de Bruno Le Maire chargé des Comptes publics du 6 juillet 2020 au 20 mai 2022 dans le gouvernement de Jean Castex et enfin, Ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion du 20 mai 2022 au 11 janvier 2024 dans le gouvernement d'Élisabeth Borne. Il a été réélu député de l'Ardèche en juin 2022 sous l'étiquette, cette fois, de Renaissance, le parti présidentiel. En décembre 2019, il était déjà pressenti pour remplacer Jean-Paul Delevoye et défendre la première réforme des retraites (abandonnée avec la crise sanitaire). Olivier Dussopt a été remplacé par Catherine Vautrin dans le gouvernement de Gabriel Attal.

Dès sa première nomination au gouvernement, Olivier Dussopt a été radié du PS. Avec un autre collègue d'origine socialiste du gouvernement, Jean-Yves Le Drian, Olivier Dussopt a alors fondé le parti Territoires de progrès le 1er février 2020, qu'il préside depuis le 9 octobre 2021, dont le but politique est de rassembler l'aile gauche (d'origine socialiste) de la Macronie. Dans ce parti se trouvent notamment, en plus de ceux déjà cités : Olivier Véran, Gilles Savary, Xavier Iacovelli, Agnès Pannier-Runacher, Émilie Chalas, Patricia Mirallès, Jean-François Carenco, Roland Ries, Clément Beaune, Brigitte Bourguignon, Florence Parly, Élisabeth Borne, Emmanuelle Wargon, Laurence Maillart-Méhaignerie, Stéphane Travert, Anne-Christine Lang, François Pupponi, Didier Guillaume, etc.

Nul doute qu'à 45 ans, Olivier Dussopt a encore un avenir politique devant lui. Sauf nomination surprise comme ministre délégué, il va retrouver son siège de député de l'Ardèche le 11 février 2024 et aura à cœur de défendre ses propres propositions de loi qu'il aura scrupuleusement préparées. Il est l'une des nombreuses victimes du télescopage du calendrier politique avec le calendrier judiciaire.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (17 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Démineur du gouvernement.
Olivier Dussopt relaxé.
Emmanuel Macron.

Gabriel Attal.
Rachida Dati.
Amélie Oudéa-Castéra.
Le gouvernement de Gabriel Attal.
Élisabeth Borne.
François Bayrou.
Édouard Philippe.
Éric Dupond-Moretti.
Bruno Le Maire.
Brigitte Macron.
Gérard Collomb.
François Léotard.
Pap Ndiaye.
Robert Badinter.
Bruno Millienne.
Jean-Louis Bourlanges.
Claude Malhuret.
Olivier Véran.
Aurore Bergé.
Pierre Moscovici.
Rima Abdul-Malak.
Vincent Lindon.
Caroline Cayeux.
Christophe Béchu.
Agnès Pannier-Runacher.
Sacha Houlié.
François Braun.
Jean-Yves Le Drian.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240117-dussopt.html

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12 janvier 2024 5 12 /01 /janvier /2024 04:19

« J'ai envie de répondre aux attentes de nos concitoyens avec humilité, je me sens armé pour le faire. (…) Ce que je veux, c'est de l'action et des résultats. (…) Ma méthode, c'est de dire la vérité, d'être lucide sur le constat. » (Gabriel Attal, le 11 janvier 2024, au journal de 20 heures sur TF1).





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Le nouveau Premier Ministre Gabriel Attal n'est pas resté inactif depuis sa nomination le 9 janvier 2024 vers 12 heures. Dès 14 heures 30, arrivant à pied, passation des pouvoirs à Matignon ; en fin d'après-midi, visite avec Christophe Béchu aux sinistrés des inondations dans le Pas-de-Calais (en brûlant de nombreux feux rouges et en franchissant de nombreuses lignes blanches ; il me semble qu'à son arrivée à Matignon, Élisabeth Borne respectait les feux rouges) ; dîner à l'Élysée ; lendemain, visite avec Gérald Darmanin dans un commissariat de police en région parisienne ; déjeuner et dîner à l'Élysée ; le surlendemain, redéjeuner à l'Élysée, etc. et enfin, l'annonce de la composition du nouveau gouvernement (non, ce n'est pas un remaniement !), juste avant le journal télévisé de 20 heures sur TF1, tradition politique ancestrale d'un nouveau Premier Ministre d'aller à son oral de démarrage devant les Français.

Les petits discours de passation sont toujours instructifs. Ils sont à peine préparés, à peine griffonnés, et pourtant, ils donnent un aperçu de l'avenir... et aussi du passé pour la personne qui s'en va. Élisabeth Borne a fait sans doute l'un de ses meilleurs discours, venant du cœur, et se montre une grande politique, ultracompétente techniquement. Elle a donné la recette de sa méthode : « J'ai mis toute mon énergie à les servir. J'ai travaillé sans relâche, sans chercher les coups d'éclat. Et partir du réel vécu par nos concitoyens, partir de leur quotidien et chercher à apporter des résultats rapides et tangibles, c'est ma méthode d'action et je l'assume ! ». Elle a aussi annoncé qu'elle ne quitterait pas la vie politique (elle exercera son mandat de député), elle a déjà refusé la proposition de rester au gouvernement aux Armées (à quoi cela rimerait, à part pour avoir un poste ?), on reparlera certainement d'elle dans quelques années, et probablement pas en mal.

Gabriel Attal a plutôt étonné par sa raideur et son stress : « Cela a été dit, ces dernières heures, j'ai pu le lire ou l'entendre : "le plus jeune Président de la République de l'histoire nomme le plus jeune Premier Ministre de l'histoire". Je ne veux y voir qu'un seul symbole : celui de l'audace et du mouvement. Le symbole aussi, et peut-être surtout de la confiance, celle accordée à la jeunesse, cette génération qui mérite que l'on se batte pour elle sans relâche. (…) Avec le Président de la République, j'aurai donc un objectif : garder le contrôle de notre destin et libérer notre potentiel français. ». Presque endimanché dans son manteau noir, il n'a fait que lire ses papiers, qu'il tenait de deux mains un peu fébriles, il avait l'air submergé par la grandeur de sa nouvelle fonction. Son sourire efface la perception du malaise. Il est dans l'action, pas le temps de psychoter !


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La nouvelle étape, c'est bien sûr la composition du nouveau gouvernement avec les habituelles marronniers : cela se fera vite, mais ça dure dans la rapidité car finalement, ce n'est pas évident de boucler une équipe au complet. Même topo pour le gouvernement resserré ! Comme à chaque nomination de nouveau gouvernement, on parle d'une équipe resserrée qui, finalement, n'est jamais si resserrée que cela, quitte à rajouter des ministres délégués et des secrétaires d'État en cas de réduction du nombre de ministres plein, ce qui est le cas ici.

Le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier a évoqué, dans son blog le 10 janvier 2024, cette tarte à la crème du resserrage d'équipe : « Souvent présenté comme un gage d’efficacité, un tel nombre traduit au contraire un renfort d’autorité… et il n’est jamais respecté. Il renforce l’autorité car moins l’on est nombreux, plus la décision du chef s’impose facilement : il est plus facile de diriger une équipe d’une dizaine de personnes que d’une vingtaine ou d’une quarantaine. Il renforce encore l’autorité car les directions administratives réparties en une vingtaine de ministères sont alors concentrées dans une dizaine. ».


Dans son discours d'arrivée à Matignon, Gabriel Attal a dit aussi : « J'emmène avec moi, à Matignon, la cause de l'école ! ». Et en fait, non, il n'a pas emmené l'Éducation nationale avec lui, il l'a laissée à Amélie Oudéa-Castéra, devenue Ministre de l'Éducation nationale, de la Jeunesse, des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques. Un très gros ministère qui pourrait ravir le médecin et animateur de télévision Michel Cymès qui souhaite redonner l'habitude du sport chez les plus jeunes, qui sont beaucoup trop collés devant un écran et qui ne bougent plus.

Il faut se souvenir d'un discours de Michel Rocard avant d'avoir été nommé à Matignon : il proposait, lui qui considérait que l'école était un élément majeur de la cohésion sociale, que le Premier Ministre s'occupât aussi de l'Éducation nationale. Quand il est devenu Premier Ministre, il n'a pas eu les mains libres pour la composition, et devait intégrer dans son équipe Lionel Jospin, le premier secrétaire du PS, un peu l'œil de Moscou, euh, de Mitterrand dans son gouvernement, qui a eu le Ministère de l'Éducation nationale et était classé en numéro deux du gouvernement, donc, un peu dans la philosophie rocardienne de l'éducation. La réalité, c'est qu'on ne peut pas être un Premier Ministre à temps plein (avec l'ambition de faire un déplacement par jour !) et assurer les fonctions de Ministre de l'Éducation nationale en même temps.

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Revenons à la composition du nouveau gouvernement. Bien entendu, la surprise du jour, c'est la nomination de Rachida Dati comme Ministre de la Culture à la place de Rima Abdul-Malak. C'est une recrue de choix dans le phagocytage consciencieux de LR par la Macronie depuis 2017. Très logiquement, dès l'annonce de cette nomination, elle a été exclue de LR, ce qui, à mon avis, va au-delà des simples statuts mais ce qui paraît néanmoins normal politiquement. Ministre de la Justice de 2007 à 2009, députée européenne de 2009 à 2019, maire du 7
e arrondissement de Paris depuis 2008, elle est surtout la chef de l'opposition à Anne Hidalgo au conseil de Paris (ses joutes sont très suivies sur Internet), et cette dernière doit avoir quelques frissons de savoir qu'elle devra travailler avec son opposante devenue une ministre fonctionnellement très parisienne. Anne Hidalgo a assez mal réagi dans la soirée : « Je souhaite bon courage aux acteurs du monde de la culture compte tenu des épreuves qu'ils vont traverser. » (elle aurait dû écrire : "compte tenu des épreuves que je vais traverser" !).

Cela fait des années que Rachida Dati critiquait la direction de LR et demandait un véritable contrat de gouvernement entre la majorité présidentielle et LR afin de construire une majorité absolue à l'Assemblée Nationale. Jusqu'à maintenant, Emmanuel Macron et Gabriel Attal n'ont pu faire que du débauchage individuel, mais, finalement, le nouveau gouvernement est composé de sept ministres sur quatorze qui proviennent de LR !

Peu de surprise pour les autres ministres. Les grands ministres sont conservés : Bruno Le Maire à l'Économie et aux Finances, Gérald Darmanin à l'Intérieur et aux Outre-mer, Éric Dupond-Moretti à la Justice et Sébastien Lecornu aux Armées.

Stéphane Séjourné, patron de Renaissance, député européen et ancien compagnon de Gabriel Attal (dont l'homosexualité a été ouvertement déclarée), va remplacer Catherine Colonna au Quai d'Orsay (Europe et Affaires étrangères). À un moment, il a été question d'Amélie de Montchalin pour ce ministère.

Autre prise de guerre, Catherine Vautrin, présidente du Grand Reims, qui était première-ministrable en 2022, est revenue par la porte ministérielle à la tête d'un grand Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités. Elle sera secondée, lors de la nomination du reste du gouvernement, par Agnès Pannier-Runacher. Catherine Vautrin remplace donc à la fois Olivier Dussopt, dont l'incertitude sur le jugement qui sera prononcé le 17 janvier 2024 incitait Gabriel Attal à ne pas le reconduire, Agnès Firmin-Le Bodo, soupçonnée par la justice d'avoir reçu, comme pharmacienne, des cadeaux illicites de la part d'un laboratoire pharmaceutique (entendue le jour même par la justice), et Aurore Bergé appelée à une autre fonction ministérielle.

Marc Fesneau, à l'Agriculture, et Christophe Béchu, à la Transition écologique, ont aussi sauvé leur ministère, mais de manière assez humiliante puisqu'ils sont les uniques représentants de leur parti respectif, le MoDem et Horizons (alors que deux nouveaux ministres LR ont été nommés ; en fait, Catherine Vautrin est aussi considérée comme une ministre Horizons).


Enfin, parmi les onze "ministres pleins", l'ancienne présidente de l'Université Paris-Saclay Sylvie Retailleau est, elle aussi, une rescapée du changement de gouvernement en restant Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle avait pourtant émis ses réticences sur la loi Immigration, notamment sur la caution que les étudiants étrangers devraient apporter en début d'année et la fin des aides au logement.

Parmi les trois ministres déléguées auprès du Premier Ministre nommées le 11 janvier 2024, la députée Marie Lebec prend la succession de Franck Riester aux Relations avec le Parlement, Prisca Thevenot celle d'Olivier Véran comme porte-parole du gouvernement (ainsi que chargée du "Renouveau démocratique") et Aurore Bergé est rétrogradée, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les Discriminations.

Sur ces quatorze nominations, il y a quatre entrants : Catherine Vautrin (ancienne secrétaire d'État entre 2004 et 2007), Rachida Dati (ancienne ministre entre 2007 et 2009), Stéphane Séjourné et Marie Lebec. Pour les sortants, il est difficile d'être très fixé car certains ministres qui n'ont pas été reconduits à ce jour pourraient être repêchés parmi les ministres délégués et secrétaires d'État qui seront nommés la semaine prochaine, ce sera le cas d'Agnès Pannier-Runacher.


Pour l'instant, hors de cette hypothèse de repêchage, sont sortants : Catherine Colonna, Olivier Dussopt, Rima Abdul-Malak, Agnès Firmin-Le Bodo, Stanislas Guérini (où est-il passé ? probablement sera-t-il nommé la semaine prochaine), Olivier Véran, Franck Riester et Bérangère Couillard. Le sort de Clément Beaune et de Patrice Vergriete (ministres délégués respectivement des Transports et du Logement dans le précédent gouvernement) sera à observer car ils se sont opposés à la loi Immigration, leur éviction est donc probable.

Concernant la parité, si effectivement il y a sept hommes et sept femmes parmi les quatorze nominations, les femmes y perdent quand même beaucoup en influence car il n'y a que quatre ministres pleins femmes, les autres sont déléguées, et par rapport au précédent gouvernement, "les femmes" ont "perdu" Matignon et les Affaires étrangères. Rappelons qu'au début du nouveau quinquennat, en juin 2022, il y avait trois femmes aux postes les plus importants de la majorité : Élisabeth Borne Première Ministre, Yaël Braun-Pivet Présidente de l'Assemblée Nationale et Aurore Bergé présidente du groupe Renaissance. Désormais, il ne reste plus que Yaël Braun-Pivet comme femme parmi ces trois postes stratégiques.

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On évoque une sarkozysation du gouvernement ; est-ce exact ? L'idée est de marquer politiquement et tous les ministres nommés ce 11 janvier 2024 sont des politiques. Il n'y en a plus qui sont des touristes perdus de la société dite civile. Le besoin d'une communication forte sur les réalisations du gouvernement est important. Élisabeth Borne était dans le savoir-faire, Gabriel Attal dans le faire-savoir. Le dircab de Gabriel Attal était l'ancien directeur de cabinet de Bruno Le Maire à Bercy, cela donne une idée aussi de l'encadrement du nouveau jeune Premier Ministre.


Quant aux contours de la majorité, pour l'instant, rien ne change mais l'idée générale serait de convaincre un certain nombre de députés LR de rejoindre la majorité présidentielle afin d'obtenir une majorité absolue. Même si Éric Ciotti a réagi très rapidement par la négative, les rangs LR sont divisés et Franck Louvrier, maire LR de La Baule et ancien conseiller en communication de Nicolas Sarkozy à l'Élysée, a d'ores et déjà déclaré son intérêt pour cette nouvelle architecture : selon lui, LR ne peut pas refuser les responsabilités et s'enfermer dans une opposition systématique qui la détruirait progressivement, en laissant au seul RN la volonté d'agir (il est même favorable à une liste commune Renaissance/LR aux élections européennes de juin 2024).

Rendez-vous donc la semaine prochaine, avec le complément du gouvernement, une allocution d'Emmanuel Macron et un discours de politique générale de Gabriel Attal. En raison de la majorité relative, Gabriel Attal ne devrait pas demander la confiance des députés mais les députés FI ont déjà annoncé qu'ils déposeraient une motion de censure, ce qui ferait que le gouvernement serait donc adoubé par l'Assemblée Nationale, en absence de majorité pour le renverser. Par leur opposition forcenée, les députés FI ne se rendent pas compte qu'ils aident le gouvernement à conquérir sa légitimité démocratique ! À suivre...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (11 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
Élisabeth Borne remerciée !
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240111-gouvernement-attal.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-gouvernement-de-gabriel-attal-252500

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11 janvier 2024 4 11 /01 /janvier /2024 19:37



Composition du premier gouvernement de Gabriel Attal nommé le jeudi 11 janvier 2024 par Emmanuel Macron



Nomination du Gouvernement.
Publiée le 11 janvier 2024






La composition du Gouvernement résultant du décret signé ce jour sur la proposition du Premier Ministre, chargé de la Planification écologique et énergétique est la suivante :

M. Bruno LE MAIRE, Ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique ;

M. Gérald DARMANIN, Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer ;

Mme Catherine VAUTRIN, Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités ;

Mme Amélie OUDÉA-CASTÉRA, Ministre de l'Éducation nationale, de la Jeunesse, des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques ;

M. Marc FESNEAU, Ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire ;

Mme Rachida DATI, Ministre de la Culture ;

M. Sébastien LECORNU, Ministre des Armées ;

M. Éric DUPOND-MORETTI, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice ;

M. Stéphane SÉJOURNÉ, Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères ;

M. Christophe BÉCHU, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires ;

Mme Sylvie RETAILLEAU, Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ;


Ministres délégués :
Auprès du Premier Ministre :


Mme Prisca THEVENOT, chargée du Renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement ;

Mme Marie LEBEC, chargée des Relations avec le Parlement ;

Mme Aurore BERGÉ, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les Discriminations.

Le Président de la République réunira l’ensemble des membres du Gouvernement pour un Conseil des ministres qui se tiendra le vendredi 12 janvier à 11h00.


Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240111-gouvernement-attal.html


 

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9 janvier 2024 2 09 /01 /janvier /2024 15:23

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Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240111-gouvernement-attal.html









Cérémonie de passation de pouvoir entre Élisabeth Borne et Gabriel Attal le mardi 09 janvier 2024



Allocution d'Élisabeth BORNE

Monsieur le Premier Ministre, cher Gabriel, tout d’abord, bienvenue à Matignon. Au moment où je te passe le relais, je voudrais d’abord dire toute ma reconnaissance. Ma reconnaissance au Président de la République, bien sûr, qui m’a fait confiance depuis 2017. Et je suis fière d’avoir, à ses côtés, pendant près de 7 ans, servi notre pays et nos concitoyens en tant que ministre puis Première Ministre. Ma reconnaissance aussi envers l'équipe gouvernementale que j'ai eu l'honneur de diriger, qui a porté avec force et détermination les réformes nécessaires, y compris les plus difficiles. Et je veux vraiment dire un grand merci à chacune et à chacun.

Je veux dire ma reconnaissance aussi aux Parlementaires de la majorité. Dans un contexte inédit, souvent face aux attaques les plus brutales, ils ont tenu. Alors je serai bientôt l'une d'entre eux en tant que députée du Calvados et je me réjouis de continuer à servir mon pays à leur côté avec détermination et exigence. Et puis, je veux remercier aussi les parlementaires des oppositions qui ont fait le choix du dialogue et du compromis plutôt que du blocage et de l'obstruction.

Je tiens aussi à remercier toutes les administrations que j'ai dirigées au cours de ces 7 années, les équipes de Matignon et tout particulièrement mon cabinet. Je mesure le travail qu'ils ont accompli à toute heure du jour et souvent de la nuit et j'ai été particulièrement bien entourée, donc je veux leur dire un grand merci. Je veux également rendre hommage à tous les partenaires qui sont essentiels pour notre action au service du pays. Je pense aux élus locaux qui s'engagent au quotidien pour nos concitoyens. Je pense aux acteurs de la société civile et notamment aux associations qui portent des combats essentiels, de la transition écologique à l'égalité des chances. Et puis, je pense aux partenaires sociaux avec lesquels j'ai toujours entretenu des relations de confiance et de respect. Moi, je crois au dialogue, à la co-construction, à la force du collectif. Alors, il y a eu des moments difficiles, mais le dialogue n'a jamais été rompu.

Enfin je veux dire aux Françaises et aux Français que chaque jour, en tant que ministre puis Première ministre, j'ai mis toute mon énergie à les servir. J'ai travaillé sans relâche, sans chercher les coups d'éclat. Et partir du réel vécu par nos concitoyens, partir de leur quotidien et chercher à apporter des résultats rapides et tangibles, c'est ma méthode d'action et je l'assume.

Alors, Monsieur le Premier Ministre, cher Gabriel, j’ai parlé de reconnaissance et je veux aussi parler de fierté. Je suis fière du travail accompli au cours de ces presque 20 mois, pendant lesquels je me suis, en particulier dans des conditions inédites à l’Assemblée, attelées à faire adopter nos budgets, la réforme des retraites, la loi immigration et plus de 50 textes pour répondre aux défis de notre pays et aux attentes de nos concitoyens. Nous avons réussi à construire des majorités de projets dans l'esprit du dépassement porté par le Président de la République en 2017. Et puis, je suis fière aussi que notre pays soit désormais doté d'une planification écologique concrète et solide.

Tout au long de ces années, tout au long de ces mois, je n'ai jamais reculé devant aucun obstacle, je n'ai jamais reculé devant aucune réforme. J'ai mené les projets qui me semblaient justes et nécessaires pour notre pays et j'ai tenu, sans trembler, le cap fixé par le Président de la République. Enfin, bien sûr, je ressens aujourd’hui beaucoup d’humilité. Je suis consciente de tout ce qu’il reste à accomplir. Je connais les enjeux devant nous. Nous devons y répondre et rassembler. Nous devons plus que jamais veiller à donner sa chance et des perspectives à chacun, bâtir une France plus forte et plus juste, dans une Europe plus souveraine.

Monsieur le Premier Ministre, cher Gabriel, au moment où je te passe le relais, je suis confiante. Nous nous connaissons bien, tous les deux, nous nous sommes engagés dès la première heure derrière le Président de la République. Tu as la détermination et l’énergie pour mener une équipe et porter les projets nécessaires pour notre pays. Tu as aussi cette volonté de tenir, de respecter la parole donnée. En te sachant dans cette fonction, j’ai confiance et je t’adresse tous mes vœux de succès. Tu peux compter sur moi pour t’y aider, il en va de la réussite de notre pays et c’est finalement la seule chose qui compte.

Et peut-être, je voudrais terminer sur un mot plus personnel. En prenant mes fonctions, j’avais adressé un message à toutes les petites filles en leur disant d'aller au bout de leurs rêves. Je pense que mon parcours démontre que quelle que soit son histoire, tout est possible. Mais j'ai aussi pu mesurer, assez souvent, qu'il reste du chemin pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Alors je le dis à toutes les femmes : « tenez bon ! L'avenir vous appartient ». Et puis, plus largement, il reste du chemin pour que chacun, quelle que soit son origine, quel que soit son milieu social, quelle que soit son adresse, ait toutes ses chances, par son mérite et son talent. Alors à toutes et tous, je veux le dire, à vos côtés, je continuerai le combat. Je vous remercie.

Élisabeth BORNE



Allocution de Gabriel ATTAL

Madame la Première Ministre, très chère Élisabeth, Mesdames, Messieurs, depuis 1936, depuis Léon BLUM, c’est d’ici, depuis l’hôtel de Matignon, que nos Premiers et nos Premières Ministres ont œuvré à bâtir la France. Chère Élisabeth, pendant près de 20 mois, c'est la France de demain que tu as contribué à bâtir. Aux côtés du Président de la République, tu as été une Première Ministre d'action et de courage. Ton histoire personnelle, tout autant que ton éthique politique, ont fait de toi un exemple pour tes ministres, pour les Parlementaires que tu as évoqués, et plus largement, je le crois très profondément, pour les Français. Nous savons tous ce que nous te devons. Élisabeth, Madame la Première Ministre, merci pour tout.

À l'heure où je prends mes fonctions, c'est d'abord au Président de la République que j'adresse mes remerciements les plus sincères. Cela a été dit, ces dernières heures, j'ai pu le lire ou l'entendre : « le plus jeune Président de la République de l'histoire nomme le plus jeune Premier Ministre de l'histoire ». Je ne veux y voir qu'un seul symbole : celui de l'audace et du mouvement. Le symbole aussi, et peut-être surtout, de la confiance, celle accordée à la jeunesse, cette génération qui mérite que l'on se batte pour elle sans relâche.

Ces derniers mois, j'ai consacré toute mon énergie à redonner espoir, à chercher à redonner espoir à cette génération et à ses parents en œuvrant pour l'école de la République. Je le dis d'emblée Mesdames et Messieurs, j'emmène avec moi ici à Matignon la cause de l'école. Je réaffirme l'école comme étant la mère de nos batailles, celle qui doit être au cœur de nos priorités et à qui je donnerai, comme Premier Ministre, tous les moyens d'action nécessaires pour sa réussite. Elle sera l'une de mes priorités absolues dans mon action à la tête du Gouvernement. Il y aura de ce point de vue une forme de continuité, car en prenant des décisions fortes sur l’abaya, en prenant des décisions fortes sur la laïcité, c'est pour la liberté que je me suis engagé. En prenant des décisions fortes sur l'exigence et sur le choc des savoirs, c'est pour l'égalité que je me suis engagé. En prenant des décisions fortes dans la lutte contre le harcèlement, c'est pour la fraternité que je me suis engagé. « Liberté, égalité, fraternité », cette devise de l'école est aussi celle de la République et ce sera toujours ma boussole.

Mais Mesdames et Messieurs, j'ai conscience du contexte dans lequel je prends mes fonctions. Trop de Français doutent encore. Trop de Français doutent de notre pays, doutent d'eux-mêmes, doutent de notre avenir. Je pense en particulier, aux classes moyennes, cœur battant de notre pays, artisans de la grandeur et de la force de notre nation française. Ces femmes, ces hommes, ces familles qui se lèvent tous les matins pour aller travailler, qui peuplent notre territoire et que l'on n'entend pas souvent, mais qui sont toujours au rendez-vous de leurs responsabilités. Cette classe moyenne qui travaille et qui finance, par son travail, nos services publics et notre modèle social. Ces Français qui, parfois, ne s'y retrouvent plus. Des Français doutent mais au fond, je sais qu'ils espèrent aussi car, au fond de nous, au plus profond de nos consciences de Français amoureux de notre pays, nous le savons : la France ne rimera jamais avec déclin. Car la France, elle rime avec sursaut, elle rime avec audace, elle rime avec grandeur.

Et c'est précisément à cette tâche que je vais m'atteler, sous l'autorité du président de la République. Il a été réélu sur un projet clair, un projet d'action, de transformation, un projet de reprise en main de notre destin et de préparation de celui de la prochaine génération. Avec le président de la République, j'aurai donc un objectif : garder le contrôle de notre destin et libérer notre potentiel français.

Garder le contrôle de notre destin, c'est lutter pour la maîtrise de notre modèle social, c'est agir pour la solidarité entre les Français, c'est assumer de faire de l'autorité et du respect de l'autre une valeur politique de premier ordre et de la sécurité un objectif absolument prioritaire. C'est agir pour le renforcement de nos services publics, au premier rang desquels l'école, j'en parlais il y a un instant, mais aussi la santé et en premier lieu, évidemment, notre hôpital. C'est renforcer notre souveraineté nationale et celle de l'Europe en maîtrisant mieux notre immigration. C'est garantir l'avenir de notre planète qui est le bien commun de notre humanité.

Libérer le potentiel français, cela veut dire continuer à transformer notre économie autour de trois axes majeurs. D'abord, la priorité donnée au travail. Travailler doit toujours être mieux valorisé que ne pas travailler, alors que l'inflation, je le sais, continue de peser sur la vie des Français. Ensuite, c’est l'acte 2 de la libération de notre économie, notamment avec la simplification drastique de la vie de nos entreprises et de nos entrepreneurs. Et c'est enfin l'action résolue que nous devons mener pour notre jeunesse, dont le talent ne demande qu'à s'exprimer.

Dans ce chantier, avec le Président de la République, nous ne partons pas de nulle part. Depuis plus de six ans, tant a été fait, tant a été engagé et déjà des résultats sont perceptibles dans la vie des Français. Nous avons un taux de chômage historiquement bas depuis un certain nombre d'années et tu y as largement contribué en tant que ministre et Première ministre. Mais pour les années à venir, tant reste encore à faire. C'est la tâche à laquelle je consacrerai toute mon énergie, avec la même méthode qui est la mienne, celle que j'ai toujours utilisée dans mes fonctions : poser des diagnostics clairs sans jamais mentir aux Français et mettre en place des actions fortes, concrètes, sans tabou, dire la vérité, agir sans attendre. Voilà ce que sera mon action à la tête du Gouvernement de la France.

Mesdames et Messieurs, avant de conclure, je veux avoir à nouveau une pensée pour le Président de la République, lui redire toute ma gratitude, toute ma fidélité. Je veux avoir un mot pour notre Parlement. À la majorité, je dis ma reconnaissance et ma promesse de toujours rester l'un des leurs. Aux oppositions, je leur dis que nous avons en commun le destin de notre Nation, que nous ne serons évidemment pas d'accord sur tout, que nous nous opposerons, mais aussi, je leur fais la promesse de toujours les écouter, toujours les respecter parce qu’à travers eux, c’est la voix de millions de Français qui s’expriment.

Je veux avoir un mot pour nos élus locaux qui sont eux aussi les garants de notre République. Pour nos partenaires sociaux, oui, ils sont nos partenaires, avec tout ce que cela comporte d'exigence et de franchise. Parce que chaque jour compte, je réunirai toutes ces forces vives du pays dès cette semaine pour enclencher ensemble cette nouvelle étape. Avant de conclure, je veux avoir une pensée pour Édouard PHILIPPE qui fut le premier à me faire confiance en me nommant au Gouvernement il y a plus de cinq ans. Une pensée pour toi Élisabeth, que je remercie à nouveau pour ta confiance et je pense évidemment à Jean CASTEX avec qui j'ai tant appris ici à Matignon en tant que secrétaire d'État auprès de lui, porte-parole du Gouvernement. J'ai appris ici, avec lui, à ses côtés, le fonctionnement de Matignon, l'exigence de la tâche de Premier Ministre et aussi l'importance de l'amitié en politique. Je veux lui dire que je sais ce que je lui dois, ce que notre famille politique lui doit et ce que la France lui doit.

Je veux, pour conclure, m'adresser directement aux Français, à tous les Français, où qu'ils vivent, dans l'Hexagone, dans les outre-mer ou à l'extérieur de nos frontières, quels que soient leur parcours de vie, quelles que soient leurs opinions politiques, peu importe qui ils aiment ou ce en quoi ils croient. Je veux leur dire qu'ils pourront toujours compter sur moi, leur dire qu'avec le Président de la République, chaque jour, chaque minute, chaque seconde leur sera consacrée. Parce qu'il n'y a rien de plus beau, rien de plus fort, rien de plus grand que de servir la France et les Français. Je vous remercie.

Gabriel ATTAL



Source : gouvernement.fr

https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20240109-discours-borne-attal.html


 

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9 janvier 2024 2 09 /01 /janvier /2024 12:26

« Cher Gabriel Attal, je sais pouvoir compter sur votre énergie et votre engagement. » (Emmanuel Macron, le 9 janvier 2024 sur Twitter).




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"L'Enfer de Matignon", c'est un livre de Raphaëlle Bacqué sorti le 12 septembre 2008 (chez Albin Michel) et aussi cinq épisodes d'un documentaire diffusé sur France 5 du 13 octobre 2008 au 3 novembre 2008, qui rappelle que la fonction de Premier Ministre est éprouvante, épuisante et rarement intéressante pour les candidats à l'élection présidentielle. Un nouvel épisode de la vie politique française vient donc de commencer avec la nomination par Emmanuel Macron, ce mardi 9 janvier 2024 peu après midi, du Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse Gabriel Attal au poste de Premier Ministre.

L'événement est même rapporté aux États-Unis par des flashs spéciaux en raison de cette caractéristique historique : Gabriel Attal n'a que 34 ans, il aura 35 ans le 16 mars prochain. Le temps très long entre la démission officielle d'Élisabeth Borne et cette nomination (dix-huit heures) s'expliquerait par le fait qu'il fallait convaincre tous les poids lourds de la Macronie de l'intérêt de l'initiative, sans qu'ils en prennent ombrage : François Bayrou, Édouard Philippe, Richard Ferrand, Bruno Le Maire (qui était le patron de Gabriel Attal à Bercy il y a encore moins d'un an) et Gérald Darmanin devront le soutenir et ne pas en être trop jaloux !

Mais l'opération de communication était encore plus réussie : en confiant que cette nomination était la plus probable depuis hier soir, cela a conduit toutes les chaînes d'information à tourner en boucle sur Gabriel Attal, avantages et inconvénients, atouts et handicaps, etc. et finalement, à rendre cette nomination évidente et naturelle, alors qu'elle n'allait pas de soi.


Revenons sur les mots des journalistes et commentateurs qui, comme toujours, ne se trompent jamais complètement mais ne sont jamais rigoureux. D'une part, entendu depuis quinze jours, il ne s'agit pas d'un remaniement mais d'une changement complet non seulement de gouvernement, mais aussi de Premier Ministre. Or, on lit encore (sur franceinfo par exemple) que c'est un remaniement !

Autre ritournelle en boucle, Gabriel Attal est le plus jeune Premier Ministre de la Cinquième République. Ce n'est pas faux, c'est même très juste, mais c'est plus que cela : c'est le plus jeune chef du gouvernement que la France a eu de toute son histoire, républiques et monarchies confondues ! Là aussi, c'est notable. Le précédent recordman de la jeunesse, c'était Laurent Fabius qui avait 37 ans (il allait avoir 38 ans quelques semaines plus tard) lorsqu'il a été nommé à Matignon le 17 juillet 1984 (il est né le 20 août 1946).

Si on remonte plus loin, deux autres chefs du gouvernement ont été très jeunes, mais pas autant que Gabriel Attal. Sous la Quatrième République, pour l'un des derniers gouvernements, le radical Félix Gaillard a été nommé Président du Conseil le 6 novembre 1957, le lendemain de ses 38 ans (né le 5 novembre 1919) ; il était d'un potentiel politique exceptionnel, mais il est mort en pleine mer à 50 ans, d'un naufrage au large de Jersey. Enfin, si on remonte encore plus loin, sous la Restauration, Louis XVIII a nommé Élie Decazes le 20 novembre 1819 Président du Conseil des ministres ; il avait alors 39 ans (né le 28 septembre 1780), et avait été auparavant préfet de police de Paris à une époque très tumultueuse (fin des Cent Jours), puis Ministre de la Police, puis Ministre de l'Intérieur.

Cela pour la passé, mais prenons l'avenir. Évidemment, cette nomination ne changera pas la situation politique dans laquelle se trouve le Président de la République et sa majorité présidentielle : il n'y aura pas plus de majorité absolue que sous Élisabeth Borne ; le président de LR Éric Ciotti l'a d'ailleurs confirmé dès la nomination du nouveau Premier Ministre, LR restera dans l'opposition, et le contraire aurait été surprenant.

En revanche, ce qui est nouveau, c'est que si Gabriel Attal est un fidèle et loyal d'Emmanuel Macron, il a acquis une existence politique propre (ce qui est très rare en Macronie) et pourrait donc faire de l'ombre, un jour, à Emmanuel Macron (comme la plupart des Premiers Ministres sous la Cinquième République). Tout le monde pense à l'échéance présidentielle de 2027 (Gabriel Attal serait plus jeune qu'Emmanuel Macron en 2017), mais ce serait mettre la charrue avant les bœufs : la vie à Matignon n'est pas un long fleuve tranquille et l'horizon d'un Premier Ministre n'est pas trois ans mais trois mois voire trois semaines.


L'atout est donc la surprise de la jeunesse, et on ne peut pas ne pas penser à François Mitterrand qui, lui aussi, avait donné à la France le plus jeune Premier Ministre puis la première femme Première Ministre. Cette nomination serait-elle excessive ? Certainement pas, car Gabriel Attal est un véritable animal politique et s'il vient de la gauche, il s'est bien gardé de faire des réserves sur la loi Immigration et il est même très apprécié par les tenants les plus droitiers de l'échiquier politique en ce sens qu'il a détonné au Ministère de l'Éducation nationale en faisant du retour à l'autorité sa priorité numéro une. On regrettera sans doute qu'il doive quitter ce ministère alors qu'il a à peine agi en ce sens et son successeur aura la difficile tâche de lui succéder (au même titre que lui-même avait bénéficié du contraste de personnalité avec son prédécesseur Pap Ndiaye).

Malgré sa jeunesse, cela fait une vingtaine d'années qu'il est dans les allées du pouvoir, lorsqu'il a travaillé chez Marisol Touraine au Ministre des Affaires sociales, il était déjà le plus jeune collaborateur de ministre. Partout où il est allé, il a su développer son existence politique propre. Son objectif serait la mairie de Paris en 2026 ; il risque d'avoir beaucoup d'amis à ses côtés pour qu'il se concentre sur Paris en 2026 et qu'il oublie l'Élysée en 2027 !

Au-delà de la jeunesse, l'autre atout, bien sûr, c'est sa popularité. En ce sens, la nomination de Gabriel Attal, qui n'a aucune troupe, aucun courant, ni évidemment aucun parti, est à mettre en parallèle avec la nomination de Manuel Valls à Matignon en 2014 (il y a dix ans !) par François Hollande alors qu'il n'avait représenté que 6% à la primaire du PS de 2011. Son atout était, là aussi, sa grande popularité et le fait qu'il était un véritable animal politique.

L'objectif à court terme de Gabriel Attal, c'est de reprendre du terrain sur le RN dans l'optique des élections européennes, donner un coup de vieux à Marine Le Pen (55 ans) en prenant comme adversaire principal le président du RN et tête de liste RN, Jordan Bardella (28 ans, moitié moins).

Mais il aura bien des embûches en chemin et le premier rendez-vous budgétaire, à la rentrée de 2024, vote de la prochaine loi de finances, sera un test de compétence tant politique que technique, qu'Élisabeth Borne avait brillamment réussi deux fois (en 2022 et 2023).


Penser à 2027 ? Gabriel Attal, le chouchou ? le dauphin ? C'est beaucoup trop loin ! Il faut déjà constituer un gouvernement Macron plus qu'un gouvernement Attal, et ce n'est pas si simple entre les barons incontournables et les petits jeunes à pousser ; il y aura beaucoup de déception et de rancœur dans une majorité parlementaire que Gabriel Attal devra pourtant réunifier pour la mettre en ordre de bataille. En ordre de marche.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (09 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
Élisabeth Borne remerciée !
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240109-gabriel-attal.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/gabriel-attal-plonge-dans-l-enfer-252446

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2024/01/09/40168671.html




 

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8 janvier 2024 1 08 /01 /janvier /2024 18:13

« Votre travail au service de notre Nation a été chaque jour exemplaire. Vous avez mis en œuvre notre projet avec le courage, l'engagement et la détermination des femmes d'État. De tout cœur, merci. » (Emmanuel Macron, le 8 janvier 2024 sur Twitter).




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Ça y est, la première partie est faite, le remerciement. Ou plutôt, le congédiement de la Première Ministre Élisabeth Borne qui aura tenu près de vingt mois à Matignon, sans majorité absolue. C'est clair qu'elle n'a pas démérité, elle a même atteint en 2023 les deux objectifs fixés par Emmanuel Macron : faire adopter la réforme des retraites et faire adopter la loi Immigration (pour cette dernière, le Conseil Constitutionnel exprimera son avis le 25 janvier 2024).

Emmanuel Macron a donc accepté la démission du gouvernement d'Élisabeth Borne ce lundi 8 janvier 2024 vers 18 heures, démission qu'il lui avait lui-même demandée quelques heures auparavant au cours d'un entretien d'une heure qui n'était pas programmé dans l'agenda présidentiel. Elle devait se rendre mardi auprès des victimes des inondations dans le Pas-de-Calais, ils attendront.

Le nouveau Premier Ministre (je ne mets pas au masculin mais au neutre qui veut dire masculin ou féminin) sera en principe nommé mardi 9 janvier 2024 dans la matinée. Ce retard à l'allumage est étonnant dans la mesure où c'est le Président de la République lui-même qui a déclenché la démission d'Élisabeth Borne. Cela signifie qu'il y a des empêchements ou des problèmes de dernière minute.

D'après les bookmakers de la vie politique (on les appelle éditocrates, ceux qui seraient bien informés), Gabriel Attal serait le prochain chef du gouvernement, court-circuitant les hypothèses Sébastien Lecornu (inconnu du grand public), Julien Denormandie (inconnu du grand public), Bruno Le Maire (qui a "décliné" pendant ses vœux du 8 janvier 2024 après avoir activement pressé pour être nommé) et Richard Ferrand (qui se considère comme hors jeu après son échec dans sa circonscription en 2022).

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Un changement de Premier Ministre à froid (c'est le cas de le dire), sans scrutin électoral, sans changement radical de politique, c'est plutôt rare. Élisabeth Borne aurait préféré rester un peu plus longtemps, au moins le temps de la campagne des élections européennes. Mais il y a urgence pour la majorité présidentielle, car il ne faut pas considérer ces élections perdues malgré des sondages désastreux. Mais pour s'attaquer à la fatalité, il fallait changer de Premier Ministre. C'est ce que n'avait pas fait, à tort, Jacques Chirac en 1997, alors que le sien, Alain Juppé, était usé et que Philippe Séguin, qui a plus tard voté oui au référendum du 29 mai 2005 (eh oui !), était tout prêt, tout disponible, tout attendu.

Élisabeth Borne impopulaire ? La belle affaire ! Tous les Premiers Ministres ont été impopulaires à Matignon, tous sauf deux ou trois mais cela ne leur a pas réussi : sauf Michel Rocard, Édouard Balladur et Lionel Jospin. Et l'impopularité en exercice ne présage rien de l'avenir, il suffit de voir la popularité post-Matignon de Raymond Barre, Alain Juppé ou encore Édouard Philippe pour s'en convaincre. De toute façon, de nos jours, avec les réseaux sociaux, les chaînes d'information continue, l'immédiateté des événements et des réactions qui s'enchaînent, avec un peuple plus instruit, mieux informé mais plus dépolitisé, plus indifférent, gouverner ne sera plus jamais populaire, il faut même être un dingue, un masochiste pour vouloir gouverner, d'autant plus un pays comme la France !

Élisabeth Borne a assuré l'hypertechnicité gouvernementale, et avec l'absence de majorité absolue, ce n'était pas superflu. Mais il a toujours manqué ce lien presque charnel entre la personnalité politique et le peuple. Pourquoi n'a-t-elle fait aucun meeting politique pour expliquer sa politique ? Pourquoi a-t-elle refusé de marquer son territoire, quitte à s'éloigner du Président de la République ? Elle n'a jamais fait qu'une loyale mais un peu servile collaboratrice de l'Élysée. Celle qui prend les coups mais sans prendre l'initiative. La torture assurée !


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Comme c'est bizarre qu'on congédie toujours plus facilement une femme qu'un homme. Les statistiques sont dures : seulement deux femmes à Matignon (l'autre est Édith Cresson), sur les vingt-quatre premiers Premiers Ministres de la Cinquième République (8% !), et bizarrement, elles se retrouvent toutes les deux parmi les cinq Premiers Ministres les plus brefs. À quelques mois près (deux ou trois mois près), son mandat à Matignon aura duré aussi longtemps que Laurent Fabius, Jean-Marc Ayrault, Jean Castex, Pierre Messmer et même Dominique de Villepin. Cette durée n'est donc pas exceptionnellement courte, mais elle est "normale-basse". Les conditions de son éviction sont toutefois plutôt humiliantes. Qu'importe, quand on est Premier Ministre, on a du cuir en guise de peau.

Pour Élisabeth Borne, cela va changer son environnement, puisqu'elle était membre du gouvernement depuis le 17 mai 2017 (près de sept ans), ce qui est beaucoup. Quand elle a été nommée pour la première fois ministre, elle était présidente-directrice générale de la RAPT depuis le 21 mai 2015, tandis que son prédécesseur à Matignon Jean Castex fait partie de ses successeurs à la RATP, nommé à sa tête le 23 novembre 2022. Va-t-on bientôt la voir présider la SNCF ou Air France ?


En fait, on s'en moque un peu. Il est peu probable, même si ce n'est pas exclu, qu'Élisabeth Borne puisse jouer un rôle politique important dans un futur proche, comme c'est le cas avec Édouard Philippe ou même François Bayrou. C'est dommage car la classe politique a besoin de femmes d'État, et Élisabeth Borne en est devenue une, s'adaptant très bien à la complexité de notre situation politique. On peut juste espérer qu'elle a ouvert la voie à d'autres femmes pour Matignon, d'une manière moins exceptionnelle et plus ordinaire, c'est-à-dire surtout d'une manière plus régulière, et donc plus fréquente.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (08 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Élisabeth Borne remerciée !
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

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https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/elisabeth-borne-remerciee-252433

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4 janvier 2024 4 04 /01 /janvier /2024 04:43

« Le nom de Sébastien Lecornu revient avec insistance pour succéder à Élisabeth Borne à Matignon. » ("Valeurs actuelles", le 4 janvier 2024).





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La tarte à la crème, l'Arlésienne, le marronnier... on l'appellera comme on voudra, mais depuis la nomination d'Élisabeth Borne, il n'y a quasiment pas un jour où un journaliste n'évoque pas la nomination de son successeur, un prochain remaniement, des spéculations hasardeuses sur le prochain locataire de Matignon. La rumeur a pris de l'ampleur avec le renvoi à la semaine prochaine du conseil des ministres de cette semaine (en raison du voyage de la Première Ministre en Guyane, report du 3 au 10 janvier), mais rappelons que cette première semaine de janvier 2024, aussi étonnante soit-elle, est encore une semaine de vacances scolaires et que reporter un conseil des ministres pendant des vacances scolaires, ce n'est pas vraiment exceptionnel.

Personnellement, n'étant pas dans la confidence des dieux (c'est bien connu que ceux qui en parlent ne savent pas et ceux qui savent n'en parlent pas !), je ne me risquerais donc pas de faire un pronostic qui pourrait être démenti dès les heures qui suivraient, mais il est vrai que le quinquennat franchit une étape avec l'année 2024. Les deux grandes lois très polémiques (retraites et immigration) ont été adoptées en 2023 et ce qui reste de ce second quinquennat devrait être un peu plus consensuel, même si les mécontents seront toujours de plus en plus nombreux, usure du pouvoir oblige.

Cependant, je pense que cette étape serait plutôt au second semestre de 2024 plutôt qu'au début de l'année, après les élections européennes qui pourraient user définitivement l'actuelle Première Ministre et aussi après les Jeux Olympiques et Paralympiques. Si Manuel Valls est resté à Matignon après les élections européennes de juin 2014, malgré la défaite du PS, c'était parce qu'il venait d'entrer à Matignon, après le désastre électoral des municipales de mars 2014. De même, Jacques Chirac a semblé vouloir faire durer Jean-Pierre Raffarin jusqu'à l'épuisement, au-delà des échéances électorales de mars puis juin 2004 (municipales, régionales, européennes) qui n'étaient pas vraiment des succès pour la majorité d'alors, et il a eu bien raison car cela lui a permis de changer de Premier Ministre après l'échec du référendum de mai 2005.

Dans ses vœux adressés aux Français le 31 décembre 2023, Emmanuel Macron a remercié l'équipe gouvernementale, ce qui n'augure généralement pas que du bon : « Tous ces mois passés ont donc été bien loin de l’impuissance qu’on nous prédisait, et c’est heureux. Et je veux ici tout particulièrement en remercier la Première Ministre et son gouvernement. ».

Un conseiller d'un ministère a confié au journal "Le Parisien" : « Élisabeth Borne, c'est terminé. N'oublions pas comment il avait défendu Pap Ndiaye en conseil des ministres avant de le virer. C'est un bon indicateur de la façon dont il fonctionne. ». Un proche de l'Élysée a confirmé le 3 janvier 2024 pour TF1 : « Si c’est l’hypothèse d’un changement de Première Ministre qui est retenue, ça peut aller très vite, avant mercredi prochain voire ce week-end. ». Mais il a aussi envisagé son contraire : « Tout est possible, y compris rien. » ! Et un autre conseiller d'un autre ministère a confié au "Journal du dimanche" le 3 janvier 2024 : « Avant le week-end ? Ça m’étonnerait, vue l’actualité internationale ! ». Un troisième conseiller : « À mon avis, ça peut prendre du temps, Macron n’aime pas aller vite. ».

En tout cas, Élisabeth Borne vient de recevoir en Guyane une médaille qui récompense les soldats capables de survivre dans la jungle ! Pas étonnant car elle a la baraka, elle a déjà résisté à deux périodes de fortes rumeurs, en juillet 2022 et en juillet 2023. Elle a du reste déclaré aux journalistes curieux de France Info : « Je vous remercie de votre question mais je pense qu'on aura l'occasion d'y revenir prochainement. ».


Un changement de Premier Ministre maintenant serait "à froid" et c'est très rare, c'est-à-dire, sans être la conséquence d'un scrutin électoral (élections, référendum etc.). Si on regarde l'histoire de la Cinquième République, il n'y a pas beaucoup de Premiers Ministres qui quittent leurs fonctions à froid : Jacques Chaban-Delmas en 1972 (à cause d'une mésentente politique avec Georges Pompidou), Jacques Chirac en 1976 (la seule véritable démission politique d'un Premier Ministre), Michel Rocard en 1991 (à cause d'une mésentente politique avec François Mitterrand, même topo qu'en 1972), Manuel Valls en 2016 (autre véritable démission d'un Premier Ministre, mais pour raison technique, à cause de sa candidature à la primaire socialiste de janvier 2017), et enfin, j'ajoute aussi Édouard Philippe en 2020 (mais cette sortie de Matignon faisait suite à des élections).

Ce dernier cas m'intéresse quand même beaucoup, d'où le fait de le citer, pour plusieurs raisons et la première, c'est que le changement de Premier Ministre a été décidé par Emmanuel Macron, et donc, ce changement pourrait se faire encore aujourd'hui pour la même raison. On ne peut pas parler de mésentente politique avec le Président de la République, on ne peut même pas parler d'épuisement tant physique que politique, malgré le début de la crise du covid-19, mais d'un nouveau départ voulu par le Président de la République. Certes, je sais que je me trompe complètement en parlant d'éviction à froid pour 2020 car Édouard Philippe a quitté Matignon à la suite des élections municipales dont le second tour s'est tenu en juin 2020. Mais c'était l'impression politique que cela donnait : un Premier Ministre qui n'a pas démérité (loyauté absolue, crise des gilets jaunes en 2018, première réforme des retraites en 2019, covid-19 en 2020) et qui a été remercié un peu brutalement. Réélu maire du Havre, Édouard Philippe s'est replié en Normandie en attendant son destin national, couvert de sondages pour l'instant flatteurs, trompeusement flatteurs.

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Tout reste possible car le Président de la République a pour habitude de ne pas respecter forcément des codes politiques, de ne pas s'enfermer dans les habitudes. De plus, un nouveau Premier Ministre pourrait s'envisager pour tenter de redresser les sondages dans l'optique des élections européennes. Il faudrait alors un poids lourds politique, expérimenté par des campagnes électorales nationales, dont l'adhésion à la construction européenne a toujours été connue, et à part François Bayrou, englué par une sombre affaire de collaborateurs parlementaires, je ne vois personne d'autre. François Bayrou est d'ailleurs un chaud partisan du remplacement d'Élisabeth Borne ; il l'a répété il y a quelques jours sur Sud Radio : « Je pense qu'il va falloir un nouveau départ et je pense que tout ça a été éclairé par ce que nous avons vécu ces dernières semaines et depuis un an et demi. ».

L'absence de poids lourds politiques dans la Macronie, surtout du côté de l'aile gauche, est un vrai problème pour Emmanuel Macron. Ancienne conseillère à Matignon de Jean-Marc Ayrault puis Manuel Valls et experte à la Fondation Jean-Jaurès (think tank du PS), la politologue Chloé Morin a expliqué à "Ouest France" le 3 janvier 2024 : « Cela révèle (…) que le fonctionnement d’Emmanuel Macron affaiblit le gouvernement. Le Président laisse peu de latitude à la Première Ministre et aux ministres. Faute d’espace, il leur est difficile d’exister. Ce qui me chiffonne le plus, dans cette instabilité gouvernementale, c’est que des ministres qui ne restent en place que six mois ne peuvent pas avoir du poids face à leur administration. C’est un problème sur le plan démocratique. ».

Une autre raison est plus impérieuse, et là, le Président n'en est pas le maître des horloges, c'est le verdict du procès du ministre Olivier Dussopt (attendu le 17 janvier 2024). En cas de condamnation, même symbolique, même si c'est en première instance (et en cas d'appel, il reste toujours la présomption d'innocence tant que le prévenu n'est pas condamné définitivement), un remaniement, même minime, serait une obligation politique.

La problématique d'Emmanuel Macron est la suivante : s'il doit changer de Premier Ministre, il faut une personnalité qui ne lui fasse pas d'ombre jusqu'en 2027, qui n'ait pas d'ambitions présidentielles (c'est pour cette raison que Nicolas Sarkozy n'a pas été nommé à Matignon ni en 2002, ni en 2005), et qui lui soit d'une loyauté absolue. Pour Chloé Morin, il n'est pas ici du tout question de désigner un dauphin : « Je ne pense pas du tout qu’Emmanuel Macron soit dans cette perspective. On aurait pu imaginer qu’il propulse Gabriel Attal. Mais le Président ne raisonne pas ainsi. Jusqu’à présent, il a encouragé les ambitions concurrentes, sans en choisir une. Même si, à l’approche de la présidentielle de 2027, il lui deviendra impossible de ne pas choisir. ».

Ainsi, le journal "Valeurs actuelles" a évoqué le matin du 4 janvier 2024 l'hypothèse Sébastien Lecornu (38 ans). Issu de LR, le Ministre des Armées a une loyauté assurée, et surtout, n'a pas pour objectif l'Élysée, éventuellement le Petit-Luxembourg (Présidence du Sénat), comme Jean-Pierre Raffarin. Lui-même n'est pas demandeur (il se plaît bien aux Armées) mais ne pourrait pas refuser une telle proposition présidentielle.


Ce n'est pas le seul journal qui évoque Sébastien Lecornu, il y a aussi l'hypothèse Christophe Béchu (grand ponte de Horizons) et même le retour (improbable à mon sens) d'Édouard Philippe. On cite aussi Richard Ferrand (malgré sa non-réélection parlementaire en 2022), et Julien Denormandie, qui avait voulu prendre du champ en 2022.

Ce qui semblerait acquis, c'est que ce ne serait ni Gérald Darmanin ni Bruno Le Maire, déjà parce qu'ils sont indispensables dans le dispositif gouvernemental tant à l'Intérieur qu'à l'Économie et aux Finances, et aussi parce qu'ils ont des ambitions bien trop fortes pour s'installer à Matignon et maintenir paisible la seconde moitié du quinquennat.

Ce qui est aussi à peu près sûr, c'est qu'un nouveau Premier Ministre, quel qu'il soit, aurait peu de chance d'élargir la majorité à l'Assemblée Nationale. On a vu en 2023 que le groupe Les Républicains ne prendrait jamais la responsabilité d'un accord de gouvernement en bonne et due forme avec la Macronie, car ce parti signerait dans ce cas son suicide électoral. Pour exister politiquement, LR a besoin, au contraire, de se différencier du pouvoir en place. Ainsi, la nomination d'une personnalité issue de LR à Matignon serait certainement une erreur de discernement pour Emmanuel Macron : loin d'élargir la majorité présidentielle, elle pourrait, au contraire, la réduire avec le départ des députés les plus à gauche de l'aile progressiste de Renaissance, déjà dégoûtés par la loi Immigration. Et finalement, la présence d'Élisabeth Borne à la tête du gouvernement constitue un bon équilibre entre toutes les composantes de la majorité...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (04 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Cohabitation en 2022 ?
Cohabitation en 1986.
Un remaniement en juillet 2023 ?
Un remaniement en juin 2020 ?
Qui à Matignon en 2022 ?
Qui à Matignon en 2019 ?
Qui à Matignon en 2017 ?
Qui à Matignon en 2014 ?
Qui à Matignon en 2012 ?
Qui à Matignon en 2010 ?
Qui à Matignon en 2007 ?
Un ex-futur Premier Ministre.


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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240103-matignon.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/macron-2024-bientot-le-grand-252347

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