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28 novembre 2023 2 28 /11 /novembre /2023 04:51

« Je dévisageais ce curieux petit bonhomme magnétique, puissamment charpenté, tenant à la fois du patriarche montagnard coriace et du vieux nain énergique, faisant nerveusement les cent pas, les mains croisées dans le dos, sa grosse tête en avant comme s’il se préparait à enfoncer une muraille d’un coup de bélier, perdu dans ses pensées, très loin, ne prenant même pas la peine de signaler qu’il savait que quelqu’un, quelque chose, un infime grain de poussière, avait atterri dans son bureau. David Ben Gourion avait soixante-quinze ans à cette époque, et moi, une vingtaine d’années. » (Amos Oz, 2002).




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Et le poète israélien Amos Oz (1939-2018) de poursuivre la narration de sa première rencontre, dans son roman autobiographique "Une Histoire d'amour et de ténèbres" publié en 2002 : « Ben Gourion, malgré Platon et Spinoza, n’était pas un intellectuel. Loin de là. À mon sens, c’était un paysan visionnaire. Il y avait chez lui quelque chose de primitif, d’un autre âge. Une spontanéité biblique, une volonté pareille à un rayon laser. Dans sa jeunesse, à Plonsk, en Pologne orientale, il était mû par deux idées fixes : les Juifs devaient rétablir leur patrie sur la Terre d’Israël, et il était celui qui devait les guider. Il n’en a jamais dévié. Il y a subordonné toute chose. C’était un homme honnête et féroce, et comme la plupart des idéalistes, le prix à payer lui importait peu. Ou peut-être avait-il à cette question une réponse toute prête : ça coûtera ce que ça coûtera. ».

L'homme d'État israélien David Ben Gourion est mort il y a cinquante ans, le 1er décembre 1973, quelques semaines après la Guerre du Kippour, à l'âge de 87 ans, dans le désert du Néguev (il résidait modestement dans un kibboutz). Il est mort isolé, profondément affecté par la mort de son épouse Paula cinq ans auparavant. Né le 16 octobre 1886 à Plonsk, il a été le premier Premier Ministre de l'État d'Israël du 17 mai 1948 (officiellement du 25 février 1949) au 26 janvier 1954 et du 3 novembre 1955 au 26 juin 1963 (à la tête de huit gouvernements) et a fondé l'État d'Israël, a fondé Tsahal le 26 mai 1948 (parce qu'aucun pays arabe n'avait accepté l'existence d'Israël) et, auparavant, en 1930, avait fondé ce qui allait devenir le parti travailliste. Il est considéré par les Israéliens comme le Père de la Nation. L'un des surnoms de Ben Gourion était le Lion, et il se plaisait à répéter : « Il vaut mieux vivre un jour comme un lion que cent jours comme un mouton. ».

Dirigeant la communauté juive en Palestine sous la mandat britannique après la Première Guerre mondiale, Ben Gourion a proclamé l'indépendance de l'État d'Israël à la fin du mandat britannique, le 14 mai 1948 à 16 heures dans le hall du Musée des Beaux-Arts de Tel Aviv, conformément au vote de l'ONU du 29 novembre 1947. Il a ensuite dominé la vie politique des quinze premières années d'Israël, et seul Benyamin Netanyahou a battu son record de longévité au pouvoir.


À l'âge de 23 ans, Ben Gourion, agressé dans un attentat meurtrier contre des Juifs, était fier d'avoir laissé fuir son assaillant arabe sans le tuer, afin de rompre le cercle vicieux de la violence. À partir de 1948, il a toujours refusé de donner des consignes claires d'expulsion des Palestiniens sur territoire israélien, mais selon certains, il était partisan de ces expulsions mais ne voulait pas qu'elles fussent son passif pour sa postérité. Lorsque Shimon Peres (alors Président de l'État d'Israël), Bertrand Delanoë (maire de Paris) et Rachida Dati (maire du septième arrondissement) ont inauguré l'Esplanade David Ben Gourion, en face du Musée Branly, à Paris, le 15 avril 2010, des contestations se sont toutefois fait entendre contre une telle initiative (par des manifestations propalestiniennes et aussi du vandalisme), pour rappeler les conditions de la naissance de l'État d'Israël.

Très rapidement, Ben Gourion a été convaincu par l'idée du sionisme développée par Theodor Herzl. Au départ, il a voulu la faire vivre au sein de l'empire ottoman et a fait des études à Istanbul en 1912 (après des études à Varsovie). La déclaration Balfour du 2 novembre 1917 a modifié son point de vue sur l'empire ottoman, État en sursis : c'est à partir de là qu'il prônait l'existence d'un véritable État hébreu en Palestine. En 1952, Ben Gourion a proposé au célèbre physicien Albert Einstein d'occuper les fonctions de Président de l'État d'Israël, et le sage Prix Nobel a refusé, expliquant par la suite : « Les équations sont plus importantes pour moi que la politique, parce que la politique est lié au présent, mais une équation est quelque chose pour l'éternité. ».

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Sous ses responsabilités, David Ben Gourion a dû faire admettre Israël aux pays arabes (en particulier à l'Égypte) par la force armée. Désavoué par son propre parti en 1963, il a quitté le pouvoir et n'a pris sa retraite de député qu'en 1970 après avoir tenté de créer un nouveau parti. Ben Gourion a rencontré les grands de ce monde quand il était aux responsabilités, en particulier De Gaulle, Churchill, Harry Truman, Konrad Adenauer, etc. Parmi ses proches, il y avait notamment des militaires comme Yitzhak Rabin et Ariel Sharon.

Le politologue israélien Freddy Eyant, ancien ambassadeur et auteur de nombreux essais sur la vie politique israélienne, a évoqué la vie de Ben Gourion le 11 novembre 2021, ainsi que son héritage : « Cet infatigable lutteur n’a jamais connu un seul moment de satisfaction ni de repos. Pour lui, un homme satisfait n’aspire à rien, ne rêve plus et n’a plus d’ambition. L’Israélien devrait être toujours en action, à la recherche d’une solution, dans la réalisation d’un projet. Toujours réfléchir et méditer pour un avenir meilleur. Être modeste et se contenter de peu pour lui-même, mais demeurer toujours curieux et exigeant, et servir d’exemple à son peuple. Ben Gourion pensait qu’une patrie n’est ni donnée ni achetée par des droits ou des accords politiques. Elle ne s’acquiert ni par l’or ni par la force du poing, elle se construit avec le labeur et à la sueur des fronts. ».


Il rappelait notamment cette période fondatrice, pleine de trouble, entre 1917 et 1948 : « En 1929, les Arabes se révoltent et des incidents sanglants éclatent. Les événements se précipitent. La situation des Juifs d’Europe se dégrade de jour en jour. Des millions de Juifs sont condamnés à l’extermination systématique. Lorsque Théodore Herzl avait songé à l’État juif, il avait envisagé une immigration progressive, jamais en catastrophe. La puissance mandataire britannique fermera aux Juifs les portes de la Palestine, en bafouant l’esprit même de la déclaration Balfour pour un Foyer National. La rage au cœur, les Juifs, convaincus de leur bon droit, réussissent quand même à forcer le blocus et à pénétrer clandestinement dans leur pays. Des milliers d’entre eux sont arrêtés par les autorités britanniques et sont refoulés vers de nouveaux camps, à Chypre. L’épopée de l’immigration clandestine atteint son apogée avec la célèbre affaire du bateau Exodus. ».

L'écrivain israélien Clinton Bailey, qui avait interviewé Ben Gourion en avril 1968 (l'interview a été diffusée le mardi 23 mai 2017 sur Arte), le décrivait comme ceci le 17 mai 2017 : « Il n’était pas seulement un intellectuel. Il était un homme d’État, un homme politique et un intellectuel. Il était un expert pour manœuvrer et naviguer entre les Britanniques et les Arabes pour que nous continuions à devenir un État. (…) Ben Gourion a en quelque sorte permis aux Allemands de prendre collectivement un nouveau départ qui serait cette fois du bon côté de l’Histoire. En acceptant les réparations, Ben Gourion a offert aux Allemands un second commencement après la guerre. Ben Gourion était un esprit libre. Il avait confiance en lui et dans son jugement. Et en même temps, il croyait à l’esprit collectif et à la volonté nécessaire pour réaliser un rêve commun. Et les Israéliens ont l’esprit et la volonté. Ben Gourion les a captés et embrassés pour donner une réalité, avec ses pairs, au rêve partagé. » (propos recueillis par Yvette Nahmia-Messinas sur son blog du "Jerusalem Post").

Quant à Alain Poher, qui fut Président du Sénat en France (entre 1968 et 1992), il exprimait sa fascination pour l'homme d'État : « Ben Gourion était de la trempe de ces hommes qui tiennent dans l'histoire d'un pays une place que, légende vivante, ses contemporains lui ont reconnue et que les génération montantes ne pourront jamais méconnaître. ».

En 1951, Ben Gourion voyait l'avenir d'Israël ainsi : « Plus que tout, l'humanité a besoin en ce moment de paix, de coopération et d'amitié entre les peuples. La véritable amitié prospérera uniquement sur la base de la reconnaissance mutuelle. ». Avec les événements récents et la guerre entre Israël et le Hamas, cette reconnaissance mutuelle, qui signifie au fond la coexistence pacifique de deux États, est encore très loin de mûrir.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (25 novembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La naissance de l’État d’Israël.
David Ben Gourion.
Gaza : quel est l'accord entre Israël et le Hamas ?
Le rappel très ferme d'Emmanuel Macron contre l'antisémitisme.
Conflit israélo-palestinien : la France est-elle concernée ?
Dominique de Villepin toujours pro-palestinien ?
Emmanuel Macron participera-t-il à la grande marche contre l'antisémitisme du 12 novembre 2023 ?
Gaza, victime avant tout du Hamas ?
Quel est le bilan de la visite d'Emmanuel Macron au Proche-Orient ?
Proche-Orient : l'analyse crue de Jean-Louis Bourlanges.
Pourquoi Emmanuel Macron se rend-il en Israël ce mardi 24 octobre 2023 ?
Hôpital à Gaza : la vérité aveuglée par la colère ?
Hamas : tirs groupés contre les insoumis.
Horreur en Israël : les points sur les i de Gérard Larcher et Emmanuel Macron.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 12 octobre 2023 (vidéo et texte intégral).
Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Israël en guerre contre son agresseur terroriste, le Hamas.
Les Accords d'Oslo.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231201-ben-gourion.html

https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/david-ben-gourion-la-legende-251586

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/11/27/40123196.html




 

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23 novembre 2023 4 23 /11 /novembre /2023 04:37

« Le gouvernement approuve les grandes lignes de la première étape d'un accord selon lequel au moins 50 personnes enlevées, des femmes et des enfants, seront libérées pendant quatre jours au cours desquels il y aura une accalmie dans les combats. » (Gouvernement israélien, communiqué du 22 novembre 2023).




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Après de longues semaines de négociations, un accord entre Israël et le Hamas a été conclu dans la soirée du 21 novembre 2023. Le gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou a approuvé les bases de cet accord qui ne devrait pas être mis en vigueur avant vendredi 24 novembre 2023. Selon le Qatar, le début de la trêve aurait lieu ce même vendredi le matin et une première libération d'otages le vendredi après-midi : 13 otages du Hamas en échange de 39 prisonniers palestiniens.

De quoi s'agit-il et avant, comment a-t-il été négocié ? Il est toujours surprenant qu'un protagoniste qu'on veut anéantir, éradiquer, devienne du jour au lendemain un interlocuteur pour un accord. En fait, c'est le cas pour toutes les guerres. Les deux parties sont foncièrement focalisées par l'élimination de l'autre, sinon, il n'y aurait pas de guerres mais simplement des discussions. Et pourtant, il faut bien aboutir à la paix et, auparavant, à la trêve ou au cessez-le-feu. On ne conclut la paix, même provisoire, qu'entre deux belligérants.

Comme dit depuis longtemps, c'est le Qatar qui a servi d'intermédiaire. Le rôle du Qatar est ambivalent puisqu'il est économiquement très implanté en Europe, par exemple, mais il est aussi la base principale du Hamas. Pour la situation actuelle, c'était donc l'intermédiaire idéal : Israël pouvait discutait avec le Qatar (avec les États-Unis) et le Hamas également.

La nature de l'accord, c'est l'échange de prisonniers : libération de 50 otages du Hamas contre la libération de 150 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes. Le rapport 1 pour 3 est différent du rapport relevé auparavant (1 pour 10). /ors de ces libérations et échanges, pendant quatre jours, un cessez-le-feu est prévu.

Les 50 otages du Hamas libérés (sur 236 otages en tout, dont certains sont certainement déjà morts car placés en boucliers humains) sont uniquement des femmes et des enfants (de moins de 19 ans). À leur libération du Hamas, ils seront examinés médicalement par la Croix rouge puis seront interrogés comme témoins par l'armée israélienne, enfin seront ensuite libres de retrouver leurs familles et proches. Parmi ces 50 otages, la France espère qu'il y en aura 4 de nationalité française.

Du côté israélien, 150 prisonniers palestiniens seront donc également libérés, aussi uniquement des femmes et des enfants. Quand on entend cette information, il y a évidemment tout de suite un élément qui choque : il y a des enfants palestiniens dans les prisons israéliennes. À la différence des otages du Hamas, innocents et enlevés de manière arbitraire, les personnes retenues dans les prisons israéliennes le sont selon une procédure judiciaire et pour des raisons pénales, car Israël est un État de droit.

Le gouvernement israélien a publié à l'attention des médias une liste de 300 noms dont les 150 émaneraient. Elle a été émise par le Département de la Justice sous le titre : "Publication au public de la décision gouvernementale 1077 – Libération de prisonniers pour des raisons de gestion des relations extérieures et de la sécurité du pays".

Elle contient ainsi 300 fiches nominatives contenant des informations précises sur les prisonniers. Par exemple, ce jeune homme de 18 ans (né le 30 janvier 2005) qui a été arrêté le 14 novembre 2022, pas encore jugé ("en état d'arrestation") donc sans durée de détention, avec l'indication de la cour de justice dont il dépend (ici la cour martiale) et les infractions que la justice israélienne lui reproche, ici "lancer une bombe ou un incendiaire ; lancer des pierres ; créer un objet explosif ou incendiaire".

On peut comprendre que des adolescents qui ont le même motif d'arrestation puissent être en prison. La justice de adolescents de 13 à 18 ans pose aussi un problème en France où les auteurs d'infractions parfois très graves sont de plus ne plus jeunes (c'est un sujet qui revient régulièrement dans le débat public en France et le terrible assassinat de Thomas 16 ans le 18 novembre 2023 à Crépol sera certainement l'occasion de l'alimenter).

Dans cette liste publiée, il y a une trentaine de femmes, pour la plupart majeures, âgées de 15 à 59 ans. Parmi les mineurs, cela va de 14 à 18 ans. Les prisonniers libérés n'ont pas été arrêtés pour des affaires de meurtres voire d'assassinats, mais des tentatives de meurtres, un soutien au terrorisme, des tirs sur des personnes, des lancements de bombes, des incendies criminels.

50 prisonniers seraient affiliés au Hamas, dont quelques mineurs de 17 et 18 ans et deux femmes. Ces deux femmes affiliées au Hamas sont les suivantes : une jeune femme de 24 ans arrêtée pour blessures corporelles graves, port de couteaux et poignards ; une femme de 41 ans arrêtée pour atteinte à la sûreté de la l'État. La grande crainte du gouvernement israélien est de libérer un dirigeant du Hamas.

L'arrestation du directeur de l'hôpital Shifa à Gaza, le plus grand hôpital de Gaza, parce que son hôpital servait de base de commandement du Hamas et de repli des terroristes auteurs des massacres du 7 octobre 2023, a permis à l'armée israélienne d'atteindre une de ses objectifs.

La manière dont se dérouleront les quatre jours de trêve donnera une idée de négociations ultérieures pour la fin des combats à Gaza, d'une part, et pour la construction d'une paix durable entre Israéliens et Palestiniens, d'autre part. On est loin d'y être encore, mais la libération d'otages par le Hamas aura quand même de quoi rendre la situation un peu moins tendue.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (23 novembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Gaza : quel est l'accord entre Israël et le Hamas ?
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Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Israël en guerre contre son agresseur terroriste, le Hamas.
Les Accords d'Oslo.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231122-israel-hamas.html

https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/gaza-quel-est-l-accord-entre-251657

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/11/23/40117457.html







 

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13 novembre 2023 1 13 /11 /novembre /2023 04:33

« Par soumission à la voix du plus fort, la voix de la France s'est tue, celle qui faisait parler le Général De Gaulle au lendemain de la guerre des Six-Jours, celle qui faisait parler Jacques Chirac après la deuxième Intifada. »




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Et de poursuivre : « Comment comprendre aujourd'hui que la France appelle à la “retenue” quand on tue des enfants en connaissance de cause ? Comment comprendre (...) que la première réaction de la France, par la voix de son Président, soit celle du soutien sans réserve à la politique de sécurité d'Israël ? (…) Il n'y a pas en droit international de droit à la sécurité qui implique en retour un droit à l'occupation et encore moins un droit au massacre (…). [Israël] ne peut se prévaloir du fait que le Hamas instrumentalise les civils pour faire oublier [qu'il] assassine ces derniers (…). Oui, il y a une terreur en Palestine et en Cisjordanie, une terreur organisée et méthodique appliquée par les forces armées israéliennes, comme en ont témoigné de nombreux officiers et soldats israéliens écœurés par le rôle qu'on leur a fait jouer. ».

Un coup de gueule très fort du l'ancien Ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin qui paraît être actuel mais qui date en fait d'une interview au journal "Le Figaro" du... 1er août 2014, il y a plus de neuf ans ! Le 17 juillet 2014, l'armée israélienne était entrée dans la Bande de Gaza et un nouveau cessez-le-feu de soixante-douze heures avait débuté le 31 juillet 2014. Comme on le voit, il n'y a pas grand-chose qui a changé en neuf ans... du moins, dans la réaction de l'ancien ministre, car en 2023, la grande différence, c'est qu'il y a eu les massacres du 7 octobre.

L'ancien Premier Ministre Dominique de Villepin fête ses 70 ans ce mardi 14 novembre 2023. Toujours plus ou moins présent dans la classe politique, il est surtout marqué par son discours du 14 février 2003 au Conseil de Sécurité de l'ONU contre la guerre en Irak, alors qu'il était encore Ministre des Affaires étrangères.

Il partage avec Georges Pompidou, Raymond Barre et Élisabeth Borne le fait de ne jamais avoir reçu de mandat électif à sa nomination à Matignon (comme Emmanuel Macron lorsqu'il a été élu Président de la République). Mais à la différence des trois autres qui ont été élus députés après leur nomination, Dominique de Villepin n'a toujours pas été élu, même pour un mandat local.

Après ses velléités de se présenter à l'élection présidentielle de 2012 (il n'a pas obtenu tous les parrainages nécessaires), Dominique de Villepin a renoncé à toute ambition politique au profit de son cabinet d'avocat conseil international très lucratif.

Depuis un mois, Dominique de Villepin est de nouveau présent dans les médias pour donner ses réflexions sur la guerre que mène Israël contre le Hamas après le 7 octobre 2023. Les propos n'ont pas varié et semblent toujours aussi anti-israéliens même s'il a mesuré l'horreur des massacres du 7 octobre 2023 : « L'ampleur, l'horreur et la barbarie qui se sont exprimés nous appellent tous à un devoir d'humanité et de solidarité vis à vis d'Israël et du peuple israélien. ». Plusieurs semaines plus tard, il a aussi déclaré : « Ce qui m’inquiète aussi c’est la montée de l’antisémitisme en France (…). Il faut que nous mesurions la mémoire douloureuse que nous avons pour les communautés juives, arabes et musulmanes. Il faut se rassembler et donner l’exemple sur notre propre territoire que nous pouvons vivre ensemble. ».

Ainsi, l'ancien Premier Ministre a déclaré sur France Inter le 12 octobre 2023 : « Je le dis avec une peine infinie : je ne suis pas surpris par cette haine qui s'est exprimée, quand on se souvient de ce que nous avons tous dit de cette prison à ciel ouvert [qu'est la bande de Gaza]. (…) On se dit que quelque chose a été raté, par nous tous, par l'ensemble de la "communauté internationale", avec l'amnésie qui a été la notre, l'oubli qui a considéré à imaginer que cette question palestinienne allait pouvoir s'effacer devant un accord économique, stratégique et diplomatique, comme substitut à cette tragédie. (…) La ligne de fracture du monde, aujourd'hui, recoupe celle de l'Ukraine. La voix de l'Europe, la voix de "l'Occident" n'est pas majoritaire. Tout ce qui va se passer, va l'être sous l'œil et le regard du monde qui ne voit pas les choses comme nous. ».

Et de marteler : « Le devoir de responsabilité que nous avons vis à vis de cette horreur, c'est de bien prendre en compte l'importance de la réaction, de se souvenir que le droit à la légitime défense n'est pas un droit à une vengeance indiscriminée, qu'il n'y a pas de responsabilité collective pour un peuple pour les crimes commis par quelques-uns (…). Il y a manifestement des crimes contre l'humanité dès lors qu'a été ciblée de façon systématique et générale une catégorie de population, mais il faut éviter que la riposte indiscriminée ne conduise à enflammer un peu plus la région, mais aussi le monde. [Le Hamas] n'est pas le peuple palestinien (…). Combattre le Hamas n'est pas enfermer deux millions de Palestiniens dans la Bande de Gaza sans pouvoir sortir. (…) Il y a une exigence d'humanité et de solidarité vis-à-vis d'Israël, une exigence de responsabilité que nous devons porter à la tête de la communauté internationale et une expérience à partager, nous devons penser que la solution à deux États, plus que jamais est aujourd'hui la seule (…). Israël ne peut pas être en sécurité tant qu'il n'y a pas la reconnaissance d'un État palestinien à ses côtés qui partage la responsabilité de la sécurité dans cette région. ».

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L'expression utilisée par Dominique de Villepin « prison à ciel ouvert » est une expression qui a fait bondir plusieurs responsables de la majorité et surtout fait applaudir les responsables de France insoumise dans une sorte de drôle d'alliance.

Invité de la matinale de France Info le 7 novembre 2023, Dominique de Villepin a soutenu l'idée (commune depuis longtemps) de deux États : « Tous les Israéliens l’ont compris : ils ne peuvent plus vivre avec les Palestiniens. Il faut donc une politique de séparation qui doit être digne : c’est-à-dire conférer aux Palestiniens un État viable et véritable, qui pourra se construire et être d’autant plus en paix. ». Selon l'ancien ministre de Jacques Chirac, le départ des colons de Cisjordanie, « c'est l’histoire, le prix de la sécurité pour Israël ».

Comme solution transitoire, Dominique de Villepin a préconisé un mandat international pour Gaza : « On va se retrouver avec un territoire de Gaza détruit, sans aucune forme d’administration civile. Je pense que la meilleure stratégie, c’est d’avoir une administration internationale, qui peut-être en partie arabe, sous l’égide de l’ONU. ». L'idée serait surtout de démilitariser la zone et d'exfiltrer les terroristes du Hamas et leurs soutiens. Et il a ajouté : « La paix est toujours utopique, mais il y a une raison d’y croire : c’est que tant que nous n’aurons pas fait cela, Israël ne vivra pas en sécurité, et nous non plus. ».

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Dans un entretien le 7 novembre 2023 pour "La Tribune de Genève", l'ancien président de République solidaire (un parti créé le 19 juin 2010) a voulu alerter : « L’éradication du Hamas est illusoire, Israël doit adapter ses buts. (…) Quand nous voyons Netanyahou s’engager dans une impasse, nous devons être capables le dire. ».

Invité quelques jours plus tôt sur BFMTV, le 27 octobre 2023, Dominique de Villepin a mis en garde sur le réveil des États arabes : « On a été trompés par le silence des États arabes et musulmans des dernières années. Les peuples n'ont jamais oublié que la cause palestinienne et l'injustice faite aux Palestiniens étaient une source de mobilisation considérable. La question palestinienne reste pour les peuples arabes la mère des batailles. ».

En évoquant « un gouffre géopolitique qui est l'absence de perspective face à une offensive terrestre massive », il a insisté sur la vision du monde entier : « Regardez les réactions en Indonésie, en Afrique, au Nigeria. Tout ça forme un tout. C'est le nouveau monde dans lequel nous sommes, nous ne sommes pas capables de gérer seuls en gendarme du monde (…). La guerre contre le terrorisme (…) n'a jamais été gagnée nulle part et enclenche au contraire des engrenages extrêmement dramatiques (…). Le plus gros travail aujourd'hui, c'est celui qui consiste pour les pays européens, les États-Unis à aider Israël à avancer au-delà de cette réponse militaire (...) qui est une impasse (…). C'est difficile parce que la solution à deux États est sortie du logiciel israélien. C'est difficile car il faut faire émerger des interlocuteurs palestiniens. (…) Mais la diplomatie, c'est d'être capable au fond du tunnel d'imaginer qu'une lumière est possible. ».

Cette condamnation de la réaction israélienne massive qui touche principalement la population civile de Gaza rend de plus en plus difficile le soutien inconditionnel de l'État d'Israël à la suite du 7 octobre 2023. Dans ses différentes interventions, Dominique de Villepin a donc abordé ces deux faces du problème : la sécurité d'Israël et la protection des civils de Gaza. Il a eu cette formule très forte, le 7 novembre 2023 : « Dans ce contexte, chaque enfant tué, chaque femme tuée, ce sont plus de terroristes. Donc l'objectif d'Israël, ce qu'il atteint, c'est exactement l'inverse de ce qu'il souhaite. ».

Du reste, le Président de la République Emmanuel Macron n'est pas loin d'avoir la même opinion quand on l'écoute sur la BBC : « Aujourd'hui, les civils sont bombardés de facto. Ces bébés, ces dames, ces personnes âgées sont bombardés et tués. Il n'y a donc aucune raison et aucune légitimité à cela. Nous exhortons donc Israël à arrêter. » le jour de la grande marche contre l'antisémitisme à laquelle il n'a pas participé et qui a rassemblé un peu moins de 200 000 personnes partout en France, dans des manifestations pacifiques sans heurt ni violence (exactement 182 000 dont 105 000 à Paris).

Depuis longtemps, Dominique de Villepin n'a cessé d'émettre des opinions principalement pro-arabes sans jamais oublier de rappeler, histoire oblige, son fameux discours du 14 février 2003, qui, pour certains, passe comme le dernier acte d'une France indépendante idéalisée (il suffit d'écouter Jean-Marie Le Pen vingt ans auparavant pour savoir à quel point cette indépendance-là était déjà fustigée). On veut rendre nostalgiques les Français sur Chirac comme sur De Gaulle (au fond, je m'en réjouis), mais ils étaient aussi des hommes politiques avec des combats et des opposants et ceux qui, aujourd'hui, par nostalgie démagogique, voudraient s'identifier ou se reconnaître dans ce passé français supposé glorieux sont pourtant, généralement, les héritiers de leurs plus féroces opposants (ceux de De Gaulle et Chirac).

En passant, on se posera quand même la question de savoir s'il est vraiment impartial dans ce conflit ou s'il a des donneurs d'ordre du côté arabe. En effet, depuis le 1er juillet 2015, il n'est plus inscrit au barreau de Paris et dirige une entreprise commerciale (Villepin International) qui fait notamment du lobbying international : « conseil en management et en stratégie, analyse des risques politiques et des enjeux économiques, réalisation d’études, d’audits et de préconisations, tenue de conférences et de forums, intermédiation en vue de rapprochements, présentation et publication d’exposés ou d’analyses ».

Wikipédia annonce ainsi : « Son réseau en Chine, en Iran, au Venezuela ou encore au Qatar, lui permet d’intervenir dans le flux d’affaires entre pays émergents. (…) Considéré comme "très proche du Président chinois Xi Jinping", il siège également au conseil du fonds d’investissement d’État China Minsheng et à l'agence de notation chinoise Dagong. Selon le journaliste [Clément Fayol], il y "aiderait des entreprises chinoises à se développer en Afrique et en Europe dans l’aéronautique, les infrastructures, les assurances, parfois en concurrence avec des entreprises françaises". Il a aussi créé une galerie d'art à Hong-Kong, où il vend principalement des œuvres de l'artiste sino-français Zao Wou-Ki, dont il est un intime de la veuve Françoise Marquet. ».

Selon le Hamas, au 12 novembre 2023, les bombardements de l'armée israélienne aurait fait 11 180 victimes majoritairement civiles dont 4 609 enfants [Un nouveau bilan du Hamas le 13 novembre 2023 fait état de 11 240 morts dont 4 630 enfants et 3 130 femmes, et de 29 000 blessés].

Dans un entretien diffusé le 12 novembre 2023, le Premier Ministre israélien Benyamin Netanyahou s'est justifié ainsi : « Ce n’est pas seulement notre guerre, c’est votre guerre aussi (…). C’est le combat de la civilisation contre la barbarie. (…) Israël se bat dans le respect des lois internationales. L’armée israélienne réalise un travail exemplaire en tentant de minimiser les victimes civiles. ». Il a admis que chaque vie civile est une tragédie, mais le Hamas a empêché les Palestiniens d'évacuer les lieux : « [Il] a tiré dans des zones sûres et dans les corridors humanitaires que nous avons établis (…) pour empêcher les Palestiniens de se mettre à l’abri. Il place des roquettes dans les écoles, les hôpitaux, il a des tunnels sous des lits d’enfants. ».

Incontestablement, rien n'est simple dans une guerre, les horreurs sont toujours au rendez-vous, mais l'une des différences entre l'armée israélienne et les terroriste du Hamas, c'est qu'elle ne cherche pas à haïr, ni à humilier ni à torturer, à se rendre sadique vis-à-vis des Palestiniens, les soldats israéliens veulent "seulement" éliminer ceux qui ont fait vœu de détruire l'État d'Israël et les Juifs en général. Il reste que des milliers d'innocents meurent dans ces bombardements et que leur mort ne contribue évidemment pas à se rapprocher de la paix.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (12 novembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Dominique de Villepin toujours pro-palestinien ?
Dominique de Villepin votera-t-il pour Emmanuel Macron ?
Quai d’Orsay.
Cassandre ?
Mais où est donc Dominique de Villepin ?
Assurancetourix ?
République solidaire et le revenu universel.
Les moulins de l’UMP.
Le gaullisme politique.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231114-dominique-de-villepin.html

https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/dominique-de-villepin-toujours-pro-251510

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/11/11/40104580.html
 





 

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6 novembre 2023 1 06 /11 /novembre /2023 04:05

« Jamais autant de Juifs n'ont été tués en une seule journée depuis la Shoah. » (Isaac Herzog, Président de l'État d'Israël, 11 octobre 2023).




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Cela fait maintenant un mois que l'organisation terroriste du Hamas a perpétré l'horrible massacre en Israël, tuant plus de 1 400 personnes sur un territoire reconnu par les Nations Unies comme appartenant à Israël. En outre, il y a encore 241 otages qui sont détenus par le Hamas ou déjà tués, soit par le Hamas, soit en boucliers humains.

Ce 7 octobre 2023 est une date importante dans les relations internationales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il n'y en a pas beaucoup et elles ont symboliquement révolutionné les rapports de force. On peut en citer, de cette importance, au moins cinq : le 9 novembre 1989 qui correspond à la chute du mur de Berlin et ses conséquences, la chute de l'Union Soviétique ; le 11 septembre 2001 avec les attentats du World Trade Center et ses conséquences en Afghanistan et en Irak ; le 17 décembre 2010 avec l'immolation d'un jeune vendeur de fruits et légumes tunisien Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid, qui a amorcé les Printemps arabes, la fuite de Ben Ali, Moubarak, le lynchage de Kadhafi et l'arrivée de Daech en Syrie et en Irak ; le 24 février 2022 avec l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe ; enfin, le 7 octobre 2023 avec le massacre des Juifs par le Hamas dont l'ampleur n'a jamais été aussi grande depuis la Shoah, comme l'a expliqué le 11 octobre 2023 le Président de l'État d'Israël Isaac Herzog.

Ces dates bouleversent les paradigmes antérieurs et s'il y a une chose qu'il convient de faire, c'est de ne plus raisonner comme auparavant. Cela ne dit pas comment analyser, mais les analyses antérieures sont assurément devenues caduques. La chute du mur de Berlin a ainsi clos la guerre froide, réunifié l'Europe continentale. La guerre en Ukraine a définitivement démasqué Vladimir Poutine sur ses intentions (avant, on pouvait toujours avoir des doutes). Enfin, le 7 octobre 2023 a montré que l'État d'Israël ne garantissait pas la sécurité des Juifs dans les conditions actuelles.

L'horreur voulue des terroristes du Hamas, au point de la filmer en direct et la diffuser auprès des proches des suppliciés, a atteint un point de non-retour. Ce qui se passe à Gaza depuis le 7 octobre 2023 est effectivement affreux ; le Hamas a indiqué que plus de 10 000 Palestiniens sont morts des bombardements et de la riposte de l'armée israélienne, dont des milliers d'enfants. C'est une seconde horreur, elle est absolument regrettable et même si on peut douter de la réalité des chiffres fournis par le Hamas, il ne fait pas de doute que la riposte israélienne a déjà fait des milliers de morts parmi la population civile.

Aussi condamnable soit cette réaction du gouvernement israélien, il faut réaliser que les victimes palestiniennes sont d'abord les victimes du Hamas et que c'est l'attaque du 7 octobre 2023 qui en est la seule cause. Sans celle-ci, le gouvernement israélien, qui avait déserté les lieux depuis plus d'une quinzaine d'années, serait indifférent au sort des Palestiniens de Gaza, comme auparavant. Il faut aussi remarquer que la riposte d'Israël, aussi meurtrière soit-elle, est actuellement approuvée par la grande majorité de la classe politique israélienne unie pour l'occasion de manière exceptionnelle alors que cela fait quatre élections législatives (sauf les dernières) que le peuple israélien, très divisé, n'avait amenée aucune majorité parlementaire à la Knesset (le parlement israélien).

Benyamin Netanyahou a répété le 30 octobre 2023 qu'il n'était pas question de cessez-le-feu tant que le Hamas n'était pas mis hors d'état de nuire et les otages n'étaient pas libérés : « Tout comme les États-Unis n'accepteraient pas un cessez-le-feu après Pearl Harbor ou le 11-Septembre, Israël n'acceptera pas une cessation des hostilités après l'horrible attaque du 7 octobre (…). Ceci est le temps de la guerre ! ».

On pourra toujours accuser les uns et les autres des événements antérieurs, mais on ne refait jamais l'histoire et il faut toujours regarder l'avenir. Si des torts ont eu lieu, les gouvernements israéliens, et pas seulement ceux de Benyamin Netanyahou, ont eu effectivement leur part, notamment par une politique de colonisation de la Cisjordanie particulièrement insensée et outrancière.

Mais l'Autorité palestinienne a elle aussi une responsabilité historique grave dans ce qui se passe. Le refus de Yasser Arafat des concession acceptées par Ehud Barak, Premier Ministre israélien, à l'occasion du Sommet de Taba en janvier 2001, a été totalement irresponsable alors que ce dernier avait concédé jusqu'à la capitale palestinienne à Jérusalem Est, une proposition qui n'a jamais été aussi audacieuse et qui ne se renouvellera probablement plus.

De plus, l'abandon du peuple palestinien est un fait qui n'est pas seulement provenant d'Israël : ni les pays arabes ne s'en sont préoccupé, ni la Russie, pas plus que les États-Unis. Benyamin Netanyahou a cru qu'avec les Accords d'Abraham et la normalisation de relations diplomatiques avec de nouveaux pays arabes, il pourrait s'épargner une solution politique au "problème" palestinien. Il a eu tort, mais certainement pas tout seul !

Certains, n'hésitant pas à employer la langue d'Orwell de "1984" (c'est-à-dire désigner par leur contraire les choses, cela pour rappeler que les républiques démocratiques et populaires du camp soviétique n'avaient rien de démocratique et rien de populaire), en désignant la Bande de Gaza comme un énorme camp de concentration, les laudateurs du Hamas en France et en Europe oublient un peu vite de se poser la question : pourquoi la Bande de Gaza, en plus de quinze ans, n'a-t-elle pas construit de centrales électriques ? Pourquoi n'est-elle pas capable d'avoir de l'eau potable ? Alors qu'elle bénéficie de nombreuses aides ? Parce que ces aides sont préemptées pour enrichir l'arsenal militaire du Hamas pour attaquer Israël ?

On peut observer aussi qu'à Paris comme à Washington, face à la Maison-Blanche, des manifestants ont défilé pour soutenir le peuple palestinien, au même titre que des manifestations avaient eu lieu à Tel-Aviv pour s'opposer à la réforme judiciaire de Benyamin Netanyahou. Je n'ai pas vu de manifestation de solidarité avec les victimes du 7 octobre 2023 à Gaza ou à Téhéran, et c'est là la grande différence entre une démocratie, toujours imparfaite, et des théocraties.

Depuis un mois, l'obsession totale du gouvernement israélien d'unité nationale est l'éradication du Hamas, cause d'insécurité permanente d'Israël (rappelons que des roquettes palestiniennes ciblaient régulièrement Israël depuis des dizaines d'années). Cette obsession, qui n'est pas seulement électorale mais aussi fondamentale, puisque c'est l'existence même de l'État d'Israël qui est remise en cause, évacue toutes les autres considérations et en particulier un certain nombre de valeurs humanistes dont l'Europe et les États-Unis notamment se veulent être les porteurs.

En particulier, le Président américain Joe Biden a "sermonné" Benyamin Netanyahou en lui disant qu'il ne faut pas qu'Israël commette la même faute que les États-Unis après le 11 septembre 2001 en faisant la guerre en Irak. Cette position n'a pas été assez rappelée, mais il faut la souligner, elle est la première parole officielle américaine de la faute de l'invasion de l'Irak et la diplomatie française peut être fière d'avoir toujours voulu s'opposer aux États-Unis à cet égard.

Les Américains ont même eu l'audace de donner des conseils techniques à l'armée israélienne pour réduire le nombre de victimes civiles. Car au-delà de l'horreur que vit aujourd'hui la population de Gaza, c'est aussi la popularité du Hamas dans le monde arabe qui est en jeu. Israël considère que l'existence du Hamas l'empêche d'exister puisque ces terroristes veulent l'élimination d'Israël. Mais c'est une organisation parmi les plus prospères, grâce à des fonds probablement iraniens.

L'armée israélienne devra bien un jour arrêter sa riposte. C'est la guerre et comme toute guerre, il y a des horreurs, les morts se comptent par milliers. Il n'y a pas de guerre sans victimes. Pour autant, un seul mort parmi la population civile reste scandaleux et digne d'indignation (et en outre, cela constitue un crime de guerre lorsque c'est délibéré). Paradoxalement, et c'est là le nœud du problème, ce gouvernement israélien ou le suivant devra bien arriver à une étape de négociation pour enfin bâtir une paix durable. Le processus sera difficile, long, mais les massacres du 7 octobre 2023 ont montré que l'État d'Israël ne pourrait pas être en sécurité sans trouver une réponse à la question palestinienne.

Cette paix durable passera nécessairement par deux États, selon les résolutions de l'ONU. Elle passera aussi par des négociations entre l'État d'Israël et des représentants du peuple palestinien, ce qui suppose, paradoxalement, des délégués du Hamas. Rappelons qu'avant les Accords d'Oslo, l'OLP d'Arafat était considérée comme une organisation terroriste. La paix est toujours une construction fragile et courageuse, mais elle promet la prospérité et les innovations technologiques...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (06 novembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Gaza, victime avant tout du Hamas ?
Quel est le bilan de la visite d'Emmanuel Macron au Proche-Orient ?
Proche-Orient : l'analyse crue de Jean-Louis Bourlanges.
Pourquoi Emmanuel Macron se rend-il en Israël ce mardi 24 octobre 2023 ?
Hôpital à Gaza : la vérité aveuglée par la colère ?
Hamas : tirs groupés contre les insoumis.
Horreur en Israël : les points sur les i de Gérard Larcher et Emmanuel Macron.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 12 octobre 2023 (vidéo et texte intégral).
Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Israël en guerre contre son agresseur terroriste, le Hamas.
Les Accords d'Oslo.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231106-israel-hamas.html

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27 octobre 2023 5 27 /10 /octobre /2023 05:56

« Je ne mourrai pas en laissant l'exemple pernicieux d'un pouvoir personnel. J'aurai fondé auparavant une République libre, aussi éloignée du bolchevisme que du fascisme. » (Atatürk, 1930).




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Les dates sont toujours un peu artificielles, elles ponctuent des phénomènes plus lents, plus diffus. Par exemple, la date d'un mariage est très ponctuelle, mais l'amour a pris son temps, parfois plusieurs années avant de s'officialiser précisément dans le temps. S'il fallait donc donner une date de naissance à la Turquie moderne et laïque, celle de Mustafa Kemal Atatürk, assurément, ce serait le 29 octobre 1923, il y a juste cent ans, date de la proclamation de la République.

Cette proclamation a été la suite d'un long processus qui a été l'une des conséquences de la Première Guerre mondiale. Le Traité de Versailles, puis les nombreux traités qui l'ont suivi dans les années 1920 ont formalisé la fin des grands empires : la fin de l'Empire allemand devenu République de Weimar, la fin de l'Empire austro-hongrois, sans doute le plus spectaculaire dans l'Europe centrale naissante, l'Empire russe qui s'est désintégré tout seul avec la Révolution russe, enfin l'Empire ottoman.

L'Empire ottoman est né le 27 juillet 1299 en Anatolie et était dirigé par un sultan. Conquérant, cet empire : la date fondatrice fut la chute de Constantinople en 1453 qui mit fin à l'Empire byzantin (l'Empire romain d'Orient). Les Ottomans ont occupé jusqu'aux Balkans (en Bosnie) et même l'Espagne, dans un empire transcontinental. Les armées ottomans sont arrivées jusqu'aux portes de Vienne, la capitale autrichienne (d'où cette spécialité viennoise, le croissant !).

Le Traité de Sèvres, signé le 10 août 1920 (au Musée national de la céramique à Sèvres) par la Triple Entente (les vainqueurs de la Première Guerre mondiale) et l'Empire ottoman a réduit drastiquement le territoire ottoman : perte des provinces arabes et africaines, perte considérable dans les Balkans (au profit de la Grèce). Cette paix avait un intérêt : elle confirmait la place du sultan Mehmed VI. Même l'Anatolie était amputée, en particulier par la Grèce à l'ouest, par l'Arménie et le Kurdistan (qui ne vit jamais le jour) à l'est.

Cette renonciation territoriale a eu une conséquence : le soulèvement de nationalistes turcs qui ont refusé ces concessions territoriales, en particulier en Anatolie. Deux gouvernements coexistaient alors en Turquie : celui du sultan à Istanbul, signataire du Traité de Sèvres, et celui d'Ankara, dirigé par Mustafa Kemal Atatürk, depuis le 3 mai 1920. Ce dernier fut également depuis le 24 avril 1920 le Président de la Grande Assemblée nationale de Turquie (la seule chambre du parlement turc). Atatürk considérait comme une trahison la signature du sultan Mehmed VI. Ce dernier a été vidé de ses pouvoirs jusqu'à être renversé le 1er novembre 1922, date considérée comme celle de la fin de l'Empire ottoman. Atatürk a également fait abolir le califat ottoman le 3 mars 1924, une abolition votée par la Grande Assemblée nationale.

Le Traité de Sèvres, qui n'a jamais été ratifié (un traité, il faut d'abord le signer, puis le ratifier selon les procédures des signataires ; sans ratification, le traité n'est pas applicable), a été remplacé par le Traité de Lausanne signé le 24 juillet 1923 (et dans une moindre mesure aussi par le Traité de Kars signé le 13 octobre 1921) nettement plus favorable à la Turquie et à la Russie au détriment de la Grèce et surtout, de l'Arménie et du Kurdistan qui ne furent finalement pas créés.

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La proclamation de la République de Turquie a eu lieu le 29 octobre 1923. Mustafa Kemal Atatürk a été alors élu Président de la République le 29 octobre 1923 par la Grande Assemblée nationale et fut constamment réélu (le 1er novembre 1927, le 4 mai 1931 et le 1er mars 1935) jusqu'à sa mort de maladie à l'âge de 57 ans, le 10 novembre 1938.

Avec un parti unique, qui avait le monopole des candidatures parlementaires, choisies par Atatürk dont la légitimité émanait de ces mêmes parlementaires (le chat qui se mord la queue), la supposée démocratie était très vague et presque une imposture, même si le multipartisme s'est imposé en 1945. La notion de démocratie avait une valeur prospective : « Il faut que je gouverne ce pays pendant dix ou quinze ans encore. Après cela, nous verrons s'il est capable de se diriger lui-même… » (1932) !

Les réformes de Kemal ne furent pas seulement institutionnelles (passage de la monarchie à la république), mais vraiment sociétales. Son modèle politique, c'était la France, celle de la Révolution de 1789, comme il l'expliquait dans un discours à l'Ambassade de France le 14 juillet 1922 : « Quoique la grande Révolution française, dont nous lisons les pages sanglantes avec admiration et enthousiasme, ait jailli du cœur de la nation française, ses résultats n’en furent pas moins d’une portée universelle. (…) On a vu d’un bon œil, en plein XXe siècle, qu’on affirme être le siècle du droit et de la justice, que le peuple de Turquie fût soumis à un régime d’oppression et de violence qui avait, à juste titre, soulevé la nation française cent trente ans auparavant. Le peuple de Turquie s’est soulevé pour défendre ses droits méconnus et foulés aux pieds. (…) J’espère que les fils de la France d’aujourd’hui, de cette France révolutionnaire et patriote qui a, par sa dévotion à la défense des droits de l’homme, inspiré à l’humanité pensante ses principes les plus supérieurs, confirmeront par les faits la juste cause de la Turquie. ». Il a été enterré avec un livre de Jean-Jacques Rousseau, "Du Contrat social", dans sa langue d'origine (le français) et annoté par lui-même.

Le 6 septembre 1938, pressentant venir la fin de son existence, il a écrit :
« Mon héritage spirituel, c'est la science et la raison (…). Tout dans ce monde évolue rapidement. La conception du bonheur et du malheur se modifie, au fil du temps, chez les peuples et les individus. Affirmer, dans ce contexte, que l'on a su inventer des recettes éternellement valables équivaudrait à renier l'incessante évolution des idées et de la science. (…) Nul n'ignore ce que j'ai essayé de faire, ce que je me suis efforcé de réussir pour le bien de la nation turque. Ceux qui, après moi, voudront avancer dans mon sillage, sans jamais s'éloigner de la raison et de la science, deviendront mes héritiers spirituels. ».

Ainsi, il a véritablement, même si j'apprécie peu le mot, "occidentalisé" la Turquie. On dirait plus utilement "modernisé". La première des choses, c'était de séparer l'État de la religion, l'islam, et à ce titre, il a pris exemple sur la loi française du 9 décembre 1905 de séparation des Églises et de l'État (sans être pour autant anticlérical). La France et la Turquie sont d'ailleurs les deux seuls pays véritablement laïques dans le monde qui vit plutôt en mode communautaire (en particulier chez les Anglo-saxons).

Atatürk
n'a pas interdit le port du voile (comme il l'aurait souhaité car la mesure aurait été très impopulaire) mais l'interdiction devait s'appliquer dans les services publics et à l'université. Beaucoup de mesures en faveur du droit des femmes ont été prises (dont le droit de vote dès 1930 ; en France : 1945 !). La polygamie a été également interdite.

Autres mesures de laïcité : le calendrier grégorien a remplacé le calendrier hégirien (en 1926) ; l'alphabet latin a remplacé l'alphabet arabe (en 1928), Atatürk lui-même a enseigné l'alphabet latin aux gens qui ne le connaissaient encore pas ; le dimanche a remplacé le vendredi comme jour de repos (en 1935) ; l'école est devenue obligatoire, mixte et laïque, sur le modèle de Jules Ferry (la scolarisation des jeunes filles est devenue une priorité nationale), etc.

Tout était voué à s'occidentaliser, la culture occidentale préférée à l'orientale par une promotion des opéras, ballets, etc. Parallèlement, Atatürk était un nationaliste turc et a tout fait pour renforcer l'identité des Turcs dans le monde. Il a aussi promu l'indépendance des pays du Tiers-Monde (notion future) vis-à-vis des grandes puissances du moment.

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C'est après sa mort et par l'action de ses successeurs qu'Atatürk a eu un véritable culte de personnalité, comme le fondateur du pays. Dans les années 1950, il fut le modèle idéal de nombreuses nations musulmanes, l'Égypte de Nasser, l'Afghanistan du dernier roi Mohammed Zaher Chah, l'Iran du chah Reza Pahlavi, la Tunisie de Bourguiga, même des indépendantistes algériens, etc. Pour eux, le kémalisme était un modèle de gouvernement, celui d'un nationalisme musulman qui ne se base pas sur l'islam mais sur la nation et l'État.

Le kémalisme était tellement à la mode que dans les années 1930, un groupe de brillants et jeunes députés radicaux très progressistes (dont Pierre Mendès France) a été appelé les "Jeunes Turcs" du parti radical en référence à la modernisation de la Turquie à cette époque.

Concrètement, Atatürk bénéficiait d'une armée puissante qui était au service de la démocratie. C'était paradoxal. Ainsi, la Turquie moderne a été régulièrement ponctuée de putschs militaires dans le but d'interrompre des processus de réislamisation du pays. Cela a été le problème de l'Algérie dans les années 1990 qui a préféré interrompre son processus de démocratisation à laisser arriver au pouvoir des islamistes. Même phénomène en Égypte après la victoire des Frères musulmans à l'élection présidentielle, puis le renversement du Président islamiste au profit d'un général de l'armée (Al-Sissi). Au contraire, la révolution iranienne a apporté une théocratie islamique en réplique à la modernisation réalisée au pas de charge par le chah d'Iran.

Comment évolue la Turquie moderne de nos jours ? C'est difficile d'avoir une idée très exacte et claire de cette évolution. Depuis vingt ans, l'AKP (parti de la justice et du développement) est au pouvoir à Ankara. Ce parti est un parti islamique et conservateur, mais qui reste démocratique. Incarné par Recep Tayyip Erdogan, Premier Ministre de Turquie du 14 mars 2003 au 28 août 2014 et Président de la République de Turquie depuis le 28 août 2014, l'AKP voulait d'abord se faire considérer comme un parti "démocrate musulman" au sens de la démocratie chrétienne en Europe. Tout était alors fait pour aller vers une adhésion à l'Union Européenne en adoptant un État de droit et en se rapprochant des standards européens.

Mais en fait, c'est moins clair depuis quelque temps. En 2008, une bataille constitutionnelle a eu lieu pour supprimer l'interdiction du voile à l'université (l'amendement constitutionnel du 9 février 2008 a été annulé le 5 juin 2008). Depuis une dizaine d'années, et surtout depuis l'été 2016, l'État turc est devenu un État de plus en plus autoritaire et de plus en plus islamisé (il y a quelques jours encore, Erdogan n'a pas hésité à déclarer que le Hamas était un mouvement de résistance), même s'il demeure encore un allié des États-Unis (et membre de l'OTAN).

Bien que contesté par beaucoup de ses compatriotes, Erdogan a été réélu le 28 mai 2023 de manière démocratique et a ainsi renforcé son autorité sur le pays. Comme on le voit, la longévité de son pouvoir a dépassé depuis longtemps celle de Mustafa Kemal Atatürk. Ce dernier reste toutefois une figure historique légendaire qui a fait vibrer non seulement la nation turque mais bien d'autres nations musulmanes qui ne souhaitent toujours pas sombrer dans la charia.



Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (28 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La Turquie de Mustafa Kemal Atatürk, moderne et laïque, a 100 ans !
La triple victoire de Recep Tayyip Erdogan.
Méditerranée orientale : la France au secours de la Grèce face à la Turquie.
Putsch raté en Turquie : Erdogan conforté.
Le génocide arménien et la Turquie.
Le monde musulman en pleine transition.
Islamisation de la Turquie : ne pas se voiler la face !
Crise des réfugués.
Daech.

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https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/la-turquie-de-mustafa-kemal-250912

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26 octobre 2023 4 26 /10 /octobre /2023 05:16

« Lutter contre le terrorisme, protéger les civils, donner un horizon politique : voilà le sens de l’initiative que je porte au Proche-Orient, pour la paix et la sécurité de tous. » (Emmanuel Macron, le 25 octobre 2023, au Caire).




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Le Président de la République française Emmanuel Macron a rendu visite à Israël le mardi 24 octobre 2023 pour exprimer tout le soutien de la France après les massacres commis par le Hamas le 7 octobre 2023. Le séjour dans la région a finalement duré deux jours, il s'est prolongé au mercredi 25 octobre 2023 pour rencontrer aussi des dirigeants arabes.

Parler du bilan d'une visite diplomatique est toujours difficile, parce qu'il y a des résultats à court terme et d'autres à long terme. Le résultat à court terme, cela aurait pu être la libération d'un ou plusieurs otages français. À ce jour, 9 Français ont été portés disparus depuis le 7 octobre 2023, et 35 autres ont perdu la vie dans ces crimes contre l'humanité commis par l'organisation terroriste.

Les abonnés à l'opposition systématique du pouvoir en France et du dénigrement permanent de leur propre pays, la France, diront que le bilan est nul, qu'Emmanuel Macron n'a eu aucun résultat, que sa visite n'a servi à rien, sinon à jouer un rôle sur la scène internationale. Ce discours, mille fois entendu bien avant Emmanuel Macron et dans d'autres circonstances, ils s'étaient préparés à le dire avant même qu'Emmanuel Macron ne quitte Paris pour le Proche-Orient. Ceux-là tentent de coincer la réalité dans leur moule qui n'est même plus idéologique mais nihiliste, car finalement, ces gens-là, d'un certain âge, sont plutôt dépressifs et le complotisme est une de leurs maladies récurrentes. Ils ne croient plus ni en l'avenir ni au génie humain et encore moins au génie français.

Alors, rappelons d'abord les trois objectifs de la venue au Proche-Orient d'Emmanuel Macron : le premier, c'était de marquer la pleine solidarité de la France avec Israël après les attaques du 7 octobre 2023 ; le deuxième, c'est de tout faire pour éviter une escalade dangereuse dans la région et réaffirmer l'importance de protéger les populations civiles ; enfin, le troisième est d'ouvrir une perspective politique en rassemblant la communauté internationale pour la sécurité d'Israël et pour la reprise d'un processus de paix.

Autant dire que si le premier objectif dépend uniquement du Président français, et Emmanuel Macron sait y faire dans la compassion et l'empathie, les deux autres objectifs sont plutôt très ambitieux voire missions impossibles. Avec un discours difficile à tenir car avec nuances : la reconnaissance du droit d'Israël à se défendre, mais aussi le ferme souhait que la riposte respecte le droit international, c'est-à-dire ne tue pas aveuglément des populations civiles. Selon les décomptes incertains du Hamas, plus de 7 000 civils auraient été tués à Gaza depuis le 7 octobre 2023 par les bombardements israéliens, dont près de 3 000 enfants. Et cela est inacceptable, pas moins que les victimes israéliennes du 7 octobre 2023.

Emmanuel Macron s'est d'abord rendu à Tel-Aviv où il a rencontré le Premier Ministre israélien Benyamin Netanyahou. Il a rencontré aussi les chefs de l'opposition, temporairement en trêve politique pour la circonstance. Emmanuel Macron a rendu aussi visite aux familles des victimes et des otages du Hamas.

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Au chef du gouvernement israélien, le Président français a déclaré notamment : « Les actes que vous avez subis dépassent tout entendement. Comme toutes les victimes du terrorisme, ces morts n'ont pas d'autre mobile que la haine pure. Le 11 janvier 2015, vous étiez avec nous, Monsieur le Premier Ministre, lorsque nous marchions dans les rues de Paris et que nous pleurions nos morts. Vous nous disiez la solidarité des Israéliens. Je vous apporte aujourd'hui l'émotion et la solidarité des Français. Nos deux pays sont liés par le même deuil. 30 ressortissants français [en fait, au moins 35] ont été assassinés par le Hamas. Et c'est pour mon pays l'attaque terroriste la plus meurtrière subie depuis 2016. C'est une page noire de notre propre histoire. Nous partageons aussi avec Israël une terrible épreuve, celle des otages. Plus de 200 Israéliens sont retenus [en fait, 224]. 9 Français le sont. C'est plus que nous n'en avions dans le monde entier jusqu'à présent. Et vous savez, nous savons, combien est insupportable pour un pays d’imaginer la captivité de certains de ses enfants. ».

Outre l'émotion et la solidarité, Emmanuel Macron a milité pour que la lutte contre le terrorisme que l'armée israélienne a engagée se fasse dans le respect des droits humanitaires et de la protection des civils. La lutte contre le terrorisme doit d'ailleurs être un objectif commun à toutes les nations.

En effet, l'une des sorties d'Emmanuel Macron a été de proposer une grande coalition internationale pour lutter contre le terrorisme du Hamas. Sur le modèle de la grande coalition contre Daech. Cette idée, originale mais farfelue, il faut bien le dire, était motivée par la considération suivante : si la communauté internationale laisse Israël seul dans la lutte contre le terrorisme, donc contre le Hamas, cela engendra un carnage dans la population palestinienne. Si au contraire, les pays arabes se décident eux aussi de lutter contre le Hamas, alors Israël aura besoin de moins réprimer, la lutte contre le terrorisme sera alors plus efficace et moins meurtrier.

Les mots exacts d'Emmanuel Macron sont les suivants : « Je suis aussi venu vous dire la solidarité de la France dans la lutte contre notre ennemi commun, le terrorisme ; rappeler devant tous le droit légitime d'Israël de se défendre face à ceux qui œuvrent à sa destruction. Cette cause est juste. Point final. Le Hamas est un groupe terroriste dont l'objectif même est la destruction de l'État d'Israël. C'est aussi le cas de Daech, d'Al Qaïda, de ceux qui leur sont associés dans l'action et dans l'intention. La priorité, votre priorité, mais aussi celle de toutes les démocraties et de la France, est avec vous de vaincre ces groupes terroristes. Nous qui avons été frappés si durement par ces mêmes groupes, voulons vous dire une chose simple : "vous n'êtes pas seuls". C'est pourquoi la France est prête à ce que la coalition internationale contre Daech, dans le cadre de laquelle nous sommes engagés pour notre opération en Irak et en Syrie, puisse lutter aussi contre le Hamas. Je propose à nos partenaires internationaux (…) que nous puissions bâtir une coalition régionale et internationale pour lutter contre les groupes terroristes qui nous menacent tous. Je pense que c'est l'intérêt d'Israël, de sa sécurité, celle aussi de plusieurs de vos voisins menacés par ces mêmes groupes ou des groupes voisins. La lutte doit être sans merci, mais pas sans règles, car nous sommes des démocraties qui luttons contre des terroristes ; des démocraties, donc qui respectent le droit de la guerre et assurent l'accès humanitaire, des démocraties qui ne prennent pas pour cible les civils, ni à Gaza, ni nulle part. Le respect des populations impose en l’occurrence de permettre l'accès de l'aide (…), de rétablir l'électricité pour les hôpitaux, pour les malades et les blessés, sans que cette électricité puisse être utilisée pour faire la guerre. Et nous allons bâtir des coopérations très concrètes sur ce sujet dans les tout prochains jours. ».

Benyamin Netanyahou pourrait voir d'un bon œil cette équivalence entre le Hamas et Daech, car il l'a faite, lui aussi, dans ses récentes déclarations, mais il est moins enclin, en revanche, à vouloir déléguer la sécurité d'Israël et la lutte contre le terrorisme à d'autres États, en particulier arabes. Évidemment, du côté arabe, cette proposition ne peut recueillir un intérêt même minime : les peuples arabes considèrent que le Hamas est un mouvement de résistance des Palestiniens, même le Président turc Erdogan l'a clairement signifié le 25 octobre 2023, et les dirigeants arabes restent vigilants et à l'écoute de la rue.

Daech qui voulait instituer un califat sur toute la région était un réel danger pour la plupart des pays arabes, tandis que le Hamas, au contraire, n'a rien de concurrentiel. Son but est négatif, la destruction d'Israël, il n'est pas la construction d'un semblant d'État. L'organisation terroriste est d'ailleurs manipulée par le Hezbollah (les massacres du 7 octobre ont été préparés à Beyrouth), donc par l'Iran.

Voyant que cette proposition n'avait rien de réaliste ni de raisonnable, Emmanuel Macron l'a rapidement oubliée dans ses échanges ultérieurs. Et c'est tant mieux.

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Emmanuel Macron est passé à Jérusalem, et a fait le voyage jusqu'à Ramallah pour y rencontrer le Président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. Ce dernier, à 88 ans et demi, est un Président fantoche depuis le 15 janvier 2005. Il ne représente pas le peuple palestinien qui ne s'est plus prononcé démocratiquement depuis une quinzaine d'années. Emmanuel Macron pouvait-il éviter de le rencontrer ? Non, s'il veut garder un positionnement de médiateur.

Dans la rue, des Palestiniens ont manifesté leur hostilité à la venue d'Emmanuel Macron, son portrait a été brûlé (ce qui est assez stupide), mais ils ont probablement manifesté aussi contre Mahmoud Abbas qui ne représente plus rien sinon une sorte de statue du commandeur. Le vrai problème palestinien, c'est qu'il n'y a plus de personnalités solides et valables pour incarner la défense des intérêts des Palestiniens.

Emmanuel Macron a redit que la solution de paix passait par deux États, l'État d'Israël et l'État palestinien. C'est l'unique voie qui pourrait aboutir à une paix durable. C'est aussi la reprise du droit international. Cela signifie le démantèlement des colonies israéliennes en Cisjordanie. Cette existence d'un État palestinien est l'élément clef de toute stabilité : « La cause palestinienne, elle, doit être entendue avec raison. La stabilité de la région, le retour à la normalisation qui s'annonçait ne seront garantis que si la réponse d'Israël à la violence est évidemment sécuritaire et implacable face aux groupes terroristes, mais aussi politique en acceptant le droit légitime des Palestiniens à disposer d'un territoire et d'un État en paix et en sécurité aux côtés d'Israël, parce qu'il aura intégré l'existence et la sécurité d'Israël comme une condition première. La sécurité d'Israël, la lutte commune contre le terrorisme, le respect du droit humanitaire, l'ouverture d'un horizon politique, tous ces éléments sont indissociables. Il faut agir ici et maintenant en nous battant face au terrorisme et en offrant un espoir. ».

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Le lendemain (25 octobre 2023), Emmanuel Macron s'est rendu à Amman où il a été reçu par le roi de Jordanie Abdallah II puis au Caire où il a rencontré le Président égyptien Al-Sissi. Cette reprise de contacts était un préalable avant toute amorce de reprise du processus de paix.

Lors de sa venue le 18 octobre 2023, le Président américain Joe Biden devait aussi rencontrer ces deux dirigeants arabes mais au lendemain de l'explosion d'un hôpital à Gaza (il a été établi qu'Israël n'en est pas à l'origine), ces dirigeants avaient annulé les rencontres à cause de la forte émotion populaire.

Alors, le voyage d'Emmanuel Macron au Proche-Orient a-t-il été utile ? Sur les otages, pour l'instant, aucun résultat direct (aucune libération). Mais sur deux points, cette visite aura été utile. Le premier point, c'est la décision de la France d'augmenter son aide humanitaire en faveur du peuple palestinien, notamment par la venue d'un navire, Tonnerre. La France a obtenu quelques garanties de la part d'Israël et aussi de l'Égypte pour permettre cette aide humanitaire. C'est sur le court terme, l'extrême court terme d'ailleurs, puisqu'il y a urgence pour la population palestinienne en danger.

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Le second point, c'est le long terme. Emmanuel Macron est le premier (et le seul) dirigeant d'un pays ami d'Israël à avoir été reçu par des dirigeants arabes depuis le 7 octobre 2023. Or, il est indispensable de maintenir un lien de dialogue et d'échange entre les voisins directs d'Israël. Et surtout, il est indispensable que l'Europe s'investisse dans la reprise du processus de paix, comme elle l'avait fait pour les Accords d'Oslo. Le 23 octobre 2023, Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères, a dit à l'Assemblée Nationale très justement : « Il est criminel de ne pas être au rendez-vous. L’Europe ne se relèverait pas d’être restée passive dans des circonstances aussi dramatiques. ».

La France a amorcé une dynamique diplomatique qu'il convient donc de saluer. Elle est fragile, instable, mais aussi prometteuse. L'Union Européenne est prête à aller dans ce sens et d'assurer un agenda. À la suite d'Emmanuel Macron, les dirigeants tchèque et autrichien sont venus à Tel-Aviv auprès de Benyamin Netanyahou. Il n'en sortira peut-être rien, comme plusieurs tentatives de résurrection des Accords d'Oslo depuis 1999, mais on aura au moins essayer.

Et puis, il y a un contexte grave : si Joe Biden a très sagement rappelé que son soutien indéfectible à l'État d'Israël ne pouvait s'exonérer de la protection des civils palestiniens, en tenant un discours équilibré sur le droit d'Israël à assurer sa sécurité mais aussi le droit du peuple palestinien à simplement vivre, la perspective d'une nouvelle élection de Donald Trump en novembre 2024 remettrait en cause toute la diplomatie américaine.

Donald Trump n'a jamais été équilibré dans sa politique au Proche-Orient. Il a rejeté les accords nucléaires avec l'Iran et il a installé l'ambassade des États-Unis en Israël à Jérusalem. Il est donc nécessaire qu'en cas de défaillance diplomatique des États-Unis, l'Europe puisse prendre le relais du même discours équilibré, celui qui pacifie et pas celui qui attise.

En ce sens, Emmanuel Macron a pris des marques pour l'histoire. Pas la sienne, qui serait dérisoire, mais celle du Proche-Orient qui a un besoin urgent de paix pour se développer et amorcer la prospérité. Un processus à l'européenne, après une guerre abominable, est en attente depuis trois quarts de siècle.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (25 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


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Shimon Peres.

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Golda Meir.
La lutte contre l’antisémitisme est l’affaire de tous !
Les Accords de Camp David.
La naissance de l’État d’Israël.
Massacre à Gaza.
Tentative de paix en 1996.
Un géant à Jérusalem.
L'un des derniers Sages d'Israël.
Israël est une démocratie.
Yitzhak Rabin.
Le Président Peres.
Ariel Sharon.
Ehud Olmert.
Benyamin Netanyahou III.
Yasser Arafat.

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http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/10/25/40085701.html





 

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25 octobre 2023 3 25 /10 /octobre /2023 05:22

« Le Hamas met en scène les pires violences sur les populations dans le seul but d’effrayer et d’intimider : c’est du terrorisme. Le Hamas ne fait la guerre qu’aux civils, c’est la définition même et dans son extension maximale du crime de guerre ! Les fidèles du Hamas n’hésitent pas à appeler non pas uniquement à la disparition de l’État d’Israël, mais à l’élimination des Juifs en tant que Juifs ! C’est l’expression même d’une volonté de génocide porteuse d’un crime contre l’humanité. Face à une telle entreprise. Israël dispose d’un droit absolu à se défendre. » (Jean-Louis Bourlanges, le 23 octobre 2023 dans l'hémicycle).




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En application de l'article 50-1 de la Constitution, le gouvernement a choisi d'engager un débat sans vote au sein de l'Assemblée Nationale le lundi 23 octobre 2023 sur la situation au Proche-Orient. Cela consistait en une déclaration de la Première Ministre Élisabeth Borne puis aux réponses des différents groupes politiques.

Ce fut l'occasion pour le gouvernement de revenir sur les faits : « Des centaines de civils ont été massacrés, des crimes abjects ont été commis. Chaque jour a révélé son lot d’atrocités : le meurtre sauvage de jeunes lors d’un festival dans le désert ; les horreurs perpétrées dans des kibboutz, à Be’eri, Kfar Aza ou Réïm ; des femmes, des hommes, des personnes âgées, des enfants enlevés ou brutalement assassinés. Au total, près de 1 400 personnes ont été tuées dans les attaques terroristes de ce mois d’octobre. Et même si 2 otages américaines ont été libérées, plus de 200 personnes sont encore retenues. Parmi les victimes, 30 de nos compatriotes ont été tués et 7 sont encore portés disparus. Cette attaque n’était en rien comparable aux épisodes de violence qu’a malheureusement déjà connus la région par le passé. Le déchaînement de barbarie, commandité et mis en œuvre par le Hamas, montre un changement de nature et d’échelle. Le 7 octobre, c’est une action complexe et préméditée qui a été menée, une action qui visait à atteindre Israël et sa population en leur cœur. » [à ce jour, c'est 4 otages qui ont été libérés et il y a eu 31 Français tués et 9 Français pris otages].

La Première Ministre a insisté sur le fait que ces massacres étaient singuliers et abominables : « Minimiser, justifier, voire absoudre le terrorisme, c’est accepter qu’il frappe à nouveau demain, en Israël, en France ou partout ailleurs. Nous ne devons faire preuve d’aucune ambiguïté face à de tels crimes. Le Président de la République l’a affirmé avec force : Israël a le droit à la sécurité et a le droit de se défendre dans le respect du droit international. Ceux qui confondent le droit des Palestiniens à disposer d’un État et la justification du terrorisme commettent une faute morale, politique et stratégique. Ils ne servent en rien la cause palestinienne. Soyons clairs : les Palestiniens ne sont pas le Hamas ; le Hamas n’est pas le peuple palestinien. (…) En agissant comme il l’a fait, le Hamas a exposé délibérément, de manière criminelle et cynique, toute la population de Gaza. Il utilise les populations civiles comme bouclier humain et met ainsi en péril les espoirs de paix dont les Palestiniens ont tant besoin. (…) C’est une tragédie ; or les tragédies se prêtent mal aux postures et aux indignations à géométrie variable. Il n’y a pas de victimes qu’il conviendrait de pleurer moins que d’autres, pas de vies qui valent moins que d’autres. ».

De tous les orateurs qui ont suivi Élisabeth Borne, il me semble que le plus intéressant était le représentant du MoDem, Jean-Louis Bourlanges, le président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée Nationale depuis le décès de Marielle de Sarnez (élu président le 27 janvier 2021 et réélu le 30 juin 2022).

Jean-Louis Bourlanges est l'un des responsables politiques les plus brillants de notre République. Agrégé de lettres, IEP Paris, ENA, Cour des Comptes, professeur associé à l'Université Johns-Hopkins de Baltimore, cofondateur de l'UJP en 1966 (l'Union des jeunes pour le progrès, en d'autres termes, les Jeunes gaullistes), il aurait pu avoir une carrière classique de député-maire RPR de Dieppe dès le milieu des années 1980 (ou de Rouen vingt ans plus tard)... s'il n'avait pas été un esprit aussi indépendant. Et l'indépendance, elle ne pouvait pas passer dans un parti qui enrégimentait (RPR ou UMP), d'où son positionnement au sein de l'UDF (puis SDF de la vie politique après l'opposition de François Bayrou à Nicolas Sarkozy). Longtemps député européen (1989 à 2007), il aurait pu devenir ministre dans beaucoup de gouvernements de centre droit s'il n'était pas resté un électron-libre de la vie politique. Le soutien à Emmanuel Macron en 2017 lui a fait retrouver François Bayrou au MoDem et, pour la première fois, lui a donné son premier mandat de parlementaire national aux élections législatives de juin 2017 (qu'il a renouvelé en juin 2022). Ses analyses sur les finances publiques et sur les relations internationales sont très écoutées et très reconnues.

À 77 ans, Jean-Louis Bourlanges a gravi les quelques marches de la tribune de l'Assemblée Nationale avec difficulté, au point de devoir faire une pause, mais lorsqu'il a amorcé son discours, il était tout entier dans cette passion du verbe et de la politique, même si, à l'évidence, il manquait un peu de souffle. J'espère que cette faiblesse physique est passagère et qu'il s'en remettra.

En quoi son discours du 23 octobre 2023 dans l'hémicycle était-il intéressant ? Il a été capable, mieux que d'autres, de bien remettre en perspective l'histoire de la région et aussi, de rester sur le socle des valeurs humanistes : comme disait Élisabeth Borne, il n'y a pas à sélectionner l'indignation, les massacres du Hamas sont un scandale, les bombardements sur la population civile, y compris les enfants, sont une tragédie. Ce recul historique avec perspective lui a valu même les applaudissements de députés insoumis (qui se sont même levés à la fin de son intervention), ce qui n'était pas forcément un cadeau, d'ailleurs.

Le contexte de la situation conflictuelle au Proche-Orient depuis soixante-quinze ans, c'est l'absence d'un État palestinien aux côtés de l'État israélien : « De ce vote solennel [à l'ONU] qui engage la communauté internationale date à la fois le droit imprescriptible du peuple juif à vivre dans un État libre et souverain, et le lancinant problème posé par l’émergence indéfiniment différée de son jumeau palestinien. Israël était né, Ismaël restait dans les limbes ; la tragédie prenait ses marques au cœur d’un Moyen-Orient par ailleurs déchiré par la guerre froide. ».

Il a bien affirmé ce qu'était le Hamas après le 7 octobre 2023 : « Le 7 octobre dernier, cette interminable tragédie a pris un cours décisivement nouveau et d’une gravité exceptionnelle : Israël s’est trouvé confronté à une agression paramilitaire de première grandeur, menée par un Hamas résolu à piétiner tous les principes, toutes les règles, tous les usages régissant les relations entre les peuples, que ceux-ci soient en guerre ou en paix. Si les mots ont un sens, il est clair que l’agression conduite par le Hamas est à la fois terroriste, constitutive d’un crime de guerre généralisé et adossée à un discours à caractère génocidaire assumé. ».

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Jean-Louis Bourlanges en est rapidement venu à la sécurité durable d'Israël en posant la bonne question : « Comment un État de 20 770 kilomètres carrés, peuplé de moins de sept millions de Juifs, fer de lance d’une communauté humaine de près de treize millions de personnes, pourrait-il espérer vivre durablement en paix et en sécurité au milieu d’un environnement par hypothèse hostile de plus d’un milliard et demi de musulmans ? ».

Et d'exclure la réaction à court terme : « La mauvaise réponse, mais aussi la plus tentante, est bien entendu celle du mur, du cordon sanitaire, supposés pouvoir soustraire l’État hébreu, puissamment militarisé, à toutes les menaces qui l’entourent. La combinaison de la faiblesse démographique d’Israël et d’une diffusion générale d’armes de destruction de courte et de moyenne portée, a progressivement créé une situation d’extrême vulnérabilité sécuritaire pour l’État hébreu. Même l’arme nucléaire dont dispose Israël n’est pas de nature à assurer la survie d’un État concentrant toute sa population sur un espace aussi restreint. ».

Le député du MoDem a alors rappelé un peu l'histoire d'Israël : « Les grands dirigeants historiques d’Israël, quelle qu’ait été leur sensibilité politique, ont eu une conscience aiguë de cette vulnérabilité après que la guerre du Kippour l’eut rendue manifeste. ». Il a cité en particulier trois dirigeants israéliens : Menahem Begin, Yitzhak Rabin et Ariel Sharon.

Les trois étaient des "faucons" en ce sens qu'ils prônaient la fermeté dans la défense d'Israël. Begin venait du Likoud, de son aile très à droite, et il a conclu une paix avec son premier ennemi, l'Égypte de Sadate avec les Accords de Camp David. Le travailliste Rabin, lui, a compris que la sécurité d'Israël ne serait jamais assurée sans un État palestinien, d'où les Accords d'Oslo, et il en est mort puisqu'il a été assassiné par un extrémiste juif peu de temps après. Enfin, Ariel Sharon, connu pour ses méthodes brutales (notamment au Sud-Liban), a aussi compris l'enjeu démographique : si on laissait les Palestiniens en Israël, très rapidement, la population palestinienne prendrait le dessus sur la population juive (d'autant plus qu'Israël est une démocratie, il faut le rappeler, la seule démocratie de la région). La solution à deux États permet donc d'évacuer le problème démographique par la séparation. C'est pourquoi Ariel Sharon a commencé à évacuer les colons de Cisjordanie et à créer un parti centriste en quittant le Likoud.

Malheureusement, comme l'assassinat de Rabin a empêché la poursuite du processus d'Oslo, Sharon a quitté la vie politique très rapidement après cet éclair de conscience en raison d'une santé défaillante (il est tombé dans le coma). Des malchances pour la paix.
Le processus d'Oslo n'a pas non plus trouvé beaucoup d'écho du côté palestinien, Yasser Arafat voulant un peu trop facilement surfer sur la vague populiste de la population palestinienne.

L'arrivée au pouvoir de Benyamin Netanyahou (qui n'est pas un va-t-en-guerre au contraire des trois précédents), à partir de 2009, a changé la donne : souvent sous l'influence de partis juifs extrémistes dont le soutien lui était nécessaire pour rester au pouvoir, il a encouragé l'installation de colons en Cisjordanie, en les défendant de manière très musclée, et il s'est totalement désengagé de Gaza (évacuation des troupes israéliennes).

La seule solution à long terme, on le sait depuis 1947, c'est la création de deux États, un israélien et un palestinien, qui bénéficient chacun d'une reconnaissance mutuelle. Or, cela suppose avant tout un désengagement d'Israël de Cisjordanie, en d'autres termes, de sacrifier les colons qu'il a encouragés à venir s'installer.

Les phrases de Jean-Louis Bourlanges sont très lourdes de sens : « Ces hommes [Begin, Rabin, Sharon] avaient pressenti et pleinement reconnu (…) qu’Israël ne trouverait la paix qu’à la condition d’établir avec les États arabes qui l’entouraient, mais aussi avec les hommes et les femmes de Palestine, une relation équilibrée qui supposerait le respect mutuel et le partage des bénéfices de la paix. La rupture introduite ces dernières années dans la politique israélienne par les gouvernements successifs de M. Netanyahou n’est certainement pas la cause unique de la situation nouvelle, mais elle y a puissamment contribué. ». Cette dernière phrase a été huée par certains députés.

Et le président de la commission des affaires étrangères a explicité l'erreur de Netanyahou (qui vient d'avoir 74 ans) : « M. Netanyahou a semblé imaginer que l’établissement de relations apaisées et coopératives avec les voisins arabes d’Israël, ce qui était en soi une excellente ambition et se révélera demain fort utile à la quête nécessaire de l’apaisement, pouvait avoir ce pouvoir indirect, mais précieux à ses yeux, de dispenser Israël de rechercher avec les Palestiniens un accord équilibré et respectueux de leurs attentes et de leurs aspirations profondes. Bien plus, les accords d’Abraham ayant permis aux États arabes d’abandonner les Palestiniens à leur triste sort, le gouvernement israélien s’est estimé libre d’engager sans risque une relance rampante mais brutale et déterminée de sa politique de colonisation en Cisjordanie. ».

Les responsabilités sont cependant multiples : « La politique d’Israël a changé, mais il serait injuste d’attribuer à l’État hébreu le monopole de la nouvelle brutalisation du monde d’où l’horreur du 7 octobre est sortie. Partout, les forces attachées à la modération, à la coopération et à la paix ont été battues en brèche. Que les Palestiniens aient eu la tentation croissante et suicidaire de se réfugier dans une sorte de nihilisme politique ne peut, hélas, pas nous surprendre. Une population sans avenir, donc sans espoir, pouvait-elle être tentée par des partis modérés qui n’avaient rien à lui offrir ? ». Encore cette dernière phrase a été ponctuée par quelques huées de députés.

Pro-européen, Jean-Louis Bourlanges a voulu rappeler la responsabilité des États-Unis, notamment lors du mandat de Donald Trump, et la clairvoyance de l'Union Européenne : « Les États-Unis ont eux aussi leur part de responsabilité historique dans l’armement du piège, qui n’avaient guère encouragé les efforts des Européens en faveur d’un processus de paix fondé sur la quête d’une solution à deux États et qui, à l’initiative de Donald Trump, ont basculé dans le camp des pousse-au-crime en cassant les Accords de Paris avec l’Iran et en cautionnant le transfert de leur ambassade à Jérusalem. L’Europe, quant à elle, n’a manqué ni de lucidité ni d’imagination dans son obstination à soutenir le seul modèle capable de transformer en partenaires des adversaires de toujours, mais elle s’est révélée incapable de tenir le choc quand le Président Trump avait décidé de sonner la charge contre toute solution d’équilibre et de bon sens, force des analyses, faiblesse des volontés. ».

Le risque, c'est hélas l'embrasement du Proche-Orient : « D’abord le risque d’une escalade incontrôlée pouvant conduire à un embrasement général. Derrière le Hamas, il y a le Hezbollah ; derrière le Hezbollah, il y a l’Iran ; derrière l’Iran, il y a la Russie et la Chine. Rendons, à cet égard, un juste hommage au sang-froid et à l’engagement du président Biden qui, au rebours de son prédécesseur, met indiscutablement tout le poids des États-Unis au service de la modération, de la désescalade, de la libération des otages et du droit à la vie des populations civiles. Le deuxième risque majeur est celui d’un anéantissement massif de populations civiles utilisées par les uns comme des boucliers humains et par les autres comme l’exutoire d’une tentation de vengeance, pour reprendre l’expression préoccupante du Premier Ministre israélien. ».

Pour Jean-Louis Bourlanges, l'Union Européenne a tout son rôle pour réenclencher le processus de paix : « Il est des moments et des lieux où il est criminel de ne pas être au rendez-vous. L’Europe ne se relèverait pas d’être restée passive dans des circonstances aussi dramatiques. Reste à construire un avenir de paix. La tâche est redoutable en raison du mur de détresse et de haine qui sépare aujourd’hui Israéliens et Palestiniens. Aujourd’hui, il est à la fois trop tard et trop tôt pour instituer deux États en terre de Palestine. Il est en revanche temps, et même grand temps, de commencer à réaliser les conditions qui rendront possible, le moment venu, cette double création. La première de ces conditions, c’est qu’Israël fasse cesser sa politique de colonisation et reconnaisse enfin que la solution du problème palestinien ne saurait passer par l’exportation, en Égypte, des Palestiniens de l’Ouest et, en Jordanie, des Palestiniens de l’Est. La seconde de ces conditions consiste à recréer, notamment avec l’appui des États modérés du pacte d’Abraham, une autorité palestinienne active, respectée et capable de prendre à Gaza le relais d’un Hamas en cendres et de négocier un statut respectueux des droits palestiniens. Au-delà du Moyen-Orient, les bonnes volontés existent, comme celle du Brésil, dont la France a eu raison de soutenir le projet de résolution à l’ONU. Il nous appartient de nous associer à leurs efforts. (…) L’Europe brisée et ruinée s’est reconstruite sur une idée simple et forte, celle qui a guidé la réconciliation franco-allemande : on ne peut trouver la paix avec ses adversaires de toujours qu’à la condition de prendre en compte leurs besoins légitimes. C’est à l’Europe de convaincre Palestiniens et Israéliens de la pertinence de son logiciel de réconciliation et c’est à la France de convaincre nos partenaires de relever ce défi historique. ».

Cette conclusion semble préfigurer la visite du Président français Emmanuel Macron au Proche-Orient les 24 et 25 octobre 2023...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (23 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Jean-Louis Bourlanges et la capitulation du PS.
Pouvoir d’achat : l’idée révolutionnaire de Jean-Louis Bourlanges.
Proche-Orient : l'analyse crue de Jean-Louis Bourlanges.
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La naissance de l’État d’Israël.
Massacre à Gaza.
Tentative de paix en 1996.
Un géant à Jérusalem.
L'un des derniers Sages d'Israël.
Israël est une démocratie.
Yitzhak Rabin.
Le Président Peres.
Ariel Sharon.
Ehud Olmert.
Benyamin Netanyahou III.
Yasser Arafat.

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23 octobre 2023 1 23 /10 /octobre /2023 19:15

« Il faut de la sécurité pour Israël et un État pour les Palestiniens. Les deux forment un tout indissociable. (…) La seule solution viable est une solution à deux États vivant en paix et sécurité côte-à-côte. » (Catherine Colonna, le 23 octobre 2023 à l'Assemblée Nationale).




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Annoncée le dimanche soir, la visite du Président de la République française Emmanuel Macron en Israël ce mardi 24 octobre 2023 répond à plusieurs objectif. La Ministre française de l'Europe et des Affaires étrangères Catherine Colonna était venue dès le 15 octobre 2023 pour y exprimer le soutien et la solidarité de la France après les massacres commis par le Hamas le 7 octobre 2023 : «  La France est frappée par l’horreur des crimes commis par le Hamas contre Israël et sa population civile. Les Français sont nombreux parmi les victimes ». La Présidente de l'Assemblée Nationale, Yaël Braun-Pivet s'est aussi rendue en Israël ce week-end (accompagnée notamment du président de LR Éric Ciotti).

Emmanuel Macron sera le sixième chef d'État ou de gouvernement d'alliés à Israël à se rendre à Tel-Aviv depuis le 7 octobre 2023, après le Chancelier allemand Olaf Scholz le 17 octobre 2023, le Président des États-Unis Joe Biden le 18 octobre 2023 (qui n'a pas pu rencontrer les dirigeants de Jordanie, de l'Autorité palestinienne ni de l'Égypte à cause de l'explosion d'un hôpital de Gaza la veille), le Premier Ministre britannique Rishi Sunak le 19 octobre 2023, la Présidente du Conseil d'Italie Giorgia Meloni le 21 octobre 2023, et le Premier Ministre néerlandais Mark Rutte le 23 octobre 2023. Il devrait rencontrer en tête-à-tête le Premier Ministre israélien Benyamin Netanyahou, mais aussi l'un des chefs de l'opposition, Benny Gantz.

Avec les États-Unis, la Thaïlande, l'Ukraine et la Russie, la France est l'un des pays étrangers les plus durement touchés par l'attaque terroriste du 7 octobre 2023 : à ce jour, au moins 30 ressortissants français ont été tués sur les plus de 1 400 victimes recensées et 7 Français sont portés disparus dont une jeune femme est confirmée comme otage du Hamas (sur les 220 otages restants).

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Emmanuel Macron se rend à Israël d'abord pour exprimer sur place la compassion, la solidarité et le soutien de la France au peuple israélien dans cette difficile épreuve. Il s'y rend aussi pour assurer les familles des otages français du soutien de la France et de sa volonté absolue d'obtenir leur libération (et celle des autres otages).

Mais la France veut aussi faire pression sur Israël pour rester dans le droit international, épargner la population civile dans sa riposte à Gaza qui doit être ciblée (plus de 5 000 personnes, la plupart civiles, auraient déjà été tuées dans cette nouvelle guerre qui s'est engagée contre le Hamas), et renoncer à l'intervention terrestre de l'armée. Elle insiste également pour stopper l'embargo sur Gaza, et pour autoriser l'arrivée de camions d'aide humanitaire. C'est pour l'urgence.


Dans le volet politique, Emmanuel Macron veut empêcher toute extension régionale du conflit (participation du Hezbollah par exemple ; les États-Unis ont fait venir deux porte-avions), et surtout, il veut reprendre l'initiative pour réamorcer un processus de paix (qui passe nécessairement par l'arrêt de la colonisation en Cisjordanie) et instituer un État palestinien, seule porte de sortie par le haut de ce conflit qui dure depuis plus de soixante-quinze ans.

Emmanuel Macron s'est entretenu au téléphone le dimanche 22 octobre 2023 avec Joe Biden, Olaf Scholz, Rishi Sunak, Giorgia Meloni et le Premier Ministre canadien Justin Trudeau. Il en est ressorti ce communiqué de presse : « Les échanges ont porté sur le conflit en cours entre Israël et l'organisation terroriste Hamas. Les dirigeants ont réitéré leur soutien à Israël et à son droit de se défendre contre le terrorisme et ont appelé au respect du droit humanitaire international, y compris la protection des civils. Ils ont salué la libération de deux otages et ont appelé à la libération immédiate de tous les otages restants. Ils sont convenus de se coordonner étroitement pour soutenir leurs ressortissants dans la région, en particulier ceux qui souhaitent quitter Gaza. ».

En outre : « Les dirigeants ont salué l'annonce de l’arrivée des premiers convois humanitaires à Gaza en soutien aux Palestiniens dans le besoin, et se sont engagés à poursuivre la coordination avec les partenaires de la région afin de garantir un accès durable et sûr à la nourriture, à l'eau, aux soins médicaux et aux autres formes d'assistance nécessaires pour répondre aux besoins humanitaires. Les dirigeants se sont engagés à poursuivre une coordination diplomatique étroite, notamment avec les principaux partenaires de la région, afin d'éviter que le conflit ne s'étende, de préserver la stabilité au Moyen-Orient et d'œuvrer en faveur d'une solution politique et d'une paix durable. ».

On pourra toujours dire que la venue d'Emmanuel Macron à Tel-Aviv ne servira à rien. C'est ce qu'on avait déjà dit pour sa venue à Moscou le 7 février 2022 lorsqu'il avait tenté de négocier avec Vladimir Poutine avant l'invasion russe de l'Ukraine. Pourtant, rien ne doit être négligé dans ce triple objectif : libération des otages du Hamas, protection de la population civile de Gaza et règlement définitif de la paix au Proche-Orient.

Il est tentant de dire que la guerre entre Israël et le Hamas est un second front militaire après la guerre en Ukraine, mais c'est se tromper d'analyse. La Russie a été, elle aussi, durement touchée par le Hamas le 7 octobre 2023 avec 16 personnes décédées et 9 disparues. La position de la Russie dans le conflit israélo-palestinien est très prudente (au même titre qu'Israël est resté très prudent dans ses prises de position sur la guerre en Ukraine). Vladimir Poutine a accepté par exemple que depuis le 7 octobre 2023, Israël bombarde à deux reprises les aéroports internationaux de Damas et d'Alep, de son protectorat, la Syrie, et cela sans riposte.

L'un des arguments exprimés aux dirigeants israéliens, c'est de ne pas commettre la même erreur que les États-Unis après le 11 septembre 2001 en déclarant la guerre en Irak. Une reprise du nord de la Bande de Gaza est stratégiquement peu pertinente. Les bombardements incessants depuis dix-sept jours de l'armée israélienne sur la population palestinienne paraissent à la fois scandaleusement disproportionnés, inutilement meurtriers (des milliers de victimes) et ne contribuent pas à une esquisse de la paix dans un horizon même lointain. C'est tout le pouvoir de conviction du Président français qui sera donc mis à rude épreuve dans ce voyage en Israël. Et dans tous les cas, il aura toujours été utile de pouvoir échanger et discuter avec les parties prenantes d'une guerre qu'il faut à tout prix circonscrire et arrêter, mais aussi avec les familles des victimes qui ont besoin d'écoute et d'empathie.

Pendant que le chef de l'État sera en Israël, la Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Catherine Colonna ira défendre, le même jour, devant le Conseil de Sécurité de l'ONU, « la mise en place d’une trêve humanitaire, qui pourra donner lieu à un cessez-le-feu, trêve nécessaire à la distribution de l’aide aux populations civiles ». On peut toujours rêver.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (23 octobre 2023)
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19 octobre 2023 4 19 /10 /octobre /2023 05:21

« Si l'on veut donner une définition de ce que je nomme le palestinisme, on pourrait écrire que c'est le fait d'épouser aveuglément le narratif palestinien sans esprit critique aucun. Avant d'expliquer que ce palestinisme n'est qu'un avatar de l'islamo-gauchisme, je tiens à dire qu'on peut parfaitement être sensible à la cause arabo-palestinienne sans être palestiniste. » (Gilles-William Goldnadel, "Le Figaro" du 17 mai 2021).





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J'aurais pu aussi titrer : la vérité s'efface derrière la colère. En revanche, s'il s'agit bien de vérité, il ne s'agit pas de raison (qui s'oppose généralement à l'émotion) : en effet, la destruction d'un hôpital n'a absolument rien de ...raisonnable. En revanche, rechercher la cause de cette destruction doit se faire hors de toute passion, rationnellement. Comme s'il fallait faire la guerre à une surenchère compassionnelle.

Soyons clairs : tout ce qui arrive depuis le 7 octobre 2023 à la population civile de Gaza est de la responsabilité du Hamas. Le massacre commis par cette organisation terroriste qui a coûté la vie à plus de 1 200 personnes en Israël a très logiquement eu pour conséquence une réaction de l'armée israélienne pour assurer la sécurité de ses habitants dans l'objectif d'éliminer les forces terroristes. Cette réaction, hélas, a déjà coûté la vie à au moins 3 000 personnes à Gaza, principalement des civils, et on compterait entre 800 et 1 000 enfants qui y ont péri. Ce bilan désastreux et encore hélas provisoire est aussi condamnable que l'horreur du 7 octobre 2023.

La riposte israélienne ne doit pas être une vengeance mais une opération pour combattre le terrorisme. Ce sont les alliés d'Israël qui ont exprimé le plus inconditionnellement leur soutien et leur solidarité à Israël qui sont les mieux placés pour convaincre Israël d'épargner le plus possible la population civile à Gaza. Les valeurs humanistes sont universelles et s'imposent à tous : la valeur de la vie est la même en Israël et à Gaza.

L'explosion d'un hôpital (l'Ahli-Arab Hospital) à Gaza dans la soirée du mardi 17 octobre 2023 a servi de catalyseur aux peuples arabes pour manifester contre la politique d'Israël. Même dans des pays qui commençaient à nouer des relations diplomatiques avec Israël, comme le Maroc, les manifestants étaient nombreux pour soutenir le peuple palestinien et condamner Israël. Du côté du Hamas, on a communiqué sur le nombre de victimes, d'abord 200, puis jusqu'à près de 500, et pourtant, d'autres observateurs évoqueraient plutôt quelques dizaines, ce qui reste, surtout dans un hôpital, un scandale : dans les hôpitaux à Gaza, il y a non seulement des patients et le personnel soignant et administratif, mais aussi des réfugiés, des familles, qui sont venus faute d'avoir de quoi se loger après la destruction de leur habitation. Le Hamas a très vite accusé l'armée israélienne d'avoir bombardé cet hôpital, ce qui a déclenché ces nouvelles manifestations dans les pays arabes contre Israël mais aussi contre ses alliés, notamment les États-Unis et la France.

Pourtant, le lendemain, on s'aperçoit qu'il n'en est rien. Certes, les dénégations d'Israël sont de bonne guerre et à peine plus crédibles que les affirmations du camp palestinien, chaque belligérant rejetant sur l'autre les conséquences tragiques de "leur" guerre. Mais dans ce cas précis, qui n'exonère pas la responsabilité morale d'Israël des autres tragédies provoquées par sa riposte, on peut douter très sérieusement de la responsabilité de l'armée israélienne, d'autant plus que l'hôpital en question est un établissement chrétien.

L'origine israélienne de l'explosion de cet hôpital est remise en cause, en effet, par des images diffusées en direct par la chaîne qatarie Al-Jazeera, qu'on ne peut soupçonner d'une partialité pro-israélienne. Dans ces images, on voit une roquette qui a explosé en plein vol au-dessus de l'hôpital et dont les éclats sont retombés sur l'hôpital (essentiellement le parking) avant le départ d'un feu.

Cette version est renforcée par le bruit de la roquette (qui n'a rien à voir avec les bombes israélienne) et aussi l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre un membre du Hamas et un membre du Djihad islamique. Ce serait un défaut d'une roquette du Djihad islamique, tirée avec beaucoup d'autres depuis un cimetière peu éloigné de l'hôpital, qui serait à l'origine de l'explosion. Cette version est aussi confirmée par la nature des dégâts : un incendie (dû au carburant de la roquette, liquide inflammable) et pas une explosion au sol, des fenêtres cassées mais pas les murs (alors que les bombes israéliennes détruisent des bâtiments entiers), pas de cratère, etc. Ce qui expliquerait aussi que l'estimation communiquée par le Hamas de plusieurs centaines de victimes est peu crédible (on parle maintenant de plusieurs dizaines de morts, tous des civils).

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Du reste, certains rappellent qu'environ une roquette sur vingt lancées depuis Gaza par les terroristes palestiniens pour tuer des Israéliens retombe sur Gaza même, tuant donc des Palestiniens au point qu'on peut sérieusement se demander qui, de l'armée israélienne ou des terroristes palestiniens ont tué le plus de civils palestiniens depuis plusieurs décennies (rappelons que le 7 octobre 2023, le Hamas a lancé 5 000 roquettes contre Israël).

En outre, la venue du Président américain Joe Biden au Proche-Orient le lendemain ne coïncidait pas vraiment dans l'agenda avec une frappe israélienne qui aurait été contre-productive. Les tentatives américaines de médiation dans la région ont été anéanties par cette explosion qui a beaucoup ému des pays arabes qu'il voulait aussi visiter.

La vérité existe puisque les faits sont les faits. Sur cette explosion de l'hôpital, cela paraît donc peu probable que l'armée israélienne en soit responsable. Mais celle-ci a finalement une faible importance face aux foules enflammées. Et comme je l'ai écrit plus haut, la non responsabilité de l'armée israélienne de cette destruction ne l'exonère pas de celle des autres tragédies qu'elle commet en réponse à l'horreur du Hamas. Malgré la désinformation, la colère se base sur du réel aussi.

Avez-vous remarqué que lorsque des peuples non islamiques sont touchés par de tragiques attentats, sont mis en avant la tristesse et le recueillement comme émotions principales, tandis que lorsqu'un peuple islamique est touché par une tragédie guerrière, c'est la colère qui l'emporte, et l'esprit de vengeance ? La colère est une courte folie, dit la formule latine. Combien de temps faudra-t-il attendre pour que la folie cesse enfin et que les deux peuples, israélien et palestinien, qui ne sont peuples que depuis 1948, puisse cohabiter paisiblement avec une mutuelle reconnaissance et dans un mutuel respect ? C'est l'objectif des rationnels, ceux qui laissent la passion de côté et qui veulent la raison. Ils sont ultra-minoritaires dans cette région du monde...


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Sylvain Rakotoarison (18 octobre 2023)
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Hôpital à Gaza : la vérité aveuglée par la colère ?
Hamas : tirs groupés contre les insoumis.
Horreur en Israël : les points sur les i de Gérard Larcher et Emmanuel Macron.
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Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Terreur Al-Aqsa : Israël en guerre contre son agresseur, le Hamas.
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Le retour au pouvoir de Benjamin Netanyahou après sa nouvelle victoire.
Emmanuel Macron à Pithiviers en 2022.
Covid-19 : comprendre la situation épidémique en Israël.
Covid-19 : la France plus vaccinée qu’Israël.
Naftali Bennett, Premier Ministre d’Israël à la place de Benyamin Netanyahou.
Israël 2020 : Benyamin Netanyahou vs Benny Gantz (3e round).
Benyamin Netanyahou a 70 ans.
Les élections législatives israéliennes du 17 septembre 2019.
Poisons et délices de la proportionnelle.
Les enjeux des élections législatives israéliennes du 9 avril 2019.
Golda Meir.
La lutte contre l’antisémitisme est l’affaire de tous !
Les Accords de Camp David.
La naissance de l’État d’Israël.
Massacre à Gaza.
Tentative de paix en 1996.
Un géant à Jérusalem.
L'un des derniers Sages d'Israël.
Israël est une démocratie.
Yitzhak Rabin.
Le Président Peres.
Ariel Sharon.
Ehud Olmert.
Benyamin Netanyahou III.
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9 octobre 2023 1 09 /10 /octobre /2023 05:19

« Au-delà des bilans humains, sans précédents côté israélien, le revers infligé à Israël est, comme en 1973, d’une brutalité symbolique inouïe. Le Hamas a porté la guerre sur le sol israélien avec une intensité jamais vue depuis la création de l’État hébreu en 1948. » (Benjamin Barthe, "Le Monde" le 7 octobre 2023).




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On pourra tordre par tous les bouts les mots, leurs significations : après le déclenchement de ce qui est plus qu'un acte terroriste mais un véritable acte de guerre appelé opération Al-Aqsa, Israël est la victime et le Hamas est l'agresseur. Comme l'Ukraine est la victime et la Russie est l'agresseur dans la guerre déclenchée par Vladimir Poutine le 24 février 2022. Il n'y a qu'après un lessivage de cerveau en Russie ou en Iran qu'on aurait l'audace de dire l'inverse. Chez certains, l'audace est d'ailleurs sans limite.

La forte émotion qui s'est évidemment répandue à travers la planète après le début de cette véritable invasion d'Israël par le Hamas pourrait retourner une "opinion internationale" qui était pourtant plutôt favorable au peuple palestinien. Ce n'est évidemment pas l'intérêt de la cause palestinienne de montrer que les bourreaux sont dans le camp palestinien. Plus de 600 morts du côté israélien, voire bien plus, des centaines d'otages civils, des milliers de personnes blessées, et la réaction forcément mécanique de l'armée israélienne fera que les morts et les blessés se compteront aussi du côté de la Bande de Gaza, avec son lot de désespoir, de détresse dans une région du monde qui, depuis trois quarts de siècle, n'a jamais été en paix. Parmi les quelque 500 jeunes participants à un festival musical (appelé aussi rave party), la moitié a été sauvagement assassinée, d'autres ont été pris en otages et servent de boucliers humains. Pratiques de barbares.

Faut-il dire que le Premier Ministre Benjamin Netanyahou n'attendait pas un tel spectacle d'horreur pour justifier sa position très ferme contre le Hamas ? Pourtant, en plus des victimes israéliennes (des journaux iraniens titraient salement : Israël humilié), il n'a pas de quoi se réjouir : malgré une unité nationale qui permet à la nation israélienne de se serrer les coudes face à l'ennemi, qui sera toujours de courte durée, il faudra bien expliquer un jour pourquoi les services de renseignements israéliens n'avaient pas vu venir une opération militaire d'une si grande envergure, sans précédent depuis 1948, sur terre, par mer, et même par les airs au moyen d'ULM. 5 000 roquettes ont été lancées de la Bande de Gaza vers le territoire israélien le 7 octobre 2023, comme pour saluer étrangement le cinquantième anniversaire du commencement de la guerre du Kippour (le 6 octobre 1973), l'agression de l'Égypte contre Israël.

Maintenant, il faut craindre le pire. La réaction de l'armée israélienne va être sans pitié et c'est le peuple palestinien qui trinquera. Le Hamas l'avait-il pensé ? Israël veut assiéger Gaza et détruire définitivement le Hamas. Ce sera long, et surtout, ce sera douloureux, cela va coûter en vies humaines, hélas. Mais Benyamin Netanyahou a-t-il le choix quand son pays est si durement attaqué ? Il l'a répété :
« Nous sommes en guerre (…). L'ennemi paiera un prix sans précédent. ». Sans-précédent.

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Comme le remarque le journaliste du quotidien "Le Monde", cette nouvelle flambée de violences ne ravit pas les pays arabe : « La nouvelle guerre de Gaza aura une résonance inévitablement régionale. Le coup de force du Hamas percute de plein fouet le processus de normalisation israélo-arabe, entamé à l’été 2020, avec la reconnaissance de l’État hébreu par les Émirats arabes unis et Bahreïn, suivis par le Maroc. Une dynamique relancée ces derniers mois par les tractations saoudo-américaines visant à déboucher sur l’ouverture de relations diplomatiques entre le royaume et l’État hébreu. » (Benjamin Barthe). Le seul point qui fait vivre encore un peu d'espoir, c'est que les habitants de la Cisjordanie refusent de suivre le Hamas dans ses délires de bourreau.

En France, le conflit israélo-palestinien hystérise beaucoup le débat public et les réseaux sociaux. Cette nouvelle guerre donne l'occasion plus ou moins larvée d'exprimer un certain antisémitisme, j'aurais tendance à dire, un antisémitisme d'extrême gauche, d'islamo-gauchisme, à ne pas confondre avec l'antisémitisme d'extrême droite (qui se rejoignent tout de même dans la haine).

Faut-il choisir son camp ? La position de la France comme de la plupart des pays, c'est la coexistence pacifique et la stabilité avec deux États, Israël et l'État palestinien. La paix ne peut se construire qu'entre deux belligérants. Mais depuis trois générations, le "monde" est las de ces morts, de ces massacres. En commettant autant d'horreurs en si peu de temps, le Hamas a simplifié, en quelque sorte, l'analyse géopolitique de la situation.

En ce qui concerne la France, l'invasion du Hamas a tué, parmi les centaines de victimes, au moins une ressortissante française, peut-être quelques autres Français dont l'ambassade n'a plus de nouvelles. Prendre position pour le Hamas, c'est clairement prendre position contre la France, prendre position pour le terrorisme islamique et prendre position contre tous nos intérêts tant économiques que culturels. Cette caricature, ce n'est pas moi qui la propose, ce sont les terroristes enragés du Hamas qui nous l'ont imposée. Le choix est donc vite fait.



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Sylvain Rakotoarison (08 octobre 2023)
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