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20 avril 2021 2 20 /04 /avril /2021 03:57

« Je conseille aux jeunes d’essayer beaucoup de choses différentes (…). Il faut tout tenter et, surtout, oser. Le plus grand mécanisme d’obstacle à la réussite est l’autocensure. » (Thomas Pesquet, "Le Monde" le 7 janvier 2019).




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S’il y a bien des héros des temps modernes à promouvoir dans notre société postmoderne, ce sont bien les astronautes, cosmonautes, spationautes. Ils ont pour cadre la planète et pas la nationa, au point même de rompre les manichéismes simplificateurs de la guerre froide (le premier de ces nouveaux héros fut le Soviétique Gagarine adulé en "Occident").

Pour le spationaute français Thomas Pesquet, cet héroïsme prend la marque d’une jeunesse qui semblerait figée dans une sorte d’intemporalité (alors qu’il a quand même maintenant 43 ans) et d’un talent médiatique incontestable. Un humble superhéros. Ce lundi 19 avril 2021, il a tenu une conférence de presse depuis Cap Canaveral, base de lancement aux États-Unis, pour dire au revoir aux Terriens. Il va en effet décoller le jeudi 22 avril 2021 à 12 heures 11 (heure de Paris) pour rejoindre la station spatiale internationale (l’ISS), où il va séjourner pendant six mois avant de revenir. Bien évidemment, comme ses trois compagnons d’équipage (deux Américains et un Japonais), il s’est fait vacciner contre le covid-19.

Les relations qu’il développe avec le grand public sont plus celles d’un champion sportif que d’un grand scientifique, les gens qui lui posaient des questions le tutoyaient naturellement, un tutoiement d’idole et de star.

Certes, il a de gros bras, il est un grand sportif (il le faut pour remplir ses missions), il a même rêvé, enfant, de devenir un nouveau Micheal Jordan, et quand il était jeune, il n’a cessé de faire du sport : judo (ceinture noire), basket, natation, plongée, rugby, parachutisme, alpinisme, voile, etc. : « Les sports collectifs, par exemple, apprennent à la fois la compétition et l’esprit d’équipe. Que fait-on si on est le plus nul de l’équipe ? Ou si, au contraire, on est le meilleur et on trouve que tous les autres ne sont pas assez bons ? Tous ces questionnements, un jeune va y être confronté dans sa vie active. Le sport individuel, lui, apprend le dépassement et la persévérance. ».

Mais Thomas Pesquet n’est pas qu’un grand sportif, il a développé de nombreuses autres qualités et compétences. Il aime aussi la musique (il joue du saxophone), il parle six langues (français, anglais, allemand, russe, mandarin et espagnol ; le russe et l’anglais sont les deux langues officielles de l’ISS), et il a suivi des études scientifiques longues. Il a été formé comme ingénieur en aéronautique à Toulouse (Sup’Aéro), puis a travaillé chez Thalès, puis au CNES (Centre national d’études spatiales), est devenu pilote de ligne, instructeur chez Air France, enfin, il a été sélectionné pour être un spationaute de l’Agence spatiale européenne (ESA) en mai 2009 : 6 candidats retenus pour 8 413 candidats ! Thomas Pesquet est le dixième spationaute français, après notamment Jean-Loup Chrétien, Patrick Baudry, Claudie Haigneré et Jean-François Clervoy.

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La sélection pour devenir spationaute, c’est plus strict que pour devenir énarque, polytechnicien ou normalien ! Thomas Pesquet est l’exemple typique de la réussite sociale par l’éducation, de la fameuse méritocratie républicaine. Petit-fils d’agriculteurs, fils d’enseignants, il n’a jamais eu aucun lien (ni sa famille) avec l’aéronautique et n’a pris la première fois l’avion qu’à l’âge de 20 ans : « Bien travailler à l’école, c’est une clef. Ce n’est pas la seule, bien sûr, mais c’est un vrai tremplin, un accélérateur social, j’en suis l’exemple premier. Je ne suis pas là pour faire la publicité de l’Éducation nationale, mais j’ai eu toutes ces ouvertures grâce au système éducatif. On ne travaille pas pour faire plaisir à ses professeurs ou à ses parents. On travaille pour se donner des chances. ».

Pour Thomas Pesquet, les qualités personnelles l’emportent sur le savoir académique pour être sélectionné par l’ESA : « On n’a pas besoin de cow-boy ou de héros pour la conquête spatiale, mais de gens qui savent travailler en équipe. Pour rester six mois dans la station spatiale internationale à gérer la promiscuité, les nombreuses tâches à réaliser et l’éloignement de chez soi, il faut être un joueur d’équipe. Il faut savoir s’entendre, communiquer, être aussi patient et calme. Ces qualités priment dans mon domaine, mais elles sont importantes dans tous les métiers. Ce n’est pas essentiel d’être le plus intelligent tout le temps. (…) L’équilibre mental est (…) clef, tout comme la capacité à s’adapter. Il s’agit de pouvoir rester soi-même en toutes circonstances. ».

Thomas Pesquet a suivi six années de formation, notamment à la Cité des étoiles, à Moscou, en Russie, où il a appris à piloter le vaisseau Soyouz, au centre spatial de la NASA à Houston, au Texas, ainsi qu’au centre spatial de Cologne, en Allemagne, où il a appris les instrumentations scientifiques et les bases de la médecine théorique et pratique. Sa première mission spatiale fut au bord du Soyouz MS-03 lancé au centre de Baïkonour, au Kazakhstan, le 17 novembre 2016. Il a rejoint la station spatiale internationale (l’ISS) le 19 novembre 2016 et y a séjourné pendant 196 jours. Sa première sortie hors de la station a eu lieu le 13 janvier 2017, une seconde le 24 mars 2017, avant de quitter l’ISS pour atterrir au Kazakhstan le 2 juin 2017.

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À son retour sur Terre, Thomas Pesquet, colonel de l’armée de l’air et de l’espace, a piloté l’Airbus A310 à Toulouse pour faire des vols paraboliques en 2018. Depuis son retour, il jouit d’une très grande popularité, considéré comme l’un des Français préférés par ses compatriotes (classé en quatrième place). Il a participé à beaucoup de projets culturels, des participations à des films, émissions de télévision, livres, bandes dessinées, musique, projets gastronomiques avec des grands chefs, événements sportifs. La raison ? Pendant son premier séjour à l’ISS, il a su garder contact avec la Terre sur des médias grand public (chroniques régulières à la télévision et à la radio), et, surtout, a partagé sa vie sur Internet, ainsi que ses dizaines de milliers de photographies personnelles qu’il a prises depuis l’ISS, en voulant montrer simplement la beauté de notre planète. C’est rare, un humain qui s’émerveille.

Un véritable phénomène de société ! Guillaumette Faure, dans "Le Monde" du 1er décembre 2017, pourrait même décrire une Pesquet-mania : « Sachez qu’il y a en France des gens qui se retrouvent par petits groupes pour dire du bien de Thomas Pesquet. Ils se donnent rendez-vous à Paris pour se redire à quel point il est modeste, gentil. "Et beau aussi", ce qui ne gâte rien. ».

Son vol du 22 avril 2021 est donc sa deuxième mission spatiale, annoncée le 22 janvier 2019 par la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation Frédérique Vidal. La première était lancée grâce à la Russie, la deuxième grâce aux États-Unis, depuis Cap Canaveral, en Floride, dans un vaisseau privé Crew Dragon de SpaceX. Le spationaute a affirmé le 19 avril 2021 que piloter ce vaisseau, c’est comme conduire une voiture très moderne, guidée par GPS. En outre, au cours de la seconde moitié de son nouveau séjour à l’ISS, il sera le commandant de la station, à ce titre, le premier Français et le quatrième Européen à l’être.

Bonne chance à Thomas Pesquet pour son prochain voyage, et bravo à la France et l’Europe pour avoir su former un tel champion de l’Espace !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (19 avril 2021)
http://www.rakotoarison.eu


(La plupart des citations proviennent de l’entretien accordé à Laure Belot et publié dans "Le Monde" le 7 janvier 2019).


Pour aller plus loin :
SpaceX en 2020.
Thomas Pesquet.
60 ans après Vostok 1.
Youri Gagarine.
Spoutnik.
Rosetta, mission remplie !
Le dernier vol des navettes spatiales.
André Brahic.
Les petits humanoïdes de Roswell…
Evry Schatzman.
Le plan quantique en France.
Apocalypse à la Toussaint ?
Le syndrome de Hiroshima.
L’émotion primordiale du premier pas sur la Lune.
Stephen Hawking, Dieu et les quarks.
Les 60 ans de la NASA.
La relativité générale.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20210419-thomas-pesquet.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/thomas-pesquet-bon-courage-au-232457

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2021/04/19/38930024.html




 

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22 janvier 2021 5 22 /01 /janvier /2021 03:19

« Il s’agit d’un effort absolument majeur, qui témoigne avant tout de la volonté du gouvernement et du Président de la République, de faire de la France un des acteurs majeurs de ces technologies au niveau européen et international. » (Communiqué de l’Élysée, le 21 janvier 2021).


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Le Président Emmanuel Macron a visité l’Université Paris-Saclay ce jeudi 21 janvier 2021. Ce n’était pas son premier déplacement dans l’une des universités phares de la France, qui a compté déjà de nombreux Nobel de sciences dures et où sont regroupés de nombreux laboratoires de recherche contribuant à l’excellence scientifique française, pôle exceptionnel du Grand Paris en pleine ébullition avec la perspective de la ligne de métro 18 prévue pour 2026 (dans cinq ans seulement).

Emmanuel Macron a notamment rencontré des étudiants pour leur annoncer quelques mesures importantes visant à rendre aux étudiantes la crise sanitaire plus facile à vivre, tant socialement que psychologiquement (le repas au restaurant universitaire à 1 euro pour tous les étudiants, 20% de présentiel dans les établissements universitaires, création de chèque-psy pour ne pas avancer les frais de consultation d’un psychologue).

Dans sa volonté de ne pas faire seulement de la "gestion de crise covid-19" mais aussi des impulsions pour préparer l’avenir national, Emmanuel Macron a fait le déplacement également pour lancer ce qu’il a appelé la stratégie quantique de la France.

De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’investir massivement dans l’un des domaines scientifiques majeurs du XXIe siècle, à savoir l’informatique quantique. Je vais tenter en quelques trop courts mots d’expliquer très grossièrement l’enjeu.

Depuis l’apparition des ordinateurs (depuis la fin de la guerre et plus particulièrement à partir du début des années 1980 avec le développement des ordinateurs individuels, l’informatique se faisait avec le basique "bit" qui est un composant binaire : soit en position 0, soit en position 1. Toute la programmation et les calculs ne sont qu’une suite logique de bits.

En cinquante ans, les ordinateurs ont bénéficié d’énormes progrès, notamment de la science des matériaux, dans l’électronique, dans l’énergétique, etc. Toute personne âgée de plus 50 ans qui a pu toucher des ordinateurs dans les années 1980 ont pu voir le chemin parcouru : la taille des composants et des ordinateurs, leur rapidité, la capacité des mémoires (vive ou de stockage), tout s’est miniaturisé et s’est "purifié". Plus le matériau du composant est "pur", plus il augmente ses performances physico-chimiques. Plus les circuits imprimés sont fins, plus les équipements associés sont petits, ou à taille constante, plus ils sont puissants.

Beaucoup de technologies ont été développées notamment pour graver plus finement (laser, etc.). Mais on peut comprendre aisément qu’il va y avoir une limite matérielle irréductible : la taille des atomes  (on prévoyait qu’on atteindrait cette dimension en 2020, ce qui est un peu en avance sur la réalité). Actuellement, on en est à des couches d’une dizaine d’atomes. Il va donc être compliqué de renforcer la puissance des ordinateurs sans technologie disruptive, en restant dans l’informatique qu’on pourrait qualifier de classique.

Deux voies sont possibles pour lever ce verrou matériel, il y en a peut-être d’autres d’ailleurs. Le premier que je n’indique que par simple intérêt, c’est l’ordinateur biologique : l’utilisation de synapses ou même d’ADN pourrait contourner les limites de la matière en permettant de faire des opérations logiques complexes sur un "matériel biologique" plus compact que les simples matériaux utilisés jusqu’alors.

L’autre voie, très importante depuis une quarantaine d’années (proposée notamment par le célèbre Prix Nobel Richard Feynmann  en 1982), et renforcée depuis une vingtaine d’années, c’est l’ordinateur quantique.

Qu’est-ce que l’informatique quantique ? Eh bien, au lieu d’être constitué de "bits" qui ne peuvent dire que 0 ou 1, l’ordinateur quantique est constitué de "qubits", autrement dit, de "bits quantiques" qui auraient bien plus de possibilités qu’être 0 ou 1, il y aurait en fait une grande possibilité d’états probabilistes. En théorie, le qubit pourrait même transporter une infinité d’informations (une infinité de combinaisons), ce qui pourrait rendre un ordinateur doté de qubits des centaines de milliards de fois plus puissant que les ordinateurs actuels.

Un ordinateur quantique calcule de manière parallèle et pas séquentielle. Sur l’article sur le sujet, Wikipédia cite Thierry Breton. À l’époque, il était le patron d’Atos (une entreprise qui a beaucoup investi avec Bull et le CEA dans l’informatique quantique) et aussi le président de l’ANRT (Association nationale de la recherche et de la technologie). Il évoquait ce sujet passionnant sur France Culture le 27 juin 2017 en prenant un exemple pour servir son analogie. On cherche dans une salle de mille personnes celles qui mesurent plus de 1,80 mètre et qui savent parler anglais. L’ordinateur classique va interroger chaque personne succeessivement et leur poser les deux questions, mettre un oui ou un non aux deux colonnes (taille, anglais) et ensuite, il va sélectionner ceux qui ont deux oui. L’ordinateur quantique, lui, va juste interroger la salle en demandant que ceux qui mesurent plus de 1,80 mètre et qui parlent anglais lèvent la main. On a immédiatement l’information souhaitée. C’est un peu cela, l’informatique quantique, un traitement généralisé en parallèle, d’autres algorithmes plus futés pour réduire leur durée, mais aussi une base matérielle à effet quantique.

Bien entendu, c’est l’idée théorique, il y a énormément de technologies déployées pour réaliser un ordinateur quantique. On peut utiliser de nombreux effets, dont l’intrication quantique. Pour être en zone d’effet quantique, il faut se débarrasser la plupart du temps des agitations atomiques dues à la température et donc être proche du zéro absolu (0 Kelvin, soit –273,15°C). Cela nécessite donc un environnement industriel lourd (un liquéfacteur pour fournir en hélium liquide).

Gagner en puissance de calculs, c’est-à-dire en gros, faire en quelques secondes ce que nos ordinateurs actuels ne pourraient faire qu’en plusieurs milliards d’années, c’est nous ouvrir de très nombreuses portes sur le progrès : meilleure modélisation de la météo, reconnaissance vocale, fonctionnement de l’univers, modélisation moléculaire plus complexe que la simple molécule de dihydrogène, et même, puisqu’on est en pleine pandémie, découverte de nouveaux médicaments.

Mais il y a aussi des inconvénients, car cette puissance de calculs peut aussi servir le "mal" et pas seulement le "bien" : les protections sur les transactions bancaires, sur les processus nucléaires, etc. pourraient être facilement détruites avec ces ordinateurs quantiques. Parallèlement au développement de cette nouvelle génération d’ordinateurs, il faut donc développer ce qu’on appelle la cryptographie quantique.

La France compte des laboratoires d’excellence dans ce domaine, en particulier à Paris-Saclay et à Grenoble. Le physicien français Serge Haroche a même reçu le Prix Nobel de Physique en 2012 sur ce sujet (avec son collègue américain David Wineland).

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Emmanuel Macron, peut-être par sa génération, mais pas par sa formation, est sans doute le Président de la République qui a le mieux compris les enjeux des hautes technologies. On l’a vu pour le développement des vaccins : ce n’est plus des grands groupes, comme dans les années 1960 et 1970, qui arrivent le mieux et le plus rapidement à sortir une technologie nouvelle, ce sont d’abord des petites structures, des start-up, qui ensuite s’associent à des groupes industriels pour leur phase de production.

À Paris-Saclay, le Président de la République a d’abord rappelé les mesures pour doper la recherche scientifique depuis 2017 : la loi de programmation pour la recherche (c’est sans précédent, et j’espère que cette loi sera renouvelée par les majorités suivantes), le programme d’investissements d’avenir, le plan France Relance, et enfin, le plan sur l’intelligence artificielle lancé à la suite du rapport remis le 29 mars 2018 par le député et mathématicien Cédric Villani.

Le plan quantique a pour objectif de mettre à la disposition des chercheurs, des start-up et des industriels, de nouveaux moyens dont la formation, de développer l’informatique quantique et d’investir massivement dans les technologies associées : communications, capteurs et cryptographie.

D’un point de vue financier, Emmanuel Macron a posé 1,8 milliard d’euros sur cinq ans, dont 1,050 milliard d’euros provenant pour moitié de l’État (programme d’investissements d’avenir) et pour moitié d’établissements affiliés (CEA, CNRS, INRIA), 200 millions d’euros de crédits européens et 550 millions d’euros du secteur privé (c’est un classique du genre qu’un représentant de l’État annonce un financement avec une partie qui ne vient pas du secteur public, donc, qu’il n’a pas).

Si on reste en dépenses publiques, cela signifie que la France va passer en rythme annuel de 60 millions d’euros à 200 millions d’euros, soit plus du triple, ce qui n’est pas négligeable, même si cela ne correspond qu’à une grosse moitié des dépenses publiques américaines (400 millions de dollars). Ces dotations placeront la France en troisième position d’investisseur public sur le quantique derrière les États-Unis et la Chine. Pour avoir une petite idée de l’évolution dans le temps, en 2005, seulement 75 millions d’euros avaient été consacrés en dépenses publiques aux États-Unis pour le quantique, 25 millions d’euros au Japon, 12 millions d’euros au Canada, 8 millions d’euros en Europe et 6 millions d’euros en Australie.

Cette enveloppe budgétaire permettra de financer notamment une centaine de bourses de thèse, une cinquantaine de bourses post-doctorales, et le recrutement d’une dizaine d’excellents chercheurs étrangers en séjour pendant une année dans un laboratoire français.





La répartition du 1,8 milliard d’euros selon les secteurs est le suivant : 350 millions d’euros pour les simulateurs quantiques, 430 millions d’euros pour les prototypes d’ordinateur quantique, 150 millions d’euros pour la cryptographie post-quantique, 250 millions d’euros pour les capteurs quantiques, 320 millions d’euros pour les communications quantiques. Le reste est consacré aux technologies à développer pour construire des machines quantiques comme 300 millions d’euros pour la cryogénie. Le quantique, c’est en effet, avant tout, l’étude de l’ultra-froid et de l’infiniment petit. Hypermétropes frileux s’abstenir !

Ce qui a été bien compris par le gouvernement, au-delà du besoin en investissements sonnants et trébuchants, c’est l’important d’une synergie complète entre les grands laboratoires universitaires ou issus de grands organismes publics, des industries, les start-up et les grandes entreprises, sans oublier, essentielles, les relations internationales qui oscillent toujours entre coopération et concurrence.

C’est donc très heureux qu’avec ce plan quantique, la France, fort de son potentiel très fort de recherche, se donne les moyens de se placer parmi les grands leaders mondiaux d’un des domaines essentiels à horizon 2030 voire 2050. On aura peut-être oublié qui a pris cette décision, mais on n’oubliera pas qu’elle a été prise…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 janvier 2021)
http://www.rakotoarison.eu



Pour aller plus loin :
1,8 milliard d’euros pour le plan quantique en France.
Apocalypse à la Toussaint ?
Bill Gates.
Benoît Mandelbrot.
Le syndrome de Hiroshima.
Au cœur de la tragédie einsteinienne.
Pierre Teilhard de Chardin.
Jacques Testart.
L’émotion primordiale du premier pas sur la Lune.
Peter Higgs.
Léonard de Vinci.
Stephen Hawking, Dieu et les quarks.
Les 60 ans de la NASA.
Max Planck.
Georg Cantor.
Jean d’Alembert.
David Bohm.
Marie Curie.
Jacques Friedel.
Albert Einstein.
La relativité générale.
Bernard d’Espagnat.
Niels Bohr.
Paul Dirac.
Olivier Costa de Beauregard.
Alain Aspect.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20210121-strategie-quantique.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/paris-saclay-la-strategie-230377

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1 novembre 2020 7 01 /11 /novembre /2020 03:36

« La peur est notre émotion la plus profonde et la plus forte, et celle qui se prête d’elle-même à la création d’illusions défiant la nature. » (Howard Lovecraft, 1937).


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Nous avons eu la catastrophe nucléaire de Tchernobyl le 26 avril 1986. Nous avons eu les deux Tours infernales avec les attentats du World Trade Center le 11 septembre 2001. Nous avons eu le tsunami géant dans l’Océan Indien le 26 décembre 2004. Nous avons eu la catastrophe nucléaire de Fukushima le 11 mars 2011. Nous avons la pandémie de covid-19 qui mobilise l’attention de l’ensemble des pays et des peuples du monde depuis janvier 2020. Aurons-nous ce lundi 2 novembre 2020 une nouvelle catastrophe planétaire, le choc d’un astéroïde contre notre bonne vieille Terre ?

Le 31 octobre 2020, pleine lune pour Halloween dont les enfants sont privés de défilé pour cause de reconfinement. Le 1er novembre 2020, c’est la Toussaint. Pour les chrétiens, ce n’est pas la fête des morts mais la fête des vivants, la fête de tous les saints. Le gouvernement a exceptionnellement accepté qu’il y ait des messes à cette occasion. Le 2 novembre 2020, c’est la journée des défunts. Enfin, le lendemain, c’est l’élection présidentielle aux États-Unis.

Cette journée des défunts est particulière cette année. D’abord, à cause de la forte mortalité du covid-19. Le monde est éprouvé, avec près de 1,2 million de décès depuis le début de la pandémie, et hélas, tout laisse entendre que ce qu’on appelle la "seconde vague" sera bien plus meurtrière que la première vague du printemps dernier parce que les mois qui viennent vont être froid dans l’hémisphère nord. La France hélas, a été particulièrement touchée par le coronavirus SARS-Cov-2 (plus de 36 000 décès) au point de devoir subir un deuxième confinement après l’explosion vertigineuse du nombre de malades nécessitant une assistance respiratoire depuis quelques semaines.

Depuis le début de l’été 2020, la pandémie ne suffit plus à cauchemarder : le Web bruisse en inquiétudes diverses et variées sur ce lundi 2 novembre 2020. Non, pas à cause de la rentrée scolaire (une vraie rentrée scolaire malgré le confinement) mais à cause d’un astéroïde détecté il y a deux ans et qui s’approche vertigineusement de notre planète Terre.

Effectivement, et c’est très "fréquent", des astéroïdes peuvent s’approcher de la Terre dans leur trajectoire spatiale, dans leur "petit" tour galactique. L’hypothèse bien documentée d’une chute d’un astre extraterrestre sur la Terre pour expliquer la disparition des dinosaures il y a 65 millions d’années peut expliquer cette nouvelle peur du XXIsiècle.

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A contrario, c’est normal aussi d’avoir quelques réticences à croire aux premières rumeurs venues de l’Internet quand on évoque la fin du monde. Les Philippulus (du nom du prédicateur de malheur de "L’Étoile mystérieuse", dans les Aventures de Tintin de Hergé) sont nombreux et je me souviens de la crainte stupide du 21 décembre 2012 sous prétexte que les Mayas n’auraient pas continué leur calendrier. Comme si, ici et maintenant, nous allions subir le même sort de fin du monde le 31 décembre de chaque année sous prétexte que nos calendriers s’arrêtent le 31 décembre, raisonnement identique en poussant jusqu’au 30 juin suivant pour les calendriers scolaires (je n’ai pas dit solaires).

D’ailleurs, pour les amateurs de coïncidences, parmi les connaissances de la civilisation maya, il y a un site archéologique au Guatemala qui a été découvert en 1996 et qui a été appelé, cela ne peut pas s’inventer, "Corona" (à ceux, crédules, qui pensent que le covid-19 était connu dès 2004 simplement parce qu’il y a des publications scientifiques et des brevets qui parlent de coronavirus, mais ce n’était pas le même, on pourrait affirmer que c’était même connu bien avant !).

Revenons plus sérieusement à notre astéroïde du 2 novembre 2020. Découvert le 3 novembre 2018 lors de son dernier passage (premier passage observé), il s’appelle 2018 VP1 et son diamètre ne mesure qu’environ 2 mètres. Cela a suffi à de nombreuses personnes pour exprimer leur peur, jusqu’à construire des bunkers (on imagine que si cela avait fait disparaître une espèce aussi costaude que les dinosaures, le moindre bunker aurait été détruit dès le début de l’impact), ou à s’inscrire à des stages de survivalisme (mais là, on serait plutôt dans le recrutement pour sectes).

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Selon Jonti Horner, professeur d’astrophysique à l’Université du Queensland du Sud en Australie, l’astéroïde a été observé vingt et une fois en treize jours, ce qui a permis de placer treize points sur une trajectoire que les chercheurs ont donc pu modéliser avec une certaine précision.

Pour rassurer tous les Terriens, la NASA a publié un tweet le 23 août 2020 qui n’a fait que confirmer, pour certains internautes, le risque d’une collision : « Asteroid 2018 VP1 is very small, approx. 6.5 feet, and poses no threat to Earth! It currently has a 0.41% chance of entering our planet’s atmosphere, but if it did, it would disintegrate due to its extremely small size. ». Selon ces explications de NASA Asteroid Watch (le service de surveillance des géocroiseurs de la NASA), il n’y a donc (je traduis) que 0,41% chance que l’astéroïde atteigne l’atmosphère terrestre, et quand bien même l’atteindrait-elle que ce ne serait pas très grave puisque l’astre serait désintégré avant même d’atterrir au sol terrestre.

On se souvient d’ailleurs de la chute d’une météorite le 15 février 2013 dans le ciel de la ville russe de Tcheliabinsk, dans l’Oural ; l’astre avait un diamètre d’environ 19 mètres (beaucoup plus gros que 2018 VP1) et n’avait été détecté par aucun radar, ce qui a produit une énorme explosion à quelques dizaines de kilomètres au-dessus du sol et provoqué de gros dégâts et surtout, a blessé plus de 1 000 personnes. L’explosion a libéré une énergie équivalente à trente fois celle de la bombe nucléaire qui a détruit à Hiroshima.

Pour ce lundi 2 novembre 2020, il sera impossible de prédire à quel endroit exact du Globe le 2018 VP1 va "frôler" la Terre, ni à quelle heure, mais les calculs (qui peuvent se tromper) ont montré que l’astéroïde passerait a priori à 3,7 millions de kilomètres de la Terre, soit (très grossièrement) environ 10 fois la distance entre la Terre et la Lune. Dans les calculs, la distance minimale potentielle du passage de 2018 VP1 serait de 1 300 kilomètres de la surface terrestre, et dans ce pire scénario, l’astre resterait trop petit pour provoquer des dégâts.

Trois raisons donc de ne pas s’inquiéter : 1° l’astéroïde va passer trop loin de la Terre pour avoir un effet ; 2° dans le cas où il s’écraserait quand même contre la Terre, il serait détruit avant même d’arriver au sol ; 3° et même dans le cas où il ne serait pas détruit, il y aurait encore peu de chance qu’il tombe sur une zone habitée, puisque au moins 71% de la surface de la Terre est recouverte d’océans (sans compter les montagnes, les forêts et les déserts).

Du reste, des passages d’astéroïde à proximité de la Terre ne sont pas nouveaux dans l’histoire spatiale et en raison de la finesse des instruments d’observation et également des programmes d’observation et de surveillance, on les repère désormais plus nombreux ces dernières années, même si on ne les repère pas tous. Ainsi, selon le programme de surveillance des géocroiseurs de la NASA, on peut détecter plus de 90% des astres de diamètre supérieur à 1 kilomètre, mais seulement 25% lorsque le diamètre est compris entre 140 mètres et 1 kilomètre.

Ainsi, le 13 novembre 2019, l’astéroïde 2002 NT7 d’un diamètre de près de 2 kilomètres est passé à 61 millions de kilomètres de la Terre, soit quasiment la distance entre la Terre et Mars en été 2018 (distance certes exceptionnelle). Notons cependant que la collision d’un astéroïde d’une telle taille avec la Terre serait une véritable catastrophe, capable de détruire un continent et de provoquer un changement climatique global. (Qu’avez-vous fait le 13 novembre 2019 ?).

Le passage d’un astre le plus proche de la Terre a eu lieu le 16 août 2020 à 6 heures 08 (heure de Paris) avec l’astéroïde 2020 QG qui est passé à moins de 3 000 kilomètres de la Terre (2 950 exactement) au-dessus de l’Océan Indien et pas très loin de l’Antarctique. Tony Dunn a tweeté le lendemain, 17 août 2020 : « Newly-discovered asteroid ZTF0DxQ passed less than 1/4 Earth diameter yesterday, making it the closest-known flyby that didn’t hit our planet. ». (Qu’avez-vous fait le 16 août 2020 ?). D’un diamètre compris entre 2 et 6 mètres et d’une vitesse de 12,3 kilomètres par seconde (soit plus de 44 000 kilomètres par heure), cet astéroïde ne présentait pourtant aucun danger pour la vie humaine car en cas de collision, il se serait désintégré en pénétrant dans l’atmosphère terrestre.

Donc, don’t worry !!
(et bonne Toussaint).


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Sylvain Rakotoarison (31 octobre 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Apocalypse à la Toussaint ?
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Peter Higgs.
Léonard de Vinci.
Stephen Hawking, Dieu et les quarks.
Les 60 ans de la NASA.
Max Planck.
Georg Cantor.
Jean d’Alembert.
David Bohm.
Marie Curie.
Jacques Friedel.
Albert Einstein.
La relativité générale.
Bernard d’Espagnat.
Niels Bohr.
Paul Dirac.
Olivier Costa de Beauregard.
Alain Aspect.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20201102-asteroide-terre.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/apocalypse-a-la-toussaint-228251

https://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/10/31/38621140.html







 

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14 octobre 2020 3 14 /10 /octobre /2020 03:05

« Dans un monde toujours plus complexe, les scientifiques ont besoin de deux outils : des images aussi bien que des nombres, de la vision géométrique aussi bien que de la vision analytique. » (Benoît Mandelbrot et Richard L. Hudson, "Une approche fractale des marchés", éd. Odile Jacob, 2005).



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Le grand mathématicien Benoît Mandelbrot est mort il y a dix ans, le 14 octobre 2010, à Cambridge dans le Massachusetts (États-Unis), terrassé par la maladie à presque 86 ans (né le 20 novembre 1924 à Varsovie). Couvert de distinctions et de récompenses internationales prestigieuses, il est l’un des scientifiques français les plus importants dans la seconde moitié du Vingtième siècle, mais il est allé faire ses recherches …principalement aux États-Unis, pays plus facile pour aller le plus loin possible dans la science, comme, du reste, la nouvelle Prix Nobel de Chimie française (2020).

Le 24 septembre 2010 sur Arte, était diffusé un documentaire fort intéressant sur la géométrie intitulé "Fractales, à la recherche de la dimension perdue" (réalisé par Bill Jersey et Michael Schwarz). Et dans ce film, on y parlait d’un des objets mathématiques les plus intéressants récemment inventés : les fractales. Parmi les plus jolies figures, il y avait l’ensemble de Mandelbrot, qui a pour particularité de se reproduire toujours avec la même figure quand on la zoome en permanence (c'est l'effet d'autosimilarité). Un peu à l’instar de l’ADN qui reproduit l’un et le tout dans chaque organe.

Cette figure a été obtenue pour la première fois le 1er mars 1980 dans un laboratoire d’IBM à New York. La figure est d’autant plus connue qu’elle a été adoptée par beaucoup de monde, des chanteurs, des publicitaires, etc.

La figure :

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Un point de zoom de cette figure :

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Des zooms de zooms :

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(Ces trois figures proviennent de Wikipédia).


L’animation sur Wikipédia résume assez bien ce concept homothétique : cliquer ici.

L’équation de la figure est assez simple et représente l’ensemble des nombres complexes c tels que la suite de nombres complexes définie ainsi :

z(0) = 0
z(n+1) = z(n)2 + c, c étant un nombre complexe constant.

Le 2 après z(n) correspond au carré, je le précise dans le cas où sa mise en forme comme exposant n’aurait pas été prise en compte.

…tels que cette suite, donc, présente un module borné, c’est-à-dire tels que si l’on fait tendre n vers l’infini, le module de la suite z(n) ne s’enflamme pas vers l’infini.

On peut aussi définir d’autres ensembles en considérant non pas au carré mais à la puissance p le terme z(n) ou encore en considérant c non pas comme un nombre complexe mais un nombre plus large (de dimension quatre, par exemple, un quaternion).

Ces ensembles de Mandelbrot sont le développement particulier d’autres fractales inventées en 1918 par le mathématicien français Gaston Julia (1893-1978) appelées ensembles de Julia.

L’ensemble de Julia est l’ensemble des complexes z(0) (qui peuvent être non nuls) pour lesquels le module de la suite z(n) est borné. L’ensemble de Mandelbrot donne tous les paramètres c de la famille des ensembles de Julia qui sont connexes (c’est-à-dire, qui sont des figures "d’un seul morceau").

On peut voir la relation entre les deux familles d’ensembles (Mandelbrot et Julia) en téléchargeant cette publication de Lei Tan : "Similarity between the Mandelbrot set and Julia sets" (1990).

À quoi cela sert-il ? Cela sert surtout à mettre une représentation mathématique sur les fluctuations. Et là, il y a beaucoup d’applications, de la forme des poumons aux prévisions financières en passant par l’hydrologie, le contour du littoral et même la structure des récits. Certains les ont utilisées aussi la communication sans fil, la miniaturisation des antennes de télécommunications, la cartographie, la lutte contre le cancer, la lutte contre le réchauffement climatique, etc. L’informaticien Loren Carpenter s’en est aussi inspiré pour la première séquence de cinéma en images de synthèse (dans "Star Trek II" sorti aux États-Unis le 4 juin 1982).

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L’inventeur de ces ensembles, c’est justement ce mathématicien Benoît Mandelbrot. D’origine polonaise et basé à la fois aux États-Unis et en France, il a été l’un de grands mathématiciens de notre époque malgré la faible reconnaissance qu’il a eue. Neveu d’un professeur au Collège de France, il fut polytechnicien (après une préparation dans le prestigieux lycée du Parc à Lyon), et quitta la France pour les États-Unis afin d’avoir plus de liberté de réflexion. Il fut professeur à Yale et au CNAM, alternant des périodes américaines et françaises.

Son idée créatrice, c’était de se focaliser sur les fluctuations aléatoires des phénomènes, rarement prises en compte par les scientifiques. René Thom (qui a développé la théorie du chaos) travailla également sur ce sujet (ainsi que le physicien quantique Léon Brillouin qui s’est intéressé à la théorie de l’information et a fait, à la suite d’une livre en 1964, une grande publicité à Mandelbrot qui devint célèbre aux États-Unis ; Brillouin, lui aussi, fut d’ailleurs un Français peu reconnu qui préféra émigrer aux États-Unis).

C’est Benoît Mandelbrot qui a inventé le mot même de fractale en 1974 pour désigner une figure géométrique qui se répète par homothétie interne (du latin "fractus" qui signifie "irrégulier", "brisé").

Dans une interview au journal "Le Monde" du 18 octobre 2009, de passage à Paris pour l’excellent film documentaire "Fractales, à la recherche de la dimension cachée" (cité plus haut), Benoît Mandelbrot insistait lourdement sur l’absence de démarche scientifique des milieux financiers (il avait déjà alerté dès 1964 et encore en 2005 avec son livre "Une approche fractale des marchés", éd. Odile Jacob, cité plus haut aussi).

Pour lui, tout est parti d’une théorie mathématique trop simpliste et vieille de 1900 : « Cette théorie ne prend pas en compte les changements de prix instantanés qui sont pourtant la règle en économie. Elle met des informations sous le tapis. Ce qui fausse les moyennes. Cette théorie affirme donc qu’elle ne fait prendre que des risques infimes, ce qui est faux. Il était inévitable que des choses très graves se produisent. Les catastrophes financières sont souvent dues à des phénomènes très visibles, mais que les experts n’ont pas voulu voir. Sous le tapis, on met l’explosif ! ».

Avec les nombreux nouveaux produits financiers, très sophistiqués, les financiers n’ont pas su prendre la mesure exacte du risque à long terme qu’il faisait prendre à leur banque ou à leurs clients. Pendant de nombreuses années, Benoît Mandelbrot demandait aux patrons des banques qu’il rencontrait régulièrement de recruter des chercheurs pour faire des mathématiques fondamentales. Non seulement il n’a pas été écouté mais les docteurs qu’il avait formés le reniaient également pour réussir leur carrière dans la finance !

Benoît Mandelbrot était en train de rédiger son autobiographie, pour raconter une existence finalement pas si éloignée de celle d’un Georges Charpak, quand la grande faucheuse est venue lui couper l’herbe sous les pieds… à grands coups de fractales.















Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (11 octobre 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Publication : Tan, Lei. "Similarity between the Mandelbrot set and Julia sets". Comm. Math. Phys. 134 (1990), no 3, 587-617.
Benoît Mandelbrot.
Le syndrome de Hiroshima.
Au cœur de la tragédie einsteinienne.
Pierre Teilhard de Chardin.
Jacques Testart.
L’émotion primordiale du premier pas sur la Lune.
Peter Higgs.
Léonard de Vinci.
Stephen Hawking, Dieu et les quarks.
Les 60 ans de la NASA.
Max Planck.
Georg Cantor.
Jean d’Alembert.
David Bohm.
Marie Curie.
Jacques Friedel.
Albert Einstein.
La relativité générale.
Bernard d’Espagnat.
Niels Bohr.
Paul Dirac.
Olivier Costa de Beauregard.
Alain Aspect.

_yartiMandelbrotBenoit06



https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20201014-benoit-mandelbrot.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/les-fractales-explosives-de-benoit-227779

https://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/10/12/38586972.html


 

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15 septembre 2020 2 15 /09 /septembre /2020 01:14

(vidéo)

Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200903-castex.html



Discours du Président de la République Emmanuel Macron le 14 septembre 2020 à l'Élysée pour la French Touch





Emmanuel Macron, le 14 septembre 2020 à l'Éysée, Paris.

Source : elysee.fr
http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200914-discours-macron.html




 

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3 août 2020 1 03 /08 /août /2020 03:00

« La force d’où le Soleil tire sa puissance a été lâchée contre ceux qui ont déclenché la guerre en Asie. (…) Si [les dirigeants japonais] n’acceptent pas maintenant nos conditions, ils doivent s’attendre à un déluge de destructions comme il n’en a jamais été vu de semblable sur cette Terre. Après cette attaque aérienne suivront des forces marines et terrestres en nombre et en puissance telles qu’ils n’en ont jamais vues et avec les aptitudes au combat dont ils sont déjà bien conscients. » (Harry Truman, le 6 août 1945 à Washington).


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Il y a 75 ans, le 6 août 1945 à 8 heures 16 (heure locale), la première bombe nucléaire, larguée par un bombardier américain, a éclaté au centre de la ville japonaise de Hiroshima (350 000 habitants), à environ 600 mètres d’altitude. 75 000 personnes furent tuées sur le coup, au total, près de 170 000 auraient péri. La bombe, appelée "Little Boy", a dissipé l’énergie de l’équivalent de 15 000 tonnes de TNT, soit environ 63 milliards de joules. Une seconde bombe nucléaire, appelée "Fat Man", a été larguée à Nagasaki (200 000 habitants) le 9 août 1945 vers 11 heures et elle a explosé à 500 mètres d’altitude, provoquant la mort de 80 000 personnes et la formation d’une colonne de fumée de 18 kilomètres de hauteur. La bombe de Nagasaki avait une puissance de 20 000 tonnes de TNT et a ciblé des infrastructures militaro-industrielles.

L’explosion des deux bombes nucléaires, les deux seules employées de l’histoire du monde hors essais nucléaires, fut le résultat du rejet de l’ultimatum du 26 juillet 1945 prévu par la Conférence de Potsdam qui a réuni, du 17 juillet au 2 août 1945, les trois chefs d’État vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, Staline (URSS), Harry Truman (USA) et Winston Churchill, remplacé ensuite par Clement Attlee (UK). Staline profita de la désorganisation du Japon pour envahir la Mandchourie le 9 août 1945.

Incontestablement, l’explosion des deux bombes nucléaires par l’armée américaine sur les nombreux habitants de deux grandes villes japonaises fut l’une des deux innovations les plus cruelles de la Seconde Guerre mondiale, au point de bouleverser complètement tant la pensée militaire et internationale que la philosophie sur le mal chez les humains. L’autre sinistre innovation, ce fut la Shoah où 6 millions de Juifs furent déportés et massacrés d’une manière quasi-industrielle. À ma connaissance, aucun complotiste n’a encore nié l’explosion de ces deux bombes nucléaires.

Le débat ne me paraît pas clos sur la nécessité de faire exploser ces deux bombes, et en particulier la seconde, à Nagasaki. Les États-Unis, en s’en prenant aux populations civiles, savaient qu’ils commettaient un crime contre des centaines de milliers de personnes innocentes. Ces bombardements ont été réalisés dans un contexte très difficile où le Japon refusait de capituler (il ne le fit que le 2 septembre 1945), et l’armée américaine a pilonné de nombreuses villes japonaises, faisant selon certains un million de victimes. Ce contexte peut-il relativiser l’horreur des explosions nucléaires ? Sûrement pas, car elles ont montré une efficacité économique et technique particulièrement redoutable.

Qu’y avait-il dans la tête du Président Harry Truman lorsqu’il a ordonné le largage de ces deux bombes ? Une chose qui semble à peu près établie est que la motivation première ne semblait pas grand-chose à voir avec la capitulation japonaise, mais plutôt avec une démonstration de force pour marquer les esprits, et ils ont été marqués, sur la puissance redoutable de l’arme nucléaire et l’avantage militaire décisif des États-Unis qui l’avaient développée.

Pendant plus d’une quarantaine d’années, le monde a donc vécu dans cette guerre froide synonyme d’équilibre de la terreur, avec le risque du déclenchement d’une guerre thermonucléaire massive. Au fur et à mesure des développements technologiques, cinq grandes nations ont acquis la bombe nucléaire : les États-Unis, l’URSS (maintenant la Russie), la France, le Royaume-Uni et la Chine. À eux doivent être ajoutés Israël, l’Inde, le Pakistan et la Corée du Nord, qui se sont invités à la table nucléaire, tandis que l’Afrique du Sud y a renoncé et que l’Iran officiellement aussi.

Comme tous mes contemporains, je suis né dans ce monde terrible de la dissuasion nucléaire où le moindre faux-pas diplomatique pourrait faire plonger la planète dans un effroyable chaudron nucléaire. Deux dates furent particulièrement tendues, que je ne détaillerais pas : la crise des missiles soviétiques à Cuba en 1962 (John Kennedy et Nikita Khrouchtchev), et la crise des missiles américains en Allemagne fédérale en 1983 (Ronald Reagan et Youri Andropov). Le Président américain avait alors obtenu le soutien précieux de la France avec cette formule devenue célèbre de François Mitterrand le 12 octobre 1983 à Bruxelles, lors d’un dîner officiel avec le roi des Belges : « Je suis, moi aussi, contre les euromissiles. Seulement, je constate des choses tout à fait simples. Dans le débat actuel, le pacifisme, et tout ce qu’il recouvre, il est à l’Ouest et les euromissiles, ils sont à l’Est. Et je pense qu’il s’agit là d’un rapport inégal. ».

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Enfant, comme tous les autres enfants, j’ai donc vécu sous cette psychose de la dissuasion nucléaire et du risque d’une destruction totale de la planète Terre. Avec tout le stock de bombes, avec leurs ogives nucléaires, il y aurait de faire exploser plusieurs fois la Terre. En 2018, il y aurait eu apparemment dans le monde un stock total de 14 000 têtes nucléaires (diversifiées), selon la Federation of American Scientists. Depuis la fin de la guerre froide, les stocks se réduisent (ne serait-ce parce que cela coûte très cher de maintenir opérationnelles toutes les têtes), plusieurs traités internationaux ont organisé le démantèlement de nombreuses armes nucléaires. Au plus fort de la guerre froide, dans les années 1980, il devait y avoir autour de 70 000 têtes nucléaires.








Cette psychose qui semble aujourd’hui s’éloigner peu à peu, malgré l’Iran, malgré la Corée du Nord, malgré l’Inde et le Pakistan (l’angoisse serait plutôt pour des attentats nucléaires, même si depuis la chute de l’URSS, aucune ogive nucléaire n’a encore servi à des fins terroristes), m’a paru, au fil de ma maturité et de mes connaissances, de plus en plus absurde.

En fait, je pense qu’il y a un côté hyperprétentieux de l’être humain (son côté prométhéen) de croire qu’il peut dévaster lui-même une planète comme la Terre. Planète d’une masse d’environ 6 x10(puissance 24) kg (c’est ainsi que je noterai les puissances de 10 pour être sûr d’être compris avec toutes les typographies), d’un rayon d’environ 6 400 km. C’est un objet gigantesque, on a beau être 7,8 milliards d’êtres, on a beau être intelligents, technologues, scientifiques, industriels, finalement, à l’échelle planétaire, on ne vaut pas grand-chose, et la crise du covid-19 nous le rappelle d’ailleurs amèrement, un petit bout d’ARN de rien du tout (mais particulièrement mortel) est capable de faire arrêter de tourner le monde humain pendant de nombreux mois.

Alors, j’ai essayé de faire un petit calcul (qui vaut ce qui vaut) pour savoir si nous, humains évolués (évolués dans le sens prométhéen du terme), nous sommes vraiment capables de faire exploser la Terre par nos propres bêtises. Il faut donc faire deux calculs. Celui des forces dont nous disposons, et celui des forces dont nous devons avoir besoin. J’écris force mais il faut bien sûr penser énergie.

Le premier calcul est le plus simple. Bien sûr, l’arme nucléaire paraît la meilleure méthode. Alors, pour tenter de majorer les forces dont nous disposons, prenons le stock maximal dont nous avons disposé dans l’histoire du monde, à savoir 70 000 têtes nucléaires (en vérité, il n’y a plus que le cinquième). L’idée est de majorer. Comme ces têtes étaient diverses et variées, voyons grand et considérons que chaque tête correspond à la puissance de la bombe nucléaire la plus puissante que l’homme a pu développer, c’est-à-dire la Tsar Bomba (dite "Gros Ivan"), développée par l’URSS et qui a explosé le 30 octobre 1961 à 11 heures 32 (heure locale) en Nouvelle-Zemble, dissipant l’équivalent de 57 millions de tonnes de TNT, provoquant un champignon de fumée de 64 km de hauteur et de 40 km de diamètre, visible à plus de 1 000 km !

Une telle bombe a dissipé l’énergie d’environ 2,4 x10(puissance 14) joules. Si l’on admet qu’on aurait pu en disposer de 70 000 (ce qui est très loin d’avoir été le cas, en moyenne, une bombe H fait plutôt "seulement" l’équivalent d’une mégatonne de TNT, presque deux ordres de grandeur de moins), cela aurait apporté un potentiel d’énergie de 1,7 x10(puissance 19) joules.

Le second calcul est plus compliqué, à savoir quelle serait l’énergie minimale (ici, il faut la minorer) pour pouvoir faire exploser la planète Terre ? Il faut en fait prendre en compte l’énergie gravitationnelle (énergie potentielle de gravitation) et éventuellement, l’énergie des morceaux de Terre qui s’en éloigneraient avec une certaine vitesse, suffisante pour dépasser l’attraction gravitationnelle de la Terre. La vitesse de libération est à peu près égale à 10 000 km/s (un peu plus en fait, mais je minore l’énergie). Il faut faire une intégrale puisque la masse varie (diminue) à mesure que la planète explose (que le rayon diminue).

Bon, pour ce calcul, j’ai fait un calcul qui s’approchait bien mais ici, je ne vais pas me mouiller et je vais reprendre plus simplement l’estimation d’un spécialiste : dans un article sur Futura-Science publié le 5 mars 2020, l’astrophysicien Roland Lehoucq, qui travaille au CEA de Saclay, a proposé : « Pour détruire une planète, il faut dépenser une énergie suffisante pour compenser l’énergie gravitationnelle qui lie sa matière. Pour une planète semblable à la Terre, l’énergie nécessaire est tout à fait considérable. Elle correspond à celle que rayonne la totalité du Soleil durant six jours. Et cette valeur gigantesque n’est qu’un minimum car, dans cette hypothèse, les débris de la planète se répandront dans l’Espace à une vitesse proche d’une dizaine de kilomètres par seconde. ».

Dans son site créé le 14 mars 2001 chez Free, Jacques Ardissone, professeur agrégé de sciences physiques, s’est amusé à faire le calcul de la durée de vie du Soleil, dont l’activité est la fusion d’hydrogène en hélium. Dans ses calculs, il a donc utilisé la puissance du Soleil qu’on peut évaluer à 4 x10(puissance 26) watts, soit le Soleil rayonne une énergie de 4 x10(puissance 26) joules à chaque seconde (par seconde). En reprenant les deux informations, cela donne, pour six jours de rayonnement solaire, l’énergie minimale nécessaire à faire exploser la Terre, soit 2,1 x10(puissance 32) joules. En fait, la valeur plutôt admise serait de 2,4 x10(puissance 32) joules (7 jours de rayonnement solaire), ce qui reste le même ordre de grandeur.





On peut donc comparer les deux résultats approximatifs : l’énergie largement majorée dont nous aurions disposé il y a une quarantaine d’années soit 1,7 x10(puissance 19) joules, mais il faudrait en fait réduire d’un ou de deux ordres de grandeur (au moins, car j’ai beaucoup majoré) et l’énergie minorée pour faire exploser la Terre, soit 2,1 x10(puissance 32) joules.

Il y a entre les deux valeurs un rapport de 10 millions de milliards, il faudrait à mon sens dire plutôt 100 ou 1 000 millions de milliards en ordre de grandeur. Donc, même dans le "meilleur" cas d’énergie, l’être humain n’aurait pas été en mesure de faire exploser sa planète Terre. Toutes les idées selon lesquelles nous pourrions le faire sont donc nécessairement fausses : nous sommes beaucoup trop peu outillés pour cela, et c’est tant mieux.

Si l’on veut aussi faire quelques comparaisons, on peut aussi dire que le tremblement de terre dans l’océan Indien du 26 décembre 2004 a dégagé une énergie de 2 x10(puissance 18) joules. Ou encore que pour faire exploser la Terre, il faudrait la même énergie que 3,3 millions de milliards de milliards de bombes de Hiroshima !

Une fois constaté cela, attention, je n’ai pas écrit plus : je n’ai pas écrit que l’être humain ne serait pas capable de détruire sa propre espèce, sa propre humanité. Il est à peu près clair que si les 70 000 têtes nucléaires dont nous disposions dans les années 1980 ou seulement les 14 000 têtes nucléaires dont nous disposons aujourd’hui explosaient chacune à un endroit différent et peuplé, il ne resterait plus beaucoup d’êtres humains, voire d’êtres vivants à la surface de la Terre. Mais la Terre résisterait, et d’autres formes de vie s’y développeraient, peut-être même des humains qui auraient survécu aux multichocs nucléaires.

Le calcul pourrait avoir l’air un peu sinistre mais finalement, il reste optimiste : quoi qu’on en dise, quelle que soit l’évolution de notre technologie, de nos progrès scientifiques, la Terre, la Nature, sera toujours plus forte que l’homme. Cela rend humble, mais cela réduit aussi les conséquences de notre éventuelle irresponsabilité.





NB. Angoissons-nous quand même un peu : si on veut vraiment s’inquiéter, on peut par exemple réfléchir sur les réserves en uranium 238 sur Terre qui contiendraient une énergie potentielle d’environ 3 x10(puissance 31) joules, ce qui se rapproche ainsi de l’ordre de grandeur nécessaire à la destruction de la Terre…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (02 août 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le syndrome de Hiroshima.
Hitler.
Auschwitz-Birkenau.
18 juin 1940 : De Gaulle et l’esprit de Résistance.
Les 75 ans de la Victoire sur le nazisme.
La Seconde Guerre mondiale.
La Première Guerre mondiale.
La Libération de Paris.
La République de Weimar.
Le Pacte germano-soviétique.
Le Débarquement en Normandie.
Les Accords de Munich.
Le Pacte Briand-Kellogg.
Le Traité de Versailles.
L’Europe, c’est la Paix.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200806-hiroshima.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/le-syndrome-de-hiroshima-226147

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/07/28/38453140.html








 

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17 avril 2020 5 17 /04 /avril /2020 03:41

« L’imagination est plus importante que le savoir. Le savoir est limité alors que l’imagination englobe le monde entier, stimule le progrès, suscite l’évolution. » (Albert Einstein, 26 octobre 1929).


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Le très célèbre physicien Albert Einstein est mort il y a soixante-cinq ans, le 18 avril 1955. Tout le monde connaît Einstein et c’en est même étonnant alors que les concepts qu’il a développés sont particulièrement compliqués pour des "profanes" des disciplines concernées. Sa personnalité attachante, son look même, son esprit philosophe ont certainement favorisé cette popularité hors norme qui a incité les fondateurs de l’État d’Israël à vouloir le placer à sa tête (il a refusé : rendons à César… et puis : « Pour châtier mon mépris de l’autorité, le destin a fait de moi une autorité. »).

Rappelons rapidement le tableau de chasse d’Albert Einstein : la théorie de la relativité restreinte (en 1905) et la théorie de la relativité générale (en 1915) qui en ont fait un physicien de la gravitation à l’égal d’un Newton. Il n’était peut-être pas le meilleur en calculs mathématiques, mais il était absolument génial en intuition et en imagination : relier les mathématiques à des considérations physiques fut d’autant plus exceptionnel que l’observation a confirmé, a validé sa théorie : « En fait, c’est à Bruxelles que tout a commencé pour lui. Au congrès Solvay, en 1911, tous les plus grands physiciens du monde ont découvert que ce petit employé minable était un génie absolu… ». J’ai utilisé l’adverbe "absolument" avant de trouver cette citation du livre évoqué plus bas, qui inclut aussi "absolu".

Je rappelle à cette occasion que dans la méthode scientifique, il y a deux directions possibles : une observation bizarre, et l’on cherche une explication théorique (méthode empirique qui nécessite une bonne acuité d’observateur et donc, une intuition pour savoir quoi observer) ; une réflexion purement théorique, faite de déductions intellectuelles, de calculs mathématiques et de conclusions physiques, et on la valide par l’observation. Cette dernière méthode est beaucoup plus difficile car il faut une bonne intuition pour qu’une spéculation intellectuelle soit en accord avec la réalité physique et observable (si elle n’est pas observable, on ne peut rien dire, ni valider in invalider, c’était le drame du boson de Higgs pendant longtemps, mais heureusement, notre technologie de plus en plus performante et fine permet des observations parfois inimaginables au moment où certaines théories avaient été proposées).

Einstein fait partie de ces théoriciens que l’observation a couronnés. Pourtant, il n’a pas reçu le Prix Nobel en 1921 pour sa relativité (qui n’était pas une découverte "concrète" pour la vie de tous les jours, comme le souhaitait Alfred Nobel, ce qui a empêché Stephen Hawking d’être lauréat), pourtant, l’équivalence masse énergie allait avoir des conséquences très concrètes et c’est même grâce à cela que j’ai un domicile chauffé en hiver et que je peux utiliser l’Internet à cet instant. Il a été récompensé pour sa contribution majeure au développement de la physique quantique, et c’était, là aussi, mérité car ce qui a été primé, c’était l’effet photo-électrique, que la lumière pouvait être transformée en électricité et réciproquement. Une application basique, ce sont les portes de magasins qui s’ouvrent au passage du client, ou alors les différents systèmes de protection dans un musée, par exemple.

Cette contribution majeure a été suivie de discussions et de réticences majeures sur le développement de la physique quantique. En opposition avec ce qu’on a appelé l’école de Copenhague pour désigner Niels Bohr, Einstein n’a jamais cru à la théorie probabiliste, au fait que, selon la formule très célèbre, Dieu jouait aux dés. Il pensait qu’il manquait quelques maillons de compréhension, il voulait en rester à l’esprit déterministe qui avait dominé le XIXe siècle de la science triomphante, celle de la thermodynamique et celle de l’électromagnétisme (Maxwell).

Einstein "croyait" à la théorie des variables cachées (paradoxe EPR), des variables qu’on n’aurait pas su prendre en compte localement et avec lesquelles tout reviendrait sur son lit déterministe, sans probabilité, sans hasard, sans indétermination d’Heisenberg, sans réduction du paquet d’onde. L’histoire, sans complaisance, lui a donné tort grâce aux expériences d’intrication quantique menées par Alain Aspect (notamment), qui ont conclu à l’invalidation de l’hypothèse des variables cachées (voir plus loin). Cela ne signifie pas qu’il n’a pas été un contributeur majeur, car sans lui, pas d’expérience d’Alain Aspect par exemple. Ses doutes, ses réticences, ont permis paradoxalement de conforter et de perfectionner la théorie quantique, de s’appesantir sur les points qui dérangeaient, qui n’allaient pas, qui devaient être précisés.

Ici, je quitterais volontiers la science pour aller vers l’humain (bien que les deux ne soient pas incompatibles, lire l’encyclique "Caritas in veritate", par exemple !). Car Einstein a permis l’énergie nucléaire, a permis l’intrication quantique, a permis la commutation lumière/électricité, mais il a aussi eu un effet sur moi très surprenant : il m’a fait découvrir un romancier français, un auteur dont je ne connaissais que le nom mais dont je n’avais encore ouvert aucun ouvrage.

Je veux parler ici de Didier van Cauwelaert. En 2017, cet écrivain reconnu a sorti un petit roman très amusant "J’ai perdu Albert". Lu comme cela, je n’aurais pas apporté attention, mais comme je l’ai vu dans une librairie, la couverture ne laissait aucun doute sur le patronyme de ce fameux "Albert" : il s’agissait bien d’Einstein. Adopté dans mon petit panier qui commençait à s’alourdir dangereusement (dangereusement pour la carte bancaire qui, elle, allait s’alléger par la même occasion, dans un effet d’osmose ou, plus basiquement, de vases communicants). L’auteur en a même réalisé un film que je n’ai pas vu (sorti le 12 septembre 2018), avec Julie Ferrier et Stéphane Plaza, et qui n’a pas été un grand succès au cinéma.

Didier van Cauwelaert semble assez intéressé par l’idée de pouvoir communiquer avec les morts. Dans ce petit livre dont je vais tenter de ne pas dévoiler l’intrigue, il imagine qu’Einstein guide une jeune femme pseudo-voyante professionnelle dans ses visions : « La gamine se laisse glisser contre le flanc de la baignoire et noie ses larmes dans "La Théorie de la relativité restreinte", les doigts crispés sur le livre où sourit Einstein devant un tableau d’équations. ».

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Pourquoi Einstein et pas un autre homme ou femme célèbre ? Petit à petit, on découvre la vie du physicien, son manque de reconnaissance final (il est mort trop tôt, et il voudrait publier de nouveaux travaux scientifiques : « Le chaînon manquant, la fusion entre la gravitation et la mécanique quantique ! Dans la théorie des supercordes, ce qui manquait, c’est l’application aux perturbations de l’espace-temps ! »), et un regret qui l’encourage à rester encore lié avec les affaires terrestres, avec de nobles objectifs : « Réussir l’éducation et le bonheur d’un enfant. Arrêter toutes les guerres. Aider les êtres humains à s’aimer davantage, à maîtriser leur avenir… Et sauver les abeilles. ».

Ces objectifs de sa mort sont rappelés à la fin du livre : « Ce cahier des charges impossible que je me suis fixé durant mon incinération : désarmer les nations, sauver la planète, redonner aux hommes les clés de leur destin qu’ils se sont laissé voler par les religions, les idéologies, l’inculture et la peur… ».

Le roman n’est pas scientifique mais légèrement à tendance épistémologique quand même. Il évoque par exemple le déclencheur de la vocation d’Einstein : « En fin de compte, je dois tout ce que je fus à trois chocs d’enfance. Un : l’aiguille de la boussole que m’offrit mon père à quatre ans, preuve d’une action à distance dont le principe me conduira un jour à la théorie de la gravitation. Deux : la vibration des cordes sous l’archet de ma jolie professeur de violon, révélation de la nature ondulatoire et sexuée de la matière. Trois : Max Talmud, exclu de l’université en tant que Juif. Le reste, c’est de la littérature pour biographe. ». J’insiste sur le fait que le livre est simplement un roman et n’a aucune ambition de véracité historique. L’ami d’Einstein s’appelait Max Talmey (1867-1941) et Albert fut aussi très marqué à 12 ans par le cadeau de son oncle, un manuel de géométrie euclidienne qui lui a donné la passion des démonstrations claires et limpides.

Si l’histoire ne livre pas beaucoup de secret scientifique, il raconte néanmoins quelques éléments humains de la vie d’Einstein, et en particulier, sa vie affective relativement chaotique. Il n’a pas eu des relations idéales avec ses enfants (l’un, interné pour schizophrénie, n’a plus reçu de visite de son père à partir de 1933, d’abord à cause de l’exil, mais son père n’est pas retourné le voir après la guerre ; il est mort en 1965, dix ans après son père), ses deux mariages ne reflétaient pas non plus des réussites conjugales. Je reste toujours réticent à évoquer la vie privée de personnages publics car chacun vit comme il le veut et surtout, comme il le peut et toute personne, aussi extraordinaire soit-elle, est un humain avec ses failles.

Ainsi, Didier van Cauwelaert s’amuse à raconter quelques scènes de vie d’Einstein.

Comme celle-ci : « La cabine d’un paquebot. Une femme de chambre des années 30 est en train de défaire le lit, dans les reflets du soleil couchant que les miroirs diffusent sur les panneaux d’acajou. (…) Entre les deux hublots, un passager en tweed joue du violon dans un nuage de tabac, entouré de calculs et de partitions. Einstein à l’aube de la vieillesse, chevelure et moustache blanches. Il interrompt la mélodie pour noter un début d’équation. (…) Il hésite, repose sa pipe et son crayon, reprend son archet. La femme de chambre le dévore des yeux à la dérobée tout en lui préparant son lit pour la nuit. Il tourne la tête vers elle, l’observe avec la même discrétion, puis soudain un rhumatisme articulaire lui fait lâcher son instrument pour enserrer son poignet gauche. Le violon entraîne dans sa chute le voilier miniature qui lui sert de presse-papiers. ».

La suite, toujours en 1933 à bord du transatlantique vers les États-Unis : « Le physicien hirsute, pipe au bec et pieds nus dans ses mocassins, est en train de réparer le mât de son voilier miniature, retendant la ficelle des haubans. C’est le jouet que lui avait offert son père à quatre ans et demi, en même temps que la boussole qui allait décider de sa vocation. (…) On tape à la porte. Il grogne dans sa pipe pour dire d’entrer. La femme de chambre (…) entrebâille le battant, fléchit le genou droit dans une esquisse de révérence. "Did you call me, Sir ?". Derrière son nuage de fumée, Einstein lui répond dans son français haché par l’accent yiddish (…). Il lui déclare que, toute la traversée, il a rêvé de lui faire l’amour, mais qu’il n’a plus le cœur à tromper sa femme. D’ailleurs, elle occupe la cabine voisine. (…) Il pose sa pipe, prend le petit voilier dans sa main droite et se lève pour lui faire face. Tout en avançant lentement vers elle, il lui murmure que les nazis l’ont chassé de son pays, qu’il a dû abandonner ses enfants, qu’il est un père minable, un amoureux dispersé, un savant qui ne sait plus où il va. "Fous serez mon dernier rayon de bonheur, Juliette. En soufenir de ce qui aurait pi se passer…". Et il glisse avec sensualité le petit voilier dans la poche ventrale de son tablier blanc. Rougissant, très gênée, elle bredouille dans sa langue maternelle qu’elle regrette, mais que le bagagiste arrive tout de suite. Et elle plonge la main dans sa poche en dentelle pour lui rendre son cadeau. Il la plaque soudain contre lui, écrasant le voilier. Il l’embrasse fougueusement dans le cou. Elle se laisse faire, décontenancée. Tout à coup il fige, recule le torse en la dévisageant et articule lentement, illuminé (…). Comme s’il entrevoyait dans son excitation la solution de l’équation sur laquelle il butait. Elle lui demande pardon. Sur un ton d’évidence éblouie, il achève : "(…) Oh, merdzi ! Merdzi !". Il la serre contre lui avec enthousiasme, mais elle est tirée aussitôt en arrière par le bagagiste qui vient d’entrer. S’interposant pour la défendre, il empoigne le bras de l’agresseur qui lui flanque un coup de boule. ».

Autre souvenir, plus ancien, mais cette fois-ci à la première personne du singulier : « L’écriteau raconte en termes chatoyants les mois d’exil paisibles que j’ai savourés dans ma chère Belgique, protégé des tueurs nazis par l’amitié de la reine Élisabeth, merveilleuse violoniste avec qui j’avais tant de plaisir à jouer Mozart. Passons. On ne refait pas l’histoire quand les historiens s’en contentent. Mon passé appartient aux vivants ; je préfère de loin hanter leur présent pour leur chercher un avenir. Un futur différent de celui que tendent à façonner leurs peurs, leur bêtise agressive, leurs visions à court terme. ».

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Et très vite, le récit, toujours à la première personne du singulier, revient sur les rancœurs ressenties pendant la période nazie : « Ce n’est pas tout rose de renouer avec soi. Il y a la physique, bien sûr, ma passion dévorante, les lois que je viole et que je féconde, mais il y a aussi, hélas, la biographie. Tout ce qu’on m’a fait. Toutes les ignominies (…). ». Et d’évoquer les lois antisémites des nazis, l’interdiction faite aux Juifs de « l’exercice d’un métier afin de leur dénier, par voie de conséquence, le droit de vivre en tant que bouches inutiles. Et les camps de concentration (…) au souvenir des millions de personnes qui ont fini en fumée tandis que les gouvernants du monde se bouchaient le nez… Mais c’est une souffrance tellement partagée, transcendée par tant de victimes qu’elle a cessé de me gâcher la mort. Ce qui me revient de plein fouet, ce qui me retourne l’âme au fil des pages (…), ce sont les blessures que j’étais seul à subir. les trahisons de mes pairs. ».

Et il y a toute une liste de rancœurs du physicien, mais la plus importante, la plus cruciale, est sans doute au congrès Solvay, en 1927 : « Ces petits blancs-becs surdoués, tous unis en bloc derrière mon ami Niels Bohr, qui me rendent hommage en présentant leur mécanique quantique. Une physique nouvelle qui dépasse celle que j’ai inventée, disent-ils, mais qui en est "l’aboutissement logique". Le plus subtil affront qu’on ait pu me faire : honorer ma mémoire en concluant à ma place, sur des bases inédites, les travaux que j’avais initiés. Comme si j’étais déjà mort. J’ai quarante-sept ans, je sais que j’ai raison, je sais que ma théorie unitaire des champs rend leurs thèses incomplètes, je pressens la non-séparabilité des particules, leurs interactions perpétuelles alors même qu’elles ne sont plus en contact, mais il faudra attendre la technologie des années 80 pour qu’Alain Aspect le démontre expérimentalement à l’Institut d’optique d’Orsay, et que leurs successeurs quantiques aient le culot d’en déduire que cette confirmation me donne tort. ».

Nous sommes ainsi au cœur de la tragédie einsteinienne : « Pour l’heure, mes jeunes fossoyeurs soutiennent qu’aucune loi ne pourra jamais prédire le comportement d’une particule. Ils condamnent le scientifique à l’ignorance, le soumettent à l’inexplicable, ils érigent l’aléatoire en règle universelle. Je leur réponds que Dieu ne joue pas aux dés avec le monde. Ils ricanent, ne retiennent que le mot Dieu et non mes objections rationnelles à leur notion "d’incalculable". Je répète que, de la plus lointaine étoile à la moindre cellule de notre corps, il n’y a pas de hasard dans l’univers, que tout, absolument tout peut être mis en équation. Ils rappellent mon glorieux passé pour souligner combien j’ai perdu la boule, et me tournent en ridicule à coups d’éloges funèbres. ».

Autre polémique scientifique : « Ce sont mes pairs, la "communauté scientifique" comme ils se baptisent, qui m’obligent à me renier, dans mon propre intérêt, à déclarer que ma dernière théorie, la constante cosmologique justifiant l’énergie du vide, est la plus grande connerie de ma vie, sinon ils me coupent les vivres, me privent de conférences et de publications, pour m’éviter de mon vivant d’entacher ma mémoire avec des élucubrations, alors que j’avais raison ! Une fois de plus ! Seul, envers et contre tous ! Comme lorsque j’avais démontré dans l’indifférence générale l’existence des ondes gravitationnelles, ces déformations de l’espace-temps qui seront détectées cent ans plus tard, et présentées alors comme la découverte du siècle… ».

Mine de rien, Didier van Cauwelaert dévoile petit à petit l’Einstein tragique et l’Albert intime. La tragédie dans une théorie plus qu’incomplète qui n’est aujourd’hui plus à la mode car dépassée par la rude efficacité de la théorie quantique de l’école de Copenhague, et l’intimité d’un homme qui fut médiocre père, médiocre mari, parce que tout simplement, comme la plupart des génies, ils sont invivables, insupportables, obsédés par leur art, focalisés par leur passion, avec ce petit clin d’œil d’imaginer l’illumination d’une équation, sa découverte, cette lumière quand le filament éclaire l’ampoule placée au-dessus d’un personnage de bande dessinée… bref, ce fameux "eureka" si attendu des chercheurs, ici placé par le romancier au moment fatidique, unique, singulier …de l’orgasme. Un orgasme qui n’est pas, ici, quantique mais bel et bien humain ! Einstein vu de l’intérieur.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (13 avril 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
"J’ai perdu Albert" de Didier van Cauwelaert.
Au cœur de la tragédie einsteinienne.
Pierre Teilhard de Chardin.
Jacques Testart.
L’émotion primordiale du premier pas sur la Lune.
Peter Higgs.
Léonard de Vinci.
Stephen Hawking, Dieu et les quarks.
La disparition de Stephen Hawking.
Un génie très atypique.
Les 60 ans de la NASA.
Document à télécharger : la publication de Max Planck du 7 janvier 1901, "On the Law of the Energy Distribution in the Normal Spectum", qui fit naître la physique quantique.
Max Planck.
Georg Cantor.
Jean d’Alembert.
David Bohm.
Marie Curie.
Jacques Friedel.
Albert Einstein.
La relativité générale.
Bernard d’Espagnat.
Niels Bohr.
Paul Dirac.
Olivier Costa de Beauregard.
Alain Aspect.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200418-einstein.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/au-coeur-de-la-tragedie-223378

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/04/13/38195846.html





 

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19 juillet 2019 5 19 /07 /juillet /2019 03:33

« L’homme, cette créature de Dieu, plus encore que la Lune mystérieuse, au centre de cette entreprise, se révèle à nous. Il s’avère être géant. Il se révèle être divin, non pas en lui-même, mais dans son principe et dans son destin. Honneur à l’homme, honneur à sa dignité, à son esprit, à sa vie. » (Saint Paul VI, Angelus du 13 juillet 1969).


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Il y a cinquante ans, dans la nuit du 20 au 21 juillet 1969, "On a marché sur la Lune". L’être humain, ou plutôt Neil Armstrong puis Buzz Aldrin, ont posé un pied sur la surface lunaire, symbolisant le succès de la mission Apollo-11.

Dans cette perspective, le pape (désormais) saint Paul VI avait accueilli la mission, une semaine auparavant, avec beaucoup d’intérêt : « La science et la technologie se manifestent de manière si incomparable, si complexe et si audacieuse qu’elles marquent le sommet de leurs conquêtes et en laissent présager d’autres : l’imagination n’est même plus en mesure maintenant de les rêver. Et ce qui est le plus étonnant, c’est de voir qu’il ne s’agit pas de rêves. La science-fiction devient réalité. Et puis, si nous considérons l’organisation des cerveaux, des activités, des instruments, des moyens économiques, avec toutes les études, les expériences, les tentatives que l’entreprise requiert, l’admiration se fait réflexion, et la réflexion se tourne vers l’homme, vers le monde, vers la civilisation, dont jaillissent des nouveautés d’une telle sagesse et d’une telle puissance. » (site du Vatican).

Même la Lune d’aujourd’hui s’est mise en tenue de cérémonie pour célébrer ce cinquantenaire. Cinquante ans après le décollage de la fusée, le 16 juillet 2019, à partir de 20 heures 43 (et jusqu’à 01 heure 37, heures de Paris), la Lune, pleine, s’est mise dans la continuité de la droite formée par le Soleil et la Terre, si bien qu’on pouvait voir une éclipse partielle recouvrant 65% de sa surface visible à partir de la zone nord.

Hélas, je n’ai vu que le début de ce spectacle, lorsque la Lune, déjà ombrée, s’est levée avec majesté et étant en déplacement imprévu, je n’ai pas pris le matériel adéquat pour fixer ce moment magique de manière satisfaisante…

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Le bébé pouvait avoir dix-huit mois et savait déjà ce qu’étaient le Soleil et la Lune. Il était réveillé en pleine nuit pour un transfert chez une voisine qui ne lui était pas inconnue. Mystérieuse aventure nocturne, dont le caractère exceptionnel avait été immédiatement ressenti. Devant un poste de télévision (les ancêtres au tube cathodique), en noir et blanc évidemment, autour de sa famille et de celle de la voisine, dans un silence glacial que le cœur, éponge à cet âge-là, a pris pour une émotion immense, une émotion primordiale, il a vu dans ce paysage de nuit les deux hommes se poser lentement sur la Lune.

Étonnant réflexion : il ne connaissait pas encore Hergé, pas encore Jules Verne, n’avait pas encore vu "2001, l’Odyssée de l’Espace" (sorti le 3 avril 1968), mais il avait compris qu’une page d’histoire était en train d’être écrite, en train d’être vécue. Il ne connaissait pas la complexité de la science, de la technologie, ni les aspects économiques, ni les batailles politiques de la guerre froide, mais il comprenait que ce moment n’était pas anodin.

Ce ne sont pas les images qui sont ses souvenirs, car elles ont pu être vues et revues par la suite de son existence, mais cette émotion si particulière, si indéfinissable, qui lui disait que décidément, l’homme était grand. Mais la réflexion devait se poursuivre ultérieurement en ajoutant : mais au cours du même siècle, comme l’homme a pu aussi être si petit

L’exploit a été voulu par le Président John F. Kennedy dans deux discours qui ont marqué sa courte Présidence. Le 25 mai 1961 devant le Congrès à Washington, John Kennedy exprima cette ambition technologiquement folle : « Je crois que cette nation devrait s’engager à atteindre l’objectif, avant la fin de cette décennie, de faire atterrir un homme sur la Lune et le ramener sain et sauf sur Terre. ». Objectif court, précis, compréhensible et mesurable. Cela faisait seulement quatre mois qu’il occupait la Maison-Blanche.

Les considérations politiques étaient sans doute plus fortes que les réflexions technologiques : le 12 avril 1961, Youri Gagarine fut le premier homme lancé dans l’Espace, ce qui donna à l’Union Soviétique une image incomparable de grande nation moderne tournée vers l’avenir. Les États-Unis ne pouvaient pas laisser aux Soviétiques le monopole de l’exploration spatiale.

L’objectif a été donc donné avant même que le premier Américain fût lancé dans l’Espace. Il a été confirmé par John Kennedy lors de son discours à l’Université Rice, à Houston, le 12 septembre 1962 : « Nous avons choisi d’aller sur la Lune. Nous avons choisi d’aller sur la Lune au cours de cette décennie et d’accomplir d’autres choses encore, non pas parce que c’est facile, mais justement parce que c’est difficile. Parce que cet objectif servira à organiser et à offrir le meilleur de notre énergie et de notre savoir-faire, parce que c’est le défi que nous sommes prêts à relever, celui que nous refusons de remettre à plus tard, celui que nous avons la ferme intention de remporter, tout comme les autres. ».

Et le calendrier fut tenu : avant la fin de la décennie. Le décollage de la fusée Saturn V a eu lieu le 16 juillet 1969 à 14h32 (je donne ici toujours en heure de Paris, il faut retrancher cinq heures pour connaître l’heure locale à Cap Canaveral, en Floride). Un million de personnes étaient présentes pour assister physiquement au décollage. Dont près de 3 500 journalistes du monde entier. Événement mondial.

À bord, les trois astronautes américains, des héros dont les noms, très rapidement, jusque dans les livres pour enfants, ont été diffusés dans la littérature, à l’égal d’un Christophe Colomb (mais aussi d’un Paul-Émile Victor, d’un Jacques-Yves Cousteau, entre autres) : Michael Collins (38 ans), Neil Armstrong (38 ans) et Buzz Aldrin (39 ans). Le trajet pour arriver jusqu’à la Lune a duré trois jours. La mise sur orbite lunaire a commencé le 19 juillet 1969 à 18h22.

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Ensuite, Michael Collins resta dans le vaisseau Apollo (module de commande et de service CSM) pendant que ses deux collègues le quittèrent le 20 juillet 1960 à 18h44 dans le module lunaire Eagle dans le but d’alunir (de nombreux jeux vidéos, dès le début des années 1980, ont repris une simulation de cet alunissage, notamment sur Apple-2).

L’alunissage a eu lieu le 20 juillet 1969 à 21h18. Enfin, Neil Armstrong, le héros des héros, est sorti du module et a mis le premier pas humain sur la surface lunaire le 21 juillet 1969 à 03h56 du matin (en pleine nuit donc à Paris, mais en début de soirée à Houston). Fameuse phrase entendue par 600 millions téléspectateurs (soit 17% de la population mondiale !) grâce à une retransmission en direct en mondovision : « That’s one small step for man, one giant leap for manking. » [C’est un petit pas pour un homme, un bond de géant pour l’humanité].

Buzz Aldrin suivit son collègue dix-neuf minutes plus tard. Il a mis plusieurs minutes à descendre du module vers le sol en plaisantant (en disant qu’il ne fallait pas qu’il bloquât le verrou en quittant le module). Toutes les photographies représentées ici ont été prises par Neil Armstrong et donc, montrent Buzz Aldrin. Ne manquant pas d’humour, Buzz Aldrin constata : « Belle vue » et « Magnifique désolation », puis expliqua par la suite : « Armstrong a peut-être été le premier homme à marcher sur la Lune, mais j’ai été le premier à faire pipi sur la Lune. ». L’émotion, toujours.

Les deux hommes ont ensuite posé une plaque : « Nous sommes venus dans un esprit pacifique au nom de toute l’humanité. ». Ce qui est amusant dans l’égocentrisme terrien, c’est d’avoir mis la date (juillet 1969), une date très arbitraire puisque dépendant de l’histoire des Terriens, ainsi que le nom de notre planète, lui aussi très arbitraire. Au cours de leur mission sur le sol lunaire où ils sont restés 151 minutes (jusqu’à 06h37) et ont récupéré des échantillons lunaires, ils ont eu droit à un échange (public) avec le Président des États-Unis Richard Nixon, lui installé dans son bureau ovale de la Maison-Blanche.

Le pape saint Paul VI a, lui aussi, adressé un message de félicitations aux astronautes et à tous ceux qui ont participé à l’odyssée lunaire, depuis sa résidence de Castel Gandolfo (près de Rome) le 21 juillet 1969 : « Nous ne sommes plus une frontière insurmontable de l’existence humaine, mais un seuil ouvert aux grands espaces sans limites et aux nouveaux destins. (…) Honneur à vous, hommes architectes de la grande entreprise spatiale ! Honneur aux hommes responsables, érudits, créateurs, organisateurs, opérateurs ! Honneur à tous ceux qui ont rendu ce vol audacieux possible ! (…) Honneur à vous qui, assis derrière votre appareil prodigieux, avez gouverné, avez informé le monde, avez élargi la domination sage et audacieuse de l’homme jusqu’aux profondeurs célestes. » (site du Vatican).

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Après une période de repos, leur décollage du sol lunaire a commencé le 21 juillet 1969 à 18h54, et les deux astronautes ont regagné à 22h35 leur collègue Michael Collins dans le vaisseau qui lui-même a regagné la Terre avec une durée plus courte pour le retour, 59 heures, en raison de la plus grande force gravitationnelle (de la Terre par rapport à la Lune).

Le 24 juillet 2019 à 17h51, les trois astronautes ont réussi à amerrir dans l’Océan Pacifique et furent mis en quarantaine pendant 21 jours pour prévenir d’éventuels germes de contamination. Après une conférence de presse tenue le 16 septembre 1969, les trois héros ont entamé une tournée mondiale triomphale du 29 septembre 1969 au 5 novembre 1969 où ils furent reçus dans vingt-trois pays. Des trois astronautes, Michael Collins et Buzz Aldrin sont toujours vivants, seul Neil Armstrong est mort à 82 ans le 25 août 2012 à Cincinnati, des suites d’une opération du cœur.

Les États-Unis venaient alors de reprendre leur "revanche" sur l’Union Soviétique dans la course de la conquête de l’Espace. Mais là n’était pas l’essentiel, tellement peu essentiel que l’URSS a disparu vingt-deux années plus tard. L’essentiel, c’était évidemment qu’après l’exploration humaine des terres arides, des déserts, des montagnes élevées, des océans, des pôles, l’être humain a exploré la Lune. La première exploration extraterrestre par l’homme. Ce fut un exploit multiple.

Exploit philosophique sinon onirique : la Lune est un astre que tout le monde connaît, même les plus petits. Le plus visible après le Soleil. C’était donc normal que l’homme imaginât très tôt l’idée d’y faire un tour. De nombreux créateurs l’ont imaginé et la bande dessinée de Tintin était particulièrement étonnante en ce sens que les descriptions d’Hergé étaient peu éloignées des aspects techniques réels. Jules Verne évidemment en a fait aussi le centre d’un de ses nombreux ouvrages d’anticipation. Cette symbolique montre une incroyable puissance de l’intelligence humaine à pouvoir réaliser des rêves très ambitieux.

Exploit technologique aussi. Certains de la Nasa ont déclaré qu’aujourd’hui, il serait plus difficile de retourner sur la Lune pour deux raisons. D’une part, le savoir-faire technologique de l’époque a disparu en même temps que les personnes impliquées dans cette aventure (retraite, décès). D’autre part, surtout, car ce qu’on est capable de faire une fois, on peut toujours le refaire une seconde fois, mais aujourd’hui, l’attention portée à la protection, à la sécurité est telle qu’on n’aurait jamais osé envoyer ces trois hommes, dans ces conditions, vers la Lune.

Rappelons plusieurs choses à cet égard. Trois autres héros, malheureusement moins célébrés, ont péri au début du programme Apollo. Ils devaient se lancer dans la première mission, Apollo-1 (juste un vol habité), mais ils furent tués asphyxiés lors d’un essai sur Terre en conditions réelles le 27 janvier 1967 à cause d’un incendie dans le vaisseau : Gus Grissom (40 ans), Ed White (36 ans) et Roger Chaffee (31 ans). La mission lunaire a tué. Le courage de leurs collègues acceptant pourtant de continuer l’aventure n’en a été que renforcé.

Par ailleurs, les conditions de départ de Collins, Armstrong et Aldrin furent si peu sécurisées (notamment en cas de problème au décollage) que Richard Nixon avait déjà fait préparer son discours d’hommage aux astronautes supposés disparus et toute une procédure avait déjà été pensée (appel téléphonique du Président aux épouses, etc.).

C’était vrai que les conditions technologiques des missions Apollo, pas plus d’ailleurs que les missions soviétiques, étaient très sécurisées : aucune électronique (ce qui, cependant, évitait d’autres défaillances ultérieures), et peu de plan B ou plan C en cas de pannes. Au-delà des capacités intellectuelles et physiques exceptionnelles, les astronautes devaient donc avoir une personnalité forte et une mentalité très courageuse, prête au sacrifice, comme on pouvait la trouver par exemple chez les résistants pendant la guerre (où la probabilité de mourir était loin d’être nulle).

Quatre autres missions ont permis à des astronautes de mettre leurs pas sur la Lune : Apollo-12 (19 au 20 novembre 1969), Apollo-14 (5 au 6 février 1971), Apollo-15 (30 juillet au 2 août 1971), Apollo-16 (21 au 24 avril 1972) et Apollo-17 (11 au 14 décembre 1972). Les missions se sont arrêtées pour plusieurs raisons mais principalement pour des raisons budgétaires et politiques (guerre de Vietnam, lutte contre la pauvreté) : les missions Apollo-18, Apollo-19 et Apollo-20 (prévues pour la période de 1972 à 1974) furent supprimées le 20 septembre 1970.

Le Président George H. W. Bush (Sr) proposa un nouveau programme lunaire le 20 juillet 1989 (pour le 20e anniversaire), que son fils, en 2004, tenta de relancer après l’explosion de la navette Columbia, mais l’idée fut finalement abandonnée par Barack Obama le 1er février 2010, toujours pour des raisons budgétaires.

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Depuis une dizaine d’années, une rumeur court sur l’Internet, à l’instar des théories complotistes sur l’attentat du 11 septembre 2001, selon laquelle les Américains n’auraient jamais posé un pied à la surface lunaire. Malgré les preuves nombreuses (rappelons-nous qu’il y a eu cinq missions et pas seulement une seule), cette rumeur se fie à une information réelle qui est la suivante.

Lors d’une conférence de presse le 16 juillet 2009, la Nasa a affirmé que les bandes vidéo originales de la mission Apollo-11 n’ont pas été retrouvées et qu’elles avaient été sans doute effacées dans le cadre d’une réutilisation, procédure habituelle à l’époque. L’absence des bandes originales ne signifie pourtant pas l’absence de vidéo puisqu’elles ont été diffusées pratiquement dans tous les pays du monde en direct. Ainsi, des copies ont pu être restaurées et diffusées publiquement le 6 octobre 2010. Mais lorsque la rumeur court, elle ne s’arrête jamais, surtout lorsqu’elle permet de nourrir un antiaméricanisme qui, ici, serait particulièrement primaire.

Aujourd’hui, il serait plutôt question d’aller sur la planète Mars. Mais serait-ce vraiment utile et pertinent d’y mettre un pas humain ? Techniquement, ce serait au contraire un handicap, car les robots ont une meilleure capacité de "survie" que l’humain dans des conditions physico-chimiques très rudes. Politiquement, les crises économiques structurelles et la croissance des inégalités sociales rendent difficile la justification de dépenses aussi massives. Enfin, psychologiquement, au contraire d’un voyage sur la Lune, l’idée d’un voyage habité sur Mars n’a jamais fait partie des "rêves populaires". Cependant, certains scientifiques défendent cette idée avec des arguments qui peuvent être convaincants, mais c’est un autre sujet…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (13 juillet 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
L’émotion primordiale du premier pas sur la Lune.
Peter Higgs.
Stephen Hawking.
La théorie de la Relativité générale d'Einstein encore vérifiée (publication du 29 juin 2018 à télécharger).
"Radar evidence of subglacial liquid water on Mars", R. Orosei et al., "Science" (publication du 25 juillet 2018 à télécharger).
Les 60 ans de la NASA.
Le dernier vol des navettes spatiales.
Rosetta : mission remplie !
Youri Gagarine.
Spoutnik.
Les petits humanoïdes de Roswell.
André Brahic.
Evry Schatzman.
La relativité générale.
Max Planck.
Marie Curie.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190720-apollo-11-lune.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/l-emotion-primordiale-du-premier-216720

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/07/13/37497465.html



 

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10 juin 2019 1 10 /06 /juin /2019 01:18

Richard Stothers, de la NASA, a publié en 2007 un article intitulé "Unidentified flying objects in classical Antiquity" dans la revue scientifique : "The Classical Journal" 103,1 (2007) 79-92.

Cliquer sur le lien pour télécharger le rapport (fichier .pdf) :
https://pubs.giss.nasa.gov/docs/2007/2007_Stothers_st02710y.pdf

Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20180729-nasa.html
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20170702-roswell.html

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13 mars 2019 3 13 /03 /mars /2019 03:33

« Il est très possible que des aliens dotés de dix-sept bras, d’une vision infrarouge et aux oreilles pleines de crème fraîche aient observé expérimentalement le même phénomène sans éprouver le besoin de recourir aux quarks. » (Stephen Hawking et Leonard Mlodinow, 2010).


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Le physicien Stephen Hawking est mort il y a un an, le 14 mars 2018 à l’âge de 76 ans. Très célèbre par son livre best-seller "Une brève histoire du temps" (éd. Bantam Press, 1988), il était un scientifique atypique d’une très grande stature intellectuelle (il enseigna à la prestigieuse chaire de professeur lucasien de mathématiques de Newton puis de Paul Dirac à Cambridge) qui a eu la particularité très visible d’être en situation de handicap et de dépendance pendant quasiment toute sa vie active. Il fut sans doute le scientifique le plus célèbre du monde de ce début du XXIe siècle : « Parfois, je me demande si je ne suis pas plus célèbre pour mon fauteuil roulant et mes handicaps que pour mes découvertes. » (Interviewé par la chaîne américaine PBS en 2014).

Son courage à refuser condamnations médicales et renoncements professionnels mais aussi affectifs, en a fait même un exemple de ténacité, de combativité et de persévérance pour tous ceux qui, atteints de maladie irréversible, se battent pour pouvoir vivre le plus "normalement" possible.

Je propose ici, en son hommage et pour l’occasion, de revenir sur quelques points de sa vie, de sa pensée et de ses travaux, à travers quelques-uns de ses ouvrages.

Dans "Comment penser comme Stephen Hawking" (éd. Michael O’Mara Books Limited, 2016), Daniel Smith n’hésite pas à écorner un peu la réputation du physicien en le décrivant habile, bête de scène et de télévision (avec son « incomparable talent (…) pour susciter l’intérêt du grand public, y compris dans des disciplines les plus hermétiques »), aimant la réussite et provocateur : « Stephen Hawking semblait profiter pleinement de sa célébrité même si cela comportait quelques désagréments. En vérité, il n’avait aucune raison de se priver et de vivre comme un ermite. (…) Il aimait les signes extérieurs de richesse, et d’ailleurs pourquoi n’en aurait-il pas eu le droit ? ».

Créer la polémique pouvait être une tactique : « Bien qu’ayant longtemps vécu avec un salaire modeste d’universitaire, il avait la réputation d’être un habile négociateur qui ne se bradait pas. Il attendait, à juste titre, une rémunération équitable pour son expertise unique. Lorsqu’il devient célèbre à partir des années 1980, il négocie son prix pour rédiger des articles et donner des conférences. En outre, il était passé maître dans l’art de la publicité. Il savait que ses déclarations publiques recueillaient une attention considérable et entretenaient sa notoriété tout en créant une petite controverse de temps en temps. » (Daniel Smith).

C’était peut-être pour cette raison que dès son premier livre grand public, "Une brève histoire du temps", il a malicieusement placé une phrase polémique que l’éditeur a accepté de ne pas retirer à la fin de son ouvrage : « Si nous découvrons une théorie complète, elle devrait un jour être compréhensible dans ses grandes lignes pour tout le monde, et non pas une poignée de scientifiques. Alors, nous tous, philosophes, scientifiques et même gens de la rue, serons capables de prendre part à la discussion sur la question de savoir pourquoi l’univers et nous existons. Si nous trouvons la réponse à cette question, ce sera le triomphe ultime de la raison humaine, à ce moment, nous connaîtrons la pensée de Dieu. ».


Dieu est-il nécessaire ?

À cette question, Stephen Hawking a répondu tout au long de ses travaux par la négative : les lois de la physique suffisent à faire que le monde est monde ! Sans départager sa propre croyance (athéisme ou agnosticisme), il remettait régulièrement les pendules (quantiques) à l’heure.

Dans "Une brève histoire du temps", il l’expliquait déjà : « Toute l’histoire de la science est la prise de conscience progressive que les événements n’arrivent pas de façon arbitraire, mais qu’ils peuvent refléter un certain ordre fondamental qui peut être ou ne pas être d’origine divine. ».

En 1988, dans une interview à l’hebdomadaire allemand "Der Spiegel", il complétait ainsi : « Ce que j’ai fait, c’est montrer qu’il est possible que la manière dont l’Univers a commencé ait été déterminée par les lois de la science. Dans ce cas, il ne serait pas nécessaire de faire appel à Dieu pour décider comment l’Univers a commencé. Cela ne prouve pas que Dieu n’existe pas, seulement que Dieu n’est pas nécessaire. ».

En 1990, sur la BBC, il imaginait mal un Dieu pour les humains : « Nous sommes d’insignifiantes créatures sur une planète mineure située dans la banlieue extérieure d’une galaxie parmi des centaines de milliards d’autres. De la sorte, il est bien difficile de croire en un Dieu qui s’occuperait de nous ou ne ferait même que remarquer notre existence. ».

En 2007, il disait aussi : « Je crois que l’Univers est régi par les lois de la science. Ces lois ont peut-être été décrétées par Dieu, mais Dieu n’intervient pas pour briser ces lois. » ("New Statesman").

En 2011, dans un documentaire sur la chaîne Discovery Channel, il était plus clair encore : « Chacun est libre de croire ce qu’il veut. Mais mon point de vue est extrêmement clair : il n’y a pas de Dieu. Personne n’a créé l’Univers et personne ne dirige notre destin. Ce qui me mène vers une conclusion : il n’existe probablement pas de paradis. Ni même de vie après la mort. » ("Curiosity").

En 2011, dans une interview au "Guardian", il philosophait ainsi : « Cela fait quarante-neuf ans que je vis dans la perspective d’une mort précoce. Je n’ai pas peur de la mort, mais je ne suis pas pressé d’en finir. Il y a encore tellement de chose que je veux faire d’abord (…). Pour moi, le cerveau est un ordinateur qui cesse de fonctionner lorsque ses composants ont lâché. Il n’y a pas de paradis ou d’au-delà pour les ordinateurs cassés… ».

La plus grande provocation éditoriale fut sans doute avec la publication en 2010 d’un de ses derniers essais, coécrit avec le physicien Leonard Mlodinow au titre déjà éloquent : "Y a-t-il un grand architecte dans l’Univers ?" (éd. Odile Jacob pour son édition française), au titre original en anglais "The Great Design", titre qui reprend le thème très voltairien du grand horloger.

Le livre se termine comme dans "Une brève histoire du temps" : « Le fait que nous, êtres humains, simples assemblages de particules fondamentales de la nature, ayons pu aboutir à une telle compréhension des lois qui gouvernent notre Univers constitue en soi un triomphe fantastique. Mais le vrai miracle réside peut-être dans ce que des considérations abstraites de logique aient pu déboucher sur une théorie unique qui prédit et décrit un aussi vaste Univers, riche de l’étonnante variété que nous observons. Si cette théorie est confirmée par l’observation, elle conclura avec succès une quête commencée il y a plus de trois mille ans. Nous aurons alors découvert le grand dessein. ».


La structure de l’Univers

Parmi les particules dont nous sommes assemblés, les plus importantes, celles qui constituent les nucléons, ce sont les quarks. Dans le même livre, les deux physiciens expliquent : « Le modèle des quarks, qu’on ne peut pas (…) voir, permet d’expliquer (…) les propriétés des protons et des neutrons dans le noyau de l’atome. Bien que protons et neutrons soient des assemblages de quarks, on n’a jamais pu observer de quark individuel car les forces qui les lient augmentent avec la distance qui les sépare. Par conséquent, il n’existe pas de quark isolé dans la nature. (…) Avec le temps et à mesure que les prédictions du modèle des quarks se sont révélées exactes, l’opposition [à ce modèle] a cependant perdu de sa vivacité. ».

Le livre évoque aussi des molécules en forme de ballon de football, composées de soixante atomes de carbone et appelées fullerènes (en anglais, buckyballs) en hommage à l’architecte Buckminster Fuller qui a conçu des immeubles de la même forme. Cette molécule est déjà de l’ordre du macroscopique et pourtant, elle suit encore des propriétés quantiques tout à fait extraordinaires. Ainsi, lors d’une expérience dans un laboratoire autrichien en 1999, lorsqu’on les envoie à travers une paroi avec deux fentes, ces molécules se répartissent comme l’auraient fait des photons, et aussi, déjà plus curieusement, des électrons, c’est-à-dire avec des zones sans molécules, comme s’il y avait des interférences.

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Les deux physiciens auteurs du livre de 2010 commentent ainsi : « Nous avons alors progressivement découvert que la nature, à l’instar des fullerènes, ne se comporte pas comme notre expérience quotidienne ou notre bon sens nous le soufflent. L’expérience sur les fullerènes est typique de ces phénomènes qui échappent à la science classique et ne peuvent s’expliquer que dans le cadre de la physique dite quantique. ».

De là à se poser cette question : « Des théories qui reposent sur des cadres conceptuels aussi éloignés de notre ressenti quotidien peuvent-elles également expliquer les événements de la vie ordinaire comme le faisait si bien la physique classique ? ».

Et la réponse est oui : « Bien que ces atomes élémentaires obéissent aux principes de la physique quantique, on peut montrer que les grands assemblages que sont les ballons de football, les navets et les avions de ligne, ainsi que nous par la même occasion, s’arrangent pour ne pas diffracter à travers des fentes. (…) Aussi étrange que cela puisse paraître, il arrive très souvent en science qu’un assemblage important se comporte très différemment de ses composants individuels. Ainsi, les réponses d’un neurone unique ne ressemblent en rien à celles du cerveau humain ; de même, connaître le comportement d’une molécule d’eau ne vous dira pas grand-chose sur celui d’un lac entier. ». On peut poursuivre à l’infini, je donnerai cet exemple du grain de sable et du tas de sable qui n’ont pas du tout les mêmes comportements.

Dans son livre "La brève histoire de ma vie" (éd. Bantam Books, 2013), sorte d’autobiographie sur son cheminement scientifique et personnel, Stephen Hawking a évoqué le type d’Univers qu’il imaginait : « La condition aux limites sans bord implique que l’Univers ait été créé spontanément à partir de rien. On crut d’abord que cette proposition ne prévoyait pas un niveau suffisamment élevé d’inflation, mais j’ai ensuite compris que la probabilité d’une configuration donnée de l’Univers doit être pondérée par le volume de la configuration. (…) La proposition sans bord prévoit que l’Univers se présente complètement lisse à ses débuts, mais avec de minuscules écueils. Ces écueils grandissent conjointement avec l’expansion de l’Univers et conduisent à la formation de galaxies, d’étoiles, et de toutes les autres structures de l’Univers, sans oublier les êtres vivants. La condition sans bord est la clef de la création, la raison pour laquelle nous sommes ici. ».

Dans "Y a-t-il un grand architecte dans l’Univers ?", après avoir expliqué que la création d’un corps nécessite de l’énergie positive afin d’assurer que l’Univers soit stable localement, Stephen Hawking a apporté l’intérêt cosmologique de l’existence de la gravitation : « Si l’énergie totale de l’Univers doit toujours être nulle et que la création d’un corps coûte de l’énergie, comment un univers entier peut-il être créé à partir de rien ? C’est précisément la raison pour laquelle une loi comme la gravitation doit exister. La gravitation étant une force attractive, l’énergie gravitationnelle est négative : il faut fournir de l’énergie pour séparer un système lié par la gravité (…). Cette énergie négative peut donc contrebalancer l’énergie positive nécessaire à la création de la matière (…). La gravitation déformant l’espace et le temps, elle autorise l’espace-temps à être localement stable mais globalement instable. ».

Et d’en conclure : « Parce qu’une loi comme la gravitation existe, l’Univers peut se créer et se créera spontanément à partir de rien (…). La création spontanée est la raison pour laquelle il existe quelque chose plutôt que rien, pourquoi l’Univers existe, pourquoi  nous existons. Il n’est nul besoin d’invoquer Dieu pour qu’il allume la mèche et fasse naître l’Univers. ».


Le handicap et la dépendance

Dans "Une brève histoire de ma vie", Stephen Hawking y a aussi raconté sa maladie et la manière dont elle évoluait. Ainsi, lors d’un voyage au CERN à Genève, en 1985, il a attrapé une méchante pneumonie : « On m’emmena aussitôt à l’hôpital du canton et l’on me mit sous un respirateur artificiel. Les médecins me croyaient tellement mal en point qu’ils proposèrent de couper le respirateur pour abréger mes souffrances, mais Jane [son épouse] refusa et me fit ramener par ambulance aérienne à l’hôpital d’Addenbrooke, à Cambridge. Là, on tenta de me ramener à mon état antérieur, mais il fallut finalement procéder à une trachéotomie. ».

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Malgré la difficulté de la dépendance, il pouvait travailler efficacement : « Je peux être satisfait de ma vie. J’ai été marié deux fois et j’ai trois beaux enfants épanouis. (…) Mon handicap n’a jamais été un obstacle sérieux pour mon travail scientifique. (…) Pour mes collègues, je suis un physicien comme les autres, mais pour le grand public, je suis peut-être devenu le scientifique le plus connu au monde. Cela vient en partie de ce que les savants, à l’exception d’Einstein, ne sont pas des rocks stars mondialement connus. (…) Au fond,  j’aurai eu une belle vie. Je crois que les personnes handicapées devraient se concentrer sur les choses que leur handicap ne les empêche pas de faire, sans regretter ce dont elles sont incapables. Dans mon cas, j’ai réussi à faire la plupart des choses que je souhaitais. J’ai beaucoup voyagé. ».

Il a en effet fait de nombreux tours du monde, s’est déplacé dans de nombreux pays, a rencontré parfois leurs dirigeants en même temps que ses collègues, a tenu beaucoup de conférences, etc. Stephen Hawking a même fait un vol en apesanteur (en 2007), s’est retrouvé dans une conférence en Antarctique (en 1997), a visité un laboratoire de neutrinos à mille cinq cents mètres de profondeur (à Sudbury, au Canada), ou encore a voyagé dans un sous-marin et dans un dirigeable. Bref, malgré son handicap, il a eu la chance, par sa notoriété et son influence, à vivre beaucoup d’aventures sportives que beaucoup de personnes "normales" ne vivront jamais.


Pas de Nobel pour Hawking

Mais il y a quand même une chose qu’il n’a pas réussi à faire, ou plutôt à avoir. Il n’a jamais eu le Prix Nobel de Physique. Dans "Une brève historie de ma vie", il est revenu sur ce sujet : « J’ai rencontré un certain succès dans ma carrière scientifique : la plupart des spécialistes de physique théorique ont admis, me semble-t-il, l’émission quantique des trous noirs que j’ai décrite, même si cela ne m’a pas encore valu de Prix Nobel, parce que c’est très difficile à vérifier de manière expérimentale. D’un autre côté, j’ai remporté le prix de physique fondamentale, plus précieux encore, récompensant l’importance théorique de la découverte même si elle n’a pas été confirmée par l’expérience. ». Le prix de physique fondamentale, il l’a reçu en 2013, et il est le prix le mieux doté au monde, d’un montant de trois millions de dollars (deux fois plus que le Nobel).

Dans son livre, Daniel Smith analyse ainsi la situation : « À première vue, il semble étrange que le scientifique le plus célèbre ait été privé de la plus haute distinction existant dans son domaine. Était-il victime d’un complot, de jalousie ou de préjugés ? Ou bien n’était-il pas assez brillant pour le mériter ? En réalité, aucune de ces explications n’est valable. ».

Certes, selon Daniel Smith, « tout le monde, mis à part les plus réticents, s‘accorde à dire que Stephen Hawking avait sa place parmi l’élite scientifique mondiale et admet qu’il aurait dû être candidat au Prix Nobel. Pour citer Brian Cox, célèbre animateur de radio et professeur de physique des particules à l’Université de Manchester, Stephen Hawking était "un génie du calibre du Nobel". ».

La raison la plus répandue de la non attribution du Nobel, ce fut que sa découverte la plus importante, le rayonnement d’Hawking (des trous noirs) n’a encore jamais été prouvée par l’expérience, bien que son existence ait été admise par quasiment tous ses collègues. Au même titre que Peter Higgs en 2013 avec son boson, Stephen Hawking aurait pu recevoir le Nobel si, de son vivant, un chercheur avait observé cette mystérieuse émission quantique. Ainsi, lors de la mise en service du LHC (grand collisionneur de hadrons) au CERN en 2008, il s’amusait à dire : « Le plus excitant pour moi serait qu’il trouve de petits trous noirs, car je recevrais alors le Prix Nobel. Cependant, comme je ne pense pas que ce soit très probable, je ne retiens pas mon souffle. ».

De toute façon, il faut être réaliste, les scientifiques ne sont pas dans ce métier pour s’enrichir et obtenir des gratifications, il y a des jobs plus faciles intellectuellement et plus rémunérateurs en reconnaissance autant que pécuniairement : « On ne mène pas des recherches en physique pour gagner un prix mais pour la joie de révéler quelque chose que personne n’avait découvert auparavant… ».

Même Albert Einstein a mis longtemps à obtenir son Prix Nobel de Physique, et encore, pas pour sa contribution majeure dans la science, à savoir la Relativité générale qu’il est difficile voire impossible de prouver expérimentalement, mais pour la découverte de l’effet photoélectrique, certes importante dans la naissance de la physique quantique, mais pas autant que la Relativité qui a une portée beaucoup plus fondamentale.


La joie d’avoir contribué…

Dans "Une brève histoire de ma vie", Stephen Hawking insistait sur sa joie d’avoir posé quelques pierres dans la connaissance scientifique : « Quelle expérience formidable cela a été que de vivre et de faire de la recherche en physique théorique ! Je suis heureux si j’ai pu contribuer à notre compréhension de l’Univers. ».

Mais cette joie ne l’éblouissait pas jusqu’à en devenir aveugle. Comme tout scientifique, il avait le doute et l’humilité comme béquilles : « Toute théorie physique est provisoire, en ce sens qu’elle n’est qu’une hypothèse : vous ne pourrez jamais la prouver. Peu importe le nombre de fois où les résultats d’une expérience s’accorderont avec une théorie donnée ; vous ne pourrez jamais être sûr que, la fois suivante, ce résultat ne la contredira pas. Vous pouvez également réfuter une théorie en trouvant une observation unique qui ne cadre pas avec ses prédictions. ».

C’est la célèbre théorie de Karl Popper. Et surtout, c’est comme cela que la physique quantique est née, à partir de la "catastrophe ultraviolette" que Max Planck a tenté de planquer !…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (12 mars 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Stephen Hawking, Dieu, les quarks, le football, l’origine du monde, le handicap et le Nobel.
La disparition de Stephen Hawking.
Un génie très atypique.
Les 60 ans de la NASA.
Document à télécharger : sa publication du 7 janvier 1901, "On the Law of the Energy Distribution in the Normal Spectum", qui fit naître la physique quantique.
Max Planck.
Georg Cantor.
Jean d’Alembert.
David Bohm.
Marie Curie.
Jacques Friedel.
Albert Einstein.
La relativité générale.
Bernard d’Espagnat.
Niels Bohr.
Paul Dirac.
Olivier Costa de Beauregard.
Alain Aspect.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190314-stephen-hawking.html

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/stephen-hawking-dieu-les-quarks-le-213428

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