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30 novembre 2007 5 30 /11 /novembre /2007 22:47

Islamisation de la Turquie : ne pas se voiler la face !


Le voile islamique a fait de nombreuses polémiques en France. Mais, d’autres pays s’enflamment aussi pour la même cause, celle de la laïcité. La Turquie par exemple.

Le Premier Ministre turc Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis le 11 mars 2003, est à la tête d'un gouvernement dit islamiste modéré démocratiquement élu.

Un démocrate-musulman

Au moment de prendre le pouvoir, Erdogan avait voulu tempérer l'islamisme de sa mouvance politique et rassurer les observateurs étrangers en disant que son parti (AKP, le Parti de la Justice et du Développement) était à l'islam ce que les démocrates-chrétiens (en Allemagne ou en Italie) étaient au christianisme. Une sorte de mouvement démocrate musulman.

Son but, éviter d'être confondu avec des islamistes fondamentalistes.

Cela ne l'avait pourtant pas empêché de proposer une loi sur l'adultère pour criminaliser l'infidélité conjugale, projet qu'il avait vite abandonné après de nombreuses protestations.

Un pays à la laïcité pointilleuse

La Turquie, depuis le 10 décembre 1937, vit sous un régime laïque. Sa Constitution indique dans son article 2 : « L'État turc est républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur. ». Pays donc musulman à pouvoir très fortement laïque. L'armée, la magistrature, les universités sont très majoritairement laïques et partisanes de cette laïcité institutionnalisée. Quitte, pour l'armée, à se montrer menaçante.

À l'instar de l'Égypte. À la différence près que la Turquie est une démocratie. Mieux, une démocratie qui cherche à s'occidentaliser notamment en demandant (depuis 1959) son adhésion à l'Union Européenne.

La Turquie de Mustafa Kemal (devenu Atatürk) fut toujours en ‘avance' sur la laïcité dans le monde musulman et avait pris modèle sur la France de Jules Ferry.

Cela a abouti notamment par l'accession au poste de Premier Ministre d'une femme, Tansu Ciller, du 25 juin 1993 au 6 mars 1996, lors de l'élection de son prédécesseur (Suleyman Demirel) à la Présidence de la République (elle n'était cependant pas la première femme dans ce cas à diriger un gouvernement dans un pays musulman).

Une crise institutionnelle secouée par des considérations laïques

Ceux qui s'intéressent à la vie politique turque avaient observé une véritable crise institutionnelle à l'occasion de l'élection du Président de la République turque du 27 avril 2007.

Le Président est désigné par les parlementaires, majoritairement membres de l'AKP. Le Ministre des Affaires Étrangères, Abdullah Gül, un des leaders de l'AKP, était donc leur candidat (Premier Ministre du 18 novembre 2002 au 11 mars 2003, le temps que Erdogan, condamné pour incitation à la haine, ait retrouvé son éligibilité). Mais la classe politique craignait une crise politique et même, l'intervention de l'armée (il manquait dix voix pour Gül).

En effet, on reprochait notamment à l'épouse de Gül d'être voilée, alors que Gül lui-même a toujours été considéré comme un modéré, notamment par l'Union Européenne, car il a lancé des réformes de démocratisation du pays pour son éventuelle adhésion à l'Union Européenne. L'épouse de Erdogan aussi est voilée.

Finalement, au troisième tour, Gül a été élu le 28 août 2007 et surtout (c'est l'important), accepté par tous les acteurs de la Turquie (y compris l'armée).

Depuis cette date, l'AKP occupe donc les deux principales fonctions à la tête de l'État turc.

Le voile de nouveau autorisé à l'université ?

La nuit du 6 au 7 février 2008, certains se sont peut-être mordu les doigts d'avoir laissé à l'AKP le champ libre.

Malgré la grande manifestation du 2 février 2008 à Ankara (ayant réuni 125 000 personnes), un amendement constitutionnel a été adopté par le Parlement turc (par 404 députés), qui va permettre aux jeunes filles voilées d'étudier dans les universités.

Cette mesure, nécessitant la majorité des deux tiers, a été confirmée le samedi 9 février 2008 par 411 députés sur 500 malgré le déroulement d'une nouvelle grande manifestation de protestation (de 100 000 personnes), et devra être approuvée par le Président Gül.

En fait, le texte est plus anodin et dit : « Personne ne peut être privé de son droit à l'éducation supérieure. ».

Et évidemment, dit comme cela, il est difficilement contestable.

C'est d'ailleurs toute l'argumentation de Erdogan qui explique que cette volonté d'accès inconditionnel aux universités est une réponse pour se mettre en conformité avec les attentes de l'Union Européenne qui rejette toutes les discriminations (encore que la France ait adopté elle-même une loi contre le port du foulard dans les écoles) et également un élément majeur de la liberté de religion.

Un voile jusqu'à maintenant interdit à l'université

Le port du voile est strictement interdit dans la fonction publique depuis 1980 et dans les universités depuis 1989 (interdiction renforcée en 1997 par les militaires ayant renversé le premier gouvernement islamiste dirigé par Necmattin Erbakan).

Notons qu'en France, s'il est interdit dans les établissements d'enseignement primaire et secondaire, le port du voile est autorisé dans les universités françaises (et d'ailleurs fréquemment observé).

Deux tiers des femmes turques portent le voile islamique, ce qui leur interdit actuellement de suivre des études supérieures.

Des observateurs peuvent ainsi remarquer que permettre aux jeunes femmes voilées de s'instruire leur empêchera de sombrer dans une sorte d'inculture qui fait le lit aux fondamentalismes religieux (quels qu'ils soient).

Un risque d'islamisation de la Turquie ?

Mais beaucoup de pro-laïques considèrent que le foulard est le symbole de l'islam politique et estiment que cette réforme est une véritable provocation, servant à « éroder la laïcité », à « défier la République laïque » et finalement, à ériger « un État islamique ».

L'un des meneurs de l'opposition, Gokhan Gunaydin, a scandé samedi 9 février 2008 : « Ce qui se passe aujourd'hui au parlement consiste à éliminer le régime républicain et à le remplacer par la bigoterie. Ils veulent détruire la république démocratique laïque. ».

Une mesure très fortement polémique qui n'arrange personne

Ils redoutent aussi que la pression du voisinage encourage à se voiler les étudiantes qui ne portaient pas de voile dans les campus. Et les responsables des universités craignent des affrontements dans les campus et un boycottage des cours.

Le Parti Républicain du Peuple (CHP), d'opposition, soupçonne, quant à lui, que l'AKP veuille exploiter les sentiments religieux pour gagner les élections municipales qui se profilent en 2009.

« Le voile divise le pays. (...) Il réduit les femmes en citoyens de deuxième classe » a protesté Nur Serter, une parlementaire du CHP.

Kemal Anadol, le président du groupe CHP du Parlement, avait demandé en vain à ses collègues, avant le voter, d'avoir du bon sens, « pour qu'ils évitent de prendre une décision qui provoquera le chaos ».

Étrangement, les autorités religieuses ne sont pas non plus favorables à cette mesure, car l'amendement n'autorise que le fichu traditionnel noué sous le menton et pas le ‘turban' qui enveloppe la tête et le cou.

Une situation complexe difficile à apprécier sans nuance...

Mais... il vaut peut-être mieux un gouvernement AKP (qui apaise le fondamentalisme islamiste) qu'une prise de pouvoir islamiste par la force comme l'Iran en a connue, ou une anarchie due à des opposants islamistes qu'a connue l'Algérie et que connaissent encore aujourd'hui l'Irak, l'Afghanistan, le Pakistan et le Cachemire (entre autres).

Petit à petit, Erdogan donne des arguments à ses partenaires européens pour... ne pas accueillir la Turquie au sein de l'Union Européenne. À la grande joie de certains.

Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison


Pour aller plus loin :

La laïcité en France et en Turquie.

 

http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=35742 

 



      Article paru sur Agoravox.








        Article paru aussi
        sur CentPapiers.










 Article paru aussi sur LePost.



 http://www.lepost.fr/article/2008/02/25/1104029_islamisation-de-la-turquie-ne-pas-se-voiler-la-face.html



Le fœtus est-il une personne à part entière ?


À partir de combien de semaines de grossesse l'être en devenir est-il un véritable être humain ? Dès la conception, après 22 semaines ou entre les deux ? Le débat ne doit pas être scientifique, mais éthique, social et finalement politique.


La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le 6 février 2008 un triple jugement concernant les cas de familles d’enfants morts-nés entre 1996 et 2000. Ces familles voulaient faire une déclaration de naissance et de décès à l’état-civil, mais cet enregistrement leur fut refusée et seule une « déclaration d’enfant sans vie » leur a été proposée.


.Un seuil contesté

En effet, ces enfants, ces fœtus plus exactement, avaient entre 18 et 21 semaines et ne pesaient qu’entre 155 et 400 grammes. Or, la limite légale de réanimation du fœtus en France est de 22 semaines de grossesse (24 semaines d’aménorrhée) et de 500 grammes (il y a une vingtaine d’années, c’était 25 semaines de grossesse et 800 grammes), un seuil que le progrès technique a réussi à faire baisser.

Les parents ont alors saisi un tribunal de grand instance qui les a déboutés, et en mai 2005, la cour d’appel de Nîmes avait confirmé les premiers jugements.


.Une carence dans la législation

La décision de la Cour de cassation a été motivée par le vide juridique existant pour les fœtus, et notamment entre 12 et 22 semaines. La Cour de cassation a estimé que ce n’était pas aux tribunaux mais à la loi de fixer une norme (nombre de semaines et poids) et l’avocat général Alain Legoux est convaincu qu’en cassant les trois arrêts de la cour d’appel (qui violaient l’article 79-1 du Code civil), c’est la « meilleure façon d’incité le législateur » à se préoccuper de ce sujet très sensible.


.Des droits nouveaux

Ce jugement fera donc jurisprudence et l’inscription d’un fœtus mort-né pourra se faire sans condition ni de poids ni de durée de la grossesse.

Concrètement pour les parents, cela signifie la possibilité donner un nom à leur enfant disparu, de reprendre son corps et d’organiser un enterrement pour faire leur deuil. Jusqu’à 22 semaines de grossesse, les fœtus morts sont souvent jetés avec les autres déchets organiques des hôpitaux, sans autre considération.

Mais cela leur donne aussi des droits sociaux comme un droit au congé maternité.

De ces droits, certains craignent même que des femmes qui demandent l’interruption volontaire de grossesse puissent elles-mêmes en bénéficier.

Selon le Médiateur de la République, il y aurait chaque année entre 5 000 et 6 000 naissances d’enfants morts-nés en France.

http://www.mediateur-republique.fr/fic_bdd/pdf_fr_fichier/1189161187_MEDIATEUR10_1.pdf.pdf


.Des réactions contrastées

Parmi les réactions, Maïté Albagly, dirigeante du mouvement français pour le planning familial, s’est inquiétée qu’on « ouvre une brèche [qui] peut, à la longue, mettre en cause l’avortement » tandis que Jean Goyard, président d’une association qui milite pour la reconnaissance juridique de l’embryon au sein de sa mère, considère que c’est « un bon pas, dans la bonne direction » et qu’il est « absurde de nier le statut d’enfant à un fœtus mort-né alors que le droit civil le reconnaît dans plusieurs occasions, notamment en matière d’héritage [car] si un père meurt alors que sa femme est enceinte, le bébé, pourtant en devenir, hérite ».


.Un besoin de légiférer

Le député Philippe Gosselin vient justement de déposer à la Présidence de l’Assemblée Nationale le 30 janvier 2008 un rapport sur la proposition de loi relative à la législation funéraire qui a été adoptée par le Sénat le 22 juin 2006.

rapport Gosselin 30 janvier 2008 législation funéraire
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r0664.pdf

proposition de loi
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/propositions/pion0051.pdf

Ce parlementaire explique qu’il souhaite rajouter à cette proposition de loi un volet sur le sujet afin de « répondre à la détresse des familles qui ont besoin de matérialiser le passage sur terre de leur bébé pour mieux en faire leur deuil, et [de] ne plus considérer, au XXIe si !cle, un enfant en devenir comme un ‘déchet anatomique’ à brûler ». Le texte viserait à abaisser de 22 à 12 semaines le seuil requis pour l’enregistrement par l’état-civil.

De son côté, le Médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, s’était penché sur ce problème en 2005 en mettant en place un groupe de travail et en regrettant que, par exemple, pour des couples non mariés, qui ne disposent pas encore de livret de famille avant la naissance de leur premier enfant commun, aucun document ne portera trace de leur premier enfant si celui-ci est « né sans vie » : «Un enfant né sans vie ne peut être reconnu » stipule ainsi l’Instruction générale relative à l’état-civil.

http://www.mediateur-republique.fr/fic_bdd/pdf_fr_fichier/1189161187_MEDIATEUR10_1.pdf.pdf

Jean-Paul Delevoye ne fait donc qu’encourager à légiférer sur le sujet : « Nous devons mieux accompagner les familles touchées par la mort d’un enfant avant la déclaration de naissance et rendre plus égalitaires les droits des parents placés dans cette situation. ».

Il ne fait qu’encourager
http://www.mediateur-republique.fr/fic_bdd/pdf_fr_fichier/1202391181_CPresse_enfant_ne_sans_vie.pdf


.Une relance d’un débat polémique

La décision de la Cour de cassation relance évidemment un débat déjà ancien sur le statut du fœtus.

La jurisprudence qui s’ouvre est antagoniste avec celle qui, en pénal, refuse, par l’arrêt du 29 juin 2001 de la Cour de cassation, l’incrimination d’homicide involontaire dans le cas de décès in utero survenus lors d’un accident de la circulation ou d’un accident médical.

La loi 2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière va dans le même sens en prenant acte de ce refus d’incrimination d’homicide.

Loi n°2003-495 du 12 juin 2003
http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000603464

Et comme le rappelle le rapport du député Richard Dell’Agnola du 20 mai 2003 sur la violence routière, le législateur essaie surtout de « combler un vide juridique sans relancer le débat sur le statut du fœtus ».

Rapport dell’agnola 20 mai 2003 violence routière
http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r0865.pdf

Car la question pose aussi d’autres problèmes éthiques très complexes.


.Fœtus/embryon versus IVG ?

La loi sur l’avortement permet en France l’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la douzième semaine (depuis la loi 2001-588 du 4 juillet 2001, dite loi Guigou ; avant 2001, c’était jusqu’à la dixième semaine).

loi n°2001-588 du 4 juillet 2001
http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000222631

Mais d’autres lois protègent le fœtus et même l’embryon sur les éventuelles manipulations scientifiques : clonage, utilisation de cellules souches etc. comme la loi 2004-800 du 6 juillet 2004 sur la bioéthique qui interdit toute recherche sur l’embryon humain ou encore la ratification, dans le cadre du Conseil de l'Europe, de la Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à regard des applications de la biologie et de la médecine adoptée à Strasbourg le 19 novembre 1996 et signée par la France le 4 avril 1997 à Oviedo en Espagne.

loi n°2004-800 du 6 juillet 2004
http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=80C11AA9A6E19C2E14B9CB03CE1C3C3B.tpdjo06v_3?cidTexte=JORFTEXT000000441469&dateTexte=

ratification
http://www.senat.fr/leg/pjl97-538.html

Toute la question revient à cette incidence : à partir de quand peut-on considérer que le fœtus (humain) est un être humain à part entière, une personne ?


.La grossesse, processus continu mais incertain à ses débuts

Si l’on ne tient que sur des considérations purement thermodynamiques, on sait que la survenue de la vie ou son extinction s’accompagnent de discontinuités énergétiques et chimiques dans le métabolisme qui peuvent s’exprimer par des changements brusques d’un certain nombre de grandeurs (comme la température).

Or, il est un fait que de la conception (et de la première division cellulaire) à la naissance, la grossesse est un processus continu. Donc, on peut difficilement admettre que la vie n’arrive qu’en cours de route dans le développement du fœtus.

En revanche, il est reconnu aussi qu’avant le troisième mois environ, le développement de l’embryon puis du fœtus n’est pas assuré d’aboutir, les fausses couches, les malformations etc. peuvent se produire et rien n’est donc certain sur le devenir de la grossesse. C’est donc difficile de considérer juridiquement l’existence d’une personne humaine à ce stade si instable du développement.


.L’avortement, un progrès social indéniable malgré un seuil arbitraire

La législation sur l’avortement, sur laquelle personne ne compte revenir, fixe elle-même un seuil de durée de grossesse très arbitraire, différent en fonction de l’époque ou des pays : en Europe, cela va de 10 semaines en Slovénie et au Portugal à 24 semaines au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, en passant par la Suède avec 18 semaines, la plupart des pays ayant retenu 12 semaines, parfois, comme en Finlande, on autorise jusqu’à 20 semaines uniquement pour les mineures de moins de 17 ans (on peut se référer aux tableaux mis en lien ou à ce site).

tableaux
http://www.planning-familial.org/themes/theme03-avortement/fiche05Precision03.php

site
http://www.touteleurope.fr/fr/nc/divers/impression-pdf.html?origine=1278

Si éthiquement, cette législation peut heurter certaines consciences, socialement, elle a montré son efficacité dans la santé publique. L’interdiction de l’avortement n’a a priori jamais empêché les avortements, mais ceux-ci se faisaient de manière clandestine et dans des conditions sanitaires déplorables et dangereuses pour la femme. Selon l’OMS, 80 000 décès maternels sont encore provoqués chaque année par des avortements à risques.

selon l’OMS
http://www.crdp-nice.net/432/docs/Avortement.pdf


.L’utérus, domaine intime ou domaine public ?

Et finalement, cela revient à poser la question de savoir à partir de quelle durée de grossesse l’utérus de la femme n’est plus du domaine intime et passe, selon l’expression d’une médecin qui m’est chère, dans le domaine public.

Et cela, seule la société des humains peut le décider. Et par conséquent, ses représentants politiques, les parlementaires.



Aussi sur le blog.
http://rakotoarison.over-blog.com/article-7370726.html

Sylvain Rakotoarison
http://www.rakotoarison.eu



Les dépêches de presse :


LCI : tout fœtus né sans vie est déclarable à l’état-civil.
http://aliceadsl.lci.fr/infos/france/justice/0,,3705614-VU5WX0lEIDUzNg==,00-foetus-vie-peut-etre-declare-etat-civil-.html

Figaro : état civil pour le fœtus, la polémique s’installe.
http://www.lefigaro.fr/actualites/2008/02/08/01001-20080208ARTFIG00426-etat-civil-pour-le-ftus-la-polemique-s-installe-.php

RTL : le fœtus mort-né reconnu comme une personne.
http://www.rtl.fr/fiche/40909/le-foetus-mort-ne-reconnu-comme-une-personne.html



http://adminv1.over-blog.com/trackback.php?Id=7370726



Le fœtus est-il une personne à part entière ?


À partir de combien de semaines de grossesse l'être en devenir est-il un véritable être humain ? Dès la conception, après 22 semaines ou entre les deux ? Le débat ne doit pas être scientifique, mais éthique, social et finalement politique.


La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le 6 février 2008 un triple jugement concernant les cas de familles d’enfants morts-nés entre 1996 et 2000. Ces familles voulaient faire une déclaration de naissance et de décès à l’état-civil, mais cet enregistrement leur fut refusée et seule une « déclaration d’enfant sans vie » leur a été proposée.


Un seuil contesté

En effet, ces enfants, ces fœtus plus exactement, avaient entre 18 et 21 semaines et ne pesaient qu’entre 155 et 400 grammes. Or, la limite légale de réanimation du fœtus en France est de 22 semaines de grossesse (24 semaines d’aménorrhée) et de 500 grammes (il y a une vingtaine d’années, c’était 25 semaines de grossesse et 800 grammes), un seuil que le progrès technique a réussi à faire baisser.

Les parents ont alors saisi un tribunal de grand instance qui les a déboutés, et en mai 2005, la cour d’appel de Nîmes avait confirmé les premiers jugements.


Une carence dans la législation

La décision de la Cour de cassation a été motivée par le vide juridique existant pour les fœtus, et notamment entre 12 et 22 semaines. La Cour de cassation a estimé que ce n’était pas aux tribunaux mais à la loi de fixer une norme (nombre de semaines et poids) et l’avocat général Alain Legoux est convaincu qu’en cassant les trois arrêts de la cour d’appel (qui violaient l’article 79-1 du Code civil), c’est la « meilleure façon d’incité le législateur » à se préoccuper de ce sujet très sensible.


Des droits nouveaux

Ce jugement fera donc jurisprudence et l’inscription d’un fœtus mort-né pourra se faire sans condition ni de poids ni de durée de la grossesse.

Concrètement pour les parents, cela signifie la possibilité donner un nom à leur enfant disparu, de reprendre son corps et d’organiser un enterrement pour faire leur deuil. Jusqu’à 22 semaines de grossesse, les fœtus morts sont souvent jetés avec les autres déchets organiques des hôpitaux, sans autre considération.

Mais cela leur donne aussi des droits sociaux comme un droit au congé maternité.

De ces droits, certains craignent même que des femmes qui demandent l’interruption volontaire de grossesse puissent elles-mêmes en bénéficier.

Selon le Médiateur de la République, il y aurait chaque année entre 5 000 et 6 000 naissances d’enfants morts-nés en France.


Des réactions contrastées

Parmi les réactions, Maïté Albagly, dirigeante du mouvement français pour le planning familial, s’est inquiétée qu’on « ouvre une brèche [qui] peut, à la longue, mettre en cause l’avortement » tandis que Jean Goyard, président d’une association qui milite pour la reconnaissance juridique de l’embryon au sein de sa mère, considère que c’est « un bon pas, dans la bonne direction » et qu’il est « absurde de nier le statut d’enfant à un fœtus mort-né alors que le droit civil le reconnaît dans plusieurs occasions, notamment en matière d’héritage [car] si un père meurt alors que sa femme est enceinte, le bébé, pourtant en devenir, hérite ».


Un besoin de légiférer

Le député Philippe Gosselin vient justement de déposer à la Présidence de l’Assemblée Nationale le 30 janvier 2008 un rapport sur la proposition de loi relative à la législation funéraire qui a été adoptée par le Sénat le 22 juin 2006.

Ce parlementaire explique qu’il souhaite rajouter à cette proposition de loi un volet sur le sujet afin de « répondre à la détresse des familles qui ont besoin de matérialiser le passage sur terre de leur bébé pour mieux en faire leur deuil, et [de] ne plus considérer, au XXIe si !cle, un enfant en devenir comme un ‘déchet anatomique’ à brûler ». Le texte viserait à abaisser de 22 à 12 semaines le seuil requis pour l’enregistrement par l’état-civil.

De son côté, le Médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, s’était penché sur ce problème en 2005 en mettant en place un groupe de travail et en regrettant que, par exemple, pour des couples non mariés, qui ne disposent pas encore de livret de famille avant la naissance de leur premier enfant commun, aucun document ne portera trace de leur premier enfant si celui-ci est « né sans vie » : «Un enfant né sans vie ne peut être reconnu » stipule ainsi l’Instruction générale relative à l’état-civil.

Jean-Paul Delevoye ne fait donc qu’encourager à légiférer sur le sujet : « Nous devons mieux accompagner les familles touchées par la mort d’un enfant avant la déclaration de naissance et rendre plus égalitaires les droits des parents placés dans cette situation. ».


Une relance d’un débat polémique

La décision de la Cour de cassation relance évidemment un débat déjà ancien sur le statut du fœtus.

La jurisprudence qui s’ouvre est antagoniste avec celle qui, en pénal, refuse, par l’arrêt du 29 juin 2001 de la Cour de cassation, l’incrimination d’homicide involontaire dans le cas de décès in utero survenus lors d’un accident de la circulation ou d’un accident médical.

La loi 2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière va dans le même sens en prenant acte de ce refus d’incrimination d’homicide.

Et comme le rappelle le député Richard Dell’Agnola dans son rapport du 20 mai 2003 sur la violence routière, le législateur essaie surtout de « combler un vide juridique sans relancer le débat sur le statut du fœtus ».


Car la question pose aussi d’autres problèmes éthiques très complexes.


Fœtus/embryon versus IVG ?

La loi sur l’avortement permet en France l’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la douzième semaine (depuis la loi 2001-588 du 4 juillet 2001, dite loi Guigou ; avant 2001, c’était jusqu’à la dixième semaine).

Mais d’autres lois protègent le fœtus et même l’embryon sur les éventuelles manipulations scientifiques : clonage, utilisation de cellules souches etc. comme la loi 2004-800 du 6 juillet 2004 sur la bioéthique qui interdit toute recherche sur l’embryon humain ou encore la ratification, dans le cadre du Conseil de l'Europe, de la Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à regard des applications de la biologie et de la médecine adoptée à Strasbourg le 19 novembre 1996 et signée par la France le 4 avril 1997 à Oviedo en Espagne.

Toute la question revient à cette incidence : à partir de quand peut-on considérer que le fœtus (humain) est un être humain à part entière, une personne ?


La grossesse, processus continu mais incertain à ses débuts

Si l’on ne tient que sur des considérations purement thermodynamiques, on sait que la survenue de la vie ou son extinction s’accompagnent de discontinuités énergétiques et chimiques dans le métabolisme qui peuvent s’exprimer par des changements brusques d’un certain nombre de grandeurs (comme la température).

Or, il est un fait que de la conception (et de la première division cellulaire) à la naissance, la grossesse est un processus continu. Donc, on peut difficilement admettre que la vie n’arrive qu’en cours de route dans le développement du fœtus.

En revanche, il est reconnu aussi qu’avant le troisième mois environ, le développement de l’embryon puis du fœtus n’est pas assuré d’aboutir, les fausses couches, les malformations etc. peuvent se produire et rien n’est donc certain sur le devenir de la grossesse. C’est donc difficile de considérer juridiquement l’existence d’une personne humaine à ce stade si instable du développement.


L’avortement, un progrès social indéniable malgré un seuil arbitraire

La législation sur l’avortement, sur laquelle personne ne compte revenir, fixe elle-même un seuil de durée de grossesse très arbitraire, différent en fonction de l’époque ou des pays : en Europe, cela va de 10 semaines en Slovénie et au Portugal à 24 semaines au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, en passant par la Suède avec 18 semaines, la plupart des pays ayant retenu 12 semaines, parfois, comme en Finlande, on autorise jusqu’à 20 semaines uniquement pour les mineures de moins de 17 ans (on peut se référer aux tableaux mis en lien ou à ce site).

Si éthiquement, cette législation peut heurter certaines consciences, socialement, elle a montré son efficacité dans la santé publique. L’interdiction de l’avortement n’a a priori jamais empêché les avortements, mais ceux-ci se faisaient de manière clandestine et dans des conditions sanitaires déplorables et dangereuses pour la femme. Selon l’OMS, 80 000 décès maternels sont encore provoqués chaque année par des avortements à risques.


L’utérus, domaine intime ou domaine public ?

Et finalement, cela revient à poser la question de savoir à partir de quelle durée de grossesse l’utérus de la femme n’est plus du domaine intime et passe, selon l’expression d’une médecin qui m’est chère, dans le domaine public.

Et cela, seule la société des humains peut le décider. Et par conséquent, ses représentants politiques, les parlementaires.



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison


Quelques dépêches de presse :

LCI : tout fœtus né sans vie est déclarable à l’état-civil.

Figaro : état civil pour le fœtus, la polémique s’installe.

RTL : le fœtus mort-né reconnu comme une personne.


 



      Article paru sur Agoravox.





http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=35813

http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20080212/tot-le-f-tus-est-il-une-personne-part-en-89f340e_1.html







http://www.lepost.fr/article/2008/02/25/1104032_le-f-tus-est-il-une-personne-a-part-entiere.html

 
        Article paru aussi
        sur CentPapiers.









 Article paru aussi sur LePost.



 


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