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20 janvier 2017 5 20 /01 /janvier /2017 06:52

Manuel, Benoît, Arnaud, Vincent, Sylvia, François et Jean-Luc sont dans un bateau qui tangue et qui n’est pas loin de couler. Où il est question de désigner un nouveau capitaine de pédalo. Troisièmes divagations.


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Le troisième et dernier débat du premier tour de la primaire socialiste a eu lieu ce jeudi 19 janvier 2017 en direct sur France 2 et Europe 1, animé par Léa Salamé, David Pujadas et Fabien Namias. Sans surprise, ce troisième débat en huit jours, interminable (trois heures), a été d’un profond ennui. Il y a eu pourtant 3,1 millions de téléspectateurs à ce débat.

Parmi les sept nains, il est utile de rappeler que six furent des "bébés Ayrault" : cinq ont fait partie de l’équipe ministérielle de Jean-Marc Ayrault et un autre a fait parti de son équipe municipale à Nantes. Seul, Jean-Luc Bennahmias est l’intrus de la primaire, mais il l’est aussi pour d’autres raisons, même si dans ce débat, il a fini de rigoler et de faire le clown.

Pour cette fois, au contraire du deuxième débat de dimanche dernier où il était présent dans un théâtre parisien pour écouter Michel Drucker (snobant ses anciens camarades de parti), François Hollande a fait savoir qu’il regardait la télévision ce jeudi soir (sans dire ce qu’il regardait vraiment, peut-être a-t-il regardé "L’héritage empoisonné" sur Arte, ou "Demolition Man" sur TMC, ou encore "La vengeance dans la peau" sur NT1ou le Cirque sur Gulli… ou plutôt "Départ immédiat" sur 6ter ?!).

Le Président était "retenu" à la préfecture de Charleville-Mézières (il vit de belles journées présidentielles !). L’ennui doit aussi le guetter à l’Élysée, car le mercredi 18 janvier 2017, il n’avait rien trouvé mieux à faire, comme Président de la République, que mobiliser le Premier Ministre et trois ministres pour s’occuper du "grand froid", faire le planning des chasse-neige, rédiger la note aux écoles pour ne pas laisser les enfants au froid dans la cour de récréation, etc.

Dans ce troisième débat, tout montre en fait une nette césure entre Manuel Valls, et sa posture d’homme d’État, responsable, prêt à gouverner (il est crédible sur ce registre puisqu’il vient de gouverner), opérationnel donc, dont l’objectif est bien l’élection présidentielle de 2017, et ses quatre autres concurrents du PS qui ont fait dans le catalogue des mesures jamais financées, dans une sorte de quatrième dimension, celle du mythe socialiste, et dont l’objectif, lui, n’est pas l’Élysée, mais plus modestement leur place au sein d’un Parti socialiste en déliquescence. Fossé entre la gauche qui veut gouverner le pays et la gauche qui veut gouverner un parti.

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Car si Manuel Valls, sans surprise non plus, s’est montré responsable tant sur les finances publiques que sur la sécurité, en tout cas, le moins irresponsable, pour ses principaux concurrents, c’était quasiment "on rase gratis". Tous les programmes sont vraiment nuls car oublient complètement la question du financement des mesures très coûteuses des uns et des autres. Ce qui signifie nécessairement que soit ces catalogues sont de la poudre aux yeux (du rêve réenchanté qui sera vite oublié), soit un nouveau matraquage fiscal massif.


Arnaud Montebourg

La palme des incantations et des moulinets dans l’air revient à Arnaud Montebourg qui a expliqué que ses milliards proposés à droite et à gauche seraient financés par le retour de la croissance et la baisse du chômage. Je me demande comment il a réussi à expliquer cela sans rire, alors que cela fait à peu près trente ans que tous les candidats à l’élection présidentielle ont envisagé le même type de solution, et plus particulièrement leur ancien "chef" François Hollande qui attend toujours la croissance et la baisse du chômage après quatre ans et demi de désastre économique (dont Arnaud Montebourg, chargé de l’industrie française pendant la moitié du quinquennat, est pleinement responsable).

Arnaud Montebourg a eu le toupet de dire, avec une forte dose de prétention et de bluff : « Mon programme, c’est de faire redémarrer les entreprises ! ». Comme si les entreprises attendaient sa venue à l’Élysée pour commencer à produire ! Et surtout, comme si le candidat n’avait jamais été ministre de ces mêmes entreprises pendant deux ans et demi ! (je le répète !).

Un peu plus tard, Arnaud Montebourg a proposé que 80% des marchés publics soient réservés aux PME nationales et a traité d’argument "du Medef" cette réflexion : ce ne sont pas les PME qui peuvent construire des porte-avions. La réponse fut hors sujet, parlant des grands groupes du CAC40… (on peut rester pantois sur les réponses qui mènent quasiment à l’absurdité au sens du dramaturge Eugène Ionesco !). Rien de ce qu’il a proposé n’est novateur. Il n’a pas dû lire le rapport de Lionel Stoléru qui vient de mourir (et dont je reparlerai plus tard), rapport qui date de 2007 !

Montrant quelques tendances autoritaires, Arnaud Montebourg a déclaré aussi vouloir obliger les pères à prendre des congés parentaux, afin de réduire les inégalités homme/femme dans l’entreprise. Il le disait d’ailleurs en face d’une Léa Salamé visiblement enceinte et qui travaillait encore !… Faudra-t-il alors rendre clandestine la naissance d’un enfant pour continuer à travailler et à faire carrière, dans un régime Montebourg ?!

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Enfin, je termine sur Arnaud Montebourg et sa conclusion ratée, car il a buté sur sa dernière phrase très "cliché" et pas du tout originale : « Le chemin est escarpé. Il n’est pas infran-chissable. Franchissons-le ensemble ! ». Il a malheureusement buté sur le mot "infranchissable", cela peut arriver, mais cela lui a coupé tout l’effet oratoire escompté, laissant à la prestation l’amer goût d’un avocat débutant…


Benoît Hamon

La palme de la dépense publique revient néanmoins à Benoît Hamon et à son "revenu universel", pas si universel que cela si le but est de le proposer sous condition d’âge et de ressources (je rappelle : universel veut dire "tout le monde"). Face aux multiples critiques depuis une semaine, le leader de l’aile gauche du PS a d’ailleurs édulcoré sa proposition : au lieu de 750 euros, ce serait un revenu de 600 euros, et d’abord seulement pour les "jeunes" et les "pauvres", ce qui coûterait 45 milliards d’euros par an, et généralisée, la mesure coûterait 300 milliards d’euros chaque année (certains parlaient de 450 milliards d’euros mais on n’est pas à quelques centaines de milliards d’euros près, n’est-ce pas ?). Arnaud Montebourg, qui a compris que Benoît Hamon était en fait son principal concurrent du premier tour, a pilonné le projet en invoquant un "deuxième budget de l’État".

Comment est-il financé ? Ce n’est pas faute d’avoir été interrogé sur ce sujet, mais la seule réponse fut : on a bien trouvé 40 milliards d’euros pour le CICE ! Un peu court alors qu’on prêche l’indépendance du pays. Autant d’irresponsabilité laisse pantois. Sans conséquence puisque ces guignols savent qu’ils ne seront pas élus. Mais cette irresponsabilité s’est retrouvée aussi sur d’autres sujets.

Benoît Hamon, par exemple, critiquant le prix trop fort de certains médicaments (il a cité comme exemple ceux qui traitent l’hépatite C) a proposé l’autorisation d’en produire des génériques dès leur mise sur le marché.

C’est ne rien comprendre à la recherche médicale et à son coût gigantesque car les tests cliniques sont longs (heureusement pour les patients !), et n’aboutissent pas forcément. Avec une telle proposition, il n’y aurait plus de recherche médicale en France, et on ne ferait plus progresser la médecine. Comment pense-t-il que le progrès se gagne ? Avec de l’argent, oui, c’est sale l’argent, mais sans argent, pas de progrès. Cela n’empêche pas de la régulation (certains groupes pharmaceutiques ont même fait des excès, surtout sur la sécurité des patients, il y a plusieurs affaires qui sont de grands scandales, mais ce n’était pas le sujet ici).

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Comme François de Rugy qui l’avait précédé dans l’expression de la proposition, Benoît Hamon s’est déclaré favorable à l’euthanasie en seulement trois phrases, avec des clichés et des arguments particulièrement simplistes qui ont ruiné d’un simple mouvement de menton trois ans de débats parlementaires compliqués, nuancés et consensuels. Il a considéré la loi Claeys-Leonetti comme une "première étape" alors que ce n’est pas le cas, et il a dit qu’il fallait aller plus loin alors que cette loi résout justement 99,99% des situations difficiles (et qu’aucune loi de toute façon ne pourrait résoudre 100% des situations). Avant de continuer à légiférer (le cancer bureaucratique français), il faudrait d’abord évaluer l’application de cette loi qui n’a même pas une année d’existence. De plus, ses explications ont montré qu’il confondait (volontairement ou pas ?) les soins palliatifs, la sédation profonde et l’euthanasie. Des années de débats très nuancés ont été réduites en poussières par trois phrases lapidaires, c’est désolant.

Si le sujet n’était pas aussi grave, je lui proposerais bien de commencer par "euthanasier" le PS qui est un parti anachronique dans la France de 2017 et qui est sous acharnement thérapeutique depuis au moins mai 2005 et la coupure du référendum sur le TCE (si ce n’est depuis juin 1982 et le tournant de la rigueur).


François de Rugy

François de Rugy, lui, on le croyait raisonnable sur le plan budgétaire (il avait dit auparavant un truc du genre : eh, les gars, arrêtez de faire des dépenses, il faut penser à nos enfants qui récupéreront notre dette !) et voici qu’il a lâché sa mesure démagogique à deux balles : il faudrait restructurer la dette de tous les pays européens, pas seulement de la Grèce. Heureusement, un journaliste a demandé de préciser : restructurer, cela veut dire annuler une partie de la dette.

Et pourrait-on savoir quelles en seraient les conséquences concrètes ? Non. Pourtant, elles sont faciles à deviner : plus personne ne voudrait prêter aux États qui restructurent leur dette sans préavis, si bien qu’il y aurait intérêt à avoir un budget équilibré (sans déficit, pas même 3% !) ou alors, c’est le shutdown (on ne paierait plus les fonctionnaires). Bref, cela signifierait des coupes budgétaires bien plus sévères que celles, mesurées, que propose François Fillon (qui semblait jouer le rôle de l’épouvantail des sept nains).

Sur le sujet économique, François de Rugy, pourtant "pragmatique", a été décevant. Il ne connaît visiblement pas les entreprises. Il a parlé de la filière nautique (il est député de Nantes) dont 80% du CA se fait à l’exportation (c’est pour expliquer que le protectionnisme serait un choc contre l’économie française, et il a raison de le dire), mais il a poursuivi en disant que dans leur ensemble, les entreprises françaises exportent 25% de leur CA, et d’en conclure qu’un employé sur quatre travaille à l’exportation, un ingénieur sur quatre, un ouvrier sur quatre, etc. Eh non, monsieur de Rugy, il n’y a pas proportionnalité entre CA et nombre d’employés, et ce qui compte, d’ailleurs, c’est la création de valeur, c’est-à-dire, à quel moment et à quel endroit se fait le bénéfice.

Enfin, de réputation raisonnable, François de Rugy a fait une proposition particulièrement démagogique : il a proposé de faire adopter l’euthanasie par référendum (on imagine ce qu’il dirait si l’on soumettait le sujet de la peine de mort au référendum). L’euthanasie est un sujet très compliqué qui nécessite nuance et réflexion et pas un débat simpliste où seuls un "oui" ou un "non" peut répondre à des problématiques qui sont aussi différentes et nombreuses qu’il n’y a de personnes concernées. Les débats parlementaires de très haute volée sur le sujet ont montré qu’il était possible de légiférer sur la fin de vie de manière consensuelle et satisfaisante (c’est peut-être même l’un des rares sujets dont François Hollande pourrait se glorifier de son quinquennat, à ma grande surprise d’ailleurs).


Sylvia Pinel

Sylvia Pinel, la seule femme de la promo, a pris plus d’assurance dans ce troisième débat. Vêtue d’un tailleur rouge vif, sur un fond reposant (bleu et rose) qui changeait du rouge agressif (pour les yeux) du deuxième débat, elle brillait au milieu de ces costumes sombres et tristes (ce n’est pas sexiste de parler des vêtements, car visuellement, on ne pouvait pas la "rater"). Seul Jean-Luc Bennahmias, en bout de tribunes, avait gardé son col ouvert.

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Par le hasard, elle était placée au centre des tribunes, et elle s’est permis de faire la leçon, d’interpeller Benoît Hamon sur l’absence de début de financement de son "revenu universel". Elle fut quasiment la seule à se préoccuper de la dépendance et de renforcer les moyens d’aider les "aidants".

Comme beaucoup de ses concurrents qui n’en ont pas parlé, Sylvia Pinel a promu la PMA pour toutes les femmes… y compris donc au sein de familles homosexuelles. Elle venait alors de dire qu’il fallait arrêter les préjugés sexistes, quelques minutes après la tirade d’Arnaud Montebourg, qui, apparemment, n’a pas dû connaître beaucoup d’entreprises (à part Habitat), décrivant les réunions dans les entreprises avec uniquement des hommes (vieux souvent, selon lui) et les rares femmes seraient jeunes et apporteraient seulement le café (on a l’impression qu’il a une vision des années 1970 des entreprises…).


Vincent Peillon et Manuel Valls

Vincent Peillon aussi a parlé de la dépendance en proposant de faire financer par l’État 10 000 places par an dans des EHPAD mais son dogmatisme est ressorti lorsqu’il a accompagné cette mesure d’une autre, d’une taxation renforcée des successions et des legs (c’est une obsession chez lui, pour lui faire croire qu’il est bien de gauche).

Parmi les rares moments de dissipation, Vincent Peillon s’est permis de reprendre Manuel Valls sur l’emploi du mot "guerre" qu’il mettait à toutes les sauces (notamment contre Donald Trump !). Manuel Valls lui a répondu en évoquant son "vieux professeur" qui lui disait de bien choisir ses mots. Vincent Peillon a été piqué au vif et lui a demandé que le mot "professeur" ne fût pas une …insulte !


La sécurité

Toute une partie du débat a été consacrée à la sécurité, dans une période particulière de l’histoire de France puisque la campagne présidentielle se déroule pour la première fois en état d’urgence en raison des risques terroristes. Pourtant, à part Manuel Valls, ce sujet semble être très secondaire aux yeux des candidats de la primaire PS. L’ombre de Christiane Taubira planait sur le plateau.

On peut en rester pantois (encore) ! Tout a tourné autour des peines de substitution, de réduction de peines, d’éviter la prison, de construire de nouvelles places de prison… mais rien pour réduire la délinquance, la criminalité !… Quelle misère ! Quand on écoute ce genre de discussion, on comprend pourquoi le FN a de grandes chances d’atteindre le second tour de l’élection présidentielle…


Premier tour le dimanche 22 janvier 2017

Je ne suis pas sûr que la participation soit au rendez-vous de cette primaire socialiste tardive et inutile, sans enjeu sinon le devenir du Parti socialiste. La campagne présidentielle n’a pas attendu les socialistes et Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon occupent suffisamment le terrain du PS pour rendre son candidat …inutile ! Pour les organisateurs, le seuil de réussite semblerait être de 2 millions de participants.

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Je vais faire un pronostic sur le résultat du premier tour. C’est toujours dangereux d’en faire, le risque est qu’il soit mauvais mais tant pis, puisque c’est de la téléréalité, jouons le jeu. Je ne mets pas de pourcentage, car ce qui compte, à mon sens, c’est l’ordre d’arrivée que je propose ainsi, dans le sens décroissant : 1er Benoît Hamon ; 2e Manuel Valls ; 3e Arnaud Montebourg ; 4e Vincent Peillon ; 5e Sylvia Pinel ; 6e François de Rugy ; 7e Jean-Luc Bennahmias. Ce qui compte, de toute façon, c’est l’ordre des trois premiers, les seuls susceptibles d’atteindre le second tour.

Mais, il y a plus important.
Par exemple, l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (20 janvier 2017)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Comment voter à la primaire socialiste de janvier 2017 ?
Troisième débat de la primaire socialiste du 19 janvier 2017.
Deuxième débat de la primaire socialiste du 15 janvier 2017.
Premier débat de la primaire socialiste du 12 janvier 2017.
Jean-Christophe Cambadélis.
La primaire socialiste de janvier 2017.
L’élection présidentielle vue en janvier 2017.
François Hollande.
Emmanuel Macron.
Jean-Luc Mélenchon.
Manuel Valls.
Arnaud Montebourg.
Benoît Hamon.
Vincent Peillon.
Programme de Manuel Valls (à télécharger).
Programme de Benoît Hamon (à télécharger).
Programme d’Arnaud Montebourg (à télécharger).
Programme de Vincent Peillon (à télécharger).
Programme de François de Rugy (à télécharger).
Programme de Jean-Luc Bennahmias.
Programme de Sylvia Pinel (à télécharger).

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20170119-primaire-ps.html

http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/primaire-ps-2017-troisieme-debat-188781

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2017/01/20/34826718.html

 

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