« Dis-moi que tu m'aimes encore si tu l'oses
J'aimerais que tu te trouves autre chose
De mieux »
("Fuir le bonheur de peur qu'il ne se sauve", août 1983,
Jane Birkin, paroles et musique de Serge Gainsbourg)
Dimanche maussade malgré l'été, malgré le soleil, ce 16 juillet 2023 : l'annonce de la mort de Jane Birkin, la chanteuse et actrice britannique, à Paris à l'âge de 76 ans, a ému de nombreux Français qui se sentaient très proches d'elle. Elle était venue en France et elle faisait partie du paysage familier de la France.
Moi-même, je l'ai encore "croisée" au détour d'un zapping un soir de cette semaine ; elle jouait dans une comédie de Claude Zidi avec Pierre Richard (fils de Claude Piéplu), c'était "La moutarde me monte au nez" (sorti le 9 octobre 1974 dans la France giscardienne), diffusé sur Arte le 10 juillet dernier, et je me suis alors arrêté à cette chaîne (je suis vieux jeu, je n'ai pas Netflix).
Ce n'était sans doute pas le meilleur film, parmi les quatre-vingts dans lesquels elle a joué (elle a "fait" tous les styles, du cinéma populaire au cinéma d'auteur), mais cette comédie légère était la bienvenue dans ce climat très lourd de tensions internationales (et nationales) permanentes. Son accent british, tellement adorable, tellement indispensable malgré ses quelque soixante ans de vie en France, était paradoxalement tellement représentatif de la "French life" !
Oui, je sais, Jane Birkin n'était justement représentative de personne, de rien, du moins le voulait-elle, mais bien malgré elle, elle donnait une image de la femme, archi-belle et pourtant tellement en dehors des canons classiques de la beauté (un peu à l'instar d'une Audrey Hepburn), une image de femme combattante aussi, celle qui défend des causes, celle des animaux par exemple. Elle était malade, très malade, mais elle vivait, elle était encore présente, devant le public de l'Olympia à la cérémonie des Césars le 24 février 2023, aux côtés de sa fille Charlotte Gainsbourg, de sa petite-fille Alice Attal pour un film documentaire sur sa vie ("Jane par Charlotte" réalisé par sa fille, sorti le 12 janvier 2022).
Elle a aussi joué au théâtre, fait des lectures aux côtés notamment de Michel Piccoli il y a une dizaine d'années. Elle ne s'était jamais arrêtée avec le succès (« Il paraît qu'il vaut mieux travailler que tourner en rond. »).
Elle comptait se produire en 2023, ce printemps, cet été, elle avait prévu plein de participations à des concerts, à des festivals, qu'elle a dû annuler à cause de sa santé. Auteure d'une trentaine de disques, la chanteuse a aussi produit des albums récemment, avec notamment Étienne Daho, aussi Salvator Adamo, un peu avant, un hommage à Barbara avec le pianiste Alexandre Tharaud... Elle était fatiguée, mais elle y mettait toute son énergie, elle ne faisait pas les choses à moitié.
Dans une interview accordée à "Télérama" en décembre 2014, elle était sous le choc de la perte d'un enfant : « Rien ne peut consoler. En tant que mère, je n’ai plus confiance dans la vie. Avant, j’étais sûre que rien n’arriverait aux miens si j’étais auprès d’eux. J’avais la conviction démesurée que tout irait bien. Maintenant... Une panique nouvelle est apparue pour les autres enfants. Ça change une vie. Complètement. ».
Dans cet entretien, elle expliquait qu'elle n'a jamais pensé choquer le monde et pourtant, elle a fait de nombreuses transgressions dans sa carrière, peut-être malgré elle. Aujourd'hui, on se demande bien pourquoi elle avait tant choqué et si elle ne l'imaginait pas à l'époque, c'était peut-être parce qu'elle était une femme moderne avant l'heure. Par exemple, dans le film "Blow-Up" (1966) de Michelangelo Antonioni, on la voyait entièrement nue pendant quelques secondes. Dans la fameuse chanson "Je t'aime... moi non plus", le scandale était arrivé jusqu'aux oreilles du pape qui s'est senti obligé de la condamner : « Serge disait que c’était notre meilleur attaché de presse. ». Dans "Le Pirate" (1984) de Jacques Doillon, son personnage aimait à la fois un homme et une femme. Etc.
La France est endeuillée pendant qu'elle part en vacances. Voici, dans la vidéo suivante, en son hommage, un petit rappel de cette fuite du bonheur, ce bonheur qui s'éloigne au fur et à mesure que cette Terre tourne et tourne encore. Une chanson qui avait été conçue et enregistrée alors que Serge Gainsbourg et Jane Birkin venaient de se séparer et qui reste, comme son interprète, intemporelle.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (16 juillet 2023)
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Pour aller plus loin :
Serge Gainsbourg.
Les 75 ans de Jane.
Jane Birkin.
Justine Triet.
Clint Eastwood.
Les Randonneuses (série télévisée).
L'Affaire d'Outreau (documentaire télévisé).
Lycée Toulouse-Lautrec (série télévisée).
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Charlie Chaplin.
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230716-jane-birkin.html
https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/intemporelle-jane-birkin-rejoint-249402
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