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22 octobre 2025 3 22 /10 /octobre /2025 04:40

« J'ai le sentiment qu'il ne faut jamais bâtir ou vouloir bâtir une carrière politique en ne faisant que cela. On ne peut s'engager dans la vie publique au service de ses concitoyens que si, professionnellement, d'une manière générale, on a eu l'occasion de service ses concitoyens à travers une vie professionnelle différente. Peut-on défendre les intérêts de ses concitoyens et dire qu'en leur nom, on défend telle ou telle cause si on n'a pas eu l'occasion de pratiquer autre chose d'une manière moins conflictuelle mais ô combien instructive. » (Daniel Hoeffel, le 19 décembre 2019).



 


L'ancien ministre alsacien Daniel Hoeffel est mort le mardi 14 octobre 2025 à l'âge de 96 ans (il est né le 23 janvier 1929). Il faisait partie, avec Marcel Rudloff, des deux centristes alsaciens qui ont repris la succession de l'historique Pierre Pflimlin, ancien Président du Conseil, dans l'incarnation politique de Strasbourg et de l'Alsace, tant en France qu'en Europe, à qui on doit que Strasbourg est une capitale européenne, siège du Parlement Européen.

Parce que protestant (il a eu de nombreux pasteurs dans sa famille, en particulier son grand-père Charles-Frédéric Hoeffel, et aussi son frère Michel Hoeffel, président de l'Église protestante de la confession d'Augsbourg, d'Alsace et de Lorraine), il ne paraissait pas forcément très jovial d'un premier abord, néanmoins, il avait de l'humour et n'hésitait pas à en user. Daniel Hoeffel a longtemps était le fils de son père, Robert Hoeffel, agriculteur, sénateur RPF sous la Quatrième République de 1948 à 1959 (plus exactement, membre du Conseil de la République, chambre haute). Daniel Hoeffel a ainsi été élu maire de Handschuheim en mars 1965, reprenant la succession de son père (ce dernier, maire de 1937 à 1965), et l'est resté jusqu'en mars 2008, soit pendant quarante-trois ans !

Mais maire n'était pas forcément une véritable activité politique pour Daniel Hoeffel et il a toujours milité pour qu'un responsable politique ne vienne pas de nulle part mais de la vie réelle, avec une véritable vie professionnelle, pour comprendre la vie quotidienne des gens.

Toutefois, il était passionné par la politique. D'abord, son père parlementaire, ensuite, ses études le prédisposaient à la politique : diplômé de l'Institut d'études politiques de Strasbourg, il a fait une thèse de doctorat en droit sur le droit de dissolution sous la Quatrième République, qui n'est pas sans rappeler une actualité brûlante aujourd'hui. Il a fait une première carrière comme attaché à la chambre patronale du Bas-Rhin et fut membre du cabinet du général Pierre Koenig, Ministre de la Défense nationale te des Forces armées du 23 février 1955 au 6 octobre 1955.
 


Son entrée dans la vie politique s'est faite progressivement jusqu'au sommet du pouvoir politique, le gouvernement. Élu en 1973 au conseil économique et social d'Alsace dont il a été le président de 1976 à 1977, Daniel Hoeffel s'est présenté comme tête d'une liste de la majorité aux élections sénatoriales (où figurait Marcel Rudloff qui fut aussi élu). Il fut élu sénateur du Bas-Rhin de septembre 1977 à septembre 2004, sans discontinuer sauf lorsqu'il était au gouvernement, avec l'étiquette centriste du CDS, faisant partie de l'UDF, puis de l'UMP à partir de 2002.

Bombardé à la présidence du groupe Union centriste au Sénat dès 1977, Daniel Hoeffel est entré par cette qualité au gouvernement de Raymond Barre : Secrétaire d'État (auprès d'abord de Simone Veil) chargé de la Santé et de la Famille, du 3 avril 1978 au 2 octobre 1980, puis aux Postes et Télécommunications par intérim, ainsi que Ministre des Transports du 2 octobre 1980 au 2 mai 1981. Daniel Hoeffel retourna au gouvernement sous la deuxième cohabitation, appelé par Édouard Balladur, comme Ministre délégué auprès de Charles Pasqua chargé de l'Aménagement du territoire et des Collectivités locales du 30 mars 1993 au 11 mai 1995, attributions qui étaient alors une évidence pour lui.

C'est pendant cette période giscardienne (fin années 1970) qu'il est devenu un élu alsacien incontournable : il a été élu président du conseil général du Bas-Rhin de mars 1979 à mars 1998, pendant près de vingt ans, l'un des départements les plus prospères de France (élu d'un canton de Strasbourg). Mine de rien, avec son mandat de maire, il cumulait trois fonctions exécutives ou parlementaires (maire, président de conseil général et sénateur ou ministre), et a pris de nombreuses responsabilités d'élus locaux, en particulier, il a été président de l'Association des maires du Bas-Rhin, et surtout, président de l'Association des maires de France de 2002 à 2004. Au Sénat, il fut aussi premier vice-président du Sénat de 2001 à 2004.


Son élection sur un canton de Strasbourg n'était pas évidente pour lui puisqu'en mars 1979, il s'était présenté contre le sortant, un cacique du RPR, André Bord, qu'il a battu de justesse (moins d'une centaine de voix), ce qui lui a permis de conquérir la présidence du département (cette bataille alsacienne reprenait les enjeux de la querelle nationale entre Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac). André Bord, ancien résistant, député, ancien ministre, élu municipal de Strasbourg, avait présidé le conseil général de 1967 à 1979. Les deux ont cru que l'autre n'irait pas jusqu'au bout de sa candidature. Plus tard, Daniel Hoeffel a lâché sur cette amère bataille ce commentaire désolé : « Fin d’une épreuve moralement, psychologiquement et amicalement très dure ».

En mars 1992, il a mené à la victoire la liste UDF-RPR aux élections régionales en Alsace, mais pour conserver ses mandats de sénateur et président de conseil général, il a laissé la présidence du conseil régional d'Alsace au sortant et ami Marcel Rudloff, ancien maire de Strasbourg de 1983 à 1989, qui a présidé l'Alsace de 1980 à 1996 (en mars 1992, Marcel Rudloff a démissionné de son mandat de sénateur pour siéger... au Conseil Constitutionnel ; à l'époque, ses membres pouvaient conserver leurs mandats locaux, parfois importants).


Pendant une vingtaine d'années, Daniel Hoeffel (comme Marcel Rudloff) représentait les anciens dans la querelle entre les anciens et les modernes au sein du parti centriste, le CDS, hégémonique en Alsace (parlementaires, élus locaux, etc.). Mais il a fini par échouer lorsqu'il s'est trouvé confronté, aux élections sénatoriales de septembre 2004 (il avait alors 75 ans), à un autre centriste, Philippe Richert, son successeur à la présidence du conseil général du Bas-Rhin, qui l'a emporté (la liste dissidente sde Daniel Hoeffel n'ayant recueilli que 12,8% des voix). Ces élections ont été annulées et se sont reproduites quelques mois plus tard, mais Daniel Hoeffel avait compris qu'il était temps pour lui de décrocher et de laisser la place aux jeunes. Il a fini son mandat de maire jusqu'en mars 2008 (il avait 79 ans) et s'est retiré de la vie politique.
 


Passionné par la construction européenne, il n'imaginait pas l'Alsace sans la France, mais non plus sans l'Europe qui fait la force de la France, Daniel Hoeffel, en tant que sénateur, a été membre de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe de novembre 1995 à novembre 2001. En particulier, il a publié le 19 avril 2000 un rapport sur le rôle du Conseil de l'Europe dans l'aménagement du territoire dans lequel il a écrit : « Tout en étant consciente de l'importance du rôle dans ce domaine de l'Union Européenne aux niveaux de ses pays membres et des pays limitrophes à l'Union, l'Assemblée reste convaincue que le Conseil de l'Europe constitue le cadre approprié pour une approche paneuropéenne globale et, plus particulièrement, pour ce qui concerne les pays d'Europe centrale et orientale, non membres de l'Union et non limitrophes de celle-ci. ».

Dans le même esprit, il avait milité pour la création du Conseil d'Alsace en avril 2013, rejeté par référendum mais qui finalement, a réussi à émerger en janvier 2021 sous l'appellation Collectivité européenne d'Alsace, regroupant les deux conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin avec près de 2 millions d'habitants. En bon Alsacien, il s'était auparavant opposé à la fusion de l'Alsace dans la région Grand Est en 2015.

Rendant hommage à Daniel Hoeffel dans "Les Dernières Nouvelles d'Alsace" le 16 octobre 2025, le journaliste Jacques Fortier a écrit : « Il incarna le centriste alsacien fidèle, rigoureux et généreux. (…) Daniel Hoeffel, avec son élocution martelée, ses discours en trois points, son sens de la litote, son humour à froid, a marqué une page de l’histoire alsacienne. Bien des élus actuels lui doivent beaucoup, qui l’ont ensuite un peu oublié. L’homme ne s’en offusquait pas. Ceux qui le connaissaient bien savaient qu’à côté d’une rigueur tout alsacienne, fier de ses ascendances paysannes, il cultivait aussi une bienveillante philosophie. ». RIP.



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (17 octobre 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
"Pilier de la politique alsacienne, ex-ministre… Daniel Hoeffel, la rigueur et la philosophie", de Jacques Fortier, le 16 octobre 2025, dans "Les Dernière Nouvelles d'Alsace".
André Santini.
Daniel Hoeffel.
Olivier Stirn.
Claude Malhuret.
Didier Borotra.
François Bayrou.
Jean-François Kahn.
Laurence Vichnievsky.
Monique Pelletier.
Olivier Falorni.
Henri Grouès.
Anne-Marie Comparini.
Marielle de Sarnez.

 

 

 

 

 

 

 

 

 







https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20251014-daniel-hoeffel.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/daniel-hoeffel-grand-defenseur-de-263920

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/10/17/article-sr-20251014-daniel-hoeffel.html


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