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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200518-macron-europe.html
Document final :
https://www.elysee.fr/admin/upload/default/0001/07/d4fe338244d28de018c5bf0c538c83c337285d0e.pdf
PROPOS INTRODUCTIFS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, M. EMMANUEL MACRON, LORS DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE COMMUNE AVEC LA CHANCELIÈRE DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE, MME ANGELA MERKEL
Emmanuel MACRON
Merci beaucoup, Madame la Chancelière, chère Angela MERKEL.
En effet, nous avons eu l'occasion aujourd'hui et ces dernières semaines d'avoir de nombreux échanges et discussions pour approfondir nos positions communes et bâtir cet accord franco-allemand dans un contexte inédit qu'Angela MERKEL vient de rappeler.
La crise que nous vivons est inédite et elle implique, elle impose une réponse qui, pour être efficace, doit être collective et d'abord européenne. Parce que, et ça nous l'avons dit l'un et l'autre depuis le début de cette crise, le virus ne connaît pas de frontière et a touché toute notre Europe.
L'Europe, il faut bien le dire et avoir cette lucidité, a été sans doute mise en défaut au début de cette crise, d'abord parce que la compétence sanitaire n'est pas une compétence communautaire et donc nous ne devons pas demander à l'Union européenne ce qui n'est pas de sa compétence.
Aussi parce qu'il y a eu des réflexes nationalistes, en particulier sur la gestion des frontières, y compris à l'intérieur de l'espace Schengen. Et nous devons à cet égard tirer toutes les leçons de cette pandémie. Angela MERKEL vient de le rappeler et je partage totalement ce qu'elle vient de dire à cet égard aussi.
Ensuite, nous devons aussi dire que des actions remarquables au niveau européen ont été conduites. Je ne veux pas oublier les gestes de solidarité très concrets qui ont donné de l'Europe un visage humain. Cette solidarité a sauvé des vies. L'Allemagne, la Suisse, le Luxembourg, l'Autriche ont accueilli près de 200 patients français. L'Allemagne comme la France ont apporté et livré beaucoup de matériel à l'Italie et plusieurs autres pays. Et cette solidarité, c'est aussi cet esprit européen et c'est l'Europe qui a fonctionné.
Nous avons eu aussi une réponse économique et monétaire très forte dès le début de la crise. La Banque centrale européenne a agi dès la mi-mars de manière massive, adaptée et a permis d'éviter une crise financière de court terme et l'écartement des taux d'intérêt entre les pays européens. La Commission européenne a très tôt su lever les règles qui auraient pu nous contraindre en matière budgétaire ou en matière de concurrence et a permis au niveau national d'apporter des réponses sectorielles qui étaient absolument indispensables.
Cette réponse très importante a été aussi accompagnée, je le disais, de manques, d'égoïsmes, de retards. Je pense à la question des frontières. Je n'ai sur ce sujet aucun tabou et la France, en coordination avec l'Allemagne, a poussé activement avec succès pour une fermeture stricte des frontières extérieures de l'Union européenne.
Mais à l'intérieur de l'Europe, c'est à nos yeux différent, non pas par naïveté mais par souci d'efficacité car nous devons être à la hauteur de notre histoire et ne céder à aucune démagogie. Nous avons posé des restrictions à toutes nos frontières, y compris avec l'Allemagne, car cela était nécessaire. Nous l'avons fait de manière coordonnée, nous avons constamment échangé avec la Chancelière MERKEL. Nous n'avons pas fermé ses frontières à toute circulation et nous avons laissé en particulier nos 350 000 travailleurs frontaliers pouvoir continuer à œuvrer. Nous avons aussi laissé passer certains produits alimentaires ou sanitaires essentiels pour nos pays. D'autres pays européens, simplement, n'ont pas eu ce réflexe et ont fermé toutes les frontières sans prévenir leurs voisins, ce qui a donné une triste image de notre Europe.
Au-delà de cela, il y a des débats essentiels qui demeurent : celui de la solidarité financière en Europe, de notre souveraineté européenne, d'une Europe plus forte. Et c'est cette conviction commune que nous portons avec la Chancelière qui nous a conduits à présenter aujourd'hui cette initiative franco-allemande. Elle est le fruit d'un travail bilatéral mais d’échange avec plusieurs de nos partenaires et ce travail que nous avons su mener avec l’Italie, l’Espagne, le Portugal, les Pays-Bas et plusieurs autres, avec aussi le Président du Conseil comme la Présidente de la Commission.
La Chancelière a évoqué les grandes lignes de cette initiative, et je n’y reviendrai donc que brièvement, en insistant sur sa cohérence. Il y a 4 piliers à notre initiative : la protection sanitaire, la relance budgétaire, la transition écologique, la souveraineté économique. Et je suis convaincu que c’est le socle essentiel de la reconstruction de nos vies, de nos économies, de nos sociétés qui passent par cette stratégie.
En effet, sur le plan sanitaire, notre souhait, notre volonté ensemble est de doter l'Europe de compétence très concrète en matière de santé et de nous engager ensemble. Des stocks communs de masques ou de tests, des capacités d’achat et de production communes ou coordonnées pour les traitements et les vaccins. Des plans de prévention partagés des épidémies, des méthodes communes pour recenser et identifier les cas. Cette Europe de la santé n'a jamais existé. Elle doit devenir notre priorité.
Sur le plan budgétaire et des outils de solidarité, la Chancelière vient de rappeler un instant l'importance de ce fonds de relance de 500 milliards d'euros qui viendra compléter nos perspectives financières et donc notre budget européen. Mais sur la base des traités existants, pour la première fois ensemble, ce que nous proposons ensemble, Allemagne, France, aux 27 pays membres, c'est d'une part de décider tous ensemble, d'aller lever une dette commune sur les marchés et d'utiliser ces 500 milliards d'euros d'aides qui aura vocation à être remboursés, comme l'a rappelé madame la Chancelière, de l'utiliser pour apporter des financements qui seront fléchés en priorité sur les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire et économique et les régions les plus impactées par cette crise. Et donc d'accepter de vrais transferts, une vraie stratégie commune pour compléter notre budget européen. C'est une étape majeure et nous espérons que la Commission européenne, dans quelques jours, portera cette proposition et qu'elle sera ensuite suivie par l'ensemble de nos partenaires.
Ce fonds de relance, c'est 500 milliards qui ne seront pas des prêts octroyés à telle ou telle région ou tel ou tel secteur, mais bien des dotations budgétaires sur la base de notre endettement commun, viendront compléter l'accord trouvé par nos ministres des Finances de 500 milliards d'euros avec le programme « SURE » de réassurance par la Commission, mais aussi les prêts dans le cadre du Mécanisme européen de stabilité et des prêts délivré par la Banque européenne d'investissement. 500 milliards de prêts, l'accord déjà trouvé par nos ministres de Finance, 500 milliards de dotation budgétaire au travers de la proposition de fonds de relance germano-française. C'est ce qui nous semble indispensable pour compléter des initiatives qui ont été d'ores et déjà prises et continueront de l'être au niveau national.
Troisième levier que nous défendons ensemble, c'est l'accélération de la transition écologique et de la transition numérique. Notre message est simple : le « green deal », cette transformation verte de notre économie, ne doit pas être remise en cause. Elle doit être accélérée. Et secteur par secteur, la relance européenne devra être accompagnée d'engagements et de conditions en matière de climat, d'environnement, de biodiversité.
Enfin, et c'est le quatrième axe de notre accord franco-allemand, c'est celui d'une vraie souveraineté européenne. Cette conviction, nous la portons ensemble, c'est celle qui consiste à réduire notre dépendance à l'extérieur dans les secteurs stratégiques comme la production de médicaments, mais aussi d'améliorer la protection de nos entreprises, de mieux lutter contre les investissements prédateurs venant d'autres puissances, mais aussi pour attirer ou relocaliser les investissements clés en Europe. L'Europe ne doit pas se fermer au commerce mondial. La France encore moins. Elle doit parfois savoir être moins naïve, elle doit mieux accompagner les secteurs les plus stratégiques et nous pensons qu'il nous faut mieux partager une stratégie commune d'autonomie industrielle, économique. C'est en tout cas ce que nous allons continuer de faire et renforcer en franco-allemand.
Je ne serai pas plus long. Nous allons maintenant répondre à vos questions.
Emmanuel Macron, le 18 mai 2020 à Paris.
Source : elysee.fr
http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20200518-discours-macron-merkel.html