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22 mai 2019 3 22 /05 /mai /2019 01:53

« La laïcité est d’abord un idéal avant d’être une norme juridique créatrice de droits et d’obligations. Le caractère laïque de la République ne sera définitivement acquis que si toutes les composantes de la société, et notamment les populations issues de l’immigration, voient dans ce principe une chance, une garantie de pouvoir exercer librement leur culte et, plus généralement, une valeur indissociable des notions de liberté et d’égalité. C’est donc essentiellement vers un effort d’explication, d‘information et d’éducation à la laïcité que doit s’orienter l’action publique. » (André Rossinot, le 20 septembre 2006).


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Mercredi 22 mai 2019, André Rossinot fête son 80e anniversaire. Né à Briey, dans le nord de la Meurthe-et-Moselle, André Rossinot reste sans doute la personnalité politique la plus forte de ce département des quarante dernières années. Mon titre est un peu "exagéré" pour ce républicain enthousiaste, nourri au radicalisme lorrain. Nancy, la ville catholique par excellence, s’est associée pendant de longues années avec un maire radical. Il n’y a donc rien d’étrange à ce que ce fût André Rossinot qui présida une mission sur la laïcité en 2006 (voir plus loin). Je reprends ici seulement le titre, en le parodiant, de son livre sur le roi Stanislas, devenu duc de Lorraine, coécrit avec Emmanuel Haymann (éd. Michel Lafon, 1999).

Aujourd’hui quasiment à la retraite (pas tout à fait encore !), André Rossinot montre des allures de père Noël, mais sous cette apparence débonnaire, il y a un homme politique rigoureux, exigeant, qui a montré une vision pour la ville de Nancy et son agglomération. Grâce à lui, Nancy a rompu avec la morosité des années 1970 et avec l’instabilité des maires qui étaient évincés à la fin de leur premier ou au milieu de leur second mandat à cause de la réalisation des projets de leur prédécesseur (c’est en fait un peu plus compliqué que cela).

L’une des plus dramatiques "défaites" de Nancy a eu lieu à la fin des années 1960 lorsqu’il a été décidé de faire passer l’autoroute Paris-Strasbourg (A4) par Reims et Metz et pas par Nancy comme la logique géométrique aurait voulu : le maire de Reims et le maire de Metz étaient alors membres du gouvernement, tandis que le maire de Nancy manquait à son rayonnement national, même si à cette époque, Jean-Jacques Servan-Schreiber a eu quelques velléités (ce dernier a quand même été élu député de Nancy contre un gaulliste sortant, ancien résistant, considéré comme indéboulonnable, et fut également président du conseil régional de Lorraine à l’époque d’avant la décentralisation). L’autre "défaite" de Nancy, ce fut le choix en 1969 de Metz comme chef-lieu de la région Lorraine (au lieu de Nancy), ce qui provoqua une grave crise au sein du conseil municipal de Nancy (avec dissolution par décret du 20 décembre 1969).

André Rossinot fut à l’origine un médecin ORL (oto-rhino-laryngologiste), élu conseiller municipal de Nancy depuis juillet 1969 (réélu au conseil municipal à toutes les élections jusqu’à maintenant). Dans la municipalité dirigée entre mars 1977 et mars 1983 par Claude Coulais, qui fut membre du gouvernement sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing, André Rossinot fut élu deuxième adjoint au maire chargé des affaires sociales. L’année suivante, André Rossinot fut élu député de Nancy en mars 1978, parmi de nombreux nouveaux députés UDF. Il avait alors 38 ans et a battu le député sortant RI Pierre Weber, médecin lui aussi et ancien maire très contesté de Nancy. Il fut réélu député sans discontinuer jusqu’en juin 1997.

Ce fut par une petite révolution de palais qu’André Rossinot a conquis la mairie de Nancy le 12 mars 1983. Il a entamé alors une longue série de mandats de maire, puisqu’il est resté maire de Nancy pendant trente et un ans, jusqu’au 6 avril 2014. Nancy est sa passion et il s’y consacre pleinement. Son premier mandat fut très efficace en incitant les propriétaires à rénover les façades dans le centre historique de la ville, ce qui a complètement changé l’aspect de la ville.

André Rossinot s’est aussi beaucoup investi dans l’agglomération de Nancy, d’abord en alternant vice-présidence et présidence du district urbain de Nancy (il présida le district de mars 1989 à mars 1992), en alternance avec un autre élu de l’agglomération. Notamment Charles Choné qui présida ensuite la communauté urbaine du Grand Nancy. André Rossinot a repris la présidence de la communauté urbaine du Grand Nancy en mars 2001 et a été constamment réélu, jusqu’en mars 2020 en principe (la communauté urbaine du Grand Nancy, créée le 1er janvier 1996, est devenue la Métropole du Grand Nancy le 1er juillet 2016 par décret du 20 avril 2016, représentant un bassin de vie de 266 000 habitants). Dans l’agglomération, il a vécu deux générations de transports en commun. D’abord les trolleybus au début des années 1980 (dont il n’était pas le réalisateur), puis, plus tard, le (fameux) tramway avec et sans rail.

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1983 fut une année capitale pour André Rossinot dans sa vie politique car, devenu l’influent député-maire de Nancy, il a pris la présidence nationale du Parti radical valoisien. À cause des statuts du plus vieux parti de France, il ne pouvait pas faire plus de deux mandats successifs, il a alterné avec d’autres responsables de ce parti. Ainsi, il a présidé le Parti radical du 26 novembre 1983 au 15 octobre 1988, puis du 20 novembre 1993 au 12 octobre 1997, enfin du 26 octobre 2003 au 12 novembre 2007, avec une coprésidence partagée avec Jean-Louis Borloo à partir de 2005, qu’il laissa seul président à partir de 2007 (jusqu’en 2014), en prenant le titre de président d’honneur du Parti radical (le Parti radical fut une composante de l’UDF de 1978 à 2002, puis de l’UMP de 2002 à 2011, puis de l’UDI de 2012 à 2017).

Par ailleurs, il fut élu vice-président du conseil régional de Lorraine en 1983 et réélu en 1986 jusqu’en 1988. Le 16 mars 1986, il y a eu deux élections, toutes les deux à la proportionnelle intégrale dans le cadre départemental. Des élections législatives où André Rossinot fut le deuxième de la liste UDF menée en Meurthe-et-Moselle par l’ancien ministre, le général Marcel Bigeard (député sortant de Toul), suivi en troisième position de l’ancien Ministre de l’Éducation nationale René Haby (qui était le député sortant de Lunéville), et des élections régionales où André Rossinot fut la tête de la liste UDF.

Devenu chef de l’un des partis de l’alliance UDF-RPR, André Rossinot fut incontournable lors de la formation des deux premiers gouvernements de cohabitation. Ainsi il fut nommé Ministre des Relations avec le Parlement du 20 mars 1986 au 10 mai 1988 dans le second gouvernement de Jacques Chirac, puis Ministre de la Fonction publique du 30 mars 1993 au 11 mai 1995 dans le gouvernement d’Édouard Balladur où il fut proche d'une collègue, Simone Veil, dont le nom fut donné à la grande place devant la gare de Nancy.

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Lors de la dissolution de l’Assemblée Nationale, aux élections législatives de juin 1997, à la surprise générale, André Rossinot fut battu de justesse dans sa circonscription de Nancy par un candidat socialiste inconnu. Il n’est pas un coureur de mandats. Il aurait pu en effet chercher un moyen d’avoir un autre mandat parlementaire, par exemple, en se présentant aux élections européennes de juin 1999 ou aux élections sénatoriales de septembre 2001, ou encore tenter de conquérir le conseil régional de Lorraine en mars 1998, mais il a préféré se replier exclusivement sur Nancy et son agglomération, à tel point qu’il a préféré ne pas se représenter aux élections législatives de juin 2002 (alors qu’il aurait été probablement réélu), préparant ainsi sa succession avec son adjoint Laurent Hénart qui fut élu député de juin 2002 à juin 2012 (battu en 2012), membre du troisième gouvernement de Jean-Pierre Raffarin (mars 2004 à mai 2005), et élu (sur son nom) maire de Nancy en mars 2014 (également élu président du Parti radical à partir de 2014).

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Parmi les très nombreuses autres responsabilités qu’il a eues dans sa carrière politique, on peut citer également président de la Fédération nationale des agences d’urbanisme de 1995 à 2010 (président d’honneur à partir de 2014), président du Centre national de la fonction publique territoriale, secrétaire général de l’Association des maires de grandes villes de France de 2001à 2014 et président du Pôle métropolitain européen du Sillon lorrain en 2012 (regroupement des agglomérations de Thionville, Metz, Nancy et Épinal). Membre d’honneur de la prestigieuse Académie Stanislas, André Rossinot a été également élevé au grade de commandeur de la Légion d’honneur par François Hollande (décret du 14 juillet 2015).

Dans ses prises de position aux élections présidentielles, André Rossinot a soutenu Valéry Giscard d’Estaing en 1981, Raymond Barre en 1988, Édouard Balladur en 1995, Jacques Chirac en 2002, Nicolas Sarkozy en 2007 et 2012 et Emmanuel Macron en 2017 (officiellement le 4 avril 2018, il a annoncé son soutien au Président de la République).

Lorsqu’il était Ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy a demandé à André Rossinot de présider un groupe de travail sur la laïcité dans les services publics après la loi du 15 mars 2004 consécutive aux conclusion de la Commission présidée par Bernard Stasi. Ce groupe de travail était composé notamment de Jean-Paul Alduy (sénateur-maire de Perpignan), Pierre Carlo (député-maire de Chanteloup-les-Vignes, "tombeur" de Michel Rocard en mars 1993), Didier Maus (constitutionnaliste) et de Laurent Wauquiez (député de Haute-Loire, ancien rapporteur de la Commission Stasi). Les auditions et réflexions de ce groupe de travail a fait l’objet d’un rapport qui a été rendu au ministre le 20 septembre 2006.

Le rapport expliquait entre autres que l’école devait enseigner le fait religieux : « La relégation de la connaissance de la laïcité et du fait religieux hors des enceintes scolaires et universitaires avalise le refus de tout esprit critique à l’égard du discours religieux, et par là, les extrémismes. Face à ce risque, l’école républicaine ne peut rester inactive. Il lui appartient, sans s’immiscer dans l’interprétation du sacré, de développer une approche raisonnée et objective de la laïcité et des religions comme faits de civilisation. ».

Revenons à Nancy. Mars 2020 devrait sonner l’heure du retrait complet des responsabilités politiques pour André Rossinot. Le 23 mars 2014, lorsque Laurent Hénart s’est présenté aux élections municipales de Nancy, il expliquait pourquoi André Rossinot était présent sur sa liste : « André Rossinot a redressé Nancy. La ville gagne des habitants et a retrouvé sa fierté. Ce bon bilan est incontesté. Son expérience apportera de la sérénité face aux crises et aux mutations actuelles. ». André Rossinot aura réussi à faire revivre une ville rayonnante de sa culture, de ses universités, de son art, de son industrie, qui s’était un peu "assoupie" dans les années 1970 après la crise sidérurgique et son isolement des infrastructures de l’Est de la France (absence d’autoroute, absence de ligne TGV, absence d’aéroport régional, etc.).


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (22 mai 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
André Rossinot.
Les Radicaux en marche vers l’Europe.
Discours de Laurent Hénart le 9 mars 2019 à Paris (texte intégral).
Laurent Hénart en 2019.
Le Manifeste européen du Mouvement radical adopté le 6 février 2019 (à télécharger).
L’unité des radicaux.
La famille centriste.
La défense de la laïcité.
Laurent Hénart en 2014.
Jean-Louis Borloo.
Programme de Sylvia Pinel.
Jean-Michel Baylet.
Jean-Jacques Servan-Schreiber.
Françoise Giroud.
Robert Fabre.
Jean Moulin.
Maurice Faure.
Edgar Faure.
Édouard Herriot.
Pierre Mendès France.
Georges Clemenceau.
Jean Zay.
Jules Jeanneney.
René Cassin.
Joseph Caillaux.
Jean-François Hory.
Évelyne Baylet.
Yves Jégo.
Rama Yade.
Christiane Taubira.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190522-andre-rossinot.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/andre-rossinot-le-roi-philosophe-215308

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/05/16/37340579.html


 

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18 mai 2019 6 18 /05 /mai /2019 01:37

« Nous devons tenir debout. Fiers et lucides. Dire d’abord ce qu’est l’Europe. C’est un succès historique : la réconciliation d’un continent dévasté, dans un projet inédit de paix, de prospérité et de liberté. Ne l’oublions jamais. Et ce projet continue à nous protéger aujourd’hui : quel pays peut agir seul face aux stratégies agressives de grandes puissances ? Qui peut prétendre être souverain, seul, face aux géants du numérique ? » (Emmanuel Macron, Lettre aux citoyens européens, le 4 mars 2019).



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J’ai entendu encore récemment un opposant au gouvernement actuel protester contre la tribune du Président Emmanuel Macron aux citoyens de tous les pays européens. Et il ajoutait : et c’est encore les contribuables qui l’ont payée. C’est faux, puisque cette tribune a été publiée dans les journaux nationaux de chaque pays, ce sont donc les lecteurs de ces journaux qui l’ont payée, pas les contribuables français. Ce qui ennuient les eurosceptiques farouches, et il y en a beaucoup pendant cette courte campagne européenne, c’est que, pour la première fois depuis près d’un quart de siècle, le Président de la République française a réaffirmé positivement sa foi dans la construction européenne, son attachement enthousiaste à cet édifice de coopération internationale complètement inédit dans l’histoire du monde. Positivement et pas par défaut comme ses trois derniers prédécesseurs.

Entendre enfin un responsable politique de premier plan, et Emmanuel Macron l’est plus particulièrement, de premier plan, qui ose dire haut et fort que l’Europe nous a sauvés, nous sauve et nous sauvera ! Sur ce point, d’ailleurs, les Français le suivent très majoritairement, et plus encore en 2019 qu’en 2017, selon certains sondages. Face aux nationalismes de tous poils qui ne savent que critiquer, sans rien proposer de constructif, il faut préserver précieusement cette Europe qui, certes, est loin d’être parfaite (bien au contraire), mais dont il faut consolider l’esprit, conserver l’essence, le germe, l’idée fondatrice.

C’est le sens de la liste Renaissance, reprenant le nom de la tribune présidentielle, soutenue par les partis de la majorité, LREM, le MoDem, le Mouvement radical et Agir. Sa tête de liste, Nathalie Loiseau, ancienne Ministre des Affaires européennes de 2017 à 2019, ancienne directrice de l’ENA (mais elle n’a pas fait l’ENA, elle est une diplomate qui a fait toute sa carrière au Quai d’Orsay, proche de son ancien ministre de tutelle Alain Juppé), elle peut avoir toutes les tares que ses opposants lui collent, son amateurisme politique, sa naïveté en campagne, ses gaffes qui, avouons-le, pimentent gaiement les dîners en ville, elle est sur le fond très solide, elle connaît ses dossiers, elle sait de quoi elle parle. Cela change un peu des raccourcis, des caricatures, des simplifications infantilisantes, que certains candidats tentent de propager.

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Les élections ne sont jamais acquises, mais la probabilité pour que cette liste ait des élus est tout de même très forte. Je propose ici une petite présentation du programme de cette liste pour les élections européennes. C’est important politiquement puisque le projet européen d’Emmanuel Macron, qui est à la tête de la France pour au moins trois ans encore, est sans aucun doute l’inspirateur de ce programme électoral. Il a fallu attendre le 8 mai 2019 pour qu’il fût publié (on peut le télécharger ici).

Une mise en garde s’impose : les mesures proposées dans un programme pour les élections européennes ne sont pas comme un programme proposé dans un autre cadre, qu’il soit présidentiel, législatif, régional, départemental voire municipal. En effet, dans les cadres cités, l’élu peut espérer atteindre une majorité et conquérir l’exécutif en question, que ce soit le gouvernement ou un exécutif territorial, si bien que les mesures qui l’ont fait élire, qu’on appelle "promesses électorales", devront, ou pas, être tenues (sachant que lorsqu’on est élu au second tour, cela signifie qu’il n’y avait pas une majorité absolue d’électeurs qui, spontanément, dès le premier tour, avait adhéré à ces promesses.

Lorsqu’il s’agit des élections européennes, la situation se complique car au-delà du partage des sièges entre listes politiques, il y a aussi le jeu des nations, chaque pays européen ayant un nombre de sièges au Parlement Européen déterminé par son importance démographique. Et même si l’élu arrive à constituer une coalition qui corresponde à une majorité à Strasbourg, le Parlement Européen n’a pas tous les pouvoirs d’une chambre parlementaire, même si le Traité de Lisbonne a été une grande avancée à cet égard, notamment en lui permettant de valider la désignation du Président de la Commission Européenne et les autres commissaires européens (comme cela se fait aux États-Unis lors de la formation d’un nouveau gouvernement où le Congrès garde un droit de regard).

L’instance décisionnelle par excellence en Europe, c’est le Conseil Européen, en d’autres termes, ce sont les chefs d’État et de gouvernement des États membres. Donc, les meilleurs changements de l’Europe s’espèrent plus dans le cadre des élections nationales dans chaque pays (victoire d’un courant politique plutôt qu’un autre, en rappelant qu’il y a des histoires parfois divergentes, par exemple, l’Espagne qui renoue avec le socialisme alors que la France et même l’Allemagne sont prêtes l’enterrer définitivement).

Par ailleurs, parmi les mesures proposées dans chaque programme, ce sont celles qui sont susceptibles de recueillir la majorité qualifiée voire l’unanimité des États membres qui auront des chances d’aboutir et d’être applicables. Les autres, ce sont des mesures que je qualifierais d’utopiques. Elles ne sont pas inutiles si elles permettent de montrer un cap, elle sont inutiles si elles restent lettres mortes.

Si on veut vraiment avancer et progresser dans la construction européenne, il faut évidemment proposer des mesures réalistes qui seraient capables de recueillir l’accord de toute l’Europe, pas seulement des Français. C’est là la difficulté majeure d’une campagne européenne, difficulté pourtant à peine consciente, vu que la campagne électorale se focalise de toute façon sur des thèmes de politique intérieure.

Néanmoins, le programme électoral reste une base essentielle pour comprendre la vision de l’Europe du parti ou de la coalition qui se présente aux électeurs, d’où la raison d’une présentation du programme de la liste considérée comme la plus influente des partisans de la construction européenne, appelé "Projet Renaissance". Le mot lui-même, reprenant la tribune présidentielle du 4 mars 2019, peut faire penser à la …Renaissance italienne (Léonard de Vinci préféré alors à Matteo Salvini).

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Soixante-dix-neuf propositions sont énumérées dans ce programme Renaissance. Il n’est pas question ici de les évoquer toutes, bien au contraire. Plus il y en a, et moins le programme est lisible. C’était le problème aussi de la conférence de presse présidentielle du 25 avril 2019 : trop de mesures tuent l’information et le message envoyé.

La première page donne clairement le ton et le cadre : « Reprendre le contrôle de notre destin », avec deux affirmations. La première, positive : « Nous sommes fiers d’être Européens ». Et la seconde, négative : « Mais l’Europe d’hier peine dans le XXIe siècle. ». La reprise du contrôle de notre destin consiste donc à façonner l’Europe de demain, celle qui peut surmonter des défis majeurs : « écologiques, économiques ou migratoires ».

Neuf thèmes sont présentés, que j’ai rassemblés en six parties.


1. L’écologie : « faire de l’Europe, une puissance verte »

Un tableau apocalyptique, reprenant quelques études, est donné. Par exemple : « Toutes les dix minutes, un Français meurt prématurément du fait de la pollution. ». On ne peut donc pas ne rien faire.

La proposition phare, c’est d’investir 1 000 milliards d’euros dans la transition écologique et solidaire en cinq ans (jusqu’en 2024) : nouvelles énergies, transports, logement, formation pour la reconversion de secteurs économiques, etc. Cette enveloppe gigantesque devra représenter 40% des dépenses européennes. L’objectif financier est très ambitieux. Rien n’est indiqué pour comprendre comment l’atteindre. Le budget actuel de l’Union Européenne n’a rien à voir avec ce montant colossal (les dépenses totales dans le budget de l’année 2017 ne sont que de 137 milliards d’euros).

Une autre mesure qui pourrait être très porteuse, également proposée par d’autres listes, est protectionniste : « Taxer le carbone des produits importés en Europe ». Là encore, comme pour la TVA sociale, la mesure punirait les consommateurs français plutôt que les importateurs étrangers, car ce sont les acheteurs qui payeraient les taxes. Également : taxation du transport aérien.

Autres mesures ambitieuses : fermer toutes les centrales aux énergies fossiles d’ici à 2050, arrêter la vente de véhicules essence et diesel d’ici à 2040, interdire le plastique non-recyclable d’ici à 2025. Les autres mesures sont plus consensuelles, comme la sortie du glyphosate (d’ici à 2021), etc.


2. Le social : « bâtir l’Europe de la justice sociale et fiscale »

Le programme reprend la "formule" de Jacques Delors (qui restera, dans le programme, l'une des deux seules références historiques, l’autre étant Simone Veil) : « la concurrence qui stimule, la coopération qui renforce et la solidarité qui unit ». En présentation, une phrase choc : « L’évasion fiscale prive l’Europe de milliards d’euros chaque année alors que 100 millions d’Européens vivent dans la précarité. ».

Mesure consensuelle en France : taxer les géants du numérique en Europe comme cela se fait désormais en France avec une « taxe française sur les services numériques », taxe que la liste souhaite généraliser à l’échelle européenne. Cela ne concernerait que les entreprises qui font un chiffre d’affaires mondial supérieur à 750 millions d’euros.

Autre mesure visant à réduire la concurrence fiscale : harmoniser l’impôt sur les sociétés, sans préciser dans quel sens converger (vers le plus bas ou plus haut taux ?). Et à réduire la concurrence sociale : institution d’un salaire minium dans chaque pays (mesure qui sera refusée par certains pays et donc qui peut être considérée comme utopique), aussi réforme du travail détaché.

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Mesures intéressantes pour accompagner les salariés dans une reconversion économique : la garantie Zéro chômage (15 000 euros prêtés au demandeur d’emploi pour se reconvertir et remboursables uniquement s’il le peut à l’issue de la formation), aide à la reconversion numérique et écologique jusqu’à 20 000 euros par salarié, nouveau statut pour les travailleurs de plateforme numérique (comme Uber, 3 millions de personnes sont concernées).


3. L’Europe, puissance économique mondiale

Le programme prévoit de mettre une barrière commerciale avec une directive Éthique des entreprises, l’accès au marché européen étant conditionné à certaines règles sociales et environnementales. Le problème actuel, c’est que les entreprises européennes doivent proposer des produits avec des normes sociales et environnementales plus contraignantes que dans le cas des produits d’importation.

Il est aussi proposé de faire en sorte que la création de champions europées ne soit pas entravée par le principe de concurrence (comme ce fut le cas avec la fusion Alstom-Siemens), ainsi que de déployer un « plan de soutien massif à l’industrie Made in Europe 2024 » (sans préciser l’enveloppe).

Je cite deux autres mesures intéressantes également : « Construire un Pacte avec l’Afrique en développant les investissements et les programmes scolaires et universitaires, en particulier à destination des jeunes filles », et : « Faire de l’euro la monnaie internationale de référence pour sortir du tout-dollar et décider seuls avec qui nous commerçons ». Idée louable pour contourner l’interdiction imposée par Donald Trump d'échanger avec l’Iran, mais sans donner aucune indication sur le comment.


4. L’Europe de la Défense

La partie sur la création d’une armée européenne est assez peu réaliste, surtout si l’on sait que le premier échec de la construction européenne concerne ce domaine très sensible car régalien. Cependant, « construire une capacité d’action européenne » se justifie pleinement aujourd’hui : désengagement américain de l’OTAN, multiplication des interventions dans des régions instables comme au Sahel et au Moyen-Orient, terrorisme international, cybercriminalité, etc.

Cette « armée européenne » ne sera pas exclusive, elle sera commune, avec l’armée de chaque nation. Le programme évoque donc la négociation d’un « Traité de défense et de sécurité ».

Une autre mesure de protection pourrait faire sursauter, tant la définition pourrait susciter des problèmes d’interprétation remettant en cause une certaine idée de la liberté d’expression : « Obliger les plateformes numériques et les réseaux sociaux à retirer tout contenu terroriste, pédopornographique, et de haine raciste et antisémite ». Jusqu’où définir la "haine raciste et antisémite" ? à la simple allusion ? à un second degré mal compris ? à de l’humour déplacé ?


5. Asile et immigration : « Faire respecter nos valeurs et nos frontières »

On ressent la politique du "en même temps" (de gauche et de droite). Gauche : « Notre priorité sera de construire une politique européenne de l’asile et de sauvegarder Schengen ». Entre autres, est proposé d’atteindre « l’objectif de 10 000 garde-frontières et garde-côtes au sein de Frontex » (mais il en faudrait trois ou quatre fois plus pour faire réellement respecter les frontières européennes). Droite : « Rendre effectifs les retours contraints, en chargeant Frontex du rapatriement des migrants illégaux ».


6. Culture, université, démocratie

Beaucoup de mesures sont proposées dans ces trois domaines, comme le triplement du programme Erasmus étendu aux apprentis, lycéens et jeunes demandeurs d’emploi, la création d’une vingtaine d’universités européennes d’ici à 2024, la création de résidences culturelles européennes pour les jeunes artistes, l’augmentation du pouvoir du Parlement Européen (pouvoir d’initiative des lois européennes) et du pouvoir des citoyens européens (un million de citoyens pourraient imposer l’examen d’une proposition), enfin, la diminution du nombre de commissaires européens.

Également : « Interdire le financement des partis politiques européens par des puissances étrangères et des entreprises ».

La dernière proposition est en fait la première d’un point de vue chronologique : instituer une « Conférence pour l’Europe » avec les dirigeants européens, des personnes qualifiées, mais aussi des citoyens tirés au sort pour améliorer le fonctionnement des institutions européennes et renforcer la démocratie européenne. Cette mesure avait déjà été proposée par Emmanuel Macron le 26 septembre 2017 lors de son discours de la Sorbonne, qui n’avait reçu qu’un accueil mitigé, poliment glacial, dans la plupart des autres pays européens.


Utopie ?

Comme on le voit, le programme de la liste menée par Nathalie Loiseau n’est pas creux mais pourrait risquer d’être vain, dans la mesure où c’est au Conseil Européen de décider de la plupart des mesures proposées ici. Il montre néanmoins un solide travail d’analyse sur les difficultés et les points de progression de l’Union Européenne. Il a le mérite d’être à la fois ambitieux et rassembleur. Rassembleur car il n’est pas épris d’idéologie qui réduirait la lucidité sur les carences actuelles de l’Europe. Ce programme a une volonté à la fois de protection (écologique, sociale, économique) et de conquête (affirmer sa puissance mondiale, notamment sur le plan monétaire mais aussi militaire). Il s’appuie sur des valeurs (ce qui lui permet de renforcer le droit d’asile) mais aussi sur la fermeté des lois et des règles. Il assume sa position clairement europhile ainsi que sa fierté europeénne.

S’il fallait ne retenir qu’une seule mesure (des soixante-dix-neuf au total, autant que de candidats de la liste), ce serait bien sûr ces investissements européens de 1 000 milliards d’euros dans la transition écologique et solidaire. Mais pour que cette mesure n’ait pas le goût amer et trompeur de la démagogie, il faut impérativement expliquer aux électeurs comment on compte atteindre une telle somme en cinq ans : en incitant le secteur privé à investir, comme c’était le cas avec les "grands emprunts" ? ou en créant de nouveaux impôts, spécifiquement européens ?

Il est grand temps de débattre concrètement de la vision de l’Europe de demain, celle de 2025, celle de 2050, et pourquoi pas, celle de 2100. Après tout, l’année 2100 n’est pas plus éloignée d’aujourd’hui que ne l’est l’année 1938, c’est-à-dire, par exemple, que les Accords de Munich


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (17 mail 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
À quoi pense Nathalie Loiseau ?
Nathalie Loiseau.
Emmanuel Macron.
Édouard Philippe.
Richard Ferrand.
François de Rugy.
Christophe Castaner.
Gérard Collomb.
Daniel Cohn-Bendit.
Nicolas Hulot.
Jean-Yves Le Drian.
Bruno Le Maire.
Amélie de Montchalin.
LREM.
Le sparadrap Benalla.
Européennes 2019 (4) : les enjeux du scrutin du 26 mai 2019.
Européennes 2019 (3) : l’Union Européenne est-elle démocratique ?
Européennes 2019 (2) : enfin, la campagne commence !
Programme de la liste Renaissance (LREM) pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste Les Républicains pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste UDI pour les élections européennes de 2019.
Michel Barnier, pas très loin de la Présidence de la Commission Européenne.
Le testament européen de Jean-Claude Juncker.
Européennes 2019 (1) : la France des Douze ?
Le retour aux listes nationales aux élections européennes (2 décembre 2017).
Jean Monnet.
Emmanuel Macron à la conquête des peuples européens.
Le programme du CNR.
Discours de Robert Schuman le 9 mai 1950 au Salon de l’Horloge à Paris (texte intégral).

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190326-nathalie-loiseau.html

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/05/18/37345484.html




 

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10 mai 2019 5 10 /05 /mai /2019 04:33

« Carré, épais, avec cette élocution lente qu’ont les gens du Nord même lorsque, c’est son cas, ils sont avocats, il a une rondeur, une onction toute "catho". Il paraît que, dans la vie publique locale, il est beaucoup plus agressif qu’il n’en a l’air contre les "socialo-communistes" ! » (Michèle Cotta, 18 octobre 1977, "Cahiers secrets").



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Figure historique du centrisme dans le Nord, André Diligent est né il y a exactement un siècle, le 10 mai 1919 à Roubaix, près de Lille. Baigné, par sa famille, dans le catholicisme social, son père Victor était l’un des responsables du PDP (ancêtre du MRP) sous la Troisième République, et membre du Sillon, André Diligent avait d’ailleurs pour parrain Marc Sangnier, le fondateur du Sillon (1873-1950) en 1894, député entre 1919 et 1924 puis à la Libération (jusqu’à sa mort).

Cette proximité avec les idées de la démocratie chrétienne très ancrées dans le Nord faisait que pendant toute sa carrière politique, il privilégia l’homme de conviction sur l’homme d’ambition, au point qu’on l’appela au Palais du Luxembourg le "candide du Sénat", en raison de la "défense de ses idéaux". Il n’hésitait pas à encourager les jeunes générations à faire vivre ce courant politique dont la traduction aujourd’hui est difficile à déterminer en raison de l’éclatement du paysage politique depuis une quinzaine d’années. Homme de proximité et de simplicité, il a toujours rejeté l’idée de recevoir la Légion d’honneur, malgré diverses sollicitations.

Paradoxalement, la France a été principale partie prenante pour proposer en politique la doctrine sociale de l’Église catholique, grâce au pape Léon XIII qui, dans son encyclique historique Rerum Novarum, a ouvert la voie de la compatibilité entre être républicain et rester catholique (alors qu’auparavant, la foi devait forcément faire choisir la monarchie). Mais en même temps, la France a toujours refusé une appellation politique qui rappelle la religion (catholique social, démocrate-chrétien) au nom de la laïcité que les chrétiens ont finalement acceptée à partir des années 1920 (grâce à Clemenceau qui avait décidé d’en finir avec les guerres de religion). Ainsi, cela a donné des expressions nouvelles pour décrire l’engagement politique comme "républicains populaires" (MRP), pour les résistants catholiques, puis "démocrates sociaux" (CDS) pour ne pas coller l’épithète chrétien. Difficile de retrouver ce courant politique maintenant, historiquement, ce serait impossible de l’imaginer au Mouvement radical, politiquement, ce serait impossible de l’imaginer à LREM, sa localisation dans la géographie politique contemporaine serait probablement quelque part entre le MoDem et l’UDI.

Toute sa vie, André Diligent a été un défenseur scrupuleux de cette doctrine sociale de l’Église qui a inspiré son action politique, tant au niveau local que national. André Diligent a suivi des études de droit à Lille puis à Marrakech (où il fut mobilisé pendant la guerre) pour devenir un brillant avocat après la guerre au barreau de Lille. En 1942, il s’engagea dans la Résistance et fut nommé à la Libération, en septembre 1944, commissaire adjoint à l’information pour la région du Nord. Il se consacra pleinement à la politique.

Sur le plan électoral, André Diligent fut d’abord élu conseiller municipal de Roubaix aux élections municipales de 1947, ville dont il fut élu jusqu’en 1995. Roubaix était une ville traditionnellement de gauche mais la majorité municipale fut la coalition de la troisième voie qui n’a pas réussi au niveau national au même moment à Paris, à savoir un rassemblement de la SFIO (socialiste), du MRP (démocrates-chrétiens) et des indépendants. Pendant toute son existence, André Diligent a montré son opposition tant au communisme qu’aux gaullistes, je parle ici des personnalités politiques et pas du courant politique, les gaullistes ayant toujours attaqué les centristes dans leurs stratégies, même lorsqu’ils en avaient besoin.

Le maire socialiste de Roubaix Victor Provo (1903-1983), ancien résistant, en fonction d’août 1942 à mars 1977 (et qui a donné son nom à un hôpital de sa ville), a nommé André Diligent adjoint au maire de 1949 à 1954 et de 1965 à 1977. La citadelle socialiste paraissait inébranlable, si bien qu’André Diligent a d’abord cherché à conquérir le département du Nord (Victor Provo fut également président du conseil général du Nord de 1967 à 1973, et parlementaire, député de 1952 à 1958 et sénateur de 1974 à 1977). En 1955, cependant, André Diligent n’est pas parvenu à conquérir le canton de Roubaix-Est "détenu" par Victor Provo de 1949 à 1973, ce fut d’ailleurs la raison pour laquelle il ne fut pas son adjoint pendant cette période. André Diligent a fait une seconde tentative cantonale en 1958 à Roubaix-Ouest, sans plus de succès.

Malgré ces deux échecs, André Diligent a réussi son implantation locale lors des élections législatives de novembre 1958 en se faisant élire député MRP du Nord à l’âge de 39 ans, mais il fut battu en novembre 1962 (il avait voté la motion de censure du 4 octobre 1962, la seule qui a été adoptée sous la Cinquième République, pour protester contre l’élection du Président de la République au suffrage universel direct).

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Durant son mandat de député, il siégea à la commission des affaires sociales où il a déposé une proposition de loi pour prolonger le paiement des allocations familiales aux familles des apprentis jusqu’à la fin de la période d’apprentissage. Il fut élu, délégué par les députés, membre du très éphémère Sénat de la Communauté du 8 juillet 1959 au 16 mars 1961 (il en fut l’un des secrétaires).

Très intéressé également par les questions de presse et audiovisuel (il fut président du conseil d’administration du groupe Nord-Éclair Éditions de 1979 à 1989 et membre du conseil d’administration de France 3 de 1995 à 2001), André Diligent fut membre, en 1960, de la commission chargée de la surveillance et du contrôle des publications destinées à l’enfance et à l’adolescence, et protesta régulièrement contre la trop grande influence du gouvernement sur l’ORTF (il déposa plusieurs propositions de loi pour demander plus d’indépendance : « Un service public ne doit pas être confondu avec un service de gouvernement. »).

André Diligent retrouva un mandat parlementaire en septembre 1965 en se faisant élire sénateur MRP du Nord, inscrit au groupe de l’union centriste. Il assura en tout trois mandats sénatoriaux : de septembre 1965 à septembre 1974 (le 21 septembre 1974, il fut battu aux élections sénatoriales), puis de septembre 1983 à septembre 2001 (il fut réélu en septembre 1992, mais battu le 30 septembre 2001).

Durant ses trois mandats de sénateur, André Diligent a été très actif au Palais du Luxembourg. Entre 1983 et 2001, il a posé 222 questions au gouvernement. Il fut désigné juge à la Haute Cour de Justice entre 1989 et 2001 et plutôt en raison de son mandat de maire de Roubaix (ville qui compte beaucoup de populations immigrées), il a été nommé par le Premier Ministre Michel Rocard membre du Haut Conseil à l’intégration de 1990 à 1994.

Rapporteur du budget de l’ORTF de 1967 à 1974, il évoqua beaucoup de sujets régionaux, en particulier le projet du Tunnel sous la Manche dès 1968, la désindustrialisation de sa région (et de sa ville), notamment dans le domaine du textile. Ses prises de position furent généralement en rapport avec ses convictions centristes, à savoir européennes (il approuva bien sûr le Traité de Maastricht en 1992) et aussi décentralisatrices (mais il s’est abstenu lors du vote de la loi instituant les régions françaises en 1972). Il vota la loi Neuwirth du 29 décembre 1967 (légalisant la contraception), ainsi que la loi Royer en 1973, protégeant les commerces de proximité en limitant l’expansion des grandes surfaces commerciales. André Diligent a été favorable à la loi du 1er décembre 1988 sur le RMI mais opposé aux 35 heures en 1998 (loi Aubry).

En juin 1979, alors qu’il n’était plus sénateur, partisan enthousiaste de la construction européenne, André Diligent participa également à la première aventure électorale européenne en se faisant élire député européen de juin 1989 à juin 1984 sur la liste menée par Simone Veil.

Les mandats de parlementaire dans les années 1960, alors quadragénaire, ont placé André Diligent comme un homme incontournable du centrisme, représentant le Nord et son enracinement chrétien social. Il s’est beaucoup investi dans les instances politiques dirigeantes de la démocratie chrétienne, d’abord au sein du MRP (il fut membre du bureau national à partir de 1963), puis au sein du Centre démocrate de Jean Lecanuet (à partir de 1967, il fut vice-président du Centre démocrate en 1973, à une époque où les centristes étaient divisés entre partisans et opposants au soutien à Georges Pompidou), enfin, au sein du Centre des démocrates sociaux (CDS), dont il fut vice-président de 1976 à 1977, puis le très influent secrétaire général de 1977 à 1983. Il resta à l’UDF jusqu’à la fin de sa vie, toujours dans une position d’indépendance avec les gaullistes, si bien qu’il a trouvé en François Bayrou un ami politique de grand avenir pour reprendre ce combat de l’indépendance des centristes (notamment lors de la création de l’UMP).

Après les années 1950 de son implantation locale, les années 1960 de sa consolidation politique nationale, les années 1970 et 1980 furent pour André Diligent la période de sa plus grande influence, tant locale que nationale, qu’il a fait perdurer dans sa ville jusque dans les années 1990.

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En effet, si en mars 1977, André Diligent, candidat contre un élu socialiste (à la fin du mandat de Victor Provo), n’a pas réussi à le battre pour conquérir la mairie de Roubaix, alors que les socialistes étaient prisonniers de l’union de la gauche, donc, exclusivement avec les communistes et contre les centristes, il a réussi cependant à sa deuxième tentative, si bien qu’il fut élu maire de Roubaix le 6 mars 1983, fut réélu en mars 1989, et démissionna le 18 mai 1994 pour raison de santé. Il fit alors élire le 28 mai 1994 son premier adjoint (ancien directeur de cabinet entre 1983 et 1989), René Vandierendonck, à l’époque membre du CDS mais devenu ensuite socialiste pour sa réélection en mars 2001, et qui resta maire de Roubaix jusqu’au 22 mars 2012 (il fut en outre sénateur de septembre 2011 à septembre 2017). Roubaix (110 000 habitants en 1975, quatrième ville de la région), bénéficia de la passion d’agir d’André Diligent, très attentionné au bien-être de ses habitants.

Devenu dans les années 1980 l’influent sénateur-maire de Roubaix, il s’était déjà replié dans sa ville dès l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. Localement, André Diligent fut également désigné (comme parlementaire) conseiller régional du Nord-Pas-de-Calais de novembre 1973 à septembre 1974 (il fut battu aux sénatoriales), puis il mena la liste UDF aux élections régionales de mars 1986 qui a obtenu 14,2%, si bien qu’il retrouva un siège au conseil régional du Nord-Pas-de-Calais de mars 1986 à mars 1992.

Ses fonctions de secrétaire général du CDS avaient eu une grande importance durant le septennat de Valéry Giscard d’Estaing, que les centristes soutenaient sans pour autant vouloir être "fondus" dans un parti giscardien (d’où la solution d’une confédération laissant une grande autonomie à ses composantes, ce qui donna l’UDF en 1978 à la veille des élections législatives).

Dans ses "Cahiers secrets de la Ve République", la journaliste Michèle Cotta a raconté sa rencontre avec André Diligent le 18 octobre 1977 à l’issue de la convention du PR (Parti républicain). Il n’était pas membre de ce parti qui fut créé par Valéry Giscard d’Estaing. Au contraire, il était membre du CDS, l’autre principale composante de la future UDF (en février 1978), et même son numéro deux (secrétaire général) derrière Jean Lecanuet (son président), et à l’époque, ce parti pesait peu : « De Gaulle m’a appris une chose : c’est au moment où les autres vous croient faibles qu’il faut crier le plus fort et faire preuve d’intransigeance ! ».

C’était pour dire à Michèle Cotta qu’il était favorable à Valéry Giscard d’Estaing mais tenait à son autonomie, en particulier parce que le CDS défendait des valeurs : « Il y a certes une très grande concordance entre les finalités du Président de la République et notre mouvement. Nous sommes en réalité très différents. Je vous donne un exemple : lorsque j’écoute Jean-Pierre Soisson [ministre et chef du PR] parler, j’entends un homme préoccupé uniquement du concret. Nous, nous mettons au contraire l’accent sur l’idéal. Nous croyons à certaines valeurs, même si on doit les appeler spirituelles. C’est pourquoi, dans cette majorité, nous sommes à part, parce que vigoureusement régionalistes, profondément européens, profondément sociaux. J’ajoute que nous avons une sensibilité écologique que n’ont pas nos partenaires giscardiens. (…) Nous sommes dans la majorité, c’est un mariage de raison. Dans ce mariage, nous apportons un supplément d’âme. ».

C’est intéressant d’entendre qu’un responsable politique de grande influence se sentait "écologique" il y a déjà quarante-deux ans ! Cela a étonné son interlocutrice Michèle Cotta à qui André Diligent donna quelques éléments : « Il me cite saint François d’Assise et ses petits oiseaux, et, plus près de nous, le mouvement du Sillon de Marc Sangnier, avant-guerre. » (Michèle Cotta). André Diligent lui rappela effectivement : « Il y a une véritable tradition écologique chez les chrétiens : la nature a été voulue par le Créateur. Elle doit donc être conservée et non dégradée. (…) Nous sommes les seuls à faire dans notre plate-forme [diffusée lors de la fondation du CDS en 1976] des propositions précises sur la défense de l’environnement, sur la culture biologique. Cherchez dans tous les autres textes de la majorité, vous verrez bien que nous sommes les seuls à aborder ce sujet qui laisse tout le monde politique de marbre. ».

André Diligent avait aussi confié à Michèle Cotta le même jour que le CDS portait toute sa confiance et ses espoirs en la personne du Premier Ministre Raymond Barre : « Il bénéficie chez nous d’un préjugé incontestablement favorable. Il nous apparaît comme étant un homme qui veut dire la vérité. Nous sommes actuellement très proches de lui. » (18 octobre 1977, propos rapportés par Michèle Cotta).

Toujours dans ses "Cahiers", Michèle Cotta évoqua aussi la présence d’André Diligent, en tant que représentant du CDS, aux nombreuses réunions du comité de liaison de la majorité, notamment celle qui avait eu lieu vers le 13 janvier 1978, en plein préparation des élections législatives, au siège du RPR, rue de Lille, en présence des autres dirigeants des partis de la majorité, Yves Guéna pour le RPR (Charles Pasqua était présent aussi), Roger Chinaud pour le PR et Bertrand Motte pour le CNI. Quelques jours avant la fondation de l’UDF (dont le sigle pouvait habilement rappeler la récemment défunte UDR gaulliste), les dirigeants du RPR étaient très contrariés par la décision des autres partis de la majorité de s’unifier pour présenter une candidature commune au premier tour des élections législatives de mars 1978 en compétition avec un candidat RPR, les deux candidats se rassemblant ensuite au second tour, le candidat ayant eu le plus de voix étant soutenu par celui qui aurait reçu le moins de voix. Le RPR aurait préféré que chaque parti de la future UDF présentât au premier tour chacun son candidat, ce qui aurait évidemment avantagé le candidat RPR. La stratégie giscardienne était alors claire : prendre le dessus sur le RPR au sein de la future majorité parlementaire.

André Diligent, parce qu’il ne transigeait pas sur les valeurs, n’a donc pas eu que des amis durant ses cinquante-quatre ans de vie politique, ce qui expliqua qu’entre plusieurs victoires électorales, il a eu aussi plusieurs échecs électoraux (un aux municipales, deux aux cantonales, deux aux sénatoriales, un aux législatives, entre autres), mais cela ne l’avait pas découragé à poursuivre son action militante.

Il est mort à Villeneuve-d’Ascq quelques mois après son échec aux élections sénatoriales, le 3 février 2002 à l’âge 82 ans. À quelques semaines près, il n’a connu ni la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle de 2002, ni la création de l’UMP qui allait faire fondre ce qui restait de l’ancien CDS (devenu Force démocrate en 1995 puis fondu dans l’UDF en 1998) dans un grand parti présidentiel qui resterait contrôlé en permanence par les gaullistes. Il aurait sans aucun doute apporté son soutien (à l’époque) à la candidature de François Bayrou car André Diligent voulait se battre sur ses propres valeurs et seule, l’autonomie du centre pouvait le permettre.

Quinze ans plus tard, il serait tentant d’imaginer la position d’André Diligent face à la candidature de l’extraterrestre Emmanuel Macron. Il l’aurait certainement soutenue comme l’ont fait François Bayrou mais aussi Jean Arthuis (notamment), s’éloignant ainsi des centristes restés encore alliés plus ou moins fermement avec LR (qui est un parti qui n’a plus grand-chose à voir avec le gaullisme). Mais il ne s’agit pas ici de faire parler les morts, qu’ils restent dans le repos mérité et qu’ils soient honorés. André Diligent était avant tout ce supplément d’âme qui manque peut-être de nos jours dans la classe politique. Merci à son action et à son exemple, que son souvenir demeure toujours vivant malgré les générations qui passent. Il n’y a pas de combat politique pertinent et utile sans idéal philosophique.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (09 mai 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Étienne Borne.
André Diligent.
Pierre Méhaignerie.
Bernard Stasi.
André Damien.
Les Rénovateurs.
Le CDS.
Jean Seitlinger.
Simone Veil.
Nicole Fontaine.
Henry Jean-Baptiste.
Loïc Bouvard.
Bernard Bosson.
Dominique Baudis.
Jacques Barrot.
Adrien Zeller.
Alain Poher.
Jean Lecanuet.
René Monory.
Raymond Barre.
Charles Choné.
Marie-Jeanne Bleuzet-Julbin.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190510-andre-diligent.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/andre-diligent-un-supplement-d-ame-214961

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/05/07/37317074.html




 

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4 mai 2019 6 04 /05 /mai /2019 03:24

« Dans le progrès humain, la part essentielle est la force vive, qu’on appelle l’homme. » (Jules Michelet, 1867).



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L’ancien ministre centriste Pierre Méhaignerie fête son 80e anniversaire ce samedi 4 mai 2019. Né à Balazé, en Ille-et-Vilaine, il a suivi une longue carrière politique qui l’a porté à la tête d’un grand parti pendant plus d’une douzaine d’années et au gouvernement, au sommet du pouvoir. Petit éclairage sur son parcours.

Et d’abord, une petite anecdote politique : lors de l’université d’été du CDS à Ramatuelle réunie du 29 août au 3 septembre 1989, l’occasion pour les jeunes militants de rencontrer leurs "aînés" et discuter avec eux, Pierre Méhaignerie, alors président du Centre des démocrates sociaux (CDS), s’était joint discrètement à l’assistance lors d’une table ronde dont il n’était pas un intervenant. Puis, prenant la parole pour donner son avis, très écouté puisqu’il était finalement le "patron" des lieux, il avait commencé sa phrase par la supposition qui tuait : « Si j’étais Premier Ministre, je… ».

Eh oui ! Sous la Cinquième République, si l’on est Premier Ministre, on suit la feuille de route donnée par le Président de la République élu par tous les Français. Cela donnait la mesure du déficit d’ambition du parti centriste à se prévaloir du pouvoir : le CDS restait dans l’idée seulement d’une roue de secours à un parti plus grand, qui, lui, aurait le pouvoir. Cinq années plus tard, François Bayrou lui succéda à la présidence du CDS et commença sa lente ascension pour devenir candidat à l’élection présidentielle. Certes, François Bayrou n’a pas été élu (et ne semble plus en mesure de l’être un jour), mais il avait réuni plus de 18% des Français en 2007 et son influence, encore aujourd’hui, reste bien plus importante que l’influence qu’a eue Pierre Méhaignerie dans les années 1980 et 1990.

Car Pierre Méhaignerie, Breton d’obstination, homme réaliste, était sans doute trop réaliste : il ne se voyait pas candidat à l’élection présidentielle ni osait se frayer un passage électoral entre les Jacques Chirac, les Raymond Barre, les Valéry Giscard d’Estaing, les Édouard Balladur, les François Léotard, les Alain Juppé, les Philippe Séguin et même les Simone Veil de son environnement immédiat. Le trop-plein était très encombré, il ne ferait pas le poids. Il préférait assurer l’importance numérique de son groupe parlementaire et influencer par des mesures concrètes. Boîte à idées, oui. Destin national, sûrement pas.

Pour bien comprendre, il faut rappeler que le CDS était l’un des trois principaux partis de l’UDF, avec le Parti radical valoisien et le Parti républicain (à l’époque dirigé par François Léotard et très vite médiatique). Chaque parti de l’UDF avait gardé sa propre organisation et l’UDF n’était qu’une confédération à finalité électorale, créée pour faire contrepoids au RPR qui, lui, était un parti allié. Après la victoire de François Mitterrand en 1981, il n’y avait plus de doute sur la nécessité d’une alliance UDF-RPR comme seule stratégie pour revenir au pouvoir.

La Bretagne fut historiquement une terre démocrate-chrétienne, comme l’Alsace. Revenons au début de sa carrière, qui a commencé très tôt. Comme beaucoup de notables centristes (et pas seulement centristes), Pierre Méhaignerie a eu une ascendance encourageante.

Son père Alexis Méhaignerie (1899-1976), agriculteur et syndicaliste agricole (président de la fédération des exploitants agricoles d’Ille-et-Vilaine), s’engagea en politique après la Libération sous l’étiquette MRP (démocrate-chrétien). Il fut élu maire de Balazé de mai 1945 à décembre 1976 et conseiller général de Vitré de septembre 1945 à mars 1976. Il fut aussi élu député MRP de novembre 1945 à juin 1968, sans interruption, d’abord élu sur la liste menée par Pierre-Henri Teitgen, puis au scrutin majoritaire sous la Cinquième République. Quelques mois avant sa mort, il laissa son fils Pierre se faire élire sur son canton en mars 1976, tandis qu’après sa mort, son autre fils Paul (Alexis a eu huit enfants, Pierre fut le septième) se fit élire maire de Balazé en décembre 1976. Le propre père d’Alexis fut également maire de Balazé de 1905 à 1945 et conseiller général de Vitré de 1930 à 1945.

La caractéristique familiale des mandats électifs n’est ni aristocratique ni népotique puisque dans une élection, c’est bien le peuple qui décide. On voit aussi des "dynasties" (le mot est un peu fort) dans d’autres domaines, comme dans les arts, la musique (Casadesus, etc.), le cinéma (Brasseur, Seigner, Depardieu, etc.), la science (Langevin, Curie, etc.), et là, certes, ce ne sont pas les électeurs, mais les lecteurs, les auditeurs, les spectateurs qui crédibilisent les "fils de". Il est facile de comprendre que lorsqu’un enfant vit dans le "milieu" de ses parents, il peut soit être passionné comme ses parents par ce même milieu, soit, au contraire, vouloir le fuir, mais il ne peut pas être indifférent. Des "dynasties", il y en a eu de nombreuses et n’ont pas forcément été les plus incapables dans la classe politique : Debré, Jeanneney, De Gaulle, Mitterrand, Giscard d’Estaing, Joxe, Cot, Barrot, Bosson, Baudis, Abelin, etc. Cela se retrouve dans tous les courants politiques, y compris à l’extrême droite (exemple très connu sur trois générations, la famille Le Pen).

Du reste, Laurence Maillart-Méhaignerie, épouse d’un neveu de Pierre Méhaignerie (à ne pas confondre avec sa fille qui se prénomme aussi Laurence), a repris le flambeau familial à l’Assemblée Nationale en se faisant élire députée LREM en juin 2017 (sur le quota du MoDem), mais à Rennes, pas à Vitré, dans une circonscription initialement réservée par Emmanuel Macron à son collègue de promotion Gaspard Gantzer (parachutage qui avait fait beaucoup réagir les militants LREM à l’époque). Elle avait été candidate UDI aux élections européennes de mai 2014 sur la liste de Jean Arthuis, et aux élections régionales de Bretagne en décembre 2015. Autre membre de la famille, l’ancien ministre socialiste Guillaume Garot, député (et ancien maire) de Laval, est le fils d’un cousin de Pierre Méhaignerie.

Cet aparté familial étant écrit, reprenons la trajectoire de Pierre Méhaignerie qui a fait ses études d’agronomie à Rennes. Métier détonnant dans le milieu politique, Pierre Méhaignerie est à l’origine un ingénieur du génie rural et des eaux et forêts (à ma connaissance, seule Nathalie Kosciusko-Morizet a eu un métier approchant).

En juin 1968, Alexis Méhaignerie renonça à solliciter le renouvellement de son mandat de député et le laissa son fils Pierre se présenter, mais dans le contexte de la fin de la crise de mai 1968, ce fut le gaulliste Henri Lassourd qui remporta l’élection. Aux élections suivantes, en mars 1973, dans la même circonscription (celle de Vitré), Pierre Méhaignerie a pris sa revanche en battant le député sortant gaulliste et fut donc élu député à l’âge de 33 ans. Ce fut son entrée dans l’arène politique, tant bretonne que nationale. Il fut réélu sans discontinuité député entre mars 1973 et juin 2012. En juin 2012, sa collaboratrice Isabelle Le Callennec fut élue députée UMP de sa circonscription, battue avec surprise en juin 2017 par la candidate LREM Christine Cloarec, conseillère municipale de la majorité de Vitré depuis 2008. Pierre Méhaignerie fut également élu député européen en juin 1979 sur la liste de Simone Veil mais démissionna immédiatement en raison de ses fonctions nationales.

Les fonctions nationales, il les a eues très tôt dans sa carrière, à l’âge de 36 ans. En effet, il fut nommé au gouvernement de Jacques Chirac le 12 janvier 1976 et resta sans discontinuer jusqu’à la fin du septennat de Valéry Giscard d’Estaing : Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Agriculture du 12 janvier 1976 au 29 mars 1977, puis, dans les gouvernements de Raymond Barre, Ministre de l’Agriculture du 29 mars 1977 au 13 mai 1981.

En mars 1977, non seulement il devenait un ministre de plein exercice, mais il avait acquis ses galons d’élu local : en mars 1976, il fut élu conseiller général du canton de Vitré, celui de son père et grand-père, et en mars 1977, maire de Vitré. Il fut rapidement l’un des hommes forts du centre droit de l’Ille-et-Vilaine (avec Alain Madelin, futur député-maire de Redon).

Pierre Méhaignerie est aujourd’hui encore maire de Vitré (depuis mars 1977) et président de la communauté d’agglomération de Vitré Communauté depuis janvier 2002, et il devrait en principe laisser la main en mars 2020 (aux prochaines élections municipales). Il fut également élu conseiller général de Vitré de mars 1976 à mars 2001, président du conseil général d’Ille-et-Vilaine de mars 1982 à mars 2001, et brièvement, conseiller régional de Bretagne de mars 1986 à juin 1988. L’un des mandats grâce auxquels il a pu expérimenter ses idées, ce fut bien sûr la présidence du conseil général, dont les missions sociales sont budgétairement très importantes (il est devenu président au moment où la décentralisation a donné beaucoup de pouvoir aux exécutifs départementaux). Ainsi, il a pu tester le concept du RMI dans son département avant l’heure, dispositif que le gouvernement de Michel Rocard a généralisé dans toute la France à partir du 15 décembre 1988 (loi n°88-1088 du 1er décembre 1988).

Je viens d’évoquer ses idées. Mais lesquelles sont-elles ? Pierre Méhaignerie est un démocrate-chrétien, il est donc avant tout un humaniste et à ce titre, un partisan de la construction européenne, et il est aussi un pragmatique dans le domaine économique. Il a compris qu’on ne pouvait pas redistribuer les richesses avant de les avoir produites. Par conséquent, il est dans cette idée de favoriser l’efficacité économique, mais avec la justice sociale. Ce n’est pas pour rien que son parti, le CDS (Centre des démocrates sociaux) a le mot "sociaux" dans son appellation. En quelques sortes, le CDS était la vigie sociale des gouvernements de centre droit et plus généralement, des coalitions rassemblant centristes, radicaux, indépendants et gaullistes. À ce réalisme, il faut ajouter aussi son adhésion à la décentralisation et à ce principe qui est à la base de l’Union Européenne, à savoir le principe de subsidiarité.

La victoire de la gauche en 1981 a bouleversé le camp de la majorité sortante, profondément divisée entre UDF et RPR. D’une part, le leadership de Jacques Chirac fut incontesté (et donc, incontestée aussi, l’hégémonie du RPR), et d’autre part, les députés UDF-RPR élus ou réélus en juin 1981 furent considérés comme des "rescapés" sur qui allaient peser les espoirs de reconquête.

Ce fut à ce moment-là que Jean Lecanuet, ancien candidat centriste à l’élection présidentielle de 1965, président de l’UDF depuis 1978 (il le resta jusqu’en 1988), et président du CDS depuis la réunification des centristes en 1976, abandonna la présidence du CDS. Jean Lecanuet, président du Centre démocrate à partir de 1963, puis du CDS à partir de 1976, créa la fonction de président délégué du CDS en 1978 lors de la création de l’UDF qu’il présidait aussi. Bernard Stasi était ce président délégué et très naturellement, en 1982, il était le favori pour être son successeur comme président du CDS.

Un changement de génération allait s’opérer : face à la "vieille garde" centriste représentée par Jean Lecanuet et André Diligent, il y avait cette "jeune garde" incarnée par Bernard Stasi, Jacques Barrot et Pierre Méhaignerie. Les trois furent parmi les cinq candidats à la présidence du CDS. D’habitude feutrées et dans les coulisses, les rivalités sont sorties au grand jour lors du congrès du CDS à Versailles du 29 au 31 mai 1982, invité par le sénateur-maire de Versailles, André Damien, disparu récemment.

Dans son blog, l'ami Hervé Torchet a rappelé ce congrès lors de la mort de Bernard Stasi : « Il y a cinq candidats à la présidence, parmi lesquels Stasi a la réputation d’être le plus proche de Barre, cependant que Méhaignerie est considéré comme plus proche de VGE. Au premier tour, Stasi est largement devant, je crois qu’il atteint 35% des mandats des délégués. Mais au deuxième tour, l’alliance de Méhaignerie avec Jacques Barrot (autre candidat) est gagnante. Méhaignerie est élu président et on dit que son premier geste est alors de téléphoner à Raymond Barre. Je me souviens du jeune Méhaignerie, grand homme blond d’aspect juvénile (il avait 42 ou 43 ans), un peu étonné de son propre succès, circulant parmi les tables du déjeuner de clôture du congrès en serrant des mains. » (8 mai 2011).

Pierre Méhaignerie fut donc élu président du CDS le 30 mai 1982 au second tour avec 525 voix contre 447 à Bernard Stasi (congrès du CDS à Versailles) et fut réélu jusqu’au 11 décembre 1994 (congrès du CDS à Vincennes). Pendant une douzaine d’années, il appliqua une alliance sans défaut avec le RPR pour la reconquête du pouvoir. L’un des grands talents de Pierre Méhaignerie fut d’avoir été un négociateur redoutable face au RPR pour les investitures communes aux élections législatives. André Diligent, secrétaire général du CDS, fut remplacé par Jacques Barrot en mai 1983 (il l’avait déjà été entre mai 1976 et octobre 1977).

Malgré son barrisme affiché, Pierre Méhaignerie et plus généralement, le CDS participa au gouvernement de cohabitation le 20 mars 1986. Raymond Barre y était hostile mais comprenait qu’on pût "aller à la soupe", les ministres centristes expliquaient comme leurs collègues qu’ils ne pouvaient pas refuser de gouverner dès lors que François Mitterrand avait refusé de démissionner. Et les centristes furent bien "servis" par Jacques Chirac, avec surtout des portefeuilles techniques. Ainsi, le premier d’entre eux, Pierre Méhaignerie fut nommé Ministre de l’Équipement, du Logement, de l’Aménagement du territoire et des Transports du 20 mars 1986 au 10 mai 1988, un ministère très technique mais crucial dans une stratégie politique (il était le ministre des mobilités et le ministre des implantations locales, si l’on peut dire). Il fut le premier à avoir instauré un dispositif fiscal d’incitation à l’investissement locatif.

Jean Lecanuet n’a pas eu le droit de revenir au gouvernement (il rêvait des Affaires étrangères, il était président de la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat), car François Mitterrand y avait mis son veto, accepté voire encouragé par Jacques Chirac. Sept autres centristes étaient ministres (sur trente-sept) : René Monory à l’Éducation nationale, Georges Chavanes au Commerce, Artisanat et Services, Bernard Bosson aux Collectivités locales puis aux Affaires européennes, Adrien Zeller à la Sécurité sociale, Jean Arthuis à la Consommation, Concurrence et Participation, André Santini aux Rapatriés et Ambroise Guellec à la Mer (à l’époque, André Santini était responsable du PSD et ne fut membre du CDS qu’en 1995 lors de la fusion en Force démocrate). À part René Monory qui a été confronté aux manifestations contre le projet Devaquet, aucun des ministres centristes n’était en première ligne ni en charge de ministères politiquement "chauds" ou "sensibles".

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Le clivage de 1982 au sein du CDS était surtout stratégique : Pierre Méhaignerie souhaitait une alliance confirmée avec les gaullistes alors que Bernard Stasi voulait plus d’autonomie, d’autant plus que la gauche arrivée au pouvoir, initialement prisonnière de son union avec les communistes, aurait pu se recentrer avec une alliance PS-CDS. C’était d’ailleurs ce qu’il allait se faire justement après la réélection de François Mitterrand en 1988 et la nomination de Michel Rocard (grand ami de Bernard Stasi et Simone Veil) à Matignon, ne bénéficiant que d’une majorité relative à l’Assemblée Nationale.

En juin 1988, les députés CDS décidèrent de faire sécession avec leur groupe UDF et créèrent le groupe UDC, Union du centre, afin d’apporter sur certains sujets le complément de voix pour aider le gouvernement Rocard (trois centristes, Jean-Marie Rausch, Bruno Durieux et Hélène Dorlhac, furent même débauchés et nommés au gouvernement, mais exclus du CDS). Pierre Méhaignerie décida de présider ce groupe parlementaire tout en présidant le parti lui-même, ce qui était rare dans la tradition parlementaire, surtout que l’expérience a montré qu’il se préoccupait plus de cette nouvelle présidence que de celle du parti.

Après l’échec de Raymond Barre à l’élection présidentielle de 1988 (Pierre Méhaignerie aurait pu être son Premier Ministre), et le retour de la gauche au pouvoir, un grand vent de "fronde" a eu lieu au printemps 1989 dans la perspective des élections européennes de juin 1989. En mars 1989, une nouvelle génération de responsables UDF-RPR a conquis de nombreuses grandes villes (certains les avaient déjà conquises en mars 1983). Au début du mois d’avril 1989, douze jeunes espoirs de la coalition UDF-RPR se sont regroupés dans un groupe appelé les Rénovateurs dans le but de mener une liste aux élections européennes et de "renverser" le pouvoir des plus anciens, à savoir Jacques Chirac, président du RPR, et Valéry Giscard d’Estaing, devenu président de l’UDF.

Six RPR : Alain Carignon (Grenoble), Michel Noir (Lyon), Étienne Pinte (Versailles), François Fillon (Sarthe), Michel Barnier (Savoie), Philippe Séguin (Épinal). Six UDF, dont trois du PR : Philippe de Villiers (Vendée), Charles Millon (Rhône-Alpes), François d’Aubert (Laval), et trois du CDS : Bernard Bosson (Annecy), Dominique Baudis (Toulouse) et François Bayrou (Pyrénées-Atlantiques). Ils n’étaient pas tous chefs d’un exécutif local à l’époque mais tous avaient l’ambition de faire tourner une page générationnelle. Pas seulement : leur but était aussi l’union de l’opposition, puisque l’idée était de constituer une liste commune aux élections européennes, du reste comme cela avait été le cas en juin 1984 sous l’égide de Simone Veil.

Lors de l’université de printemps du CDS à Narbonne réunie du 7 au 9 avril 1989, les trois députés centristes impliqués furent les stars de l’événement. On les a donc appelés "les trois B" et devenaient la génération montante du CDS. Si Pierre Méhaignerie suivait totalement cette initiative, il pouvait imaginer que son leadership serait amené à être rapidement contesté en interne. Chacun des trois B présentait ses perspectives stratégiques, qui étaient souvent différentes : l’un prônait la fusion des partis de l’opposition en un seul parti (ce que professait Édouard Balladur et c’est devenu réalité en 2002 avec la création de l’UMP), d’autres au contraire prônaient l’autonomie renforcée du parti centriste.

Je peux me tromper car mes souvenirs sont aujourd’hui trop parcellaires, mais il m’a semblé entendre que Bernard Bosson, avec sa voix qui pouvait prendre un ton chuintant giscardien, était favorable à l’autonomie, tandis que François Bayrou, qui allait devenir secrétaire général de l’UDF, voulait au contraire l’union de l’opposition. Cela réagissait vivement, cela débattait chez les militants du CDS et plus généralement, de toute l’opposition parlementaire. Les militants RPR étaient probablement encore plus opposés à une fusion en un seul parti que ceux de l’UDF.

Les responsables de la même génération installés dans les états-majors des partis refusèrent de suivre les Rénovateurs. Ce fut le cas de François Léotard (président du PR), Alain Madelin (vice-président du PR), Gérard Longuet (secrétaire général du PR), Alain Juppé (secrétaire général du RPR), Nicolas Sarkozy (secrétaire général adjoint du RPR). Des partis politiques de l’opposition, seul le CDS soutenait cette démarche de rénovation. Du CDS, seul (à ma connaissance) Jean Lecanuet s’était opposé au congrès du CDS à Lille le 22 avril 1989 à l’idée d’une liste centriste et rénovatrice aux élections européennes du 18 juin 1989 et souhaitait une liste unique UDF-RPR. Il fut alors sifflé copieusement par les militants centristes et ne prit plus jamais la parole dans une enceinte centriste.

En mai 1989, des différends politiques entre Philippe Séguin et la grande majorité des autres rénovateurs ont fait éclater le groupe des Rénovateurs, si bien que de leur initiative, il ne resta que la constitution d’une liste centriste menée par Simone Veil et soutenue par le CDS seul, à laquelle Jacques Chirac a eu l’habileté d’opposer une liste RPR-PR menée par un Européen convaincu, Valéry Giscard d’Estaing. C’est de ces élections que date la détestation de Simone Veil pour celui qui fut son directeur de campagne, François Bayrou, l’accusant d’avoir mal dirigé sa campagne (le résultat fut très décevant avec seulement 8,4% des voix, elle qui avait recueilli 43,0% aux précédentes élections du 17 juin 1984).

Après cet échec et une longue période sans élection ni locale ni nationale ni référendum (entre septembre 1989 et mars 1992), ce qui fut très rare dans l’histoire électorale, la perspective du congrès du CDS à Angoulême du 11 au 13 octobre 1991 fut au renouvellement. Le "ticket" de gouvernance Méhaignerie-Barrot était contesté au sein du CDS (également pour sa gestion interne), et d’autant plus qu’une nouvelle génération était là avec les "trois B".

Pourtant, chez les démocrates-chrétiens, on n’a pas voulu "tuer le père" en 1991. Alors qu’il était prévu que le très médiatique Dominique Baudis fût candidat à la présidence du CDS, soutenu par le vent de rénovation, Pierre Méhaignerie a réussi à négocier un compromis in extremis, si bien qu’il n’y a pas eu de "bataille". Pierre Méhaignerie gardait temporairement la présidence du CDS pour un dernier mandat, mais il était épaulé par un "président exécutif" Dominique Baudis, et par un nouveau secrétaire général Bernard Bosson, qui, pendant trois ans, nouvel homme fort du CDS, allait visiter toutes les fédérations départementales. En "lot de consolation", quittant le secrétariat général, Jacques Barrot fut désigné en octobre 1991 président du groupe UDC à l’Assemblée Nationale, à la place de Pierre Méhaignerie.

Pierre Méhaignerie voulait rester à la tête du CDS pour une raison compréhensible : la perspective des élections législatives de mars 1993 et la probable victoire de l’UDF et du RPR. Édouard Balladur fut nommé Premier Ministre et Pierre Méhaignerie fut nommé Ministre d’État, Ministre de la Justice du 30 mars 1993 au 11 mai 1995, numéro quatre du gouvernement. Pour Pierre Méhaignerie, ce fut une nomination surprenante et même décevante : pendant cinq ans, il s’était préparé à devenir le Ministre de l’Économie et des Finances, mais Édouard Balladur lui a préféré un autre centriste, moins influent politiquement et économiste (professeur agrégé d’économie politique), Edmond Alphandéry, député du Maine-et-Loire, et en supprimant l’appellation "Finances", accompagné par le très influent Nicolas Sarkozy au Budget (lui aussi ministre de plein exercice).

Sept centristes furent nommés membres du gouvernement Balladur : en plus de ceux nommés, Simone Veil, Ministre d’État et numéro deux du gouvernement, aux Affaires sociales, Santé et Ville, François Bayrou à l’Éducation nationale, Bernard Bosson à l’Équipement, Transports et Tourisme (l’ancien portefeuille de Pierre Méhaignerie sous la première cohabitation), Philippe Douste-Blazy à la Santé (et par la suite, porte-parole du gouvernement) et Daniel Hoeffel à l’Aménagement du territoire et Collectivités locales (Daniel Hoeffel était l’influent président du groupe Union centriste au Sénat depuis 1986). On pouvait légitimement s’étonner de l’absence de Dominique Baudis.

La fin du mandat de Pierre Méhaignerie à la tête du CDS aurait dû avoir lieu au cours du congrès du CDS à Rouen du 22 au 24 avril 1994, l’occasion de rendre hommage à Jean Lecanuet, mort le 22 février 1993. En raison de la perspective des élections européennes de juin 1994 et de la désignation de Dominique Baudis comme tête de liste UDF-RPR, il avait été décidé de reporter la désignation du nouveau président du CDS à un congrès extraordinaire à Vincennes les 10 et 11 décembre 1994. En toute logique, Bernard Bosson était le favori, il connaissait bien les fédérations et les militants et pouvait se prévaloir a priori facilement une majorité de mandats. Cependant, François Bayrou décida d’entrer dans la bataille et après une campagne éclair de trois mois, ce dernier fut finalement élu président du CDS le 11 décembre 1994, avec la neutralité bienveillante de Pierre Méhaignerie.

On connaît l’histoire qui a suivi : François Bayrou a voulu construire un parti à son service dans une perspective d’une candidature à l’élection présidentielle, d’abord en créant le 25 novembre 1995 (et présidant) Force démocrate (fusion du CDS et du PSD), puis en reprenant le 17 septembre 1998 la présidence de l’UDF, enfin en créant le 10 mai 2007 le MoDem qu’il préside encore aujourd’hui.

Après mai 1995, Pierre Méhaignerie quitta le gouvernement et se replia localement et à l’Assemblée Nationale, où il présida la commission des finances de juin 1995 à avril 1997, de juin 2002 à juin 2007, puis la commission des affaires sociales de juin 2007 à juin 2012. Il fut également vice-président du groupe d’amitié France-États-Unis (son épouse est américaine).

Le 7 mars 2007, Pierre Méhaignerie a envisagé de se porter candidat au perchoir pour la succession de Jean-Louis Debré nommé Président du Conseil Constitutionnel. Cette élection était particulière car les députés étaient en congé jusqu’à la fin de la législature le 19 juin 2007, en raison de la campagne présidentielle, si bien que le Président de l’Assemblée Nationale élu n’aurait eu aucune séance à présider. Bataille donc symbolique. Ce fut Patrick Ollier qui fut finalement élu à la quasi-unanimité en séance publique (seuls ont pris part au vote les députés UMP), après une primaire interne à l’UMP le matin où s’étaient présentés trois candidats, Patrick Ollier (ex-RPR), Claude Gaillard (ex-UDF), député de Nancy, ainsi que Yves Bur (ex-UDF), vice-président et finalement soutenu par Pierre Méhaignerie.

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Lors de création de l’UMP le 23 avril 2002, deux jours après le choc qui plaça Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle, Pierre Méhaignerie, Jacques Barrot, Philippe Douste-Blazy et de nombreux autres cadres centristes ont rejoint l’UMP dirigée par Alain Juppé. Philippe Douste-Blazy fut nommé secrétaire général de l’UMP. Quand Nicolas Sarkozy a repris la présidence de l’UMP, Pierre Méhaignerie fut désigné secrétaire général de l’UMP du 28 novembre 2004 au 25 septembre 2007 (Patrick Devedjian, Xavier Bertrand puis Jean-François Copé lui ont succédé par la suite). Cependant, il n’avait plus aucune influence sur la politique de l’UMP et quitta ce parti en été 2010, révolté par le discours de Grenoble (du 30 juillet 2010). Il a compris que la création de l’UMP n’était pas une fusion de deux partenaires égaux mais la phagocytose de l’UDF par le RPR. Dès l’été 2011, il annonça son soutien à la candidature de François Bayrou à l’élection présidentielle et il adhéra à l’UDI lors de sa création en octobre 2012.

Pierre Méhaignerie s’est retiré partiellement de la vie politique en juin 2012 en ne sollicitant pas le renouvellement de son mandat de député, après trente-neuf années de mandat interrompues par ses incursions gouvernementales (pendant neuf ans). Il avait quitté aussi la présidence du conseil général d’Ille-et-Vilaine en mars 2001, touché par la loi sur le cumul des mandats. Quand, le 18 septembre 2013, Pierre Méhaignerie a annoncé à l’âge de 74 ans qu’il se présenterait à un nouveau mandat de maire de Vitré en mars 2014, il confiait qu’il avait besoin d’agir tant qu’il le pouvait, et évaluait à 99% la probabilité qu’il arrêterait définitivement en mars 2020, après quarante-trois ans de mandat de maire. En mars 2014, il a été réélu dès le premier tour avec 76,2% des voix.

Cette brillante carrière politique, tant locale que nationale, associée à la démocratie chrétienne bretonne, Pierre Méhaignerie ne l’a évidemment pas poursuivie sans quelques aspérités ni reproches comme dans tout parcours politique. Pour finir, signalons que, contrairement à certains qui courent après les honneurs, Pierre Méhaignerie n’a été décoré qu’une seule fois et très tardivement, puisqu’il a été fait chevalier de la Légion d’honneur seulement le 21 novembre 2014 devant cinq cents personnes par Alain Juppé, venu le visiter sur ses terres de Vitré et reçu par la députée UMP Isabelle Le Callennec qui affirma plus tard : « De l’avis de tous, une très belle soirée en hommage à celui qui a tant fait et continue d’œuvrer au service de son territoire. Respect ! ».

Respect, c’est probablement ce qu’il faut retenir des réalisations de Pierre Méhaignerie qui ont toujours eu pour but d’associer, selon son antienne, l’efficacité économique avec l’indispensable justice sociale. Peut-être un bon enseignement pour aujourd’hui…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 mai 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
André Diligent.
Pierre Méhaignerie.
Bernard Stasi.
André Damien.
Les Rénovateurs.
Le CDS.
Jean Seitlinger.
Simone Veil.
Nicole Fontaine.
Henry Jean-Baptiste.
Loïc Bouvard.
Bernard Bosson.
Dominique Baudis.
Jacques Barrot.
Adrien Zeller.
Alain Poher.
Jean Lecanuet.
René Monory.
Raymond Barre.
Charles Choné.
Marie-Jeanne Bleuzet-Julbin.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190504-mehaignerie.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/pierre-mehaignerie-et-le-centrisme-214843

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/05/02/37305286.html




 

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1 mai 2019 3 01 /05 /mai /2019 03:16

« Il y a un paradoxe : on a passé des mois à dire qu’il fallait redonner de la vigueur à notre démocratie et l’on considérerait qu’il n’est pas important d’aller voter ? Décider de ne pas aller voter, c’est décider de donner sa voix à ceux qui ne veulent que détruire. » (Emmanuel Macron, déclarations avec la presse régionale, 20 mai 2019).



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La question que je pose dans le titre, à savoir, "L’Union Européenne est-elle démocratique ?" peut prêter à sourire plus qu’à réfléchir. La réponse paraît immédiate, évidente, consensuelle et sans appel : non ! Non, l’Union Européenne n’est pas démocratique. Et pourtant, très paradoxalement, nous nous apprêtons à nous livrer, nous citoyens européens, nous les 400 millions d’électeurs européens, à l’exercice démocratique par excellence : l’élection. En effet, dans quelques jours, le 26 mai 2019, nous élisons le nouveau Parlement Européen qui sera en exercice du 1er juillet 2019 au 30 juin 2024.

De paradoxes, dans cette Europe, il y en a beaucoup. L’une des critiques les plus justifiées des institutions européennes actuelles, c’est justement le manque de démocratie, la carence démocratique. Le paradoxe, c’est que ce sont ceux qui sont le plus contre l’Union Européenne, ce sont ceux qui sont le plus contre la coopération européenne, ce sont ceux qui sont le plus contre la construction européenne, au point parfois de l’appeler UERSS pour vouloir la comparer à la défunte Union Soviétique (des stupides qui n’ont jamais vécu l’enfer soviétique, apparemment), qui fustigent le plus le manque de démocratie européenne.

Justement, disons-leur : chiche ! Faisons de l’Union Européenne une véritable démocratie. Rendons démocratique, plus démocratique, l’Europe ! Il n’a échappé à personne, pas même aux eurosceptiques, que faire la démocratie en Europe, c’était nécessairement la rendre supranationale ! Paradoxe que ce soient les plus opposés à l’Europe qui condamnent le manque démocratique.

Car qu’est actuellement l’Europe d’aujourd’hui ? Pas celle que les eurosceptiques dénoncent. Non. C’est celle au contraire qu’ils soutiennent dans une sorte de fantasme : l’Europe des nations. Ou l’Europe des patries. Alors, je leur dis : réveillez-vous ! ouvrez vos yeux, surtout ceux qui, en masse, ont été élus au Parlement Européen en mai 2014 : le centre de décision dans l’Europe d’aujourd’hui, c’est le Conseil Européen, c’est-à-dire, c’est l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement des États membres. C’est même la raison de l’enlisement, de la paralysie, surtout lorsqu’il faut l’unanimité pour décider : une seule nation suffit à faire capoter un projet que souhaitent les vingt-sept autres. J’écris vingt-sept et pas vingt-six, puisque le Royaume-Uni, à cette heure, est encore officiellement membre de l’Union Européenne.

Qui a "inventé" cette Europe des nations actuelle ? Il s’agit de Valéry Giscard d’Estaing, qui, lorsqu’il était Président de la République, avait proposé au Chancelier allemand Helmut Schmidt d’institutionnaliser ce qui n’était encore qu’informel : la réunion des chefs d’État et de gouvernement. Cela s’est appelé le Conseil Européen et depuis, les traités ultérieurs ont codifié cette réunion régulière.

Il faut rappeler qu’à l’époque (milieu des années 1970), les plus enthousiastes des partisans de la construction européenne s’étaient opposés à cette institutionnalisation du Conseil Européen : en effet, ils avaient compris que c’étaient les nations qui allaient garder le pouvoir seul au sein de l’Europe qui n’avait donc rien de supranational.

Mais Valéry Giscard d’Estaing, comme les Pères de l’Europe, est un esprit pragmatique. Pour faire avancer l’Europe, il avait compris qu’il fallait faire adhérer toutes les nations en même temps, n’en laisser aucune au bord de la route. Seuls, les États pouvaient réaliser des avancées notables dans la construction. Il a eu raison. Évidemment, à l’époque, c’était l’Europe des Neuf. C’était plus facile (ce qui ne voulait pas dire facile) de se mettre d’accord à Neuf qu’à Vingt-huit. C’était la raison du TCE puis du Traité de Lisbonne, la possibilité au Conseil Européen de prendre des décisions à la majorité qualifiée au lieu de l’unanimité.

À la même époque, parce qu’ils étaient des esprits pragmatiques, Valéry Giscard d’Estaing a proposé avec son homologue allemand, l’élection au suffrage universel direct des députés européens (première élection directe, en juin 1979, il y a quarante ans), ce qui permet aujourd’hui de pouvoir voter. Entre le Traité de Rome et 1979, il y avait bien eu un Parlement Européen, qui s’appelait autrement et surtout, qui était composé de parlementaires nationaux désignés par leur parlement respectif. Donc, en élection indirecte, sans impliquer les citoyens européens.

Cette élection directe avait donc un sens politique essentiel : c’était la première pierre démocratique spécifique des institutions européennes. Certes, à l’époque, le Parlement Européen n’avait aucun pouvoir. Il pouvait discuter de résolutions, approuver des directives, créer des prix (Sakharov par exemple), mais son activité n’avait aucune finalité décisionnelle au contraire des parlements nationaux qui élaborent et votent les lois. En 1979, cette élection était donc surtout politique et symbolique. Accessoirement, elle permettait aussi à des personnalités politiques sans mandats d’en avoir (tremplin pour jeunes espoirs ou placard pour losers).

En France, un parti s’est particulièrement opposé à cette élection directe, en 1979, ce fut le RPR dirigé par Jacques Chirac, ce qui a donné son plus mauvais texte, le fameux appel de Cochin, Cochin car le président du RPR était hospitalisé après un très grave accident de voiture, et en fait, résultat d’une manœuvre de Marie-France Garaud (c’est à cause de cela d’ailleurs que Jacques Chirac s’est politiquement séparé d’elle). Les "souverainistes" ne pouvaient que s’opposer à l’élection directe des députés européens. Je pose la question maintenant, quarante ans plus tard : qui, des eurosceptiques, s’opposent à l’élection directe des députés européens ?

Le fait qu’aujourd’hui encore, le Conseil Européen reste l’instance d’initiative et de décision (la Commission Européenne n’étant qu’une instance opérationnelle qui exécute les décisions du Conseil Européen) montre qu’aucun État membre n’a perdu sa souveraineté nationale. S’il y a une décision européenne, c’est parce que les États membres l’ont voulue.

Depuis les années 1990, ce fut le problème avec la crise économique : une certaine forme de "schizophrénie" a contaminé la plupart des gouvernements nationaux, quelles qu’en soient la nationalité et surtout, la tendance politique. On disait ainsi en France : ce n’est pas à cause de moi, à Paris, mais à cause de ces eurocrates de Bruxelles. Sauf que ces bureaucrates de Bruxelles, ils n’ont fait qu’appliquer ce que le gouvernement français (et les autres) ont décidé. Le double langage parisien et bruxellois, en France, mais c’était pareil dans beaucoup d’autres pays, permettait de ne pas assumer la responsabilité de ses propres décisions. Pas étonnant que Bruxelles soit devenu un bouc émissaire facile.

L’exemple le plus typique est le déficit public et la dette. Le critère de Maastricht, c’est d’avoir un déficit public de moins de 3% du PIB. Or, cette décision qui est un engagement international de la France, c’est d’abord un impératif pour la France même isolée en dehors de toute appartenance européenne. On ne peut pas impunément et systématiquement avoir un budget en déficit sans que les citoyens le paient un jour cruellement (il suffit d’une remontée des taux d’intérêt pour que cela soit catastrophique). Le 30 avril 2019 sur LCI, l’ancien Ministre des Finances Thierry Breton, autosatisfait, répétait ainsi, pour se vanter d’avoir assaini les finances publiques, qu’il était arrivé à Bercy avec les engagements internationaux de la France sur le déficit. Comme si, sans Maastricht (ratifié démocratiquement par le peuple français, rappelons-le quand même à tout hasard), la France n’aurait pas dû réduire son déficit public. Ce sont systématiquement ce type de propos, pourtant émanant de partisans de la construction européenne, qui ont injustement discrédité l’Europe.

La construction européenne n’a jamais été qu’une construction à petit pas, timide, et surtout, inédite. Car au contraire de l’URSS, au contraire du Troisième Reich (comment peut-on comparer l’Union Européenne à un Quatrième Reich ? Il faut vraiment ne rien connaître de l’histoire pour imaginer une telle stupidité), l’Union Européenne est le regroupement VOLONTAIRE de nations LIBRES pour appliquer ce principe si connu et si utilisé : l’union fait la force. Surtout face aux États-Unis, à la Chine, à l’Inde, au Japon, à la Russie, au Brésil… Une superpuissance de 500 millions d’habitants peut rivaliser avec d’autres blocs d’importance similaire. Pas une puissance moyenne de 67 millions d’habitants.

Historiquement, une telle construction est inédite, à tel point qu’on attendait le modèle européen (qui aujourd’hui nécessite une "renaissance" comme le propose Emmanuel Macron) pour construire d’autres ensembles coopératifs de pays (notamment en Afrique). Le modèle est pour l’instant en attente.

Cette construction est donc progressive, prudente, pragmatique. Arrivons justement au Traité de Lisbonne, lui aussi qui est aujourd’hui très décrié. Pourtant, entre avant et après Lisbonne, il y a des avancées démocratiques majeures. La principale, c’est enfin de se servir de cette assemblée élue démocratiquement par les peuples européens, pour qu’elle participe à la prise de décision européenne.

Ainsi, depuis le Traité de Lisbonne, si le Président de la Commission Européenne ainsi que les commissaires européens sont toujours désignés par le Conseil Européen, ils doivent être "ratifiés" ou plutôt "confirmés" par le Parlement Européen, un peu comme les membres du gouvernement américain sont confirmés par le Congrès américain. Ce ne sont pas les députés européens qui choisissent les membres de la Commission Européenne (d’autant qu’il faut une représentation de chaque nation), mais ils sont capables de refuser certains de ces membres. C’est une avancée, même mineure, mais symboliquement essentielle.

On a l’habitude de représenter les institutions en faisant des comparaisons : la Commission Européenne serait le "gouvernement", le Parlement Européen la "chambre basse" et le Conseil Européen, la "chambre haute" (Sénat). En fait le gouvernement et la chambre basse seraient regroupés plutôt au Conseil Européen, et la Commission Européenne serait plutôt comme une super-administration centrale.

Or, en 2014, la situation a un peu évolué avec la pratique, et seulement avec la pratique. Fort de ce droit de ratification, les candidats parlementaires européens ont décidé, pour cinq ou six grands partis européens (PPE, S&D, ALDE, écologistes, ultra-gauche) de désigner un "chef de file" (Spitzenkandidat, mot allemand qu’on garde en français pour cette fonction très spécifique), en décidant que le chef de file du parti ayant le plus de sièges au Parlement Européen serait le futur Président de la Commission Européenne. Il y a un moyen simple d’imposer cette idée au Conseil Européen, il suffit de refuser de ratifier tout autre candidat. Ainsi, Jean-Claude Juncker (PPE), Martin Schulz (S&D), Guy Verhofstadt (ALDE) et Alexis Tsipras, entres autres, furent les candidats déclarés à la tête de la Commission Européenne.

Il faut bien comprendre ce qu’il s’était passé il y a cinq ans : les partis européens ont pris le pouvoir eux-mêmes en utilisant les institutions issues du Traité de Lisbonne pour renforcer la démocratie et approcher les institutions européennes d’un régime parlementaire classique (de type britannique, allemand, italien ou espagnol). Le chef du gouvernement est généralement le chef du parti victorieux aux élections législatives.

Après la victoire électorale du PPE en mai 2014, le Conseil Européen, refusant d prendre l’initiative d’un affrontement avec le Parlement Européen, a désigné Jean-Claude Juncker à la Présidence de la Commission Européenne. S’il avait toutes les compétences pour ce poste (notamment en tant que Président de l’Eurogroupe pendant longtemps), Jean-Claude Juncker a surtout eu le mérite d’être le premier Président de la Commission Européenne issu d’un processus démocratique classique mais novateur en Europe.

Le premier et peut-être le dernier à court terme, puisque, entre autres, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont réaffirmé leurs réticences à l’égard de ce principe du Spitzenkandidat. Selon les projections électorales, le PPE resterait le premier parti du Parlement Européen en nombre de sièges (même s’il en obtiendrait moins qu’en 2014), et pourtant, il est peu plausible que le chef de file du PPE soit désigné Président de la Commission Européenne alors qu’il n’a jamais eu l’expérience d’un exécutif (le Bavarois Manfred Weber).

Interrogé par la presse régionale française le 20 mai 2019, le Président Emmanuel Macron a réaffirmé son ambition pour l’Europe, d’autant plus que la France préside l’Union Européenne à partir du 24 mai 2019 (pour six mois) : « Je veux une Convention fondatrice européenne après les élections. Que les chefs d’État et de gouvernement, avec le nouvel exécutif et les responsables du Parlement, avec les citoyens, prennent le temps de définir la stratégie de l’Europe pour les cinq années à venir, y compris les changements de traités sur lesquels ils veulent aboutir. ». Toutefois, la liste Renaissance menée par Nathalie Loiseau a très peu de propositions pour renforcer concrètement la démocratie européenne.

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La liste qui m’a paru la plus réformatrice dans le but de donner plus de démocratie à l’Europe me semble être celle de l’UDI, menée par Jean-Christophe Lagarde (son programme est ici).

La liste UDI propose ainsi la réforme majeure qui parlementariserait définitivement l’Union Européenne en faisant simplement élire le Président de la Commission par le Parlement Européen : « Nous proposons que, comme dans n’importe quelle démocratie normale, le Président de la Commission Européenne soit élu par les parlementaires européens, en fonction des résultats des élections européennes, et non plus selon un simple avis conforme (article 17 du TUE). ».

Par ailleurs, la même liste propose ce que François Bayrou avait proposé déjà il y a une vingtaine d’années, à savoir l’élection d’un Président du Conseil Européen au suffrage universel direct. Depuis le Traité de Lisbonne, cette fonction a été créée, actuellement occupée par le Polonais Donald Tusk (on parlerait d’Angela Merkel pour lui succéder), mais il est désigné pour deux ans et demi, renouvelables une fois. L’idée, ici, est une véritable élection supranationale avec la mise en place d’un véritable paysage politique européen : « Nous proposons que le Président du Conseil Européen soit directement élu au suffrage universel. Sa première mission serait de défendre l’intérêt des citoyens européens lors des réunions des gouvernements et des chefs d’État au Conseil. ».

Ces deux mesures citées sur la désignation des deux chefs d’exécutif auraient pour conséquence une véritable démocratisation des institutions européennes. Or, tous ceux qui critiquent le manque de démocratie se gardent bien de proposer de telles réformes car il s’agirait alors de renforcer l’Europe politique. On ne peut pas créer de démocratie en refusant la supranationalité.

Je souhaite cependant mettre un bémol au sujet de ces deux mesures. La liste UDI, avec raison, veut renforcer la construction européenne par des projets qui unissent les citoyens. Son principe est le suivant : « L’Europe s’essouffle car nos chefs d’État ne proposent que des projets qui divisent les Européens : nous savons que l’Europe ne pourra pas avancer si l’on impose de manière autoritaire des mesures dont les autres pays que la France ne veulent pas. Pour relancer l’Europe, nous proposons des grands projets fédérateurs qui peuvent rassembler les vingt-huit États car tous y auront intérêt. ».

Or, l’idée de l’élection directe, par l’ensemble des citoyens européens, d’un Président de l’Europe me paraît une utopie peu réaliste. Pourquoi ? Parce que, pour le coup, c’est une véritable réforme supranationale qui subirait non seulement l’opposition des eurosceptiques, mais aussi des europhiles de nombreux pays parlementaires qui pourraient craindre le bonapartisme à la française que symboliserait une telle mesure. Un tel Président serait beaucoup trop imposant pour l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement.

Le pragmatisme prudent viserait plutôt à appuyer à fond la première mesure, l’élection du Président de la Commission Européenne par les députés européens, qui, là, serait totalement acceptée par les partisans d’une parlementarisation classique des institutions européennes.

Cette élection pourrait s’accompagner, comme le propose l’UDI, d’un choix plus démocratique des commissaires européens : « Le candidat sélectionné par le chef d’État devra obtenir la validation des "eurodéputés" du pays concerné à la majorité absolue, c’est-à-dire un avis conforme d’au moins quarante "eurodéputés". » (pour la France). Cela pour éviter, par exemple, la précédente désignation en 2014 : François Hollande avait nommé le socialiste Pierre Moscovici (son ministre) comme l’unique commissaire européen français alors qu’aux élections européennes, « 87% des Français avaient voté contre le PS ! ».

En outre, la liste UDI propose d’autres voies également de démocratisation.

En premier lieu, la possibilité d’un "référendum européen citoyen" qui serait lancé avec une pétition regroupant 1% de la population (seuil de 4,5 millions de citoyens européens) : « Ce référendum permettrait de créer un véritable corps électoral européen, de rendre l’Europe plus démocratique et plus efficace alors que le système gouvernemental actuel paralyse la prise de décision. ». Mais cette mesure s’harmonise mal avec certaines démocraties européennes qui refusent le principe même du référendum dans leur Constitution.

En second lieu, un changement radical du financement du budget européen. Supprimer les contributions nationales (ce qui rendrait 91 milliards d’euros aux Français pour les sept prochaines années) et créer une fiscalité européenne propre, à savoir : une taxe sur les importations de produits polluants (491 milliards d’euros sur sept ans), une taxe sur les transactions financières (385 milliards d’euros sur sept ans) et une taxe sur les visas de touristes extra-européens (44 milliards d’euros sur sept ans).

Cette dernière mesure, spécifiquement fiscale, est aussi une mesure de démocratisation dans la mesure où la démocratie impose la clarté. Or, personne ne sait où va l’argent pour l’Europe. En créant une fiscalité propre, on renforce ainsi la démocratisation des institutions européennes. Là encore, ceux qui critiquent le manque de démocratie de l’Union Européenne se garderont bien de proposer une telle fiscalité propre, qui, pourtant, allégerait le poids budgétaire de l’Europe à tous les États membres.

Cette question de la démocratisation de l’Europe est donc essentielle, car sans soutien populaire, l’Europe ne vaut rien. Or, ce sont ceux qui parlent d’un manque de démocratisation qui s’opposent le plus à toute réforme visant à la réaliser ! Cherchez donc bien quelles listes sont cohérentes, quelles listes proposent de renforcer, réellement, la démocratie européenne, au-delà des postures démagogiques et des déclarations hypocrites.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 mai 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Ce que propose l’UDI pour les élections européennes de 2019.
François-Xavier Bellamy.
Nathalie Loiseau.
Marine Le Pen.
Européennes 2019 (4) : les enjeux du scrutin du 26 mai 2019.
Européennes 2019 (3) : l’Union Européenne est-elle démocratique ?
À quoi pense Nathalie Loiseau ?
La Vaine Le Pen.
Européennes 2019 (2) : enfin, la campagne commence !
Programme de la liste Renaissance (LREM) pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste Les Républicains pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste UDI pour les élections européennes de 2019.
Michel Barnier, pas très loin de la Présidence de la Commission Européenne.
Le testament européen de Jean-Claude Juncker.
Européennes 2019 (1) : la France des Douze ?
Le retour aux listes nationales aux élections européennes (2 décembre 2017).
Jean Monnet.
Emmanuel Macron à la conquête des peuples européens.
Le programme du CNR.
Discours de Robert Schuman le 9 mai 1950 au Salon de l’Horloge à Paris (texte intégral).

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190520-udi-programme-europeen.html

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/05/21/37355689.html



 

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12 avril 2019 5 12 /04 /avril /2019 01:40

« Je préfère être impopulaire qu’irresponsable. » (5 septembre 1980).


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J’ai été barriste, je reste barriste. Je ne sais pas combien il en reste encore aujourd’hui, mais s’il devait n’en rester qu’un, je suis prêt à être celui-là !

Plus je regarde le passé derrière moi, plus je vois cette quasi-trentaine d’années de perdues par l’irresponsabilité et le manque de vision des dirigeants de la France, plus je reste persuadé que l’élection de Raymond Barre à la Présidence de la République en mai 1988 aurait changé la face des choses en France. Le pays aurait alors accepté de s’occuper de ses vrais problèmes, aurait eu le courage de faire des réformes pour enrayer son déclin et amorcer sa renaissance. Et le premier des courages, cela aurait été d’arrêter la fuite en avant du clientélisme électoraliste onéreux qui a fait grimper la dette publique à des niveaux inimaginables.

Il y a exactement dix ans, le 25 août 2007, l’ancien Premier Ministre Raymond Barre est mort, à l’âge de 83 ans, au Val-de-Grâce, quatre jours avant un autre Premier Ministre, Pierre Messmer, dans le même hôpital parisien. Cela faisait quatre mois qu’il était hospitalisé et plusieurs années qu’il était malade. Les obsèques furent célébrées le 29 août 2007 par le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris.

À la fois gaulliste détesté par les gaullistes et démocrate-chrétien détesté par les démocrates-chrétiens, à la fois libéral détesté par les centristes et centriste détesté par les libéraux, il cultivait son don très personnel de l’indépendance intellectuelle et politique.

On a vu que pour gagner une élection présidentielle, il fallait plutôt être chef de meute que loup solitaire. Qu’importe, puisque face à l’Histoire, il aura eu raison. C’est le syndrome Pierre Mendès France, ou encore Jacques Delors, ou encore Michel Rocard : si j’avais été à la magistrature suprême, cela se serait passé autrement… L’actuel Premier Ministre Édouard Philippe l’a bien expliqué à ses colistiers du Havre lors de la campagne municipale de mars 2014 pour son renouvellement de maire : un homme sans conviction qui ne s’occupe que des stratégies politiciennes n’a aucun intérêt ; un homme de conviction incapable de voir la dimension politique ne sera jamais au pouvoir et ce n’est même pas la peine d’en parler. En d’autres termes, il faut des convictions et l’ambition pour réussir.

Le Président François Mitterrand avait reconnu, en 1988, la qualité de celui qui avait été l’un de ses adversaires les plus redoutables à l’élection présidentielle : Raymond Barre était, selon lui, un « véritable homme d’État ». Et c’est vrai que depuis une dizaine d’années, on peut se demander où ils sont, les "véritables hommes d’État" d’aujourd’hui ?

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Un peu comme Simone Veil et d’autres personnalités très indépendantes, Raymond Barre n’appartenait pas au sérail politique. Il avait hésité et avait préféré l’agrégation en économie au diplôme de l’ENA. Cela ne l’a cependant pas empêché d’être un haut fonctionnaire respecté et écouté par De Gaulle au point d’avoir fait preuve d'un certain talent de persuasion lorsqu’il fallait éviter la dévaluation du franc en automne 1968 alors que tout le monde la réclamait, et en particulier le gouvernement français lui-même (Raymond Barre a toujours sous-estimé publiquement l’importance de son rôle à cette époque où il travaillait à Bruxelles comme numéro deux de la Commission Européenne).

Son caractère trempé, prêt à avoir raison contre tout le monde, pouvait agacer avec son air professoral qu’il a toujours gardé, anobli par le Président Valéry Giscard d’Estaing du titre ronflant de « l’un des meilleurs économistes de France », une qualification qui lui colla à la peau un peu comme, plus tard, quand Jacques Chirac a parlé de son fidèle Alain Juppé comme « le meilleur d’entre nous ». Son amour de la langue française et des subjonctifs imparfaits ajoutait avec saveur quelques bons mots, comme sa revendication d’être un « extraterrestre » dans le « microcosme politique », loin des « porteurs de pancartes, ceux qui scribouillent, jacassent et babillent, le chœur des pleureuses et le cortège des beaux esprits, des milieux qui ne vivent que de manœuvres, d’intrigues et de ragots » (27 septembre 1978).

Avec son ton pontifiant et son assurance de premier de la classe, Raymond Barre était forcément sujet à la caricature, ce qu’il apprécia à sa juste valeur, n’étant pas, lui-même, exempt d’humour et d’autodérision : « Ma détente, lorsque j’étais à Matignon, était de lire le grouillement du microcosme dans "Le Canard enchaîné". Je n’ai jamais vraiment souffert d’être caricaturé. » ("L’enfer de Matignon", documentaire de 2007). Babarre l’éléphant, ou encore Barzy le nounours dans le "Bébette Show" de Stéphane Collaro, sa marionnette des "Guignols de l’info", ou encore la tortue de la fable, il adorait évidemment les excellentes imitations de Thierry Le Luron, notamment celles avec Bernard Mabille imaginées dans sa villa de Saint-Jean-Cap-Ferrat en 1984-1985.

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Ce fut ce même entêtement à vouloir avoir raison contre tous, et donc, à se moquer de ne pas être aimé, de ne pas être apprécié à sa juste valeur, qui a fait parfois dériver Raymond Barre à la fin de sa vie.

On lui reproche régulièrement sa maladresse lors de sa réaction sur TF1 au terrible attentat antisémite de la rue Copernic le 3 octobre 1980 (il était alors Premier Ministre) : « Cet attentat odieux qui voulait frapper les Israélites qui se rendaient à la synagogue et qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic. ». Il avait dû s’expliquer devant les députés le 8 octobre 1980 en réaffirmant que malgré la tournure de la phrase qui pouvait susciter l’ambiguïté, celle de considérer que les Juifs étaient coupables et n’étaient pas des Français, ses "compatriotes juifs" faisaient bien partie de "l’ensemble de la nation" et qu’il n’y avait pas opposition. Mais il n’avait pas voulu dire simplement qu’il avait été maladroit et qu’il le regrettait.

Ce reproche l’a rendu très amer pendant les décennies qui ont suivi cette malheureuse polémique. Juste avant de mourir, dans ses dernières déclarations publiques avant de tomber dans le coma, sur France Culture, interrogé par Raphaël Enthoven le jeudi 1er mars 2007 dans l’émission "Le rendez-vous des politiques", il a franchi la ligne rouge en "se lâchant", en évoquant le « lobby juif » contre lui. C’était hélas une triste illustration du fameux "naufrage de la vieillesse" dont parlait De Gaulle pour expliquer Pétain.

Il a aussi choqué beaucoup de monde (dont moi) en parlant de son ancien collègue universitaire à Caen, Bruno Gollnisch (élu FN accusé de propos négationnistes, voir à la fin de l'article) qui était un conseiller municipal de Lyon qui « se conduit correctement » : « Moi, je suis quelqu’un qui considère que les gens peuvent avoir leur opinion, c’est leur opinion. Et par ailleurs, quand je les ai vu fonctionner dans un climat particulier, je reconnais leurs qualités. (…) Certes, je blâmais les propos de M. Gollnisch, mais j’ai tellement entendu les propos de M. Gollnisch à Lyon que cela finissait par ne plus m’émouvoir. Quand on entend à longueur de journée tout ce qui se dit à droite et à gauche, à la fin, on n’y porte plus attention. Et j’ai dit en parlant de Gollnisch que je blâmais ce qu’il avait dit, mais que pour le reste, je l’avais connu et que c’était un homme bien. C’était un bon conseiller municipal et que ceux qui ne sont pas satisfaits de cela pensent ce qu’ils veulent. ».

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Quant à son ancien Ministre du Budget, Maurice Papon, condamné bien plus tard, le 2 avril 1998, à dix ans de réclusion criminelle pour complicité de crimes contre l’humanité, il était pour lui « un grand commis de l’État ». Avec cette question à la clef, à faire frémir : « Alors, nous nous trouvons devant un phénomène essentiel : est-ce que tous les fonctionnaires de l’État qui étaient en fonction à l’époque auraient dû abandonner leurs responsabilités ? Ou au contraire, rester, pour essayer de limiter la casse (…) et de préparer l’avènement de la République qui suivrait ? ».

Et de poursuivre : « Quand on a des responsabilités essentielles dans un département, une région ou à plus forte raison, dans le pays, on ne démissionne pas. On démissionne lorsqu’il s’agit vraiment d’un intérêt national majeur. (…) Ce n’était pas le cas car il fallait faire fonctionner la France. (…) [Les fonctionnaires qui étaient en place] ont essayé tant bien que mal de limiter ce drame qu’a été la persécution des Juifs. ». En rajoutant : « Il y a dans ce pays une hypocrisie fondamentale à chercher quelques boucs émissaires alors qu’il faut bien le reconnaître : si le pays a continué à fonctionner, c’est parce que le Général De Gaulle a maintenu ceux qui étaient en place quand il le pouvait. ».

Cette déclaration m’a fait frémir car "l’intérêt national majeur", arrêter la déportation des Juifs et leur future extermination, si ce n’était pas majeur… Sa justification, Raymond Barre l’a donnée avec la caution d’un gaulliste insoupçonnable, Olivier Guichard, venu comme lui témoigner au procès Papon.

Pour l’absence de regret de Maurice Papon, Raymond Barre l’a mise sur le compte de la fierté (la même que la sienne) : « Il lui a manqué la phrase disant que ce qui avait été fait sous son autorité était quand même regrettable et qu’il l’avait fait parce qu’il pensait que c’était son devoir de le faire. Je crois que c’est cela et il n’a jamais rien dit ensuite, parce que M. Papon était un homme fier. C’est un homme qui exerçait de grandes responsabilités, ce n’était pas quelqu’un à dire : "Je regrette ce que j’ai fait". ».

Il a conclu cette interview ainsi : « Je m’excuse, je vous ai parlé très franchement. Que vous me fassiez passer pour un antisémite, pour quelqu’un qui ne reconnaît pas la Shoah, j’ai entendu cela cent fois, et cela m’est totalement égal. ». En fait, cela ne lui était pas du tout égal, cela l’avait meurtri très profondément mais l’amour-propre débridé par la vieillesse lui a fait prononcer des paroles qui allaient bien au-delà de ce qu’il a toujours représenté dans la vie politique française, à savoir un homme aux réflexions raisonnables et mesurées.

Je me permets ici de retranscrire ma réaction à la suite de cette interview, en pleine compagne présidentielle de 2007 : « J’ai écouté Raymond Barre sur France Culture le 1er mars 2007. (…) À la question sur l’absence de vraies mémoires, Raymond Barre a l’humilité de dire que cela nécessitait un travail soutenu de documentation qu’il ne se sentait pas en mesure d’accomplir à sa fin de vie (…). Comment dire l’émotion chaque fois que j’écoute Raymond Barre ? C’est sa démarche qui m’a fait apprécier la classe politique, sa fermeté, sa grandeur d’esprit qui m’ont entraîné dans sa campagne en 1988. C’est un peu le père politique de François Bayrou, l’un des trois (nouveaux) candidats imposés par Raymond Barre aux partis lors des élections législatives de mars 1986 (avec Christine Boutin, passée à l’UMP, et Bruno Durieux, devenu ministre de Michel Rocard). » (8 mars 2007).

Puis, je suis revenu sur les propos polémiques : « Hélas, les propos entendus à propos de Maurice Papon en disant qu’un fonctionnaire ne démissionne pas, sauf en cas de force majeure, de son poste, sont évidemment condamnables, car l’Occupation allemande, n’est-ce pas une force majeure ? François Bayrou a réagi sur RTL dans le journal de 12 heures 30 du 7 mars 2007 en exprimant son malaise et en expliquant que Raymond Barre a gardé beaucoup de rancœur contre les réactions de sa déclaration à la suite d’un attentat antisémite, et qu’il en parlait souvent lorsqu’il souffrait à la suite des traitements thérapeutiques très difficiles. Mon admiration pour l’homme ne peut compenser ma révulsion contre ces propos-là, dommage. ».

Bref, cette ultime interview sur France Culture a eu de quoi rendre Raymond Barre à la fois impopulaire et irresponsable. C’est parce que j’apprécie beaucoup Raymond Barre, sa personnalité, son action, ses analyses, que j’ai voulu commencer par cette interview polémique pour solder son passif, faire un état des lieux, un inventaire sur ce qui a légitimement scandalisé beaucoup de Français.

Je reviendrai dans un prochain article sur la trajectoire de Raymond Barre, d’abord sa carrière, ensuite, sur l’élection présidentielle de 1988, puis sa pensée sur l’Europe et sur les institutions en particulier.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (25 août 2017)
http://www.rakotoarison.eu


Note du 11 septembre 2017 :
C’est par une erreur regrettable que nous avons publié que M. Bruno Gollnisch, député européen, avait été condamné pour négationnisme. M. Gollnisch a été clairement innocenté le 23 juin 2009 par un arrêt de la Cour de cassation (n° 08-82521), rendu au fond, dont il résulte qu’il avait été poursuivi sur la base de bribes de réponse à des questions non précisées, artificiellement présentées comme une déclaration, et que, même ainsi articulés, ses propos n’enfreignaient pas la loi.


Pour aller plus loin :
Raymond Barre, un véritable homme d’État (25 août 2017).
Disparition de Raymond Barre (25 août 2007).
Raymond Barre absent de l’élection présidentielle (12 avril 2007).
La dernière interview de Raymond Barre le 1er mars 2007 sur France Culture (texte intégral).
Triste vieillesse (8 mars 2007).

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190412-raymond-barre.html

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/04/12/37253470.html


 

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31 mars 2019 7 31 /03 /mars /2019 21:35

« Réinscrire la France dans son temps et au cœur de l’Europe sont deux grandes missions auxquelles je dédierai toutes mes compétences et mon énergie. » (Amélie de Montchalin, juin 2017).


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Après la démission, le 27 mars 2019, de trois membres du gouvernement, Nathalie Loiseau (Affaires européennes), parce qu’elle est la tête de la liste Renaissance aux élections européennes de mai 2019, Mounir Mahjoubi (Numérique) et Benjamin Griveaux (porte-parole du gouvernement) pour préparer les élections municipales de mars 2020 à Paris, le Président Emmanuel Macron les a remplacés rapidement, ce dimanche 31 mars 2019, juste après la cérémonie au Plateau des Glières (à laquelle il avait invité Nicolas Sarkozy), au cours d’un remaniement ministériel "technique" du 2e gouvernement d’Édouard Philippe.

Et la nomination la plus importante, c’est évidemment celle de la députée de la 6e circonscription de l’Essonne (Massy-Palaiseau) Amélie de Montchalin comme Secrétaire d’État auprès de Jean-Yves Le Drian, chargée des Affaires européennes. Je me réjouis de son entrée au gouvernement qui était d’ailleurs attendue depuis plus d’un an et demi par de nombreux observateurs.

Malgré ses seulement 33 ans (elle a été élue députée à la veille de son 32e anniversaire), Amélie de Montchalin a largement montré son énergie, ses compétences, son talent, en près de deux ans d’exercice du mandat parlementaire. C’est même assez simple : alors que cette Assemblée Nationale a été "envahie" par une foule de députés nouveaux, parfois novices de la politique, elle est nettement sortie "du lot" grâce à son activité très intense dans l’hémicycle et en commission (elle a été classée 7e députée la plus active, sur 577, par un magazine d’information, et elle fut désignée comme la députée de l’année par le Trombinoscope en février 2018).

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Née le 19 juin 1985 à Lyon, ayant passé son enfance en France, au Brésil (elle était vice-présidente du groupe parlementaire France-Brésil) et en République tchèque (en fonction du travail de son père, cadre supérieur dans de grandes entreprises), Amélie de Montchalin a suivi une très solide formation initiale, mais pas "traditionnelle" pour la politique : lycée Hoche et prépa à Ginette, puis HEC Paris, tout en suivant des études d’histoire (à la Sorbonne) et d’économie appliquée (à Dauphine), elle a obtenu également un MBA à Harvard après avoir travaillé au Chili puis à la Commission Européenne.

Elle a travaillé principalement pour un grand assureur (AXA) comme économiste : « Mon métier m’a permis de suivre depuis 2009 les politiques publiques liées à la transition climatique, la révolution numérique et la réforme du système financier. Sur ces sujets, mon rôle a été de créer des ponts entre le monde de l’entreprise et les décideurs publics afin de définir des stratégies d’entreprise en phase avec les attentes sociales et faire émerger des politiques publiques innovantes et efficaces. » (présentation sur son blog).

Amélie de Montchalin vient du monde réel, celui des entreprises, celui de l’économie, et a pour ambition d’apporter ses compétences dans le monde politique. En résumé, elle est l’une des actrices très écoutée et consultée de la Macronie, séduite par le côté start up de la démarche d’Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle.

À l’origine, elle a conseillé Valérie Pécresse qu’elle a rencontrée avant l’élection présidentielle de 2007 et qu’elle a suivie au Ministère de la Recherche. Elle a ensuite soutenu la candidature à la primaire LR de novembre 2016 de l’ancien Premier Ministre Alain Juppé, dont elle a participé à l’élaboration du programme économique (sur la réforme budgétaire notamment). L’échec d’Alain Juppé l’a conduite à soutenir Emmanuel Macron en janvier 2017 pour son engagement européen, et la victoire présidentielle lui a permis de remporter l’ancienne circonscription de François Lamy (proche de Martine Aubry) au second tour du 18 juin 2017 avec 61,3% (face à une candidate UDI-LR), après avoir éliminé au premier tour le candidat socialiste, Jérôme Guedj, ancien président du conseil général de l’Essonne et ancien député en tant que suppléant de François Lamy lorsqu’il était ministre.

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Amélie de Montchalin est l’une des parlementaires qui travaillent le plus. Numéro deux de la commission des finances, elle connaît sur le bout des doigts les enjeux financiers et budgétaires de la nation, ainsi que les conséquences sur l’économie. Elle était chargée de rappeler les députés de la majorité absents de l’hémicycle au moment des votes. Après l’élection au perchoir, le 12 septembre 2018, de Richard Ferrand (qu’elle a soutenu le 10 septembre 2018 aux journées parlementaires de LREM à Tours), elle a tenté sa chance pour diriger le groupe LREM à l’Assemblée Nationale, mais s’est retrouvée seulement en troisième position (sur sept candidats), si bien qu’au second tour, elle a soutenu Gilles Le Gendre qui fut élu. Elle était depuis le 9 octobre 2018 la première vice-présidente du groupe LREM. Par ailleurs, elle était coprésidente de la mission d’évaluation et de contrôle (issue de la commission des finances) et membre du groupe d’études Startup, PME et ETI.

Dans les débats budgétaires (ce sont les moments les plus concrets et les plus importants dans une démocratie), Amélie de Montchalin a montré ses compétences. Elle a d’ailleurs été rapporteure d’une partie des projets de loi de finance, tant pour 2018 que pour 2019, ainsi que rapporteure d’une mission d’évaluation et de contrôle sur l’évaluation du financement public de la recherche dans les universités.

Ce thème du financement de la recherche lui est cher puisqu’elle a été l’auteure d’une proposition de résolution pour le renforcement des outils et des moyens de pilotage de la recherche publique, déposée le 8 juin 2018, qui fut adoptée le 20 juin 2018 par 49 voix contre 3 (sur 57 votants). Elle rappelait que « la France occupe la cinquième place mondiale pour la dépense de recherche publique en 2015 », soit 0,86% du PIB, en dessous de l’objectif de 1% du PIB et en dessous de l’effort consacré par l’Allemagne (0,91% du PIB).

Elle se réjouissait de l’augmentation des crédits pour la recherche dans la loi de finance 2018 : « Cette prise de conscience que la recherche et l’innovation sont les clefs pour développer le savoir humain et pour renforcer l’attractivité de la France sur la scène internationale est de bon augure et doit être amplifiée. ». Mais elle pointait un handicap : « Les retombées économiques de l’effort de recherche ne sont pas à la hauteur des performances scientifiques de la France. ». Pour y remédier, évoquant par exemple l’arrivée de nouveaux concurrents privés dans des domaines pourtant réservés jusqu’à maintenant aux États (comme SpaceX dans le domaine des lanceurs spatiaux), elle proposait de renforcer le pilotage des projets de recherche (notamment par le développement d’une stratégie à moyen terme).

Intervenant à la séance du 24 janvier 2018 à l’Assemblée Nationale, Amélie de Montchalin a aussi insisté sur l’importance des financements privés de la recherche : « Nous le disons clairement, nous l’assumons : la fiscalité de notre capital était l’une des plus élevées d’Europe ; elle constituait un vrai repoussoir pour les épargnants français et les investisseurs étrangers ; elle organisait la fuite des projets de nos entrepreneurs, développés sur nos territoires, et vidait la France de ses emplois. (…) Le monde de la finance n’est ni sans nom ni sans visage ; il n’est pas notre ennemi. Ceux qui financent notre économie, ceux qui investissent en France doivent avoir avec nous des relations exigeantes, fermes, matures mais constructives. ».

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Amélie de Montchalin s’est donc beaucoup occupée de sujets nationaux (surtout économiques et financiers), mais également, locaux. Elle a par exemple posé une question au gouvernement le 16 janvier 2018 pour s’assurer que la ligne 18 du métro allant d’Orly à Versailles via Évry, Massy, Saclay et Saint-Quentin-en-Yvelines, serait effectivement achevée en 2024 comme c’était prévu lors de la visite d’Emmanuel Macron sur le Plateau de Saclay le 25 octobre 2017, tout en proposant ce que demandent les élus locaux depuis longtemps : « Le Plateau de Saclay a en effet, au-delà de son activité de recherche de pointe, une vocation agricole et environnementale importante. Dans ce cadre, l’enfouissement du tronçon ouest pourrait être réétudié sérieusement afin d’assurer son acceptabilité et sa pérennité. Des options concrètes de financement ont été proposées. » (la question n’a pas eu de réponse car elle a été retirée par son auteure le 23 janvier 2018).

La voici désormais membre du gouvernement, avec un poste stratégique et très délicat dans ce climat eurosceptique généralisé, les Affaires européennes. Amélie de Montchalin connaît bien la complexité des institutions européennes ainsi que les nécessités économiques qui prévalent dans un monde ouvert et libre, où la France, mieux que d’autres, a la capacité de résister aux flux de la mondialisation grâce à ses nombreux atouts (en particulier scientifiques et technologiques). Gageons que cette révélation de la Macronie n’en restera pas là et qu’à moyen terme, malgré son jeune âge, elle saura servir le pays dans des responsabilités nationales bien plus élevées…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (31 mars 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Remaniement ministériel du 31 mars 2019 du 2e gouvernement d’Édouard Philippe.
Amélie de Montchalin.
Emmanuel Macron à la conquête des peuples européens.
Les risques d’un référendum couplé aux européennes.
Enfin le retour aux listes nationales aux élections européennes (2 décembre 2017).

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190331-amelie-de-montchalin.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/amelie-de-montchalin-enfin-nommee-213960

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/03/31/37222734.html

 

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11 mars 2019 1 11 /03 /mars /2019 03:21

« À partir d’aujourd’hui, il n’y a plus que des radicaux sociaux, libéraux, humanistes, laïcs et européens. (…) C’est avec cet état d’esprit que nous allons bâtir une force politique de premier plan, car il est grand temps que les radicaux soient de retour. C’est mon ambition, c’est notre ambition ! Aujourd’hui, nous affirmons notre indépendance et notre liberté dans le chahut de la recomposition politique. » (Laurent Hénart, le 9 mars 2019 à Paris).


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Le premier congrès du Mouvement radical a eu lieu ce samedi 9 mars 2019 à Paris. Le Mouvement radical existe depuis sa fondation le 9 décembre 2017. Il est la continuation de l’historique Parti républicain, radical et radical-socialiste créé le 21 juin 1901 et qui a dominé la vie parlementaire française pendant la période entre les deux guerres. Ce congrès a mis fin à la période transitoire démarrée il y a quinze mois pour achever le processus de réunification des radicaux après leur séparation pendant près d’un demi-siècle, en 1972, entre radicaux valoisiens (majoritaires) et radicaux de gauche (minoritaires) qui avaient accepté des alliances avec les communistes au nom de l’union de la gauche.

Coprésident sortant (avec Sylvia Pinel qui a démissionné avec fracas le 6 février 2019), le maire de Nancy Laurent Hénart a été réélu président du Mouvement radical entre le 6 et le 8 mars 2019 avec 88,6% (il était le seul candidat ; il y a eu 11,4% de votes blancs) pour un mandat de trois ans, c’est-à-dire jusqu’à la veille de la prochaine élection présidentielle en 2022 : « Je suis immensément heureux et honoré d’être votre président. Je vous remercie pour votre confiance. Mes amis, je suis prêt à ferrailler dans toutes les assemblées, sur tous les plateaux, pour défendre nos valeurs,nos propositions, et poursuivre ce chemin que nous accomplissons ensemble ! ».

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Ce congrès marque donc la consécration d’une ambition, la "renaissance" (puisque ce mot est à la mode) du courant radical au sein de la République à un moment où ses valeurs sont toujours autant d’actualité : laïcité, liberté économique, justice sociale, construction européenne et décentralisation, auxquels est rajoutée la préoccupation écologique, six enjeux cruciaux pour les années à venir en France, en Europe et dans le monde.

La réussite de cette réunification, malgré quelques défections en cours de route, a pour raison le moment idéal pour se concrétiser : le PS est en état de décomposition avancée et Les Républicains sont en plein effondrement idéologique sinon électoral. Or, pendant près de cinquante ans, les radicaux ont été des alliés peu influents de ces deux partis de gouvernement dont l’arrogance, encore actuelle, les ramenait au rang de simples supplétifs (« cette dureté de nos partenaires, ce manque de respect de ce que nous sommes »).

L’éclatement du paysage politique a été l’occasion de cette prise d’indépendance des radicaux avec l’espoir de redevenir une force centrale majeure de la vie politique : « Cette réunification (…), nous y sommes arrivés à la force du courage. Il fallait du courage face à nos anciens partenaires, qui ont cherché à nous dissuader. (…) Oui, il faut courage et endurance pour s’affranchir des anciennes alliances, ne plus être des supplétifs, être des acteurs pleins et entiers de la construction d’une nouvelle offre politique. ».

Ce terrain est cependant aussi occupé par d’autres formations politiques, en particulier par l’UDI qui représente le centre droit, mais aussi par Agir, issu de LR et macroniste (sur sa droite) et par le MoDem (sur sa gauche). Évidemment, la formation qui aujourd’hui occupe la place centrale de la vie politique, tant dans la vie nationale que sur l’échiquier politique, c’est évidemment LREM avec sa majorité absolue à l’Assemblée Nationale.

Il serait très audacieux de vouloir placer LREM, le MoDem et le Mouvement radical sur une échelle gauche/droite car les trois sont à peu près au même niveau, soit "ni de gauche, ni de droite", soit "et de gauche, et de droite". Et pourtant, si le MoDem et LREM sont dans la majorité, le Mouvement radical, jusqu’à preuve du contraire, est (encore) dans l’opposition (même si Annick Girardin est ministre et radicale). Et une partie d’anciens ténors LR (qui sont maintenant à LREM ou Agir) sont aussi au gouvernement.

En fait, ce serait audacieux (et sans intérêt) car c’est surtout mission impossible : le clivage gauche/droite n’existe concrètement plus, ne signifie plus rien pour la très grande majorité des électeurs, et selon certains politologues biberonnés aux sondages, il ne serait plus imaginable que ce clivage revienne lors du second tour des prochaines élections présidentielles. C’est cet état de fait que les radicaux souhaitent prendre en compte pour s’adapter aux nouveaux enjeux.

Et le principal enjeu d’aujourd’hui, surtout à deux mois et demi des prochaines élections européennes, cruciales dans l’histoire de l’Europe en plein euroscepticisme renforcé par les populismes, c’est la construction européenne. Pour les radicaux, il est donc impensable de diviser le camp des partisans de la construction européenne qui aurait pour seule conséquence le renforcement électoral des eurosceptiques, et en premier lieu, celui du RN. En ce sens, c’est une critique à peine voilée de la stratégie de l’UDI, quasi-suicidaire, qui souhaite présenter sa liste aux européennes de manière autonome et qui ne parvient pas à sortir de son étiage autour de 2-3% d’intentions de vote dans les sondages.

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Au-delà de l’irréversibilité la réunification de la famille radicale, la décision importante du Mouvement radical prise au cours de ce congrès, ce fut le souhait de former une liste de rassemblement de tous les partisans de la construction européenne, et donc, de rejoindre la majorité présidentielle à condition que celle-ci ne soit pas arrogante et s’ouvre à d’autres formations politiques que celles qui la composent, à savoir LREM et le MoDem.

Dans son discours (dont on peut lire l’intégralité ici), Laurent Hénart a rappelé ainsi les principaux piliers des valeurs radicales (qui sont évidemment communes, parfois, à d’autres formations politiques). L’une des principales est la laïcité : « Pour nous, la loi de 1905 n’est pas négociable ! Depuis vingt ans, l’intégrisme islamiste s’est attaqué à ce pacte, faisant ressurgir la grande question laïque dans la France contemporaine. Je le redis ici : on ne peut pas mélanger le hijab et le serre-tête ! ».

Il a également évoqué les deux grands sujets d’actualité : le grand débat national consécutif à la crise des gilets jaunes et la campagne des élections européennes.

Pour Laurent Hénart, les radicaux souhaitent renforcer la démocratie : « Ce grand débat, en effet, doit permettre une transition vers un renouveau démocratique. Nos institutions doivent renouer avec une véritable expression populaire, notamment par un recours plus fréquent au référendum, auquel je suis favorable. La démocratie directe n’est pas l’ennemie des représentants du peuple. Notre démocratie a besoin régulièrement d’être regénérée et de s’adapter à son époque. Bien préparé par les débats, le référendum peut être un élément de regénération. ».

Sur l’Europe, Laurent Hénart a été alarmiste : « L’Europe est confrontée à un défi inédit depuis la chute du mur de Berlin. L’aventure européenne peut s’arrêter demain, parce que les populistes ont déclaré la guerre à l’Europe. (…) Quarante ans après la première session du Parlement Européen élu au suffrage universel, sous la Présidence de Simone Veil, il est évident que les élections de mai seront les plus dramatiques de notre histoire contemporaine. Oui, l’Europe peut mourir au printemps prochain et oui, la France peut tristement contribuer à cette rupture. ».

D’où la stratégie proposée : « C’est pour cela (…) que je défends la participation de tous les pro-européens à une liste de rassemblement qui dépasse nos divergences nationales. (…) Nous devons donc nous allier, pour cette élection, aux partis et aux sensibilités pro-européennes : à des sociaux-démocrates, à des écologistes indépendants, à la droite modérée et aussi bien sûr au MoDem et à LREM. ».

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En ce sens, la publication, le 5 mars 2019, de la lettre aux citoyens européens du Président Emmanuel Macron, juste avant ce congrès radical, est arrivée au bon moment pour prendre position sur la stratégie européenne à tenir : « Surtout, c’est le projet qui doit faire la liste et la tribune publiée par le Président de la République mardi peut en être le socle. (…) Nous ne pouvons que partager le diagnostic et les propositions qui sont dans ce texte du chef de l’État ! ».

Répondant aux critiques sur l’indépendance, le président du Mouvement radical a expliqué : « Pour moi, cette échéance européenne est une première étape où nous montrons que l’indépendance, c’est aussi la cohérence avec les convictions. Où nous montrons que l’indépendance ne peut pas, ne doit pas être une incantation qui conduit finalement à l’abstention. Où notre indépendance se concrétise en expression, en prise de position, en participation à chaque consultation démocratique. ».

Parmi les motions qui ont été adoptées par le congrès, l’une d’elle est assez claire dans le choix de la stratégie adoptée pour les européennes : « Devons-nous participer au combat européen à travers une entente regroupant des forces politiques avec lesquelles nous avons de profondes différences ? À cela, il nous faut répondre par l’affirmative : il en est désormais de notre responsabilité vis-à-vis de nos convictions fédéralistes. La bataille pour les européennes de 2019 doit se mener en fonction des enjeux européens et non pas nationaux. Cette évidence qui n’est restée jusqu’à présent qu’un vœu pieu doit désormais devenir une réalité. ».

Dans sa déclaration d’orientation politique, le Mouvement radical a précisé : « Cette liste ne devra pas être seulement celle de la majorité parlementaire et gouvernementale, mais bien celle du rassemblement de tous les partisans d’une Europe forte et intégrée. ».

Interviewé par "Le Figaro" du 7 mars 2019, Laurent Hénart avait confié l’une des motivations européennes de la future stratégie des radicaux : « Je refuse que l’élection du 26 mai soit dévoyée en élection nationale, pour refaire le match de 2017, ce que veulent Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. ».

Il avait aussi donné une indication sur le futur paysage politique européen : « La recomposition politique va se poursuivre au niveau européen, car les groupes PPE ) droite et PSE à gauche sont confrontés respectivement à des divergences internes et à un déclin politique. Le Mouvement radical siège au groupe central de l’Alliance des libéraux et des démocrates européens (ALDE). Comme le MoDem et l’UDI d’ailleurs. Ce groupe devra sans doute s’élargir en rassemblant tous les fédéralistes européens. ».

Laissant de côté la défection de Sylvia Pinel et de plusieurs autres cadres du PRG opposés à une alliance avec LREM aux européennes, Laurent Hénart a conclu son interview en réaffirmant que, face à la perte de confiance populaire pour le PS et LR, et aux difficultés de l’exécutif qui profitent aux populistes de FI et du RN, il fallait une nouvelle offre : « Nous mouvement est une vigie de la République et une offre politique nouvelle, indépendante, qui défend la justice sociale, la transition écologique, la laïcité et les pouvoirs locaux. ».

C’est pourquoi cette refondation du plus vieux parti de France est une renaissance moderne des valeurs qui sont à l’origine de la tradition républicaine de la nation française depuis près d’un siècle et demi. Il ne reste qu’à convaincre les électeurs que cette offre est bien nouvelle et pleine d’avenir et qu’elle correspond aux aspirations profondes d’une grande partie d’électeurs déçus qui avaient préféré Emmanuel Macron à Marine Le Pen le 7 mai 2017.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (10 mars 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Les Radicaux en marche vers l’Europe.
Discours de Laurent Hénart le 9 mars 2019 à Paris (texte intégral).
Laurent Hénart en 2019.
Le Manifeste européen du Mouvement radical adopté le 6 février 2019 (à télécharger).
L’unité des radicaux.
La famille centriste.
La défense de la laïcité.
Laurent Hénart en 2014.
Jean-Louis Borloo.
Programme de Sylvia Pinel.
Jean-Michel Baylet.
Jean-Jacques Servan-Schreiber.
Françoise Giroud.
Robert Fabre.
Jean Moulin.
Maurice Faure.
Edgar Faure.
Édouard Herriot.
Pierre Mendès France.
Georges Clemenceau.
Jean Zay.
Jules Jeanneney.
René Cassin.
Joseph Caillaux.
Jean-François Hory.
Évelyne Baylet.
Yves Jégo.
Rama Yade.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190309-mouvement-radical.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-radicaux-en-marche-vers-l-213357

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/03/10/37165693.html






 

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9 mars 2019 6 09 /03 /mars /2019 15:33

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Pour en savoir plus :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190306-mouvement-radical.html
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190309-mouvement-radical.html


Discours de Laurent Hénart, président du MRSL, au premier congrès du Mouvement radical le 9 mars 2019 à Paris



Mes chers amis.

Je suis très ému, profondément ému de vous retrouver et de m’adresser à vous tous, aujourd'hui à Paris.

Ce samedi 9 mars 2019, nous écrivons une nouvelle page de la grande histoire radicale, celle de l’aboutissement de notre processus de réunification.

Vous comprendrez que mes premiers mots sont en forme de demande pour l’équipe nationale, l’Atelier, les commissions et groupes de travail, les parlementaires, les élus locaux, les responsables de fédérations.  Toutes celles et ceux qui ont œuvré, qui ont mis de l’huile de coude pour défendre nos idées, dépasser les divergences qui ont pu apparaître, pour avancer, garder le cap, et finalement redonner au « Parti Républicain Radical et Radical Socialiste » son existence pleine et entière, uni, relancé, avec de nouveaux visages, une nouvelle dynamique, avec bientôt de nouvelles propositions, et dans une place de Valois remise à neuf ! Bravo ! Le chantier était immense, il est loin d’être achevé mais grâce à votre travail les bases sont là ! Je demande qu’on applaudisse tous ces artisans de la réunification !

Je suis immensément heureux et honoré d’être votre président. Je vous remercie pour votre confiance. Mes amis, je suis prêt à ferrailler dans toutes les assemblées, sur tous les plateaux, pour défendre nos valeurs, nos propositions, et poursuivre ce chemin que nous accomplissons ensemble!

Cette réunification vient bien entendu de notre choix, en 2017, de dire, dans ce monde ouvert, marqué par la fin des grandes guerres idéologiques, que plus rien ne pouvait réellement séparer les Radicaux.

Mais elle nous vient aussi de plus loin.

Elle vient de 2011, quand radicaux de droite et de gauche, les uns quittant l’UMP pour fonder l’UDI, les autres faisant acte de candidature à la primaire de la gauche, ont renoué avec le chemin d’indépendance politique.

Elle vient des combats de nos présidentes et présidents, de Didier Bariani, d’André Rossinot et d’Emile Zuccarelli, ici présents. Ils ont connu cette dureté de nos partenaires, ce manque de respect de ce que nous sommes, cette indépendance qu’il a fallu défendre pied à pied. Vos présidences ont rendu cette réunification possible et je vous rends, nous vous rendons hommage.

Elle vient de la rupture de 1972, une parenthèse d’un demi-siècle durant laquelle les Radicaux ont cultivé, de part et d’autre du Mur, les valeurs communes des origines, laissant vivre la possibilité de retrouvailles futures.

Elle remonte la grande lignée des Radicaux depuis les origines de la fin du 19ème siècle jusqu’aux bouleversements du monde contemporain, convoquant dans nos esprits les grands noms de notre famille politique, ce désir farouche de progrès et de République, l’héritage de Gambetta, de Clemenceau et de Caillaux, celui de Mendes, de Servan-Schreiber, de Michel Crépeau, de Jean-Louis Borloo.

Cette réunification, chers amis, nous y sommes arrivés à la force du courage.

Il fallait du courage face à nos anciens partenaires, qui ont cherché à nous dissuader.

Je le dis avec respect, sans rancœur aucune : malgré l’élection présidentielle de 2017, malgré le désir de renouvellement traversant l’opinion publique, les anciens grands partis, LR et PS, conservent une volonté hégémonique.

On a cherché à nous dissuader et j’ai une pensée aujourd’hui pour ceux qui n’ont pas pu faire l’aventure avec nous, tant furent fortes les pressions locales.

Oui, il faut courage et endurance pour s’affranchir des anciennes alliances, ne plus être des supplétifs, être des acteurs pleins et entiers de la construction d’une nouvelle offre politique.

Cette réunification, mes amis, enfin et surtout, est irréversible.

C’est un acquis.

Il n’y aura pas de retour en arrière, parce que plus rien ne nous sépare. Nous l’avons dit à maintes reprises au fil de nos congrès et de nos universités d’été : le clivage droite / gauche est dépassé.

Les deux grands partis qui l’incarnaient, le PS et LR, ont perdu la confiance majoritaire des Français et les difficultés de l’exécutif profitent aux populistes de gauche eT de droite, à LFI et au RN. Nous sommes libérés des accords politiques systématiques qui ont si longtemps limité notre existence politique, électorale et même idéologique.

Désormais, et j’y veillerai personnellement, les instances nationales seront équilibrées entre les deux familles fondatrices de notre mouvement. Et je forme un vœu, que je partage avec vous du fond du cœur : celui que ce congrès soit la dernière occasion pour nous de soupeser « valoisiens » et « Radicaux de Gauche ».

A partir d’aujourd'hui, il n’y a plus que des radicaux, sociaux, libéraux, humanistes, laïcs et européens !

C’est avec cet état d’esprit que nous devons travailler dans les prochaines semaines, à l’élaboration de notre projet, qui incarnera notre rassemblement et renforcera notre expression médiatique.

C’est avec cet état d’esprit que nous accueillerons de nouveaux adhérents. C’est avec cet état d’esprit que nous devons continuer de développer notre communication, nos fédérations, nos outils de participation et de débat.

C’est avec cet état d’esprit que nous devons préparer les prochaines élections locales, et en premier lieu des municipales, car l’implantation locale est notre force. Nous devons nous appuyer sur nos territoires, leur faire confiance et les aider dans leur développement.

C’est avec cet état d’esprit que nous allons bâtir une force politique de premier plan, car il est grand temps que les radicaux soient de retour. C’est mon ambition, c’est notre ambition !

Aujourd’hui, nous affirmons notre indépendance et notre liberté dans le chahut de la recomposition politique.

Aujourd’hui, nous affirmons notre renaissance autour de quatre piliers qui fondent notre identité contemporaine.

D’abord, et sans doute au-dessous de tout, la justice sociale.

Cette volonté́ de générosité, car il ne peut y avoir de politique heureuse sans justice ni partage.

Ce postulat, c’est la raison d’être du premier Parti Radical, son humanisme fondateur, et la série d’actes politiques majeurs qu’il a nourrie, depuis les premières lois sociales de la fin du 19ème siècle jusqu’à aujourd’hui.

C’est cette même volonté ardente de justice sociale qui a fait qu’à l’eté 2017, à l’acmé de la popularité de l’exécutif, nous tirions la sonnette d’alarme sociale, avant les autres. Aujourd’hui, cela parait évident car tout le monde hurle avec les loups. Mais rares étaient les voix qui s’élevaient alors. Soyons en fiers, mes amis.

A la justice sociale, nous ajoutons la défense des territoires et des pouvoirs locaux.

Nous l’avons dit à maintes reprises : la France n’est pas assez décentralisée. On ne fait pas assez confiance aux territoires. Dans ce pays où l’on n’impose rien à personne, les réformes doivent se faire ensemble. Il faut lutter sans cesse contre le réflexe jacobin qui si souvent conduit la France à l’échec.

Nous, radicaux, affirmons que les maires restent les hussards de la République, que les collectivités sont les premiers investisseurs publics, qu’elles sont capables comme nulle autre institution de bâtir des actions concertées avec les Français, qu’elles sont le régénérateur de la confiance citoyenne, qu’avec tout le respect que l’on doit à l’Etat et au Parlement, ce sont les territoires qui font la France au quotidien !

A la justice sociale et à la défense des pouvoirs locaux, nous ajoutons la transition écologique.

Le Grenelle conduit par Jean-Louis Borloo en 2008 a ouvert la voie à une approche plus globale, plus ambitieuse, plus collective, plus progressive de la réponse à l’impératif environnemental. Cette transition est l’un des grands défis de l’Europe et la France doit être exemplaire en la matière. Nous devons être en pointe, à la pole position de cette transition et le départ de Nicolas Hulot doit être dépassé, il ne doit pas signifier l’abandon d’une politique écologique ambitieuse.

Enfin, bien sûr, nous sommes les défenseurs les plus ardents de la laïcité, dont on parle moins en ce moment, mais qui est évidemment un sujet fondamental.

Le cadre créé en 1905 est une innovation civique aux conséquences positives inestimables pour notre nation.

Les Radicaux ont toujours défendu et défendront toujours le caractère intangible de cette loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, à laquelle la concorde nationale doit tant.

C’est l’affirmation des libertés de conscience et d’expression. La coexistence pacifique des spiritualités. Le refus de toutes les discriminations. La reconnaissance absolue de la dignité de la personne humaine et notamment celles des femmes. Pour nous, la loi de 1905 n’est pas négociable !

Depuis vingt ans, l’intégrisme islamiste s’est attaqué à ce pacte, faisant ressurgir la grande question laïque dans la France contemporaine. Je le redis ici : on ne peut pas mélanger le hijab et le serre tête ! Il faut porter le débat et le combat au bon niveau, celui de la loi de 1901. Pour refaire de la France un sanctuaire de laïcité, il faut s’attaquer au dévoiement de la liberté associative et la rétablir au service de l’idéal républicain. C’est ce combat que nous menons avec le Mouvement Radical, pour renouer, sans heurts ni divisions, avec la cohabitation pacifique des religions.

Voilà, mes amis, ce qui nous anime.
Voilà le ciment de notre réunification.
Nous sommes les Radicaux, sentinelles de la République.
Notre offre est claire et de plus en plus et visible.
Nous n’avons tout à gagner !
Nous sommes ouverts à celles et ceux qui partagent nos valeurs.
Nous serons toujours accueillants pour les Radicaux qui font actuellement d’autres choix. Parlons fort, notre message est bon, l’avenir est à nous !

L’avenir, mes chers amis, est là, devant nous, immédiat. Deux grands sujets méritent notre engagement le plus volontaire, dès à présent.

D’abord, et nous en avons parlé aujourd’hui : défendre nos propositions et avancer nos positions dans le cadre du Grand Débat National.

Ce débat inédit et protéiforme a été déclenché par un intense sentiment d’injustice sociale.

Il était donc absolument indispensable que nous nous y engagions, et c’est la décision qui a été prise par le Comité national le 6 février dernier.

A l’issue de nos débats, nous avons arrêté cinq priorités, qui font écho à nos quatre piliers que je viens d’évoquer, auxquels s’ajoute une demande de réforme des institutions.

Ce Grand Débat, en effet, doit permettre une transition vers un renouveau démocratique. Nos institutions doivent renouer avec une véritable expression populaire, notamment par un recours plus fréquent au referendum, auquel je suis favorable.

La démocratie directe n’est pas l’ennemi des représentants du peuple. Notre démocratie a besoin régulièrement d’être régénérée et de s’adapter à son époque. Bien préparé par les débats, le referendum peut être un élément de régénération.

L’autre grand sujet qui nous mobilise est évidemment la campagne européenne et je souhaite ici remercier du fond du cœur Pierre Moscovici pour sa présence, son engagement, témoignages de son ouverture d’esprit, de son courage, de cette capacité à se mettre en mouvement, à trouver de nouveaux partenaires partageant les mêmes combats.
Quoi de plus stimulant et passionnant pour les Radicaux qu’une échéance européenne !
 
Mes chers amis, que voulons-nous pour l’Europe ? Avec qui veut-on la défendre et la réformer ?

Notre congrès doit trancher cette question. Je sais qu’elle fait vraiment débat.

Ce que nous voulons, c’est un vrai projet européen, pour faire barrage aux populistes et permettre le retour de la confiance citoyenne. C’est cela, l’urgence et la ligne de cette campagne historique.

Je l’ai dit dès la rentrée de septembre : l’Europe est confrontée à un défi inédit depuis la chute du Mur de Berlin. L’aventure européenne peut s’arrêter demain, parce les populistes ont déclaré la guerre à l’Europe.

Ils sont là, en Pologne, en République Tchèque, en Autriche, en Hongrie. Ils ont nourris le drame du Brexit, j’étais à Londres en début de semaine et je peux vous dire le désarroi de nombreux élus.

Ils sont à l’origine de la dérive de l’Italie, notre pays frère, cette nation fondatrice de l’Union, pourtant meurtrie par le fascisme il y a à peine trois générations.

Quarante ans après la première session du Parlement européen élu au suffrage universel, sous la présidence de Simone Veil, il est évident que les élections de Mai seront les plus dramatiques de notre histoire contemporaine. Oui, l’Europe peut mourir au printemps prochain et oui, la France peut tristement contribuer à cette rupture. N’oublions jamais que plus de la moitié des suffrages exprimés au 1er tour de l’élection présidentielle en 2017 agrégeait des aspirations extrémistes et populistes, de droite et de gauche.

Je refuse ces hypothèses et je me bats pour que nos idées triomphent. C’est pour cela que je refuse que l’élection du 26 mai soit dévoyée en élection nationale, pour refaire le match de 2017, ce que veulent Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon.

C’est pour cela, surtout, que je défends la participation de tous les pro- européens à une liste de rassemblement qui dépasse nos divergences nationales. Comment justifier que ceux qui croient en l’avenir de l’Union et défendent le même projet se divisent en plusieurs listes ? Ce scénario nous conduirait à avoir moins d’élus au Parlement européen.

Chers amis, nous devons faire travailler ensemble celles et ceux pour qui l’idéal européen est au dessus de tout. Nous pouvons être, pour la cause européenne, des partenaires prêts à dépasser les contingences partisanes pour écrire un vrai projet parlant aux Français.

Nous devons donc nous allier, pour cette élection, aux partis et aux sensibilités pro-européennes : à des Sociaux Démocrates, à des écologistes indépendants, à la droite modérée et aussi bien sûr au MODEM et à LREM. Je l’ai dit dans Le Figaro hier, en étant clair avec eux et nos autres partenaires, et je vous le redis aujourd’hui.

Bien entendu, il y a des conditions de succès. D’abord, cette liste ne doit pas être celle de la seule majorité parlementaire et gouvernementale, mais bien celle du rassemblement de fervents européens. J’attends donc d’En Marche ! de l’écoute et de l’ouverture. Surtout, c’est le projet qui doit faire la liste et la tribune publiée par le Président de la République mardi peut en être le socle. Remettre à plat l’espace Schengen avec une même politique d’asile, créer une police des frontières commune, se doter d’un traité de défense et de sécurité, instaurer un bouclier social et un salaire minimum européen, réguler les géants du numérique... : chers amis, nous ne pouvons que partager le diagnostic et les propositions qui sont dans ce texte du Chef de l’Etat !

Si les Radicaux sont des européens fervents, aucun autre choix n’était possible. Voilà pourquoi aujourd'hui notre congrès choisit le rassemblement des européens et il donne mandat à la direction nationale pour que ce rassemblement porte aussi les idées des radicaux et qu’ils y soient respectés.

De tout cela, je rendrai compte à notre prochain Comité national, à la fin du mois.

Nous serons audibles, nous serons respectés, nous intéresserons nos concitoyens parce que nous ferons prévaloir l’avenir de la Nation par la sauvegarde de l’Europe sur l’intérêt partisan le temps d’une campagne.

D’aucuns diront que c’est une décision oublieuse de notre indépendance politique... Ceux-là même qui seraient tentés par une liste d’union de la gauche ou par une liste de coalition de centre droit !

En âme et conscience, je me suis beaucoup posé la question. Pour moi, cette échéance européenne est une première étape où nous montrons que l’indépendance, c’est aussi la cohérence avec les convictions.
Où nous montrons que l’indépendance ne peut pas, ne doit pas être une incantation qui conduit finalement à l’abstention. Où notre indépendance se concrétise en expression, en prise de position, en participation à chaque consultation démocratique.

Nous sommes, par notre travail, par notre courage, par notre combativité, les premiers gardiens de notre indépendance.

Il nous faut la cultiver sur le terrain, par notre travail militant, par la diversité de notre recrutement, pour que le visage de notre mouvement soit le visage de la France.

C’est ce travail que nous devons mener pour renouer avec l’histoire.

Goethe: « Vive quiconque vaillamment s’affirme ».

Laurent Hénart, le 9 mars 2019 à Paris

Source : Mouvement Radical

http://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20190309-discours-laurent-henart.html

 

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6 mars 2019 3 06 /03 /mars /2019 03:51

« Notre postulat humaniste est sans égal. La politique ne se mesure pas de manière arithmétique, ce n’est pas de la tuyauterie (…). Si nous avons, nous, la certitude d’être la formation humaniste de ce pays, celle dont il a besoin parce qu’on ne peut pas avancer dans l’Histoire sans justice, alors demain est à nous, il faut le croire, il faut le dire, il faut le partager. (…) Cette ambition, notre ambition humaniste, s’est traduite en actes politiques fondateurs qui sont dans nos livres, que nos enfants et petits-enfants apprennent, qui forment un héritage inestimable pour chaque Français. » (Laurent Hénart, le 9 décembre 2017 à Paris).


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Le Mouvement radical social-libéral tient son premier congrès ce samedi 9 mars 2019 aux Salons de l’Aveyron à Paris (17 rue de l’Aubrac, dans le 12e arrondissement). Auparavant, entre le 6 et le 8 mars 2019, ses adhérents auront élu son président après une période de transition de quinze mois. Qu’est-ce que ce parti politique dont il est difficile de dire qu’il est nouveau malgré cette appellation "modernisée" ? C’est la réunion (historique) de la famille radicale réalisée lors du congrès de réunification du 9 décembre 2017 au Palais des Congrès de Paris.

Depuis quelques années, il y a certes une ambiguïté sur le mot "radicaux" dont on dit généralement qu’ils sont comme les radis, roses à l’extérieur et blancs à l’intérieur. Les radicaux viennent de la gauche, et même de l’extrême gauche, mais ils ne sont pas ce qu’on appelle aujourd’hui la "gauche radicale" qui désignerait plutôt Jean-Luc Mélenchon et ses proches. Les radicaux sont l’une des plus anciennes familles politiques de la République depuis qu’elle est pérenne, c’est-à-dire depuis près de cent cinquante ans.

Depuis cent cinquante ans également, il y a un glissement politique dans le paysage politique, un glissement vers la droite. Cela ne signifie pas que la gauche ancienne est devenue la droite actuelle, mais plutôt que la droite actuelle était la gauche ancienne. Cela peut paraître équivalent, mais pas tout à fait. Ceux qui, aujourd’hui, se situent à l’aile ultragauche, diront donc que le PS est un parti de droite, tandis que ceux qui, aujourd’hui, se retrouvent à l’aile ultradroite, diront au contraire que LR est un parti de gauche. Tout est une question de point de vue, mais il est clair que le paysage politique s’est gauchisé en ce sens que la majeure partie des partis politiques d’aujourd’hui, en dehors de l’extrême droite, étaient originellement des partis de gauche. De toute façon, c’était assez simple, être républicain était une marque de gauche.

Ainsi, lorsque la République fut proclamée le 4 septembre 1870, Adolphe Thiers était une figure marquante du …centre gauche parce que républicain, conservateur, certes, mais républicain, et partisan d’une paix négociée avec Bismarck pour refaire démarrer la France. Au contraire, Léon Gambetta, lui aussi républicain, était pour la résistance à outrance contre les Allemands (les élections du 8 février 1871 l’ont désavoué). Gambetta se trouvait donc à l’extrême gauche de Thiers dans son républicanisme. Mais très vite, ces républicains (aussi Jules Grévy et Jules Ferry) ont été attaqués sur leur gauche par des "radicaux", menés par Georges Clemenceau. Lui-même, au début du XXe siècle, a dû combattre, lorsqu’il était au pouvoir, des parlementaires encore plus à gauche que lui, les socialistes menés par Jean Jaurès, qui, eux-mêmes, furent débordés par les communistes qui, après les années 1930, et surtout, à la Libération, formaient une force politique puissante (un quart de l’électorat). Enfin, depuis quelques années, les communistes sont débordés eux-mêmes sur leur gauche par… les Insoumis de Jean-Luc Mélenchon (pourtant ancien apparatchik du parti socialiste). J’évoque évidemment des partis majeurs, puisqu’il y a eu d’autres partis d’extrême gauche mais électoralement peu représentatifs.

En gros, dans le mouvement historique, on peut déterminer deux phénomènes. Le premier sur les personnes : une personne au pouvoir se droitise (devient raisonnable) par rapport à sa période de jeunesse ou d’opposition. C’était notamment le cas de Clemenceau, Alexandre Millerand, Léon Blum, François Mitterrand (qui s’est gauchisé avant de se redroitiser), Michel Rocard, Lionel Jospin, François Hollande, Manuel Valls, Emmanuel Macron. Les impératifs économiques et financiers et la raison d’État concernant la sûreté et la sécurité sont les raisons de cette transformation. Le second sur les formations politiques : dès qu’un progrès a été acquis, et accepté, il fait partie du "pot commun" de la grande partie de l’échiquier politique et arrivent de nouveaux partis qui proposent d’autres "progrès" (ou pas). C’était le cas pour la forme républicaine du gouvernement et du modèle social, ces deux éléments sont aujourd’hui défendus par la quasi-totalité des partis politiques actuels.

Si les radicaux étaient des républicains (mais pas exclusivement, Raymond Poincaré et André Tardieu étaient, eux aussi, républicains), ce qui les distinguait, c’était leur défense de la laïcité et c’est sur leur point de vue que le consensus s’est établi depuis plus de cent dix ans.

À cela, il faut ajouter depuis la Libération leur foi en la construction européenne, en sachant que ce furent deux ministres radicaux qui négocièrent le Traité de Rome, Maurice Bourgès-Maunoury et Maurice Faure. Avec l’attention soutenue pour l’aménagement du territoire, le réalisme économique et la solidarité nationale, on peut donc résumer la tradition radicale par ces cinq fondamentaux : la laïcité, l’Europe, la décentralisation, la liberté économique et la justice sociale.

Laurent Hénart les a exprimés dans cette profession de foi : « Nous, radicaux, sommes des fédéralistes européens. Nous pensons que l’Europe demeure la plus belle ambition qui soit, pour notre peuple et pour tous ceux du vieux continent. (…) Nous, radicaux, sommes un parti positif dans le nouveau monde, défendant la liberté et une économie modernisée, permettant le développement de l’entreprenariat au service de tous. (…) Nous, radicaux, sommes pour la transition écologique. (…) Si la misère se développe encore, elle emportera tout le monde et fera le lit des nouveaux barbares. Nous, radicaux, sommes pour la justice sociale. Nous sommes généreux, car il ne peut pas y avoir de transformation heureuse de la France sans justice ni partage. (…) Nous, radicaux, sommes pour la laïcité, tout simplement. (…) Face à la double impasse de l’angélisme et de la stigmatisation, il n’y a qu’une voie, une seule voie capable de parler à tous nos concitoyens : faire respecter la loi (…). La vie politique doit renouer avec le temps long et l’Histoire. (…) Le message du Parti radical n’a pas pris une ride, au contraire, il est d’une totale modernité. » (9 décembre 2017).

La famille radicale fut hégémonique sous la Troisième République, faisant et défaisant les majorités, soutenant parfois les républicains modérés à leur droite (qui seraient aujourd’hui situés au centre droit mais qui, à l’époque, étaient situés à gauche) et soutenant d’autres fois les socialistes à leur gauche (en particulier, lors du Front populaire). La figure du radicalisme triomphant fut Édouard Herriot, chef du Cartel des gauches en 1924. Depuis donc près d’un siècle, les radicaux se sont toujours situés au centre de l’échiquier politique, au point, justement, d’être coupés en deux en 1972 entre une majorité de radicaux qui a refusé le programme commun et l’alliance avec les communistes (JJSS) et un noyau dur qui les a acceptés au point de n’être plus qu’un groupuscule d’appoint pour le PS (Robert Fabre). Pour l’historien Frédéric Fogacci, le divorce n’était pas idéologique : « Il s’agissait davantage de stratégies locales que de désaccords idéologiques. » ("L’Express" du 9 décembre 2017).

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Aujourd’hui, après la déflagration du paysage politique en 2017, la disparition progressive du PS (et aussi du PCF), la droitisation de LR, la mosaïquisation du centre droit (UDI, Agir, FED, Alliance centriste, Les Centristes, MoDem, etc.) et l’apparition soudaine d’un parti présidentiel aujourd’hui (et probablement temporairement) hégémonique (LREM), il n’y a plus aucune raison politique ni stratégique à la désunion des radicaux en France.

C’est ce qu’a dit Laurent Hénart, coprésident du Mouvement radical, le 9 décembre 2017 : « Aujourd’hui, nous sommes libres. Nos valeurs et notre analyse du monde sont les mêmes. Nos anciennes alliances sont obsolètes. Pour le Parti radical de gauche, l’allié PS est en déliquescence. Pour le Parti radical valoisien, Les Républicains sont sans boussole et le socle idéologique qui leur est promis avec l’élection probable de Laurent Wauquiez est trop étroit pour fédérer les anciennes droites. (…) Plus rien ne nous sépare. Voilà pourquoi nous sommes réunis. (…) Voilà pourquoi nous voulons être un mouvement politique indépendant, qui a vocation à se présenter à tous les scrutins sous ses couleurs. (…) Le radicalisme n’est soluble dans aucun grand ensemble. Mais ce n’est pas non plus le splendide isolement. Il est au cœur de l’espace central devenu essentiel avec l’élection d’Emmanuel Macron. ». L’adjectif "central" n’est pas nouveau, il était employé par François Bayrou en 2007.

Les deux partis étaient donc prêts à se rassembler, après l’élection d’Emmanuel Macron, et après de nombreuses déclarations d’intention (anciennes), notamment d’André Rossinot, président d’honneur du Parti radical valoisien, et de Jean-Michel Baylet, président d’honneur du PRG (Parti radical de gauche). Le Parti radical valoisien, présidé depuis le 6 avril 2014 (élu le 22 juin 2014 avec 61,3% des voix et réélu le 22 novembre 2017 avec 79% des voix) par Laurent Hénart (maire de Nancy et ancien ministre), a été créé le 21 juin 1901 et est le plus vieux parti de France. Le PRG, présidé depuis le 17 février 2016 par Sylvia Pinel (députée depuis l’âge de 29 ans, première vice-présidente du conseil régional d’Occitanie et ancienne ministre), a été créé le 4 octobre 1972 (avec une autre appellation).

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Concrètement, la réunification s’est réalisée en deux temps. La première étape fut une université d’été commune les 15 et 16 septembre 2017 à Montpellier : première rencontre nationale des personnes et travail de réflexion en commun. La seconde étape fut le congrès de la réunification le 9 décembre 2017 au Palais des Congrès de Paris où les deux partis se sont unis dans le (nouveau) Mouvement radical. Lors de ce congrès, le PRG a adopté cette réunification par 85% des voix et le Parti radical valoisien également a largement adopté cette réunification au cours de son 117e congrès.

Cependant, quelques jours avant ce congrès, l’UDI (Union des démocrates et indépendants), dont est membre fondateur le Parti radical valoisien, s’est inquiétée des conséquences politiques de cette réunification. Le conseil national de l’UDI a ainsi décidé le 2 décembre 2017 d’exclure le Parti radical valoisien, considérant que l’UDI ne devait pas intégrer en son sein des personnalités qui, pour certains du PRG, ont été élues avec des voix des communistes ou des insoumis et dans des majorités territoriales les intégrant.

Pour cette raison d’exclusion et d’obligation de choisir entre radicaux et UDI, certains élus ont préféré rester à l’UDI, ce fut le cas notamment de Michel Zumkeller, Yves Jégo, Sophie Joissains, etc. qui ont créé Génération 1901 (1901, date de fondation du Parti radical) pour rester au sein de l’UDI. Parallèlement, certains élus radicaux de gauche ont refusé cette fusion, ce fut le cas notamment de Virginie Rozière et Stéphane Saint-André qui ont créé le 14 décembre 2017 un nouveau parti appelé Les Radicaux de gauche.

En principe, une période de transition devait avoir lieu pendant deux ans, de réorganisation locale et nationale, au bout de laquelle les deux partis fusionneraient officiellement. Finalement, le comité exécutif du PRG a décidé le 6 février 2019 de quitter le Mouvement radical. Guillaume Lacroix, qui fut co-secrétaire général du Mouvement radical, démissionna et fut désigné président du PRG le 8 février 2019, succédant à Sylvia Pinel qui a également quitté le Mouvement radical.

La raison officielle fut la crainte que lors du congrès du 9 mars 2019, le Mouvement radical décide de rejoindre la liste de la majorité présidentielle aux élections européennes, ce qui serait pourtant idéologiquement cohérent avec la lettre aux citoyens européens que vient de publier Emmanuel Macron ce lundi 4 mars 2019.

Une autre raison est aussi à indiquer : malgré la grande présence électorale du PRG dans le Sud-Ouest, la réorganisation des fédérations départementales de l’ensemble fusionné s’est réalisée plutôt à l’avantage des radicaux valoisiens plus nombreux sur le plan national.

La désertion de Sylvia Pinel (qui a quitté sa fonction de coprésidente du Mouvement radical) a fait que Laurent Hénart est assuré d’être réélu président (et seul président) du Mouvement radical dans la mesure où le professeur Didier Maus, constitutionnaliste et président de la commission permanente de contrôle du Mouvement radical, n’a enregistré le 22 février 2019 qu’une seule candidature remplissant els conditions de parrainages.

Tous les radicaux de gauche ne sont pourtant pas partis du Mouvement radical puisque Harold Huwart, vice-président du conseil régional du Centre-Val-de-Loire, issu du PRG, a été désigné co-secrétaire général du Mouvement radical et a considéré, le 22 février 2019, que la réunification a bien eu lieu en rappelant l’échec magistral de 2017 pour le PRG : « De renoncement en renoncement, le PRG a été amené  soutenir Manuel Valls, puis Benoît Hamon, avant de s’enferrer définitivement dans un accord législatif avec le PS qui ne pouvait que s’avérer désastreux parce que, compte tenu des positions idéologiques et politiques affichées par un appareil socialiste moribond, cette alliance était devenue profondément contraire à notre identité et à nos valeurs. Preuve ultime de cet échec : à une exception près, la totalité des candidats aux législatives issus des radicaux de gauche, à commencer par notre présidente [Sylvia Pinel], ont été élus sur une ligne de majorité présidentielle autre que celle officiellement portée par le PRG. C’est pour tourner cette page d’impuissance politique que la réunification a été proposée par nos dirigeants et finalement votée par les militants. ».

Ce congrès du 9 mars 2019 aura donc deux enjeux politiques majeurs : montrer que le Mouvement radical est effectivement le parti de la réunification malgré le départ de certains radicaux (de gauche mais aussi valoisiens), et prendre plus d’importance médiatique dans le paysage politique, car depuis quinze mois, les radicaux réunifiés ne se sont pas donné beaucoup d’échos médiatiques.

Je termine sur deux positions du Mouvement radical qui sont d’une grande actualité.

Une motion adoptée au comité national le 6 février 2019 a décrit les différentes lignes directrices sur lesquelles le Mouvement radical voudrait s’exprimer à l’occasion du grand débat national : « Nous, radicaux, participerons au grand débat. (…) Nous y porterons nos valeurs et nos propositions : le choix d’une décentralisation beaucoup plus franche que celle que notre pays a connue jusqu’ici, la généralisation de la négociation et du contrat dans les relations entre l’État, les territoires et les acteurs sociaux, la nécessité d’une transition écologique assumée et accompagnée par une politique de soutien au pouvoir d’achat des classes moyennes et des plus modestes, la défense intransigeante des principes laïques qui fondent notre République face aux offensives extrémistes qui minent le débat public et portent atteinte à l’unité de la Nation. ».

Le même jour fut adopté le Manifeste européen du Mouvement radical qui est intitulé  "Construire la souveraineté européenne, relevons ensemble les défis de la mondialisation" (lisible ici). Dans ce texte d’une vingtaine de pages, divisé en huit parties, je propose de citer trois propositions essentielles en matière institutionnelle.

D’abord, identifier les personnes qui incarnent la gouvernance européenne : « Réforme aussi symbolique que nécessaire pour que l’UE ait une légitimité populaire, il est primordial que le Président de l’Union Européenne soit élu au suffrage universel direct. ».

Ensuite, empêcher la paralysie dans les décisions communes : « Pour garantir une prise de décision plus rapide et éviter les paralysies liées aux égoïsmes nationaux, la règle de l’unanimité doit disparaître et être remplacée par des règles de majorité plus ou moins qualifiée selon l’importance stratégique des sujets. ».

Enfin, renforcer les pouvoirs du Parlement Européen : « Ses pouvoirs doivent notamment être renforcés vis-à-vis de la Commission Européenne. Cela passe par l’élection du Président de la Commission Européenne par le Parlement Européen ainsi que par une capacité, pour lui, de contrôler les décisions de la Commission. (…) Afin de mieux pouvoir retranscrire les aspirations des citoyens européens dont les parlementaires sont les représentants, il convient de doter enfin le Parlement Européen d’un pouvoir d’initiative législative. ».

Ce sont trois mesures fortes qui ne manqueront certainement pas d’être débattues dans le cadre de la campagne des élections européennes, qui auront lieu dans moins de trois mois, le dimanche 26 mai 2019.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (04 mars 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le Manifeste européen du Mouvement radical adopté le 6 février 2019 (à télécharger).
L’unité des radicaux.
La famille centriste.
La défense de la laïcité.
Laurent Hénart.
Jean-Louis Borloo.
Programme de Sylvia Pinel.
Jean-Michel Baylet.
Jean-Jacques Servan-Schreiber.
Françoise Giroud.
Robert Fabre.
Jean Moulin.
Maurice Faure.
Edgar Faure.
Édouard Herriot.
Pierre Mendès France.
Georges Clemenceau.
Jean Zay.
Jules Jeanneney.
René Cassin.
Joseph Caillaux.
Jean-François Hory.
Évelyne Baylet.
Yves Jégo.
Rama Yade.

_yartiMRSL2019A04



http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20190306-mouvement-radical.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/l-unite-des-radicaux-213194

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2019/02/27/37136556.html


 

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