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12 mai 2025 1 12 /05 /mai /2025 18:51

« Le samedi 10 mai 2025, les dirigeants de la France, de l’Allemagne, de la Pologne, du Royaume-Uni et de l’Ukraine se sont rencontrés à Kyiv. Ils sont convenus qu'à partir du lundi 12 mai, il devrait y avoir un cessez-le-feu complet et inconditionnel pendant au moins 30 jours. Ils sont convenus qu'un cessez-le-feu inconditionnel, par définition, ne peut être soumis à aucune condition. Si la Russie demande de telles conditions, cela ne peut être considéré que comme une tentative de prolonger la guerre et de saper la diplomatie. Ils ont exigé que le cessez-le-feu soit global, dans les airs, en mer et sur terre. Ils ont souligné que ce cessez-le-feu nécessitait un monitoring efficace, qui pourrait être mis en œuvre avec succès en étroite coordination avec les États-Unis. (…) Ils sont convenus que si la Russie refusait un cessez-le-feu total et inconditionnel, des sanctions plus sévères devraient être adoptées contre les secteurs bancaire et énergétique, ciblant les combustibles fossiles, le pétrole et la flotte fantôme. Ils sont convenus d'adopter un 17e paquet de sanctions fortes de l'UE et de le coordonner avec les sanctions imposées par le Royaume-Uni et la Norvège, ainsi que par les États-Unis. » (Communiqué commun du 10 mai 2025 à Kiev).



 


On se demande pourquoi Emmanuel Macron irait chercher dans un référendum aux résultats très aléatoires (on verra son intervention télévisée de ce mardi 13 mai 2025) ce qu'il a trouvé déjà en politique étrangère, à savoir le crédit qu'on peut porter à un homme d'État exceptionnel. Car avec la guerre en Ukraine, il s'agit bien de cela. Dès 2017, le Président Emmanuel Macron avait prôné une véritable souveraineté européenne et une défense européenne, faisant le constat que l'OTAN était en mort cérébrale. Et c'est Vladimir Poutine, en tentant d'envahir l'Ukraine, qui a réveillé et l'OTAN et l'Europe ! L'objectif d'Emmanuel Macron et de tous ses homologues européens, c'est d'éviter de nouveaux Accords de Munich avec l'Ukraine. Et donc, d'éviter une nouvelle guerre générale.

L'Europe et la France peuvent être fières d'Emmanuel Macron. Heureusement qu'il est là, car il manquait un leader à l'Europe pour réaffirmer tout simplement nos valeurs, et la première de celles-ci, c'est la paix, mais la paix durable, la paix juste, pas la paix du plus fort contre le plus faible, pas la paix de Vladimir Poutine qui ne s'apaiserait qu'en écrasant l'Ukraine, qu'en écrasant la Pologne, les Pays baltes, la Moldavie, la Géorgie, qu'en faisant renaître une Grande Russie (idéalisée) comme Hitler voulait une Grande Allemagne.

Le vent tourne pour Vladimir Poutine. À force d'envoyer ses missiles tuer des civils, le Président de la Fédération de Russie a déçu, pire, a lassé Donald Trump prêt à abandonner tous ses efforts sur ce conflit. Le Président russe a raté une opportunité historique. Le résultat, c'est un revirement total (dont le Président américain est coutumier). Volodymyr Zelensky a accepté le principe d'un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours proposé par les États-Unis, les Européens aussi et ils l'ont dit avec une grande force. La diplomatie européenne revient sur le devant de la scène ukrainienne, et avec elle, la diplomatie française.

Deux images fortes pour le pont du 8 mai 2025. Parallèlement aux défilés caricaturaux à Moscou devant les hôtes de Vladimir Poutine, notamment Xi Jinping, Sissi, Maduro, etc. où les canons faisaient figures de valeurs, le Président Emmanuel Macron et le Premier Ministre polonais Donald Tusk ont signé le vendredi 9 mai 2025 dans la belle ville de Nancy, sur la Place Stanislas (à l'Hôtel de Ville), le Traité pour une coopération et une amitié renforcées entre la République de Pologne et la République française.

 


Ce n'est pas nouveau que Nancy, la capitale des ducs de Lorraine, s'est retrouvée au centre d'une diplomatie intense. Il y a vingt ans, le 19 mai 2005, la Place Stanislas a accueilli également un mini-sommet entre le Président français Jacques Chirac, le Chancelier allemand Gerhard Schröder et le Président polonais Aleksander Kwasnieski. Dans sa conférence de presse à cette occasion, Jacques Chirac a déclaré : « Je voudrais remercier la ville de Nancy, ses habitants, son maire pour l'accueil qu'ils nous ont réservé et aussi les féliciter, féliciter tous les Nancéiens très chaleureusement pour la superbe restauration de la place Stanislas réalisée à l'occasion de son 250e anniversaire. C'est une belle image donnée par Nancy au monde de la France, de son art et de son histoire. Cette rencontre à trois se tient à un moment particulièrement important puisque nous sommes tous les trois, parmi les vingt-cinq, engagés dans un processus de ratification du Traité constitutionnel. ». C'était dix jours avant le référendum sur le TCE.

Et Jacques Chirac d'expliquer : « Depuis cinquante ans, l'Europe s'est considérablement développée. Elle a d'abord apporté l'essentiel, c'est-à-dire la paix, la démocratie, la liberté, un certain modèle social et le développement économique aux six pays fondateurs. Puis, petit à petit, elle s'est élargie comme il était à la fois nécessaire et utile pour tous. Nous avons aujourd'hui un ensemble qui est déterminé à enraciner définitivement, sur l'ensemble de notre continent, la paix, la démocratie, la liberté, déterminé à conforter le modèle de développement économique et de progrès social, le modèle social européen, particulièrement incarné par la position notamment allemande et française et à renforcer le poids de l'Europe dans le monde. C'est le sens de l'ambition du traité constitutionnel qui est en voie de ratification chez les vingt-cinq Européens. ».


Mais revenons au Nancy de 2025, vingt ans plus tard. Le traité signé entre la France et la Pologne fait partie des traités bilatéraux que la France a voulu conclure avec chacun des pays européens depuis quelques années. Elle l'avait déjà fait avec l'Ukraine le 16 février 2024.
 


Les deux nations (française et polonaise) sont « convaincues que le moment est venu de porter leurs relations bilatérales à un niveau plus élevé et de se préparer conjointement à faire face aux défis auxquels les deux États et les deux peuples ainsi que l’Europe dans son ensemble sont confrontés au XXIe siècle ». Elles « œuvrent activement à une UE plus forte, sûre, souveraine, démocratique, prospère, compétitive et unie. Elles entendent protéger leurs citoyens, défendre leurs valeurs et leurs intérêts et renforcer la sécurité européenne, notamment celle de la frontière extérieure de l’UE, et la sécurité économique. ».

L'alinéa 2 de l'article 4 de ce traité proclame très clairement la mutuelle assistance en matière de défense : « Conformément aux dispositions de l’article 51 de la Charte des Nations Unies, en cas d’agression armée sur leurs territoires, les Parties s’assistent mutuellement, y compris par des moyens militaires. Cette aide et cette assistance seront mises en œuvre conformément aux engagements découlant de l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord et du paragraphe 7 de l’article 42 du Traité sur l’Union Européenne. ».

En tout, le Traité de Nancy compte 19 articles qui précisent les coopérations dans de nombreux domaines, en particulier dans l'industrie, la recherche scientifique, les transports, l'immigration, le numérique, la protection de l'environnement, l'énergie, l'agriculture, la culture, le sport, etc. Il remplace le Traité de Paris signé le 9 avril 1991.






L'autre initiative est également très importante puisque, venus par un train de nuit qui est parti la veille, le Président français Emmanuel Macron, le nouveau Chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier Ministre britannique Keir Starmer et le Premier Ministre polonais Donald Tusk ont rejoint le Président ukrainien Volodymye Zelensky à Kiev, la capitale de l'Ukraine assiégée par Vladimir Poutine. Leur présence a une signification à la fois forte et courageuse. Courageuse car c'est toujours risqué de se rendre à Kiev sous d'éventuels bombardements russes. D'où d'ailleurs le train car l'avion serait beaucoup trop dangereux.
 


À ce titre, le Président Macron a diffusé une petite vidéo dans le train qui l'a conduit à Kiev, se mettant en scène en train d'appeler Donald Trump. C'est important car il a montré qu'il était à l'initiative pour construire la paix en Ukraine. Certains lui reprocheront de trop faire dans les réseaux sociaux, mais il faut vivre avec son temps et Donald Trump a gagné sa dernière élection en s'adaptant à ces nouvelles mœurs technologiques.





Reprenons le contenu du voyage à Kiev et ses conséquences diplomatiques. Le samedi 10 mai 2025 à 14 heures 30, les "alliés" de l'Ukraine (Europe mais aussi Canada, Nouvelle-Zélande, etc.) ont mis Vladimir Poutine dos au mur : ils ont fermement demandé un cessez-le-feu de 30 jours, inconditionnel, à partir du lundi 12 mai 2025, sous forme d'un ultimatum, avec l'accord des États-Unis. C'est ce dernier point qui est nouveau. J'ai placé les extraits les plus importants du communiqué commun en tête de cet article.








Vladimir Poutine a répondu aux Européens à minuit 40, c'est-à-dire, heure de Moscou, à 2 heures 40 du matin ! Il a proposé des négociations directes à Istanbul entre la Russie et l'Ukraine, sans cessez-le-feu préalable.
 


Le dimanche 11 mai 2025 à 18 heures 15 (heure de Paris), Donald Trump a vivement encouragé l'Ukraine à accepter la rencontre proposée par Vladimir Poutine à Istanbul.

Le dimanche, à 19 heures, Volodymyr Zelensky a déclaré sur Twitter : « J'attendrai Poutine en Turquie, jeudi. Personnellement. J'espère que cette fois, les Russes ne chercheront pas d'excuses. ».





Dans le même temps, Donald Trump a semblé désabusé de la mauvaise foi de Vladimir Poutine en confiant ce même dimanche : « Je commence à douter que l'Ukraine parvienne à un accord avec Poutine, trop occupé à célébrer la victoire de la Seconde Guerre mondiale, qui n'aurait pas pu être gagnée (même de justesse !) sans les États-Unis. ORGANISEZ UNE RENCONTRE MAINTENANT ! ». Ce point historique est réel (quoi qu'en pensent les trolls poutinolâtres qui pullulent sur le Web) : si les États-Unis n'avaient pas massivement aidé l'URSS pour son armement, cette dernière n'aurait pas pu prendre en tenaille l'Allemagne nazie sur son front est.

Lundi 12 mai 2025, le Ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, qui a rencontré son homologue américain, a confirmé la nécessité d'un cessez-le-feu préalables aux négociations avec cette phrase souvent répétée dans les conflits : « On ne va pas négocier sous les bombes ! ». Il a notamment déclaré la nature de l'ultimatum que les Européens et surtout les Américains ont lancé à Vladimir Poutine.

 


En cas de refus du cessez-le-feu, les États-Unis fixeraient les droits de douane sur l'importation du pétrole russe à 500%... mais ce n'est pas cette mesure qui aurait le plus de conséquence, c'est la suivante : ils mettraient aussi les droits de douane à 500% sur tous les produits importés de pays qui achèteraient encore du pétrole russe. Là, ce serait probablement la sanction commerciale la plus efficace. En outre, les Européens aideraient les Ukrainiens à contrôler à nouveau leur espace aérien.

Le lundi 12 mai 2025 à 16 heures 30, Donald Trump, qui allait partir au Proche-Orient à partir du lendemain (le 13 mai 2025, il sera en Arabie Saoudite), a lâché : « Je pensais y aller. Il y a une possibilité. ». Aller à Istanbul jeudi 15 mai 2025 pour une rencontre entre Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine sous le patronage de Recep Tayyip Erdogan.
 


Comme on le voit, cette semaine est cruciale pour l'avenir de l'Ukraine. Vladimir Poutine a baladé Donald Trump pendant trois mois et, chose nouvelle, ce dernier commence enfin à s'en apercevoir ! Ce qui l'a rendu furieux, c'est la présence de Xi Jinping le 9 mai 2025 à Moscou. Car Donald Trump acceptait d'abandonner l'Ukraine à la Russie à la seule condition que la Russie s'éloignât de la Chine. Pourtant, Vladimir Poutine a toujours été prévisible : seul le rapport de force est efficace avec lui. La diplomatie européenne, et plus précisément la diplomatie française ont fait beaucoup avancer les choses en Ukraine. Mais, même si c'est en bonne voie, rien n'assure que cela sera efficace à court terme. Le peuple ukrainien, pendant ce temps, continue à souffrir.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (12 mai 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Ukraine : le retour de la diplomatie européenne.
Soumy : grâce musicale versus vulgarité brutale.
Moonraker.
Olena Kohut.
François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
François Bayrou : la France avait raison !
Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
3 ans de guerre en Ukraine.
Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
L'Europe face à Poutine.
Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
François Fillon et ses relations avec la Russie.
Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
La France Unie soutient l'Ukraine !
Condoléances cyniques.
Mort d'Evgueni Prigojine.

Sergueï Kirienko.
Victoria Amelina.

L'effondrement du pouvoir de Poutine.
Putsch en Russie : faut-il sauver le soldat Poutine ?
Poutine en état d'arrestation !
Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
Kherson libéré, mais menace nucléaire ?

Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
Les massacres de Boutcha.
Le naufrage du croiseur russe Moskva.
L’assassinat de Daria Douguina.
Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
L'avis de François Hollande.
Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250510-ukraine.html

https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/ukraine-le-retour-de-la-diplomatie-260907

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/05/10/article-sr-20250510-ukraine.html



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3 mai 2025 6 03 /05 /mai /2025 04:44

« Tous les signaux que nous recevons en provenance des États-Unis indiquent que l'intérêt pour l'Europe y faiblit de manière significative. » (Friedrich Merz, le 24 février 2025).



 


Je comprends que l'élection du nouveau pape et les moindres gestes de Donald Trump, qui peuvent faire basculer la planète, sont des sujets très importants de la politique internationale, mais je m'étonne que la presse française évoquent assez peu la situation politique de l'Allemagne et la future investiture du nouveau Chancelier d'Allemagne fédérale, le chrétien-démocrate Friedrich Merz (69 ans) qui prendra ses fonctions le mardi 6 mai 2025 après son élection attendue au Bundestag. Car tout ce qui concerne notre voisin et partenaire allemand nous concerne, nous la France, et concerne l'Europe.

Friedrich Merz a franchi le dernier obstacle à sa conquête du pouvoir, l'approbation par 84,6% des adhérents (avec une participation de 56%) du SPD, le parti social-démocrate (celui de son futur prédécesseur Olaf Scholz), le 30 avril 2025 en faveur du contrat de la grande coalition SPD-CDU/CSU construite à l'issue des élections fédérales du 23 février 2025. Deux jours après l'approbation des adhérents de la CDU (le 28 avril 2025 à une « majorité écrasante ») et vingt jours après celle de la CSU bavaroise (le 10 avril 2025 à l'unanimité).

La configuration parlementaire au Bundestag est telle qu'aucun gouvernement n'aurait pu être nommé sans cette alliance des deux grands partis gouvernementaux, après la bonne performance de l'extrême droite (AfD) qui a dépassé le SPD.


Les négociations ont donc duré un peu plus de deux mois (à peu près le temps qu'a mis le gouvernement de Michel Barnier pour se mettre en place en automne 2024). Le 8 mars 2025, le principe de la grande coalition avait été acquis et pendant un mois, un texte long de 146 pages, le contrat de coalition, a été négocié durement, à huis clos, par 192 émissaires des deux partis politiques pour aboutir à un véritable contrat de gouvernement le 9 avril 2025, ce qui a conduit Friedrich Merz à dire, à l'instar de Ronald Reagan en 1980 : « L'Allemagne est de retour ! ».

Et finalement, la France l'attendait depuis vingt ans. La France attendait que l'Allemagne redevienne une puissance politique qui, avec la elle, réussirait à relancer l'Union Européenne. Or, Angela Merkel, malgré ses bonnes paroles, n'a jamais voulu vraiment rendre l'Europe indépendante, autonome, au contraire de la France dont c'est l'ADN depuis la fin de la guerre (et même avant). J'attends toujours l'initiative d'une initiative européenne commune de François Hollande et Angela Merkel annoncée dans les années 2010 ! Quant à Olaf Scholz, son faible leadership et la fragilité confirmée de sa coalition tricolore n'ont jamais permis aucune avancée européenne.

La prise de contrôle du parti d'opposition, la CDU, ainsi que la victoire électorale de Friedrich Merz auraient pu inquiéter la France. Politique mais aussi homme d'affaires, Friedrich Merz a toujours été considéré comme un très grand atlantiste. Mais la réalité, c'est que les amis des États-Unis ne peuvent plus se fier à leur grand ami et doivent faire avec... ou plutôt, sans. Ce qui a fait dire par le journaliste Emmanuel Grasland le 25 février 2025 dans "Les Échos" : « Atlantiste convaincu, Friedrich Merz juge désormais nécessaire pour l'Europe de développer des capacités de défense propres. ».


Il faut dire que pendant les négociations du contrat de gouvernement, l'Allemagne, l'Europe et le monde ont été secoué par les stupides décisions de Donald Trump sur les taxes douanières, ses allers et retours, qui ont fait chuter l'économie américaine (et mondiale).

Il y a donc un énorme changement, un double changement : celui de l'option européenne et celui de leadership. Friedrich Merz entend bien rendre présente l'Allemagne sur le plan politique, et ce leadership ne peut se concevoir qu'avec un couple franco-allemand enfin efficace après le couple Jacques Chirac/Gerhard Schröder de la fin des années 1990 et début des années 2000.

Ce nouveau couple Emmanuel Macron/Friedrich Merz aura certainement quelques difficulté car les deux personnalités sont fortes et si c'est un besoin pour l'Europe, cela peut aussi être une concurrence entre les deux hommes d'État sur certains sujets. L'important, c'est que le nouveau chef du gouvernement allemand a considéré le 9 avril 2025 que « l'amitié franco-allemande reste d'une importance capitale pour toute l'Europe ». D'ailleurs, le premier voyage extérieur de Friedrich Merz fut pour rencontrer Emmanuel Macron le mercredi 26 février 2025 à l'Élysée : « Ensemble, nos pays peuvent accomplir de grandes choses pour l'Europe. Merci beaucoup, cher Emmanuel Macron pour ton amitié et la confiance que tu accordes aux relations franco-allemandes. » (sans surprise : il est de tradition que le nouvel élu de l'un des deux pays fasse son premier voyage extérieur chez l'autre).

 


L'essentiel, c'est que le principal sujet sera un sujet de concorde encore la France et l'Allemagne, la défense européenne. Emmanuel Macron prône depuis qu'il est Président de la République française la construction d'une véritable défense européenne, solide et sérieuse, qui puisse être une véritable protection autonome de l'Europe. Jusqu'à l'arrivée de Donald Trump II, beaucoup de pays européens, dont l'Allemagne, avaient approuvé poliment cette idée... mais sans rien faire de réellement concret. Désormais, Emmanuel Macron est pris au sérieux dès lors que Donald Trump a fait comprendre que la protection américaine n'était pas certaine en cas d'attaque agressive contre l'Europe. La guerre en Ukraine montre à l'évidence que le besoin d'une défense européenne autonome est d'autant plus indispensable que les États-Unis se désengagent du continent.

Ainsi, c'est une véritable révolution du paradigme allemand à laquelle on assiste : les Allemands préféraient la garantie américaine qu'ils estimaient solide et sûre (et pas chère !), à une hypothétique défense européenne qui restait encore tout à construire. Friedrich Merz, dans son programme de gouvernement, prévoit ainsi d'investir 500 milliards d'euros dans la défense, ce n'est pas rien. Dès février 2025, le futur Chancelier constatait : « Nous devons nous préparer au fait que Donald Trump ne respectera plus inconditionnellement l’engagement de défense mutuelle de l’OTAN. ».

Le professeur Sylvain Kahn, agrégé en histoire et docteur en géographie, chercheur au Centre d'histoire de Science Po, a expliqué le 2 mars 2025 sur France Culture que ce changement n'était pas facile et allait provoquer de nombreuses discussions dans la société allemande : « Traditionnellement, depuis 1949, la CDU est très atlantiste. Mais elle est également très européiste. Pendant 80 ans, c'était finalement les deux jambes d'une même politique étrangère allemande. Aujourd'hui, cette alliance atlantique est en train de voler en éclats. Il y a une période de 80 années qui se clôt. Et c'était un peu miraculeux que la plus grande puissance mondiale accepte de garantir la défense du territoire européen. Et ça ne coûtait pas grand-chose aux Européens, finalement. Mais cela s’arrête. Et donc, il faut que les Allemands choisissent entre leur atlantisme, qui de toute façon n'existe plus, ou bien leur politique pro-européenne. Mais, il faut aussi prendre en compte la société allemande. Parce qu'il ne faut pas imaginer qu'au sein de la société allemande, tout le monde va dire "Ah ben oui, c'est formidable, Friedrich Merz a raison, on le suit". Il y a 20% des électeurs qui ont voté pour l'AfD et 9% qui ont voté pour Die Linke, la gauche radicale allemande, qui est traditionnellement pacifiste et qui, je pense, ne va pas du tout être favorable à l'idée d'une Allemagne sous parapluie nucléaire britannico-français. Et il y a une réticence de la société allemande au nucléaire, qui est très très profonde et très ancrée, et pas seulement au nucléaire civil, mais au nucléaire militaire. Donc là aussi, ça va poser des énormes débats. ».

 


Par ailleurs, Friedrich Merz a assuré le peuple ukrainien que l'Allemagne poursuivra et renforcera son aide militaire à l'Ukraine contre l'agression de Vladimir Poutine, alors que son prédécesseur réagissait assez mollement dans ce dossier. Il l'a rappelé lors du congrès extraordinaire de la CDU le 28 avril 2025 à Berlin : « Le combat de l'Ukraine contre l'agression de la Russie est aussi un combat pour le maintien de la paix et la liberté dans notre pays. ».

Autre verrou levé, celui de l'endettement public. L'Europe a décidé que les dépenses de défense ne seront pas comptabilisées dans le taux d'endettement public (Pacte de stabilité). Ce verrou était aussi constitutionnel en Allemagne et il a été déjà levé dès le 25 mars 2025, avant même le changement de gouvernement.


Car l'autre priorité de Friedrich Merz (il en a trois), c'est le redressement économique de l'Allemagne. Le Ministre de l'Économie et du Climat sortant, l'écologiste Robert Habeck, a revu le 24 avril 2025 les perspectives économiques à la baisse : 0% de croissance pour 2025, et cela après deux années de récession (-0,3% en 2023 et -0,2% en 2024). Une telle dégringolade de l'économie allemande est inédite depuis 1949. Selon une étude de l'agence Creditreform publiée le 24 avril 2025, 20% des PME seraient engagées dans la réduction de leurs effectifs, ce qui n'est jamais arrivé depuis quinze ans.

Pour la redresser, le nouveau Chancelier entend encourager massivement les investissements pour faire redémarrer le secteur industriel. Cette revue à la baisse provient directement des décisions douanières de Donald Trump et de l'effondrement de l'économie américaine.

Ainsi, l'impôt sur les sociétés sera réduit par un amortissement annuel de 30% sur les investissements en équipement au cours des trois prochaines années, 2025, 2026 et 2027. Par ailleurs, 1 000 milliards d'euros d'argent public seront injectés par l'Allemagne, 500 milliards pour les infrastructures à moderniser et 500 milliards pour l'effort de défense (ce "paquet" de 1 000 milliards d'euros a déjà été adopté le 18 mars 2025 par le Bundestag). Ces investissements massifs devraient accélérer le redressement du PIB allemand (+1% est prévu pour 2026).

Enfin, la troisième priorité de Friedrich Merz, qui est important dans le climat politique allemand actuel, où l'AfD capitalise beaucoup sur les peurs, c'est la lutte contre l'immigration illégale. Le SPD a accepté un renforcement de la sévérité avec le refoulement des demandeurs d'asile à la frontière, en concertation avec les voisins européens de l'Allemagne. "Der Spiegel" s'attendait d'ailleurs, le 9 avril 2025, à plus de fermeté : « On s'attendait à ce que la politique migratoire soit plus sévère, mais elle ne le sera pas autant que la CDU/CSU l'a annoncé durant la campagne électorale. ». Quant à l'intégration des étrangers sur le marché du travail, il est prévu la création d'une agence Travail et Séjour pour simplifier les procédures administratives des employeurs et des employés.

Le 28 avril 2025, Friedrich Merz a dévoilé les noms des ministres CDU/CSU. Il n'a pas participé à l'enterrement du pape pour finaliser la composition de son gouvernement. Les deux poids lourds Jens Spahn et Carsten Linnemann n'en feront pas partie. Parmi les ministres chrétiens-démocrates (CDU/CSU), il y aura Katherina Reiche à l'Économie et à l'Énergie, Alexander Dobrindt (CSU) à l'Intérieur, Johann Wadephul (62 ans), un proche de Friedrich Merz, aux Affaires étrangères, Alois Rainer (CSU) à l'Alimentation, Agriculture et Patrie, Karin Prien à l'Éducation, Famille, Personnes âgées, Femmes et Jeunesse, Nina Warken à la Santé, Patrick Schnieder aux Transports, Dorotee Bär (CSU) à la Recherche, Technologie et Espace et Thorsten Frei directeur de la Chancellerie fédérale. Au final, beaucoup de femmes alors que le futur Chancelier avait exclu la parité à l'origine (probablement que Casten Linnemann, proche de Friedrich Merz et promis à l'Économie, a fait les frais d'une pression médiatique pour plus de représentativité, tant féminine que géographique).

Toutefois, Friedrich Merz a préféré l'efficacité à la représentativité politique en nommant aux Affaires étrangères un proche et pas ses anciens rivaux Armin Laschet ou Norbert Röttgen (ancien président de la commission des affaires étrangères au Bundestag). C'est la première fois depuis 1966 qu'une personnalité issue du CDU occupe de nouveau ce poste important pour la diplomatie européenne. Alexander Dobrindt, seul ancien ministre fédéral, a été, selon Elsa Conesa, la correspondante du journal "Le Monde" à Berlin le 29 avril 2025, un « facilitateur » dans les négociations avec le SPD et les Verts pour réviser la Loi fondamentale (sur le seuil de l'endettement public possible). Friedrich Merz a concédé à Jens Spahn (44 ans), ancien ministre de la santé d'Angela Merkel, la stratégique présidence du groupe CDU au Bundestag alors qu'il avait provoqué une vive polémique en proposant des relations rapprochées avec l'AfD.

Quant aux ministres SPD, ils ne sont pas encore connus et devraient être annoncés par le SPD très prochainement. Son coprésident Lars Kingbeil sera Vice-Chancelier et Ministre des Finances et il devra notamment nommer six de ses membres à la Justice, au Travail, à la Défense, à l'Environnement, à la Coopération et au Logement. Boris Pistorius, ardent soutien à l'Ukraine, devrait rester à la Défense.


Ce qui est clair, c'est que l'exercice du pouvoir ne sera pas de tout repos pour Friedrich Merz : alors que son parti CDU/CSU avait devancé de 8 points l'extrême droite, deux mois plus tard, l'AfD se retrouve avec 26% d'intentions de vote et la CDU/CSU seulement 25%. Donc pas d'état de grâce pour le nouveau gouvernement allemand. Il devra donc aller vite dans ses réformes pour redresser l'économie allemande et convaincre son peuple qu'il va dans la bonne voie. C'est le gouvernement de la dernière chance.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 mai 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
L'avenir de l'Europe s'ouvre avec Friedrich Merz.
Maréchal Paul von Hindenburg.
Allemagne 2025 : Feu vert pour la grande coalition CDU-SPD.
Allemagne 2025 : victoire de Friedrich Merz (CDU).
Marché de Noël de Magdebourg : le retour du risque terroriste.
L'éclatement de la coalition Rouge Jaune Vert en Allemagne.
Friedrich Merz, futur Chancelier.
Olaf Scholz.
Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
Élections européennes 2024 (7) : Ursula von der Leyen et ses trois priorités, la défense, le logement et la compétitivité.
Élections européennes 2024 (6) : le casting pour la dixième législature du Parlement Européen.
Élections européennes 2024 (5) : la victoire de... Ursula von der Leyen !
Der Spiegel : "La France, c'est l'Allemagne en mieux".
Konrad Adenauer.
Daniel Cohn-Bendit.
Volkswagen.
Hans Modrow.
Dmitri Vrubel.

Le mur de Berlin.
La chute du mur de Berlin.
La Réunification allemande.
Berlin 1989 : le 9/11 avant le 11/9.
Maus.
Le massacre d'Oradour-sur-Glane.
Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
Le testament de Benoît XVI.
Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
L’Église de Benoît XVI.
L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !
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Olaf Scholz, l’étincelle du feu tricolore.
Législatives allemandes 2021 (2) : Olaf Scholz bientôt Chancelier.
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Législatives allemandes 2021 (1) : INCERTITUDE !
L’Allemagne en pleine fièvre extrémiste ?


 





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26 avril 2025 6 26 /04 /avril /2025 04:14

« Il ne faut pas imaginer qu'un parti me donnera d'une quelconque manière des instructions, même pas ceux qui m'ont aidé dans la compétition électorale. Cependant, je tends la main à l'ancien adversaire qui veut se mettre avec moi au travail. » (Paul von Hindenburg, le 10 mai 1925).





 


Il y a 100 ans, le 26 avril 1925, le vieux maréchal Paul von Hindenburg a été élu Président du Reich au second tour par 14,7 millions de citoyens allemands. Il avait alors déjà 77 ans (né le 2 octobre 1847), et toute une réputation prestigieuse de militaire héroïque, ayant servi pour l'Empire allemand de 1866 à 1919. À ce titre, il est l'une des personnalités marquantes de l'histoire (assez courte, depuis 1871) de l'Allemagne.

Contrairement à la tentation qu'on pourrait avoir, le maréchal von Hindenburg n'était pas à l'Allemagne ce qu'a été le maréchal Pétain à la France. Certes, les deux étaient plutôt conservateurs (quoique Pétain fut beaucoup plus "libéral" dans les mœurs sociales qu'on pourrait l'imaginer), et les deux ont eu des "relations" avec Hitler, mais cela s'arrête là. L'appel d'un homme providentiel, souvent vieux en raison du temps qu'il faut pour être présenté comme providentiel, est une constante dans les sociétés humaines. En France, on en a usé et abusé depuis plus de cent cinquante ans : Thiers en 1871, Clemenceau en 1917, Pétain en 1940 et De Gaulle en 1958. Personnalités très différentes mais qui ont eu cette particularité d'un retour au pouvoir, ou d'une prise de pouvoir (pour la première fois) aidée par une réputation historique exceptionnelle.

Si toutefois on voulait vraiment faire une analogie avec une personnalité politique française, il faudrait plutôt chercher du côté d'un autre maréchal, Patrice de Mac Mahon, militaire de bonne réputation sous l'Empire malgré la défaite de Sedan en 1870 (battu par les forces prussiennes), qui, bien que monarchiste, fut appelé par la République, alors dominée à la Chambre par des députés monarchistes, pour devenir Président de la République du 24 mai 1873 au 30 janvier 1879, en attendant la fin annoncée des légitimistes et la victoire improbable des orléanistes.


Hindenburg (je parle ainsi de la personne et pas du dirigeable baptisé de son nom) a été un militaire de toutes les grandes batailles prussiennes et allemandes : guerre austro-prussienne, guerre franco-prussienne qui a abouti à l'Unification de l'Allemagne (sous l'égide de la Prusse, associée à de nombreuses principautés allemandes), et aussi la Première Guerre mondiale, où il fut, de novembre 1916 au 25 juin 1919, le chef du grand état-major allemand de l'Empire allemand, secondé par le général Erich Ludendorff. Comme Pétain, il était à la retraite avant le début de la Première Guerre mondiale mais remobilisé pour l'occasion.

Le 18 novembre 1919, devant la commission d'enquête parlementaire visant à comprendre la défaite allemande, Hindenburg et Ludendorff, salués avec beaucoup d'honneurs par les parlementaires, ont répandu la (fausse) rumeur du "coup de poignard dans le dos", à savoir qu'à l'arrière garde, des forces anti-allemandes s'étaient activées contre l'armée allemande en Allemagne, mêlant socialistes, communistes et Juifs comme boucs émissaires. Cette thèse fut reprise plus tard par les nazis pour justifier et renforcer le sentiment de vengeance. C'était d'autant plus commode que cela dédouanait l'armée allemande de sa responsabilité dans la défaite.


L'Allemagne à la fin de la Première Guerre mondiale était dans un piteux état : dans le camp des vaincus, l'empereur Guillaume II s'est exilé, laissant l'empire sans empereur, des mouvements révolutionnaires étaient très actifs aussi en Allemagne (Rosa Luxembourg, etc.), et finalement, le régime a accouché d'une frêle République de Weimar, dominée par les sociaux-démocrates et le Zentrum (centre droit catholique), qui était une sorte d'empire sans empereur, à tel point que le gouvernement était celui du Reich, le Chancelier celui du Reich et le chef de l'État appelé Président du Reich. Ce nouveau régime était pourtant loin d'être fort, englué dans une instabilité politique typique des régimes parlementaires comme la Quatrième République en France. Mais à la différence de cette dernière, le Président avait un certain nombre de pouvoirs pour faire contre-poids, en particulier le droit de dissolution.

Le premier Président du Reich a été élu par les parlementaires le 11 février 1919 pour un mandat de sept ans, Friedrich Ebert, Chancelier social-démocrate depuis le 9 novembre 1918, mais ce dernier est mort le 28 février 1925 à 54 ans des suites d'une appendicite soignée trop tardivement. Le mode d'élection du Président était différent pour la suite puisqu'il devait être élu au suffrage universel direct pour faire participer l'ensemble du peuple allemand, seul moyen de retrouver une légitimité impériale.


Le premier tour de l'élection présidentielle a eu lieu le 29 mars 1925. Parmi les sept candidats, deux personnalités se détachaient, susceptibles d'être élues (à l'époque, il n'y avait pas de sondages) : Otto Braun, du SPD (social-démocrate) et Wilhelm Marx, du DZP, le Zentrum (centriste catholique ; rappelons que l'Allemagne est majoritairement protestante). Tous les deux étaient les représentants du nouveau régime politique, parlementaire, assez impuissant, Wilhelm Marx était alors un ancien Chancelier du Reich du 30 novembre 1923 au 15 janvier 1925.

Face à ces deux représentants du régime, le bloc national avait bien du mal à proposer une candidature de rassemblement. Personnalité très populaire à droite, l'ancien Vice-Chancelier et Ministre de l'Intérieur Karl Jarres, du DVP (parti populaire allemand, national-libéral), avait pris le leadership de la campagne électorale. D'autres petits candidats étaient présents, dont le communiste Ernst Thälmann, et aussi l'ancien général en chef limogé par l'empereur le 26 octobre 1918, Erich Ludendorff, ce qui avait mis en colère Hindenburg qui lui avait demandé dans un courrier de se retirer pour ne pas diviser le camp de la droite : « Retirez votre candidature immédiatement. Au lieu de vous unir (…), vous vous dispersez avec les cercles nationaux en cette heure décisive. Dans ce camp, votre élection est désespérée. Vous vous compromettez ainsi… de votre faute, la patrie est en danger. Acceptez donc cette demande qui pourrait être la dernière de ma vie. ». Il avait raison.

Les résultats du premier tour furent assez attendus, avec une participation de 68,9% : Karl Jarres a obtenu la première place avec 38,8% des suffrages exprimés, suivi d'Otto Braun 29,0% et Wilhelm Marx 14,5%... et Erich Ludendorff est arrivé septième avec seulement 1,1%, une gifle électorale (un militaire n'est pas forcément un bon politique). La nécessité d'un second tour rendait très incertaine son issue.
 


D'un côté, le SPD et le Zentrum se sont mis d'accord avec une seule candidature, celle de Wilhelm Marx, qui devenait donc le favori de l'élection, avec, en contrepartie, Otto Braun (que le Zentrum ne voulait pas soutenir) était destiné à devenir le ministre-président de la Prusse. De l'autre côté, le score de Karl Jarres avait peu de chance de s'améliorer, faute de voix de réserve, et fut remplacé, à la demande d'un certain nombre de dirigeants du DVP, en particulier Gustav Stresemann, ancien Chancelier, mais aussi du camp nationaliste (en particulier le NSDAP, le parti nazi), par le maréchal von Hindenburg (retiré à Hanovre) qui, malgré des réticences initiales, a bien accepté d'être présent au second tour (il n'était pas nécessaire d'être candidat au premier tour, et au second tour, l'élection était acquise à la majorité relative, ce qui nécessitait des alliances entre les forces politiques).

Finalement, Hindenburg a gagné, mais avec un score serré, avec 900 000 voix d'avance sur son concurrent Wilhelm Marx qui a eu deux handicaps, un religieux (il était catholique et la majorité était protestante) et un politique en raison du maintien du candidat communiste qui lui a privé de 1,9 million de suffrages. Hindenburg a donc été élu Président du Reich avec 48,3% des voix pour une participation encore plus élevée de 77,6%. L'historien britannique Ian Kershaw commentait ainsi ce résultat en 2001 : « La démocratie de Weimar était désormais entre les mains de l'un des piliers de l'ordre ancien. La droite nationale et conservatrice n'était pas la seule à avoir voté pour lui. (…) En 1933, le prix à payer sera lourd. ». Pour les conservateurs, l'élection d'un maréchal voulant un pouvoir fort permettait de contrebalancer le régime d'assemblée instable et de retrouver avec lui l'aura perdue de l'empereur.
 


Wikipédia a fait un résumé de la description de l'historien français Johann Chapoutot, spécialiste du nazisme, publiée dans un livre en 2025 chez Gallimard : « [Il] décrit Hindenburg, lors de son élection à la Présidence en 1925, comme une figure profondément conservatrice, attachée aux vertus prussiennes telles que l'honneur, le devoir et le sacrifice. Il souligne son hostilité aux sociaux-démocrates, aux communistes et aux syndicats, ainsi que sa méfiance envers les catholiques du Zentrum, à l'exception de ceux qu'il jugeait suffisamment conservateurs ou ayant un passé militaire. Chapoutot note également l’aversion de Hindenburg pour les évolutions sociales de la République de Weimar et son indifférence aux questions sociales, ou un possible État-providence allemand. ».

En fait de pouvoir fort, le premier mandat de Hindenburg était caractérisé par la poursuite de l'instabilité gouvernementale, avec cinq gouvernements centristes ou de gauche. Hindenburg a dissous quatre fois l'assemblée. La crise de 1929 a fait monter le nazisme électoralement : le NSDAP est passé de 2,6% en 1928 à 18,3% en 1931. Les nazis n'avaient donc plus besoin de l'aide de Hindenburg pour conquérir le pouvoir, d'autant plus qu'ils avaient une très mauvaise opinion du vieux maréchal. Ainsi, le 19 octobre 1929, Joseph Goebbels le qualifiait dans son Journal de « vieille ruine », ce qui fait penser à ce que disaient les trumpistes de Joe Biden, et en octobre 1931, Hitler le qualifiait de « vieux fou ». C'était d'ailleurs réciproque, car Hindenburg prenait les nazis pour ce qu'ils étaient d'abord, à savoir de dangereux socialistes (nationaux-socialistes) et considérait Hitler comme un « caporal bohémien » qui n'avait pas l'étoffe pour diriger le gouvernement. Le 10 août 1932, Hindenburg se refusait à toute nomination de nazis au gouvernement : « Faire d'un caporal bohémien le Chancelier du Reich, ce serait du propre ! ».

À l'élection présidentielle de 1932, la situation économique et sociale de l'Allemagne était catastrophique : chômage de masse, inflation en flèche, pouvoir d'achat en berne, hausse des impôts... Le gouvernement centriste de Heinrich Brüning était très impopulaire. Son parti, le DZP, ainsi que l'ensemble du bloc populaire (coalition de Weimar : Zentrum, SPD, etc.) ont voulu que Hindenburg se représentât pour sa succession malgré ses 84 ans ! L'un des dirigeants du DZP, Franz von Papen (qui allait devenir le successeur de Heinrich Brüning le 1er juin 1932) a même souhaité réviser la Constitution pour rendre l'élection présidentielle aux parlementaires sans passer par le peuple, mais, en raison du refus des députés nazis, il ne pouvait pas convaincre une majorité qualifiée.


Autrement dit, les rivaux de 1925 (gauche et centre droit catholique), qui craignaient une dérive autoritaire du maréchal, sont devenus les principaux soutiens de Hindenburg en 1932, toujours candidat indépendant, face à un autre candidat, celui des nazis, Adolf Hitler, qui avait hésité à s'opposer frontalement au prestigieux maréchal. Ian Kershaw analysait effectivement cette drôle de situation (cité par Wikipédia) : « [Hindenburg] était tributaire du soutien des socialistes et des catholiques, qui avaient été ses principaux opposants au cours des sept années passées et formaient de bien étranges et fâcheux compagnons de route pour le doyen loyalement protestant et ultra-conservateur. ».

Au premier tour du 13 mars 1932, avec 86,2% de très forte participation, Hindenburg a raté sa réélection dès le premier tour en recueillant plus de 18,6 millions de suffrages, soit 49,5%, face à Hitler 30,1%. Au second tour du 10 avril 1932, avec une participation de 83,5%, Hindenburg a été réélu avec 53,1% des voix, ayant pris une large avance de 7,3 millions de voix sur Hitler, grâce aux milieux économiques qui étaient plutôt rassurés par Franz von Papen (futur Chancelier du 1er juin 1932 au 17 novembre 1932).

Franz von Papen était préféré par Hindenburg à Kurt von Scleicher (futur Chancelier du 4 décembre 1932 au 28 janvier 1933). André François-Poncet, l'ambassadeur de France à Berlin et père du ministre Jean François-Poncet, expliquait ainsi : « C'est [Papen] le préféré, le favori du maréchal ; il détourne le vieil homme par sa vivacité, son espièglerie ; il le flatte en lui montrant du respect et de la dévotion. Il le séduit par son audace ; il est [aux] yeux [de Hindenburg] l'homme parfait. ».

Toutefois, Hitler a finalement gagné la partie : le 30 janvier 1933, Hindenburg l'a nommé Chancelier du Reich (et Papen Vice-Chancelier) et dès les premiers mois, le chef des nazis a consolidé, par la force et la propagande, son pouvoir, devenant même le Führer, c'est-à-dire le Guide en allemand. Hindenburg est mort le 2 août 1934 d'un cancer du poumon à l'âge de 86 ans et demi. Par le plébiscite du 19 août 1934, Hitler a plus ou moins supprimé la fonction en devenant à la fois Chancelier, Président du Reich et Führer, bref, le maître absolu d'une Allemagne puissante.

Plus précisément, Hindenburg est mort le lendemain de la promulgation, le 1er août 1934, de la loi qui précisait deux articles. Article 1er : « La fonction de Président du Reich est réunie à celle du chancelier du Reich. Par conséquent, les pouvoirs exercés jusqu'ici par le Président du Reich passent au Führer et Chancelier du Reich Adolf Hitler. Il désigne son suppléant. ». Article 2 : « Cette loi entrera en vigueur à partir du décès du Président du Reich von Hindenburg. ». C'était très cavalier de la part de Hitler qui considérait que Hindenburg n'allait pas finir son second mandat (en raison de sa grave maladie) et cela montrait aussi que le maréchal n'avait plus aucune influence sur le cours des événements (retiré en Prusse-Orientale depuis avril 1934).


Pour légitimer cette loi, Hitler l'a fait plébisciter : avec une participation officielle de 95,7%, le oui l'a largement emporté avec, officiellement, 89,9% des votants. Rappelons que les Allemands vivaient alors sous la terreur des nazis, que la Nuit des longs couteaux venait de survenir, du 29 juin 1934 au 2 juillet 1934 (crimes que Hindenburg aurait approuvés voire suggérés à Hitler ; à ce sujet, il faudrait des études complémentaires d'historiens pour avoir une idée précise de la position du maréchal).

On aurait donc tort de comparer Hindenburg à Pétain. Au contraire, il était dès le début un opposant au nazisme qu'il considérait comme dangereux. Il a présidé la République de Weimar fidèlement avec le sens de l'État et surtout de l'intérêt général. Et dès lors que Hitler bénéficiait d'une majorité à l'assemblée, il ne pouvait que l'appeler à la Chancellerie. Du moins, c'est ce qu'on pourrait penser, mais ce n'est pas l'avis de l'historien Ian Kershaw en 1999 : « Hindenburg lui-même et ceux qui étaient en position de l'influencer étaient si occupés à chercher une solution à droite qu'ils ne prirent pas la peine d'envisager une issue parlementaire. (…) L’accession d’Hitler au pouvoir n’était aucunement inéluctable. Hindenburg eût-il concédé à Schleicher la dissolution qu’il avait si volontiers accordée à Papen et décidé une prorogation au-delà des soixante jours prévus par la Constitution, que la nomination de Hitler à la Chancellerie aurait sans doute pu être évitée. (…) Hindenburg se laissa persuader d'accorder à Hitler ce qu'il avait refusé à Schleicher à peine quatre jours plus tôt : la dissolution du Reichstag. ». L'historien français Gilbert Badia, en 1975, n'était pas plus tendre : « Il a suffi d'un exposé dramatique de Hitler (…) pour que le vieillard réactionnaire confie les pleins pouvoirs au "caporal autrichien" naguère méprisé. ».

Trop âgé, trop malade, le maréchal n'a pas pu vraiment s'opposer avec toutes les armes que la Constitution lui donnait contre un Hitler qui le trouvait encombrant mais également nécessaire, profitant de son prestige militaire pour sa propre entreprise. Quant à Erich Ludendorff, qui allait mourir le 20 décembre 1937, il a refusé de participer aux grandes funérailles de son vieux chef de Hindenburg le 7 août 1934 pour ne pas s'afficher à côté de Hitler. Certains glorieux militaires avaient tout de même conservé le sens de la dignité, même dans ces temps troublés.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (26 avril 2025)
http://www.rakotoarison.eu


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Le mur de Berlin.
La chute du mur de Berlin.
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Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
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18 avril 2025 5 18 /04 /avril /2025 04:32

« La version russe du cessez-le-feu se résume à un dimanche sanglant. Il faut aider l’armée ukrainienne. » (Donald Tusk, Premier Ministre polonais, le 13 avril 2025).




 


Quel scandale ! On mesure, à quel point, en France et ailleurs, certaines officines ont été complètement dévoyées sur le sens des mots (ce n'est pas nouveau et il y a eu d'admirables auteurs pour décrire ce phénomène particulièrement éloquent).

Les deux bombardements meurtriers qui ont été décidés par l'armée russe de Vladimir Poutine a touché la population civile ukrainienne dans la matinée du dimanche 13 avril 2025, en pleine cérémonie des Rameaux, fête chrétienne, à Soumy (Sumy).

Ces deux missiles balistiques visaient la population civile et a atteint son objectif puisque 35 personnes ont été massacrées, dont deux enfants, et 117 personnes blessées. Selon la CNN, c'est l'attaque la plus meurtrière d'une zone civile depuis le début de l'année.


La ville de Soumy est une ville d'environ 260 000 habitants située au nord-est de l'Ukraine, à 30 kilomètres de la frontière russe, à 140 kilomètres de Kharkiv et à 130 kilomètres de Koursk (du côté russe).

Des images d'apocalypse ont marqué la population, comme ce bus rouge en plein centre-ville, frappé par un missile et complètement calciné (aucun passager n'a survécu), ou ces habitants qui circulaient nombreux dans les rues du centre-ville.
 


À écouter ces poutinolâtres adorateurs du massacre des peuples, ce nouveau massacre serait la faute de Volodymyr Zelensky, le Président ukrainien. On marche véritablement sur la tête, dans des inversions accusatoires complètement absurdes, surtout depuis que Donald Trump a retrouvé la Maison-Blanche. Rappelons que d'un côté, il y a un peuple, ukrainien, qui n'aspire qu'à la paix, qui n'a jamais eu de velléités agressives vis-à-vis de son voisin russe, dont on dit que les habitants sont leurs frères, et de l'autre, un autocrate (je ne confond bien sûr pas le peuple russe des oligarques russes), assoiffé de sang, et affamé de nouvelles conquêtes territoriales pour faire sa Grande Russie et surtout, maintenir le pouvoir de sa clique de voyous.
 


L'explication foireuse de Moscou, officiellement, c'était qu'une réunion de militaires aurait été visée, mais ces deux missiles balistiques, peut-être équipés de sous-munitions (destinées à faire le plus de morts possible) comme c'était le cas dans d'autres bombardements, visaient pourtant bien des civils et à ce jour, aucune des victimes ne semblait porter l'uniforme militaire. Et si c'était vrai, l'armée russe aurait pu avoir la décence de présenter ses excuses pour tant de civils massacrés. Bien sûr, les deux gamins qui sont morts étaient des militaires dangereux pour l'armée russe...
 


Trois jours de deuil ont été décrétés en Ukraine pour rendre hommage aux victimes. Elles méritent toutes notre compassion pour cette guerre folle issue d'une folie guerrière propre au siècle dernier (on connaît tellement bien la leçon). Plus les États-Unis se montrent mous voire lèche-derrière (je réemploie le vocabulaire de leur Président) vis-à-vis de Vladimir Poutine, plus l'autocrate du Kremlin se montre cruel et gourmand au dépens des Ukrainiens.

Le procureur général de Soumy a annoncé que parmi les victimes se trouvaient un garçon de 11 ans et un jeune homme de 17 ans qui ne demandaient qu'à vivre. Maryna Choudessa aussi est morte, avec sa mère : elle était institutrice et ses petits écoliers sont aujourd'hui traumatisés par sa disparition. Lioudmyla a, de son côté, déploré la mort de sa mère, Tetiana Kvacha, qui avait décidé de prendre le bus qui a été touché, ce qu'elle faisait pourtant rarement. Mauvais destin. Voulu par Vladimir Poutine et ses sbires (y compris ceux de la désinformation).
 


Parmi les victimes, il y avait aussi la musicienne Olena Kohut, organiste soliste à l'Orchestre philharmonique de Soumy et membre de l'Orchestre du Théâtre national de Soumy, également universitaire, enseignant dans une école d'art. Elle était reconnue pour sa maîtrise musicale (piano et orgue) et son dévouement au développement des jeunes talents.

En tant qu'organiste soliste, elle interprétait des mélodies qui captivaient le public et ses prestations avaient une immense portée culturelle. Olena Kohut a aussi interprété l'hymne ukrainien dans plusieurs églises à travers l'Europe pour promouvoir la culture ukrainienne.


Ses collègues du Théâtre national de Soumy ont exprimé sur Facebook leur grande affliction : « Le 13 avril 2025, à la suite d’une frappe de missile russe, notre famille du théâtre a subi une douleur indescriptible. Les blessures infligées ont tué notre collègue, artiste du théâtre orchestral, Olena Kohut. Olena était une personne extrêmement brillante, une véritable professionnelle, une collègue sympathique et une amie fiable. Sa musique, son sourire, sa gentillesse resteront à jamais gravés dans nos mémoires. Nous adressons nos plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches et à ses amis. Nous partageons votre douleur et votre chagrin. Souvenirs joyeux et respect éternel. ».

« Une perte irréparable pour notre collectif, pour toute la communauté musicale, pour tous ceux qui ont connu et apprécié Olena en tant qu’artiste et personne », pour ses amis de l'Orchestre philharmonique de Soumy.

Les auteurs d'autres condoléances ont rappelé : « Camarades et élèves se souviennent d'Olena comme d'une personne qui transmettait non seulement ses connaissances, mais aussi son humanité, sa gentillesse et son optimisme. Elle savait libérer le potentiel de chaque élève et apportait un soutien sincère à ses élèves. ».
 


Il ne faut pas l'oublier, il ne faut pas les oublier, toutes ces victimes ukrainiennes meurtries dans leur chair et leur territoire. Le criminel de guerre sera jugé. Il payera. Rien ne sera oublié. C'est le destin de tous les auteurs du terrorisme, fût-il terrorisme d'État. Et honte à tous ceux qui justifient ces morts !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (14 avril 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Soumy : grâce musicale versus vulgarité brutale.
Moonraker.
Olena Kohut.
Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
3 ans de guerre en Ukraine.
Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
L'Europe face à Poutine.
Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
François Fillon et ses relations avec la Russie.
Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
La France Unie soutient l'Ukraine !
Condoléances cyniques.
Mort d'Evgueni Prigojine.

Sergueï Kirienko.
Victoria Amelina.

L'effondrement du pouvoir de Poutine.
Putsch en Russie : faut-il sauver le soldat Poutine ?
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Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
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Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
Les massacres de Boutcha.
Le naufrage du croiseur russe Moskva.
L’assassinat de Daria Douguina.
Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
L'avis de François Hollande.
Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !








https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250413-soumy.html

https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/soumy-grace-musicale-versus-260468

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24 mars 2025 1 24 /03 /mars /2025 03:51

« La collision avec le sol est due à l’action délibérée et planifiée du copilote qui a décidé de se suicider lorsqu’il était seul dans le poste de pilotage. Le processus de certification médicale des pilotes, en particulier l’auto-déclaration en cas de diminution de l’aptitude médicale entre deux évaluations médicales périodiques, n’a pas permis d’empêcher le copilote, qui connaissait des troubles mentaux avec des symptômes psychotiques, d’exercer les privilèges de sa licence. » (Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile, Rapport n°BEA2015-0125 du 13 mars 2016).


 


Il y a dix ans, le mardi 24 mars 2015 à 10 heures 41, heure de Paris, l'Airbus A320-211 immatriculé D-AIPX du vol 4U 9525 de la compagnie allemande Germanwings, une filiale de la Lufthansa, reliant Barcelone à Düsseldorf, s'est écrasé contre une paroi rocheuse du Massif des Trois-Évêchés à 1 550 mètres d'altitude, dans la commune de Prads-Haute-Bléone, dans les Alpes-de-Haute-Provence.

Il n'y a eu aucun survivant à ce choc gigantesque (l'avion est arrivé contre la montagne à une vitesse d'environ 700 kilomètres par heure). La "chance" a été que les lieux de la collision étaient déserts car en pleine montagne. 150 personnes y trouvèrent la mort, dont 6 membres d'équipage. Aucun Français, mais 66 Allemands, 51 Espagnols, et des personnes de quinze autres nationalités (dont américaine, argentine, britannique, kazakhe, etc.). L'avion avec le même équipage avait déjà effectué le vol Düsseldorf vers Barcelone en début de matinée avant de revenir vers Düsseldorf.


Même si deux années après l'accident, dans une conférence de presse, le père du copilote a émis l'hypothèse d'une perte de conscience du copilote et du blocage accidentel de la serrure de la porte du cockpit, la cause de l'accident aérien semble complètement établie. Le copilote aurait attendu d'être seul dans le cockpit, le pilote s'éclipsant pour aller aux toilettes (il n'avait pas eu le temps d'y aller avant le décollage), pour modifier les consignes du pilotage automatique et faire descendre l'appareil tout en augmentant sa vitesse. Quand le pilote a voulu regagner sa place, la porte du cockpit était verrouillée de l'intérieur par le copilote qui a refusé de répondre tant aux personnes dans l'appareil qu'aux contrôleurs aériens français qui ont tenté de le contacter. L'analyse des opérations du premier vol de la journée, Düsseldorf vers Barcelone, aurait même montré que le copilote avait fait une répétition de ses gestes pour ce second vol, en profitant, là aussi, de l'absence du pilote.

La descente de l'avion a duré entre 8 et 11 minutes (son altitude de croisière était de 11 600 mètres). Le pilote aurait utilisé une hache pour tenter d'ouvrir la porte blindée qui était verrouillée. Des passagers ont crié. Dans les enregistrements sonores retrouvés, on peut aussi entendre la respiration du copilote jusqu'à l'impact, ce qui signifie qu'il n'était pas mort avant le choc.
 


Le suicide d'un pilote ou copilote dans un avion transportant des passagers (ici de nombreux passagers) est extrêmement rare. Le site Aviation Safety Network a répertorié, dans sa base de données très fournie, en tout six cas de suicides, et encore, seulement trois sont officiellement avérés dont le vol de la Germanwings (les deux autres : le vol Japan Airlines 350 le 9 février 1982 (24 victimes) et le vol LAM Mozambique Airlines 470 le 29 novembre 2013 (33 victimes). La plupart des suicides de pilote sont à bord de petits avions sans passager.

Ce crash a reposé deux questions importantes pour la sécurité aéronautique. La première concerne le verrouillage de l'intérieur de la porte du cockpit, mesure de sécurité adoptée après les attentats du 11 septembre 2001 permettant aux pilotes de s'opposer à d'éventuels terroristes à l'intérieur de l'appareil. À la suite de ce crash, la mesure a été assortie d'une obligation de la présence d'au moins deux personnes dans le cockpit en permanence, mesure déjà en vigueur aux États-Unis avant le crash de la Germanwings. Toutefois, cette mesure a été levée un peu plus tard en raison, également, de risque pour la sécurité en multipliant la circulation dans le cockpit.

 


L'autre enjeu concerne la santé mentale des pilote et copilote. On s'est aperçu que le copilote était en burn-out avec des tendances suicidaires. Il craignait notamment qu'on lui retirât sa licence de vol en raison d'une déficience visuelle (non avérée). Dans le mois qui a précédé le crash, il a consulté sept fois un médecin (généraliste, psychiatre, ophtalmologiste) et son médecin lui avait fait un arrêt de travail et l'avait jugé inapte au travail. Mais le copilote n'a pas transmis ces informations à sa compagnie. Il y a une contradiction entre le principe du secret médical et la sécurité des passagers d'une compagnie aérienne. Quatre avis d'arrêt de travail avaient été faits les 17 février 2015, 9, 12 et 19 mars 2015. Un médecin lui a même conseillé une « orientation vers un traitement en hôpital psychiatrique en raison d’une possible psychose ».

L'enquête a montré également que le copilote était traité pour des troubles bipolaires et qu'on lui avait prescrit des somnifères, des anxiolytiques et des antidépresseurs, des médicaments qui, selon le professeur Bernard Debré, pouvaient avoir pour effet le passage à l'acte. Le copilote avait eu des épisodes dépressifs avant même sa formation de pilote ; en 2008, il a même été hospitalisé en raison de ses idées suicidaires, mais de 2010 à 2014, il a toujours obtenu le certificat médical nécessaire aux pilotes d'avion. C'est apparemment à partir de décembre 2014 qu'il « commence à présenter des symptômes qui pourraient être associés à un épisode dépressif psychotique », selon le rapport final du Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA), l'organisme compétent en la matière dépendant du Ministère de l'Écologie (rapport n°BEA2015-0125 du 13 mars 2016). L'analyse toxicologique des tissus biologiques retrouvés du copilote a indiqué qu'il avait absorbé avant le vol des antidépresseurs et des somnifères.

 


Là aussi, la rigueur devrait être de mise. Le contrôle des pilote et copilote en alcool, stupéfiants et psychotropes devrait être obligatoire et systématique à chaque embarquement. Pour certains psychiatres, le fait que le copilote ait entraîné 149 autres personnes dans sa mort et qu'il ait prémédité cet acte devrait qualifier ce crash aérien de tuerie de masse et pas de suicide. Ainsi, le psychiatre français Serge Hefez a estimé le 15 avril 2015 sur France Inter : « Tout un chacun n’assassine pas 149 personnes en se suicidant en dehors d’un contexte de guerre et tout en déclarant : "Je vais faire quelque chose qui va changer le système. Tout le monde connaîtra mon nom". Nous sommes dans le cadre d’un acte délirant, d’un sentiment de mégalomanie, d’une revendication paranoïaque à la reconnaissance, d’une tentation de toute-puissance décuplée par le côté "seul maître à bord après Dieu". ». Et le 30 mars 2015, le psychiatre allemand Andreas Reif, de l'Université de Francfort, y a vu un parallèle avec les tueries de masse dans les écoles (particulièrement aux États-Unis) : « Le fait que [le copilote] ait entraîné tant de personnes dans la mort et que ces personnes aient presque toutes été inconnues parle contre le suicide élargi. ».

À l'époque de l'accident, il y a dix ans, ce fut un choc énorme en Europe : François Hollande (le Président français), Angela Merkel (la Chancelière allemande) et Mariano Rajoy (le Président du gouvernement espagnol) se sont rendus sur place le 25 mars 2015. Le roi d'Espagne Felipe VI était à Paris au moment de la tragédie, en visite d'État en France. Le 29 mars 2015 (dimanche des Rameaux) à Saint-Pierre de Rome, le pape François a rendu hommage aux victimes du crash aérien.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (22 mars 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Rapport final n°BEA2015-0125 du 13 mars 2016.
Crash de l'A320 de Germanwings.
L'accident aérien de Villa Castelli.
L'accident de Millas.
Le miraculé d'une collision ferroviaire.


 






https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250324-crash-germanwings.html

https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/crash-de-l-a320-de-germanwings-258648

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/24/article-sr-20250324-crash-germanwings.html


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20 mars 2025 4 20 /03 /mars /2025 03:31

« Nous sommes parvenus à l’heure de vérité, où nous devons dire non seulement ce que nous allons faire, mais aussi ce que nous sommes. J’ai souvent affirmé que la question qui se posait à l’Europe était celle du dramaturge : To be or not to be, être ou ne pas être. » (François Bayrou, le 4 mars 2025 au Sénat).


 


Le Premier Ministre François Bayrou a fait une déclaration au Sénat le mardi 4 mars 2025 sur la situation en Ukraine et la souveraineté militaire de l'Europe. Il l'a faite dans le cadre très institutionnel de l'article 50-1 de la Constitution à la suite de sa déclaration à l'Assemblée Nationale la veille.

On aurait pu imaginer, comme pour les déclarations de politique générale, que le chef du gouvernement répétât à peu près son discours de la veille. Mais une différence majeure est survenue entre-temps : Donald Trump a brutalement suspendu l'aide militaire américaine à la résistance de l'Ukraine, si bien que l'Europe commence à comprendre l'importance stratégique et l'urgence de ne plus dépendre des États-Unis pour sa défense : « Cette situation, vous le savez, évolue d’heure en heure et nous place devant des responsabilités et face à des rendez-vous que nous ne pouvons pas éluder. ».

Sur la forme, François Bayrou était encore plus à l'aise que la veille à l'Assemblée. Il n'a pratiquement pas lu ses notes et a fait sa déclaration directement en regardant les sénateurs dans les yeux. Ce sujet de l'Europe et de sa souveraineté de défense est l'un des points forts des convictions démocrates chrétiennes de François Bayrou. En tant qu'acteur majeur de l'exécutif d'un des plus grands pays européens, il est donc en posture d'influer sur le sens des événements.

Ses premiers mots étaient pour le peuple ukrainien qui souffre sous les bombes poutiennes : « Cela a été très douloureux et, pour beaucoup de nos concitoyens, voir ainsi abandonnée, y compris dans le langage et le raisonnement, la solidarité avec l’Ukraine, a été une prise de conscience, l’Ukraine qui se bat pour sa survie et pour nos principes de droit. Ces combats, ce sont déjà 100 000 morts, des centaines de milliers de blessés, et, on a peine à l’évoquer dans un discours officiel, 20 000 enfants qui ont été déplacés pour que soit changée, par l’influence, leur identité ukrainienne, pour qu’elle soit abandonnée. Cette déportation est, pour nous, un crime contre l’humanité. Enfin, des centaines de milliers d’Ukrainiens, de femmes et d’hommes, ont été déracinés. Au fond, ils sont le visage de tout un peuple qui souffre. (…) Je l’ai dit devant l’Assemblée Nationale hier, et je veux dire devant le Sénat aujourd’hui à quel point nous avons été admiratifs et nous nous sommes sentis solidaires du Président Zelensky au regard de l’attitude qu’il a eue, refusant de plier devant l’intimidation. À cet instant, il a été le visage de l’Ukraine, le défenseur de l’honneur de la démocratie, et il portait en même temps une partie de notre honneur européen. Le Président Zelensky a honoré la mission qui est la sienne. Nous nous sommes sentis profondément solidaires de son refus de se plier à ces injonctions. ».

 


Puis, il a développé les errements de la diplomatie de Donald Trump : « Au début, nous avons donc cru que ce n’étaient que des rodomontades. Ensuite, nous nous sommes aperçus qu’il arrive très souvent, avec ce type de responsabilités politiques, avec ce type d’outrances et avec ce type de transgressions, que les rodomontades se transforment en actes. Et nous avons vu, très vite, un changement incroyablement inquiétant et extrêmement profond de la diplomatie américaine, puisque la semaine dernière, aux Nations unies, les États-Unis ont voté avec la Russie et la Corée du Nord pour repousser une résolution dans laquelle était mentionnée la responsabilité de la Fédération de Russie dans la tentative d’annexion de l’Ukraine. Que les États-Unis refusent de nommer l’agression dont l’Ukraine est victime a été, pour beaucoup d’entre nous, une prise de conscience. Il y a eu ensuite l’agression dans le Bureau ovale et les mots que le Président Trump a utilisés. Je vous rappelle la phrase la plus significative : "Trouvez un accord avec Poutine ; autrement, nous vous laisserons tomber". Une nation indépendante, souveraine, soumise à la pire des menaces, une menace sur son existence même, et qui est abandonnée par le pays qui fut le leader de l’alliance des libertés : cela est, pour beaucoup d’entre nous, extrêmement violent. ».

 


Et de reprendre la belle formule de Gabriel Attal dite la veille à l'Assemblée : « Au fond, la question se résume assez simplement : si la Russie arrête les combats, c’est la guerre qui s’arrête ; si l’Ukraine arrête les combats, c’est l’Ukraine qui disparaît. Cette réalité si lourde et si choquante, il est très important qu’elle soit rappelée aujourd’hui, devant le Sénat de la République. Enfin, cette nuit, a été annoncée une décision que beaucoup redoutaient, mais dont chacun voit les implications : l’annonce selon laquelle les États-Unis stoppaient désormais les livraisons d’aide à l’Ukraine. Car le mot "suspension" ne trompe personne : la suspension, dans la guerre, de l’aide à un pays agressé, cela signifie qu’on abandonne celui-ci et qu’on accepte, ou qu’on souhaite, que son agresseur l’emporte. Pour la France, pour nous tous, pour les Européens et pour tous ceux qui sont attachés aux libertés et aux droits, pour ceux qui sont attachés à la Charte des Nations unies, par exemple, c’est évidemment tout à fait insupportable. ».

 


La fin de l'ordre international est une catastrophe collective : « Je cite presque exactement la Charte des Nations unies : c’était le refus de la violence pour régler les conflits, c’était le droit du plus juste contre le droit du plus fort. C’est ce monde-là que nous avons abandonné pour entrer dans un autre monde où, au fond, les principes sont abandonnés. Et cet abandon des principes menace l’existence même des relations internationales telles que nous les avons voulues et construites. ».
 


Selon François Bayrou, c'est à l'Europe de reprendre le flambeau du droit international et des valeurs : « Devant cette incroyable agression, cet abandon des principes et ce changement de l’ordre du monde, beaucoup d’entre nous, beaucoup de nos concitoyens, se trouvent désespérés. Mais le message et la vision du gouvernement, c’est que nous ne pouvons pas désespérer ! D’abord parce que nous sommes la France et que nous sommes l’Europe. Nous sommes l’Europe : cela signifie que, contrairement à ce que nous croyons ou à ce que nous laissons croire, nous sommes non pas faibles, mais forts, si nous comparons les capacités de l’Union Européenne et les capacités de la Russie, et même des États-Unis. L’Union Européenne compte 450 millions d’habitants, et même 520 millions en ajoutant la population du Royaume-Uni. La population russe, c’est 145 millions d’habitants. Comparons les PIB des deux ensembles : l’Union Européenne, c’est 17 000 milliards d’euros, contre quelque 2 000 milliards d’euros pour la Russie. Comparons les arsenaux : on découvrira alors que les armées européennes, c’est 2,6 millions de soldats, plus du double de ce que peut aligner la Fédération de Russie ; que nous disposons de 15 000 aéronefs, je parle sous le regard du ministre des armées, qui peut confirmer ces chiffres, contre 5 000 pour la Russie, et de 15 000 pièces d’artillerie, contre moins de 10 000 pour la Russie. Il n’y a donc pas de déséquilibre ! Simplement, cette force-là, nous ne la mobilisons pas, et nous ne savons pas qu’elle existe. Nos concitoyens pensent que nous sommes désarmés, mais je crois le contraire. ».
 


Et le démocrate chrétien a cité De Gaulle : « J’ai en mémoire un événement de cet ordre qui exprime à peu près la même chose. Lorsqu’on avait proposé au Général De Gaulle, nouvellement élu Président de la République, de signer le Traité de Rome, une partie des siens qui ne voyaient pas d’un bon œil ce traité lui avait demandé d’y renoncer. Néanmoins, le Général De Gaulle a pris son stylo pour le signer et, en marge de cette proposition de renonciation au traité, a écrit de sa main : "Non. Les Français sont forts, mais ils ne le savent pas". Ce que le Général De Gaulle avait comme vision pour son peuple, ce peuple dont il avait la charge, nous devons l’avoir aussi pour l’Union Européenne. Nous avons une force que nous ignorons et c’est à l’influence de cette force que nous renonçons. Nous devons entreprendre un travail considérable afin que l’Union Européenne fasse sentir ce qu’elle est et fasse entendre ce que sont sa volonté et ses principes. ».

D'abord, l'urgence : « L’arrêt des livraisons américaines a plusieurs conséquences (…) sur les forces armées ukrainiennes. (…) La responsabilité de l’Union Européenne et des pays amis de l’Ukraine, c’est d’être capables de se substituer le plus rapidement et le plus efficacement possible aux livraisons américaines, de manière que l’Ukraine ne soit pas contrainte de craquer. C’est un devoir de civilisation que nous avons à remplir. Cela implique de mobiliser nos moyens et nos stocks, nous devons donc trouver de l’argent, mais aussi tous ceux qui peuvent apporter leur aide à un pays qui se trouve devant une si grave menace militaire. ».


Ensuite, la souveraineté européenne : « Nous sommes appelés à faire un choix fondamental à moyen terme : les Européens sont-ils prêts à assurer eux-mêmes la sécurité et la défense de l’Europe ? Je le disais, cette question pose celle de notre existence, purement et simplement. Même si cela peut sembler paradoxal, c’est le sujet sur lequel je suis tout à fait prêt à accepter que la vision du Président américain soit respectée. Aussi, nous devons nous préparer à cette éventualité. Je pense qu’une union aussi riche et capable en armement que la nôtre a le devoir d’assurer elle-même sa sécurité ; elle n’a pas à s’en remettre perpétuellement à d’autres. Les propos que je formule ici ne sont pas différents du message que la France a envoyé au fil des générations. Depuis le Général De Gaulle, et notamment depuis le début du mandat de l’actuel Président de la République, notre message a toujours été le même : l’avenir de la défense européenne, c’est en Europe qu’il se joue. Il nous appartient de dire et de savoir si nous voulons être fidèles à cette tradition française. ». En ce sens, François Bayrou a raison. Il y a une réelle convergence de vue entre Emmanuel Macron et Donald Trump : désengagement européen des États-Unis, réengagement des pays européens pour leur propre défense.

 


Vouloir mettre en pratique la tradition française de l'indépendance militaire, c'est anticiper certaines conséquences : « La première d’entre elles est industrielle et technologique. Nous avons à construire la base industrielle et technologique de défenses (BITD) qui permettra d’équiper les forces de défense des pays de l’Union Européenne. Il ne s’agit pas de construire une armée européenne ; on sait que cette idée, qui a été à l’ordre du jour autrefois, est abandonnée depuis longtemps. Ce qu’il faut, c’est organiser, coordonner et rapprocher les armées européennes. Toutefois, la vérité oblige à dire que, aujourd’hui, les deux tiers des équipements des armées des pays de l’Union Européenne sont acquis auprès des États-Unis. Cela signifie, je le dis à voix basse, que ces équipements sont soumis, d’une manière technologiquement certaine, à l’approbation des États-Unis avant qu’ils ne soient utilisés. C’est aussi vrai pour les pays alliés en matière d’arme nucléaire et de vecteurs nucléaires. Le paysage ainsi dépeint ne peut que nous inviter à faire preuve de détermination. Au bout de ce chemin, si notre volonté s’affirme, nous serons en mesure de mutualiser nos armements, de renforcer l’interopérabilité et d’assurer nos stocks, sans lesquels il n’est pas possible de conduire une politique sérieuse de défense. Nous pourrons également profiter d’entraînements communs. Cette coalition des armées européennes, notamment grâce au partage de leurs avancées, constitue la clef de l’avenir. En ce qui concerne les avions, les blindés, les drones, les capacités de transport, la projection dans l’espace et le renseignement, nous sommes devant des responsabilités qui, de toute évidence, vont transformer notre manière d’être. C’est aussi vrai pour ce qui touche à l’espace : le système Galileo et le programme IRIS2 sont des éléments essentiels de notre indépendance. Cette transformation suppose de très grands investissements. Hier, la Présidente de la Commission Européenne, madame von der Leyen, a annoncé qu’elle envisageait d’autoriser les États s’engageant à investir dans l’équipement des armées à dépasser la limite de leur endettement public, soit 3% de leur PIB aux termes du pacte de stabilité et de croissance. Des instruments de prêts sont préparés et un appel à l’épargne a été lancé, notamment en direction de la Banque européenne d’investissement (BEI). ».

Construire l'Europe selon la vision française : « Le rendez-vous que l’Europe a avec elle-même, au regard de l’idée qu’elle se fait de son avenir, est aussi le rendez-vous de la France avec elle-même. Cela fait plusieurs décennies que notre pays défend une certaine idée de l’Europe : une Europe libre, solidaire, indépendante. La France a sans cesse déployé le drapeau de cet idéal dans les rangs de l’Union Européenne. L’expression de cet idéal et de cette volonté politique est étroitement liée à la santé et au rayonnement de notre pays. Les questions qui se posent à nous, rétablir l’équilibre de nos finances, dégager de nouveaux moyens, définir des stratégies de développement sur le long terme en matière agricole, industrielle et intellectuelle, retrouver la capacité créatrice de notre pays et la confiance que nous devons avoir en nous-mêmes, sont directement liées à la capacité d’influence que la France peut avoir sur l’Europe en portant un projet à la fois national et européen. ».


Au-delà de cet horizon européen à construire, François Bayrou compte aussi sur l'unité des Français autour de leur modèle social : « La France n’est pas qu’un projet économique, c’est aussi un pacte social. Tout cela pose la question fondamentale, principielle, de l’unité du pays. Si nous sommes unis, rien ne nous résistera, mais si nous continuons à cultiver les divisions auxquelles nous sommes tellement attachés, les obstacles qui se dressent devant nous finiront par se révéler insurmontables. (…) L’idée que nous nous faisons de la liberté, du droit et d’un monde équilibré, [repose] en partie sur la capacité de la France à se ressaisir elle-même de son destin. ».
 


À la fin du débat au Sénat, le Premier Ministre a repris brièvement la parole, notamment pour donner un satisfecit aux sénateurs plus assidus que les députés : « J’observe d’ailleurs que nombre d’entre vous sont restés jusqu’au terme du débat pour participer à la réflexion. Ce n’est pas le cas dans toutes les assemblées… Je suis frappé de l’intérêt que vous avez accordé à cette déclaration du gouvernement et je mesure l’investissement de tous les groupes politiques, quels qu’ils soient. ».

Et d'ajouter, très conscient de la responsabilité historique de tous les parlementaires d'aujourd'hui : « Chacun voit bien que nous vivons un moment historique. Pas un seul des orateurs qui se sont succédé n’a nié le fait que nous sommes en train de changer d’ère. Voilà quatre-vingts ans que nous vivions sur la base d’un certain nombre de principes, dans un cadre de réflexion aujourd’hui profondément dégradé. Nous tous, en tant que responsables politiques, avons pour mission de préparer l’avenir. Nous allons devoir remettre en cause notre manière de voir les choses et notre hiérarchie des priorités, tout simplement pour agir. Nos concitoyens, que vous représentez vous aussi, sont personnellement concernés par ce qui est en train de se passer. Nous ne pourrons, en aucun cas, nous dérober à cette réflexion et aux remises en cause qu’elle implique. Et, comme toujours, c’est devant l’opinion publique, dans la conscience des citoyens, que tout va se jouer. ».

Parmi les sénateurs qui ont participé au débat (« qui se sont succédé »), le docteur Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants, République et Territoires, membre de Horizons, dont l'intervention a été transmise en vidéo dans les réseaux sociaux américains et est en train d'être vues par des millions voire des dizaines de millions d'Américains, surpris par le ton très piquant (« empereur incendiaire », « bouffon sous kétamine ») pour décrire la nouvelle administration Trump qui jouit actuellement d'une absence totale d'opposition politique (ah, au fait, voici la définition sur Wikipédia : « La kétamine est un psychotrope utilisé comme anesthésique injectable. Elle est aussi employée comme analgésique, sédatif, et en médecine vétérinaire. » ; Claude Malhuret reste avant tout un médecin).


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (04 mars 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
François Bayrou : la France avait raison !
Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
3 ans de guerre en Ukraine.
Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
L'Europe face à Poutine.
Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
François Fillon et ses relations avec la Russie.
Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
La France Unie soutient l'Ukraine !
Condoléances cyniques.
Mort d'Evgueni Prigojine.

Sergueï Kirienko.
Victoria Amelina.

L'effondrement du pouvoir de Poutine.
Putsch en Russie : faut-il sauver le soldat Poutine ?
Poutine en état d'arrestation !
Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
Kherson libéré, mais menace nucléaire ?

Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
Les massacres de Boutcha.
Le naufrage du croiseur russe Moskva.
L’assassinat de Daria Douguina.
Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
L'avis de François Hollande.
Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !



 





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250304-bayrou.html

https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/francois-bayrou-et-l-heure-de-259680

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18 mars 2025 2 18 /03 /mars /2025 17:01

« La protection de notre liberté et de la paix ne tolère aucun retard. » (Pré-accord entre la CDU et le SPD du 8 mars 2025).






 


Même pas deux semaines, c'est probablement un record de négociation quand il n'y a pas de majorité absolue au Bundestag, ce qui est le cas souvent et en particulier pour l'Assemblée sortie des urnes du dimanche 23 février 2025 en Allemagne. En effet, un pré-accord, c'est-à-dire, un accord de principe a été conclu le samedi 8 mars 2025 entre les deux principaux partis de gouvernement, la CDU (qui a gagné les élections avec son associée bavaroise, la CSU que je ne citerai pas par la suite) et le SPD, le parti du Chancelier sortant Olaf Scholz.

Revenons très rapidement en arrière. Les électeurs allemands ont voté le 23 février 2025 pour élire leurs nouveaux députés qui vont siéger au Bundestag. Ces élections fédérales ont été anticipées par le Chancelier social-démocrate Olaf Scholz après l'éclatement de la coalition du feu tricolore (vert écologiste, jaune libéral démocrate, rouge social-démocrate) après une divergence de vue entre Olaf Scholz et son ministre des finances par ailleurs président du parti libéral démocrate (FDP).

Le résultat des courses après une campagne très difficile, sur fond d'attentats et d'ingérences américaines (Elon Musk soutenant activement le parti d'extrême droite AfD), ce fut, d'une part, une forte participation par rapport aux élections précédentes (82,5% des inscrits, soit un bond de plus de 6 points par rapport aux élections fédérales du 26 septembre 2021, avec une participation de 76,4%) ; d'autre part, l'effondrement du parti au pouvoir, le SPD (social-démocrate) qui a été relégué seulement en troisième position avec 16,4% des voix et 120 sièges sur 630.


 


Devant lui, deux grands gagnants : politiquement, l'AfD n'est pas parvenue au pouvoir mais s'est installée en confortable numéro deux du paysage politique allemand avec 20,8% des voix (il a doublé son score) et 152 sièges, devenant le premier parti d'opposition, arrivant en tête dans toutes les régions de l'ancienne Allemagne de l'Est ; institutionnellement, la CDU a gagné aussi puisqu'elle est arrivée en tête avec 28,5% des voix et 208 sièges. Les électeurs allemands ont vu en Friedrich Merz le dirigeant politique de l'Allemagne qui leur manquait depuis le retrait de la démocrate chrétienne Angela Merkel. Les Verts se sont également effondrés à 11,6% des voix et 85 sièges.

 


Le cinquième et dernier parti représenté au Bundestag (pour être représenté, il faut au moins atteindre 5% des voix), l'autre parti populiste d'Allemagne de l'Est, Die Linke (un équivalent des insoumis) qui a amélioré son score à 8,8% des voix (soit un gain de 4 points) et 64 sièges. L'autre parti frère de la gauche populiste, la nouvelle BSW, créée le 8 janvier 2024 par d'anciens dirigeants de Die Linke, a raté de peu la marche des 5% avec 4,97% des voix, ce qui ne lui a donné aucun siège. Quant au parti libéral démocrate (FDP), finalement le fauteur de l'éclatement de la coalition de centre gauche et de ces élections anticipées, il a été lourdement et sévèrement sanctionné par ses électeurs en ne recueillant que 4,3% des voix, soit 7,1 points de moins qu'en 2021 (et la perte de ses 92 sièges !), un désastre qui le fait disparaître du Bundestag pour cette nouvelle législature.

La CDU a donc gagné les élections du 23 février 2025, mais ne dispose d'aucun allié, généralement le FDP, pour atteindre la majorité absolue au Bundestag. Avec 208 sièges, il lui manque en effet 108 sièges pour rassembler 316 députés (sur 630). Deux solutions s'offraient à Friedrich Merz dont le leadership n'a jamais été contesté et qui a pris une certaine revanche historique dans l'après-Helmut Kohl (à partir de 2000). La CDU aurait pu faire alliance avec l'AfD pour un gouvernement axé très à droite, dont le thème de la lutte contre l'immigration serait l'un des objectifs communs. L'AfD était partante mais les dirigeants de la CDU ont toujours refusé toute alliance contre-nature avec l'AfD dans un pays qui a vécu le nazisme, la période la plus effroyable.

 


Il n'y avait donc pas d'autres possibilités : la CDU et le SPD se sont mis d'accord pour gouverner ensemble, malgré leurs nombreuses divergences. C'est l'objet des négociations actuelles qui ne font que débuter. En effet, le 8 mars 2025 a eu lieu un pré-accord, mais il reste encore à définir précisément un programme de gouvernement ainsi que la composition du gouvernement (pour la coalition sortante, l'accord de gouvernement de 2021 comptait 177 pages !). C'est ce qu'on a appelé historiquement la "grande coalition" (la « GroKo »), qui n'est pas nouvelle puisque Angela Merkel a gouverné trois mandats sur quatre ainsi. La CDU et le SPD, à eux deux, représentent 328 sièges sur 630, donc une majorité absolue.

Dans ce texte du pré-accord, intitulé "Sondierungspapier" [document exploratoire], beaucoup d'éléments ont été exprimés, présentés lors d'une conférence de presse commune de Friedrich Merz (président de la CDU), Markus Soder (président de la CSU et ministre-président de Bavière), Lars Klingbeil et Saskia Esken (les deux coprésidents du SPD), tenue au Bundestag. Ce pré-accord préconise des contrôles renforcés aux frontières contre l'immigration illégale (« en accord avec les partenaires européens ») et l'expulsion des étrangers en situation irrégulière. En contre-partie, le SPD a fait prévaloir sa mesure d'augmentation du salaire minimum à 15,00 euros par heure d'ici à 2026 
(actuellement, c'est 12,82 euros par heure) et la prolongation de deux ans de l'encadrement des loyers.

À cette conférence de presse, Friedrich Merz a notamment déclaré : « Nous avons rédigé un document commun et nous sommes parvenus à un accord sur toute une série de questions. (…) Nous sommes tous convaincus que nous avons une grande tâche à accomplir face aux défis auxquels l'Europe entière est confrontée. (…) Le monde n'attend pas ! ».
 


Après deux ans de récession, des difficultés économiques et énergétiques, l'Allemagne avait besoin d'une relance massive, ce qui sera le cas avec le plan d'investissement de 500 milliards d'euros. Le document commence ainsi, réaffirmant d'ailleurs très fermement le soutien à l'Ukraine : « L’Allemagne fait face à des défis historiques. La situation économique est tendue, les développements politiques mondiaux nous mettent au défi, des investissements massifs sont nécessaires pour améliorer le quotidien des habitants de ce pays. Notre exigence est claire : l’Allemagne a besoin de stabilité et de renouveau, pour un avenir sûr, pour la force économique et pour la cohésion sociale. Dans une période d’incertitude croissante en Europe et dans le monde, nous prenons nos responsabilités. La protection de la liberté et de la paix, le maintien de notre prospérité et la modernisation de notre pays ne tolèrent aucun retard. Notre but est de renforcer la capacité de défense intérieure et extérieure de l’Allemagne, d’investir massivement dans notre infrastructure et de poser les bases d’une croissance durable et soutenue. Nous voulons prendre nos responsabilités en Europe, et renforcer ensemble avec nos partenaires la capacité de défense et la compétitivité de l’Europe. Une chose est claire : L’Allemagne reste aux côtés de l’Ukraine. La fondation d’un gouvernement stable est un financement solide. C’est pourquoi nous nous sommes mis d’accord pour donner la priorité aux questions centrales d’investissement et de financement. Avec un fonds spécial de 500 milliards d’euros, nous remettons notre pays en forme et investissons dans les routes, les rails, l’éducation, la numérisation, l’énergie et la santé. En même temps, nous garantissons la capacité de défense de l’Allemagne et de l’Europe avec des moyens supplémentaires, car la protection de notre liberté est indispensable. Une chose est claire : nous voulons continuer à soutenir l’Ukraine. Nous sommes unis par la volonté de recréer de la confiance. Nous voulons consolider la cohésion sociale, en soulageant les familles, en renforçant la sécurité sociale et en reconnaissant les efforts de la classe moyenne qui travaille dur. Nous améliorer et simplifier la vie des habitants de ce pays. ».

 


Huit points sont énumérés qui précisent surtout les conditions financières du plan d'investissement de 500 milliards d'euros et la prise en compte du frein à la dette. En effet, le problème en Allemagne est que la loi fondamentale (la Constitution) oblige un équilibre budgétaire, et pour la réviser, il faut une majorité des deux tiers. Mais les écologistes ont accepté de s'accorder sur ce sujet, dès lors que l'emprunt spécial ne finance pas une baisse des impôts mais bien une augmentation de la dépense publique. Il faut dire que les équipements publics et les infrastructures en Allemagne sont en très mauvais état et ont besoin de ce réinvestissement massif, parallèlement à l'effort de défense.

En outre, seulement le premier % de PIB du budget de la défense sera comptabilité dans le frein à l'endettement, pas les autres % des dépenses de défense, conformément à la nouvelle règle de la Commission Européenne.

La conséquence immédiate de cet accord, c'est que le Bundestag a voté ce mardi 18 mars 2025 en session extraordinaire le principe de ce fonds d'investissement massif de 500 milliards d'euros (dont 100 milliards seront alloués aux communes) : « Ce fonds spécial doit servir à des investissements dans les infrastructures. Cela comprend la protection civile et de la population, l’infrastructure de transport, les investissements dans les hôpitaux, l’infrastructure énergétique, dans l’infrastructure d’éducation, de soins, et les installations scientifiques, dans la recherche et développement et dans la numérisation. ».
 


L'objectif était que cette réforme, qui nécessitait les deux tiers des voix, fût votée avant l'installation du nouveau Bundestag le 25 mars 2025, car la CDU, le SPD et les Verts n'y représenteront que 413 sièges, moins que les 420 nécessaires (majorité des deux tiers), alors qu'actuellement, dans la configuration de 2021, les trois partis représentent 521 sièges (voire 613 avec le FDP) sur 736 au total (les deux tiers imposent au moins 491 voix).

On le voit bien, l'arrivée de Friedrich Merz à la tête du gouvernement allemand va être le point de départ d'une nouvelle période pour l'Allemagne qui va être plus dépensière, plus endettée, afin d'assurer des services publics qui sont actuellement dans une situation pire qu'en France. Le Président français Emmanuel Macron, qui avait déjà reçu à l'Élysée Friedrich Merz le 26 février 2025, juste après les élections, l'a rencontré à nouveau ce mardi 18 mars 2025 à Berlin. Le couple franco-allemand semble redevenir une nouvelle force de l'Europe, avec deux poids lourds politiques sur la scène internationale, Friedrich Merz et, bien sûr, Emmanuel Macron. Il faut bien cela pour faire face à la collusion Donald Trump et Vladimir Poutine.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (18 mars 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Allemagne 2025 : Feu vert pour la grande coalition CDU-SPD.
Allemagne 2025 : victoire de Friedrich Merz (CDU).
Marché de Noël de Magdebourg : le retour du risque terroriste.
L'éclatement de la coalition Rouge Jaune Vert en Allemagne.
Friedrich Merz.
Olaf Scholz.
Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
Élections européennes 2024 (7) : Ursula von der Leyen et ses trois priorités, la défense, le logement et la compétitivité.
Élections européennes 2024 (6) : le casting pour la dixième législature du Parlement Européen.
Élections européennes 2024 (5) : la victoire de... Ursula von der Leyen !
Der Spiegel : "La France, c'est l'Allemagne en mieux".
Konrad Adenauer.
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Le mur de Berlin.
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Berlin 1989 : le 9/11 avant le 11/9.
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Le testament de Benoît XVI.
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Bonne retraite, Frau Merkel !
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L’Allemagne en pleine fièvre extrémiste ?
 





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250308-allemagne.html

https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/allemagne-2025-feu-vert-pour-la-259784

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16 mars 2025 7 16 /03 /mars /2025 03:43

« Ne cessons jamais de rappeler une chose simple : si la Russie arrête de se battre, il n’y a plus de guerre ; si l’Ukraine arrête de se battre, il n’y a plus d’Ukraine. » (Gabriel Attal, le 3 mars 2025 dans l'hémicycle).



 


À l'occasion du débat parlementaire initié par le gouvernement sur la situation en Ukraine et la défense en Europe qui s'est tenu le lundi 3 mars 2025 dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale, un ancien Premier Ministre a répondu à la déclaration du Premier Ministre François Bayrou. En effet, l'actuel secrétaire général de Renaissance, Gabriel Attal, également président du groupe Renaissance (EPR) à l'Assemblée, le plus grand groupe du socle commun gouvernemental, a pris la parole au nom de son groupe pour participer au débat public sur l'Ukraine.

Le sort de l'Ukraine est une préoccupation récurrente du jeune ancien Premier Ministre. Il s'y est rendu à l'occasion du troisième anniversaire de la guerre d'agression menée par Vladimir Poutine. Il a visité notamment à Zaporijjia, ville martyre, une école souterraine qui venait de s'ouvrir pour permettre aux enfants d'étudier en sécurité : « Rarement je n’ai ressenti autant d’espoir qu’en observant le sourire de ces jeunes, heureux de retrouver l’école pour la première fois depuis trois ans. J’ai vu l’espoir de cette jeunesse ukrainienne qui refuse de céder face à la fureur des bombes et continue à aller à l’école, à étudier, à vivre ; l’espoir d’une nation tout entière, qui vit comme un acte de résistance le fait de former de nouvelles générations de citoyens et de leur transmettre l’esprit critique qui est au fondement de nos démocraties. ».

Rejetant la méthode brutale de Donald Trump et J. D. Vance, Gabriel Attal a soutenu très vivement le Président ukrainien Volodymyr Zelensky : « L’Ukraine n’a d’excuses à présenter à personne. Le peuple ukrainien ne mérite qu’une chose : le respect. Je tiens à rendre hommage avec vous à ces femmes et ces hommes qui refusent la fatalité, la défaite, qui refusent tout simplement de disparaître. Plus encore en revenant d’Ukraine, plus encore après les événements de ces derniers jours, je crois qu’il n’y a pas de question plus forte, plus existentielle, plus révélatrice aussi, que la position de chacun de nous sur le conflit en Ukraine. Plus forte, parce qu’il est clair que nous sommes à un point de bascule. Ce qui se joue en Ukraine, ce n’est pas seulement l’avenir d’un pays souverain : ce sont aussi les intérêts de la France et des Français qui sont en danger. ».


 


Reprenant l'idée que l'Ukraine n'est pas le seul objectif de Vladimir Poutine, il a considéré que l'Europe était donc menacée : « Qu’on le veuille ou non, cette guerre nous concerne aussi, et de son issue dépendra une part de notre avenir. Si, pour certains, le simple fait de défendre une démocratie agressée ne suffit pas à vaincre les réticences, alors qu’ils pensent aux conséquences matérielles et sociales pour la France et les Français. Car oui, une victoire de la Russie aurait des conséquences dévastatrices, y compris pour nous. Je pense à notre approvisionnement en énergie, à notre accès aux céréales, au pouvoir d’achat des Français, qui seraient confrontés à une inflation puissance 10 ; je pense à des mouvements de populations sans précédent, ainsi qu’à la sécurité de l’Europe. Le coût d’une victoire de la Russie serait donc infiniment plus fort que ne l’est celui d’un soutien à l’Ukraine. Ce n’est pas une guerre lointaine qui se joue, c’est la vie quotidienne des Français qui est en première ligne. Je crois, ensuite, qu’il n’y a pas de question plus existentielle que l’avenir de ce conflit. La diplomatie est en danger de mort et elle pourrait être supplantée par un ordre mondial brutal, fondé sur la loi du plus fort et les instincts de prédation ; un ordre mondial vidé de son sens et de ses valeurs, où les démocraties libérales seraient incapables de se défendre ; un ordre mondial où les intérêts purement transactionnels auraient remplacé une communauté de valeurs et de destin. Car derrière l’Ukraine, c’est l’Europe qui est en danger. Que personne ne soit dupe : Vladimir Poutine ne cherche qu’à gagner du temps pour reprendre son souffle, face à une résistance ukrainienne qu’il ne parvient pas à étouffer. Mais l’appétit du Kremlin est insatiable, et personne ne doit douter que derrière l’Ukraine, il y a la Moldavie, la Roumanie, les États baltes, la Pologne, la Finlande, l’Union Européenne et l’OTAN. Le régime russe ne tient désormais que par et pour la guerre. ».

Et de craindre l'effet domino : « Ce n’est pas seulement une affaire européenne : le monde entier regarde l’Ukraine. Si la loi du plus fort et la brutalité l’emportent impunément, qui sait quelles conséquences d’autres puissances pourraient en tirer ? Avec les brutes et les prédateurs, la faiblesse n’a jamais eu d’autre effet que de leur désigner leur prochaine victime. ».

Le rôle de la France est alors essentiel : « La France, qui connaît trop bien le prix de la lâcheté et des paix de dupes, a une responsabilité. Je suis fier, monsieur le Premier Ministre, que votre gouvernement, après les précédents, fasse bloc autour de l’Ukraine. Je suis fier d’avoir défendu et fait adopter à cette tribune, il y a quelques mois, à la place qui est aujourd’hui la vôtre, un accord de sécurité historique entre la France et l’Ukraine. (…) Car ce conflit est aussi un grand révélateur. Ces dernières années, la France n’a jamais failli dans son soutien à l’Ukraine. (…) Nous n’avons jamais hésité une seconde, jamais flanché face à la tentation de la reddition et d’une paix bâclée, dont les Français seraient aussi victimes. Nous n’avons jamais failli, et nous étions bien seuls. Bien seuls quand d’autres refusaient de voter le soutien à l’Ukraine, ici comme au Parlement Européen. Bien seuls quand d’autres revendiquaient leur loyauté envers la Russie ou relativisaient la portée du conflit. Bien seuls face à la légèreté de ceux qui se moquent du destin de la France et de l’Europe, n’ont pas de problème à voir un leader démocratiquement élu insulté en direct et ne s’opposent pas à une victoire russe qui barrerait lourdement la route à l’avenir des Français. ».


Le cœur de l'intervention de Gabriel Attal s'est alors porté sur la condamnation des extrémismes en France qui ont refusé, par leurs votes, de soutenir l'effort de résistance de l'Ukraine. Ce sujet a aussi un rôle de révélation des liens de certains Français avec des puissances étrangères : « Nous sommes dans un moment où le voile se déchire, où l’on s’aperçoit que l’instinct capitulard est en fait bien souvent un esprit de complicité. Nous avons déjà vécu tout cela. ».

Et de s'en prendre clairement à Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon : « Madame Le Pen nous donne des conseils de géostratégie, alors même qu’elle proposait, pendant la campagne présidentielle de 2022, une alliance en matière de défense avec la Russie ; alors même qu’elle disait encore, quelques jours avant l’invasion russe, que ce pays n’envahirait jamais l’Ukraine ; alors même qu’elle estimait, comme Jean-Luc Mélenchon, que les Ukrainiens ne tiendraient ni trois jours ni trois semaines, et voilà trois ans qu’ils résistent héroïquement ! Tout à l’heure, madame Le Pen, quand l’ensemble de l’hémicycle s’est levé pour applaudir et saluer le courage du peuple ukrainien, le seul groupe qui est resté assis et n’a pas applaudi, c’est le vôtre. Votre intervention l’a confirmé : l’Ukraine brûle et vous regardez ailleurs, encore une fois. ». Cette dernière formule, parodiant celle de Jacques Chirac sur l'écologie, a ciblé juste.

D'où la nécessité de l'unité des Français dans ces moments troubles : « Je reste convaincu que, face à la puissance des enjeux, l’esprit de responsabilité peut l’emporter. Le moment appelle l’unité ; il n’est pas trop tard pour se rallier à la seule ligne juste, celle qui assure la protection de la France et la sécurité des Français. (…) Nous vivons une période d’accélération extraordinaire, où les vérités et les certitudes de la veille ne sont pas celles du lendemain, où le Président des États-Unis peut être prêt à signer un traité avec l’Ukraine le matin et à malmener le Président ukrainien l’après-midi, où le Vice-Président d’un pays allié peut venir insulter les Européens sur leur propre sol, et où chaque jour apporte son lot d’incertitudes et de contradictions. ».


Le chef des députés macronistes a ensuite énuméré ses trois convictions sur ce sujet brûlant.

Sa première conviction, c'est le besoin d'un nouveau leader pour le "monde libre", c'est-à-dire qui ne soit plus les États-Unis qui font désormais faux bond : « Les déclarations du Président Trump sont claires : plutôt que les valeurs de démocratie et de liberté, seuls compteront désormais les intérêts économiques américains, et tous ceux qui tenteront d’émettre des réserves seront marginalisés. Il revient donc à la France, aux nations européennes, de prendre enfin la relève, de montrer au monde que tout n’est pas permis, que tout ne se vaut pas, que tout n’est pas deals et transactions. On ne monnaye pas la défense de la liberté, du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. On ne monnaye pas le soutien à la démocratie. L’Europe doit devenir la nouvelle place forte de la liberté et de la démocratie. Cela ne signifie pas tourner le dos aux États-Unis (…), mais prendre notre avenir en main, ne plus avoir peur de notre propre puissance, penser, peser, exister par nous-mêmes. Au-delà d’un nouveau leader, le monde libre a besoin d’une nouvelle grammaire, d’une nouvelle manière de fonctionner, d’une nouvelle organisation. Ces dernières décennies ont été marquées par la lente agonie de certaines de nos organisations multilatérales. Former une communauté nécessite de partager des principes, des lois et des valeurs : le concept de communauté internationale n’existe plus. Nous devons en prendre acte et bâtir une alliance qui ne se borne pas aux frontières de l’Europe, mais rallie tous ceux qui refusent l’avènement de la loi du plus fort, l’effacement de nos valeurs. ».

Sa deuxième conviction, c'est la nécessité de la souveraineté militaire de l'Europe : « Puisque certaines grandes puissances ne comprennent plus que le rapport de force, assumons-le ! (…) Une place à la table des négociations ne se quémande pas, elle s’impose. Il y a urgence à ce que l’Europe accroisse son soutien militaire à l’Ukraine : c’est ainsi que nous pourrons pallier un éventuel désengagement américain, que l’Ukraine, si l’on veut lui imposer une paix factice, pourra continuer de résister. Afin de financer ce soutien supplémentaire, la France doit reconsidérer sa position concernant les avoirs russes gelés. Je comprends les préventions de certains à ce propos : je les ai partagées. Seulement, la situation a changé. La menace a franchi un nouveau palier. Avant d’envisager de faire payer les Français, les Européens, consacrons à l’Ukraine les près de 300 milliards d’euros que représentent ces avoirs ! ».

Il en a profité pour rappeler son soutien à l'adhésion de l'Ukraine à l'Union Européenne, et a même souhaité « accélérer le processus d'adhésion » : « Cette adhésion rapide constituerait un moyen de faire front lors des échanges à venir, ainsi que d’offrir à l’Ukraine, par la suite, des garanties de sécurité. Cela peut se faire de manière adaptée, avec des clauses de sauvegarde pour notre agriculture, par exemple. ».
 


Enfin, la troisième conviction de Gabriel Attal, c'est que l'Europe n'est pas faible : « La période actuelle ne doit pas susciter la tétanie, mais le sursaut. Dans leur aveuglement, les nouveaux empires qui nous mettent au défi ont commis une erreur d’appréciation : ils croient notre vieux continent fatigué de sa propre histoire et n’y voient pas couver une toute jeune communauté, si jeune que, dans sa naïveté, elle a longtemps pris pour argent comptant les discours sur sa faiblesse prodigués à dessein, mais qui vient peut-être de s’éveiller à elle-même, de prendre conscience de sa force, d’assumer son aspiration à l’indépendance, à la souveraineté. Ces dernières semaines, le temps des illusions a enfin cessé. (…) Je veux croire que les nations européennes ont ouvert les yeux. L’Europe n’étant la vassale de personne, notre objectif doit tenir en deux mots : zéro dépendance. Les résultats des récentes élections en Allemagne nous fournissent une occasion historique de progrès en ce sens. Accélérons ce qui a été entamé depuis 2017, notamment à l’initiative de la France, atteignons l’autonomie stratégique ! Instaurons pour l’Union une garantie de sécurité collective qui ne doive rien à qui que ce soit. Accroissons nos dépenses militaires, notre pays le fait depuis huit ans, et excluons-les du calcul des 3% de déficit : c’est la condition d’un réarmement européen. Créons une base d’industrie et de défense européenne bien plus ambitieuse, en travaillant à des programmes industriels communs et en imposant la préférence européenne. N’ayons pas peur, en vue de financer nos programmes de défense, d’émettre de la dette en commun. Face au covid-19, nous avons su le faire ; faisons de même pour préparer l’avenir. (…) Cessons de craindre l’indépendance, construisons-la (…). N’ayons pas peur : l’Europe doit cesser de s’excuser d’exister. Pour réussir, pour s’imposer, elle a toutes les cartes en main. L’Europe a d’abord été une culture, puis une raison ; elle doit devenir une force, une force de paix, de prospérité, une force tranquille. ».

 


En conclusion de son intervention au débat, Gabriel Attal a rappelé le grand courage du peuple ukrainien : « L’heure d’une grande accélération a sonné. Rien n’est écrit : il y a trois ans, beaucoup ne donnaient pas deux semaines à l’Ukraine avant qu’elle ne s’effondre ; elle est toujours debout. Depuis trois ans, malgré la souffrance du deuil, le drame de la destruction et la brutalité de l’invasion, malgré les horreurs des bombardements, l’utilisation du viol comme arme de guerre, les déportations d’enfants vers la Russie, les Ukrainiens résistent héroïquement, nous montrant l’exemple d’un peuple qui se bat pour son pays, bien sûr, mais aussi pour la démocratie, pour la liberté, pour l’Europe. Puissions-nous, nous autres Européens, puiser dans son impressionnant courage la force de réagir, de nous affirmer, ne plus fuir le rapport de force, assumer enfin notre puissance ! L’histoire jugera durement ceux qui ont tourné le dos à l’Ukraine ; elle sera intraitable à l’égard de ceux qui ont cru pouvoir pactiser avec la Russie ; mais être du bon côté de l’histoire ne suffit pas, encore faut-il l’écrire. Nos valeurs ne sont rien si nous ne nous tenons pas prêts à les défendre. Nous ferons bloc : l’avenir de la France, l’avenir de l’Europe en dépend. L’Ukraine vaincra. L’Europe sera. ».

Le lendemain, dans la séance des questions au gouvernement du mardi 4 mars 2025, Gabriel Attal a reparlé de l'Ukraine. La petite différence avec le lundi, c'est que Donald Trump a décidé, entre-temps, d'arrêter brutalement et immédiatement l'aide militaire américaine à l'Ukraine, malgré la promesse des États-Unis et les budgets votés en 2024 au Congrès. Cet événement est peut-être encore plus important que cette discussion médiatisée dans le bureau ovale de la Maison-Blanche le 28 février 2025, car la Russie en a profité pour bombarder les villes ukrainiennes et Donald Trump est pour le coup responsable personnellement de la morts des civils pilonnés.
 


En introduction à sa question, le président du groupe EPR (Ensemble pour la République) à l'Assemblée a évoqué sa récente visite en Ukraine : « Il y a une semaine, à Zaporijjia, un soldat ukrainien me confiait : quand nous sommes au front, nous pensons à notre famille et à la famille européenne. Telle est la réalité de cette guerre : des Ukrainiens qui donnent leurs vies pour défendre leur pays, mais aussi la sécurité d’une Union dont ils ne sont pourtant pas membres ; des Ukrainiens qui remercient la France et le Président de la République pour le soutien constant apporté depuis trois ans, ce qui est un motif de fierté ; mais des Ukrainiens qui redoutent l’avenir, au moment de la suspension de l’aide américaine. ».

Une double question de Gabriel Attal sur les conséquences à court terme du désengagement américain immédiat : « Quels besoins concrets de l’armée ukrainienne identifions-nous ? Quels équipements supplémentaires la France est-elle en mesure de mobiliser immédiatement pour répondre à ces besoins ? ».

Et avant d'attendre la réponse, il a voulu rétablir des affirmations faussées par une inversion complètement scandaleuse : « Je veux revenir sur la complète inversion des valeurs à laquelle nous assistons : du Kremlin au bureau ovale, en passant par madame Le Pen, on cherche à présenter les Ukrainiens comme des va-t-en-guerre. Je veux leur rappeler des choses simples : l’Ukraine veut la paix, la Russie veut l’Ukraine ; l’Ukraine veut la liberté, la Russie veut un empire ; l’Ukraine veut l’Europe, la Russie veut la disloquer. Tourner le dos à l’Ukraine reviendrait à tourner le dos à notre passé comme à notre avenir. Ne nous contentons pas d’être du bon côté de l’histoire, écrivons-la jusqu’au bout ! ». Cette dernière phrase, Gabriel Attal l'avait déjà dite dans son discours du 3 mars 2025 (voir plus haut).
 


Gabriel Attal a aussi affiché un réel désaccord avec le gouvernement mais aussi avec le Président de la République Emmanuel Macron, qui ne veulent pas confisquer les avoirs russes en Europe (on parle de 300 milliards d'euros). Pour l'instant, ces avoirs sont gelés et leurs intérêts sont versés à l'Ukraine. L'ancien jeune Premier Ministre préférerait utiliser ces avoirs à faire payer une aide militaire supplémentaire par les Français. L'exécutif, lui, serait réticent car cela reviendrait à remettre en cause la parole de la France lorsqu'on lui prête de l'argent, ce qui réduirait sa fiabilité et la confiance économique du pays, tout en violant le droit international (toutefois déjà largement violé par Vladimir Poutine en agressant et massacrant le peuple ukrainien).

Dans sa réponse, François Bayrou a approuvé le constat du changement de situation entre le débat de la veille et cette question du jour : « Comme vous l’avez justement indiqué, hier est déjà dépassé : hier nous en étions restés à la manière brutale dont avait été traité Volodymyr Zelensky, Président de l’Ukraine ; nous y avions vu un renversement qui faisait passer notre univers, singulièrement en Europe, d’un monde régi par la loi du plus juste au monde brutal de la loi du plus fort. Vous avez, à juste titre, ajouté que ce qui rend plus insupportable encore la situation, c’est l’inversion de valeurs, au terme de laquelle les États-Unis, qui ont défendu la liberté et les principes démocratiques à nos côtés, en viennent à reprendre les arguments, les mots, les raisonnements de l’envahisseur, de celui qui veut détruire. ».


François Bayrou a aussi applaudi la formule choc de son prédécesseur : « Vous avez eu une formule, que j’ai trouvée excellente : si la Russie arrête de combattre, la guerre est finie ; si l’Ukraine arrête de se battre, l’Ukraine est finie. Cette éloquente mise en perspective résume la situation devant laquelle nous sommes. ».
 


La réponse du gouvernement français à la question des besoins ukrainiens, c'est que l'Europe puisse remplacer les États-Unis dans leur aide militaire : « Vous me demandez ce qui manquera aux forces armées ukrainiennes, si les livraisons d’aide américaines cessent brutalement, elles sont en train de cesser : des trains entiers, chargés de matériels pour l’Ukraine sont arrêtés et interdits de se rendre à destination. Ce qui peut manquer, ce sont les munitions, certains systèmes de renseignement, l’accès à des réseaux et la connectivité, divers soutiens logistiques et de formation. J’ajoute le soutien diplomatique et, peut-être plus important encore, le soutien de peuple à peuple : les Ukrainiens se sentent abandonnés et terriblement seuls. Vous en avez fait l’expérience quand vous vous êtes rendu en Ukraine ces derniers jours. Quel est l’enjeu pour la France ? Il s’agit de réunir tous les moyens possibles pour nous substituer, autant que faire se peut, à une aide internationale venant à s’arrêter. C’est un effort considérable que les Européens, du moins ceux qui sont décidés à aider l’Ukraine, doivent fournir. ».

Et le Premier Ministre de réaffirmer la nécessité d'une véritable défense européennes, indépendante et souveraine : « Au-delà, et tout en souhaitant que notre soutien permette à l’Ukraine de résister, il nous faut bâtir une défense européenne. Nous devons le faire avec nos moyens, dont je me suis efforcé de montrer, hier, qu’ils ne sont pas négligeables, ils sont même, si on les additionne, nettement supérieurs aux capacités russes. La France demande depuis des années, huit années sous la Présidence d’Emmanuel Macron, et même depuis des décennies, si l’on remonte à la Présidence du Général De Gaulle, la création d’une capacité de sécurité et de défense indépendante, qui ne soit pas soumise aux décisions de ses alliés, notamment pour ce qui est des livraisons d’armements et de systèmes de sécurité. C’est donc un immense effort que nous devons fournir. Si je puis vous dire ce que je pense vraiment, cela va nous obliger à réfléchir à notre modèle, à nos priorités, et à voir différemment le monde que nous pensions connaître et dont nous avons découvert, par l’action de ceux que nous croyions être nos alliés, qu’il était plus dangereux que nous ne l’imaginions. ».

Ces jours-là, en tout cas, Gabriel Attal a pu se poser comme celui qui, à l'Assemblée, soutient le plus fermement les forces de résistance ukrainiennes contre l'envahisseur poutinien. Cet affirmation géopolitique aura sans doute des répercussions dans le débat politique intérieure dans les prochaines années. Cela contribuera certainement à raconter une histoire cohérente dans l'objectif ultérieur d'une grande ambition personnelle, voire d'un destin national.



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Sylvain Rakotoarison (04 mars 2025)
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11 mars 2025 2 11 /03 /mars /2025 03:25

« L’effort de construction de cette armée a demandé des investissements considérables, que la nation a supportés avec courage et esprit de continuité. Cet effort, nous l’avons supporté solitairement. Mais la France avait raison ! Elle avait raison ! On le découvre aujourd’hui, au moment même où notre principal allié paraît se ranger aux éléments de langage du pays qui attaque l’Ukraine et menace le reste de l’Europe. Face à cette situation, il est un constat que nous ne faisons pas assez : nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons ; nous sommes forts et nous ne le savons pas. Pire, nous nous comportons comme si nous étions faibles ! » (François Bayrou, le 3 mars 2025 dans l'hémicycle).



 


Le Premier Ministre a répété deux fois "la France avait raison !", sous-entendu, le Président Emmanuel Macron avait raison, raison quand il a augmenté de manière notable le budget de la défense dès 2017, raison quand il a demandé aux Européens dès 2017 de s'occuper eux-mêmes de leur défense, raison quand il a considéré qu'il fallait que l'Europe devienne un géant politique.

Depuis sa nomination à Matignon le 13 décembre 2024, je désespérais un peu de ne pas avoir encore entendu François Bayrou sur les sujets de politique étrangère. C'est vrai qu'il y a la répartition traditionnelle des rôles (à l'Élysée l'extérieur et à Matignon l'intérieur), et que le Premier Ministre, ces trois premiers mois, était particulièrement occupé par la politique intérieure : vote du budget, affaires de sécurité, attentats terroristes, catastrophe à Mayotte, etc. Mais la politique étrangère a toujours été, pour François Bayrou, un sujet d'intérêt et de prédilection au point qu'il avait souhaité être Ministre des Affaires étrangères en 1995, lors de l'élection de Jacques Chirac, et Valéry Giscard d'Estaing, amer que son ancien secrétaire général de l'UDF se soit éloigné de lui, lui a barré la route au profit d'un giscardien pur jus (Hervé de Charette). Il est, de plus, président du Parti démocrate européen (PDE) depuis le 9 décembre 2004, qui regroupe les centristes de l'Union Européenne.

Avec cette volonté d'associer le Parlement à la réflexion de la France sur des sujets actuels, très prégnants, de politique étrangère, en l'occurrence la situation de l'Ukraine et la défense de l'Europe, dans le cadre très institutionnel de l'article 50-1 de la Constitution, à savoir un débat parlementaire dans les deux chambres et aucun vote à son issue, François Bayrou a rattrapé son silence médiatique sur ces sujets et a montré à quel point il était à l'aise, car il est d'abord focalisé sur les valeurs et s'il y a bien un sujet où les valeurs sont importantes, c'est dans les relations internationales, et on le voit bien depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.

Avant le début de la déclaration du gouvernement, la Présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a fait observer une minute de silence aux cinq victimes du cyclone Garance qui a frappé violemment l'île de La Réunion la semaine précédente, et ensuite a salué, à l'occasion de ce débat sur l'Ukraine et l'Europe, la présence dans les tribunes de l'hémicycle d'une délégation du Parlement d'Estonie, conduite par son Président Lauri Hussar, et de l'ambassadeur d'Ukraine en France.


 


Le débat s'est établi deux jours après l'affligeante scène du bureau ovale de la Maison-Blanche où Donald Trump et J. D. Vance ont cherché à humilier Volodymyr Zelensky (parfois sur des critères stupides, comme les vêtements alors que Churchill lui-même se présentait devant le Président des États-Unis à Washington sans costume cravate pendant toute la durée de la guerre), une véritable honte quand on sait à quel point le Président Zelensky est un héros courageux qui a préféré continuer à combattre et à résister contre l'envahisseur poutinien tandis que l'un de ses interlocuteurs américains n'a même été capable de faire son service militaire. La réflexion que doit se poser l'Europe, et avec l'Europe, la France bien sûr, c'est : comment anticiper l'avenir de la défense nationale et européenne si les États-Unis se désengagent complètement de leur alliance militaire avec les Européens ?

 


C'est sur cet événement que François Bayrou a démarré sa déclaration : « Vendredi soir, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, s’est déroulée sous l’objectif des caméras du monde entier une scène sidérante, empreinte de brutalité et de volonté d’humiliation, dont le but était de faire plier par la menace le Président ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il se rende aux exigences de ses agresseurs. Le tout résumé en une phrase devant les caméras de la planète : "Ou bien vous trouvez un accord avec Poutine, ou bien nous vous laissons tomber !". Pour l’honneur de la responsabilité démocratique, de l’Ukraine et, j’ose le dire, de l’Europe, le Président Zelensky n’a pas plié. Je crois que nous pouvons lui manifester notre reconnaissance. ».
 


Puis, il est revenu sur le point de départ historique de la guerre : « Nous connaissons le détonateur de cette séquence dramatique. C’est un événement précisément daté : l’invasion, en vue d’annexion, de l’Ukraine par les forces armées de la Fédération de Russie, sur ordre de Vladimir Poutine, le 24 février 2022. Cette date a marqué un basculement entre deux mondes, aux conséquences planétaires, nous avons été plusieurs à le dire à l’époque. Depuis 1945, nous espérions que l’Europe, l’Occident tout entier, la communauté des nations, vivaient avec l’idée qu’une loi internationale, respectant les principes d’indépendance et de sécurité pour les nations, régissait chaque jour davantage, et régirait un jour, l’ensemble des relations internationales, diplomatiques, de défense, commerciales, financières. Bien sûr, nous le savions, ces règles ont toujours fait l’objet d’une application partielle, imparfaite et souvent partiale, nous n’idéalisons pas le passé. Mais il y avait malgré tout des garde-fous qu’on pouvait évoquer, des traités qu’on pouvait brandir, des résolutions qu’on pouvait invoquer, des engagements qu’on pouvait rappeler. Tout ceci est fini : nous avons basculé dans un autre monde. Beaucoup sont sans voix tant le choc est violent ; beaucoup se trouvent démunis tant tous les dispositifs que nous avions inventés sont démantelés. Nous voici mis en demeure d’accepter des mœurs que nous refusons, de revoir les chartes de nos libertés, de repenser les règles de la démocratie et de la liberté d’expression, d’abandonner notre souci de décence pour accepter l’indécence qu’on voudrait nous imposer. Au fond, nous vivions avec la certitude paisible que le monde serait, sinon de plus en plus démocratique comme l’affirmaient des esprits brillants, mais incurablement optimistes, du moins de plus en plus sûr. C’est dans ce cadre que la prospérité du continent européen, du monde libre et, par contagion, celle de ceux qui vivaient une relation de confiance avec l’Occident, se développaient. Certes, nous savions tous, de grands diplomates français, comme Hubert Védrine, le rappelaient, que les nations n’oublient jamais leurs intérêts, et que, par la force des choses, ces derniers passent souvent avant leurs principes. Mais nous avions, pour les uns, l’espoir, pour les autres, la certitude, qu’au bout du compte demain serait plus sûr qu’aujourd’hui et que les grands ensembles avec qui nous étions en relation en viendraient un jour à respecter plus ou moins les mêmes grands principes. Beaucoup le croyaient pour la Russie, en raison d’une proximité de civilisation et d’une communauté d’histoire. Nous le croyions pour l’Inde, dont la progression démographique, technique et scientifique et la situation de pays non-aligné sont pour la France des éléments de confiance, pour ce pays majeur, nous le croyons encore aujourd’hui. C’était vrai à certains égards pour la Chine : la France n’a jamais oublié qu’elle avait été le premier pays d’Occident à reconnaître et consacrer le statut international de cet immense peuple et acteur politique. Nous l’espérions même du Moyen-Orient tourmenté, dont nous imaginions favoriser l’apaisement avant de voir triompher une paix garantie par la reconnaissance des peuples, des communautés et des cultures. Cette symphonie d’espoirs raisonnables a volé en éclats le 24 février 2022. ».

C'est la Russie de Vladimir Poutine, qu'on croyait se normaliser, qui est retombée dans l'impérialisme le plus bestial : « Qu’un pays, géographiquement le plus vaste de la planète, militairement parmi les mieux armés, en particulier par la détention d’innombrables têtes nucléaires, ayant construit une puissante armée mécanique de blindés aussi bien que d’aviation, une puissance spatiale, un pays riche d’infinies ressources naturelles, qu’un tel pays, membre du Conseil de Sécurité des Nations Unies et à ce titre garant de l’ordre international, décide de se jeter sur un pays voisin, une nation souveraine, de surcroît intimement mêlée à sa propre histoire, pour l’annexer, en prendre le contrôle par la force et en chasser les dirigeants élus, beaucoup d’entre nous, en fait, n’auraient même pas osé l’imaginer. Or cette date de basculement de l’histoire a libéré les démons endormis et a remis en cause, d’abord, le premier principe de sécurité sur lequel étaient fondées nos règles internationales : l’intangibilité des frontières issues de la seconde guerre mondiale. Cette agression a donné le signal qu’attendaient en réalité depuis longtemps des forces tapies dans l’ombre et qui ne rêvaient que de se donner carrière. ».

La guerre en Ukraine a été le signal d'un retour à la loi du plus fort : « Ces forces, il faut les nommer : c’est l’esprit de domination ; c’est l’impérialisme militaire, idéologique, économique, religieux, fanatique, la volonté d’asservir l’autre ; c’est le culte de la force, nous le connaissons bien, car c’est la malédiction qui a coûté des dizaines de millions de morts au XXe siècle, particulièrement en Europe. Sur toute la surface de la planète, le signal donné par cet événement n’a échappé à personne. Qu’importeraient désormais la loi et les principes, les délibérations internationales ? La force seule, la violence et la brutalité suffiraient pour régler les conflits. Il s’agirait seulement de réunir les moyens suffisants, de déployer la violence suffisante, et n’importe quelle cause pourrait désormais l’emporter. C’est la fin de la loi du plus juste, c’est le règne de la loi du plus fort. Ainsi, par la décision d’un seul, devenu chef de meute, sont reniés les efforts consentis depuis plus de cent ans pour arracher l’humanité à sa naturelle inhumanité, en même temps que se trouve reniée la Charte des Nations Unies, dont voici un extrait du préambule : "Nous, peuples des Nations unies, résolus à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances, à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice", prenons l’engagement solennel "qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun". Cette charte a été signée le 26 juin 1945 pour préserver les générations au lendemain de la plus terrible des guerres que l’humanité ait connues, 80 millions de morts et une victime perdue pour toujours, une certaine idée de l’homme partie avec la Shoah, la tentative d’anéantissement programmé, et pour la première fois techno-industriel, de l’un des peuples de notre famille humaine. ».


 


Après Vladimir Poutine, le retour de Donald Trump a renforcé ce sentiment de la fin d'une régulation internationale par le droit et la justice : « Ce qui se matérialisait sous nos yeux, vendredi soir, alors que nous assistions sidérés à cet affrontement, et chacun d’entre nous se souviendra où il se trouvait à ce moment, c’était la rupture de quelque chose d’infiniment précieux, dont nous étions au jour le jour peu conscients, mais qui servait de cadre à notre regard sur le monde, à savoir l’idée de l’identité et de l’unité de l’Occident. Ce que nous avons brutalement découvert depuis quelques semaines, et qui culminait en ce vendredi soir, c’est que nos alliés pouvaient nourrir sur nous et sur notre avenir, sur l’avenir de leurs partenaires et voisins, la même volonté de domination que nous prétendions combattre chez les puissances auxquelles nous voulions résister. Les déclarations du quarante-septième Président des États-Unis à propos du canal de Panama, de Gaza, du Groenland ou même du Canada nous ont, en temps réel, fait mesurer la stupéfiante réalité : il n’y a plus de loi qui s’impose à tous et nous, Français et Européens, ne sommes pas armés pour un temps où la loi est tenue pour négligeable. Comment entendre en 2025 que "personne n’a de droits sur le Groenland" ou que quiconque ayant des droits devrait y renoncer car "nous avons besoin du Groenland pour notre sécurité nationale", s’agissant d’un territoire certes peu peuplé, mais grand comme quatre fois la France, au sous-sol riche des matières premières les plus rares, d’une biodiversité préservée par le climat particulier de cette région, et relevant de surcroît de la souveraineté d’un pays membre de l’OTAN ? ».

 


La France, avec Emmanuel Macron, a été la première nation à poser clairement la question de la souveraineté européenne : « Ces questions, la France les a posées, la première et longtemps la seule parmi les alliés. Tous ceux qui entendaient à chaque rencontre internationale l’appel français à une plus grande autonomie de la défense européenne et qui levaient les yeux au ciel en y voyant une lubie ou la défense d’intérêts égoïstes, tous ceux-là mesurent aujourd’hui combien notre idée d’indépendance était fondée. C’est dans cet esprit que nous avons bâti, nous Français, notre appareil de défense, nos armées, à commencer par la dissuasion nucléaire et par ses vecteurs, ce qui fait, il convient de le rappeler, que notre pays est le seul, à l’égal des très grandes puissances, à disposer d’une armée autonome capable d’affronter la plupart des situations de menace, sans avoir à demander l’autorisation ou la permission de quiconque. ».

Face aux défaillances de notre allié américain, les Européens ne sont pas sans puissance, et François Bayrou a voulu le rappeler très vivement, tel qu'un patriote de cœur le ressent : « Il est un constat que nous ne faisons pas assez : nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons ; nous sommes forts et nous ne le savons pas. (…) Rappelons les chiffres. L’Union Européenne compte à elle seule 450 millions d’habitants ; avec la Grande-Bretagne et la Norvège, nos alliés, nous sommes plus de 520 millions d’habitants, contre 340 millions aux États-Unis et 150 millions en Russie. Le PIB de l’Union, additionné à celui de la Norvège et de la Grande-Bretagne, c’est plus de dix fois le PIB de la Russie. Les dépenses militaires de la Russie sont certes impressionnantes, 40% de son budget et 9% de son PIB, chiffres qui donnent une idée du déséquilibre dans les investissements. Cependant, l’efficacité opérationnelle des armées russes est arrêtée depuis trois ans par l’armée ukrainienne, qu’elles devaient pourtant emporter, affirmaient les dirigeants russes, en trois jours. En comparant les arsenaux, on découvre un rapport de force qui n’est pas du tout celui qui est décrit habituellement. Nos forces armées continentales, additionnées à celles du Royaume-Uni, comptent plus de 2,5 millions de soldats professionnels, soit 25% de plus que les forces russes ; elles disposent de 2 991 avions de combat, deux fois plus que les aviations des États-Unis et de la Russie, et de quelque 15 000 pièces d’artillerie, contre moins de 10 000 pour la Russie et seulement 5 000 pour les États-Unis. Nous, pays européens, sommes une force même si nous ne le savons pas. Sur ce point, je le crois, la France se trouve en accord, pour une fois, avec M. Trump. Si nous sommes forts, nous ne pouvons pas demander à d’autres de nous défendre durablement à notre place. Si nous sommes forts, c’est à nous, Européens, de garantir la sécurité et la défense de l’Europe. ».

 


Et l'urgence, c'est d'abord défendre le peuple ukrainien bombardé matin midi et soir par Vladimir Poutine : « Nous ne pouvons pas laisser le peuple ukrainien sans défense. Nous devons aider l’Ukraine, mobiliser des ressources, partager les matériels, aider à former, sécuriser autant que possible et ne pas accepter qu’un retrait américain condamne à la défaite ce pays défenseur de nos libertés. Si nous demeurions impuissants, si la digue ukrainienne en venait à céder du fait de notre impuissance ou de notre négligence, alors n’en doutez pas : un jour ou l’autre, plus tard ou très tôt, ce sont nos pays, notre Union, qui se trouveraient ciblés. En effet, il est une leçon que l’histoire nous a enseignée et qui n’est jamais démentie : la force brutale ne se borne jamais elle-même. La situation nous dicte donc les questions que nous devons nous poser. Si les alliances se renversent, les Européens ont-ils la volonté de résister ? Ont-ils la volonté de défendre, non pas ce qu’ils ont, mais ce qu’ils sont ? Au fond, la seule question est la plus ancienne question, non seulement du théâtre, mais de la philosophie : to be or not to be ? Cette question ne cesse de se poser depuis des décennies. Beaucoup, chez nous et chez nos partenaires, mettaient en doute la nécessité de l’Union. Avec beaucoup d’autres, je crois et je soutiens que dans les circonstances créées par une telle menace de déstabilisation du monde, l’Union Européenne est pour nous le seul chemin et la seule stratégie possible. ».

L'Union Européenne comme seule réponse possible à l'abandon américain : « C’est la seule réponse possible du point de vue de l’aide à apporter à l’Ukraine, aide financière et logistique, aide à la formation, aide militaire, aide diplomatique. C’est la seule réponse possible en matière commerciale : si nous nous laissons diviser, morceler, jouer les uns contre les autres, nous subirons tous la loi de ceux qui veulent nous affaiblir pour nous soumettre. C’est la seule réponse possible en matière de réarmement scientifique et technologique : si nous ne conduisons pas une telle politique, nous resterons condamnés à former, de la maternelle jusqu’au Prix Nobel ou à la Médaille Fields, les grands découvreurs qui continueront à aller découvrir ailleurs. C’est la seule réponse possible en matière industrielle et agricole pour que nos pays retrouvent leur place de fournisseurs compétitifs sur leurs propres marchés qui, autrefois déstabilisés par l’obsédante question du prix de la main d’œuvre, peuvent dorénavant être rééquilibrés par l’automatisation, la numérisation, l’algorithmique et la robotique. ».

Et François Bayrou d'en venir aux bases gaulliennes de notre France : « L’histoire a montré qu’il y avait au ressaisissement européen une condition impérative : la vitalité et la force de la France. En effet, cette idée d’une Europe indépendante, autonome dans ses décisions, défendant elle-même sa liberté et ses intérêts, c’est la vision française. La France l’a défendue seule, à partir de l’intuition du Général De Gaulle, contre tous ceux que les temps invitaient à la facilité. Voilà ce que le fondateur de la Ve République, avec une prescience qui mérite d’être soulignée, affirmait en 1962 : "On ne sait jamais d’où peut venir la menace, ni d’où peut venir la pression ou le chantage. (…) Il peut se produire des événements fabuleux, des retournements incroyables. Il s’en est produit tellement dans l’histoire !". Après avoir observé qu’on ne sait pas ce qui peut se passer aux États-Unis et énuméré tous les risques de déstabilisation de la société américaine, il conclut : "Voilà pourquoi, tout en demeurant les alliés des Américains, nous voulons cesser de nous en remettre à eux". C’était en 1962. Depuis, la France a défendu cette vision inlassablement, en particulier lors des huit dernières années, par la voix du Président de la République. Elle l’a défendue assez souvent dans la solitude, qui est le lot de ceux dont la pensée est ferme. Je crois que les événements prouvent désormais aux yeux de tous, notamment à ceux de nos partenaires, que cette vision est d’intérêt général. La France peut jouer un rôle central dans l’édification de ce nouveau monde, de ce nouvel équilibre, mais elle ne le fera que si elle recouvre sa confiance et son unité. Tout ce que nous, Français, avons à construire et à reconstruire est la clef de cet autre monde. ».

Pour le chef du gouvernement, il faut surtout garder son sang-froid, chérir l'unité et afficher de la détermination : « Face à la réalité d’un monde inattendu, tellement inattendu que nous ne parvenons même pas à le qualifier proprement, il faut nous organiser avec sang-froid, unité et détermination. Avec sang-froid, car tout affolement serait perçu comme signe de peur et pousserait tous ceux qui ne nous veulent pas de bien à poursuivre leur offensive psychologique, morale et politique, et, qui sait, peut-être un jour militaire, contre nous. Avec unité, car il serait dangereux qu’au-delà des déclarations communes et des résolutions conjointes, chacun aille négocier ici ou là un avenant national avantageux au dépeçage du monde, un sursis à exécution avant vassalisation. Avec détermination, car les mots ne suffiront pas. ».

 


Enfin, François Bayrou a conclu, en bon agrégé de lettres, par une citation de Jules Romains : « L’événement ne nous laisse pas le choix. Dans les premiers mois de la guerre de 1914, dans un recueil composé au temps du fer, du feu et de la mort qu’il a simplement intitulé "Europe", Jules Romains a écrit ces quelques vers : "L’événement est sur nous. Il a le pas et le poil d’une bête quaternaire". Il voulait simplement dire, lui si souvent accusé d’idéalisme, qu’il est des moments où, devant le risque du pire, devant le réveil de forces primitives et archaïques, on n’a pas le choix. Nous n’avons pas vraiment le choix ; mais ce choix, au moins, est entre nos mains, et c’est la première raison d’espérer. ».

Cette déclaration du gouvernement suivie d'un débat parlementaire a marqué la singularité historique que nous sommes en train de vivre. Emmanuel Macron et François Bayrou sont aux commandes de la France et c'est sans aucun doute les meilleurs dirigeants possibles pour une telle transformation d'abord des mentalités plus que du pays qui, déjà, est en cours de transformation. Bien entendu, les extrémismes sont vérolés par les donneurs d'ordre poutiniens mais leur anti-américanisme est désormais en déshérence, puisque même Marine Le Pen a affirmé son très nouvel amour pour notre allié américain. Le retournement est complet, et la crédibilité nulle.

Les deux têtes de l'exécutif ont longtemps analysé les perspectives historiques de ces changements internationaux, et pour François Bayrou, je peux l'attester, il y réfléchit depuis la chute du mur de Berlin : il a toujours fait ses analyses selon la perspective des valeurs que nous voulons défendre, et celle de la paix ne peut se confondre avec une capitulation devant des "chefs de meute", comme il les a décrits si bien ce lundi 3 mars 2025 devant les députés pour certains émus d'entendre de telles paroles. Merci François Bayrou d'avoir mis des mots à ces profonds changements de paradigme, et merci de l'avoir fait dans l'enceinte de la représentation nationale, au cœur de la démocratie française. Et il faudra passer aux actes.



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9 mars 2025 7 09 /03 /mars /2025 03:58

« Le bouclier américain se dérobe, l’Ukraine risque d’être abandonnée et la Russie renforcée. Washington est devenue la cour de Néron : un empereur incendiaire, des courtisans soumis et un bouffon sous kétamine chargé de l’épuration de la fonction publique. » (Claude Malhuret, le 4 mars 2025 au Sénat).



 


Incontestablement, Claude Malhuret y est allé assez fort dès la première phrase de son discours. Président du groupe Les Indépendants, République et Territoires au Sénat, le docteur Claude Malhuret, qui a derrière lui une très longue carrière politique (il était ministre en 1986), et qui vient d'avoir 75 ans ce samedi 8 mars 2025, est un habitué du sens de la formule. Certains aiment faire leur show pour dire n'importe quoi, et plus c'est n'importe quoi, plus c'est un show (autrement dit, plus ça buzze, pour traduire dans la langue d'aujourd'hui).

Alors, évidemment, cela marche mieux avec les populistes, les extrémistes, avec tous ceux qui exagèrent, qui caricaturent, qui extrapolent, qui simplifient, qui falsifient la réalité et les faits, qu'avec des gens raisonnables qui veulent faire entendre le langage de la raison et de la logique. C'est pour cela que l'exercice du sénateur Claude Malhuret est précieux, car des orateurs aussi talentueux que lui sont rares, il faut le saluer.

Il participait au débat parlementaire voulu par le gouvernement sur la situation en Ukraine, qui s'est tenu au Sénat lors de sa séance du mardi 4 mars 2025. Et évidemment, il a évoqué la position de Donald Trump, le Président des États-Unis, qui consiste en un lâchage pur et simple du peuple ukrainien sous les bombes de Vladimir Poutine : « C’est un drame pour le monde libre, mais c’est d’abord un drame pour les États-Unis. Le message de Trump est que rien ne sert d’être son allié puisqu’il ne vous défendra pas, puisqu’il vous imposera plus de droits de douane qu’à ses ennemis et vous menacera de s’emparer de vos territoires tout en soutenant les dictatures qui vous envahissent. Le roi du deal est en train de montrer ce qu’est l’art du deal à plat ventre. Il pense qu’il va intimider la Chine en se couchant devant Poutine, mais Xi Jinping, devant un tel naufrage, est sans doute en train d’accélérer les préparatifs de l’invasion de Taïwan. ». L'art du deal à plat ventre, je souligne.

Et Claude Malhuret d'insister sur cette singularité historique : « Jamais dans l’Histoire un Président des États-Unis n’a capitulé devant l’ennemi. Jamais aucun d’entre eux n’a soutenu un agresseur contre un allié, jamais aucun n’a piétiné la Constitution américaine, pris autant de décrets illégaux, révoqué les juges qui pourraient l’en empêcher, limogé d’un coup l’état-major militaire, affaibli tous les contre-pouvoirs, ou pris le contrôle des réseaux sociaux. Ce n’est pas une dérive illibérale ; c’est un début de confiscation de la démocratie. Rappelons-nous qu’il n’a fallu qu’un mois, trois semaines et deux jours pour mettre à bas la République de Weimar et sa Constitution. J’ai confiance dans la solidité de la démocratie américaine ; d’ailleurs, le pays proteste déjà. Mais, en un mois, Trump a fait plus de mal à l’Amérique qu’il n’en a fait en quatre ans lors de sa précédente Présidence. ».
 


La réalité est là. Donald Trump s'est couché devant Vladimir Poutine : « Nous étions en guerre contre un dictateur ; nous nous battons désormais contre un dictateur soutenu par un traître. Il y a huit jours, au moment même où Trump passait la main dans le dos de Macron à la Maison-Blanche, les États-Unis votaient avec la Russie et la Corée du Nord à l’ONU contre les Européens réclamant le départ des troupes russes. Deux jours plus tard, dans le Bureau ovale, le planqué du service militaire donnait des leçons de morale et de stratégie au héros de guerre Zelensky, avant de le congédier comme un palefrenier en lui ordonnant de se soumettre ou de se démettre. Cette nuit, il a franchi un pas supplémentaire dans l’infamie en stoppant la livraison d’armes pourtant promise. ».

L'enjeu de la résistance de l'Ukraine, c'est l'existence des nations européennes : « La défaite de l’Ukraine serait la défaite de l’Europe. Les pays baltes, la Géorgie, la Moldavie figurent déjà sur la liste. Le but de Poutine est le retour à Yalta, où fut cédée la moitié du continent à Staline. Les pays du Sud attendent l’issue du conflit pour décider s’ils doivent continuer à respecter l’Europe ou s’ils sont désormais libres de la piétiner. Ce que veut Poutine, c’est la fin de l’ordre mis en place par les États-Unis et leurs alliés il y a quatre-vingts ans, lequel avait pour premier principe l’interdiction d’acquérir des territoires par la force. Cette idée est à la source même de l’ONU, au sein de laquelle les Américains votent aujourd’hui en faveur de l’agresseur, et contre l’agressé. En effet, la vision trumpienne coïncide avec celle de Poutine : elle défend un retour aux sphères d’influence, les grandes puissances dictant le sort des petits pays. À moi, le Groenland, le Panama et le Canada ; à toi, l’Ukraine, les Pays baltes et l’Europe de l’Est ; à lui, Taïwan et la mer de Chine… On appelle cela, dans les soirées des oligarques du golf de Mar-a-Lago, le "réalisme diplomatique"… ».

À cet égard, Claude Malhuret a rejoint la position de l'ancien président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée Jean-Louis Bourlanges, interrogé le 3 mars 2025 sur France 5, qui remarquait quatre points communs entre Donald Trump, Vladimir Poutine et Xi Jinping : d'abord, leur autocratisme, la volonté d'avoir un chef qui contrôle tout, comme un parrain clanique ; ensuite, la pratique d'un nationalisme impérial, à savoir l'idée que le monde se réduit à quelques blocs qui se laisseraient faire ce qu'ils veulent dans leur voisinage proche ; troisième tendance, le rejet de tout État de droit, tout contre-pouvoir, musellement de la presse, des réseaux sociaux, de toute opposition ; enfin, quatrième point commun, l'asservissement technologique (en particulier numérique) des peuples, leur surveillance, leur contrôle, leur neutralisation irréversible.

Le sénateur Malhuret a alors abordé la réaction de l'Europe : « Nous sommes donc seuls. Mais le discours selon lequel on ne peut résister à Poutine est faux. Contrairement à ce qu’affirme la propagande du Kremlin, la Russie va mal. En trois ans, la soi-disant deuxième armée du monde n’a réussi à grappiller que des miettes d’un pays trois fois moins peuplé. Les taux d’intérêt à 25%, l’effondrement des réserves de devises et d’or, l’écroulement démographique montrent que ce pays est au bord du gouffre. Le coup de pouce américain à Poutine est la plus grande erreur stratégique jamais commise lors d’une guerre. Le choc est violent, mais il a une vertu : les Européens sortent du déni. Ils ont compris en un jour, à Munich, que la survie de l’Ukraine et l’avenir de l’Europe sont entre leurs mains, et que trois impératifs s’imposent à eux. Tout d’abord, ils devront accélérer la livraison de l’aide militaire à l’Ukraine pour compenser le lâchage américain, faire en sorte que celle-ci tienne et, bien sûr, imposer sa présence et celle de l’Europe dans toute négociation. Cela coûtera cher. Il faudra donc en finir avec le tabou de l’utilisation des avoirs russes gelés. Il faudra aussi contourner les complices de Moscou à l’intérieur même de l’Europe, en formant une coalition des seuls pays volontaires, avec bien sûr le Royaume-Uni. Ensuite, il faudra exiger de tout accord qu’il prévoie le retour des enfants kidnappés et des prisonniers, et qu’il comporte la garantie d’une sécurité absolue. Après Budapest, la Géorgie et Minsk, nous savons ce que valent les accords avec Poutine. Cette garantie passe par une force militaire suffisante pour empêcher toute nouvelle invasion. Enfin, et c’est le plus urgent, parce c’est ce qui prendra le plus de temps, il faudra rebâtir la défense européenne, négligée au profit du parapluie américain depuis 1945 et sabordée depuis la chute du mur de Berlin. C’est une tâche herculéenne, mais c’est sur le fondement de la réussite ou de l’échec de cette construction que seront jugés dans les livres d’histoire les dirigeants de l’Europe démocratique d’aujourd’hui. ».


 


En outre, il a constaté avec joie que même l'Allemagne commence à dire que la France avait raison : « Friedrich Merz vient de déclarer que l’Europe avait besoin de sa propre alliance militaire. C’est reconnaître que la France avait raison depuis des décennies en plaidant pour une autonomie stratégique. Il reste à la construire. Il faudra investir massivement et renforcer le Fonds européen de défense, hors critères de Maastricht, harmoniser les systèmes d’armes et de munitions, accélérer l’entrée dans l’Union de l’Ukraine, laquelle possède aujourd’hui la première armée européenne, repenser la place et les conditions de la dissuasion nucléaire à partir des capacités française et britannique, et relancer les projets de bouclier antimissile et de satellite européens. Le plan annoncé hier par Ursula von der Leyen est un très bon point de départ. Et il faudra beaucoup plus. L’Europe ne redeviendra une puissance militaire qu’en redevenant une puissance industrielle. En un mot, il faudra appliquer le rapport Draghi, et pour de bon. ».

Au-delà de la stratégie, des investissements, de la réindustrialisation, il y a l'aspect moral : « Le vrai réarmement de l’Europe, c’est son réarmement moral. Nous devons convaincre l’opinion face à la lassitude et à la peur de la guerre, et, surtout, face aux comparses de Poutine, l’extrême droite et l’extrême gauche. Ces derniers ont encore plaidé hier, à l’Assemblée Nationale, devant vous, monsieur le Premier Ministre, contre l’unité européenne et la défense européenne. Ils disent vouloir la paix. Ce que ni eux ni Trump ne disent, c’est que leur paix, c’est la capitulation, la paix de la défaite, le remplacement de "De Gaulle-Zelensky" par un "Pétain ukrainien" à la botte de Poutine, la paix des collabos qui ont refusé depuis trois ans toute aide aux Ukrainiens ! Le risque est grand, mais l’humiliation publique de Zelensky et toutes les décisions folles prises depuis un mois ont fini par faire réagir les Américains. Les sondages sont en chute libre, les élus républicains sont accueillis par des foules hostiles dans leurs circonscriptions. Même Fox News devient critique ! Les trumpistes ne sont plus en majesté. Ils contrôlent certes l’exécutif, le Parlement, la Cour suprême et les réseaux sociaux, mais, dans l’histoire américaine, les partisans de la liberté l’ont toujours emporté. Ils commencent à relever la tête… ».

 


Enfin, la conclusion, sans ambiguïté, de cet éloquent exercice de géopolitique et d'histoire des relations internationales : « Le sort de l’Ukraine se joue dans les tranchées, mais il dépend aussi de ceux qui, aux États-Unis, veulent défendre la démocratie et, ici, de notre capacité à unir les Européens, à trouver les moyens de leur défense commune et à refaire de l’Europe la puissance qu’elle fut un jour et qu’elle hésite à redevenir. Nos parents ont vaincu le fascisme et le communisme au prix de tous les sacrifices. La tâche de notre génération est de vaincre les totalitarismes du XXIe siècle. Vive l’Ukraine libre, vive l’Europe démocratique ! ».

Faut-il alors s'étonner que cet excellent exposé ait été rediffusé aux États-Unis, sur des chaînes comme CNN, et que les vidéos de cette intervention orale aient parfois obtenu plus de 3 millions de vues ? Claude Malhuret, qui a présidé Médecin sans frontières il y a quelque temps, va devenir la coqueluche des citoyens américains sidérés par les premières semaines du mandat de Donald Trump. Il est temps que l'opposition démocrate se réveille et défende, un peu plus vaillamment qu'aujourd'hui, les valeurs fondamentales de la démocratie et de l'État de droit.

À court terme, la vie des Ukrainiens en dépend. Le journaliste Jean Quatremer disait à juste titre ce vendredi 7 mars 2025 sur LCI que chaque mort de civil ukrainien depuis le début de la semaine était de la responsabilité de Donald Trump qui a retiré brutalement l'aide des renseignements américains pour les antimissiles : « Chaque mort supplémentaire est imputable à Donald Trump ! (…) Il faut dire les choses clairement. L'Ukraine se fait pilonner aujourd'hui avec l'aide des Américains, puisqu'ils ont coupé le robinet des renseignements qui permettaient d'intercepter les missiles. ».

À plus long terme, c'est la défense et la protection de l'Europe qui sont en jeu. Merci Claude Malhuret d'avoir exprimé aussi clairement et synthétiquement ce qu'il fallait analyser dans cette situation internationale devenue de plus en plus compliquée. Au fait, vous savez qui est le bouffon de Néron ? Selon certains, il aurait bloqué le compte Twitter du sénateur Malhuret, mais ce dernier aurait lui-même démenti l'information.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (08 mars 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
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