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8 juin 2012 5 08 /06 /juin /2012 07:59

Dans une atmosphère de faible mobilisation, les élections législatives vont avoir lieu les 10 et 17 juin 2012. Un scrutin essentiel, tout autant que l’élection présidentielle, contrairement à ce qui se dit parfois, qui sera soit la confirmation soit au contraire la compensation du résultat du 6 mai 2012.


yartiCoha01Les risques d’une nouvelle cohabitation sont-ils élevés ? Sans doute pas, mais de quelle cohabitation parlons-nous ?


Un vrai régime parlementaire

L’existence même des trois précédentes cohabitations (1986-1988, 1993-1995 et 1997-2002) démontre pour les plus sceptiques que la Ve République est bel et bien un régime parlementaire puisque le pouvoir exécutif, celui qui est opérationnel, celui qui est aux commandes des administrations de l’État, est bien dépendant de la majorité parlementaire et pas de la majorité présidentielle. Enfin, c’est ce que l’expérience a montré depuis 1958. Rien n’interdit cependant d’innover…

Ce que certains peuvent contester en revanche, c’est que le pli présidentiel est suffisamment large pour que la mécanique électorale favorise, tant dans les candidatures que dans les élections, l’émergence au Palais-Bourbon d’une majorité totalement conforme aux aspirations élyséennes. Et cela dès novembre 1962.

Je ne répéterai d’ailleurs jamais assez que la mise en place du quinquennat (approuvé par référendum le 24 septembre 2000) et la concordance présidentielle/législatives depuis 2002 (mais aussi en 1981 et en 1988) ont rendu les parlementaires bien plus "dociles" aux "sollicitations" présidentielles.


Des sondages plutôt rassurants pour l’Élysée

Pour ce printemps 2012, les sondages restent relativement incertains sur l’issue des élections législatives. Si la mécanique présidentielle et la logique institutionnelle jouent à l’évidence en faveur du Parti socialiste, les études d’opinion montrent que les deux grands partis restent au coude à coudre.

En effet, les intentions de vote pour l’UMP et pour le PS sont situées entre 30% et 35%, soit bien plus que leurs candidats respectifs à l’élection présidentielle du 22 avril 2012, et avec souvent un écart de 1% ou 1,5% seulement, soit à peu près la même différence qu’au premier tour de l’élection présidentielle.

Alors que le Front de gauche et les écologistes sont déterminés à faire élire des candidats de gauche, à droite, le FN risque de troubler le jeu même si l’hypothèse de triangulaires ne concernera qu’un faible nombre de circonscriptions (pour se maintenir au second tour, un candidat doit recueillir au moins 12,5% des électeurs inscrits, ce qui fait que pour une abstention de l’ordre de 40%, cas du 10 juin 2007, il faut qu’il obtienne au moins 21% des suffrages exprimés, ce qui est un seuil élevé bien que pas insurmontable).

L’essentiel, pour ces élections législatives, n’est évidemment pas le pourcentage des suffrages mais le nombre de sièges et cette double question : le PS arrivera-t-il à obtenir des électeurs une majorité à l’Assemblée Nationale ? et si oui, sera-t-elle absolue, seul, avec ses alliés écologistes remuants, avec le Front de gauche ?


Détenir tous les pouvoirs ?

Bénéficiant d’une popularité non négligeable de début de mandat (voir en particulier ce sondage), François Hollande devrait avoir toutes les cartes en main pour appliquer (ou pas) son programme présidentiel (téléchargeable ici).

Ce serait d’ailleurs une première historique en France que d’avoir la gauche, et plus particulièrement, le Parti socialiste, à la tête de toutes les institutions de la République : Élysée, gouvernement, Assemblée Nationale, Sénat, quasi-totalité des conseils régionaux et grande majorité des conseils généraux, des grandes villes et des regroupements de communes.

Au contraire de ce qu’évoque l’UMP pendant cette courte et inaudible campagne des législatives, cela ne me choque pas vraiment, pour au moins deux raisons : d’une part, personne ne semblait vraiment choqué lorsque c’était la droite qui avait toutes les commandes ; d’autre part, c’est le jeu démocratique des alternances, et je ne doute pas que 2014 sera une année cruciale pour le nouveau pouvoir et qu’il aura bien du mal à préserver ses conquêtes locales de ses années d’opposition.


Pas de nuages à gauche

Il est clair que François Hollande n’aura aucun souci du côté du Front de gauche : après lui avoir apporté son soutien inconditionnel au second tour, Jean-Luc Mélenchon a clairement indiqué que "ses" députés ne voteraient jamais une motion de censure en joignant leurs voix à celles de l’UMP. Le gouvernement socialiste peut donc compter sur la "bienveillante neutralité" de l’aile gauche de la prochaine législature pour continuer à gouverner (quelles que soient les vociférations futures de l’ancien candidat soutenu par les communistes).

Donc, même si le PS ou l’alliance PS-EELV n’avait qu’une majorité relative, la gauche pourrait gouverner sans trop de souci mais avec sans doute plus de discussions à gauche. Après tout, François Mitterrand était au contraire très heureux de cette majorité relative sortie des urnes de juin 1988, et les fins connaisseurs savent bien qu’une majorité trop large peut engendrer beaucoup de contestations en son sein (voir par exemple la législature entre 1993 et 1997) alors qu’une majorité très serrée la rend soudée et unie (comme entre 1986 et 1988).


Et si l’UMP gagnait quand même ?

Il serait cependant intéressant de nous arrêter à un cas, sûrement pas le plus probable, mais qui n’est pas, non plus, à exclure : une victoire de l’UMP et de ses alliés aux élections législatives. Dire victoire signifie qu’il y aurait plus de députés UMP et alliés que de députés PS et alliés. Que la majorité soit relative ou absolue.

Jusqu’à maintenant, depuis 1958, cette déconnexion des deux majorités s’est produite trois fois. En mars 1986, en mars 1993 et en juin 1997.


Dyslexie institutionnelle

Dans les deux premiers cas, une majorité de centre droit avait gagné face à un Président de gauche et dans le troisième cas, c’était l’inverse, une majorité de gauche avait gagné face à un Président de droite. Dans les trois cas, inaugurés par François Mitterrand, un gouvernement de cohabitation a été nommé, à savoir, un gouvernement émanant de la majorité parlementaire et cohabitant avec un Président de la République de bord opposé. C’est désolant, sur le principe, qu’un Président élu au suffrage universel direct puisse ainsi être en stand-by, inerte, inactif, immobile, pendant une certaine période.

Trois cas ? En fait, il y en a eu quatre, de cas de cohabitation. Une cohabitation invisible, indolore. La législature 1958-1962 n’était pas totalement aux ordres de De Gaulle. Au contraire, le 5 octobre 1962, ce fut l’unique occasion où une majorité des députés a voté une motion de censure contre le gouvernement (pour protester contre l’institution de l’élection du Président de la République au suffrage universel direct). Et la résolution de cette crise fut purement et simplement la dissolution de cette majorité contestataire. Depuis lors, aucune majorité n’a été réunie pour le vote d’une motion de censure, même lors des pires guerres intestines menées par Jacques Chirac contre les gouvernements dirigés par Raymond Barre.


Une cohabitation longue

La dernière cohabitation n’a pas été comme les deux précédentes : alors que les deux premières finissaient un septennat sur une durée relativement courte (deux ans), la cohabitation Jospin a duré… cinq ans ! le temps d’une législature normale. Pourquoi le Président Chirac n’a-t-il pas cherché à dissoudre avant 2002 ? Personne ne saura répondre, si ce n’est par des considérations purement électoralistes.

On cite d’ailleurs régulièrement ce petit mot d’humour : François Mitterrand a inventé le septennat de cinq ans …tandis que Jacques Chirac a inventé le septennat de deux ans !


Le quinquennat, fausse solution

En fait, Jacques Chirac a même enterré le septennat. Le quinquennat a d’ailleurs été introduit en partie pour en finir définitivement avec les cohabitations, considérant que les électeurs ne voudraient pas se dédire à un mois d’intervalle. Mais ce sont des considérations assez hasardeuses.

D’une part, rien n’indique que la concordance résistera au temps puisqu’elle est survenue par un simple hasard des calendriers. Un Président pourrait écourter son mandat pour une raison ou une autre, démission ou décès, cela s’est déjà produit deux fois en cinquante ans, et un Président pourrait également dissoudre l’Assemblée Nationale, cela s’est déjà produit cinq fois en cinquante ans, soit, en moyenne, une chance tous les sept ans de rompre avec le rythme régulier.

D’autre part, les électeurs, dans leur grand sagesse, pourrait un jour préférer au contraire équilibrer les pouvoirs entre les deux grands partis.


Des gouvernements minoritaires, il y en a déjà eu…

Comme on peut le remarquer depuis le début de la Ve République, dans quatre cas, le gouvernement ne bénéficiait pas de majorité à l’Assemblée Nationale : les gouvernements Pompidou I en octobre 1962, Mauroy I en mai 1981, Rocard I en mai 1988 et Ayrault I en mai 2012.

Pour les trois derniers, ce n’était pas très important puisque des élections législatives allaient se dérouler quelques semaines plus tard (et les députés ne siégeaient plus en session). Quant au premier cas, il a abouti à une dissolution le 10 octobre 1962.

Les quatre Premiers Ministres concernés ont d’ailleurs été tous les quatre reconduits à Matignon une fois élue une nouvelle majorité conforme à leurs vues. Les éventuels scrupules des constitutionnalistes (surtout en automne 1962) furent donc simplement balayés par la volonté populaire.


Qui serait à Matignon en cas de victoire de l’UMP aux législatives ?

Avec le recul des expériecences précédentes, on pourrait donc imaginer qu’en cas de victoire de l’UMP aux élections législatives de juin 2012, une nouvelle cohabitation se déroulerait, au moins dans un premier temps. Avec un Premier Ministre UMP qui serait très probablement (quoi qu’on en dise) Jean-François Copé (parce que François Fillon n’a plus aucune envie de faire du rab). Dans le même ordre d’idées, François Hollande lui aussi s’était imaginé comme un Premier Ministre potentiel en juin 2002 après l’échec de Lionel Jospin et la réélection de Jacques Chirac.

yartiCoha02


Le précédent historique de 1986

Pourtant, dans les textes, rien n’oblige le Président de la République à désigner un Premier Ministre issu de la majorité parlementaire. Rien. Absolument rien. Si c’est ce qu’il s’est passé pour les trois premières cohabitations, c’est parce que François Mitterrand avait pris cette décision historique et que son successeur l’a suivi par la suite. Valéry Giscard d’Estaing avait indiqué qu’il aurait agi de la sorte le cas échéant (en cas de victoire de la gauche) en mars 1978, envisageant de nommer François Mitterrand à Matignon et de s’exiler au château de Rambouillet dans l’attente de jours meilleurs.

Mais un autre Président aurait pu prendre une autre décision. Par exemple, démissionner, considérant qu’il n’avait plus le soutien du peuple (cela aurait été probablement le cas de De Gaulle même si ce n’était pas certain, en particulier en 1967).


Un nouveau précédent

Or, en 2012, une situation de cohabitation dans une double élection serait d’un nouveau type, une troisième configuration : elle s’installerait en début de quinquennat. Cela voudrait dire que la légitimité du Président de la République serait aussi fraîche, donc aussi forte, que la légitimité de la majorité parlementaire nouvelle.

Rien n’empêcherait donc le Président François Hollande de suivre la troisième possibilité qui s’était offerte au Président François Mitterrand le soir du 16 mars 1986 : ni démission, ni nomination à Matignon du chef de la nouvelle majorité …mais plutôt, nomination d’un gouvernement minoritaire. L’aspect présidentiel du régime serait alors accentué.

Oui, rien n’empêcherait finalement François Hollande de reconduire Jean-Marc Ayrault à Matignon, même sans majorité parlementaire, et que la cohabitation ne se passe plus entre l’Élysée et Matignon mais plutôt entre Matignon et le Palais-Bourbon.


Politiquement difficile à défendre

J’imagine que cette situation (gouvernement minoritaire) serait politiquement difficile à tenir dans la durée. Elle pourrait néanmoins être défendable avec des objectifs précis de résolution de la crise du surendettement de l’État (l’objectif du déficit 0% en 2017 est défendu autant par le PS que par l’UMP et le MoDem).

Sous la IIIe République, elle n’a tenu que deux jours, entre le 8 et le 10 juin 1924. Alors que le Président de la République Alexandre Millerand avait fait ouvertement campagne pour les candidats du Bloc national (droite), en particulier lors de son discours à Évreux le 14 octobwre 1923, ce fut le bord opposé, le Cartel des gauches (radicaux et SFIO) qui, sous la direction d’Édouard Herriot, avait remporté les élections législatives des 11 et 25 mai 1924. Alexandre Millerand refusa de s’incliner et nomma à la tête du gouvernement français le Ministre des Finances du gouvernement sortant (dirigé par Raymond Poincaré), Frédéric François-Marsal. Finalement, Alexandre Millerand démissionna le 10 juin et Édouard Herriot fut nommé Président du Conseil le 15 juin 1924.


Des possibilités novatrices ?

La différence entre la Ve République et les précédentes, c’est que pour renverser le gouvernement, il ne suffit plus d’avoir une majorité contre, il faut aussi pouvoir rassembler une majorité pour une autre solution. Cela explique comment les gouvernements Rocard, Cresson et Bérégovoy ont tenu sans majorité absolue, ce qui aurait été impossible sous la III e ou la IV e République.

Il y a aussi quelques outils utiles pour imposer le point de vue gouvernemental à une assemblée assez peu disposée à l’égard du pouvoir exécutif, comme l’article 49-3 (quoique son utilisation a été strictement limitée par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008).


Séparation des pouvoirs ou présidentialisation ?

Cette hypothèse d’un gouvernement minoritaire, que je ne souhaite pas, serait le meilleur moyen de renforcer la séparation des pouvoirs (exécutif et législatif) et surtout, un pas supplémentaire d’un processus d’américanisation des institutions qui a déjà commencé, à partir d’une forte bipolarisation du paysage politique, de l’institution du quinquennat, de la concordance entre les élection présidentielle et législatives, par la réforme du 23 juillet 2008 qui donne plus de pouvoir au Parlement, et enfin, par la nomination d’un seul Premier Ministre au cours du mandat présidentiel précédent.

Et qui peut aujourd’hui affirmer que, libérés du joug sarkozyste, quelques députés de centre droit, radicaux ou centristes, alliés traditionnels de l’UMP, ne verraient pas d’un bon œil l’utilité d’une (toujours) "bienveillante neutralité" pour éviter à tout prix une cohabitation qui handicaperait le pays en pleine tourmente financière ?


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (8 juin 2012)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le quinquennat.
L’élection présidentielle.
François Hollande.
Jean-François Copé.
Gouvernement Ayrault I.
Programme du candidat Hollande (à télécharger).
Sondage encourageant pour le nouveau pouvoir (à télécharger).

yartiCoha03



http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2012-vers-la-118136

 




 

 

 

 

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4 juin 2012 1 04 /06 /juin /2012 16:42

Raymond Depardon a tiré le portrait officiel du nouveau Président de la République. C’est tout nouveau et cela va rester pendant cinq ans.


blogHollandePortraitOfficiel20120529C’est tiré ! Le portrait officiel du septième Président de la Ve République, François Hollande, est désormais public ce lundi 4 juin 2012. Il arrive avec deux semaines de retard par rapport à son prédécesseur Nicolas Sarkozy.

Le portrait officiel est une photographie importante puisqu’elle va se retrouver dans toutes les mairies de France, et on sait que le pays en compte beaucoup, dans les trente-six mille six cent soixante-quatre communes de France, ainsi que dans toutes les institutions nationales, commissariats, écoles, préfectures, ambassades etc.

La séance de photographie a eu lieu dans la matinée du mardi 29 mai 2012 dans les jardins de l’Élysée et le cliché a été réalisé par Raymond Depardon (bientôt 70 ans) qui a été le premier réalisateur, en France, à avoir filmé un documentaire de campagne électorale, celle de Valéry Giscard d’Estaing en 1974, à la demande du candidat de l’époque, et le film n’a pu être diffusé, toujours à cause du devenu Président, qu’en février 2002. Il fut ensuite l’inspirateur des excellents documentaires politiques de Serge Moati (notamment dans les campagnes présidentielles depuis plusieurs décennies).

blogDepardonRaymond

François Hollande est sans doute, dans ce portrait officiel, le Président le moins pompeux et celui qui a le moins posé. Comme Jacques Chirac, photographié en mai 1995 par Bettina Rheims (42 ans à l’époque, une artiste du nu féminin), il a été pris dans les jardins mais avec un arrière-plan plus flou et confus, représentant son palais. Comme pour Jacques Chirac (et ses prédécesseurs), aucun drapeau n’est visible. Bettina Rheims a été un peu déçue par sa photo qui ne lui ressemblait pas beaucoup.

blogChiracPortraitOfficiel1995

Son prédécesseur direct, Nicolas Sarkozy, avait étonné lorsque son portrait officiel a été rendu public le 22 mai 2007. Réalisé dans l’après-midi du 21 mai 2007 par le photographe dit people Philippe Warrin (44 ans en 2007), très fier de son travail présidentiel, le portrait était très conventionnel, très classique pour un Président qui se plaisait à vouloir transgresser. En effet, le cliché le représentait debout dans la bibliothèque de l’Élysée, et la seule innovation correspondait au fait que deux drapeaux étaient placés à l’arrière-plan, le drapeau tricolore, bien sûr, et le drapeau européen.

blogSarkozyPortraitOfficiel20070521li

À part Nicolas Sarkozy, seul Valéry Giscard d’Estaing s’est fait, lui aussi, photographier devant un drapeau tricolore. Valéry Giscard d’Estaing a été probablement le plus novateur dans son portrait officiel en mai 1974. La première nouveauté qui sera conservée par tous ses prédécesseur, ce fut son habit. Il a définitivement abandonné l’habit de cérémonie avec le cordon rouge de Grand Maître de la Légion d’honneur pour garder un costume de ville simple. Mais une autre innovation qui ne sera reprise que par deux autres de ses prédécesseurs, c’est le fait de faire le portrait à l’extérieur du Palais. Réalisé par Jacques-Henri Lartigue (1894-1986), qui avait presque 80 ans à l’époque, le cliché a été raté, mal cadré sur le perron de l’Élysée, à tel point qu’il a fallu rajouter à la main le rouge du drapeau tricolore et le visage en trop gros plan. Lartigue, qui n’était pas un portraitiste, voulait avant tout saisir un mouvement dans la photo.

blogGiscarddEstaingPortraitOfficiel1974

Cette mésaventure a replacé François Mitterrand dans le plus grand classicisme des portraits officiels. Voulant toujours imiter le comportement de De Gaulle, François Mitterrand fut donc photographié en mai 1981 par Gisèle Freund (1908-2000), qui avait 72 ans à l’époque, dans la bibliothèque de l’Élysée. Les originalités majeures furent que le Président tenait dans ses mains un livre ouvert, le livre était, je crois, "Les Essais" de Montaigne, et qu’il n’était visible qu’en buste et pas en pieds.

blogMitterrandPortraitOfficiel1981

Les deux premiers Présidents de la Ve République, Charles De Gaulle (photographié en janvier 1959 par Jean-Marie Marcel qui l’avait déjà pris en photo en 1945 dans une pose décontractée, avec une cigarette aux lèvres) et Georges Pompidou (photographié par François Pagès, de "Paris Match"), avaient réalisé des portraits officiels très classiques dans la stricte continuité des deux Républiques précédentes depuis 1871, à l’instar de René Coty.

blogDeGaullePortraitOfficiel1959

À l’innovation près que les clichés étaient désormais en couleurs et que les Présidents ne portaient plus l’habit présidentiel officiel tout en portant toutefois les décorations officielles, au contraire de leurs successeurs.

blogPompidouPortraitOfficiel1969


Revenons au portrait officiel du nouveau Président François Hollande.

Il étonne par sa relative spontanéité. On a l’impression qu’il est pris en action, en train de marcher. Le cadrage est relativement mauvais, le fond n’est pas bien défini et surtout, aucune symétrie n’est décelée. Bien que de taille assez moyenne, François Hollande ne semble pas savoir quoi faire de ses deux mains qu’il installe parallèlement à ses jambes si bien qu’on pourrait croire qu’il va dégainer dans un duel de western, avec la musique d’Ennio Moricone. Son seul prédécesseur à avoir adopté la même atmosphère champêtre, Jacques Chirac, avait maladroitement résolu ce problème en mettant ses mains derrière le dos, ce qui faisait un peu le genre touriste qui se fait photographier devant un monument historique ou encore épicier posant devant son épicerie.

La grande étendue de verdure derrière lui paraît renforcer l’impression qu’il est désormais seul aux commandes, dans cette solitude voire cet isolement du pouvoir suprême. Peut-être que ce vert persistant est également un clin d’œil à ses remuants alliés gouvernementaux pour leur assurer qu’il entendait prendre en compte l’environnement dans son action et sa réflexion. La position à l’ombre des arbres, meilleure qu’en plein soleil pour le visage, donne également une impression de pique-nique dans les champs.

Au final, François Hollande ne s’est pas senti le besoin, comme Nicolas Sarkozy, de parfaire sa stature présidentielle en se mettant dans une position de Musée Grévin, avec la grande solennité des dorures élyséennes. Mais on pourrait cependant regretter l’absence de drapeaux national et européen, lui qui, pourtant, à tous ses nombreux meetings de campagne, pendant trois mois et demi, n’avait pas lésiné à reproduire sans cesse une tribune présidentielle avec ces étendards.

Ce choix de l’extérieur est clairement une attention portée à Jacques Chirac, qui fut, comme lui, député de Corrèze et président du conseil général de Corrèze. Bizarrement, les rivaux de juin 1981 (François Hollande s’était confronté à Jacques Chirac aux législatives) ont su, au fil de ces trois décennies, nourrir une estime réciproque à tel point que certains proches auraient affirmé que Jacques Chirac aurait voulu voter pour le nouveau Président.

À la vision de ce portrait, comme avec Jacques Chirac, le citoyen français a maintenant envie de dire à François Hollande, nouveau locataire pour un bail de cinq ans : bienvenu à l’Élysée !

Et maintenant, au boulot !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (4 juin 2012)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Portrait officiel de François Hollande (29 mai 2012).
Portrait officiel de Nicolas Sarkozy (21 mai 2007).
François Hollande.
Nicolas Sarkozy.
Jacques Chirac.
François Mitterrand.
Valéry Giscard d’Estaing.
Georges Pompidou.
Charles De Gaulle.
René Coty.

blogHollandePortraitOfficiel20120529 


http://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/portrait-officiel-francois-117940

 

 

 

 

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4 juin 2012 1 04 /06 /juin /2012 04:56

Portrait officiel de François Hollande, Président de la République française (2012-2017).

blogHollandePortraitOfficiel20120529

La photographie a été réalisée dans le parc du Palais de l'Élysée le mardi 29 mai 2012 dans la matinée par Raymond Depardon. François Hollande a été pris dans la verdure comme Jacques Chirac (1995-2007), en simple costume de ville comme depuis Valéry Giscard d'Estaing (1974-1981), hors de la bibliothèque de l'Élysée (contrairement à tous ses autres prédécesseurs qui n'ont pas été cités).

SR

 

 

 

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17 mai 2012 4 17 /05 /mai /2012 12:58

Photographie du Gouvernement Ayrault I à l'issue du conseil des ministres du 17 mai 2012.


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Ce gouvernement nommé par le Président de la République François Hollande a donné sa démission le 18 juin 2012.

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16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 19:32

Composition du premier Gouvernement de Jean-Marc Ayrault le 16 mai 2012.


yartiAyrault01

Nommé ce mercredi 16 mai 2012 à 19h31 par le Président de la République François Hollande, le gouvernement est composé comme suit.


Premier Ministre : Jean-Marc Ayrault.

Ministre des Affaires étrangères : Laurent Fabius.
Ministre de l'Éducation nationale : Vincent Peillon.
Garde des Sceaux, Ministre de la Justice : Christiane Taubira.
Ministre de l'Économie, des Finances et du Commerce extérieur : Pierre Moscovici.
Ministre des Affaires sociales et de la Santé : Marisol Touraine.
Ministre de l'Égalité des Territoires et du Logement : Cécile Duflot.
Ministre de l'Intérieur : Manuel Valls.
Ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie : Nicole Bricq.
Ministre du Redressement productif : Arnaud Montebourg.
Ministre du Travail, de l'Emploi et du Dialogue social : Michel Sapin.
Ministre de la Défense : Jean-Yves Le Drian.
Ministre de la Culture et de la Communication : Aurélie Filippetti.
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche : Geneviève Fioraso (députée de Grenoble).
Ministre des Droits des femmes, porte-parole du gouvernement : Najat Vallaud-Belkacem.
Ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire : Stéphane Le Foll.
Ministre de la Réforme de l'État, de la Décentralisation et de la Fonction publique : Marylise Lebranchu.
Ministre des Outremers : Victorin Lurel.
Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative : Valérie Fourneyron (maire de Rouen).

Ministre délégué auprès de Moscovici chargé du Budget : Jérôme Cahuzac.
Ministre déléguée auprès de Peillon chargée de la Réussite éducative : George Pau-Langevin.
Ministre délégué auprès d'Ayrault chargé des Relations avec le Parlement : Alain Vidalies.
Ministre déléguée auprès de  Taubira à la Justice : Delphine Batho.
Ministre délégué auprès de Duflot chargé de la Ville : François Lamy.
Ministre délégué auprès de  Fabius chargé des Affaires européennes : Bernard Cazeneuve.
Ministre déléguée auprès de Tourain chargée des Personnes âgées et de la dépendance : Michèle Delaunay (députée de Bordeaux).
Ministre déléguée auprès de Montebourg chargée de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme : Sylvia Pinel.
Ministre délégué auprès de Moscovici chargé de l'Économie sociale et solidaire : Benoît Hamon.
Ministre déléguée auprès de Touraine chargée de la Famille : Dominique Bertinotti.
Ministre déléguée auprès de Touraine chargée des Personnes handicapées : Marie-Arlette Carlotti.
Ministre délégué auprès de Fabius chargé du Développement : Pascal Canfin.
Ministre déléguée auprès de Fabius chargée des Français de l'étranger et de la Francophonie : Yamina Benguigui.
Ministre délégué auprès de Duflot chargé des Transports et de l'économie maritime : Frédéric Cuvillier.
Ministre déléguée auprès de Montebourg chargée des PME, de l'Innovation et de l'économie numérique : Fleur Pellerin.
Ministre délégué auprès de Le Drian chargé des Anciens combattants : Kader Arif.


34 membres dont 17 femmes. Les plus jeunes ont 34 ans (Najat Vallaud-Belkacem et Sylvia Pinel).

Seulement 5 ministres étaient membres d'un précédent gouvernement. Le plus ancien est bien sûr Laurent Fabius qui suit un itinéraire parallèle à celui d'Alain Juppé. Les autres : Sapin, Moscovici, Le Drian et Lebranchu.


Il est à noter l'absence (entre autres) de : Martine Aubry, Bertrand Delanoë, Jean-Michel Baylet, (Ségolène Royal, Dominique Strauss-Kahn, Jack Lang, Jean-Pierre Chevènement), Michel Destot, François Rebsamen, Jean-Vincent Placé, Yannick Jadot, Gérard Collomb, Adeline Hazan, Bruno Le Roux, Claude Bartolone, Guillaume Bachelay, Claude Estier, Clémentine Autain, André Vallini, Harlem Désir, Jean-Marie Le Guen, Jean-Christophe Cambadélis, Eva Joly, etc.

Deux tombeuses au gouvernement : en juin 2007, Michèle Delaunay avait battu Alain Juppé et Geneviève Fioraso avait battu Alain Carignon qui s'était attaqué à son ancien suppléant Richard Cazenave. L'Isère devait être représenté par André Vallini ou Michel Destot mais parité oblige, c'est la première adjointe de Grenoble qui a été nommée.

Les nominations de Marylise Lebranchu et Jérôme Cahuzac ouvrent la voie du perchoir à Ségolène Royal puisqu'ils étaient les deux concurrents sérieux pour la fonction. Nicole Bricq est devenue en octobre 2011 l'importante rapporteuse générale du budget au Sénat. Sylvia Pinel est une proche de Jean-Michel Baylet. Beaucoup de proches de Martine Aubry sont nommés : François Lamy (député-maire de Palaiseau), Marylise Lebranchu, Benoît Hamon. Finalement, les proches de François Hollande sont eux aussi nommés dans ce gouvernement (à l'exception de Vallini et de Rebsamen).

Invité sur France 2 au "20 heures" du 16 mai 2012, Jean-Marc Ayrault a déclaré que les ministres qui seraient battus aux législatives seraient renvoyés du gouvernement :  « Il y a l'esprit de responsabilité, c'est-à-dire que tout ministre qui se présente aux législatives et qui ne sera pas élu ne pourra pas rester au gouvernement. ».

Le Secrétaire Général de l'Élysée, Pierre-René Lemas, a annoncé que le conseil des ministres se réunira le jeudi 17 mai 2012 à 15h00.

Sylvain Rakotoarison (16 mai 2012)


Pour aller plus loin :
Le Premier Ministre de 2012.

L'élection de François Hollande.






http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-gouvernement-ayrault-i-116931

 

 

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16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 10:35

Ce mercredi 16 mai 2012 à 10h34, François Fillon (58 ans) a quitté Matignon et a passé ses fonctions au nouveau Premier Ministre Jean-Marc Ayrault. Nommé le 17 mai 2007, François Fillon aura battu tous les records de longévité pour un chef du gouvernement français à l'exception de Georges Pompidou qui a exercé ces fonctions du 14 avril 1962 au 10 juillet 1968. François Fillon avait donné sa démission au Président Nicolas Sarkozy le jeudi 10 mai 2012. Jean-Marc Ayrault prononcera à 11h30 une brève allocution avant de finaliser la composition du nouveau gouvernement dont ne seront pas membres ni Martine Aubry ni François Rebsamen.

Sur François Fillon :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-57884621.html

Sur Georges Pompidou :
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-72592565.html


SR

 

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15 mai 2012 2 15 /05 /mai /2012 16:47

Ce mardi 15 mai 2012 à 16h47, le nouveau Président François Hollande a nommé Jean-Marc Ayrault (62 ans) Premier Ministre. Député-maire de Nantes, élu dès 26 ans comme conseiller général, agrégé d'allemand, Jean-Marc Ayrault n'a jamais eu de responsabilités ministérielles jusqu'à aujourd'hui mais a dirigé le groupe socialiste à l'Assemblée Nationale de juin 1997 à mai 2012. La composition du gouvernement devrait être connue le mercredi 16 mai 2012 et le premier Conseil des ministres aura lieu le jeudi 17 mai 2012 dans la matinée (malgré le jour férié).

La nomination de Jean-Marc Ayrault a été annoncée par Pierre-René Lemas, le nouveau Secrétaire Général de la Présidence de la République alors que François Hollande se rendait de l'Hôtel de Ville de Paris à la base aérienne 107 de Vélizy-Villacoublay pour embarquer au bord du Falcon X7 pour Berlin.

SR

 

 

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15 mai 2012 2 15 /05 /mai /2012 12:16

Ce mardi 15 mai 2012 à 10h42 sous le soleil du printemps, Nicolas Sarkozy a quitté ses fonctions et a laissé François Hollande, septième Président de la Ve République, seul au centre du pouvoir politique en France. La pluie et une chute de grêlons sont survenues juste au moment de se rendre place De Gaulle sous l'Arc-de-Triomphe.

Par ailleurs, le préfet Pierre-René Lemas, ENA promo Voltaire comme François Hollande, a été nommé Secrétaire Général de l'Élysée et succède à Xavier Musca (lui-même ayant succédé en février 2011 à Claude Guéant). Pierre-René Lemas était depuis octobre 2011 le directeur de cabinet de Jean-Pierre Bel, Président du Sénat.


SR

 

 

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10 avril 2012 2 10 /04 /avril /2012 06:01

L’ambition présidentielle de bien des responsables politiques pollue aujourd’hui la vie démocratique et ne rend pas service à l’intérêt national. Des personnalités comme Arnaud Montebourg ou même, précédemment, Charles Millon, étaient prêtes à revenir sur cette mesure phare du gaullisme triomphant, l’élection du Président de la République au suffrage universel direct. Serait-ce constructif de la mettre en cause ?


yartiSupp01Le débat instauré depuis plusieurs semaines à l’occasion de la campagne présidentielle ne paraît pas satisfaisant. Il semble surtout fait de postures et d’électoralismes et les véritables enjeux sont rarement mis en avant, ou du moins, dans les médias qui s’attachent surtout aux petites phrases.

Pourtant, cette période intense et relativement courte (trois mois tous les cinq ans) structure notre vie institutionnelle et politique et façonne les cinq années du quinquennat. Trois mois tous les cinq ans, c’est peu et en même temps, il peut y avoir déjà impression de saturer. Les enjeux sont importants. Les luttes de pouvoir sont essentielles durant cette période. Ce qui peut expliquer la violence verbale du débat.

Cela fait penser à cette période courte de l’existence, entre deux et sept ans, pendant les études, qui structure toute une vie professionnelle, les quarante à quarante-cinq ans de vie active, plus encore si on prend en compte la retraite. Travailler dur pendant ses études peut être un bon investissement.

Cependant, parfois, le chômage arrive au bout du diplôme. Pour rester dans la comparaison, c’est un peu la déception qui pointe son nez à peine quelques mois après un processus de victoire d’autant plus incertaine que les hésitations sont grandes dans le corps électoral.

La question légitime qui peut venir est donc celle de la pertinence d’un tel scrutin : l’élection présidentielle est-elle nécessaire ?

Car après tout, on pourrait imaginer un système à peine différent de l’actuel mais qui réduirait l’effet néfaste d’une élection présidentielle où les querelles de personnalités et la peoplisation jouent à plein (et n’ont donc plus grand-chose à voir avec les enjeux politiques et l’intérêt national).

Ce système est appliqué dans de nombreuses démocraties européennes, comme la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Espagne ou encore l’Italie. Un chef de l’État sans pouvoir décisionnel et un chef du gouvernement point d’orgue d’une majorité parlementaire. Dans ces pays-là, les élections législatives sont la seule respiration de la démocratie au niveau national.

Un Président de la République n’assurant que l’intégrité des institutions, sans pouvoir politique, n’aurait plus à être élu par le peuple mais seulement par un corps intermédiaire, comme sous les deux républiques précédentes (comme René Coty) mais sans les inconvénients d’une instabilité de provenance parlementaire, avec seulement un gouvernement soutenu par une majorité à l’Assemblée Nationale désignée par des élections législatives dont le débat serait moins personnalisé.

D’ailleurs, la France l’a connu à trois reprises (sur neuf ans) avec les périodes de cohabitation où les Premiers Ministres avaient pris un large pouvoir d’initiative soutenus par une majorité parlementaire et sans donner le dernier mot au Président de la République. En quelques sortes, 1986, 1993 et 1997 ont été des verrues institutionnelles de régime aprésidentiel.

La question se pose d’autant plus que depuis 2002, les élections législatives ont lieu quasiment au même moment que l’élection présidentielle, si bien que le quinquennat et la législature sont confondues, contrairement à l’esprit du constituant en 1958.

Cet aspect du calendrier électoral a même renforcé la personnalisation du pouvoir puisque le Président de la République a les moyens d’imposer à son parti les investitures aux législatives. Ce qui rend le parti majoritaire "godillot" et sans réelle autonomie avec le pouvoir.

L’idée d’en finir avec l’élection présidentielle est donc tentante pour en finir avec les aspects les plus retors de la vie politique. Cela fait une trentaine d’années qu’on parle d’écuries présidentielles et de luttes de pouvoir même au sein des partis.

On a d’ailleurs souvent dit que, contrairement aux autres démocraties, les Français avaient besoin de cette monarchie républicaine, du mythe de l’homme providentiel qui éclaire la nation.

Malheureusement, aujourd’hui, le personnel politique est "pauvre" et les pointures faibles. Souvent, le débat entre candidats se divertit par des polémiques sans rapport avec les grands enjeux. On s’occupe du petit rictus de l’un, des tics de l’autre, de leur taille, de leur conjoint, et même de leur manière de vivre alors qu’il serait plus intéressant de discuter de leurs propositions, de les évaluer, de les analyser…

Concrètement, ce ne serait pas un grand changement, pas même de république même si on passerait dans un régime purement parlementaire. Le gouvernement primerait toujours sur les assemblées et son efficacité n’en serait pas affectée. On s’épargnerait juste deux tours d’élection présidentielle qui rendent les médias et la vie politique dans un état d’excitation peu adapté à la réflexion et à la prospective.

Pourtant, je vois deux objections à supprimer l’élection présidentielle.

1. D’une part, c’est une élection plébiscitée par les Français. Avec les élections municipales, ce sont les élections présidentielles qui ont connu le plus fort taux de participation. Le "oui" du référendum de 1962 sur l’élection présidentielle au suffrage universel direct n’a jamais été démenti. Par conséquent, retirer l’élection présidentielle aux Français ne pourrait être considéré que comme une confiscation de la démocratie au profit de professionnels de la politique.

2. D’autre part, l’argument principal qui est de remettre dans la campagne électorale des enjeux politiques et moins personnels pourrait ne pas être pertinent. En effet, si le pouvoir se transférait à Matignon, la personnalité du Premier Ministre serait déterminante également. Et les enjeux de personnes pourraient se transférer aussi sur le Premier Ministre, donc, sur le chef des partis qui sont en concurrence législative.

À ces deux objections, on peut rajouter également une troisième qui est importante : une élection présidentielle est plus apte à bouleverser les pouvoirs déjà établis (les partis dominants) que des élections législatives qui favorisent les partis qui ont déjà le monopole des élus.

Une élection présidentielle peut en effet favoriser des personnalités hors grands partis, hors système, grâce au dialogue direct avec les Français. Cela s’est passé avec succès avec Valéry Giscard d’Estaing en 1974, et avec moins de succès avec François Bayrou en 2007. En 2012, Jean-Luc Mélenchon (entre autres) n’aurait jamais pu s’imposer dans le débat politique sans l'atout de sa propre personnalité.

Faut-il supprimer l’élection présidentielle ?
Pas forcément, mais peut-être éduquer les candidats à parler simplement des vrais enjeux.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (10 avril 2012)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
L’élection présidentielle de 2012.
160 ans d’élection présidentielle.
10 ans de quinquennat.
La Ve République.

 yartiSupp02

 

  http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/faut-il-supprimer-l-election-114328

 

 

 

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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 06:56

Serpent de mer régulier, les velléités de réforme se font sentir à chaque élection présidentielle. Pourtant, rien ne bouge.


yartiParrainages201201Depuis ce vendredi 16 mars 2012 à 18h00, il est désormais impossible de se présenter à l’élection présidentielle. Il fallait en effet déposer ses cinq cents parrainages au Conseil Constitutionnel qui annoncera le lundi 19 mars 2012 à 17h30 la liste officielle des candidats du premier tour. Cela fera commencer la campagne officielle avec obligation d’égalité des temps de parole dans les médias.

On imagine sans mal que pour des vendeurs de dentifrices ou des promoteurs de sectes, ce temps de parole serait une aubaine financière et un sas à notoriété.

C’est la raison pour laquelle le législateur a mis quelques garde-fous pour pouvoir se présenter à la magistrature suprême : des parrainages de maires ou d’élus territoriaux ou nationaux, avec des contraintes de répartition géographique. Initialement au nombre de cent en 1962, Valéry Giscard d’Estaing a fait passer la barre à cinq cents sous son septennat, par la loi organique du 18 juin 1976, ce qui a empêché Jean-Marie Le Pen, candidat en 1974, à le redevenir en 1981. Par la suite, à chaque élection, lui puis sa fille Marine Le Pen n’ont jamais cessé de polémiquer sur cette obligation de signatures, chaque fois avec le bluff qu’on peut imaginer. Cette source médiatique contre le système est toujours bonne à prendre pour le FN.

Ce système n’empêche pas l’émergence de plusieurs petits candidats à chaque élection.


Entre 10 et 12 candidats en 2012

Pour 2012, il devrait y avoir donc dix candidats. Les six "grands", Nicolas Sarkozy, François Hollande (entre 4 500 et 5 000 parrains, selon Daniel Vaillant), François Bayrou, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon (1 100), Eva Joly (639), et les autres, plus marginaux politiquement, Philippe Poutou (572), Nicolas Dupont-Aignan (708), Nathalie Arthaud et Jacques Cheminade (538).

Il y a la certitude de recalage de Dominique de Villepin (il lui aurait manqué 30 signatures) et deux incertitudes qui seront levées dès lundi soir en ce qui concerne Corinne Lepage (entre 470 et 520 signatures) et Jean-Marc Governatori (des signatures de maires peuvent en effet parvenir directement au Conseil Constitutionnel).

Pour beaucoup, le mode de filtrage des candidatures est mauvais et peu démocratique. Pourtant, que penser de la réussite de la candidature de Jacques Cheminade (déjà candidat en 1995) et de l’échec de Dominique de Villepin, ancien Premier Ministre très médiatique ? Justement, cela signifie que le système n’est pas si fermé que cela. Que ce n’est pas la présence médiatique qui fait les candidats. Qu’il privilégie ceux qui bossent, qui se sont organisés, qui se sont structurés sur tout le territoire national, et qu’il sanctionne les dilettantes.

L’observateur remarque avec régularité le grand savoir-faire d’un parti ultra-minoritaire comme Lutte ouvrière qui n’a jamais eu de problème pour obtenir ses parrainages, bien avant la notoriété d’Arlette Laguiller (qui date seulement de la campagne de 1995, mais elle était déjà candidate en 1974 !).

Et puis, il faut aussi y voir un échappatoire particulièrement commode pour ceux qui s’aperçoivent en cours de route que leur candidature les mènerait à la catastrophe, eux ou leur mouvement. Ce fut le cas pour Jean-Pierre Chevènement, Christine Boutin et Hervé Morin, présient du Nouveau centre. Comme le cas de Charles Pasqua en 2002.


Le système du 18 juin 1976

Le système actuel, c’est de demander cinq cents parrainages (exclusifs) parmi environ quarante-deux mille élus, issus de trente départements différents. Ce qui correspond à une potentialité d’environ quatre-vingts candidats au maximum, ce qui est très important.

Évidemment, les maires (de loin, les plus nombreux) peuvent subir des pressions. Leurs communes sont maintenant pour la plupart incluses dans des regroupements de communes et par ailleurs, elles peuvent jouir de subventions provenant du conseil général, du conseil régional ou de l’État. Toutes ces considérations peuvent politiser le process si les partis qui gèrent ces budgets (essentiellement UMP et PS) veulent promouvoir une candidature (issue de l’autre camp pour le diviser) ou empêcher une autre (pour éviter de diviser son camp).


Un système transparent

Un début de polémique a eu lieu sur la publication ou la non publication des parrains pour chaque candidat. Quelle idée de vouloir garder le secret des parrainages ? Ce n’est pas un vote, c’est au contraire une décision importante qui doit engager l’élu et par ricochet, les électeurs qu’il représente. C’est d’autant plus étonnant d’entendre des personnes contester cette publication qu’elles réclament en même temps la publicité des votes dans les assemblées du Parlement. Aux élus donc de prendre leurs responsabilités, et cela ne peut se faire que si la procédure reste transparente, donc, publique.

Maintenant, le cas particulier de Marine Le Pen ou de son père pour les élections précédentes pourrait prêter à discussion : en cas d’impossibilité de trouver le nombre nécessaire de parrainages, serait-il admissible qu’un candidat représentant entre 10 et 20% de l’électorat (tant dans les sondages que dans les scrutins précédents) puisse être exclu de la compétition ? D’un point de vue moral et démocratique, la réponse est non, d’un point de vue juridique, pourquoi pas ? et d’un point de vue politique, je redirais que ce serait tant mieux.


Remplacer les maires par les citoyens ?

Surfant sur un électoralisme de bon aloi, le Président Nicolas Sarkozy a par exemple proposé le 6 mars 2012 sur France 2 une modification du système en demandant le parrainage de citoyens au lieu d’élus, à raison de 3% des électeurs inscrits. Un rapide calcul en reprenant les données du 6 mai 2007 (ce qui minimalise) indique que cela signifierait une pétition de candidature nécessitant de recueillir… plus d’un million trois cent mille signatures !

Autant dire que le système proposé serait beaucoup plus contraignant qu’actuellement (donc, que c’est une vaste tromperie), sachant que plus de la moitié des candidats le 22 avril 2007 (sept sur douze) avaient recueilli moins d’un million d’électeurs ! Ce système nécessiterait en outre beaucoup d’argent et la validation de ces millions de parrainages de citoyens prendrait beaucoup de temps et pourrait être contestable et contesté, tant sur l’identité du signataire que sa domiciliation, d’autant plus s’ils restaient secrets (car un citoyen doit pouvoir être protégé au contraire des élus qui sont engagés dans la vie publique).


Officialiser un régime des partis ?

D’autres ont imaginé un système reconnaissant carrément aux partis leur mainmise sur la vie politique. Mais cela irait à l’encontre de l’esprit des institutions qui veulent que l’élection présidentielle soit l’occasion d’un dialogue entre un homme (ou une femme) et le peuple, indépendamment de tout group d’intérêt particulier. De plus, cela aurait pour fâcheuses conséquences la perpétuation des acteurs déjà en place (si l’on donnait des contraintes sur le parti, nombre d’élus dans les précédentes élections par exemple).


Juste un aménagement du système ?

Finalement, je pense que le système actuel de cinq cents parrainages n’est pas si mauvais et est à garder. Il a déjà permis jusqu’à seize candidats (en 2002). Il oblige le candidat potentiel à montrer qu’il doit s’organiser sur tout le territoire pour faire une véritable campagne nationale.

En revanche, il serait peut-être pertinent de réduire le risque (réel) qu’un candidat représentatif (celui du FN pour l’instant) puisse ne pas obtenir les signatures en augmentant ceux qui pourraient les accorder. À savoir, élargir à l’ensemble de tous les élus, y compris les simples conseillers municipaux, cette possibilité de parrainage, mais sans atténuer ni le nombre ni les contraintes de la répartition géographique.

Cette idée a déjà été développée par quelques parlementaires.

Cela ferait passer de quarante-deux mille à près de quatre cent mille le nombre de parrains potentiels. Un parti représentant une partie non négligeable de la population depuis plus de six ans (la durée du mandat municipal) aurait alors suffisamment d’élus municipaux pour qu’on ne nous refasse plus, à chaque élection, le coup de cette polémique et qu’on parle enfin du fond des programmes.

Les mauvaises séries doivent toujours avoir une fin.
L’aménagement proposé aurait certainement cette vertu.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (17 mars 2012)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Parrainages en 2007 : la tentation de Sarkozy.
Conseil Constitutionnel : où sont les femmes ?
Les petits candidats.
Reconnaître le vote blanc.
L’élection de 2012.

yartiParrainages201202 

 

  http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/faut-il-reformer-le-systeme-de-112662

 

 

 

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