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Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20221124-assemblee-nationale.html
Deuxième séance du 24 novembre 2022 de l'Assemblée Nationale
XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023
Séance du jeudi 24 novembre 2022
2e séance
Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente
Mme la présidente.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1 • Protéger et garantir le droit fondamental
à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception
(...)
2 • Abolition de la corrida
Discussion d’une proposition de loi
Mme la présidente.
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Aymeric Caron et de plusieurs de ses collègues visant à abolir la corrida : un petit pas pour l’animal, un grand pas pour l’humanité (nos 329, 492).
Présentation
Mme la présidente.
La parole est à M. Aymeric Caron, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
M. Aymeric Caron, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
La question que j’ai l’honneur de vous soumettre interroge le plus profond de nos consciences. Longtemps, nous avons maltraité les animaux sans le moindre remords. Au XIXe siècle, les premières lois de protection animale ont été adoptées en Angleterre puis en France. Depuis, elles ont été en permanence actualisées et améliorées en fonction de l’évolution de nos standards moraux et de nos connaissances. Désormais, dans notre pays, les sévices sur les animaux peuvent être punis de cinq ans de prison et de 75 000 euros d’amende ; je crois que nous pouvons être fiers de ces dispositions qui entérinent le fait que la République ne tolère pas les violences inutiles sur les animaux. Toutes les conséquences n’ont pas encore été tirées de ce principe qui n’en a pas moins le mérite de servir de socle aux réflexions que nous menons sur nos relations avec les autres espèces.
Ce que je vous demande aujourd’hui, chers collègues, c’est simplement de réparer une injustice.
M. Alexis Corbière.
Exactement !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Car, malgré la volonté claire du législateur, il y a encore des endroits en France où l’on peut torturer et tuer un animal pour le plaisir en raison d’une exception accordée au prétexte d’une pratique traditionnelle locale ininterrompue.
Mme Sophia Chikirou.
C’est une honte !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
C’est aberrant, mais la même cérémonie de maltraitance animale interdite à Paris, Nantes ou Strasbourg, est autorisée à Béziers ou à Nîmes. Comment tolérer encore aujourd’hui cette incohérence qui permet à des corridas de se tenir dans certaines villes françaises alors qu’elles sont interdites par la loi commune ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) C’est précisément cette aberration législative que nous devons faire disparaître. Les sévices sur les animaux ne sont acceptables nulle part dans notre République une et indivisible. (Mme Sophia Chikirou applaudit.) Ils ne sont acceptables nulle part dans un pays qui se veut un phare en matière de droits humains et de respect du vivant.
Certains prétendent que le taureau ne souffre pas dans l’arène. Ils expliquent que l’excitation liée à la lutte contre le torero et les caractéristiques génétiques de l’animal le prémunissent contre tout inconfort. J’ai même entendu dire par certains aficionados que le taureau tirait une certaine fierté de sa mise à mort chorégraphiée. Je doute sérieusement de ce dernier point : par refus d’anthropomorphisme et par respect pour la science, je ne peux raisonnablement prêter au taureau des sentiments qui ne sont que des prétextes pour mieux l’asservir, l’humilier et le torturer en bonne conscience.
Mme Anne-Laure Blin.
Il n’y a rien de scientifique dans votre raisonnement !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Oui, j’emploie le mot « torture ». Croyez bien que ce n’est pas de la provocation, chers collègues. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Simplement, je ne vois pas quel autre mot utiliser.
Pendant les vingt minutes que dure son calvaire, le taureau subit des coups de pique dont la pointe peut s’enfoncer jusqu’à trente centimètres dans les chairs. Cette pique coupe, blesse et mutile les muscles, les tendons, les ligaments, les nerfs. La pique a pour objet, paraît-il, de montrer la bravoure du taureau. Elle sert surtout à l’affaiblir en s’attaquant aux ligaments du cou, ce qui empêchera l’animal de lever la tête pour se défendre. On plante ensuite dans son dos des banderilles terminées par un harpon en acier de six centimètres, harpon qui va s’insérer dans les chairs et les travailler à chaque mouvement de l’animal afin de le faire souffrir et de l’affaiblir encore. Puis, une fois que le taureau est épuisé, perclus de douleur, vient le moment de la mise à mort, qui ne sera pas immédiate car on achève l’animal à l’épée. Mais pour être fatale, ou presque, l’épée doit transpercer le corps à un endroit et sous un angle bien précis. Sinon, le coup ravage mais laisse en vie. Le matador rate souvent son coup et doit s’y reprendre. Si le taureau met encore trop de temps à tomber, si les coups charcutent sans tuer, on utilise une autre épée, d’un autre format, et on recommence l’opération. Pendant ce temps, le taureau suffoque dans son sang qu’il vomit. Lorsqu’il se couche enfin, le taureau n’est pas encore mort. On va donc l’achever avec un couteau planté derrière la tête par petits coups. Vous verrez des toreros frapper la tête du taureau à quatre, cinq ou six reprises, s’acharner presque désespérément parce que l’animal ne veut pas ou n’arrive pas à mourir. Ensuite, on lui coupe les oreilles et la queue alors même qu’il n’est, souvent, pas encore tout à fait mort. Peut-on vraiment appeler cela de l’art, comme le font certains ? (« Oui » ! sur quelques bancs du groupe RN.) Je ne le crois pas. (Mme Mathilde Paris proteste.)
Les défenseurs de la corrida convoquent généralement Hemingway et Picasso comme arguments d’autorité : « Ah, ils aimaient la corrida, donc la corrida c’est bien. » Pour ma part, je préfère citer Robert Badinter qui disait, il y a quelques semaines : « La corrida est une des expressions de la culture du sang et de la mort. Ce ne sera jamais la mienne. » (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
Chers collègues, aujourd’hui, nous pouvons choisir d’abolir la corrida.
Mme Raquel Garrido.
Oui !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Mais certains d’entre vous ont préféré refuser le débat et empêcher le vote. Plus de 800 amendements ont été déposés, ce qui rend pour le moment impossible un travail parlementaire constructif (Protestations sur les bancs des groupes RN et LR) et impossible de procéder au vote final dans le délai imparti, c’est-à-dire avant minuit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) C’est ainsi que vous voyez la démocratie ! (Protestations sur plusieurs bancs, auxquelles répondent des exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Laurent Croizier.
C’est votre approche qui l’empêche, monsieur Caron !
Mme Sophia Chikirou.
Cela s’appelle de l’obstruction !
Mme la présidente.
Chers collègues, seul M. le rapporteur a la parole.
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Absolument, cela s’appelle de l’obstruction parlementaire. C’est pourquoi, parce que les Français attendent énormément de nous et parce qu’ils nous observent, je vous demande de retirer tous les amendements d’obstruction pour laisser la possibilité d’un vote (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES) et permettre une décision historique aussi bien pour les droits des animaux que pour l’expression de notre humanité. (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs des groupes SOC et Dem.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la ruralité.
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État chargée de la ruralité.
Dans le cadre de la niche parlementaire du groupe La France insoumise, nous examinons une proposition de loi du député Caron visant à abolir la corrida sur l’ensemble du territoire.
Je rappellerai tout d’abord, pour la bonne tenue du débat, que le Gouvernement a une parfaite conscience de la complexité des discussions que nous sommes amenés à avoir ensemble. La corrida renvoie chacun à son intimité la plus profonde, à son rapport à l’animal et à la mort. Ce sujet traverse toute la société, tout le pays, du nord au sud, mais aussi les générations et la quasi-totalité des groupes politiques de l’Assemblée, lesquels observeront, pour beaucoup, la liberté de vote sur ce texte. Ce rapport à l’intime fait de la corrida un sujet sur lequel chacun exprime sa propre sensibilité. Je ne peux que comprendre et ne pas rester insensible à ceux pour qui le fait de voir un taureau blessé par des banderilles, luttant jusqu’à l’agonie pour ne pas succomber, est insoutenable. Il faut respecter cette émotion et je ne dirai jamais que celle-ci n’est pas légitime ou sincère. Mais je comprends aussi l’émotion qui saisit les habitants des villes, dont le cœur bat au rythme de ces férias et corridas culturellement ancrées dans les territoires, à l’idée qu’elles pourraient être interdites. Ces corridas, dans plusieurs villes du sud de la France, sont l’objet d’un véritable engouement populaire qui, pendant une semaine, fait vibrer et adhérer toute une population à une culture ancestrale qui relie chaque territoire à son histoire. (Mme Nathalie Oziol proteste.) Il ne faut jamais perdre de vue le rôle social des férias, héritage qui se transmet de génération en génération.
M. Éric Coquerel et M. Alexis Corbière.
Hors sujet ! Le texte ne parle pas des férias !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Il faut respecter ces deux émotions qui ne doivent pas s’opposer.
Je tiens également à souligner à quel point le Gouvernement est animé par la défense du bien-être animal et combien les enjeux de la cause animale, mise en avant par ceux qui voudraient voir la corrida cesser, sont au cœur de nos préoccupations. Preuve de l’importance que nous donnons à ce sujet, le Gouvernement et la majorité ont été à l’initiative d’avancées notables pour le bien-être animal au cours de la législature précédente. Nous sommes la majorité qui a le plus agi pour le bien-être animal, notamment en votant la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, sur la proposition de l’ex-député de la majorité Loïc Dombreval. (M. Thomas Rudigoz applaudit.) Nous sommes fiers d’avoir, dans ce texte, renforcé les sanctions en cas de maltraitance animale. Nous avons interdit les spectacles d’orques et de dauphins à partir de 2026 et la détention et le spectacle d’animaux sauvages dans les cirques itinérants d’ici à 2028. L’action du Gouvernement ne s’est pas limitée à cette loi : par un décret du 6 février 2022, il s’est engagé à mettre un terme au broyage des poussins mâles dans la filière des poules pondeuses – on parlait auparavant de 50 millions de poussins broyés chaque année. Voici des exemples concrets de nos actions pour soutenir la cause animale. Vous le voyez, le Gouvernement et la majorité n’ont pas attendu M. le député Caron pour être des acteurs responsables du bien-être animal.
M. Vincent Bru.
Très bien !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Je suis fière de porter la parole d’un Gouvernement et d’une majorité qui, sur le bien-être animal, ont agi avec responsabilité et sont même allés plus loin que certains de nos voisins. Nous continuerons à agir dans ce sens.
D’un autre côté, comme l’a précisé la cour d’appel de Toulouse, il ne saurait être contesté que, dans le Midi de la France, entre le pays d’Arles et le Pays basque, entre garrigue et Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, en Provence, Languedoc, Catalogne, Gascogne, Landes, il existe une forte tradition taurine qui se manifeste par l’organisation régulière de corridas. En effet, la pratique est à ce jour autorisée dans une cinquantaine de communes par dérogation à l’article 521-1 du code pénal, au nom d’une tradition locale ininterrompue : elle est, par exemple, documentée depuis 1289 à Bayonne. Cela signifie que la pratique dont nous discutons est déjà interdite dans plus de 35 000 communes qui n’ont pas de passé intime avec la corrida. On ne peut que s’en réjouir.
Pourquoi suis-je attachée à ne pas abolir la corrida aujourd’hui ? (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Si l’on trouve à première vue la corrida barbare, j’aimerais, face à vous, défendre ce qu’elle apporte à nos territoires en garantissant leur diversité, en y incarnant une certaine liberté et en alimentant en leur sein une filière économique majeure.
Mme Sophia Chikirou.
Ah, l’argent, l’argent, l’argent !
Mme Sandrine Rousseau.
Tout est dit !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Tout d’abord, au-delà de la corrida, je voudrais défendre devant vous la diversité de nos territoires et la pluralité de notre société – diversité à laquelle, vous le savez, je suis particulièrement attachée. (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) La corrida est une tradition ancestrale qui participe de l’identité de certains territoires : des enfants qui, dès l’école primaire, visitent les ganaderias dans les Landes aux défilés de gardians à Arles, en passant par la valorisation du patrimoine aux arènes de Nîmes (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Protestations renouvelées sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES) , sans la tauromachie, ces territoires perdraient leur singularité.
M. Alexis Corbière.
Vous n’y connaissez rien !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Voulons-nous condamner des villes comme Dax, Mont-de-Marsan ou encore Vic-Fezensac à disparaître de notre imaginaire collectif ? Je ne suis pas ici pour décider ou non du caractère désuet ou anachronique de la corrida ;…
Mme Sophia Chikirou.
Tant mieux !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
…en revanche je peux témoigner de la place que cette tradition occupe dans nos territoires. Bien sûr, me direz-vous, les férias survivront certainement à la suppression des corridas.
Mme Bénédicte Taurine.
Les férias n’ont rien à voir avec les corridas !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Ce que je tenais à illustrer ici, c’est la place que la corrida occupe dans certains de nos territoires.
Pas plus que M. Caron, j’en suis certaine, ne souhaite stigmatiser toute la moitié sud du pays, je ne souhaite stigmatiser un député parisien qui, éloigné de toute considération politicienne (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR ainsi que sur quelques bancs des groupes Dem et HOR. – « Oh ! » sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES) , ne serait animé que par des convictions profondes sur le bien-être animal.
J’entends ensuite défendre la liberté de chacun d’assister ou non à une corrida.
M. Alexis Corbière.
Vos arguments sont très faibles !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Le sujet n’est pas tant de savoir si la corrida doit mourir de sa belle mort ou être condamnée par notre assemblée que de garantir le libre arbitre de tout un chacun vis-à-vis de cette pratique.
M. Alexis Corbière.
En fait, vous ne dites rien depuis maintenant six minutes !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Or la présente proposition de loi restreint cette liberté qui ne porte préjudice à aucun être humain. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Nous sommes tous attachés aux libertés individuelles.
M. Alexis Corbière.
Êtes-vous vraiment secrétaire d’État, madame ?
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
La ferveur autour de la corrida a toujours fluctué avec les époques et avec l’histoire : il y a dix ans, une centaine de corridas se déroulaient chaque année dans l’Hexagone ; aujourd’hui, il n’y en a plus qu’une cinquantaine.
Troisièmement, je défendrai devant vous une filière pour laquelle l’adoption du texte aurait des conséquences irrémédiables et désastreuses. Au-delà d’une tradition, la corrida représente un tissu économique non négligeable qui a déjà été lourdement affecté par la crise sanitaire du covid-19. La corrida, c’est une cinquantaine d’élevages dans les régions Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Nouvelle-Aquitaine ; c’est une filière d’excellence, la race Brave, reconnue comme race locale mais aussi comme race menacée en France et qui contribue à la biodiversité et à l’entretien de certains de nos paysages, en Camargue par exemple. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Anne-Laure Blin.
Exactement !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Comment pourrait-on décider de l’avenir de cette filière sans avoir pris le temps d’écouter les acteurs de filière et sans avoir imaginé un programme d’accompagnement et de reconversion pour toutes celles et ceux qui vivent de la tauromachie ? (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Sophia Chikirou.
Cela fait des années qu’on les écoute !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Avons-nous seulement une étude d’impact pour mesurer ces éléments ? (M. Loïc Prud’homme s’exclame.)
Enfin, il n’y a pas d’urgence sur ce sujet. En temps de crise, je crois profondément que l’essentiel est de ne pas fracturer le pays. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Il est contre-productif d’opposer les Français à des fins qui semblent plus politiques qu’essentielles.
M. Alexis Corbière.
Tout ça est vraiment très faible !
Mme Sophia Chikirou.
Plus de 80 % des Français sont pour l’abolition !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Dans les moments tumultueux que nous traversons, essayons plutôt de nous écouter les uns les autres, de nous respecter et de faire preuve de tolérance. J’ai effectué un grand nombre de déplacements depuis ma nomination et s’il y a une chose dont je suis sûre, c’est que nous sommes tous, dans cet hémicycle, convaincus que les Françaises et les Français ont bien d’autres préoccupations. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Les réelles urgences des Français sont le pouvoir d’achat, la hausse du coût de l’énergie, la guerre en Europe, le manque de médecins dans nos campagnes (Applaudissements sur les bancs du groupe LR) , l’urgence climatique, la gestion de l’eau. Voilà, chers députés, ce qui préoccupe nos concitoyens et devrait occuper nos débats. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Raquel Garrido.
Que savez-vous de nos derniers débats, vous n’étiez pas là !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Voulons-nous une France monochrome et uniforme ? Voulons-nous une société de l’interdiction ?
M. Éric Coquerel.
Quel rapport ?
M. Alexis Corbière.
Votre argumentation est nullissime !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Ou préférons-nous une France plurielle, respectueuse de l’histoire et des traditions de chacun de ses territoires ?
Voter pour la présente proposition de loi, formulée dans l’urgence, n’apporterait pas de solutions à nos concitoyens, ne résoudrait aucunement les conflits qui traversent la société sur ce sujet, mais enlèverait de la liberté à une partie de nos concitoyens.
La loi en vigueur permet par dérogation aux seuls territoires de tradition taurine d’organiser des corridas et empêche tous les territoires qui souhaiteraient développer de nouvelles corridas de le faire. Elle est respectueuse de nos différences.
Mme Raquel Garrido.
Le thème dont nous discutons méritait mieux !
Mme Dominique Faure, secrétaire d’État.
Je vous invite donc, mesdames et messieurs les députés, à voter contre cette proposition de loi présentée par Aymeric Caron, député du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, LR, Dem et HOR.)
Mme la présidente.
Nous en venons à la discussion générale.
Discussion générale
Mme la présidente.
Dans la discussion générale, la parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
D’abord, je tiens à vous faire part de mon émotion de prendre la parole devant vous, en ce moment historique, pour défendre l’abolition de la corrida.
Samedi dernier, lors d’une manifestation en soutien à cette proposition de loi, j’ai entendu le témoignage d’une petite fille. (Exclamations sur quelques bancs RN et LR.) Elle disait son incompréhension devant ce spectacle de douleur sans nom qu’est la corrida ; elle formait le vœu que les adultes écoutent parfois davantage le bon sens des enfants.
Je ne vous cache pas qu’elle m’a rappelé une autre petite fille, qui ne comprenait pas non plus que son pays permette tant d’inhumanité dans les arènes, tant de violence vis-à-vis d’un animal. Cette petite fille ne se doutait pas qu’elle aurait un jour la chance de monter à la tribune de l’Assemblée nationale pour essayer de convaincre ses collègues députés de mettre, enfin, un terme à cette aberration. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.)
Ce jour est arrivé. Enfin, l’abolition de la corrida est discutée dans l’hémicycle ; enfin, nous avons l’occasion, ensemble, de réparer ce qui n’est rien d’autre qu’une erreur tragique de notre droit. En 1853, l’empereur Napoléon III, pour les beaux yeux de son épouse Eugénie, a importé la corrida d’Espagne, au mépris de la loi de notre pays. En effet, la première loi visant à protéger les animaux avait été promulguée trois ans plus tôt.
M. Alexis Corbière.
Eh oui !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
C’était la loi Grammont, du nom de ce général qui s’était ému des mauvais traitements imposés aux chevaux dans les rues de Paris. Elle interdisait tout acte de cruauté envers un animal domestique en public. La corrida a donc toujours été illégale (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également) mais on l’a laissée prospérer pour complaire à la couronne impériale, à tel point qu’au lieu de sévir, de faire appliquer la loi, comme la raison le commandait, on a fini cent ans plus tard par adapter la loi au crime, en accordant une dérogation pour la corrida. Il est donc encore possible de torturer un animal en France dès lors qu’il s’agit d’un taureau, dans les arènes de quelques villes du sud de la France.
Or on ne parle pas de petites souffrances.
M. Sébastien Chenu.
Et à l’abattage ?
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Pendant la corrida, le taureau est transpercé de part en part, d’abord par la pique du picador, puis par les banderilles, qui portent un joli nom ensoleillé mais sont en fait des harpons qui s’agrippent dans la chair. Puis viennent les épées, enfin le couteau pour le coup de grâce – je devrais plutôt dire les coups de grâce puisque, bien souvent, il faut s’y reprendre à plusieurs fois.
Mme Martine Etienne.
Ce sont des incapables !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
L’animal vacille, tremble, aveuglé par le sang, il tombe, puis se relève dans la douleur, parfois même il vomit du sang. Qui peut dire sans ciller qu’il ne souffre pas ? S’il en était besoin, l’Ordre national des vétérinaires l’a de toute façon affirmé sans hésitation, dans un rapport paru en 2015 : oui, le taureau souffre pendant la corrida. Ni la sélection génétique ni les conditions d’élevage n’y font rien. Cette pratique est tout simplement parfaitement incompatible avec toute préoccupation de bien-être animal.
M. Charles Sitzenstuhl.
L’abattage l’est-il ?
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mes chers collègues, je vais maintenant vous demander un petit effort d’imagination. Regardez-le, ce taureau. C’est la fin du tercio , il a subi tous les coups, il gît sur le sable, espérant le couteau final, pour que ses souffrances cessent. Maintenant ce n’est plus un taureau, c’est votre chien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Vives protestations, prolongées, sur les bancs du groupe RN. – Mme Emmanuelle Ménard proteste également.)
Mme Sophia Chikirou.
Il y en a dans vos rangs qui approuvent ce qu’elle décrit !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Vous le voyez, agonisant, terrorisé, ensanglanté, avec les banderilles plantées dans le dos, ne comprenant pas pourquoi la main de l’homme l’a frappé, levant vers vous ses yeux implorants, demandant grâce ? (Mêmes mouvements.) Comprenez-vous maintenant le problème, l’erreur fondamentale ? Comment accepter pour un taureau ce que tout le monde, instinctivement, trouve insupportable pour un chien ?
Mme Sophia Chikirou.
Exactement !
M. Jocelyn Dessigny.
Que pensez-vous de l’abattage rituel ?
Mme la présidente.
On ne s’interpelle pas, s’il vous plaît. Seule l’oratrice a la parole.
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Collègues du groupe Renaissance, l’an dernier, presque à la même date, vous votiez fièrement une loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes. « Conforter le lien entre les animaux et les hommes » : c’est bien de cela qu’il s’agit. Nous parlons de notre lien aux animaux, au vivant.
Selon l’explorateur et naturaliste Théodore Monod : « La corrida est le symbole cruel de l’asservissement de la nature par l’homme. » Tout est dit. La corrida n’implique nulle notion de subsistance, nulle nécessité d’aucune sorte. Le taureau est traité en objet dont on peut disposer ; il souffre et meurt pour notre bon plaisir, pour notre divertissement. Quelle meilleure allégorie d’une domination totale ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.)
M. Jocelyn Dessigny.
Et les moutons égorgés pour Allah, vous en pensez quoi ?
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mais désormais nous le savons : il faut en finir avec ce comportement dominateur et destructeur. Nous appartenons tous au même monde du vivant ; nous partageons avec les animaux le seul écosystème qui nous soit vivable – nos destins sont liés.
En outre, nous avons déjà tranché cette question. Le code pénal est formel : il est interdit de faire souffrir un animal volontairement, plus encore de le tuer. Par conséquent, si vous vous amusez à torturer et à tuer un taureau en place publique à Brest, par exemple, ou bien si vous plantez un coup d’épée entre les omoplates de votre lapin nain, n’importe où en France, vous serez coupable d’un délit et passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Ce ne sont pas de petites peines. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)
M. Alexis Corbière.
Les partisans de la corrida n’aiment pas les taureaux !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mais le même comportement, aux dépens d’un taureau, au sein d’une arène dans le Sud de la France, serait sans conséquences ? Comme le dit une célèbre chanson : « Est-ce que ce monde est sérieux ? » (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
Un député du groupe RN.
C’est original !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
On ne peut pas, on ne peut plus se draper dans l’idée de tradition pour défendre cela. Les traditions ne sont pas immuables, elles évoluent avec les sociétés et c’est heureux. Il fut un temps où les Français aimaient à assister aux exécutions publiques : c’était un divertissement familial prisé. Je ne pense pas que quiconque ici pleure ce temps-là !
Mme Farida Amrani.
Même Marine Le Pen le reconnaît !
M. David Habib.
Les exécutions publiques !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Nous ne sommes plus au XIXe siècle : nous reconnaissons tous les animaux comme des êtres sensibles, capables de ressentir la douleur. C’est même écrit noir sur blanc, dans le code rural – aux articles L. 214-1 et suivants –, et dans le code civil – à l’article 515-14 : les animaux sont des êtres sensibles et doivent être traités comme tels.
Prenons exemple sur la Catalogne qui fut une place forte mondiale de la tauromachie et qui a pourtant mis fin à la corrida il y a dix ans déjà. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Pires Beaune applaudit également.)
Mme Nathalie Oziol.
Voilà !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Nous pouvons défendre nos traditions mais pas la violence. Pas la violence, pas en 2022 : ce n’est plus possible.
M. Charles Sitzenstuhl.
Et les abattoirs ?
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Enfin, chers collègues du sud, dont je suis : soyez raisonnables ! Vous le savez, la féria n’est absolument plus synonyme de corrida. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.) Mettre fin à la violence dans les arènes ne sonnera pas la fin de la fête : nous continuerons à danser au son des bandas, à chanter « Paquito chocolatero » ou « Les fêtes de Mauléon » à tue-tête.
M. David Habib.
Les fêtes de Mauléon ! Mais qu’est-ce qu’elle y connaît !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Les jeux, les festivités, les tournois en tout genre continueront de nous égayer, et la joie, la sangria et la convivialité seront toujours de la partie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Florence Lasserre.
Venez-y, aux corridas de Mauléon !
M. David Habib.
Elle n’y a jamais mis les pieds !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mais, comme pour l’immense majorité des Français qui désormais viennent aux férias pour la fête en elle-même, sans jamais mettre un pied dans l’arène, il ne sera simplement plus question de nous amuser « autour d’une tombe ».
Aujourd’hui, ensemble, nous pouvons aller résolument dans le sens de l’histoire.
Toutefois, certains de nos collègues s’y refusent. Au total, plus de 800 amendements ont été déposés sur cette proposition de loi, composée d’un article unique.
M. Bruno Millienne.
C’est le droit !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Les députés du groupe Rassemblement national en ont déposé 373 ; ils se font pourtant passer pour des défenseurs des animaux.
M. Jean-François Coulomme.
Ben tiens !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Le chiffre se monte à 117 pour certains députés du groupe Renaissance, sans compter l’aide de quelques députés non inscrits. Ces kyrielles d’amendements ridicules, que certains ont déposés par paquets de cent, sont une insulte à l’attente exprimée par la société. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Nathalie Oziol.
Tout à fait !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Élève-t-on vraiment le débat lorsqu’on propose ironiquement de former les toreros au bien-être animal ? Ou lorsqu’on s’interrogea sur la température extérieure idéale pour torturer un taureau ? La France se souviendra de votre attitude puérile et criminelle.
Mme Sophia Chikirou.
Exactement, on s’en souviendra !
M. Vincent Descoeur.
Oh !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
L’organisation des débats se fait ici avec vous, mais rappelons-nous que le pays est avec nous !
Un député du groupe LR.
Ça, ce n’est pas sûr !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
La population est majoritairement opposée à la corrida, même dans les terres dites taurines. On y aime les courses de vachettes bon enfant, oui, beaucoup moins les corridas avec mise à mort. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.)
Selon un sondage Ifop de février dernier, 87 % de nos concitoyens souhaitent la fin de cette dérogation au code pénal qu’est la corrida.
Mme Nathalie Oziol.
Ça, c’est la démocratie !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
À ce niveau-là, il s’agit d’une exigence démocratique que quelques-uns aujourd’hui piétinent.
Mme Nathalie Oziol.
Tout à fait !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Or nous sommes les élus du peuple, les représentants de la nation : nous nous devons d’entendre ces citoyens. Nous devons affirmer qu’aucun animal, sans exception, ne peut plus subir d’acte de cruauté dans notre pays.
M. David Habib.
Ils ont appris la démocratie au Venezuela !
Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Alors qu’on se le dise : par ce mécanisme simple et mesquin d’obstruction parlementaire, vous perpétuez des actes de torture sur des animaux. Rien d’autre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également. – M. Vincent Descoeur proteste.)
Je conclus avec ces mots de Marguerite Yourcenar : « L’homme a peu de chances de cesser d’être un tortionnaire pour l’homme, tant qu’il continuera à apprendre sur la bête son métier de bourreau. » (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES, ainsi que Mme Béatrice Roullaud, se lèvent et applaudissent. – Mmes Christine Pires Beaune et Fatiha Keloua Hachi applaudissent également.)
Un député du groupe RN.
Pantalonnade !
Mme la présidente.
La parole est à M. le rapporteur.
Mme Anne-Laure Blin.
Il a peur !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Depuis trois mois que je travaille…
M. François Cormier-Bouligeon.
Huit auditions seulement !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…avec le groupe La France insoumise sur ce projet d’en finir en France avec cet acte de torture qu’est la corrida, j’ai beaucoup entendu parler de courage. Je regrette de n’en pas voir davantage dans cet hémicycle, à ce moment précis.
Mme Anne-Laure Blin.
Ah ben si, on est là !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
J’observe pas mal de lâcheté chez certains d’entre vous, dans votre manière de fuir le débat (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LR, Dem et HOR), de tout faire pour refuser le vote qui vous donnerait tort, pour ne pas donner satisfaction aux 87 % de Français qui réclament l’abolition de la corrida en France. (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – Mme Sandra Regol applaudit également. – Vives protestations sur les bancs des groupes RN, LR, Dem et HOR.)
Je vous ai demandé tout à l’heure de vous montrer à la hauteur de votre mandat, en retirant tous les amendements d’obstruction, afin de débattre dignement du sujet. Aucun n’a été retiré. Il y a plus de 480 amendements à examiner. (Exclamations sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.) À un rythme de vingt amendements par heure, cela représente vingt-quatre heures de débat. (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Bruno Millienne.
On est là !
M. Jocelyn Dessigny.
M. Caron cherche le courage d’abandonner !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Vous avez agi ainsi pour garantir la qualité des échanges – j’en suis certain !
Mme Anne-Laure Blin.
Mais qu’est-ce qu’il veut ?
M. David Habib.
Madame la présidente, nous voulons débattre !
Mme la présidente.
Chers collègues, merci de bien vouloir écouter le rapporteur jusqu’au bout.
Monsieur le rapporteur, pourriez-vous en venir au fait, s’il vous plaît ? (Exclamations continues.)
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Les Français nous regardent.
M. Vincent Descoeur.
Vous cherchez du courage, monsieur Caron ?
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Je veux leur donner quelques exemples des amendements que vous avez déposés pour nous empêcher de travailler :…
M. Jean-Yves Bony.
C’est le début !
Mme Marie Lebec.
Et la liberté d’expression des parlementaires ?
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…ils visent à former les toreros au bien-être animal ; à maintenir la corrida, en prévoyant une piqûre contre la douleur ; à interdire les corridas lorsque la température extérieure dépasse 40 degrés Celsius.
Mme Anne-Laure Blin.
C’est le moment de la discussion générale ! Nous aussi, nous avons le droit de nous exprimer !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Voilà comment vous travaillez – il faut que les Français le sachent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.) À cet instant, je pense à tous ceux qui attendaient tellement de cette journée. (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LR et Dem. – M. David Habib s’exclame également.) Je pense aux millions de Françaises et de Français qui se sont mobilisés avec l’espoir qu’enfin on en finisse avec cette exception intolérable, indigne de notre pays. Je pense aux dizaines d’associations mobilisées, pour lesquelles ce jour était historique.
Mme Anne-Laure Blin.
Pourquoi prenez-vous la parole ? Dites-le !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Je n’ose imaginer ce que pensent toutes ces personnes pendant qu’elles nous observent en ce moment même ! (Vives protestations sur les bancs des groupes RN et LR. – Vif échange de propos entre M. François Cormier-Bouligeon et plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.)
Mme Anne-Laure Blin.
Arrête ton show, on veut débattre !
M. Frédéric Boccaletti.
On veut débattre !
Mme la présidente.
S’il vous plaît chers collègues, un peu de calme ! On ne s’entend pas !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
L’insulte et l’invective : quelle belle vision vous donnez de cette Assemblée ! Quelle honte ! (Bruit.)
Mme la présidente.
Chers collègues, s’il vous plaît, du calme !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Ça me coûte et ça me navre de le reconnaître (« Ah ! » sur les bancs du groupe RE), et je tiens à m’en excuser auprès de celles et ceux qui ont tellement compté sur nous pour obtenir une victoire historique,…
Mme Anne-Laure Blin.
C’est du pipeau, un mauvais jeu d’acteur !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…mais je dois me rendre à l’évidence : nous ne pourrons pas abolir la corrida en France aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Applaudissez et soyez fiers de vous !
Mme Nathalie Oziol.
(S’adressant aux députés qui viennent d’applaudir.) Nous nous souviendrons de vous !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Je tiens à rassurer celles et ceux qui nous écoutent : ce qui vient de se passer…
Mme Anne-Laure Blin et M. Christophe Blanchet.
C’est votre décision !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…n’est pas une fin.
Mme Anne-Laurence Petel.
On n’est pas à la télévision !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Si madame, nous sommes un peu à la télévision : sachez qu’on nous regarde ! Les Français peuvent voir ce qui se passe dans l’hémicycle et je les invite à regarder ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Anne-Laurence Petel.
Ici, on fait la loi !
Un député du groupe RE.
Ici, vous n’êtes plus journaliste !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Vous voulez dire que journaliste est un métier honteux ? C’est une invective, pour vous ? (Exclamations continues. – Mme Laurence Petel interpelle M. le rapporteur.)
Mme la présidente.
On ne s’adresse pas directement à M. le rapporteur !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Je suis un député, qui essaye de faire voter des lois pour le bien des Français et pour celui du vivant ! Ce qui se passe aujourd’hui n’est pas une fin : ce n’est qu’un début.
M. Maxime Minot.
Nous voulons continuer à débattre !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Avec mes collègues du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, je déposerai une nouvelle proposition de loi…
Mme Anne-Laure Blin.
Ce sera la troisième !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…transpartisane…
Mme Anne-Laure Blin.
En accord avec la Macronie !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
…qui sera soumise au débat dans le cadre d’une semaine de l’Assemblée. (Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) J’invite tous nos collègues à y participer : je sais qu’ils sont nombreux et nombreuses, dans chaque groupe, à vouloir la fin de la corrida. Je vous invite à travailler ensemble pour aboutir à la victoire collective qu’attendent tous les Français et les Françaises ! (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – Les députés du groupe Écolo-NUPES applaudissent également, certains debout. – Plusieurs députés du groupe SOC applaudissent également.)
Mme Émilie Bonnivard.
Non !
Mme Anne-Laure Blin.
C’est notre liberté !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
La corrida sera bientôt abolie en France, nous le promettons !
Madame la présidente, vous l’avez compris : je suis malheureusement contraint de retirer ce texte. (Huées sur les bancs des groupes RN et LR. – Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – Quelques députés du groupe Écolo-NUPES applaudissent également, certains debout. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.)
Mme Sophia Chikirou.
Bravo Aymeric !
Mme la présidente.
Chers collègues, nous allons retrouver un peu de calme. À la suite de la déclaration du rapporteur, il est donc pris acte du retrait de la proposition de loi par son auteur…
M. Bruno Millienne.
C’est honteux !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
C’est vrai, c’est honteux !
Mme la présidente.
…en application de l’article 84, alinéa 2, du règlement. En conséquence, il n’y a pas lieu de poursuivre la discussion sur ce texte.
La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Monsieur le rapporteur, vous aviez pris une décision courageuse en inscrivant à l’ordre du jour un texte qui divise et met chacun devant ses responsabilités : abolir la corrida, au prétexte du bien-être animal, ou bien refuser l’abolition, au motif de la protection des traditions. Ce texte a été examiné en commission des lois. Un administrateur vous a été affecté et les services de la commission ont accompli un travail important. Nos collègues, quelle que soit leur opinion – elles sont toutes respectables –, ont déposé des amendements – parfois dilatoires, je le dis en toute transparence, et parfois d’obstruction.
Or le groupe LFI-NUPES se livre lui-même à cet exercice d’obstruction assez régulièrement, il faut le reconnaître. (Vives protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR et sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.)
Mme Raquel Garrido.
C’est faux !
M. Éric Coquerel.
Vous êtes un menteur !
M. Alexis Corbière.
Vous n’avez pas le droit de dire ça, c’est ridicule, vous vous déshonorez !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Vous avez ouvert un débat et vous avez eu le loisir de vous exprimer et d’exposer vos motifs ; le Gouvernement a eu l’occasion de présenter sa position.
Mme Raquel Garrido.
C’est honteux !
Mme la présidente.
Madame Garrido, un peu de calme s’il vous plaît !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Le groupe LFI-NUPES a eu l’occasion de dire ce qu’il pensait de votre proposition, monsieur le rapporteur.
Mme Raquel Garrido.
C’est honteux !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Tous les députés inscrits dans la discussion générale auraient mérité eux aussi d’exposer la position des différents groupes, ne serait-ce que pour la faire connaître à nos concitoyens. (Mme Raquel Garrido continue de s’exclamer.)
M. Thomas Rudigoz et M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Ainsi, chacun aurait su comment se positionnent les différents groupes et vous auriez eu une réponse à la question que vous avez posée.
De même, un amendement de suppression devait être discuté.
Mme Bénédicte Taurine.
Il y en avait vingt !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Vingt amendements de suppression, me corrige-t-on, qui ont été adoptés par la commission – on en pense ce qu’on veut.
Mme Raquel Garrido.
Mais pourquoi parle-t-il ?
Mme Marie Lebec.
C’est la démocratie, madame Garrido !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Si ces amendements avaient été examinés, chacun aurait pu connaître la position et le vote de tous les députés, puisque vous n’auriez pas manqué de demander un scrutin public. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes RN, Dem, LR et HOR. – M. David Habib applaudit également.) Si tel était votre but, il aurait été possible d’identifier les opposants à l’abolition de la corrida. Chacun aurait pu constater la décision des uns et des autres, prise en toute responsabilité.
M. Jocelyn Dessigny.
La vérité, c’est que M. Caron a peur !
M. Sacha Houlié, président de la commission des lois.
Je regrette sincèrement que tout le travail effectué au préalable ait été vain et que cette clarification n’ait pu avoir lieu. Vous avez finalement fait preuve de bien peu de courage aujourd’hui, comparé à celui que vous aviez rassemblé jusqu’alors. (Mmes et MM. les députés des groupes RE, RN, LR et HOR applaudissent, certains debout. – Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – Vives protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Rappels au règlement
Mme la présidente.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour un rappel au règlement.
Mme Emmanuelle Ménard.
Mon intervention se fonde sur l’article 70, alinéa 3. M. Caron a traité les députés qui défendent la corrida de lâches ; il les a accusés de manquer de courage. Par ailleurs, il retire son texte avant que nous ayons pu débattre. Je souscris aux propos du président de la commission des lois : afin de nous prononcer, allons au bout du débat – nous en avons pour une heure tout au plus. Nous souhaitons examiner et soumettre au vote les amendements de suppression, qui ont été adoptés en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN, sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RE.)
Nous voulons voter, pour affirmer clairement notre position : nous défendons la corrida, contrairement à vous. En faisant ce que vous venez de faire, monsieur Caron, c’est vous qui manquez singulièrement de courage ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Les députés du groupe RN applaudissent également, certains debout.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Anne-Laure Blin, pour un rappel au règlement.
Mme Anne-Laure Blin.
Il se fonde sur le même article que celui de Mme Ménard, relatif à la bonne tenue des débats. Monsieur le rapporteur, vous fuyez le débat, vous en avez peur !
M. Frédéric Boccaletti.
Exactement !
Mme Anne-Laure Blin.
Nous avons débattu la semaine dernière en commission des lois, argument contre argument. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Pendant une semaine, les députés qui se sont élevés contre votre texte ont été invectivés et insultés ; ils s’en sont pris plein la figure, simplement parce que vous ne voulez pas que nous exprimions un avis différent. Le déni de démocratie auquel nous assistons est scandaleux ! Vous interrompez la discussion générale juste avant que nous puissions émettre un avis différent.
M. Jocelyn Dessigny.
M. Caron n’aime pas la démocratie !
M. Aymeric Caron, rapporteur.
Vous êtes drôle !
M. Jocelyn Dessigny.
Pas vous !
Mme Anne-Laure Blin.
Vous laissez croire à tout le monde que seul votre avis refléterait celui des Français ; eh bien, non ! Plusieurs députés ont déposé des amendements sur ce texte ; nous demandons simplement de les examiner et de les soumettre au vote, afin d’entendre les arguments des uns et des autres et de savoir si vous représentez vraiment les Français. Or la commission des lois s’est exprimée et a adopté les amendements de suppression. Vous avez peur que votre texte soit une nouvelle fois mis en échec. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
Mes chers collègues, je ferai droit aux demandes de rappel au règlement – une par groupe. Je vous rappelle que, le texte ayant été retiré, il ne sert à rien de demander la discussion des amendements.
La parole est à M. Alexis Corbière, pour un rappel au règlement.
M. Alexis Corbière.
Il se fonde sur l’article 100 relatif à la bonne tenue des débats. Je voudrais rappeler à tous les collègues, quel que soit leur groupe, que nous débattons aujourd’hui dans le cadre de la niche parlementaire du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale.
Mme Anne-Laure Blin.
Et alors ?
M. Alexis Corbière.
Alors ce groupe est contraint, comme le seront tous les groupes, d’examiner des textes dans un délai fixe, compris entre neuf heures du matin et minuit. (Protestations sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, Dem, LR et HOR.) Collègues, vous subirez vous aussi cette contrainte pour votre propre travail parlementaire. Lorsque vous présenterez vos propositions de loi, gare aux pluies d’amendements déposés par les autres groupes, qui profiteront de l’occasion pour vous empêcher d’avancer !
M. Jocelyn Dessigny.
Des menaces, monsieur Corbière ?
M. Fabien Di Filippo.
C’est ça, le totalitarisme !
M. Jocelyn Dessigny.
Le stalinisme de La France insoumise !
M. Alexis Corbière.
Quel que soit le groupe dans lequel nous siégeons, c’est notre travail collectif qui est aujourd’hui altéré ! (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES applaudissent, certains debout.) Le parlementarisme, les droits des parlementaires et ces journées de niches, limitées dans le temps, auxquelles tous les groupes ont droit, doivent être respectés par tous ! (Mme Michèle Peyron proteste.)
Mme Prisca Thevenot.
Par vous d’abord !
M. Alexis Corbière.
Monsieur le président de la commission des lois, vous avez évoqué le fait que nous avions, une fois en particulier, déposé un nombre significatif d’amendements sur un texte présenté par le Gouvernement : ce texte n’était pas contraint par la limite horaire à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) En outre, il ne s’agissait pas de bloquer le débat mais de l’allonger pour que nos concitoyens en soient plus instruits encore.
En défense de mon ami le rapporteur Aymeric Caron dont je connais les convictions, je tiens, au nom de notre groupe, à le saluer (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES) et à répéter ce qu’il a dit à ceux qui lui ont reproché de se défiler : le débat continuera et sera enrichi.
Mme Anne-Laure Blin.
Alors laissez-le se tenir !
M. Alexis Corbière.
Nous allons déposer un texte transpartisan parce qu’il y a des partisans de l’abolition de la corrida dans tous les groupes ! (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES applaudissent, la plupart debout.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Bruno Millienne, pour un rappel au règlement.
M. Bruno Millienne.
Il se fonde sur le même article. Monsieur Caron, écoutez-moi : le groupe Dem n’ayant pas provoqué d’embolie parlementaire, ses membres sont à même de parler sincèrement de ce qui vient de se passer. Il y a trois semaines, je vous ai rencontré à la buvette de l’Assemblée ; vous m’avez alors demandé si je voterais votre texte. Je me souviens très bien de ma réponse : entre la culture et la cruauté, mon opinion n’était pas faite ; j’avais besoin d’être instruit.
Je regrette vivement, du plus profond de mon cœur, que nous n’ayons pas ce débat. Vous auriez pu le laisser aller à son terme, perdre peut-être, et remettre ensuite votre ouvrage sur le métier. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Au moins, aurions-nous pu avoir cette discussion ; je suis donc frustré de son interruption. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes RE, RN et LR.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Anne-Laurence Petel, pour un rappel au règlement.
Mme Anne-Laurence Petel.
Il se fonde sur l’article 70, madame la présidente. J’abonde dans le sens des propos tenus par mes collègues, parce que j’avais l’intention de voter en faveur de cette proposition de loi.
M. Sylvain Maillard.
Moi aussi !
Mme Anne-Laurence Petel.
J’allais la voter, parce que…
M. Alexis Corbière.
Il aurait fallu vingt-quatre heures de débats !
Mme Anne-Laurence Petel.
Monsieur Corbière ! (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
S’il vous plaît, chers collègues, seule Mme Petel a la parole. Monsieur Corbière, vous venez de vous exprimer, merci de bien vouloir écouter Mme Petel !
Mme Anne-Laurence Petel.
Il faut aussi un peu de courage pour voter une proposition de loi sur l’abolition de la corrida contre l’avis majoritaire de son propre groupe. Vous m’avez ôté cette possibilité de débattre. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Raquel Garrido.
Ce n’est pas vrai !
Mme la présidente.
Madame Garrido, un peu de calme s’il vous plaît !
Mme Anne-Laurence Petel.
M. Caron a découvert qu’on pouvait déposer des amendements d’obstruction : mais c’est à peu près ce que fait La France insoumise depuis le début de la législature. (Mêmes mouvements.)
M. Loïc Prud’homme.
Quelle blague ! Et si on parlait de vos 49.3 ?
Mme Anne-Laurence Petel.
Nous avions la possibilité d’avoir un vrai débat démocratique et, peut-être, de construire un compromis, d’effectuer des rapprochements, de confronter des idées et des points de vue – tout ce que nous devons faire dans l’hémicycle.
Ce qui se passe aujourd’hui est conforme à l’attitude que vous avez eue en commission des lois, monsieur le rapporteur : une telle condescendance vis-à-vis de vos contradicteurs que même les indécis ne se sont pas rangés dans votre camp ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe HOR. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous avez réussi à unir les gens contre vous !
Quand on écrit la loi, on doit fabriquer du compromis, ce que vous n’avez pas su faire. (Mme Raquel Garrido s’exclame.) Je le regrette.
Je déplore également que vous ayez choisi d’arrêter la discussion générale après une prise de parole d’une députée de la NUPES.
M. Jean-René Cazeneuve.
Comme par hasard !
Mme Anne-Laurence Petel.
Je suis désolée, je n’ai pas été élue députée pour utiliser cet hémicycle comme un plateau de télévision (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR) ; je le considère pour ce qu’il est, à savoir le lieu où l’on fabrique la loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et LR, et sur quelques bancs du groupe RN.)
M. Jean-Yves Bony.
Bravo !
Mme Émilie Bonnivard.
Excellent !
Mme la présidente.
La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour un rappel au règlement.
M. Hervé de Lépinau.
Il se fonde sur l’article 70, alinéa 5. En effet, les députés du groupe Rassemblement national considèrent que M. Caron les a outragés, en remettant en cause l’essence même du travail parlementaire en dénonçant le nombre d’amendements déposés.
Comme nous sommes désormais privés de la possibilité de débattre sur le fond, je tiens à souligner, premièrement, que la corrida concerne des écosystèmes régionaux importants – il y avait donc des choses à dire – et, deuxièmement, que l’outrage ne peut dissimuler votre débandade, qui est d’autant plus désagréable que nous avons été véritablement harcelés de courriels. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Alexis Corbière et Mme Raquel Garrido.
Et ce n’est pas fini !
M. Hervé de Lépinau.
Depuis au moins un mois, en effet, nous sommes assommés par plusieurs dizaines de courriels appelant à voter votre proposition de loi.
Du reste, vous avez décidé de la retirer après votre discours à la tribune, alors que vous aviez inscrit à l’ordre du jour de votre journée de niche parlementaire un texte intéressant qui concernait le pouvoir d’achat des Français. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Alexis Corbière.
Vous avez voté contre en commission ! Vous êtes des hypocrites !
M. Hervé de Lépinau.
Par dogmatisme, vous avez préféré faire de l’esbroufe.
S’agissant du premier texte inscrit à l’ordre du jour de votre niche, il a été dénaturé par le vote d’un amendement. Une fois de plus, vous avez remporté une victoire à la Pyrrhus. Au bout du compte, la niche parlementaire du groupe LFI-NUPES n’aura été qu’une vaste blague ; il est regrettable que des sujets intéressants n’aient pu être débattus dans l’hémicycle. À ce titre, nous espérons un jour examiner la question de la réintégration des soignants. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
Le texte est donc retiré et je vous propose de suspendre nos travaux quelques minutes avant de passer à l’examen de la proposition de loi suivante.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
3 • Réintégration du personnel des établissements de santé non vacciné
Discussion d’une proposition de loi
Mme la présidente.
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé (nos 322, 493).
Présentation
Mme la présidente.
La parole est à Mme Caroline Fiat, rapporteure de la commission des affaires sociales.
Mme Caroline Fiat, rapporteure de la commission des affaires sociales.
Je suis heureuse de pouvoir vous présenter notre proposition de loi sur la réintégration des personnels non vaccinés moyennant un protocole sanitaire strict.
Je le répéterai plusieurs fois, dans l’espoir que la pédagogie de la répétition porte ses fruits : notre proposition de loi ne remet pas en cause l’obligation vaccinale.
M. Sylvain Maillard et M. Benjamin Haddad.
C’est faux !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Je le répète : notre proposition de loi ne remet pas en cause l’obligation vaccinale.
M. Sylvain Maillard.
Eh si !
M. Benjamin Haddad.
Vous êtes avec les antivax !
M. Ugo Bernalicis.
Prenons un peu de hauteur !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Ainsi, si nous sommes naturellement ouverts au débat, je vous remercie de ne pas vous retrancher sans cesse derrière cette argumentation, comme ce fut le cas en commission, pour justifier votre opposition au texte. Je ne suis devenue ni antiscience ni antivaccin.
M. Benjamin Haddad.
Mélenchon voulait autoriser le vaccin Sputnik V !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Dois-je rappeler qu’au mois de janvier 2021, j’ai été personnellement menacée pour avoir remercié le directeur du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de ma circonscription d’avoir levé l’obligation vaccinale dès le début de la vaccination ? À l’époque, beaucoup d’entre vous s’interrogeaient d’ailleurs sur le fait de se faire vacciner alors que je fus parmi les premières personnes à recevoir le vaccin.
Je vous remercie donc d’éviter toute caricature, personne sur nos bancs n’est antiscience. Nous écoutons ce que nous disent les scientifiques, nous le prenons en considération.
Mme Prisca Thevenot.
Vous n’avez jamais soutenu la campagne de vaccination !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
C’est d’ailleurs pourquoi nous avons soumis notre protocole aux autorités sanitaires. La Haute Autorité de santé (HAS) l’a ainsi validé.
En commission, j’ai d’ailleurs entendu tout et son contraire. Un député de la minorité présidentielle…
M. Philippe Vigier.
Ça va !
Mme Nathalie Oziol.
Oui, de la minorité !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
…a indiqué que mon protocole ne protégerait pas. Or c’est précisément celui qui a été établi par M. Castex, alors Premier ministre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Par conséquent, soit le Gouvernement a menti sur l’efficacité de ce protocole,…
Mme Prisca Thevenot.
On y revient !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
…soit vous faites preuve d’une grande mauvaise foi car il s’agit d’une proposition de loi du groupe LFI-NUPES.
Ensuite, vous vous opposez à la proposition de loi en rétorquant qu’elle ne concernerait que très peu de monde.
M. Thomas Mesnier.
C’est vrai !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
« En même temps », vous expliquez que le protocole prévu coûtera beaucoup trop cher. Les deux affirmations sont incompatibles.
De plus, comme je l’ai déjà évoqué, chaque personne compte. Demandez à un directeur d’Ehpad la différence que ferait la présence au quotidien d’une ou deux personnes supplémentaires dans son équipe. (M. Ugo Bernalicis applaudit.) Cela permettrait, entre autres, à chacun de bénéficier décemment d’heures et de jours de repos et de prendre soin plus dignement des résidents.
M. Benjamin Haddad.
Vous voulez vraiment envoyer des personnes non vaccinées dans les Ehpad pour soigner nos grands-parents ?
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
La situation de notre système de santé et de nos secours est très préoccupante. Nos personnels sont, plus que jamais, au bord de la rupture et tous nos concitoyens pâtissent d’une situation catastrophique.
M. Philippe Vigier.
On doit protéger nos personnels !
Mme la présidente.
Chers collègues, je sais que vous êtes impatients de vous exprimer ; cela tombe bien, nous en venons bientôt à discussion générale. Seule Mme la rapporteure a la parole.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Plus personne n’oserait nier la pénurie de personnels dans les établissements de santé, à l’heure où des services entiers doivent fermer et où l’on trie les enfants à soigner face à l’épidémie de bronchiolite qui sévit actuellement.
Mme Prisca Thevenot.
C’est indécent !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
La semaine dernière encore, à l’hôpital de Saint-Malo, un homme est décédé sur un brancard, dans un couloir, alors qu’une alerte avait été lancée sur le manque de personnel. Ces scènes sont inacceptables.
Les services de secours, notamment les pompiers, rencontrent les mêmes difficultés. Mobilisés sans relâche contre les mégafeux qui ont touché la France, ils ont connu un été épuisant. Dans un contexte de dérèglement climatique, ils sont amenés à être toujours plus mobilisés.
La situation est particulièrement dramatique en outre-mer, où les appels à la réserve sanitaire se multiplient en même temps que les tensions sociales.
Si le nombre exact de personnes suspendues est difficile à trouver, la réalité sur le terrain est frappante : dans ce contexte, chaque personne compte.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Pour rejeter notre proposition de loi, certains expliquent qu’elle ne réglera pas le problème de pénurie de personnel. Nous sommes bien évidemment conscients que notre texte ne suffira pas à rattraper des décennies de casse de nos services publics. Je vous renvoie à toutes les propositions de notre groupe en la matière. Notre proposition de loi suggère donc une porte de sortie acceptable pour toutes ces personnes. Il ne s’agit pas de les réintégrer comme si de rien n’était, mais de prendre en compte le fait que nous avons besoin d’eux et qu’ils souhaitent revenir pour exercer leur métier, un métier qu’ils aiment. En outre, la question se posera inévitablement puisqu’il ne sera pas possible de laisser toutes ces personnes en errance, dans un statut paraissant juridiquement flou.
Malheureusement, la crise de confiance est profonde. L’incompréhension règne de part et d’autre, après plus d’un an de mise au ban de ces personnels, malgré leur souhait de prendre soin – leur vocation. Les personnels suspendus peinent à comprendre le rejet persistant dont ils font l’objet, alors même que la plupart sont vaccinés – j’en fais partie – mais ne sont plus à jour, et que l’on fait appel à des renforts étrangers qui, eux, échappent à l’obligation vaccinale.
La présente proposition de loi vise à sortir de cette situation par le haut, sans aucun dogmatisme. Elle prévoit de réintégrer ces personnels dans le cadre d’un protocole sanitaire renforcé. Elle est fondée sur une approche scientifique et s’inscrit dans une démarche de responsabilité. De plus, elle sera temporaire, en attendant qu’une solution durable soit trouvée. Un débat caricatural serait donc injustifié. Finalement, la réintégration des personnels suspendus permettra de renouer avec la stratégie consistant à convaincre plutôt qu’à contraindre, préconisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Chers collègues, j’espère que ce texte fera consensus. Je sais que certains d’entre vous sont venus de loin pour le voter. Il nous revient de prendre cette décision politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
M. Sylvain Maillard.
Madame la ministre déléguée, faites-les revenir à la raison !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
À l’heure où nous examinons cette proposition de loi, je commencerai par rappeler deux choses. D’abord, le gros de la tempête est peut-être derrière nous, mais nous ne sommes pas à l’abri d’une nouvelle bourrasque, par exemple de l’émergence d’un nouveau variant inquiétant. Nous ne devons à aucun moment oublier que le covid-19 n’est en aucun cas une maladie bénigne. On en meurt, toujours, tous les jours, partout dans notre pays.
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Encore aujourd’hui, la vaccination, qui nous a permis de dépasser cette pandémie, joue un rôle décisif. C’est grâce à elle que nous avons pu retrouver une vie normale et mieux protéger les plus fragiles d’entre nous. J’en profite d’ailleurs pour rappeler que les campagnes hivernales de vaccination contre la grippe et la covid ont commencé. J’invite tous nos concitoyens les plus fragiles, et ceux qui les entourent, à se faire vacciner contre ces deux maladies. (MM. Sylvain Maillard et Éric Alauzet applaudissent.)
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
J’espère, mesdames et messieurs les députés, que vous pourrez relayer ce message dans vos circonscriptions. La vaccination protège, notamment contre les formes graves de ces deux virus. La vaccination contre la bronchiolite est d’ailleurs une piste prometteuse pour les prochaines années, pour mieux protéger les plus jeunes d’entre nous. Je rappelle aussi l’utilité des gestes barrières face à la diffusion du covid-19, mais aussi à la grippe et à la bronchiolite : nous recommandons notamment le port du masque en situation de promiscuité, par exemple dans les transports en commun.
Je rappelle également que l’obligation vaccinale pour les professionnels exerçant dans les secteurs sanitaire et médico-social, si elle a fait beaucoup de bruit, n’est ni nouvelle ni inédite. Prenons l’exemple de l’hépatite B : l’obligation vaccinale des personnels de santé a permis, de longue date, une très forte diminution du nombre de cas d’origine professionnelle, alors qu’ils étaient très fréquents dans les années 1970. Cette obligation est tout simplement la contrepartie d’une responsabilité à part de nos soignants vis-à-vis des personnes qu’ils prennent en charge et qui sont, par définition, souvent fragiles. La loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire a donc prévu, dans le cadre de notre combat contre le covid-19, l’obligation vaccinale contre ce virus, pour les personnes travaillant dans les secteurs sanitaire et médico-social. Il s’agit d’une mesure justifiée de protection des publics les plus fragiles, de limitation de la propagation du virus et de protection du système de santé. Bien sûr, la liste des vaccins obligatoires pour les professionnels de santé évolue au fil des années et des épidémies. C’est d’ailleurs pourquoi nous avons récemment saisi la Haute Autorité de santé, sur un spectre beaucoup plus large que la seule obligation de vaccination contre le covid.
Ces éléments de contexte rappelés, nous sommes donc réunis pour examiner la proposition de loi portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé, déposée par la députée Caroline Fiat. Je tiens d’abord à revenir sur les chiffres et sur les faits. Ils nous disent une chose très simple : l’épidémie n’est pas derrière nous et la vaccination reste vitale. Je l’ai dit : le covid-19 est loin d’avoir dit son dernier mot. Et il revient puisque le taux de reproduction, qui mesure la circulation du virus, est redevenu positif la semaine dernière, à hauteur de 1,19 exactement, contre 0,93 la semaine précédente et 0,65 deux semaines auparavant. Vous le voyez, ce chiffre est en croissance et cela signifie que le virus circule à nouveau activement et que chaque personne qui contracte la maladie la transmet à plus d’une autre.
Dans ce contexte, l’obligation vaccinale est essentielle : d’une part pour limiter les risques de contamination et protéger ainsi les patients fragiles et hospitalisés, les personnes âgées et les personnes à risque de forme grave, notamment les personnes immunodéprimées ; d’autre part pour protéger les personnels soignants et réduire les risques d’absentéisme dans les services déjà en tension. En un mot, nous devons rester vigilants face à l’épidémie et les établissements de santé et médico-sociaux ne sont pas dispensés de ce devoir de vigilance.
Sur le fond, la réintégration des personnels non vaccinés n’est pas opportune. J’entends dire qu’elle serait la réponse aux difficultés que rencontre notre système de santé : c’est faux. Tout d’abord, ce phénomène reste très minoritaire, voire marginal. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 99 % des professionnels concernés ont rempli leur obligation. Je tiens à leur rendre hommage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
M. Michel Lauzzana.
Bravo !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Ce pourcentage confirme l’adhésion des professionnels à l’obligation vaccinale. Ils ont compris qu’elle s’inscrivait dans une logique d’éthique du soignant et qu’il s’agissait d’une mesure de protection d’autrui. Il reste environ 0,5 % de professionnels considérés comme non vaccinés – plus précisément, 0,3 % des personnels du secteur sanitaire. Il ne s’agit d’ailleurs pas seulement des soignants, mais aussi de personnels administratifs et techniques. En outre, ces chiffres sont ceux élaborés par le ministère au mois de mai : il est très probable qu’ils soient encore moins élevés aujourd’hui. Nous avons donc demandé qu’ils soient actualisés afin que nous puissions mesurer le phénomène à ce jour. Selon l’Ordre national des infirmiers, il reste aujourd’hui 1 000 infirmiers suspendus pour une population de 637 000 personnes, soit environ 0,16 % des effectifs.
M. Michel Lauzzana.
Bravo !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Selon la Fédération hospitalière de France, les personnes concernées seraient de l’ordre de 4 000, sur plus de 1,2 million d’agents. Vous le voyez, dans l’ensemble, il serait trompeur de penser que le phénomène de non-vaccination des personnels soignants concerne plus qu’une infime minorité. Votre proposition de loi, madame la députée, prévoit de mettre fin à une obligation vaccinale.
Mme Mathilde Panot.
Mais non !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Nous pouvons en débattre, sans perdre de vue les principes de respect, de pragmatisme et d’éthique car l’éthique est le sens de l’engagement des professionnels du soin. Par ailleurs, je pense que nous devons veiller à évaluer objectivement la situation.
M. Philippe Vigier.
Absolument !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
C’est pourquoi, cet été, nous avons saisi la HAS sur l’opportunité de revenir sur l’obligation vaccinale pour les professionnels. Dans son avis du 22 juillet, elle a jugé que « les données n’étaient pas de nature à remettre en cause cette obligation vaccinale », pour toutes les personnes ayant « des contacts fréquents et rapprochés avec des personnes vulnérables ». Le comité de scientifiques, des sociétés savantes, les ordres professionnels, mais aussi France Assos Santé, qui représente les patients, tous se sont prononcés avec conviction pour le maintien de l’obligation vaccinale.
Bien sûr, cela ne veut pas dire que nous ne devons pas engager une réflexion de plus long terme sur l’obligation vaccinale contre le covid-19 et, plus généralement, sur les vaccins obligatoires recommandés pour les soignants. C’est pourquoi nous avons saisi la HAS la semaine dernière, conformément à notre engagement, sur la révision de l’ensemble des recommandations vaccinales des professionnels exerçant dans les secteurs sanitaire et médico-social. La HAS se prononcera donc sur la réactualisation des recommandations vaccinales pour les professionnels de santé, en prenant en compte l’obligation vaccinale contre le covid-19. Nous attendons désormais ses recommandations : elles devraient être publiées dans les prochaines semaines.
Mais, plus profondément, il y a un enjeu d’éthique auquel je serai très attentive. Je sais que les professionnels du soin y sont particulièrement attachés, d’où les chiffres colossaux de vaccination de ces femmes et de ces hommes,…
M. Philippe Lottiaux.
Ils n’avaient pas le choix !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
…qui se sont avant tout engagés pour soigner, guérir et prendre soin des personnes les plus vulnérables. Les professionnels sont, pour beaucoup, les premiers à nous dire être totalement opposés à la perspective d’un retour de leurs collègues qui n’ont pas joué le jeu de la vaccination, et cela alors qu’ils sont les premières victimes du manque de personnels dans les établissements de santé. Je peux donc déjà vous dire que le remède que vous proposez est pire que le mal. (M. Philippe Berta applaudit.)
M. Sylvain Maillard.
Bravo !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Beaucoup de professionnels se sont accordés sur le fait que l’hésitation vaccinale était éthiquement inacceptable dans leur profession. C’est bien sûr une question complexe et délicate. Dans ce contexte, je souhaite donc connaître l’avis du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), que nous avons saisi récemment. Il pourra nous épauler sur la définition de critères permettant de justifier, ou non, de la mise en place d’une obligation vaccinale pour les professionnels de santé et pour les professionnels exerçant dans les secteurs sanitaire et médico-social. Ce sera notamment l’occasion de chercher à concilier plusieurs de nos valeurs fondamentales, entre la liberté individuelle d’une part et, d’autre part, le bénéfice collectif de la vaccination, au vu de l’intérêt général qui sous-tend notre contrat social.
Enfin, concernant les moyens, le protocole sanitaire que propose le texte n’est ni réaliste, ni pratique. Très honnêtement, je pense qu’il est trop complexe, et inapplicable en pratique.
M. Antoine Léaument.
C’est celui de Castex !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
L’article 1er fait ainsi reposer la réintégration du personnel non vacciné sur la présentation quotidienne d’un test de dépistage négatif du covid-19, en cours de validité. L’exposé des motifs ajoute qu’il doit s’accompagner du port d’un équipement de protection. En pratique, ce protocole n’est ni réaliste, ni efficace.
Mme Mathilde Panot.
Demandez à M. Castex !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
D’une part, le test présenté peut être en réalité un faux négatif. Vous me répondrez que c’est la raison pour laquelle le dispositif prévoit d’imposer le port d’un équipement de protection. Cependant, les personnels ne porteront pas en permanence de tels équipements. Ils seront, par exemple, susceptibles de les enlever lors des pauses déjeuner. De plus, il serait très lourd, pour les établissements de santé, ainsi que pour les établissements sociaux et médico-sociaux, de contrôler que les personnels non vaccinés ont bien effectué régulièrement les tests. En bref, le protocole proposé est impossible, non seulement pour les professionnels concernés, à réaliser, mais aussi pour les établissements, à contrôler : c’est d’ailleurs ce qui vous a été dit lors des auditions que vous avez réalisées avec Mme la rapporteure.
M. Sylvain Maillard.
Exactement !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
L’article 2 prévoit quant à lui que l’État finance les tests de dépistage virologique, ainsi que des équipements de protection individuelle nécessaires à l’exercice de leur activité professionnelle, comme les masques FFP2. C’est une disposition coûteuse…
Mme Mathilde Panot.
Ah, c’est donc cela !
Mme Clémence Guetté.
Essayez les sacs-poubelles, ils coûtent moins cher !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
…qui ne se justifie pas sur le plan éthique. De plus, est-ce prioritaire, à l’heure où nous devons prendre des décisions importantes pour aider le système de santé à faire face à des défis à court terme, comme l’épidémie de bronchiolite, ou à des défis à long terme ? Je m’interroge sur le sens de vos priorités politiques.
Mesdames et messieurs les députés, nous devons prendre le temps de la réflexion et nous fonder sur des données objectives en ce qui concerne l’opportunité mais aussi le caractère éthique de la levée de l’obligation vaccinale. Surtout, les moyens proposés par ce texte – j’en suis convaincue – ne sont pas les bons.
M. Antoine Léaument.
C’est vous qui n’êtes pas convaincante !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
M. Sylvain Maillard.
Très bien !
Discussion générale
Mme la présidente.
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Philippe Nilor.
M. Jean-Philippe Nilor.
La suspension des personnels soignants et de secours a débouché sur une crise sociale aux effets dévastateurs, partout en France, mais particulièrement dans les territoires dits d’outre-mer. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Le présent texte nous offre l’opportunité de renouer et de nous réconcilier avec la stratégie consistant à « convaincre plutôt que contraindre », préconisée par l’OMS.
M. Sylvain Maillard.
Vous avez toujours été contre les vaccins, monsieur Nilor !
M. Jean-Philippe Nilor.
Nous sommes donc appelés à nous prononcer, sans aucun dogmatisme, avec beaucoup de sérénité, avec intelligence et, surtout, hors d’un état d’esprit guerrier, sur l’avenir de milliers d’hommes et de femmes, jusque-là pleinement investis dans un service public.
Aujourd’hui, bien que non éradiqué, le virus n’est plus aussi virulent – c’est une réalité – alors que la pénurie de soignants embolise nos hôpitaux au point de compromettre l’accès aux soins, notamment pour les plus démunis.
Et pourtant, dans les grands médias nationaux aux ordres de quelques milliardaires,…
M. Philippe Vigier.
Oh là là ! Quel niveau !
M. Jean-Philippe Nilor.
...on nous dit à longueur de journée que les personnels suspendus sont peu nombreux, comme si le nombre pouvait justifier une quelconque injustice ; que beaucoup se sont réinsérés ; que leur réintégration poserait un problème d’éthique, en particulier par rapport à ceux qui sont vaccinés.
M. Sylvain Maillard.
Ce serait surtout un problème éthique vis-à-vis des malades !
M. Jean-Philippe Nilor.
Si, dans toute la France, la suspension des personnels a causé un tort considérable au fonctionnement des établissements de soins et de secours, qui ne disposent pas de moyens humains suffisants, dans les outre-mer, ce phénomène se mesure au centuple.
Un chiffre : en Guadeloupe, seuls 20 % des personnels présentent un schéma vaccinal complet à trois doses. Un cinquième seulement ! La suspension des personnels non vaccinés vient donc aggraver sensiblement les problèmes de chômage endémique et de pauvreté, dans un contexte, rappelons-le, de vie chère.
Mme Danièle Obono.
Est-ce éthique, ça ?
M. Jean-Philippe Nilor.
Je pense en ce moment même à Philippe, infirmier qui a perdu son père atteint d’un cancer lié à la chlordécone. Sa mère, diabétique, doublement vaccinée, est morte des suites du covid. Philippe s’est senti trahi ; il n’a pas eu confiance dans la parole de l’État. Outre le deuil qui le frappe, ce couple est donc privé de tout revenu, son épouse, soignante elle aussi, étant suspendue également. Leur fils Olivier, qui était un brillant étudiant, sombre chaque jour dans la marginalité depuis que ses parents ne peuvent plus financer ses études.
Combien de familles, comme celle de Philippe, n’ont pu se réinsérer ?
Il vous faut comprendre que les spécificités du marché du travail rendent impossible toute réorientation professionnelle des personnels suspendus, à moins de les condamner une nouvelle fois à l’exil vers la France – ce qui amplifie encore le phénomène de saignée démographique sévissant déjà dans nos territoires.
M. Paul Vannier.
Il a raison !
M. Jean-Philippe Nilor.
Si l’on considère le contexte ultramarin, ces familles suspendues avaient-elles des raisons de s’opposer à cette injonction à l’injection ?
Le scandale de la chlordécone, sa gestion opaque et ses conséquences sur la santé des populations pour des générations, l’incapacité de l’État à endosser ses responsabilités justifient amplement leur position.
Mme Danièle Obono.
Tout à fait !
M. Jean-Victor Castor.
Très bien !
M. Marcellin Nadeau.
C’est vrai !
M. Jean-Philippe Nilor.
Où était l’éthique à ce moment-là ? Où est l’éthique aujourd’hui ? Ni Philippe, ni son épouse n’ont commis de faute professionnelle ou de manquement.
Dans les familles, ce drame de l’exclusion forcée provoque un désarroi absolu qui va nourrir les violences et les situations de non-droit ; ces suspendus ne sont ni salariés ni chômeurs.
Dans les établissements de santé, la permanence des soins n’est désormais qu’une chimère. Il est devenu impossible d’assurer la continuité du service public hospitalier et la prise en charge des patients est plus que compromise, notamment dans les Ehpad.
L’État doit reconnaître ses responsabilités dans l’abandon de nos hôpitaux depuis des décennies, et son inaction face à leur dégradation. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
M. Marcellin Nadeau.
Très bien !
M. Jean-Philippe Nilor.
Où est l’éthique ? Pour nombre de nos compatriotes, l’accès aux soins est dans de nombreux cas impossible. Obtenir un rendez-vous médical relève du parcours du combattant. Le suivi médical est hypothétique. Seuls ceux qui peuvent payer un billet d’avion à un prix prohibitif pourront espérer se faire soigner dans l’Hexagone. Pour les autres, la triste règle, c’est désormais : se sauve qui peut, financièrement.
En définitive, ces populations sont prises en otage par les décisions dogmatiques du Gouvernement qui, après les avoir empoisonnées au chlordécone, assume de les priver aujourd’hui du droit aux soins. Quoi qu’on en dise, c’est une triple violence institutionnelle, sociétale et sanitaire, traduction concrète d’une maltraitance dont il faudra un jour ou l’autre répondre devant l’histoire.
M. Sylvain Maillard.
Donc le vaccin, c’est la même chose que le chlordécone ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Mathilde Panot.
Ce n’est pas du tout ce qu’il a dit, monsieur Maillard !
M. Jean-Philippe Nilor.
Encore une fois, où est l’éthique ? De quelle éthique parlez-vous ? Est-elle à géographie variable ?
La France est-elle prête à assumer d’être d’un côté la deuxième puissance maritime mondiale, grâce à ses territoires dits d’outre-mer, et de l’autre côté d’exposer aux yeux du monde entier sa capacité à exclure des populations de l’accès à un droit aussi fondamental que celui de la santé ?
Il est temps pour le Gouvernement et pour la représentation nationale de s’honorer en reconsidérant sans délai la situation de ces personnels, comme l’ont déjà fait tant d’autres pays.
En effet, qu’ils soient un ou plusieurs milliers, ces professionnels manquent cruellement à notre système de santé et de secours. Leur réintégration s’impose à double titre : au titre de la continuité, de la sécurité, de la qualité, de l’accessibilité aux soins et de l’urgence des prises en charge sociales ; au titre de l’obligation qui incombe à l’État et à tous les acteurs de se mobiliser sur les vrais chantiers structurels de la santé, du social, du médico-social et du secours.
Déclenchée par le Gouvernement dans une période dite de « guerre », contre des professionnels pourtant applaudis au début de la crise, cette suspension ne se justifie plus objectivement. Comment accepter le recours à l’intervention de sapeurs-pompiers allemands non vaccinés pour éteindre les incendies en France ? Comment accepter le recours à des personnels vaccinés mais contaminés au travail et refuser obstinément des personnels non vaccinés non contaminés ? Qui veut-on protéger ? (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES. – MM. Frédéric Falcon et Yannick Neuder applaudissent également.)
Comment ne pas désormais intégrer dans notre réflexion et dans nos décisions à venir l’aveu de la représentante de Pfizer, le 10 octobre dernier, devant le Parlement européen médusé, reconnaissant que les vaccins n’ont jamais – jamais ! – été testés contre le risque de contamination. Ainsi s’écroule l’argument socle de la suspension des personnels non vaccinés. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
M. Jean-Victor Castor.
Excellent !
M. Jean-Philippe Nilor.
Chers collègues, quel que soit le banc sur lequel vous siégez, je vous exhorte à voter ce texte !
Si, par orgueil – ce que l’on peut comprendre chez certains d’entre vous – vous ne le faites pas pour ces personnels suspendus, faites-le au moins pour les patients dont certains meurent en ce moment même sur les brancards dans les hôpitaux. Se tromper est humain ; s’entêter est criminel ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Je laisse à votre sagacité cette citation de Desmond Tutu : « Rester neutre face à l’injustice, c’est choisir le camp de l’oppresseur. » (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES. – De nombreux députés des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES se lèvent pour applaudir.)
M. Jean-Victor Castor.
Bravo !
Mme la présidente.
La parole est à Mme Josiane Corneloup.
Mme Josiane Corneloup.
Notre pays fait face à une pénurie sans précédent de personnels de santé. Chaque jour, faute de personnels disponibles, des établissements déprogramment des interventions chirurgicales et ferment des lits ; les Ehpad manquent eux aussi de bras ; des centres médico-psychologiques renvoient des patients lourdement handicapés dans leur famille ; des services d’urgences ferment leurs portes ; des maires déplorent la multiplication des déserts médicaux. Les situations de ce type se comptent par milliers et plongent des malades, et avec eux des familles entières, dans la détresse.
La loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire a donné l’ordre aux soignants d’avoir un schéma vaccinal complet avant le 15 octobre de cette même année, sous peine d’être suspendus, sans statut, sans revenus. Nous sommes très fréquemment interpellés dans nos circonscriptions au sujet de cette mesure discriminante, injuste et inadaptée aux besoins de nos territoires et à l’état de l’offre de soins.
Depuis cette date, en France, de nombreux soignants et pompiers ont été suspendus parce qu’ils ont choisi d’exercer, comme tous les autres Français, leur libre choix à l’égard du vaccin. Ainsi, de nombreux hommes et femmes, totalement impliqués et réactifs, des dizaines de milliers de héros du quotidien, font cruellement défaut à notre hôpital, déjà exsangue, ainsi qu’à notre chaîne de secours, déjà éprouvée par deux années de crise sanitaire.
La proposition de loi qui nous est soumise vise à réintégrer les personnels des établissements de santé et de secours non vaccinés. Elle me paraît essentielle et doit être examinée avec la plus grande attention.
M. Maxime Minot.
Oui ! Et nous la soutiendrons !
Mme Josiane Corneloup.
La suspension des personnels de santé devait être, par définition, temporaire. Elle ne saurait aucunement être définitive. Il est donc indispensable de réhabiliter très rapidement ces milliers d’hommes et de femmes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR-NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Cette suspension, qui dure depuis plus d’un an, n’a pas de sens.
M. Maxime Minot.
C’est vrai !
M. Jean-Victor Castor.
Non, ça n’a pas de sens !
Mme Josiane Corneloup.
De multiples études montrent que la vaccination n’a que très peu d’incidence sur la transmission du virus. L’immense majorité des pays européens – et en dernier lieu l’Italie, depuis le 1er novembre 2022 – ont abandonné cette disposition vaccinale. Le Gouvernement s’est lui-même contraint à rappeler des soignants vaccinés, mais malades du covid, au lieu de faire appel à des personnels non vaccinés et prêts à se faire tester chaque jour si nécessaire. Et quid des personnels de santé étrangers non vaccinés ?
Mes chers collègues, nous devons nous montrer cohérents. Nous ne pouvons pas continuer plus longtemps à ignorer ces hommes et ces femmes qui ne demandent qu’à travailler, et qui ne sont pas davantage source de contamination que leurs collègues, vaccinés maintenant depuis plusieurs mois.
Les soignants suspendus depuis plus d’un an attendent une décision, car leur situation est très instable : ils ne perçoivent plus de salaire, mais n’ont pas officiellement été licenciés, et ne peuvent donc pas prétendre au chômage. Ces professionnels vivent une véritable errance administrative. Même si nous sommes toujours concernés par le virus de la covid-19 et même si, j’en ai bien conscience, nous devons rester vigilants, nous reprenons tous désormais une vie quasiment normale. Il faut tirer toutes les leçons de cette période et remuscler sans tarder notre système de santé.
J’ai bien conscience également que seuls 0,3 % des personnels soignants ne sont pas vaccinés, et donc touchés par cette interdiction d’exercer. Certes, leur réintégration ne résoudra pas le problème de fond de la pénurie de personnel dans les hôpitaux…
M. Philippe Vigier.
Ah, quand même !
M. Maxime Minot.
Nous ne l’avons jamais prétendu, monsieur Vigier !
Mme Josiane Corneloup.
…mais elle est nécessaire, tout comme le colossal chantier de la réforme de l’hôpital dans son ensemble.
L’article 2 de la proposition de loi prévoit que ces personnels réintégrés portent des équipements de protection individuelle – cela nous semble absolument justifié – et réalisent des tests de dépistage gratuits – pour le coup, la présentation quotidienne d’un test de dépistage du covid-19 négatif en cours de validité nous paraît inadaptée. Cela serait trop complexe, voire impraticable au quotidien pour les soignants concernés, et représenterait en outre un coût important pour l’assurance maladie, dans un contexte de dégradation des comptes sociaux.
M. Philippe Vigier.
Ça, c’est vrai !
Mme Josiane Corneloup.
Vous l’aurez compris, le groupe Les Républicains votera majoritairement cette proposition de loi. Nous ne pouvons pas accepter plus longtemps la mise au ban d’une partie de nos soignants et de nos pompiers, à un moment où nous avons grandement besoin d’eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Sylvain Maillard.
C’est le moment de remettre l’église au centre du village !
Mme Michèle Peyron.
La mairie, disons…
M. Philippe Vigier.
C’est un sujet très grave que nous abordons cet après-midi. Ce n’est pas un sujet de communication politique : il s’agit de l’essentiel. Nous avons tous traversé cette période folle de la covid et nous avons essayé en conscience – essayé, je le dis bien – de prendre les meilleures décisions.
Lorsqu’il a fallu se procurer des vaccins, je n’oublie pas que des efforts formidables ont été accomplis – tout comme je n’ai pas oublié ce jour de janvier 2021, quand la France était pointée du doigt parce que nous étions au dernier rang en Europe dans ce domaine.
Je n’ai pas non plus oublié que les représentants du Parti socialiste nous expliquaient, à raison, qu’il fallait vacciner tout le monde. Et je n’ai pas oublié, madame la vice-présidente de l’Assemblée nationale et rapporteure de ce texte, que certains de vos amis soutenaient que des vaccins comme le Spoutnik V étaient à même de protéger. (Sourires sur quelques bancs du groupe RE.)
Vacciner, c’est protéger. Mais tous ceux qui connaissent l’histoire de la vaccination depuis ses débuts savent qu’en la matière, les bénéfices sont parfois associés à des risques. Et lorsque le bénéfice est largement supérieur au risque, la décision s’impose. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
M. Philippe Vigier.
À l’instar de Mme la ministre déléguée, Agnès Firmin Le Bodo, qui l’a très bien dit tout à l’heure, je n’ai pas oublié les années 1970, quand on ne vaccinait pas le personnel soignant contre l’hépatite B. Dois-je rappeler le nombre d’infections hépatiques et de cancers qui en ont résulté ? Et voudriez-vous faire désormais le chemin inverse ? Non, jamais !
J’entends, madame la rapporteure, ce que vous dites au sujet du manque de personnels soignants, et je vous répondrai, mais ces personnes ne peuvent, d’un côté, faire l’objet d’une obligation vaccinale – ils l’ont acceptée, cher collègue Neuder, s’agissant de l’hépatite B, de la diphtérie ou du tétanos – et, de l’autre, avoir la possibilité de refuser la vaccination contre d’autres maladies.
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
M. Yannick Neuder.
C’était il y a un an !
M. Philippe Vigier.
Ce n’est pas tenable une seconde !
M. Yannick Neuder.
Tous les autres pays d’Europe le font !
M. Jean-Victor Castor.
Ça se fait partout !
M. Philippe Vigier.
Deuxième argument : comment gérer un établissement hospitalier ou un Ehpad avec à la fois des personnels vaccinés et des personnels non vaccinés ? (Exclamations sur les bancs des groupes LR et GDR-NUPES.)
M. Davy Rimane.
Ça existe !
M. Philippe Vigier.
Pas du tout ! En France métropolitaine, ça n’existe pas !
Mme la présidente.
Chers collègues, seul M. Vigier a la parole.
M. Philippe Vigier.
Troisièmement, et je parle sous le contrôle de Philippe Berta, dont chacun sait qu’au-delà de sa fonction de député, en sa qualité de scientifique, il connaît bien le monde médical, je vous invite à lire la dernière publication de la revue Nature Human Behaviour . Que dit-elle ? Que de tous les pays développés, la France est celui où l’espérance de vie est la plus élevée. Nous avons en effet regagné deux mois d’espérance de vie grâce à l’importance de notre taux de protection vaccinale. Ne l’oubliez jamais. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.)
M. Yannick Neuder.
Ça n’a rien à voir !
M. Philippe Vigier.
Quatrièmement, ne me dites pas à moi, qui suis biologiste, que nous pourrons faire un test PCR le matin aux soignants et que le résultat sera immédiatement connu pour leur donner la possibilité de travailler jusqu’au soir. On voit que vous n’êtes jamais venus dans un labo ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Venez voir de quoi il en retourne, car il est inacceptable de dire cela. Cela ne tient pas la route une seule seconde ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, LR et GDR-NUPES.)
Mme Danièle Obono.
Assez de mépris !
M. Jean-Victor Castor.
Vous faites travailler des covidés dans les hôpitaux !
M. Philippe Vigier.
Il est facile de parler, chers collègues,…
M. Davy Rimane.
OK, monsieur le professeur !
M. Philippe Vigier.
Je vous propose de passer aux travaux pratiques : venez lundi matin, à sept heures, et vous verrez comment les choses fonctionnent. (Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
S’agissant des pénuries de personnels – cinquième élément –, je suis d’accord avec vous, chère Caroline Fiat. J’ai eu l’occasion de la dire à la tribune à la Première ministre lors de l’examen de la deuxième motion déposée après l’engagement de la responsabilité du Gouvernement sur l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), et, rassurez-vous, je serai également présent demain soir pour évoquer à nouveau l’architecture de la santé. Oui, il y a une pénurie de personnels soignants. Qui peut dire le contraire ? Mais cela ne remonte pas à quelques jours, à quelques mois, ni même à quelques années : cela fait des décennies qu’on ferme des lits, alors ne me racontez pas d’histoires. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Oui, il faut des recrutements, oui, il faut mieux payer les personnels. J’ai d’ailleurs également dit à cette tribune que l’effort n’était pas suffisant en la matière et qu’il fallait aller plus loin.
Enfin, si vous me le permettez, je terminerai en évoquant un élément plus personnel. Je vous en fais part avec beaucoup de gravité : mon frère, qui était membre de la réserve sanitaire, est mort au combat pour protéger des gens. Pourquoi ? Parce qu’il n’était pas vacciné et qu’il a contracté la covid-19. (M. Jean-Victor Castor proteste.) Alors, de grâce, soyez prudents. Je ne voudrais pas que dans quelques années, un ministre de la santé soit convoqué devant la Cour de justice de la République pour avoir insuffisamment protégé nos personnels soignants.
M. Davy Rimane.
Ils sont déjà convoqués !
M. Philippe Vigier.
En ce qui nous concerne, nous les avons protégés, et nous en sommes fiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme Danièle Obono.
Combien sont morts sans protection à cause de vous pendant la crise du covid ?
Mme la présidente.
Merci, monsieur Vigier.
M. Philippe Vigier.
Comme la NUPES m’a volé quinze secondes, je leur reprends, madame la présidente.
Étant respectueux des avis de la Haute Autorité de santé, le jour où elle donnera son accord pour la réintégration des soignants non vaccinés, nous suivrons ses préconisations. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes RE et HOR.)
M. Philippe Berta.
Bravo !
M. Yannick Neuder.
C’est une décision politique, pas scientifique !
Mme la présidente.
La parole est à M. Elie Califer.
M. Erwan Balanant.
Les socialistes n’étaient-ils pas favorables à l’obligation vaccinale ?
M. Elie Califer.
Nous abordons un sujet important, où la passion n’a pas sa place. Au moment où je prends la parole, je me dois de saluer l’engagement des personnels de secours, de soins et de santé, qui ont travaillé et qui, exténués, ont aujourd’hui grandement besoin du renfort de leurs collègues. Nous ne sommes plus en état d’urgence sanitaire depuis le 1er août 2022. Se pose donc intellectuellement la question de la réintégration des personnels suspendus.
Nous venons de le voir à l’instant, ce sujet passionne et divise. Il divise aussi bien les groupes sociaux que les groupes politiques, ce qui est bon pour la démocratie. C’est d’ailleurs à titre personnel que je m’exprime : les autres membres du groupe Socialistes et apparentés n’auront pas nécessairement la même position que moi.
Chers collègues, lorsque la loi du 5 août 2021 a été votée, l’objectif était d’endiguer la covid-19, qui était alors à l’état de pandémie, en donnant au Gouvernement la possibilité de suspendre certaines catégories de professionnels non vaccinés. L’application de cette décision a, dans certains territoires, mis à mal un système hospitalier déjà très fragilisé, particulièrement dans l’ensemble des territoires ultramarins, ce qui est à prendre en considération.
Or, plus d’un an plus tard, il faut bien admettre que le contexte a changé. Je le répète, nous ne sommes plus en état d’urgence sanitaire et les éléments pour confirmer le bien-fondé de ce constat sont nombreux. Nous le savons, si le virus continue de circuler, il a perdu de sa virulence.
Du point de vue sociétal, les bars et restaurants sont ouverts, tout comme les grands centres commerciaux, qui brassent de larges populations. La vie reprend, et c’est heureux !
Du point de vue scientifique, les sommités médicales poursuivent leurs recherches et continuent de s’interroger. Leurs déclarations peuvent même surprendre, à l’instar de celle de la responsable des marchés internationaux de Pfizer, auditionnée par le Parlement européen.
Si je m’en remets au Centre national de ressources textuelles et lexicales, le terme « suspendre » correspond rigoureusement au fait d’« interrompre temporairement une action, un processus ». Ainsi, une suspension renvoie nécessairement à l’étape suivante, laquelle, en l’occurrence, ne peut être que la réintégration.
Mon groupe demande donc au Gouvernement de trouver une solution pour sortir de cette situation inextricable. Pour ma part, j’estime que la nouvelle situation sanitaire impose de mettre fin à la suspension : c’est mon intime conviction et mon expression personnelle. Dans le cas contraire, nous serions dans une démarche punitive.
Chers collègues, nous devons nous entendre sur le fait que la réintégration du personnel non vacciné est désormais un sujet pleinement politique. Aujourd’hui, près de quatre mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire, on peut regretter qu’une telle étape n’ait toujours pas été franchie par le Gouvernement. Cette proposition de loi nous invite à nous inspirer des décisions prises par d’autres pays.
Comme vous, je constate que certains États se remettent en question avec humilité et responsabilité. C’est le cas de l’Italie, où les médecins et infirmiers suspendus ont été réintégrés, du Canada, ou encore de la Grèce, qui mettra fin à la suspension des soignants non vaccinés après le 31 décembre. Quant à l’Espagne, le pays n’a jamais pris des mesures aussi coercitives.
La question que l’on doit se poser – et que je me pose – n’est donc plus de savoir s’il faut réintégrer les suspendus, mais de décider quand. La réponse est : aujourd’hui, par notre vote courageux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR-NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et LIOT.)
Mme Sophia Chikirou.
Très juste !
Mme la présidente.
Merci, monsieur Califer.
M. Elie Califer.
La perte d’efficacité du vaccin et la baisse de la vaccination, couplées aux décisions pragmatiques des directeurs d’hôpitaux qui se sont appuyés sur des vaccinés et des non-vaccinés pour assurer la continuité des soins, nous invitent à voter cette proposition de loi. C’est ce que je ferai à titre personnel, tandis que d’autres au sein de mon groupe resteront sur leur position de 2021. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Thomas Mesnier.
M. Thomas Mesnier.
Nous avons vécu un moment important tout à l’heure, avec l’adoption de la proposition de loi constitutionnelle visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse, et je tiens à saluer le travail de cette assemblée, accompli de façon transpartisane. Cette proposition de loi constitutionnelle est maintenant celle de notre assemblée dans son ensemble et nous espérons qu’elle pourra continuer son chemin parlementaire. À nous, chers collègues, au-delà de son inscription dans la Constitution, de rendre ce droit effectif.
Les niches parlementaires sont des moments importants pour nos groupes, dans l’optique d’apporter les solutions que nous croyons essentielles pour le pays. Je crois que nous étions nombreux sur ces bancs à vouloir débattre de la proposition de loi visant à augmenter le Smic à 1 600 euros net, même si le texte avait été repoussé en commission. De la même manière, nous aurions été heureux, chers collègues, de débattre de votre proposition de loi visant à abolir la corrida, même si elle a, elle aussi, été repoussée en commission.
Vous avez finalement refusé ces débats au profit de la présente proposition de loi dont l’objectif est, j’imagine, d’améliorer le système de santé et de faire face à la pénurie de personnels soignants…
M. Manuel Bompard.
Ce n’est pas votre PLFSS qui le fera !
M. Thomas Mesnier.
…en réintégrant les personnels non vaccinés. En réalité, par ce texte, vous envoyez un signal désastreux au monde hospitalier et un message formidable aux complotistes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Je ne rappellerai pas les chiffres, Mme la ministre déléguée l’a fait tout à l’heure : ce texte ne concerne que quelques centaines de soignants. S’agissant par exemple des Ehpad, seul un infirmier par établissement en moyenne ne serait pas vacciné. On ne peut donc raisonnablement penser que la réintégration des soignants non vaccinés résoudrait les problèmes manifestes de notre système de santé.
Mme Sophia Chikirou.
Cela y contribuerait !
Un député du groupe LFI-NUPES.
Le problème, c’est vous !
M. Thomas Mesnier.
Non, cher collègue : le problème, c’est que vous n’ayez pas voté les milliards d’euros du Ségur de la santé en faveur de notre hôpital public et de nos établissements de santé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme Sophia Chikirou.
Le problème n’est pas là !
M. Thomas Mesnier.
Je le répète, votre texte envoie un signal véritablement désastreux à nos soignants. Je reprendrai simplement ce que les différentes autorités auditionnées par la commission des affaires sociales préalablement à l’examen de ce texte ont dit. La Fédération hospitalière de France s’est déclarée favorable au maintien de la vaccination obligatoire contre le covid-19, au même titre que toutes les autres vaccinations obligatoires. La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France a estimé quant à elle que revenir sur l’obligation vaccinale reviendrait à donner une prime à la désobéissance – même si je conçois que le principe d’une telle prime puisse vous intéresser. Enfin, la Haute Autorité de santé a déclaré qu’elle n’entendait pas remettre en cause l’obligation vaccinale alors que l’épidémie n’est pas maîtrisée.
Chers collègues, comme Mme la ministre déléguée l’a rappelé tout à l’heure, malheureusement, le covid-19 tue encore chaque jour dans notre pays. Il est de notre responsabilité de nous assurer que nos concitoyens soient aussi protégés que possible et que les soignants le soient eux-mêmes, afin d’être moins contaminés et de moins contaminer les patients qu’ils soignent au quotidien.
Si l’objectif du texte que vous proposez, madame la rapporteure, est d’augmenter le nombre de soignants dans les établissements, il est louable, mais vous abordez le sujet de la plus mauvaise des façons : en réalité, c’est une suppression déguisée de l’obligation vaccinale que vous introduiriez, avec l’instauration d’un schéma parallèle. (Mme la rapporteure proteste.)
Je le répète, la Haute Autorité de santé s’est exprimée sur le sujet il y a quelques mois et a repoussé l’idée de lever l’obligation vaccinale. Depuis, M. le ministre de la santé et de la prévention et Mme la ministre déléguée ici présente lui ont à nouveau demandé de se prononcer sur la question. Chers collègues, comme nous l’avons toujours fait durant la bataille menée contre le virus, continuons d’écouter les autorités scientifiques pour guider nos choix. C’est ce que fera résolument le groupe Horizons et apparentés en s’opposant à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Sandrine Rousseau.
Mme Sandrine Rousseau.
Je commencerai par dire que le groupe Écologiste-NUPES regrette l’obstruction parlementaire qui a rendu impossible l’étude de la proposition de loi sur l’interdiction de la corrida. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui prévoit la réintégration des personnels non vaccinés grâce à l’institution d’un protocole sanitaire spécifique combinant présentation d’un test négatif et port d’équipements de protection individuelle.
Rappelons tout d’abord que la loi du 30 juillet 2022 a introduit une possibilité légale de réintégrer ces personnels de santé suspendus si un avis favorable était rendu par la Haute Autorité de santé. Or le dernier avis – défavorable – de la HAS remonte au mois de juillet 2022. Nous regrettons qu’elle ne remette pas à l’ordre du jour la question de la réintégration des personnels de santé non vaccinés sachant que 12 000 professionnels de santé se trouvent toujours suspendus. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR-NUPES.)
En effet, nous sommes préoccupés par le manque de professionnels de santé dont pâtissent les hôpitaux, en particulier dans les outre-mer, où une proportion plus importante de soignants est concernée. (MM. Jean-Victor Castor, Marcellin Nadeau et Davy Rimane applaudissent.)
Rappelons que durant la crise du covid, certains professionnels ont été réquisitionnés bien que porteurs de la maladie, ce qui a été confirmé notamment par un article de La Voix du Nord du 15 janvier 2021. On peut y lire : « Sollicité, le ministère de la santé confirme que certains soignants positifs au covid-19 peuvent être incités à venir travailler. »
La vaccination, si elle atténue la transmission et les formes graves, n’élimine cependant pas la circulation du virus. Aussi des mesures de protection particulières pourraient-elles permettre d’atteindre cet objectif d’atténuation du risque. Nous comprenons que les personnels de santé, parce qu’ils sont exposés à des personnes particulièrement fragiles et vulnérables, ont un devoir d’exemplarité, mais ce devoir pourrait dès lors se matérialiser par l’acceptation de protocoles et de mesures de protection particulières. Nous comprenons aussi la volonté de trouver une solution alternative pour réintégrer ces professionnels de santé suspendus depuis plus de quinze mois, sans rémunération, et qui n’ont plus le droit d’exercer leur métier. Nous nous devons de leur apporter une réponse, d’autant que nous avons pu compter sur eux pendant la crise du covid.
Cependant, si chacun et chacune d’entre nous a pour objectif l’accès aux soins pour toutes et tous et la meilleure protection possible de la population face au virus, la méthode pour y parvenir ne fait pas consensus, et nous entendons également les arguments de ceux qui sont contre cette réintégration et qui, au nom de la protection des équipes hospitalières et des patients, souhaitent que les soignants ne puissent déroger à l’obligation de se faire vacciner contre le covid.
Sur ce sujet particulier, le groupe Écologiste admet donc une totale liberté de vote. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane.
Je commencerai mon propos par quelques rappels : à l’époque de la crise sanitaire, le Président de la République avait annoncé que jamais il ne rendrait la vaccination obligatoire, que jamais il n’y aurait de passe sanitaire et que jamais nous n’aurions l’obligation de nous tester pour vaquer à nos occupations quotidiennes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES. – Mme Rachel Keke applaudit aussi.) Puis, devant l’évolution de la situation, il a admis avoir revu sa position et a commencé à nous imposer certaines choses. Ces obligations, la population les a acceptées, et elle a consenti beaucoup d’efforts. Je rappelle que le pays a été fermé, cadenassé, pour lutter contre la pandémie, et que la population a globalement joué le jeu ; elle a fait des efforts incommensurables pour adapter son quotidien et affronter une crise sanitaire qui frappait le monde entier.
Aujourd’hui, la situation a évolué, le temps a passé. Je peux comprendre la réticence de ceux qui ont voté l’obligation vaccinale, sauf qu’aujourd’hui leurs arguments ne tiennent plus : l’idée que le vaccin empêche d’attraper la maladie et de la transmettre a fait long feu, remise en cause par le variant omicron.
Je rappelle aussi que depuis des décennies, nos territoires dits d’outre-mer connaissent une pénurie de personnels soignants. Aujourd’hui, le manque est considérable – on parle de plusieurs centaines de soignants –, une frange de la population n’a pas accès aux soins, certains services d’urgences sont fermés la nuit par manque de bras pour accueillir les patients ; aujourd’hui, nos territoires sont des déserts médicaux.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons plus continuer à maintenir la suspension de soignants et de pompiers non vaccinés ! (MM. Jean-Victor Castor et Marcellin Nadeau et Mme Rachel Keke applaudissent.) J’en appelle vraiment à la raison chez chacune et chacun d’entre vous.
Ce soir, il n’y a pas les vaccinés contre les non-vaccinés ; ce soir, nous ne parlons pas de théories complotistes ; tous ces débats sont révolus.
Mme Rachel Keke.
Absolument !
M. Davy Rimane.
Ce soir se tient devant vous un député qui représente un territoire à l’agonie (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – MM. Jean-Victor Castor et Marcellin Nadeau applaudissent également), un territoire qui a besoin de ses soignants, tandis que depuis plus d’un an, certains personnels ne touchent plus leur salaire et n’ont droit à rien – une situation qui n’existe pas dans le code du travail !
Je réitère mes propos : je peux comprendre que dans l’urgence, on ait pu prendre une telle décision, mais désormais, nous en savons davantage, nous savons comment se comporte le virus et nous avons les moyens de faire face, tous ensemble. Il n’est plus possible de maintenir la distinction entre vaccinés et non-vaccinés.
Le ministre François Braun a déclaré dans les médias il y a quelques jours que les médecins qui s’étaient fait vacciner avaient fait un effort par rapport à ceux qui ne l’avaient pas fait. À cette petite nuance près qui me semble d’importance : ils ne l’ont pas fait de gaieté de cœur, ils ont été obligés de se faire vacciner. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.)
M. Denis Masséglia.
Ils se sont montrés responsables !
M. Rémy Rebeyrotte.
Personne ne se fait vacciner par plaisir, enfin !
M. Davy Rimane.
Que l’on se comprenne bien, chers collègues : tout le monde sur ces bancs est vacciné contre diverses maladies, et le problème n’est donc pas de vouloir ou non se faire vacciner. Ce que nous demandons, c’est de permettre à ces hommes et ces femmes, qui représentent des paires de bras et de jambes supplémentaires pour lutter contre la misère sanitaire que nos territoires connaissent depuis des décennies, de pouvoir continuer à sauver des vies. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – MM. Jean-Victor Castor et Marcellin Nadeau se lèvent et applaudissent.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Olivier Serva.
M. Olivier Serva.
Compte tenu du débat que nous avons ce jour sur la réintégration du personnel soignant non vacciné, une question me taraude : la France est-elle un pays isolé du reste du monde et de l’Europe ? L’Espagne, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Belgique n’ont jamais suspendu leurs soignants non vaccinés. Quant à l’Italie, qui avait franchi ce cap rigoriste, elle les réintègre aujourd’hui. Alors qu’attendons-nous ici, en France ? Allons-nous continuer encore longtemps à nous isoler de l’Europe ?
M. Bertrand Pancher.
Très bien !
M. Olivier Serva.
J’entends ici et là que la Haute Autorité de santé doit se prononcer sur la levée de l’obligation vaccinale. Il s’agit là de considérations hors de propos, hors sujet. En effet, ce texte ne prévoit aucunement de lever l’obligation vaccinale et ne remet pas en cause les avancées de la science et les bienfaits des différents vaccins depuis Pasteur. Stop à la mauvaise foi dans ce domaine ! Il prévoit en revanche la mise en place d’un protocole sanitaire strict, consistant en un test covid négatif quotidien pour les soignants non vaccinés.
Par ailleurs, permettez-moi, madame la ministre déléguée, de douter de vos intentions.
Vous dites attendre l’avis de la HAS pour vous prononcer sur la réintégration de ce personnel, mais en catimini, ce sont des départs à la retraite anticipés ou encore des reconversions professionnelles qui leur sont proposés, tout au moins en Guadeloupe. Pire, des pressions sont exercées sur certains d’entre eux par les autorités sanitaires afin de les pousser à la démission.
Tout cela dépasse l’entendement. Tout cela dépasse la raison. D’ailleurs, nous avons l’impression qu’avec ou sans avis de la HAS, madame la ministre déléguée, vous maintiendrez sournoisement votre cap en maintenant vos sanctions à l’encontre de ces professionnels de santé. Et c’est bien de sanctions dont nous parlons ! Il est admis que le vaccin ne protège pas nécessairement de la transmission de la covid-19. Il est également admis qu’un vacciné peut être porteur du virus et le transmettre alors même qu’un test négatif prouve que vous n’êtes ni porteur ni transmetteur du virus. Malgré ces constats, votre gouvernement maintient plusieurs milliers de soignants hors les murs du système de soins. Pour quel autre motif que celui de ne pas vous déjuger ? C’est en tout cas ce que semble indiquer cette autre incohérence : alors que la grippe tue chaque année 10 000 à 15 000 personnes en France, son vaccin est fortement conseillé au personnel soignant mais reste facultatif.
Mme Sophia Chikirou.
Très juste !
M. Olivier Serva.
Alors pourquoi persister à suspendre ces pères et mères de famille, ces fils et filles de France ?
M. Erwan Balanant.
Pour les protéger !
M. Olivier Serva.
Imaginez-vous, dans vos professions respectives, suspendus du jour au lendemain, sans salaire, avec vos enfants à charge et le coût de la vie qui devient insoutenable, a fortiori en outre-mer ! Ce scénario catastrophe est celui que la France inflige à une partie de ses soignants depuis maintenant un an. Et ce n’est pas comme si nous pouvions nous payer le luxe de nous affranchir de leurs compétences !
En Guadeloupe, d’où je viens, qui figure en tant que territoire d’outre-mer parmi les premiers déserts médicaux de France, le délai moyen d’attente pour un rendez-vous chez le cardiologue est de dix mois. Or des professionnels libéraux et des spécialistes en milieu hospitalier sont actuellement interdits d’exercer sur ces territoires. J’ai, à cet égard, une pensée pour le Dr Mona Hédreville, cardiologue au centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre, qui a dû rendre sa blouse.
Plusieurs députés du groupe LIOT.
Il a raison !
M. Olivier Serva.
Pendant ce temps, la santé de la population est mise en péril. Pire, certains décèdent faute d’accès aux soins et de prise en charge – dans la France du XXIe siècle. Pas plus tard que la semaine dernière, j’ai rencontré une administrée de Morne-à-l’Eau qui me racontait que sa grand-mère, Pascale, souffrait de problèmes de cœur et qu’elle était décédée d’un arrêt cardiaque après avoir attendu un an la pose d’un pacemaker. Bien entendu, cet appareil n’a jamais été posé.
Vous me parlez de pourcentage faible quand, moi, je vous parle d’hommes et de femmes. De chair et de sang. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – MM. Jean-Victor Castor et Marcellin Nadeau applaudissent également.) Nous ne pouvons nous passer ne serait-ce que d’un seul professionnel, compte tenu de l’ampleur des dégâts. Je tiens aussi à saluer ceux qui se sont vaccinés, volontairement ou par dépit. Merci à vous, qui portez notre système de santé à bout de souffle.
Chers collègues, je vous en conjure, mettons un terme définitif à cette casse sanitaire et sociale. Cessons de nous isoler de nos voisins européens. Clôturons définitivement ce chapitre, qui est celui d’une France sans cœur et discriminante. Votons pour la mise en place de ce protocole sanitaire strict, bien plus garant de la sécurité des patients et du personnel soignant. Le groupe LIOT soutient donc ce texte de bon sens. L’heure n’est plus aux postures politiques et aux ego mal placés. Agissons pour ces milliers de soignants, personnels médico-sociaux et pompiers. La santé des Français d’abord ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, LFI-NUPES et GDR-NUPES. – Mme Béatrice Roullaud et M. Emmanuel Taché de la Pagerie applaudissent également.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Éric Alauzet.
M. Éric Alauzet.
J’exprime ici l’opposition vigoureuse du groupe Renaissance à cette proposition de loi visant à réintégrer les soignants non vaccinés. Elle va à l’encontre des avis de la Haute Autorité de santé, de la Fédération hospitalière de France, des patients, représentés par France Assos Santé, et des soignants eux-mêmes – rien de moins ! Ils jugent votre proposition complexe et risquée. De plus, elle est source d’interrogations sur le plan éthique. Elle est difficile à mettre en œuvre, car vous instaurez deux catégories de personnel, qui seront soumises à des règles différentes suscitant des incompréhensions et des tensions internes. Madame la rapporteure, vous n’avez pas pris en compte les risques de désorganisation des services médicaux et médico-sociaux.
Mme Sophia Chikirou.
C’est vous qui désorganisez tout depuis cinq ans !
M. Éric Alauzet.
Votre proposition est risquée, car les masques et les tests antigéniques quotidiens sont insuffisants pour protéger d’une contamination. Ils sont utiles en complément du vaccin, mais pas à la place de celui-ci. De plus, rien ne nous assure que les personnes concernées – qui ne sont pas par nature les plus collaboratives – auront un comportement irréprochable à chaque instant de la journée et qu’elles se priveront des pauses cigarette ou des repas avec les collègues, qui sont autant de circonstances désormais bien identifiées comme présentant des risques. On peut même supposer que nombre d’entre elles, très rétives aux contraintes et aux règles, accepteront mal cette nouvelle contrainte du test quotidien.
Enfin, votre proposition est contestable sur le plan éthique, car elle dédouane des personnes qui refusent de donner la priorité à la sécurité des patients et de leurs collègues, alors même que la très grande majorité de ces derniers ont intégré cette priorité, pour la plupart par adhésion et pour une autre part par respect des règles qui conditionnent le droit de travailler dans ces établissements.
Vous auriez également dû vous interroger sur le droit des patients et résidents à connaître le statut vaccinal des personnes qui les prennent en charge ainsi que sur leur droit, le cas échéant, à révoquer le personnel non vacciné. Or aucune information n’est prévue à destination des patients et des résidents sur le statut de ceux qui les prennent en charge.
Finalement, votre proposition pourrait conduire au résultat inverse à celui attendu. Des professionnels réintégrés pourraient renâcler à appliquer de nouvelles contraintes, comme celle de se mettre un écouvillon tous les matins dans le nez,…
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Ils ne travaillent pas tous les jours !
M. Éric Alauzet.
…des soignants vaccinés pourraient être conduits à quitter leur poste, en exerçant leur droit de retrait, et des usagers pourraient refuser d’être pris en charge par des personnels non vaccinés, ce qui conduirait à leur exclusion de fait.
Le point le plus faible de votre proposition de loi est qu’elle remet en cause l’obligation vaccinale. Il y a là une terrible contradiction, que vous avez évidemment perçue, comme en témoignent les efforts que vous déployez pour persuader les uns et les autres que ce n’est pas le cas. Le Rassemblement national, qui soutient des deux mains et des deux pieds votre proposition de loi,…
M. Jocelyn Dessigny.
Absolument !
M. Éric Alauzet.
…ne s’y est d’ailleurs pas trompé, lui qui a combattu ardemment l’obligation vaccinale. Ce n’est certes pas votre cas, madame la rapporteure, mais la vaccination devient bel et bien facultative pour les soignants non vaccinés si vous les réintégrez, et elle le devient pour tous puisque, en République, tous les citoyens sont libres et égaux en droits. Si elle est facultative pour tous, elle n’est donc plus obligatoire.
M. Yannick Neuder.
Pas du tout !
M. Maxime Minot.
Vous n’avez rien compris !
M. Jocelyn Dessigny.
Honte à vous !
M. Éric Alauzet.
Vous ne pouvez donc pas soutenir que cette réintégration des personnels non vaccinés ne remet pas en cause l’obligation vaccinale.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Si, je vais le soutenir !
M. Éric Alauzet.
Madame la rapporteure, votre proposition de loi, contrairement à ce que vous et vos collègues de la France insoumise avez martelé et tenté de faire croire lors des débats en commission, remet tout simplement en cause l’obligation vaccinale. Nous ne pouvons pas l’accepter. Le vaccin a été et reste, rappelons-le, notre meilleure arme pour lutter efficacement contre les formes graves de la maladie.
Si votre proposition de loi était adoptée, contre l’avis des sociétés savantes, contre l’avis des patients et contre l’avis des soignants, vous sèmeriez un immense trouble chez nos concitoyens qui ont consenti, pour l’intérêt général et pour eux-mêmes, à se faire vacciner. Une telle décision provoquerait rapidement une remise en cause des autres vaccinations,…
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
M. Éric Alauzet.
…telles que celles contre l’hépatite B, contre la poliomyélite, contre la diphtérie, contre le tétanos ou encore contre la tuberculose. En d’autres termes, vous ouvrez la boîte de Pandore !
Disons-le, votre proposition de loi est très politique…
M. Yannick Neuder.
C’est votre position qui est politique !
M. Éric Alauzet.
…et vise, au détour d’une noble préoccupation – lutter contre la pénurie des personnels de santé –, à raviver vos critiques sur la gestion de la crise sanitaire par le Gouvernement, alors que vous êtes les tenants de solutions simples, pour ne pas dire simplistes et miraculeuses.
Nous ne sommes pas sortis de la crise sanitaire, même si elle est mise au second plan actuellement. Nous devons rester prudents : la huitième vague se profile, les hôpitaux sont inquiets, des déprogrammations sont déjà en cours. La grippe arrive, avec d’autres maladies, et c’est la saturation des hôpitaux qui se profile.
Mme Sophia Chikirou.
Vous avez saccagé l’hôpital, vous avez tout cassé !
Mme la présidente.
Madame Chikirou, s’il vous plaît !
M. Éric Alauzet.
En attendant, je vous propose de rejeter cette proposition. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Bénédicte Auzanot.
Mme Bénédicte Auzanot.
Le débat sur la réintégration des soignants non vaccinés n’oppose pas ceux qui croient en la science à ceux qui n’y croient pas.
Mme Prisca Thevenot.
Vous n’y croyez pas !
Mme Bénédicte Auzanot.
Il oppose ceux qui ont de la mémoire à ceux qui n’en ont pas.
Rendre la vaccination obligatoire pour les soignants suppose que le vaccin empêche la contamination et la transmission. D’ailleurs, c’est ainsi que le gouvernement de l’époque l’avait justifié. Olivier Véran annonçait le 21 avril 2021 sur France Info : « On a de plus en plus d’arguments qui nous permettent de penser que la vaccination protège de la contamination. » Le 21 juillet, sur TF1, Jean Castex déclarait : « On a constaté que les personnes qui ont deux doses […] n’ont plus de chances d’attraper la maladie. » Une semaine après, sur France Info, Jean-Michel Blanquer, affirmait, péremptoire, que « quand vous êtes vacciné, vous ne risquez pas de contaminer les autres ».
M. Sylvain Maillard.
Et vous, êtes-vous vaccinée ?
Mme Bénédicte Auzanot.
Trois déclarations, trois erreurs alors que chacune a été émise au nom de la science. Et vous vous étonnez que beaucoup de Français n’aient plus confiance en la parole publique, en la parole du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Vous portez une lourde responsabilité : vous avez abîmé la confiance en la science, vous avez alimenté le complotisme. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
M. Rémy Rebeyrotte.
On a limité le nombre de morts !
M. Jocelyn Dessigny.
Monsieur Rebeyrotte, gardez les bras le long du corps !
Mme Bénédicte Auzanot.
Vous n’avez cessé tout au long de la crise de vous contredire, de vous renier, de vous tromper, d’abuser ceux qui vous croyaient et de provoquer ceux qui doutaient. Vous l’avez fait avec arrogance, mépris et cynisme. Jamais la marque de fabrique du macronisme n’a été aussi forte et brutale que durant cette crise. Vous avez joué sur les peurs, vous avez abandonné toute raison.
M. Erwan Balanant.
Comme votre ami Raoult !
Mme Bénédicte Auzanot.
Vous n’admettrez jamais vos erreurs, mais certaines de vos décisions sont, elles, des aveux. Ainsi, lorsque vous autorisez des soignants vaccinés, mais infectés par le virus, à travailler, vous acceptez qu’on puisse travailler dans le monde médical en portant le virus. Certes, avec un protocole, mais ce protocole est repris à l’identique dans la proposition de loi dont nous débattons et vous osez le réfuter comme étant insuffisant ! Dans votre monde délirant, un vacciné malade peut travailler mais un non-vacciné en pleine santé se le voit interdire.
La vérité est que vous ne savez pas comment sortir de cette affaire. Vous ne voulez admettre ni vos erreurs ni vos mensonges. Vous vous abritez derrière la Haute Autorité de santé, mais là encore, comment avoir confiance ? Début 2020, vous affirmiez que le masque ne servait pas à se protéger, puis, volte-face, le Conseil scientifique disait le contraire et le masque devenait obligatoire, avant qu’en juillet dernier, le professeur Delfraissy, ancien président de ce conseil, ne déclare que le port du masque n’avait qu’un impact « modéré », voire « symbolique ». Là encore, où est la science, où est la raison ? Toutes les raisons invoquées pour refuser la réintégration des non-vaccinés ne résistent ni à l’analyse ni au bon sens, Mme la rapporteure l’a largement démontré.
Votre gestion du covid est un scandale d’État. Elle est aussi une affaire judiciaire, puisque la Cour de justice de la République a mis en examen une ancienne ministre de la santé et placé un ancien premier ministre sous le lourd statut de témoin assisté.
Ce débat est politique. Il peut se résumer ainsi : un gouvernement qui s’est trompé et qui a trompé ne veut pas se déjuger. Et tant pis si 12 000 Français et leurs familles en subissent les conséquences. Vous vous montrez incapables de faire face à la crise du monde médical, mais vous refusez une mesure simple, aux conséquences immédiates et positives, au nom de votre seul intérêt politicien. Vous n’êtes pas les enfants de Pasteur, mais ceux de Tartuffe !
Vous fracturez notre société, vous divisez les Français,…
M. Erwan Balanant.
Nous les protégeons !
Mme Bénédicte Auzanot.
…vous fabriquez des boucs émissaires pour vous exonérer de vos fautes, vous créez un chaos mental, comme vous laissez s’installer partout un chaos migratoire et sécuritaire, un chaos social avec vos réformes qui frappent les classes moyennes et populaires. En médecine, on applique le principe « D’abord, ne pas nuire. » Vous et vos prédécesseurs n’avez cessé de nuire. Vous êtes nuisibles au corps social français ! (Protestations sur les bancs du groupe RE.)
Mme Michèle Peyron.
Il faut se calmer !
M. Rémy Rebeyrotte.
C’est honteux !
M. Jocelyn Dessigny.
Monsieur Rebeyrotte, votre bras !
Mme Bénédicte Auzanot.
Nous voterons donc la proposition de loi de Mme Fiat. Elle est juste dans son but. Elle est noble, car elle tend à réparer. Elle est utile, car elle remettrait des soignants dans nos hôpitaux. S’y opposer n’est ni moral, ni éthique, ni scientifique, ni conforme à deux valeurs de notre République, la liberté et la fraternité.
M. Jocelyn Dessigny.
Pensons à ceux qui meurent dans les couloirs faute de soignants !
Mme Bénédicte Auzanot.
Mes chers collègues de la majorité relative, vous qui soutenez… (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
Merci, madame Auzanot.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Mme la présidente.
J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.
Article 1er
Mme la présidente.
La parole est à M. Yannick Neuder.
M. Yannick Neuder.
Il faut savoir raison garder et j’espère que nous pourrons retrouver un peu de calme dans ce débat. Je suis moi-même vacciné, mais il ne s’agit pas d’opposer les provaccination aux antivaccination, pas plus qu’il ne s’agit d’opposer ceux qui croient à la science à ceux qui n’y croient pas. Il s’agit simplement d’être un peu cohérent.
Madame la ministre déléguée, vous nous expliquiez tout à l’heure que le personnel non vacciné réintégré dans les hôpitaux quitterait son masque lors des pauses déjeuner et ferait donc courir des risques. Quand vous envoyez des personnels atteints du covid au travail, croyez-vous que ceux-ci gardent leurs masques pour déjeuner ? Vous essayez de cacher vos incohérences derrière les avis de la Haute Autorité de santé qui, comme toutes les sociétés savantes françaises, européennes et internationales, est pour la vaccination. Comment expliquez-vous dès lors la spécificité de la France, qui est quasiment le seul pays européen à ne pas réintégrer les soignants ?
Dans les régions frontalières, les infirmières non vaccinées, qui ne peuvent donc travailler dans nos hôpitaux, où elles manquent pourtant, traversent la frontière et se rendent en Italie, et surtout en Suisse, pour y travailler dans des hôpitaux où elles sont accueillies à bras ouverts.
Il y a trois semaines, vous avez à nouveau saisi la Haute Autorité de santé. Ne vous entêtez pas et arrêtez de la saisir. Votre choix n’est pas scientifique, il est politique. Assumez-le ! Vous auriez l’ensemble des élus et des députés avec vous. Nous ne sommes pas tous des petits scientifiques, mais nous souhaitons tous qu’il y ait un maximum de personnels soignants dans nos hôpitaux et dans nos Ehpad pour faire face aux infections qui arrivent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes GDR-NUPES et LIOT.)
Mme Émilie Bonnivard.
Il est bon, Neuder !
Mme la présidente.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon.
Nos soignants ont été applaudis lors de la grande crise du covid, parce que les soignants, c’est la vie et le réconfort. La Réunion a malheureusement connu, du 1er janvier au 11 juillet 2022, une inquiétante surmortalité, avec un taux supérieur de 35 % à celui constaté sur la même période en 2019, contre 5,6 % dans l’Hexagone. La covid n’explique pas tout. Des gens souffrent et meurent alors qu’ils auraient pu être sauvés. C’est le manque de soignants qui a empêché de les sauver. On ne peut pas laisser les gens souffrir et mourir parce que vous avez décidé de sanctionner des soignants pour indiscipline.
Ces soignants se sont formés, mais une fois leur diplôme en poche, vous leur refusez l’exercice de leur métier, au motif qu’ils ne sont pas vaccinés. C’est une atteinte grave à la liberté, d’autant que le vaccin ne protège pas de la contamination.
Par une décision arbitraire, malsaine, vous avez privé ces soignants non seulement de leur travail, de leur passion – soulager, sauver, guérir l’autre –, mais aussi de leur revenu, malgré les conséquences pour leur famille, comme mon collègue Nilor l’a fort bien démontré dans la discussion générale.
Certains ont déposé des amendements de suppression de l’article. Ce n’est pas sérieux. Je vous demande d’adopter l’article et la proposition de loi. C’est une question de justice sociale, d’humanité et d’assistance à personne en danger. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille.
La question posée par cette proposition de loi est sérieuse. Tout soignant doit obéir à des règles, comme tout citoyen. Or la règle est la vaccination et les soignants doivent déjà être vaccinés contre l’hépatite B, de même que les enfants accueillis à la crèche ou scolarisés sont soumis à l’obligation vaccinale. Pourquoi, dès lors, exempter les soignants de vaccination dans ce cas précis ?
Par ailleurs, même si nous ne sommes pas des scientifiques, la position de ceux-ci doit fonder nos réflexions. Or à la question de l’opportunité de la réintégration de ces soignants, la HAS a jusqu’à présent répondu non, tout comme l’Académie de médecine, pour des raisons scientifiques. Le ministre de la santé et de la prévention pourra les interroger de nouveau, c’est tout à fait normal ; leur avis changera peut-être. Toutefois, au vu des connaissances scientifiques actuelles, nous ne pouvons dire oui.
Comme je l’ai indiqué en commission, il est symptomatique que les positions de l’intergroupe NUPES et du groupe Rassemblement national se rejoignent en la matière – c’est assez impressionnant.
J’en viens au coût de la mesure – je m’adresse ici à vous, membres du groupe Les Républicains, qui la soutenez. Combien coûtera un test quotidien pour les soignants non vaccinés ? Il faudrait l’estimer, car il sera assumé par la nation. Nous nous opposons donc à cette proposition de loi.
Mme la présidente.
La parole est à M. Christian Baptiste.
M. Christian Baptiste.
Le système français de santé, s’il a fait ses preuves, mérite d’être refondé en s’appuyant sur les acteurs territoriaux. Si cela avait été fait, nous aurions abordé différemment la crise sanitaire.
La France figure parmi les derniers pays européens à ne pas avoir réintégré les personnels suspendus. En Italie, depuis fin octobre, les soignants non vaccinés sont autorisés à reprendre le travail. En Allemagne, l’obligation vaccinale, appliquée depuis mars et en vigueur jusqu’à la fin de l’année, est appliquée de manière moins stricte qu’en France – son non-respect a principalement donné lieu à des rappels à l’ordre et à des amendes dans les États fédérés. Le gouvernement britannique a finalement renoncé à imposer l’obligation vaccinale aux soignants du secteur public en mars 2022 ; seul le personnel soignant des maisons de retraite d’Angleterre doit être vacciné. La Grèce a instauré la vaccination obligatoire pour les soignants à l’été 2021, comme la Hongrie, sans revenir sur la mesure ; ce pays envisage toutefois de la lever le 31 décembre. La République tchèque ne prévoit pas d’obligation vaccinale. L’Autriche, alors qu’elle avait instauré la vaccination obligatoire de tous les résidents majeurs du pays, a levé la contrainte en juin dernier.
L’argument selon lequel les soignants vaccinés ne peuvent transmettre le virus ne tient pas, pas plus que celui selon lequel le vaccin protégerait des formes graves (Exclamations sur quelques bancs du groupe RE) , car nous savons que ce n’est pas exact. Quant à l’argument selon lequel le nombre de non-vaccinés est plus élevé dans les services de réanimation, il ne tient plus, comme le montre le changement de communication du Gouvernement.
Mme la présidente.
Merci, monsieur Baptiste.
M. Christian Baptiste.
Nous disons aux soignants suspendus de Guadeloupe que nous reconnaissons leur souffrance, la violence qu’ils ont subie et que nous voterons pour cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Vincent Thiébaut.
M. Vincent Thiébaut.
Ce sujet est important. J’avoue que même moi, il me gêne, à titre personnel. Nos débats mélangent de nombreuses questions. La première est celle de l’efficacité du vaccin. Oui, celui-ci protège, même si ce n’est pas à 100 % – ce qui n’est d’ailleurs le cas d’aucun vaccin. Nous savons qu’il réduit la probabilité de contagion et le nombre de formes graves ; il n’y a pas lieu d’en douter.
M. Philippe Vigier.
Très bien !
M. Vincent Thiébaut.
La deuxième question est celle de la situation personnelle des soignants non vaccinés. Je suis d’accord avec vous, ils vivent un drame personnel ; chacun d’entre nous en connaît dans sa circonscription. Il nous faut trouver les moyens de les accompagner.
La troisième question est plus grave. Je suis membre du conseil de surveillance de mon hôpital. Tous les médecins, tous les chefs de service demandent que la vaccination soit obligatoire au sein de l’établissement. Je vous rappelle que les infirmières sont obligatoirement vaccinées contre l’hépatite B quand elles entrent en milieu hospitalier – et personne ne conteste cette obligation.
Nos débats mélangent ainsi de nombreuses questions. Le plus grave est toutefois que nous remettons en cause la parole des sachants, avec celle des médecins. Tous demandent le maintien de cette obligation.
Ne mélangeons donc pas notre préoccupation pour des situations personnelles qui ne peuvent nous laisser indifférents et le respect de la parole des sachants. Nous, politiques, ne pouvons la remettre en cause. Sinon, quel sera leur poids demain ? Ils seront tout le temps contredits, alors qu’ils doivent être respectés. Écoutons-les.
Enfin, nous parlons de 600 infirmières sur 240 000 ; de 75 médecins sur 85 000. Non, ce n’est pas la réintégration de ces soignants qui résoudra toutes les difficultés que rencontre le milieu hospitalier. Nous voterons donc pour les amendements de suppression. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Jean-Victor Castor.
M. Jean-Victor Castor.
Je suis assez surpris : vous n’évoquez que le droit, rien que le droit, alors qu’en Guyane, seulement 40 % de la population a reçu la première dose du vaccin et 20 % la troisième dose – celle-ci a donc été refusée par 80 % de la population.
M. Michel Lauzzana.
Combien de morts ?
M. Jean-Victor Castor.
Cette réalité vaut dans tout le milieu hospitalier, dans les secteurs paramédical et médico-social et dans les professions libérales. Vous évoquez le droit, mais tous les directeurs d’hôpitaux se sont déclarés incapables de faire appliquer l’obligation vaccinale, à moins de fermer leur établissement. Madame la ministre déléguée, quelles mesures avez-vous prises pour répondre à cette difficulté ? Où est l’égalité ?
Un député du groupe RE.
Et où est la responsabilité ?
M. Jean-Victor Castor.
Rappelons que 80 % de la population guyanaise refuse ce vaccin et que ce territoire, en dehors même de la crise du covid, est le premier désert médical du pays. Alors que pour des raisons structurelles, plus aucun soignant ne veut s’y installer, vous ajoutez encore l’obligation vaccinale ! Résultat : plus personne ne veut suivre les formations d’ambulancier et d’infirmier. Dites-moi comment faire ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.)
Alors que certains seraient prêts à exercer ces métiers difficiles, dans un environnement extrêmement défavorable, vous les découragez avec la contrainte vaccinale, dont les gens ne veulent pas.
Bizarrement, la Guyane est l’un des territoires où les morts du covid ont été les moins nombreux. Posez-vous les vraies questions. Dans quel monde vit-on ? Soyez adultes, ayez le bon sens d’admettre que vous vous êtes trompés ! C’est tout ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR-NUPES, RN et LFI-NUPES.)
Et d’ailleurs…
Mme la présidente.
Le temps imparti est révolu, monsieur Castor. Je vous redonnerai la parole le cas échéant sur les amendements.
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana.
Alors que nous avons beaucoup évoqué le personnel soignant, remettons au centre du débat les patients et l’éthique que nous devons, nous, soignants, à ceux qui nous confient leur santé.
Je rappelle que dans les contentieux médicaux, ce ne sont pas les résultats qui sont jugés, mais les moyens employés pour soigner un patient. Or les moyens nécessaires pour faire face à la pandémie du covid sont les gestes barrières que nous connaissons tous, mais aussi et surtout la vaccination, promue par toute la communauté scientifique.
Je suis choqué par cette proposition de loi qui donne raison aux réseaux sociaux, aux populistes, aux obscurantistes, contre la communauté des scientifiques. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)
M. Davy Rimane.
Mais non ! Pas du tout !
M. Michel Lauzzana.
Comme l’indiquait M. Thiébaut, il est très dangereux de remettre en question l’autorité de la communauté des sachants, alors que ceux-ci travaillent tous les jours sur la question. Tout au long de l’année, des équipes médicales soumettent les vaccins à des contrôles et scrutent leurs effets pour déterminer les précautions d’emploi et d’éventuelles contre-indications, mais les obscurantistes déclarent qu’il ne faut pas se faire vacciner. (Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Cette proposition de loi est malvenue, pour des raisons éthiques. Je ne me vois pas soumettre les patients que je soigne tous les jours à un risque supplémentaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Julien Rancoule.
M. Julien Rancoule.
Oui, il faut réintégrer les personnels soignants non vaccinés. La situation est scandaleuse : 15 000 soignants, qui ne demandent qu’à travailler, se trouvent suspendus, sans salaire – alors qu’ils ont des familles, je le rappelle.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Il faudra se mettre d’accord sur les chiffres !
M. Julien Rancoule.
C’est inhumain. J’ai moi-même été suspendu.
M. Olivier Falorni.
Ah !
M. Julien Rancoule.
Pourtant, nous manquons de soignants, surtout dans le monde rural. Par exemple, le Smur – structure mobile d’urgence et de réanimation – de Quillan, dans l’Aude, s’est trouvé privé de médecin pendant quinze jours cet été et le CHU de Carcassonne manque cruellement d’infirmiers. Les lits ferment et pendant ce temps, 15 000 soignants restent chez eux.
Quelque 5 000 sapeurs-pompiers suspendus ont regardé cet été les camions-citernes feux de forêts passer, impuissants. On ne sait jamais, peut-être qu’ils risquaient de contaminer les arbres ? (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
L’obligation vaccinale n’a fait qu’aggraver la désertification médicale et le manque de pompiers dans les campagnes.
Je trouve cette proposition de loi relativement timide. Alors que nous savons que le vaccin n’empêche ni la contamination, ni la transmission, les tests obligatoires sont inutiles en l’absence de symptômes, y compris pour les personnels soignants non vaccinés. Nous souhaitons la réintégration de tous les soignants. Nous voterons pour l’article 1er. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
Sur les amendements nos 13 et identique, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Sur les amendements nos 42 rectifié, 43 et 40 rectifié, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Sur l’article 1er, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements de suppression de l’article, nos 13 et 20.
La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement no 13.
M. Éric Alauzet.
Madame la rapporteure, votre principale motivation est le manque de soignants. Nous sommes d’accord sur le bilan, mais la solution que vous proposez n’est pas efficace.
En effet, les soignants écartés sont très peu nombreux ; beaucoup d’entre eux ont désormais choisi de s’éloigner pour préparer une reconversion. La plupart de ceux pour qui ce n’est pas le cas refuseront de se soumettre au protocole sanitaire envisagé. Ces gens, après avoir refusé et critiqué de nombreuses propositions, refuseront aussi la vôtre, parce qu’elle est trop complexe.
Quant aux soignants vaccinés, ils exerceront leur droit de retrait. Il leur sera insupportable de voir arriver auprès d’eux des personnes non vaccinées après avoir fait l’effort de se vacciner dans un contexte de travail différent.
Enfin, les patients eux-mêmes seront en droit de récuser la présence des soignants non vaccinés. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Chers collègues, votre proposition de loi tombe à un bien mauvais moment, car la huitième vague de covid est proche. La situation est grave (Exclamations sur les bancs du groupe RN) et l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) s’inquiète. On déprogramme déjà des interventions dans les services en raison du grand nombre de malades de la grippe attendus cette année, après le reflux de l’année dernière. Quant à l’épidémie de bronchiolite, elle repart. L’Académie nationale de médecine redoute les co-infections de covid et de grippe. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
M. Jean-Victor Castor.
C’est une invention, ça !
M. Jocelyn Dessigny.
La majorité agite les peurs !
M. Éric Alauzet.
Ce n’est vraiment pas le moment de donner un tel signal à la population !
M. Jocelyn Dessigny.
Vous allez la gérer comment, la huitième vague, sans les soignants ?
M. Sylvain Maillard.
Écoutez les médecins qui parlent !
Mme la présidente.
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 20.
M. Philippe Juvin.
Je veux d’abord dire une chose très simple : le refus de se faire vacciner pour des raisons personnelles est respectable, et personnellement, je le respecte. Toutefois, ce refus n’est pas sérieux de la part d’un soignant au contact des malades. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Jean-Victor Castor s’exclame.)
Notre débat est pollué par le fait qu’on demande à des personnels malades de soigner les patients, ce qui est tout à fait déraisonnable.
M. Jean-Victor Castor.
C’est vrai ou pas ?
M. Philippe Juvin.
Ce sujet est important, mais ce n’est pas le sujet principal de cet amendement de suppression.
Plusieurs d’entre vous ont déclaré que le vaccin ne protégeait pas contre la contamination. C’est faux, mesdames et messieurs ! Il est vrai qu’il subsiste des doutes quant à la contamination par des soignants vaccinés : on ne sait toujours pas si un individu vacciné et infecté transmet moins le virus qu’un individu non vacciné et infecté. On sait, en revanche, qu’une personne vaccinée est moins souvent malade. C’est le propre du vaccin : il protège contre la maladie, et pas seulement contre ses formes graves ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
M. Sylvain Maillard.
C’est un médecin qui vous le dit !
M. Philippe Juvin.
Quand vous êtes vacciné, vous êtes moins souvent malade. Et quand vous n’êtes pas malade, vous ne risquez pas de transmettre le virus. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme Prisca Thevenot.
Prenez des notes !
M. Philippe Juvin.
Voilà pourquoi, chers collègues, l’Académie nationale de médecine – et non Philippe Juvin – considère que la réintégration des soignants non vaccinés contre le covid serait une erreur et voilà pourquoi je demande la suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR et sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
M. Pierre Cazeneuve.
Très bien !
Mme la présidente.
Sur l’amendement no 17, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Ceux d’entre vous qui nous invitent à écouter les médecins vont souffrir : je ne suis qu’aide-soignante ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme Sophia Chikirou.
Bravo !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Depuis le début de la discussion générale, je répète que la proposition de loi ne revient pas sur l’obligation vaccinale. (« Mais si ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.)
Je rappelle que la Haute Autorité de santé est saisie sur des questions sanitaires et ne se prononce jamais sur des sujets politiques – elle nous l’a rappelé lorsque nous l’avons auditionnée. Ce n’est pas elle qui préconise l’obligation vaccinale des soignants et qui a demandé la suspension des personnels non vaccinés. Le Gouvernement est seul responsable de cette décision ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RN et GDR-NUPES.)
M. Jean-Victor Castor.
Excellent !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Cessez de demander à la HAS ce qu’elle pense de la réintégration des soignants. Elle nous a dit clairement que le protocole proposé était de nature à protéger du risque épidémique. (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RN et GDR-NUPES.) Non, nous ne revenons pas sur l’obligation vaccinale : nous cherchons simplement une sortie de secours pour les 12 000 personnes qui le demandent ! Avis défavorable. (Mêmes mouvements.)
Mme Sophia Chikirou.
Très bien, madame Fiat !
Mme la présidente.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Parce que nous sommes adultes et cohérents, le Gouvernement formule un avis favorable sur ces deux amendements de suppression. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
On nous a dit tout à l’heure que nous n’étions pas adultes ! Je me permets juste de rappeler que nous le sommes.
M. Jocelyn Dessigny.
Mme la ministre nous confirme qu’elle est adulte et vaccinée !
Mme la présidente.
S’il vous plaît ! Un peu de calme, chers collègues.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Madame la rapporteure, la HAS a rappelé le 9 novembre qu’elle était défavorable à la levée de l’obligation vaccinale et qu’il fallait inciter au second rappel du vaccin. Elle a également souligné que le protocole de réintégration des soignants inclus dans la proposition de loi n’était pas la solution à privilégier et qu’il ne serait pas applicable sur le terrain car trop contraignant. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
M. Pierre Cazeneuve.
Eh oui !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Monsieur Nilor, le Gouvernement ne rentre pas en guerre contre les professionnels de santé. Au contraire, comme plusieurs d’entre vous l’ont rappelé, il est à leurs côtés. Toutes les fédérations professionnelles du secteur médical se sont prononcées contre la réintégration des soignants non vaccinés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Vincent Thiébaut applaudit aussi.)
Mme la présidente.
Chers collègues, vous êtes nombreux à demander la parole. Je propose que nous nous en tenions à la règle un pour, un contre.
La parole est à M. Mickaël Bouloux. Êtes-vous pour ou contre les amendements, cher collègue ?
M. Mickaël Bouloux.
Ni l’un, ni l’autre ! (Exclamations sur divers bancs.)
M. Pierre Dharréville.
C’est la preuve que cette règle est stupide !
Mme la présidente.
Dans ce cas, la parole est à M. Marcellin Nadeau, contre les amendements de suppression.
M. Marcellin Nadeau.
Les députés du groupe GDR-NUPES voteront évidemment contre ces amendements, madame la présidente ! Nous sommes malheureusement enfermés dans des postures et nous refaisons un match qui a déjà eu lieu. Il ne s’agit pas, avec la proposition de loi, d’être pour ou contre la vaccination – mes collègues l’ont déjà dit. Il s’agit, en revanche, de faire face au besoin criant de personnels soignants, notamment dans les territoires d’outre-mer.
Rappelons que 80 % de ces personnels ne présentent pas un schéma vaccinal complet et qu’il est urgent de répondre aux besoins des patients.
Mme Rachel Keke.
C’est cela le problème !
M. Marcellin Nadeau.
Certains prétendent que la politique du Gouvernement à l’égard des personnels non vaccinés ne s’apparente pas à une politique punitive : c’est faux !
M. Jean-Victor Castor.
Exactement !
M. Marcellin Nadeau.
Cette politique est punitive, car elle fait payer à des familles entières le fait que l’un des parents a refusé de se faire vacciner ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)
Parfois, l’absurdité tue. Soyons pragmatiques : votons en faveur de la proposition de loi et contre ces amendements ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Yannick Neuder, pour s’exprimer en faveur des amendements de suppression.
M. Yannick Neuder.
Les propos de notre collègue Josiane Corneloup pendant la discussion générale ont montré pourquoi il est nécessaire de s’opposer à ces amendements. Il ne s’agit pas de discuter du bien-fondé de la vaccination, mais d’envisager la réintégration des soignants.
M. Olivier Falorni.
Je croyais que c’était un pour, un contre ?
M. Philippe Vigier.
Un pour, un contre !
M. Yannick Neuder.
Pourquoi la France est-elle le seul pays à…
Mme la présidente.
Monsieur Neuder, je suis navrée, mais vous ne respectez pas la règle que nous avons fixée ! (Brouhaha.)
La parole est à M. Philippe Vigier.
Chers collègues, ce débat est important. Veuillez vous écouter les uns les autres ! Un peu de silence ! (« Chut ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Philippe Vigier.
Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) soutiendra les amendements de suppression de nos collègues Éric Alauzet et Philippe Juvin.
Madame Fiat, la principale question n’est pas le nombre de personnes concernées, mais la vaccination. Chère collègue, comment ferez-vous demain pour expliquer à nos compatriotes que certains professionnels de santé sont vaccinés et d’autres non ? Comment ferez-vous pour imposer la vaccination contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos ou la tuberculose ? (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Un mouvement de refus va inévitablement s’organiser. Cela, vous devez en avoir conscience ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.)
M. Davy Rimane.
Ça n’a rien à voir !
M. Jean-Victor Castor.
Ce n’est pas la même chose !
M. Rodrigo Arenas.
Venez donc dans le métro avec moi !
M. Philippe Vigier.
Quant à nos collègues du Rassemblement national, il me semblait que leur groupe prônait la non-désobéissance. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
En soutenant ces amendements, vous rendrez hommage aux personnels soignants morts au combat, chers collègues. Ne les oublions pas ! Vous exposez les personnels non vaccinés au risque d’être contaminés par la covid. Vous n’en avez pas le droit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
Un député du groupe RN.
Arrêtez la mandoline !
M. Philippe Vigier.
Ce n’est pas de la mandoline ! C’est une faute morale ! C’est très grave de dire cela ! Vous applaudissiez tous les personnels soignants pendant la crise sanitaire, mais aujourd’hui, vous les envoyez au feu sans les protéger. C’est scandaleux et inadmissible ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 et 20.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 261
Nombre de suffrages exprimés 257
Majorité absolue 129
Pour l’adoption 96
Contre 161
(Les amendements identiques nos 13 et 20 ne sont pas adoptés.) (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et GDR-NUPES et sur quelques bancs des groupes LR et SOC. – Les députés du groupe RE écartent les bras pour désigner les deux côtés opposés de l’hémicycle.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Joris Hébrard, pour soutenir l’amendement no 42 rectifié.
M. Joris Hébrard.
Il a pour objectif de redonner tout son rôle au Parlement – rôle qui lui a été ravi par la HAS – en lui permettant d’exprimer la volonté du peuple sur un sujet qui lui est cher et de représenter la société dans toute sa diversité.
Nous proposons de modifier le point IV de l’article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, qui accorde bien trop de pouvoir à la HAS. Si la loi du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique a redonné leur place aux deux chambres, la HAS garde toute latitude pour agir.
Quelle est la légitimité de la HAS ? Contrairement à elle, nous avons été élus pour représenter le peuple et prendre des décisions en son nom. Avec cet amendement, qui retire au Gouvernement la possibilité de décréter la fin de l’obligation vaccinale sur avis de la HAS, il est proposé à l’Assemblée nationale de retrouver son autorité. Cette décision est confiée au Parlement, qui se prononce par un vote après avis des commissions des affaires sociales de l’Assemblée et du Sénat.
Nous sommes tous excédés par les passages en force du Gouvernement, mais pas une fois nous ne sommes tombés d’accord pour le contrecarrer. Nous avons aujourd’hui l’occasion de trouver un terrain d’entente, pour la France, pour les Français et pour nos libertés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Sylvain Maillard.
M. Sylvain Maillard.
Je demande une suspension de séance, madame la présidente. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES.)
M. Louis Boyard.
Vous suspendez les soignants, les séances…
Mme la présidente.
Elle est de droit.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 42 rectifié ?
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Votre amendement, cher collègue, vise à remplacer le décret levant l’obligation vaccinale suite à l’avis de la HAS par « un vote du Parlement, après avis des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires sociales. »
Vous savez que je suis attachée au rôle du Parlement, mais le décret que vous visez n’est plus un sujet ; en effet, depuis la loi du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d’exception créés pour lutter contre l’épidémie liée à la covid-19, si la HAS constate qu’eu égard à la situation sanitaire, l’obligation vaccinale n’est plus justifiée, le Gouvernement est tenu de la suspendre. Il n’y a donc pas lieu de prévoir un vote du Parlement, dont on ne connaîtrait ni les modalités ni le moment, et encore moins d’imposer un tel vote. Le dispositif que vous proposez semble peu pratique ; il est par ailleurs fragile du point de vue juridique. Je vous propose un retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.
Même avis que la rapporteure, pour les mêmes raisons.
Mme la présidente.
La parole est à M. Antoine Villedieu.
M. Antoine Villedieu.
Plus rien ne justifie l’obligation vaccinale : elle n’empêche ni la contamination ni la propagation. Par conséquent, des soignants vaccinés peuvent tout autant transmettre le virus que ceux qui ne le sont pas, à des patients vaccinés comme non vaccinés, surtout quand on sait que les soignants testés positifs ont été rappelés faute de personnel.
M. Pierre Cazeneuve.
C’est faux !
M. Antoine Villedieu.
Pendant que vous errez dans les profondeurs du terrier à la recherche du petit lapin blanc, des milliers de nos concitoyens subissent de plein fouet les effets de votre politique sanitaire. Dans la nuit du 17 au 18 novembre, un homme de 71 ans est mort, seul sur son brancard, aux urgences de Saint-Malo. Dans mon département de la Haute-Saône, les urgences de l’hôpital de Lure ferment à vingt heures trente, obligeant nos compatriotes à effectuer un trajet de plus de trente minutes. Il n’y a désormais plus de radiologues et en 2021, les urgences de Gray ont été fermées plusieurs jours, faute de personnel. Votre déconnexion avec la réalité, madame le ministre,…
M. Pierre Cazeneuve.
La ministre !
M. Antoine Villedieu.
…est si prégnante que vous me faites penser à l’empereur Néron déclamant des vers poétiques au milieu de l’incendie qui ravagea l’antique Rome. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
M. Pieyre-Alexandre Anglade.
On ne comprend rien !
Mme Michèle Peyron.
Et l’amendement ?
M. Antoine Villedieu.
Ah, quelle belle hiérarchie des priorités, qui privilégie l’idéologie aux dépens de la santé des Français ! (Mêmes mouvements.)
C’est la raison pour laquelle je vous invite à voter l’amendement de mon collègue. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier.
Je voudrais réunir mon groupe ; je demande donc une suspension de séance. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
Il est vingt heures, monsieur Vigier. Dans ce cas, je lève la séance.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
4 • Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé ;
Discussion de la proposition de loi visant à instaurer une allocation d’autonomie pour les jeunes en formation ;
Discussion de la proposition de loi visant à créer un corps de fonctionnaires pour les accompagnants d’élèves en situation de handicap ;
Discussion de la proposition de loi constitutionnelle visant à modifier les conditions de déclenchement du référendum d’initiative partagée ;
Discussion de la proposition de résolution visant à assurer l’égalité effective entre tous les citoyens par une grande loi de développement pour les outre-mer ;
Discussion de la proposition de loi visant à accélérer la rénovation thermique des logements, en garantissant un reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes réalisant des travaux et en interdisant réellement les logements les plus énergivores ;
Discussion de la proposition de loi visant à mettre fin à la concentration dans les médias et l’industrie culturelle ;
Discussion de la proposition de loi garantissant l’accès à l’eau potable par la gratuité des mètres cubes vitaux.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra
Troisième séance du 24 novembre 2022 de l'Assemblée Nationale
XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023
Séance du jeudi 24 novembre 2022
3e séance
Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente
Mme la présidente.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
1 • Réintégration du personnel des établissements de santé non vacciné
Suite de la discussion d’une proposition de loi
Mme la présidente.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé (nos 322, 493).
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente.
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 42 rectifié à l’article 1er. Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable sur cet amendement.
Article 1er (suite)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Caroline Yadan.
Mme Caroline Yadan.
La réintégration du personnel soignant est une mesure irresponsable.
Irresponsable, elle l’est d’abord vis-à-vis des patients vulnérables que notre société a le devoir de continuer à protéger. Contrairement à ce que nous avons entendu, la pandémie de covid-19 n’est pas derrière nous : on compte encore plus de 4 000 contaminations par jour ; en ce moment même, près de 17 000 Français sont toujours hospitalisés. Non, la bataille n’est pas gagnée et le risque est toujours présent.
M. Sylvain Maillard.
Elle a raison !
Mme Caroline Yadan.
Ensuite, elle est irresponsable vis-à-vis des soignants, ces centaines de milliers d’hommes et de femmes dont le comportement exemplaire et le sens du devoir ont permis de protéger nos malades au quotidien. Cette réintégration serait incomprise et pourrait conduire ces soignants vaccinés à quitter leur poste en exerçant leur droit de retrait.
M. Philippe Lottiaux.
Pourquoi, puisqu’ils sont vaccinés ?
Mme Caroline Yadan.
Enfin, elle est irresponsable parce que réintégrer des soignants qui contestent l’idée même d’une médecine fondée sur la science, lui préférant les croyances, remettrait en cause la légitimité de l’obligation vaccinale et contribuerait à diffuser le complotisme dans les hôpitaux.
Mme Caroline Fiat, rapporteure de la commission des affaires sociales.
Ce n’est pas l’amendement !
Mme Caroline Yadan.
Qui peut soutenir que réintégrer 1 050 infirmières sur 240 000 ou 75 médecins sur 85 000 permettra de résoudre le manque de personnel ?
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Quel rapport avec l’amendement ? Aucun !
Mme Caroline Yadan.
Cette proposition de réintégration, contraire à l’avis de l’Académie de médecine, constituerait une faute incompréhensible et inacceptable. L’irresponsabilité a été le choix des non-vaccinés (Exclamations sur les bancs du groupe RN) , elle ne doit pas devenir le nôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Louis Bourlanges applaudit également.)
M. Sylvain Maillard.
Très bien !
Mme la présidente.
Je mets aux voix l’amendement no 42 rectifié.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 134
Nombre de suffrages exprimés 133
Majorité absolue 67
Pour l’adoption 40
Contre 93
(L’amendement no 42 rectifié n’est pas adopté.) (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Joris Hébrard, pour soutenir l’amendement no 43, qui fait l’objet du sous-amendement no 74.
M. Joris Hébrard.
Il est dommage, chers collègues, que vous ne vouliez pas plus de pouvoir parlementaire.
Cet amendement vise à permettre la réintégration des professionnels libéraux qui ont été injustement privés de leur fonction, parfois diffamés, voire poursuivis pour avoir eu des désaccords avec votre néopolitique sanitaire expérimentale, fondée sur le mensonge et la peur. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Charles Sitzenstuhl.
Quelle démagogie ! C’est scandaleux !
M. Joris Hébrard.
Les professionnels libéraux représentent 37 % de l’ensemble des professionnels de santé. Je vous l’accorde, monsieur le ministre de la santé et de la prévention, la réintégration du personnel soignant ne résoudra pas les problèmes du système de santé, mais vous réglerez au moins une grande partie des problèmes de ces libéraux et de leurs patients.
Prenant les devants, je vous demande votre avis : êtes-vous favorable au fait que les professionnels libéraux puissent exercer ou au contraire favorable à leur souffrance et à celle des patients qui attendent un rendez-vous ? Êtes-vous favorable aux difficultés auxquelles ils ont fait face ? Vous qui suspendez nos soignants – je m’adresse plus particulièrement à l’équipe précédente –, vous qui avez eu la volonté d’écarter et de réintégrer certains soignants, êtes-vous réellement vacciné ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir le sous-amendement no 74.
M. Cyrille Isaac-Sibille.
Soyons un peu sérieux ! Comment un professionnel libéral pourrait-il être suspendu ? Il exerce sous sa propre autorité et ne relève que de l’Ordre des médecins. S’il est suspendu, c’est que l’Ordre des médecins lui a retiré son autorisation d’exercer – ce qui ne concerne qu’un nombre infinitésimal de praticiens libéraux. Parlant au nom des soignants, j’indique qu’ils sont pour la vaccination. Nous ne parlons ici que de quelques praticiens libéraux qui n’auraient pas été vaccinés. Soyons sérieux !
Rappel au règlement
Mme la présidente.
La parole est à M. Sylvain Maillard, pour un rappel au règlement.
M. Sylvain Maillard.
J’interviens au titre de l’article 100 et pour le bon déroulement de nos débats.
Jusqu’à présent, la niche parlementaire du groupe LFI-NUPES se passait plutôt bien : nous avons adopté un magnifique texte en faveur du droit des femmes, dont nous pouvons être fiers, grâce à un beau travail collectif qui a donné lieu à un bon compromis.
M. Jean-Victor Castor.
Ce n’est pas un rappel au règlement !
M. Sylvain Maillard.
Le texte suivant, relatif à la corrida, a été retiré sans débat – je n’ai pas bien compris ce qui s’est passé. Voyant comment s’engage celui-ci, et en disant cela je pense à tous les soignants qui nous regardent (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) , je constate une sorte d’entente détestable entre le groupe RN et les députés d’outre-mer. Tous les soignants, dont 99,9 % sont vaccinés, nous regardent (Mêmes mouvements) : vous êtes en train de faire une proposition de loi antivax, complotiste ! Réfléchissez à ce que vous êtes en train de faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Louis Bourlanges applaudit également.)
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
Ce n’est pas un rappel au règlement !
Mme la présidente.
Monsieur Maillard, sur l’organisation des débats…
M. Sylvain Maillard.
Ils vous regardent ! Pour que nous puissions réfléchir, je demande une suspension de séance.
Mme la présidente.
La suspension est de droit.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue pour cinq minutes.
(La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Article 1er (suite)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Caroline Fiat, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement.
Mme Caroline Fiat, rapporteure de la commission des affaires sociales.
La disposition ici proposée est déjà prévue dans le texte : les personnels relevant des professions libérales ont évidemment vocation à faire partie du dispositif.
M. Joris Hébrard.
Ce n’est pas marqué dans le texte !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Votre demande est donc satisfaite. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention.
Tout d’abord, je vous prie d’excuser mon absence cet après-midi. J’aurais aimé être parmi vous pendant la discussion générale, mais des événements pour le moins imprévus m’ont malheureusement obligé à retourner brutalement dans l’Est de la France.
J’ai écouté vos propos avec attention. Permettez-moi d’abord de répondre à quelques questions. Vous souhaitez savoir, monsieur Hébrard, si je suis vacciné.
M. Joris Hébrard.
Pas vous particulièrement !
M. François Braun, ministre.
Vous me l’avez pourtant demandé. Je suis poli : je réponds. J’ai contracté le covid le 7 juin dernier. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) En raison des facteurs de risque que je présente, je dois attendre six mois avant de recevoir une prochaine dose de vaccin. Je ne manquerai pas de me faire vacciner dès que je le pourrai, c’est-à-dire à compter du 7 décembre.
Ensuite, vous évoquez une « néopolitique sanitaire expérimentale basée sur le mensonge et la peur ». Je veux bien tout entendre, mais ne racontons pas n’importe quoi ! Ainsi, l’ensemble de la communauté scientifique internationale mentirait et répandrait indûment la peur à propos de cette épidémie de covid, qui a fait des millions de morts ?
Un député du groupe RE.
Bravo !
M. François Braun, ministre.
Il me semble que nous pouvons débattre raisonnablement et échanger des idées sans dire n’importe quoi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
Le texte que vous proposez ne concerne pas la réintégration d’une poignée de soignants. Il porte sur le covid, c’est-à-dire sur une pandémie dont je n’ai pas besoin de vous rappeler qu’elle a fait des millions de morts…
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
Il faut parler de l’amendement !
M. François Braun, ministre.
…et qu’elle continue de faire des morts, en France comme dans d’autres pays.
M. Jean-Victor Castor.
Et l’amendement ?
M. François Braun, ministre.
Ce texte vise la politique conduite par le gouvernement précédent, approuvée par cette assemblée à plusieurs reprises (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES) et qui, ne vous en déplaise, permet à la France d’être le pays qui se sort le mieux de l’épidémie, qu’on prenne en considération le bilan humain ou les performances économiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
C’est faux !
M. Xavier Breton.
Arrêtez avec ça !
M. François Braun, ministre.
Ce texte concerne ensuite – et je sais que ce thème vous tient à cœur, madame la rapporteure – l’éthique du personnel soignant et l’obligation vaccinale au sens large.
Mme Sophia Chikirou.
Pourquoi cherchez-vous à gagner du temps comme ça ? Vous nous faites perdre du temps !
M. François Braun, ministre.
Il ne se limite pas au vaccin contre le covid – à moins que nous nous ayons tous mal compris. Alors pourquoi ne pas remettre en cause la vaccination contre l’hépatite B, tant que nous y sommes ? (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme Sophia Chikirou.
Ça va, maintenant ! Vous êtes à l’Assemblée, pas au café du commerce !
M. Sylvain Maillard.
Il a raison ! On ne va pas renoncer à tous les vaccins !
M. François Braun, ministre.
Cette vaccination obligatoire a pourtant fait chuter drastiquement la contamination des soignants par cette maladie. Pourquoi ne pas s’attaquer aussi à toutes les autres vaccinations ? (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Davy Rimane.
Mais ce n’est pas vrai !
M. François Braun, ministre.
L’éthique du personnel soignant, c’est de prendre soin. (Exclamations continues sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Et prendre soin, cela suppose d’éviter de transmettre des maladies.
M. Davy Rimane.
Arrêtez !
M. François Braun, ministre.
Nous pouvons aussi débattre du lavage de mains, si vous le souhaitez ! Renonçons-y et revenons au temps d’avant Pasteur : nous pourrons ainsi continuer à transmettre des maladies !
Mme Ségolène Amiot.
Vous êtes sérieux, là ?
M. François Braun, ministre.
L’éthique du personnel soignant, c’est de soigner et de protéger. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Sylvain Maillard.
Très bien !
M. François Braun, ministre.
Ce texte touche aussi les centaines de milliers de soignants qui ont tenu la ligne pendant les premières vagues. Croyez-moi, je sais ce que c’est : j’y étais !
Plusieurs députés du groupe RE.
Eh oui !
M. François Braun, ministre.
Je ne crois pas que ce soit le cas de beaucoup d’entre vous.
M. Sylvain Maillard.
Mais oui ! Écoutez le ministre !
Plusieurs députés du groupe RN.
Du calme, monsieur Maillard !
M. François Braun, ministre.
Ce texte concerne les 600 000 infirmières vaccinées, et non les 1 050 qui ne le sont pas. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel signal voulons-nous donner à ces personnes qui étaient en première ligne, qui se sont fait vacciner, qui ont eu peur…
Mme Sophia Chikirou.
À cause de vous !
M. François Braun, ministre.
…tous les soirs de choper cette cochonnerie et de la transmettre à leurs enfants ou à leur conjoint ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Un député du groupe LFI-NUPES.
C’est une honte de dire ça !
M. François Braun, ministre.
Ce texte ne porte pas uniquement sur les soignants à réintégrer, ni même sur les services de secours : il concerne bien l’éthique des personnels soignants.
M. Pierre Dharréville.
Et l’amendement ?
M. François Braun, ministre.
Certains arguments sont avancés. On explique que l’adoption du texte permettra de régler, ou au moins d’améliorer la situation des hôpitaux.
Mme Anne-Laure Blin.
Allez, c’est bon, on a compris !
M. François Braun, ministre.
Mais de qui se moque-t-on ? Croyez-vous vraiment que la réintégration de 1 000 infirmières sur plus de 600 000 permettra de résoudre le problème des hôpitaux ?
M. Laurent Jacobelli.
Vous espérez tenir combien de temps comme ça ?
M. François Braun, ministre.
Si nous en sommes là, autant ne plus chercher à définir une politique de santé ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Je peux vous assurer d’une chose,…
M. Jocelyn Dessigny.
Le ministre cherche à anesthésier l’Assemblée nationale !
M. François Braun, ministre.
…dont vous devez avoir conscience vous aussi, car vous vous êtes rendus dans les hôpitaux cet été pour y étudier la situation. (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Sophia Chikirou.
Vous devriez avoir honte, monsieur le ministre !
M. Manuel Bompard.
Déjà cinq minutes que vous parlez !
M. François Braun, ministre.
Que me disent les soignants, quand je les rencontre ?
M. Nicolas Sansu.
Plus que deux heures dix à tenir !
M. François Braun, ministre.
Que si nous réintégrons les soignants non vaccinés, ce sont eux qui partiront ! Vous voulez donc réintégrer 1 000 infirmières pour encourager les 600 000 qui sont en poste à quitter l’hôpital !
M. Jean-Victor Castor.
Vous n’êtes pas sérieux !
M. François Braun, ministre.
Est-ce ainsi que vous entendez régler les problèmes de notre système de santé ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
M. Laurent Croizier.
Bravo !
M. Jean-Victor Castor.
Madame la présidente, combien de temps va-t-il parler ?
M. François Braun, ministre.
Au-delà du fait que le remède est donc 600 fois pire que le mal, le protocole que vous proposez est – pardon de vous le dire – inapplicable, pour plusieurs raisons.
M. Manuel Bompard.
Voilà six minutes que vous parlez !
M. Marcellin Nadeau.
On a compris ! Il a assez parlé, madame la présidente !
M. François Braun, ministre.
D’abord, rappelons que les soignants devraient se faire tester tous les matins. Je sais qu’ils en auront rapidement assez, car je les connais bien : (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES) ils ne se plieront pas à cette exigence, mais iront tout de même voir leurs patients.
Ensuite, que se passera-t-il ? Pardon de m’appuyer sur mon expérience hospitalière (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem) , dans le cadre de laquelle j’ai eu à gérer un service et des plannings,…
M. Yannick Monnet.
Vous devez répondre en tant que ministre, pas en tant que médecin !
M. François Braun, ministre.
…mais je voudrais que vous m’expliquiez une chose. Prenons un exemple simple : un service de réanimation est organisé sur la base d’un ratio d’infirmières par malade. (Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
S’il vous plaît, chers collègues, un peu de calme !
M. Marcellin Nadeau.
Il a assez parlé, je crois !
M. Jean-Victor Castor.
Il va parler jusqu’à minuit ?
M. Éric Coquerel.
Mauvais perdants !
M. Maxime Minot.
Est-ce qu’on peut aussi demander aux collègues LFI assis en haut des travées d’arrêter de filmer ?
Mme la présidente.
Seul M. le ministre a la parole.
M. Jean-Victor Castor.
C’est inadmissible ! Vous jouez contre la démocratie !
Mme la présidente.
Veuillez laisser M. le ministre s’exprimer, je vous prie. (Vives exclamations sur de nombreux bancs.)
M. Philippe Vigier.
Partez, si ce qu’il dit ne vous convient pas ! Il y en a marre, à la fin !
Mme la présidente.
Je vais être contrainte de suspendre la séance, chers collègues ! (Brouhaha.)
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Je redonne donc la parole à M. le ministre.
M. François Braun, ministre.
Je ne sais que penser de ce brouhaha qui, je l’espère, ne reflète pas le niveau de considération que vous avez pour les soignants vaccinés. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme Maud Bregeon.
Bravo ! Il a raison !
M. Philippe Vigier.
Votre attitude est indigne, chers collègues !
M. François Braun, ministre.
Si vous le permettez, je poursuis mon explication…
M. Ugo Bernalicis.
Non, on ne le permet pas !
M. François Braun, ministre.
Quel bel exemple de démocratie vous donnez en prétendant m’empêcher de parler ! (Protestations sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
M. Éric Coquerel.
Vous ne cherchez qu’à gagner du temps car vous êtes minoritaires !
M. François Braun, ministre.
Non, je ne cherche nullement à gagner du temps, monsieur le député.
M. Laurent Jacobelli.
Bien sûr que si ! On ne vous a jamais autant entendu !
M. Manuel Bompard.
Sept minutes !
M. François Braun, ministre.
Je cherche simplement à exposer la position d’un soignant de première ligne.
M. Sylvain Maillard.
Eh oui !
M. François Braun, ministre.
Vous ne devez pas tellement savoir de quoi il retourne, mais moi oui.
M. Pierre Cazeneuve.
Bien sûr !
M. François Braun, ministre.
Si vous le permettez – mais si vous ne me le permettez pas, je m’exprimerai tout de même –, je veux simplement expliquer pourquoi ce protocole est irréaliste.
M. Ugo Bernalicis.
C’est le vôtre !
M. Laurent Jacobelli.
Vous avez trois heures, monsieur le ministre !
M. François Braun, ministre.
Je voulais prendre l’exemple des services de réanimation, où est établi un ratio soignants-patients – ce dont chacun peut se réjouir. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous sommes confrontés à de grandes difficultés actuellement – je ne reviendrai pas sur les fermetures de lits dues au manque de soignants.
M. Laurent Jacobelli.
Racontez-nous au moins une histoire ! Là, on s’ennuie !
M. François Braun, ministre.
Imaginons un soignant qui n’a pas voulu se faire vacciner. Par chance, on a trouvé un autre soignant pour le remplacer – il faut dire tout de même que sur les 600 000 professionnels, les non-vaccinés, de l’ordre de 1 sur 600, ne sont pas si nombreux (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Ce soignant se rend donc à l’hôpital pour travailler, il est inscrit au planning de telle sorte que le personnel soignant est en nombre suffisant par rapport au nombre de lits. Il se fait tester. Le résultat est positif. Dès lors, que fait-on ? Doit-il rentrer chez lui ? Dans ce cas, qui le remplace ? Qui va s’occuper de ses patients ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Sophia Chikirou.
Il travaille alors qu’il est positif ? Vous dites n’importe quoi !
M. François Braun, ministre.
Va-t-on imposer à une infirmière de service de prendre en charge deux fois plus de patients ? C’est totalement irréaliste ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Nouvelles exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Par conséquent, cette mesure ne sera pas appliquée et nous mettrons alors en danger les patients les plus fragiles qui se trouvent dans nos hôpitaux. (Mêmes mouvements. – M. Nicolas Sansu applaudit également.) Je le répète, ce texte concerne une poignée de soignants, 1 sur 600.
Tout à l’heure, je parlais d’éthique. Il se trouve que j’ai un autre objectif, que vous connaissez et que vous avez même approuvé : la prévention. En effet, l’article 17 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui porte sur la mise en place de rendez-vous de prévention, a été adopté par les sénateurs à l’unanimité.
Mme Danièle Obono.
On n’est pas au Sénat, ici !
M. François Braun, ministre.
Or, à présent, vous affirmez que la vaccination ne sert plus à rien. Quel message !
M. Davy Rimane.
Personne n’a dit ça !
M. François Braun, ministre.
En outre, vous l’envoyez au moment où nous voulons développer une politique de prévention et alors que, dans cette assemblée, vous avez tous voté pour une meilleure vaccination des enfants. De même, quel message si l’on songe aux autres vaccinations à venir ! Que me direz-vous, par exemple, lorsque je viendrai vous proposer une vaccination contre le papillomavirus ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Manuel Bompard.
Dix minutes qu’il parle !
Mme Prisca Thevenot.
Il a raison ! Que direz-vous ? C’est un vaccin pour les femmes !
M. François Braun, ministre.
C’est un vaccin qui permettra d’éradiquer le cancer du col de l’utérus ! Direz-vous alors que vous vous en moquez, que ce n’est pas une vaccination obligatoire ? C’est aberrant.
M. Éric Coquerel.
Vous n’êtes pas sérieux !
Mme Prisca Thevenot.
C’est irresponsable !
M. François Braun, ministre.
Ce message ne passera pas car il revient à dire aux soignants que nous ne nous occupons pas d’eux et aux patients que nous nous moquons de la prévention. C’est impossible.
M. Marcellin Nadeau.
Ça va, on a compris !
Un député du groupe LFI-NUPES.
Arrêtez de vous répéter !
M. François Braun, ministre.
Je vous l’ai dit, ce texte ne sera pas appliqué. Dieu sait que, dans cette assemblée, nous devons éviter les textes inapplicables – je vous rejoins sur ce point. (Plusieurs députés du groupe RE applaudissent l’arrivée dans l’hémicycle de M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.) Vous êtes les premiers à vous plaindre de notre bureaucratie, vous dénoncez ces textes que l’on ne peut appliquer dans les hôpitaux – et vous avez raison. Or vous voulez rendre la situation encore plus complexe avec ce nouveau texte inapplicable et mensonger. (Mme Sonia Chikirou se déplace dans les travées centrales où siègent les députés du groupe RE, suscitant de vives protestations chez ces derniers.)
M. Cyrille Isaac-Sibille.
Elle menace !
Mme la présidente.
Nous allons revenir au calme. Si certains députés font des demandes de rappel au règlement, j’y ferai droit. De même, j’ai bien noté que d’autres députés souhaitaient que je leur donne la parole.
M. Ugo Bernalicis.
Faites-le avant qu’on s’endorme !
Mme la présidente.
Pour l’instant, je vous demande cependant de bien vouloir laisser M. le ministre terminer son intervention.
M. François Braun, ministre.
J’aimerais mettre en parallèle les différentes stratégies adoptées face à la crise sanitaire. Celle que vous proposez, et qui consiste à se faire tester à tout instant, pour pouvoir sortir ou travailler, a été mise en œuvre par un seul pays au monde. Lequel, et avec quel succès ? La Chine. Nous voyons bien dans quelle situation se trouve aujourd’hui ce pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
M. Cyrille Isaac-Sibille.
Bravo !
M. François Braun, ministre.
La Chine est confrontée à une nouvelle vague de covid-19, probablement pire que la première, une vague qui la dépasse totalement.
M. Pieyre-Alexandre Anglade.
M. le ministre a raison !
M. François Braun, ministre.
Cette stratégie du test systématique afin de pouvoir se déplacer, et qui s’apparente à une stratégie zéro covid, ne marche pas.
À l’aube d’une reprise de l’infection – puisque les chiffres du covid-19 remontent, avec un taux de reproduction, ou R effectif, qui repasse au-dessus de 1 et une augmentation du nombre de cas après une certaine accalmie : j’imagine que, comme moi, vous suivez cette évolution –, quel message envoyez-vous donc pour les semaines à venir ?
Je le répète, ce texte, qui doit être discuté – et dont je discute avec vous en ce moment même –, n’est pas applicable, et il est contraire à l’éthique des soignants. C’est pourquoi vous ne pouvez pas le voter : il enverrait un message catastrophique sur notre système de santé.
M. Laurent Jacobelli.
En tout cas, votre message, lui, est très très long !
M. François Braun, ministre.
Certes, celui-ci est dans une situation difficile – vous le savez et je le sais aussi – mais, avec la mesure que vous proposez, vous l’entraîneriez encore plus bas et accéléreriez la fuite des soignants hospitaliers. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
M. Xavier Breton.
Regardez dans quel état est l’hôpital !
M. François Braun, ministre.
S’agissant des outre-mer, je rappelle tout d’abord que nous avions organisé un pont aérien pour rapatrier les malades. J’ai eu au téléphone des responsables au sein de ces territoires – vous connaissez le monde des urgences et du Samu, nous sommes en contact les uns avec les autres. Tous les chefs de service d’un centre hospitalier universitaire (CHU) – dont je tairai le nom, mais nous pourrons en discuter en aparté – m’ont dit qu’ils démissionneraient si l’on réintégrait les soignants non vaccinés. Réfléchissez donc aux conséquences de votre texte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Rappels au règlement
Mme la présidente.
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour un rappel au règlement.
M. Charles Sitzenstuhl.
Il se fonde sur le chapitre XIV – « Discipline, immunité et déontologie » – du titre Ier, et plus particulièrement sur l’article 70, alinéa 5, lequel vise tout membre de l’Assemblée qui s’est « rendu coupable » de « provocations » envers, notamment, des « membres du Gouvernement ».
Depuis tout à l’heure, avant même la suspension de séance, nous avons entendu, sur les bancs situés à gauche, notamment de la part de Mme Chikirou, moult invectives contre M. le ministre de la santé. Mme Chikirou a dit que M. le ministre nous faisait perdre notre temps et que c’était « notre faute ». (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Plusieurs députés du groupe RN.
Oh là là ! C’est grave !
M. Charles Sitzenstuhl.
De quoi parlait-elle ? De la pandémie, du covid-19 ? Nous évoquons des sujets sérieux, de la vie de nos concitoyens, de millions de Français. M. le ministre de la santé doit pouvoir s’exprimer calmement sans être intimidé par les oppositions. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Thomas Mesnier pour un rappel au règlement.
M. Thomas Mesnier.
Il se fonde sur l’article 70, alinéas 2 et 3, ainsi que sur l’article 9 de l’instruction générale du bureau. D’une part, comme le rappelait à l’instant M. Sitzenstuhl, des invectives, des menaces et des insultes ont manifestement été proférées sur ces bancs il y a quelques instants.
D’autre part, j’ai vu – comme plusieurs de mes collègues ainsi que, je crois, les huissiers – des députés, sur les bancs situés à gauche, utiliser leur téléphone pour se filmer et poster la vidéo sur les réseaux sociaux. (Exclamations sur de nombreux bancs.)
M. Maxime Minot.
On l’a vu !
M. Thomas Mesnier.
La présidence a rappelé il y a quelques jours que cette pratique était formellement interdite. Au vu de l’agitation que cela provoque pendant nos débats, je demande une suspension de séance de cinq minutes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures dix, est reprise à vingt-deux heures vingt.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
M. Olivier Marleix.
Rappel au règlement !
Mme Anne-Laure Blin.
Il y a un rappel au règlement, madame la présidente !
Mme la présidente.
J’ai bien vu la demande de rappel au règlement de M. Marleix et celle de M. Masséglia mais, compte tenu de l’agitation et de l’émoi ambiants, ainsi que de la sensibilité du sujet, je vais à nouveau suspendre la séance, pour m’entretenir avec les présidents de groupe ou leur représentant et voir dans quelles conditions nous pourrions continuer ce débat dans un climat plus apaisé.
M. Philippe Lottiaux.
C’est de l’obstruction !
M. Olivier Marleix.
J’ai demandé la parole pour un rappel au règlement, madame la présidente !
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.)
(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-deux, est reprise à vingt-deux heures quarante.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Après la discussion avec les présidents et les représentants de groupe, j’espère que nous pourrons continuer nos débats dans un climat plus apaisé.
La parole est à M. Olivier Marleix, pour un rappel au règlement.
M. Olivier Marleix.
Le spectacle auquel nous venons d’assister dans l’hémicycle est consternant et grave pour notre démocratie. Le débat sur la réintégration des soignants est important et attendu par des dizaines de milliers de nos compatriotes – soignants, membres de leurs familles, usagers des services publics. Ce débat, monsieur le ministre de la santé, monsieur le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, est d’autant plus légitime que la France est l’un des tout derniers pays en Europe, avec la Grèce, à n’avoir toujours pas réintégré les soignants non vaccinés. Cette anomalie justifie à elle seule le débat d’aujourd’hui. Or voici que la majorité – pardon, la minorité gouvernementale (Protestations sur les bancs des groupes RE et Dem) …
Mme Anne-Laure Blin.
Il a raison, c’est exactement ça !
M. Olivier Marleix.
Soyez respectueux de chacun dans cette assemblée ! Pardon de vous rappeler les réalités arithmétiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LFI-NUPES.) La minorité, étant particulièrement minoritaire ce soir, a été battue à l’occasion d’un amendement de suppression. Et voici que c’est l’affolement dans les rangs du groupe Renaissance et de ses alliés (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) ; depuis, on assiste à des manœuvres d’obstruction inacceptables, des centaines de sous-amendements étant déposés à l’amendement de notre collègue Philippe Juvin. Plus grave, les ministres eux-mêmes…
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Je n’ai pas parlé encore !
M. Olivier Marleix.
…se sont livrés à un exercice d’obstruction du travail parlementaire en déposant un amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) C’est la première fois sous la Ve République qu’un gouvernement se livre à l’obstruction, empêchant l’Assemblée nationale de poursuivre sa mission. Vous devriez avoir honte, messieurs les ministres, de vous être prêtés à ce jeu ! (Mêmes mouvements. – Vives protestations sur les bancs des groupes RE et Dem.) Si l’Assemblée nationale ne vote pas comme vous le voulez, si la majorité est minoritaire, ce n’est pas à vous de voler à son secours ! Respectez l’Assemblée nationale ! (Brouhaha. – Mmes et MM. les députés des groupes LR, RN, LFI-NUPES et SOC ainsi que plusieurs députés du groupe GDR-NUPES se lèvent et applaudissent longuement.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Sébastien Chenu, pour un rappel au règlement.
M. Sébastien Chenu.
Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 95 du règlement, relatif à l’examen des amendements.
Ce que nous observons ce soir résulte de plusieurs facteurs et témoigne de plusieurs choses.
D’abord, chers collègues, vous n’avez pas compris que vous n’aviez plus la majorité. L’absence de culture de la démocratie chez un groupe qui a été majoritaire et qui a du mal à comprendre qu’il ne peut pas gagner à tous les coups perturbe gravement le fonctionnement de l’Assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR.) C’est vous qui êtes la cause de ce fonctionnement désespérant.
Vous ne pouvez pas utiliser le 49.3 sur ce texte, alors vous demandez au Gouvernement d’utiliser des manœuvres d’obstruction qui n’honorent pas notre assemblée et qui empêchent la représentation nationale de faire son travail. Vous ne pourrez pas gagner avec des manœuvres. Ce n’est pas honnête par rapport aux élus présents.
Enfin, monsieur le ministre, vous avez parlé de respect vis-à-vis des soignants ; mais le respect consiste à aller au bout du texte et à le voter au lieu de chercher à faire de l’obstruction, empêchant la démocratie de s’exprimer.
Mme Caroline Yadan.
L’hôpital et la charité, vous connaissez ?
M. Sébastien Chenu.
On verra bien : si vous réussissez à convaincre la majorité des parlementaires, le texte ne passera pas ; si vous ne réussissez pas, il passera – nous en serons très heureux, mais c’est votre responsabilité de convaincre les députés si vous n’êtes pas d’accord avec ce texte, présenté dans le cadre d’une niche parlementaire. Vous ne pouvez pas vous asseoir sur la démocratie, matin, midi et soir – un coup le 49.3, un coup l’obstruction –, parce que vous refusez de comprendre que vous ne pouvez pas gagner à tous les coups. (Mmes et MM. les députés du groupe RN se lèvent et applaudissent. – Mmes et MM. les députés du groupe LR applaudissent également.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Philippe Vigier, pour un rappel au règlement.
M. Maxime Minot.
Sur le fondement de quel article ?
M. Philippe Vigier.
Sur le fondement de l’article 70, qui traite de l’organisation de nos débats, cher collègue.
Mme la présidente.
Pas d’interpellations, monsieur Minot.
M. Philippe Vigier.
Je veux bien tout entendre. Je n’ai pas oublié le texte relatif à la fin de vie, sur lequel cinq députés du groupe Les Républicains avaient déposé 3 000 amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.) Et on nous parle d’obstruction ?
Ensuite, cher Olivier Marleix, tout le monde ne pense pas la même chose, et j’avais cru comprendre que M. Juvin n’était pas d’accord ; mais je vois qu’il a disparu. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe RE.) Fera-t-on une émission « Perdu de vue » ? Il ne pourra pas défendre son amendement !
Mme Prisca Thevenot.
Où est-il ?
M. Philippe Vigier.
Oui, où est-il ? (Exclamations et interpellations mutuelles sur les bancs des groupes Dem et RE d’un côté, LR de l’autre.)
Enfin, s’agissant de l’organisation de nos débats,…
Mme la présidente.
Chers collègues, seul M. Vigier a la parole.
M. Philippe Vigier.
…va-t-on, ce soir, rayer d’un trait de plume plus de 260 ans d’histoire de la vaccination en rendant celle-ci non obligatoire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE. – Vives protestations sur les bancs des groupes RN et LR.)
M. Laurent Croizier.
Bravo, c’est exactement ça !
Un député du groupe LR.
Nul !
M. Philippe Vigier.
Je vous en laisse seuls responsables ! Toutes les maladies qui ont été éradiquées l’ont été grâce à la vaccination. Ne dites pas le contraire, c’est la vérité scientifique ! (Nouveaux applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE. – M. Charles Sitzenstuhl se lève. – M. Xavier Breton mime un joueur de pipeau.)
M. Ugo Bernalicis.
Ce n’est pas un rappel au règlement !
Mme la présidente.
La parole est à M. Olivier Serva, pour un rappel au règlement.
M. Olivier Serva.
Sur le fondement de l’article 100, relatif aux conditions des débats.
Vous utilisez des techniques d’obstruction pour ne pas admettre que vous êtes minoritaires dans l’hémicycle. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN, LFI-NUPES, LR, SOC et GDR-NUPES.) Je vous regarde, chers collègues : vous avez le sourire aux lèvres.
Vous vous réjouissez d’avoir trouvé une petite mesquinerie obstructive pour empêcher l’examen du texte d’aller à son terme. (Mme Sophia Chikirou applaudit.)
M. Sylvain Maillard.
Ce n’est pas vous qui allez nous donner des leçons !
M. Olivier Serva.
Tu vas la fermer ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Plusieurs députés du groupe RE se lèvent pour protester.)
M. Rémy Rebeyrotte.
C’est insupportable !
Mme la présidente.
Ah non, monsieur Serva, vous ne pouvez pas vous exprimer ainsi, vous ne pouvez pas vous livrer à une telle invective ! Je suspends la séance pour cinq minutes.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Mes chers collègues, il se fait tard ; les esprits s’échauffent. Je ne veux plus entendre ce que j’ai entendu il y a quelques minutes, avant la suspension.
M. Jocelyn Dessigny.
Il y a tumulte, madame la présidente ! Certains ont été sanctionnés pour moins que ça !
Mme la présidente.
Aussi demanderai-je à chacun d’entre vous de tenir son langage ; je vous rappelle que certaines dispositions du règlement m’autorisent à prononcer des sanctions. Je vous demande également d’éviter les provocations (M. Olivier Marleix applaudit) qui, elles aussi, appellent quelques sanctions et qui, à cette heure tardive, arrivent plus vite.
Nous poursuivons les prises de paroles au titre des rappels au règlement dont j’ai été saisie. MM. Pierre Dharréville et Boris Vallaud ont retiré leur demande de rappel au règlement.
Je vous demande de bien vouloir conclure, monsieur Serva ; il vous reste une minute.
M. Olivier Serva.
Je reprends donc où j’en étais. (Rires sur les bancs du groupe RN. – Quelques députés du groupe LFI-NUPES applaudissent.)
Plusieurs députés du groupe RE.
Des excuses !
M. Olivier Serva.
J’étais en train de vous rappeler que vous étiez minoritaires : vous êtes minoritaires dans cet hémicycle, vous êtes minoritaires dans le pays. Vous refusez la démocratie : vous méprisez une niche parlementaire, celle de La France insoumise-NUPES ; vous méprisez le peuple ; vous vous méprisez vous-mêmes en tant qu’élus du peuple. (Mmes et MM. les députés des groupes LIOT, RN, LFI-NUPES, LR et GDR se lèvent et applaudissent longuement.) Vous utilisez des subterfuges petits, petits comme vos idéaux, comme vos pratiques, comme votre acception de la démocratie ! Nous disons, non ! Non à votre refus de respecter ce noble hémicycle qui, aujourd’hui, fait de la démocratie française une fierté nationale, celle-là même que vous salissez avec vos bassesses, vos petitesses ! Vous êtes minoritaires : acceptez-le ! (Les applaudissements se font plus vifs.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.
M. Jean-René Cazeneuve.
J’entends parler de manœuvres. Je voudrais tout de même rappeler pourquoi nous en sommes là et comment s’est construite cette niche parlementaire. La France insoumise a déposé douze textes en sachant pertinemment que, lors d’une niche, il n’est possible d’en examiner que deux ou trois. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme Christine Pires Beaune.
Et alors ? C’est leur droit !
M. Jean-René Cazeneuve.
Ça, c’est le premier point. Le groupe LFI-NUPES a fait travailler des dizaines de fonctionnaires, des centaines de députés, notamment dans les commissions, pendant des jours et des jours,…
Plusieurs députés du groupe RE.
Eh oui !
M. Jean-René Cazeneuve.
…sachant très bien qu’il serait impossible d’examiner la totalité des textes ! (M. Gilles Le Gendre applaudit. – Nouvelles protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Hier, les députés insoumis ont retiré deux de leurs propositions de loi. Pourquoi ? Je l’ignore ! Il faudrait leur demander !
Cet après-midi, alors que nous examinions la proposition de loi visant à abolir la corrida, un amendement a été déposé en dernière minute, à dix-sept heures, dans l’espoir que son adoption fasse tomber l’ensemble des amendements et des sous-amendements que nous, membres de la majorité, avions proposés, tout cela pour refuser le débat ! (MM. Éric Coquerel et Nicolas Sansu protestent.) Puis le texte a été retiré, au beau milieu de la discussion générale, quelques minutes avant la présentation d’un amendement de suppression qui aurait permis d’éclairer nos débats.
M. Nicolas Sansu.
Ce n’est pas un rappel au règlement !
M. Jean-René Cazeneuve.
Voilà les manœuvres qui sont à l’origine de la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
M. Alexis Corbière.
Mauvais perdant, Cazeneuve !
Mme la présidente.
La parole est à M. Max Mathiasin.
M. Max Mathiasin.
Monsieur Cazeneuve, vous vous posez la question de savoir pourquoi nous en sommes là, mais je veux vous rappeler pourquoi nous sommes là. Nous sommes là parce que d’illustres prédécesseurs ont payé de leur vie, de leur sang, de leur conscience, le prix de la liberté et de la démocratie, eux qui y croyaient tellement ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN et LFI-NUPES.) C’est pour cela que nous siégeons dans cet hémicycle. Et quel que soit notre groupe politique, nous sommes investis de la même autorité, celle qui est délivrée par le peuple français, dans l’Hexagone comme outre-mer ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN et LFI-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.) C’est cela, l’ensemble français !
Puisque le Parlement est investi de l’autorité de délibérer, alors délibérons ! Aucun ministre digne de ce nom ne devrait sortir de son lit pour se livrer à des manœuvres dilatoires dans le but de nous empêcher de délibérer. (Mmes et MM. les députés des groupes LIOT, RN, LFI-NUPES, LR et GDR se lèvent et applaudissent longuement.) La question de la réintégration des agents non vaccinés ne peut plus rester irrésolue. Aucun texte de la fonction publique ne prévoit qu’une suspension puisse être définitive. Alors, que faites-vous, monsieur le ministre ? La suspension de ces agents appelle une décision de votre part, que ce soit pour la fonction publique hospitalière, la fonction publique d’État ou la fonction publique territoriale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Dites-moi, monsieur le ministre, si cette suspension est la position de la fonction publique française tout entière ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN et LFI-NUPES. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Denis Masséglia.
M. Denis Masséglia.
Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 70, alinéa 2, du règlement. Aujourd’hui, l’Assemblée nationale a montré le meilleur et le pire d’elle-même. (Mme Véronique Riotton applaudit.) Le meilleur, avec l’adoption, grâce au soutien d’une très grande partie des groupes politiques, de la proposition de loi visant à inscrire le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution ; le pire, sur ce texte, avec la réaction choquante de quelques-uns de nos collègues, dont je demande à la conférence des présidents de se saisir.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Non !
M. Denis Masséglia.
En effet, une députée est venue à proximité de mon siège et m’a demandé de sortir de l’hémicycle pour que je m’explique avec elle. Je pense que ces procédés sont inacceptables. J’insiste, la conférence des présidents doit être saisie et sanctionner les députés concernés. (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et LR.) Je vous remercie par avance de relayer cette demande, madame la présidente. Il serait bon que nous retrouvions collectivement un peu de sérénité, d’autant que nous discutons d’un texte extrêmement important : avançons, de façon à pouvoir nous prononcer sur son sort avant la fin de la soirée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
Chers collègues, nous n’allons pas passer la soirée à faire des rappels au règlement. (M. Meyer Habib demande la parole.) Non, monsieur Habib, car ils ont tous le même objet. Je vous ai laissés vous exprimer mais les demandes répétées de rappel au règlement sont abusives et je ne suis pas tenue d’y faire droit.
J’avais déjà accepté deux demandes ; je donnerai ensuite la parole à Mme la rapporteure, qui la sollicite depuis une heure.
La parole est à M. Marcellin Nadeau.
M. Marcellin Nadeau.
Nous sommes scandalisés par la tournure des débats. M. le ministre n’a cessé de nous parler d’éthique, mais je le renvoie à celle du débat démocratique, qu’il ne respecte pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, RN, LFI-NUPES, LR, SOC, Écolo-NUPES et LIOT.)
Mme Michèle Peyron.
Il a parlé vingt minutes !
M. Marcellin Nadeau.
Députés desdits outre-mer, dont moi qui ai fait 8 000 kilomètres, nous ne sommes pas venus ici pour jouer. La santé de la population est en jeu (Mmes et MM. les députés des groupes GDR-NUPES, RN, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LIOT. – M. Yannick Favennec-Bécot applaudit également) , la vie de mères et de pères de famille est en jeu. C’est cela qui est sérieux. Nous voulons un vrai débat ! Quand on n’a pas l’humilité d’accepter le verdict du débat démocratique, on ne peut pas se réclamer de la démocratie. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, RN, LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES, LR et LIOT.)
Plusieurs députés des groupes RN et LFI-NUPES.
Bravo !
Mme la présidente.
La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.
M. Jean-Philippe Nilor.
Il se fonde sur l’article 100. Ce qui se passe ce soir est extraordinairement pitoyable.
Mme Marie Lebec.
Vous pouvez le dire !
M. Jean-Philippe Nilor.
S’il y en a un parmi nous qui est calme et posé, c’est bien le collègue Max Mathiasin ; s’il s’énerve, cela veut dire que les choses sont vraiment allées très loin. Ce qui se passe dans nos territoires, vous ne l’imaginez pas.
M. Tematai Le Gayic.
Venez habiter dans nos territoires, c’est insupportable !
M. Jean-Philippe Nilor.
Malgré le décalage horaire et la distance, des gens sont en train de suivre en direct cette séance de l’Assemblée nationale, parce que, jusqu’à ce soir, ils croyaient encore que la démocratie fonctionnait pleinement en France. Vous êtes en train de démontrer que l’on peut être minoritaire et empêcher le débat démocratique d’avoir lieu. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, RN, LR, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) On peut ne pas avoir d’états d’âme, mais lorsque nous vous parlons de souffrance, d’impossibilité d’accéder à l’hôpital, de morts – nos parents, nos frères, nos sœurs –, vous nous répondez… (Mme Véronique Riotton proteste vivement.) Ne me faites pas la leçon sur les vaccins, s’il vous plaît. (Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, RN, LR et GDR-NUPES, suscitant des exclamations en réponse sur les bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
Madame Riotton, n’interpellez pas M. Nilor. Chers collègues, seul M. Nilor a la parole.
M. Jean-Philippe Nilor.
Vous ajoutez de l’indécence à l’indécence ! Notre collègue, lorsque je parle de gens qui meurent,…
M. Laurent Croizier.
Si vous pensez aux gens qui meurent, retirez votre texte !
M. Jean-Philippe Nilor.
…est en train de me culpabiliser en disant : « C’est parce que vous n’êtes pas vaccinés chez vous. » Ça veut dire quoi ?
Mme Véronique Riotton.
Vous n’avez pas compris à quoi servaient les vaccins !
Mme Christine Le Nabour.
Vous avez tout fait pour qu’ils ne se fassent pas vacciner !
M. Jean-Philippe Nilor.
Connaissez-vous l’état des hôpitaux dans nos territoires ? Imaginez-vous à quel point l’hôpital public a été abandonné par l’État depuis des décennies ? (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, RN, LR, SOC, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT se lèvent et applaudissent.)
M. Rémy Rebeyrotte.
Antivax avec antivax…
Mme la présidente.
Monsieur Nilor, merci de conclure.
M. Jean-Philippe Nilor.
Je conclurai en disant qu’il n’est pas du tout étonnant que le parti Renaissance n’ait eu aucun élu dans les outre-mer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Vous êtes en train de démontrer que le peuple a eu raison de ne pas vous faire confiance… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Elie Califer, le groupe Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) ne s’étant pas encore exprimé.
M. Elie Califer.
Je n’ai pas besoin de vous dire que je parle sous le couvert de l’article 100, celui qui nous autorise à parler au sein du Parlement français.
Il y a manifestement un désir d’éviter le vote sur le texte, car celui-ci aurait recueilli une majorité. Après avoir fait 7 000 kilomètres pour porter la parole d’un peuple qui est un peuple français depuis bien longtemps, avant bien d’autres dans certains territoires, voilà ce qu’on nous offre comme récompense pour avoir servi cette nation pendant des décennies, pendant toutes les guerres où nous avons été présents pour défendre l’esprit de la République : aujourd’hui, la République nous empêche de nous exprimer et de porter la parole de notre peuple. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, RN, LFI-NUPES, LR, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT.)
Aucun ministre ne nous a répondu quand il n’y avait pas de respirateurs ni de masques pendant le covid-19 ; aucun ministre ne nous a indiqué ce qu’il fallait faire. Les soignants étaient en première ligne, ils étaient là lorsque nous avons eu 1000 morts ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, RN, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) C’est quand ils ont vu ce qu’était le vaccin qu’ils ont décidé de ne pas se faire vacciner,…
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Vous soutenez cela ?
M. Elie Califer.
…acceptant d’être suspendus. Suspendus, oui ! Mais quel est cet état de suspension qui dure à tout jamais ? C’est que vous vous êtes trompés : vous avez voulu dire, certainement, qu’il fallait les licencier. Alors, il faut le dire ! Il faut revoter la loi en remplaçant la suspension par le licenciement, sans quoi la Haute Autorité de santé (HAS) finira un jour par dire qu’il faut que les soignants suspendus reprennent le travail, et ce sera la même chose, monsieur le ministre : il y aura les suspendus, les vaccinés et les non-vaccinés.
La Coupe du monde se déroule ; les joueurs français sont partout ; il y a eu la Route du rhum…
Mme Marie Lebec.
Quel rapport ?
M. Elie Califer.
Le virus circule, et il n’est pas si virulent. L’Assemblée nationale doit accepter que même les députés ultramarins puissent s’exprimer. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et GDR-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RN, LR et Écolo-NUPES.)
Article 1er (suite)
Mme la présidente.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Il est presque vingt-trois heures dix et nous n’avons voté aucun amendement depuis la reprise de la séance. Tout s’est bien passé jusqu’à dix-neuf heures cinquante-huit, moment choisi par la minorité présidentielle – fort minoritaire comme l’a montré le vote de la fin d’après-midi – pour faire obstruction en déposant des sous-amendements à un amendement. Le député ne vient pas soutenir l’amendement ? Le Gouvernement en dépose un identique pour ouvrir l’examen de la kyrielle de sous-amendements et empêcher l’examen du texte d’aller à son terme.
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
C’est scandaleux !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Que les parlementaires décident de jouer l’obstruction, c’est le jeu de l’Assemblée nationale – même si, sur une niche, c’est difficile à accepter –, mais que le Gouvernement fasse le jeu de l’obstruction, c’est inadmissible ! (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, RN, LR, SOC, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT se lèvent et applaudissent. – M. Yannick Favennec-Bécot applaudit également.) Nous sommes à l’Assemblée nationale : ce sont les députés qui font la loi ! (Les applaudissements se prolongent.)
Monsieur le ministre de la santé et de la prévention, tout à l’heure, vous avez fait un très long discours dans lequel vous nous avez demandé qui avait été, comme vous, en première ligne. Je vais vous répondre : moi, j’y étais ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES ainsi que sur quelques bancs du groupe RN.)
M. Laurent Croizier.
Moi aussi, madame !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Et, puisque M. Véran est à côté de vous, je rappellerai que j’y étais sans masque, sans gants, sans blouse ! (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, RN, LR, SOC, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT se lèvent et applaudissent.)
Plusieurs députés du groupe RN.
Tout cela à cause de vous !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Je vous rappelle aussi que, quand le vaccin est arrivé, il fallait avoir plus de 50 ans pour y avoir droit ; que vous avez demandé à mes collègues de retourner travailler avec le covid alors qu’ici même, vous nous faisiez la leçon en disant : « Il faut que les soignants se vaccinent par altruisme », « Vous pensez bien, les pauvres patients… » On a entendu cela toute la journée. Mais pensez-vous au patient à qui l’on ne précise pas que le soignant qui arrive dans sa chambre est positif au covid et que c’est vous qui lui avez demandé d’être là ? (Mmes et MM. les députés des groupes RN, LFI-NUPES, LR, SOC et GDR-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.) Il n’y a pas d’altruisme à ce moment-là !
Tout à l’heure, le député Alauzet proposait de laisser les patients révoquer les soignants non vaccinés. Mais si, demain, vous leur dites qui est positif au covid malgré le vaccin, leur proposerez-vous aussi de révoquer ces soignants dont vous avez terriblement besoin ? Certainement pas.
M. Laurent Croizier.
Heureusement que vous n’étiez pas aux manettes !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Sept groupes soutiennent cette proposition de loi qui propose une sortie par le haut, au moment même où l’on ne cesse d’entendre parler de compromis. « Il faut discuter », « La France a voulu une nouvelle Assemblée nationale, nous allons tout faire pour travailler ensemble »…
M. Benjamin Haddad.
Nous venons de le faire sur l’IVG !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Cela pourra vous faire sourire ; toutefois, sachez que, telle le roseau, je plie mais ne romps pas. Il a été décidé en conférence des présidents que des textes transpartisans de l’opposition seraient examinés lors des semaines du Gouvernement. Sept groupes sur dix, c’est transpartisan. Vous n’êtes plus majoritaires ; nous ne lâcherons pas et nous demanderons que ce texte revienne. (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, RN, LR, SOC, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT se lèvent et applaudissent vivement. – M. Yannick Favennec-Bécot applaudit également.) Mme Bergé a retiré sa proposition de loi sur la constitutionnalisation de l’IVG qui devait être examinée lundi prochain, mais elle pourrait revenir. Nous sommes en majorité et nous serons là pour défendre ce texte s’il est inscrit à l’ordre du jour.
M. Laurent Croizier.
C’est une insulte à nos morts !
M. Rémy Rebeyrotte.
Nous serons là aussi !
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Pas de souci, monsieur Rebeyrotte.
Pour la bonne information de tous, je précise que, quand l’examen d’un texte est interrompu à minuit lors d’une niche parlementaire, le texte est considéré comme suspendu. Nous ne vous lâcherons pas ! (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
Résistance, résistance !
M. Sylvain Maillard.
On n’est pas à la fac !
Une députée du groupe RE.
Suspendez !
Mme la présidente.
Chers collègues, cela suffit. Nous ne sommes pas au cirque ! Un peu de tenue.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Avant que vous ne m’accusiez de faire de l’obstruction, je rappelle que je suis entré dans l’hémicycle il y a une heure et quart, que c’est ma première prise de parole et que, sur l’heure et quart qui s’est écoulée, il y a eu une heure de parole pour les oppositions, contre à peu près quinze minutes pour la majorité. Vous reconnaîtrez qu’en termes d’obstruction parlementaire, on a déjà vu plus efficace. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et LR.)
J’ai rejoint le ministre de la santé et de la prévention, François Braun, car je suis interpellé par cette question : l’obligation vaccinale des soignants mérite un débat, tout comme l’idée de la réintégration, un jour, du personnel sanitaire. Ce n’est pas un mauvais débat que pose le Parlement.
Mme Ségolène Amiot.
129 amendements identiques, ça ne vous dérange pas ?
Mme la présidente.
S’il vous plaît, chère collègue.
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Je vous suggère d’éviter de hurler et je ne hurlerai pas moi-même. Cela m’est arrivé dans le passé, quand j’avais 500 heures de débat derrière moi, mais, ce soir, j’arrive tout frais, tout neuf et très heureux de vous retrouver. Je serai donc d’un calme olympien. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et SOC.)
Je suis venu car j’ai participé à 500 heures de débat sur l’état d’urgence sanitaire et à quelques dizaines d’heures de débat sur l’obligation vaccinale ; de ce fait, on m’a vu comme une sorte de tablette de la République des débats législatifs sur le covid. Je voudrais donc rappeler quelques faits qui me semblent intéressants à l’heure où certains prennent position par leur vote. Le premier, c’est que, quand nous avons discuté de l’obligation vaccinale des soignants, vous étiez là, monsieur Marleix, et vous avez voté pour ; madame Bonnivard, vous avez également voté pour l’obligation ; monsieur Minot, aussi.
Plusieurs députés du groupe LR.
Cela n’a rien à voir !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Et, à l’issue d’un débat de grande tenue et dans la sérénité…
Mme Mathilde Panot.
Ce n’est pas le sujet !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Nous ne sommes pas au bureau politique de La France insoumise.
M. Alexis Corbière.
Provocateur !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Nous sommes au Parlement et vous serez obligée de m’écouter, même si cela ne vous fait pas plaisir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Cela s’appelle la démocratie, et je la chéris.
Mme Mathilde Panot.
Non, non !
Mme la présidente.
Madame la présidente Panot, s’il vous plaît ! (Brouhaha persistant.)
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Que le groupe Les Républicains…
Mme la présidente.
S’il vous plaît, monsieur le ministre. Madame Panot… (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous allez m’écouter deux minutes.
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Vous faites de l’obstruction comportementale ! (Mmes Mathilde Panot et Ségolène Amiot protestent vivement.)
Mme la présidente.
M. le ministre délégué répond ce qu’il a envie, madame Panot.
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Plus vous hurlez, moins on avance ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme la présidente.
Il n’y a pas de conversation avec le ministre délégué ! M. le ministre délégué a la parole, vous l’écoutez, comme nous avons écouté Mme la rapporteure !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
J’ai le temps et je suis calme.
M. Alexis Corbière.
Non, vous n’êtes pas calme !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
La très grande majorité du groupe Les Républicains a voté l’obligation vaccinale des soignants. J’avais remercié M. Ciotti, qui avait lui-même voté en faveur de la mesure.
Mme Anne-Laure Blin et M. Jean-Yves Bony.
Et alors ?
Plusieurs députés sur plusieurs bancs.
Il n’est pas là !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Il s’agit de ne pas réécrire complètement le passé. (Exclamations sur divers bancs.)
Nous avions également débattu avec les bancs de gauche de l’hémicycle, en particulier avec les députés du groupe Socialistes et apparentés – je vois M. Boris Vallaud et Mme Christine Pires Beaune, qui étaient là.
M. Maxime Minot.
Votre ancienne famille !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Les députés socialistes considéraient à l’époque que nous n’allions pas suffisamment loin dans l’obligation vaccinale en la limitant aux soignants – ce n’est pas faire injure que de le rappeler. (M. Boris Vallaud acquiesce.) Vous étiez favorables à étendre cette obligation à toute la population. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe HOR.)
M. Vincent Bru.
Absolument !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Je n’y étais pas favorable.
Nous avions examiné les dispositifs de contrôle, les amendes qu’il aurait fallu infliger aux Français qui n’auraient pas été vaccinés, notamment.
M. Alexis Corbière.
Vous disiez qu’il ne fallait pas mettre de masque !
Mme la présidente.
Chers collègues, s’il vous plaît, il ne sert à rien de hurler ! Le ministre va terminer son intervention. (M. Alexis Corbière proteste.) Monsieur Corbière, s’il vous plaît !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Vous hurlez tellement, monsieur Corbière, que vous aurez parlé la moitié du temps de mon intervention !
Mme la présidente.
Monsieur Corbière, je vais être obligée de prononcer un rappel à l’ordre !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Demandez la parole si vous voulez intervenir ! La démocratie ne consiste pas à hurler plus fort que les autres, mais à les écouter et à respecter leurs interventions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. Laurent Croizier applaudit également.)
M. Éric Coquerel.
La démocratie, c’est la majorité, et vous êtes minoritaires !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Les socialistes étaient donc favorables à la généralisation de l’obligation vaccinale. Vous avez le droit de changer d’avis. Si quelque chose change, mesdames et messieurs les membres des groupes Les Républicains et Socialistes et apparentés, c’est bien votre avis ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Protestations sur les bancs des groupes RN et LR.) La situation sanitaire, elle, n’a pas changé (Protestations sur les bancs du groupe LR) : nous connaissons une épidémie, le virus circule activement ; toutes les heures, des malades sont admis à l’hôpital ; tous les jours, des malades y meurent du covid. (Brouhaha.) Le vaccin non plus n’a pas changé, pas davantage que le virus. Vous avez changé d’avis, c’est votre droit, mais assumez-le.
M. Xavier Breton.
Les masques ne servent à rien, disiez-vous !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Je ne serai pas long, mais je serai plus rapide encore si je parviens à me concentrer !
Deuxièmement, la première fois que j’ai porté la blouse – comme François Braun et Caroline Fiat l’ont portée –, j’étais étudiant en médecine, j’arrivais à l’hôpital de Grenoble, très fier de la porter ; on m’a demandé un extrait de casier judiciaire pour vérifier qu’il était vierge parce que je voulais être fonctionnaire, ainsi qu’un certificat de vaccination attestant que j’étais bien vacciné contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, et l’hépatite B, conformément à l’obligation légale.
Mme Anne-Laure Blin et M. Yannick Neuder.
Ce n’est pas la même chose !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Vous avez raison, ce n’est pas la même chose ! La poliomyélite ne circule plus en France ! Déposez un sous-amendement ! Monsieur Neuder, déposez un sous-amendement visant à abroger la vaccination obligatoire contre le tétanos ou la poliomyélite !
M. Philippe Vigier.
Eh oui !
Mme Ségolène Amiot.
C’est totalement hors sujet !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Pourquoi le vaccin contre le covid et pas les autres ? Pourquoi les médecins, les infirmiers, les aides-soignants – tout le personnel hospitalier – devraient-ils être vaccinés contre l’hépatite B et pas contre le covid ? Soyez cohérents et proposez la suppression de toute obligation vaccinale pour les soignants !
M. Philippe Vigier.
Voilà, c’est ce que j’ai dit !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Mais vous rencontreriez sans doute quelques petits problèmes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Un député du groupe LR.
Caricatural !
M. Patrick Hetzel.
Vous êtes pathétique !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Ensuite, j’ai saisi plusieurs fois la HAS, et le ministre de la santé et de la prévention l’a également fait ; par ailleurs le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a rendu plusieurs avis. La majorité présidentielle et le Gouvernement n’ont pas décidé seuls : les autorités sanitaires et scientifiques indépendantes nous ont conseillés depuis le début de la crise pandémique. (Mme Ségolène Amiot et M. Hadrien Clouet protestent.)
Mme Sandra Regol.
On pourrait revenir au sujet ?
Mme Michèle Peyron.
C’est le sujet !
Mme Sandra Regol.
Ça fait dix minutes que vous racontez votre vie !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Je pourrais lire le dernier avis de la HAS, mais vous me reprocheriez d’être trop long. Je vous conseille néanmoins de le lire, car il est intéressant. Elle écrit noir sur blanc qu’il n’est pas éthique de proposer de réintégrer les soignants et qu’il n’est pas prudent que des malades fragiles, immunodéprimés, hospitalisés en cancérologie, en gériatrie ou en pédiatrie courent le risque d’être contaminés à l’hôpital par un virus hautement contagieux que leur transmettraient des soignants non vaccinés.
Il ne s’agit pas d’une décision politique, mais d’une décision sanitaire, humaine et éthique étayée – ne vous en déplaise. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Si la Haute Autorité de santé devait changer d’avis et proposer au ministre Braun de réintégrer les soignants, vous disposeriez d’arguments supplémentaires à avancer au Gouvernement en faveur de cette mesure. Nous n’en sommes pas là. Ni vous ni moi ne sommes des experts sanitaires et scientifiques de cette question ;…
M. Jocelyn Dessigny.
C’est inquiétant, si vous n’êtes pas un expert, monsieur le ministre délégué !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
…ceux-ci sont guidés par des arguments éthiques et non – pardonnez-moi le terme – politiques.
M. Frédéric Mathieu.
Si vous ne voulez pas prendre vos responsabilités, il ne faut pas vous présenter aux élections !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Enfin, je veux répondre à la contrevérité, formulée par Mme Fiat, que j’ai déjà entendue plusieurs fois. Non, les soignants positifs au covid qui ont pu être amenés à travailler n’ont pas exercé dans des services où étaient hospitalisés des malades fragiles, mais dans des services dédiés aux malades du covid. (Protestations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES.)
Mme Sandra Regol.
Ça suffit la provocation !
Mme Ségolène Amiot.
C’est faux, je peux vous en présenter ! C’est faux, et vous le savez !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Cessez de me hurler dessus, madame Amiot ! Demandez la parole à la présidente et prenez le micro ! (Mme Ségolène Amiot s’exclame.) Descendez ! Je vous le laisse volontiers, si la présidente est d’accord : vous hurlerez dans le micro, ça vous évitera de hurler dans les travées.
Je le répète, les soignants positifs au covid ont eu des dérogations uniquement pour travailler dans les services accueillant des patients déjà contaminés par le covid.
Encore une fois, le débat est légitime. Je m’étonne un peu du niveau de tension, tel que je n’en avais jamais vu en douze ans de Parlement. (Protestations sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et LR.)
Mme Sandra Regol.
C’est vous qui la provoquez !
M. Olivier Véran, ministre délégué.
Mesdames et messieurs les députés des oppositions, j’aurais aimé que vous mettiez la même énergie, le même enthousiasme et la même volonté de bien faire lorsqu’il fallait voter des mesures difficiles pour protéger les Français, telles que les couvre-feux, les confinements et le « quoi qu’il en coûte » ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – M. Vincent Thiébaut applaudit également.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Caroline Fiat, rapporteure.
Je demande une suspension de dix minutes.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt, est reprise à vingt-trois heures cinquante.)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
J’ai deux demandes de prise de parole : un rappel au règlement de Mme Panot, mais d’abord, une demande de suspension de séance de M. Chenu. (« Ah ! » sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Mes chers collègues, il est vingt-trois heures cinquante : si nous décidons de suspendre, je lève la séance !
M. Yannick Neuder.
Nous allons répondre, quand même !
M. Sébastien Chenu.
Je demande une suspension de cinq minutes ; elle est de droit.
Mme la présidente.
Vous savez que je peux suspendre pour trente secondes !
(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)
Rappel au règlement
Mme la présidente.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un rappel au règlement.
Mme Mathilde Panot.
Dans dix minutes, notre niche parlementaire prendra fin car les débats doivent se terminer à minuit.
Mme la présidente.
Sur quel article du règlement fondez-vous votre rappel, madame la présidente ?
Mme Mathilde Panot.
Sur l’article 100 relatif à la tenue des débats.
Nous avons commencé l’examen de ce texte à dix-huit heures ; il comptait alors vingt amendements. Nous en avons commencé l’examen à dix-huit heures, afin de respecter le travail parlementaire effectué ainsi que nos collègues ultramarins qui, pour beaucoup d’eux, sont venus spécialement pour débattre de ce sujet. Vous l’avez compris, il existe un enjeu propre aux personnels de santé suspendus dans les territoires d’outre-mer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et LIOT.)
Mme la présidente.
Madame la présidente Panot, ce n’est pas un rappel au règlement. (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme Mathilde Panot.
Si, c’est un rappel au règlement !
Mme Sandra Regol.
Il concerne la bonne tenue des débats.
Mme la présidente.
Mes chers collègues, combien avons-nous eu de rappels au règlement sur le même fondement ? Nous avons compris. Merci d’en venir à l’essentiel, madame Panot.
Mme Mathilde Panot.
J’y viens. Le Gouvernement vient de franchir une ligne rouge ! (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Quand le Gouvernement lui-même fait de l’obstruction sur un texte d’une niche parlementaire, il franchit une ligne rouge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe GDR-NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.)
M. Laurent Croizier.
Mais regardez-vous !
Mme Mathilde Panot.
Je le dis solennellement : ce qui est en train de se passer est grave ! Le Gouvernement supplante la souveraineté de l’Assemblée nationale et ses décisions.
Mme la présidente.
Merci, madame la présidente Panot.
Mme Mathilde Panot.
Juste avant la coupure de vingt heures… (La présidente coupe le micro de l’oratrice.)
Mme la présidente.
Nous avons bien compris, madame la présidente Panot, je vous remercie. M. le ministre de la santé et de la prévention avait demandé la parole. (Exclamations et vives protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Je vous rappelle les règles…
M. Perceval Gaillard.
On n’est pas à Versailles ici !
Mme la présidente.
Monsieur Bernalicis, qu’avez-vous à dire ?
M. Ugo Bernalicis.
Ce n’était pas moi, mais je le dis quand même : on n’est pas à Versailles !
Mme la présidente.
C’est sûr, nous ne sommes pas à Versailles, nous sommes au cirque ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Chers collègues, il reste sept minutes, voulez-vous une réponse ?
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
Non !
Article 1er (suite)
Mme la présidente.
M. le ministre de la santé et de la prévention avait demandé la parole avant les suspensions. (Mêmes mouvements.) La parole est à M. le ministre ; ceux qui ne veulent pas l’écouter peuvent sortir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
M. Ian Boucard.
C’est une honte !
M. François Braun, ministre.
Certaines choses ont été dites sur ce texte que je ne peux laisser passer. (Mmes et MM. les députés des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se lèvent et descendent dans les travées en protestant vivement.) Jamais vous ne me verrez manquer de respect envers les outre-mer. Je connais leur situation, j’y étais pendant la première vague de la crise sanitaire. (Mmes et MM. les députés des groupes RN et LR se lèvent, descendent dans les travées et quittent l’hémicycle en protestant vivement.)
M. Olivier Marleix.
C’est une honte !
Mme la présidente.
Ceux qui veulent sortir sont libres de le faire, mais en silence.
Mme Mathilde Panot.
C’est honteux !
M. François Braun, ministre.
J’étais sur place pour transférer des patients… (Mmes et MM. les députés des groupes RN, LFI-NUPES, LR, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se sont regroupés au bas des travées et continuent à protester vivement.)
Mme la présidente.
Que ceux qui veulent sortir le fassent, mais qu’ils aient un peu de respect pour ceux qui restent !
Mme Danièle Obono.
Quel respect ? Vous n’en avez aucun !
Mme la présidente.
Sortez maintenant, en silence !
Mme Mathilde Panot.
Respectez l’Assemblée nationale, madame la présidente ! Le Gouvernement fait de l’obstruction pendant une niche parlementaire, c’est honteux ! On n’a jamais vu ça !
Mme Sophia Chikirou.
Il est où, le respect ?
Mme Michèle Peyron.
Vous avez décidé de sortir, alors sortez !
Mme la présidente.
Pas d’invective dans l’hémicycle ! Madame Chikirou, merci de sortir ! (Les vives protestations de Mmes et MM. les députés des groupes RN, LFI-NUPES, LR, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se poursuivent.) Très bien, je lève la séance !
2 • Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente.
Prochaine séance, demain, à vingt et une heures trente :
Discussion et vote sur la motion de censure déposée en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution ;
Suite de la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra
Source : assemblee-nationale.fr
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20221124-compte-rendu-assemblee-nationale.html