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30 décembre 2023 6 30 /12 /décembre /2023 04:50

« À tout prendre, ce sont les vivants qui sont les plus forts. » (Fang Fang, 2016).




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La fin de l'année et, par conséquent, le début de l'année suivante sont certes des limites artificielles au temps, mais cela reste l'occasion de faire un petit bilan de l'année passée et de petites perspectives de l'année qui vient. Comme toujours, l'année 2023 a connu son lot de souffrances, de désastres, de malheurs et l'on espère que ceux-ci s'arrêteront en 2024.

L'année 2023 n'a pas forcément été mauvaise pour tout le monde. Il suffit par exemple de regarder l'évolution des entreprises du CAC40 dont les actions ont progressé de 16,5% en un an. On peut d'ailleurs espérer que l'année 2024 soit l'année de la fin de la crise économique consécutive à la fois à la crise sanitaire du covid-19 et à la crise énergétique provoquée par la tentative d'invasion de l'Ukraine par la Russie. L'inflation, qui est redescendue à 3,5%, devrait "se calmer" en 2024 et des perspectives plus optimistes sont envisageables d'un point de vue économique.

L'économie n'est rien sans l'humain. Et 2023, malheureusement, a continué 2022 en Ukraine. Un front qui varie peu, qui fait beaucoup de morts, des centaines de milliers, dans une guerre stupide entre Ukrainiens et Russes. Elle ressemble à la guerre des tranchées entre 1914 et 1916, dans les Ardennes et en Lorraine. Il n'est pas inutile de rappeler qu'aucune solution militaire ne pourra assurer une paix durable en Ukraine, car la rancœur et les ressentiments seront trop forts pour empêcher l'une ou l'autre des parties de prendre sa revanche. Seules des négociations seront prometteuses d'un avenir paisible, mais comment commencer des négociations quand les conditions de commencement sont impossibles à tenir ?


L'année 2023 a vu aussi un autre front. En fait, un conflit qui dure depuis soixante-quinze ans déjà et qui s'est rappelé par l'effroyable massacre du 7 octobre 2023 en Israël par les terroristes du Hamas. Les conséquences humaines de la réponse de l'État d'Israël sur Gaza, aussi effroyable soit-elle, sont aussi de la responsabilité du Hamas dont l'élimination devient une condition nécessaire à la survie d'Israël. Pour cette région du monde aussi, appeler aux négociations est une évidence pour une paix durable, mais le gouvernement israélien, soutenu largement par le peuple israélien (il faut le souligner), considère qu'il n'y aura pas de paix durable sans maintenir dans l'urgence les conditions d'existence de l'État d'Israël.

Sur le plan international, quelques élections à venir en 2024 vont avoir un retentissement très grand. La première est la désignation du prochain Président des États-Unis le 5 novembre 2024, dans un pays qui reste quand même la première puissance économique du monde et qui reste au sommet de l'innovation technologique (l'attribution des Prix Nobel scientifiques le rappelle), avec le choix improbable entre un Président sortant, vieillard de 81 ans, Joe Biden et un ancien Président, repris de justice, Donald Trump, également vieillard (Trump a l'âge de Biden en 2020), qui, en plus, est inéligible dans déjà deux États.

Une autre élection est importante mais sans réel suspense ni enjeu, l'élection présidentielle en Russie et la réélection de Vladimir Poutine pour un cinquième mandat (2000-2004, 2004-2008, 2012-2018, 2018-2024, 2024-2030 ?) est tellement anticipée qu'aucun second tour n'est prévu pour l'instant (il est également un vieillard ; à la fin de ce nouveau mandat, Poutine aura l'âge de Biden en 2020).

En revanche, le pouvoir du Président chinois Xi Jinping est assuré en 2024 puisqu'il a été réélu à la tête du parti communiste et de l'État en 2022 et 2023. Idem pour Erdogan en Turquie. De même, Emmanuel Macron et la plupart des dirigeants européens (Italie, Espagne, Grèce, Pologne, Hongrie, etc.) n'ont pas à renouveler leurs instances nationales. Seuls l'Allemagne et le Royaume-Uni sont dans l'expectative dans la mesure où leurs chefs du gouvernement respectifs n'ont pas forcément une durée pérenne (la coalition allemande pourrait éclater). Reste l'inconnu européen (voir plus loin) et l'inconnu néerlandais où la victoire relative de Geert Wilders aura du mal à se traduire par un gouvernement ouvertement nationaliste.

En Argentine, où une grève générale est attendue le 24 janvier 2024, l'évolution de la vie politique sera scrutée avec attention après l'élection de Javier Milei dans un combat étrange mais redoutable entre un ultralibéralisme inquiétant et un collectivisme social qui a fait faillite.

En France, quoi qu'on en dise, Emmanuel Macron a réussi son année 2023 en parvenant à faire adopter deux lois très déterminantes pour son deuxième quinquennat, la réforme des retraites (certaines personnes commencent à s'apercevoir qu'elles vont en bénéficier, celles qui ont commencé très tôt leur vie active et qui peuvent désormais prendre leur retraite plus tôt que prévu), et, en fin d'année, la loi Immigration dont on attend encore l'avis du Conseil Constitutionnel sur certaines dispositions et dont le vote par le groupe RN modifiera profondément la situation politique (à mon avis). Les jeux olympiques d'été qui commenceront le 26 juillet 2024 seront un grand rendez-vous national et parisien, ainsi que l'inauguration de la nouvelle Notre-Dame de Paris en décembre 2024 (le pape François y est invité).

En 2024, la perspective politique se focalise sur les élections européennes, véritables élections intermédiaires en France (entre deux élections présidentielles) où chaque force politique peut librement évaluer son audience électorale dans un scrutin proportionnel national.


Malheureusement, dans ces élections, les enjeux nationaux l'emporteront sur les enjeux européens. Chaque grand parti (ou parti désirant le redevenir) souhaite préparer l'élection présidentielle en optimisant son score des européennes. Bien évidemment, le RN, en tête des sondages, veut montrer qu'il serait l'alternance crédible en 2027 ; mais les partis de la majorité vont devoir aussi faire campagne efficacement s'ils veulent pouvoir gouverner avec un minimum de légitimité (on se souvient que François Mitterrand a eu du mal à gouverner en ne représentant plus que 20% des électeurs entre 1984 et 1986, après les élections européennes de juin 1984). Pour LR, ce scrutin est également crucial car il va déterminer la crédibilité du futur candidat LR à l'élection présidentielle de 2027 (je vois néanmoins l'avenir de LR très sombre). FI aussi aura à éviter l'effondrement électoral de 2019 et montrer que ce parti revendicatif est bien connecté avec le peuple, condition pour ce parti de rester le seul parti valable à gauche, la gauche aboyante (ou aboyeuse).

Les enjeux européens sont pourtant bien plus importants que les enjeux nationaux. L'Europe de 2024 va devoir faire l'apprentissage de la solitude et de l'autonomie, celle en particulier de l'aide militaire à l'Ukraine en raison d'un désengagement des États-Unis (également possible en cas de victoire des démocrates à la Maison-Blanche). Une relance de l'esprit européen est donc nécessaire avec une véritable défense européenne qui s'autosuffit (ce qui n'est pas le cas actuellement) tant sur le plan militaire que sur l'armement. Elle devra faire preuve aussi d'un degré d'initiative diplomatique sans précédent, en particulier en préparant la proposition d'un véritable plan de paix pour le Proche-Orient.


La personnalité du prochain Président de la Commission Européenne sera donc déterminante et dépendra évidemment des rapports de forces au sein du nouveau Parlement Européen. C'est donc un vœu cher que je formule pour le premier semestre de 2024, celui qu'une véritable campagne européenne, sur des enjeux européens, soit amorcée par une classe politique française un peu trop égocentrée.

Mais l'essentiel, comme l'a fait dire par l'un de ses personnages la romancière chinoise Fang Fang dans son récit (assez glauque) des "Funérailles molles" (que je recommande à tous les curieux de la Chine communiste), c'est d'être vivant et bien vivant, et la première condition, c'est d'avoir la santé. C'est pourquoi je souhaite à tous les internautes d'avoir la meilleure santé possible pour 2024, car l'argent, le pouvoir et le succès sont bien sympathiques, mais ne guérissent jamais des maladies, juste peut-être l'amour...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (30 décembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


(Illustrations trouvées sur Internet).


Pour aller plus loin :
2024.
2023.
2022.
2021.
2020.
2019.
2018.
2017.
2016.
2015.
2014.
2012.
2010.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240101-nouvel-an.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/bonne-sante-pour-2024-252297

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/12/29/40158027.html









 

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20 décembre 2023 3 20 /12 /décembre /2023 04:55

« Ce projet de loi rendra notre système plus efficace, parce qu’il simplifiera drastiquement nos procédures et réduira les délais de traitement des demandes d’asile, parce qu’il permettra d’expulser plus rapidement les étrangers délinquants ou radicalisés, parce qu’il donnera des moyens accrus pour lutter contre l’immigration illégale, parce qu’il comporte des mesures spécifiques pour les outre-mer, adaptées à chaque territoire. Ce n’est pas tout : ce projet de loi rendra notre système plus juste, parce qu’il interdit le placement des mineurs en rétention administrative, parce qu’il renforce les sanctions contre les passeurs, parce qu’il fait pleinement du travail un levier d’intégration, notamment dans les filières en tension. » (Élisabeth Borne, le 19 décembre 2023 dans l'hémicycle).




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Le projet de loi Immigration défendu par Gérald Darmanin a été définitivement adopté par le Parlement ce mardi 19 décembre 2023 dans la soirée, en particulier, à l'Assemblée Nationale vers 23 heures 30 par 349 voix pour, 186 voix contre et 38 abstentions. Avant d'analyser en détail ce scrutin, revenons à ces deux derniers jours plein de suspense dramatique.

L'adoption surprise d'une motion de rejet préalable le 11 décembre 2023 par l'Assemblée Nationale a empêché les députés de débattre réellement du sujet, de cette loi Immigration, et les a empêchés de voter ou rejeter plus de 2 600 amendements. Si la gauche avait déposé cette motion de rejet, elle ne comptait pas la faire adopter grâce aux voix cumulées du RN et d'une partie (majoritaire) de LR. Résultat : la gauche, au lieu d'avoir à débattre d'un texte amendé par la commission des lois (dont le président Sacha Houlié, macroniste de gauche, a refusé de voter pour le texte final), a dû se contenter d'un texte bien plus dur issu de la commission mixte paritaire.

Si le 11 décembre 2023 au soir, Gérald Darmanin n'en menait pas large, et a même présenté sa démission, ce 19 décembre 2023 au soir, contrairement à ce que disent les médias en général, c'est la grande victoire du Ministre de l'Intérieur et des Outre-mer. La chronologie récente est la suivante : pendant plusieurs jours, Élisabeth Borne a repris l'initiative pour négocier à Matignon avec la majorité et les parlementaires LR. Il est clair que LR, malgré leur faible représentation à l'Assemblée (10,7% des sièges), étaient dans cette histoires les maîtres des élégances. De manière ordinaire, les tractations au sein de la commission mixte paritaire sont confidentielles. Ici, non seulement tout était au grand jour, mais cela se passait à Matignon, ce qui était une première !

Lorsque la commission mixte paritaire (dont j'ai rappelé précédemment la composition) s'est réunie à partir de 17 heures le lundi 18 décembre 2023, c'était quand même très mal parti car dès les premières minutes, elle a été suspendue à la demande de LR. Elle a repris à 21 heures (après la prolongation de la suspension), et il a fallu attendre le début d'après-midi du lendemain pour aboutir à un accord. Contrairement aux prévisions les plus pessimistes, la commission mixte paritaire a été conclusive.

Parlons rapidement du fond. L'immigration. Une énième loi sur l'immigration. L'immigration qui serait la cause de tous nos malheurs, le chômage, l'insécurité, le terrorisme, l'inflation, et même les bouleversements climatiques, pourquoi pas ? Cela fait plus de quarante ans que l'immigration est le thème populiste par excellence, le fonds de commerce de l'extrême droite, le chiffon rouge pour rameuter le peuple. La peur de l'autre, la perte de références, la crise identitaire, le repli sur soi ont toujours accompagné les crises, ce n'est pas nouveau. Mais l'essentiel, ce n'est pas l'Assemblée, c'est que le peuple est à plus de 70% favorable à un durcissement des conditions d'immigration. C'est ce point crucial qui vaut cette loi, transformée ainsi.

Elle a deux jambes, mais la jambe droite est manifestement plus grande que la gauche. La gauche : l'interdiction de mettre des mineurs dans les centres de rétention, la régularisation des travailleurs clandestins qui sont déjà intégrés dans la vie sociale, la non-suppression de l'aide médicale d'État. La droite : le point le plus notable est la préférence nationale pour les allocations familiales et l'APL concernant même les personnes immigrées légalement (par exemple les étudiants).

Pendant toute l'après-midi, l'incertitude demeurait car beaucoup de députés de la majorité hésitaient à voter ce texte considéré comme droitisé. En revanche, véritable coup politique, Marine Le Pen a annoncé que le Rassemblement national voterait le texte car, selon elle, il consacrerait la victoire idéologique de ses idées. Je reviendrai sur cette position qui pourrait étonner puisque le texte de la CMP (commission mixte paritaire) est moins dur que celui du Sénat, alors que les deux sénateurs RN avaient rejeté le texte du Sénat parce que trop mou. Il faudra aussi que Marine Le Pen explique à ses électeurs pourquoi elle aura voté pour un texte qui va régulariser environ 10 000 sans-papiers par an. Le RN n'est pas à une contradiction près, lui qui avait voté pour la motion de rejet préalable pour empêcher tout débat dans l'hémicycle.

De l'autre côté de l'échiquier, la gauche et l'extrême gauche ont profité du coup politique du RN pour faire des leçons de morale à la majorité présidentielle et dire que le texte de la CMP serait d'inspiration d'extrême droite. Le problème, c'est que les socialistes sont peu habilités à faire des leçons de morale alors leur dernier dirigeant, François Hollande, avait proposé en décembre 2015 la déchéance de nationalité qui avait scandalisé jusque dans les rangs de la droite !

La soirée du 19 décembre 2023 s'est finalement déroulée sans surprise. Une motion de rejet préalable déposée par Mathilde Panot (FI) a été rapidement rejetée par 384 voix défavorables contre 155 voix favorables (et 2 abstentions). Plus intéressante est l'analyse du scrutin pour le vote solennel de la loi Immigration (scrutin n°3213) car l'inconnue résidait dans l'importance des députés de la majorité hostiles au texte.

Par exemple, Stella Dupont avait annoncé son vote défavorable car la différenciation entre étudiants français et étudiants étrangers pour l'APL, par exemple, était sa ligne rouge. Du reste, elle n'a pas tort et probablement que le Conseil Constitutionnel invalidera la mesure (ce qui ferait que tout ce débat ne serait qu'un vaste théâtre d'ombres et de postures). La députée MoDem Aude Luquet avait aussi songé voter défavorablement mais finalement, elle s'est abstenue.

Derrière le risque de l'implosion de la majorité (peu probable malgré la singularité de ce texte), c'est aussi la bataille des voix qui compte en politique : pour qu'il y ait victoire politique de la majorité, il fallait que les seules voix de la majorité et de LR (et alliés) suffisent à faire adopter ce projet de loi. À la fin de la soirée, la victoire est réelle (mais en demi-teinte) et Gérald Darmanin a pu ainsi parader, très humblement, mais il ne pouvait cacher sa joie d'avoir finalement réussi, contre toute attente, d'avoir atteint son objectif de faire adopter la loi Immigration sans article 49 alinéa 3.

L'analyse du scrutin est très intéressante à faire. Tous les groupes hors de la majorité sont très clivés : le RN a voté pour le texte par 88 députés sur 88, LR aussi par 62 députés sur 62. Quant à la gauche et extrême gauche, on ne relève qu'une seule défection d'un député communiste. Tous les autres ont voté contre le projet de loi : 75 députés FI sur 75, 31 députés PS sur 31, 23 députés EELV sur 23 et 21 députés PCF sur 22.

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En revanche, c'est beaucoup plus contrastés pour les 4 députés non-inscrits (Emmanuel Ménard a voté pour, Nicolas Dupont-Aignan s'est abstenu), et pour les 21 députés centristes de LIOT qui avaient soutenu le gouvernement le 11 décembre 2023 (8 pour, dont Olivier Serva, Jean-Luc Warsmann et Pierre Morel-À-L'Huissier ; 8 contre, dont Charles de Courson et Bertrand Pancher ; 5 abstentions).

Enfin, les groupes de la majorité, s'ils sont très majoritairement en faveur du texte, ont eu beaucoup de défections. Seulement 131 députés Renaissance (sur 170) ont voté pour le texte (Yaël Braun-Pivet, en qualité de Présidente de l'Assemblée Nationale, n'a pas pris part au vote). 20 députés Renaissance ont voté contre (dont Sacha Houlié, Gilles Le Gendre, Stéphane Travert et Stella Dupont), et 17 députés Renaissance se sont abstenus (dont Joël Giraud et Laurence Maillart-Méhaignerie). Seulement 30 députés MoDem (sur 51) ont voté pour le texte, mais seulement 5 députés MoDem ont voté contre (dont Erwan Balanant et Maud Gatel), et 15 députés MoDem se sont abstenus (dont Jean-Louis Bourlanges, Aude Luquet, Jean-Paul Mattei, Perrine Goulet et Olivier Falorni). Enfin, le groupe Horizons est presque homogène avec 28 députés sur 30 qui ont voté pour (seulement 2 députés Horizons ont voté contre).

Le texte de la loi Immigration a recueilli 349 voix pour une majorité absolue de 268. En retirant les 88 voix du RN, cela aurait donné 261 voix, ce qui fait qu'il aurait manqué 7 voix pour maintenir la majorité sans le RN. Rappelons que dans ce scrutin, il y a eu 573 votes sur 577 au total (dont la Présidente), soit seulement 3 députés (hors Présidente) qui n'ont pas pris part au vote, ce qui est très rare dans les scrutins.

Le Président de la République Emmanuel Macron va-t-il alors demander un nouveau vote comme l'y autorise l'article 10 de la Constitution : « Le Président de la République promulgue les lois dans les quinze jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. Il peut, avant l'expiration de ce délai, demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles. Cette nouvelle délibération ne peut être refusée. » ?

Je peux bien sûr comprendre les scrupules de certains députés de la majorité et leur volonté de rester sincères avec leurs convictions en votant contre le texte, ce qui est tout à leur honneur. Pourtant, en votant contre le texte, ils ont fait le jeu du RN qui voulait justement se rendre indispensable dans l'adoption du texte (ce qu'il est à 7 voix près). Leur abstention aurait été bien plus pertinente, à la fois pour marquer leur opposition à la version définitive du texte, mais aussi pour empêcher le RN d'obtenir une mini-victoire parlementaire.

Je reviens sur le coup politique du RN. En décidant l'adoption du texte, Marine Le Pen pense faire un coup politique à plusieurs ressorts. À mon avis, elle a fait de la politique politicienne de court terme et ce coup pourrait lui nuire à long terme. Je m'explique. Normalement, l'adoption du texte aurait dû profiter politiquement à LR (Éric Ciotti et Olivier Marleix ont paradé toute l'après-midi). En faisant ce coup, le RN a réduit la part de profit pour LR à son avantage avec l'idée qu'il valait mieux s'adresser à l'original qu'à la copie. Mais sur le long terme, le RN s'est mis en position de cogérant de l'immigration et s'interdit ainsi toute surenchère sur l'immigration dans les prochaines années.

Concrètement, personne ne doute que cette loi changerait peu la situation, mais elle est une posture importante, cette idée que le gouvernement souhaite montrer de la fermeté. La préférence nationale concernerait très peu de personnes, et cette disposition pourrait faire l'objet d'une invalidation du Conseil Constitutionnel (s'il était saisi). En clair, cette loi, purement politique, parce qu'il y a une urgence face aux attentes populaires sur ce sujet, a quelques chances de lever l'hypothèque de l'immigration pour l'élection présidentielle de 2027. Et pour cela, c'est très positif et utile car l'atmosphère politique en sera d'autant plus respirable.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (19 décembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Commission mixte paritaire et adoption de la loi Immigration.
Article 49 alinéa 3 et projet de loi Immigration.
Motion de rejet préalable et projet de loi Immigration.

Loi Immigration : le risque du couperet...
Des bleus à l'A.M.E. (aide médicale d'État) : entre posture et protection.
L'affaire Leonarda, dix ans plus tard...
La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
Aymen Latrous Aymen Latrous n’est pas Leonarda !
Mamoudou Gassama, un héros en France.
Leonarda sous le feu des projecteurs.
L’immigration irlandaise.
Immigration : l'occasion ratée de François Hollande.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231219-loi-immigration.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/commission-mixte-paritaire-et-252108

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/12/19/40148985.html





 

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11 décembre 2023 1 11 /12 /décembre /2023 18:32

« Débattre et légiférer sur l’intégration et l’immigration, c’est répondre à la demande forte, légitime et répétée de nos concitoyens. Quoi qu’en pensent les Français, nous savons tous que la maîtrise des flux migratoires, la difficulté de lutter contre l’immigration irrégulière, l’accroissement des moyens donnés aux préfets, aux agents des préfectures, aux magistrats et aux forces de l’ordre, sont autant de sujets qui alimentent un débat essentiel et nécessaire, que personne ne peut raisonnablement rejeter d’un revers de la main sans que l’Assemblée Nationale n’ait pu en discuter au moins quelques instants. » (Gérald Darmanin, le 11 décembre 2023 dans l'hémicycle).





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Coup de théâtre ce lundi 11 décembre 2023 peu avant 18 heures dans l'hémicycle : la motion de rejet préalable déposée par le groupe écologiste pour rejeter le projet de loi sur l'immigration défendu par le Ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a été adoptée avec 270 voix pour et 265 voix contre, et 13 abstentions volontaires sur 548 votants. 29 députés n'ont pas pris part au vote, pour une raison ou une autre, parfois pas politique (santé, éloignement géographique, etc.).

Le projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, que je nommerai simplement le projet de loi Immigration, a été déposé par le gouvernement le 1er février 2023 sur le bureau du Sénat en première lecture. Ce texte a été adopté par les sénateurs le 14 novembre 2023 par 210 voix pour et 115 voix contre, avec 341 votants, après un profond remaniement du projet par le groupe LR du Sénat (en particulier, avec la suppression de l'aide médicale d'État).

Le projet de loi Immigration a été examiné ensuite par la commission des lois de l'Assemblée Nationale le 2 décembre 2023, avec la suppression des principales modifications sénatoriales (retour de l'A.M.E. dont la suppression était considérée comme un "cavalier" législatif qui aurait été invalidé par le Conseil Constitutionnel). La séance du 11 décembre 2023 correspondait donc au premier jour d'examen de ce projet dans l'hémicycle. 2 621 amendements avaient été déposés pour l'occasion, aucun ne sera donc examiné puisque la motion de rejet préalable a été adoptée.


Dans l'analyse détaillée des votes de la motion de rejet préalable, on peut certes remarquer qu'il a manqué à l'appel 5 députés Renaissance qui étaient absents du vote, dont un atteint d'une maladie qui n'a pas eu le temps de donner sa délégation de vote, deux retenus dans leur circonscription lointaine de Français de l'étranger, mais il y a eu aussi 3 députés MoDem et 1 député Horizons absents. Or, ces 8 députés de la majorité ont fait défaut pour un vote qui s'est partagé avec 5 voix de retard. Le présence aurait donc pu éviter le camouflet infligé au gouvernement par ce vote.

Néanmoins, cette analyse assez grossière du scrutin (l'absence de ces députés n'ayant pas de signification politique particulière et n'étant pas de nature à amorcer une sorte de fronde comme du temps de François Hollande) ne tient pas (avec des si, on peut mettre Paris dans une bouteille) dès lors qu'on peut aussi constater l'absence du scrutin de 10 députés des oppositions populistes (1 RN, 3 PS, 1 EELV, 5 PCF). Si ceux-ci avaient été présents, ils auraient compensé les éventuels votes des députés absents de la majorité.

Donc, le problème pour la majorité reste le même. Ce qui a fait défaut, c'est l'adhésion (au mieux) ou l'indulgence (au pire) des députés LR qui ont été divisés mais en penchant du mauvais côté pour le gouvernement : 40 pour la motion de rejet, 2 contre la motion, 11 absentions et 9 absences du vote. Le groupe LR est encore plus opposé au gouvernement sur ce thème de l'immigration que sur le thème des retraites.


Insistons sur le suicide politique de ce qui fut un grand parti de gouvernement, Les Républicains, dans ce vote avec les oppositions populistes. En voulant absolument faire de l'immigration le thème majeur de campagne de LR pour sa renaissance à l'élection présidentielle de 2027, Éric Ciotti (le président de LR) et Olivier Marleix (le président du groupe LR à l'Assemblée au look juppéen) ne comprennent pas que c'est contre-productif : chaque fois que ce thème est saisi, c'est le ou la candidate du RN qui en bénéficiera électoralement et pas le candidat LR (avec cette petite musique que les électeurs préfèrent l'original à la copie). Si LR veut renaître, il lui faut retrouver un thème de campagne spécifique, original, pertinent, qui ne se confond pas avec d'autres partis. Or, depuis la campagne de François Fillon en 2017, il n'y a plus d'idée novatrice à LR.

Le fait de ne pas avoir réussi à convaincre le groupe LR est un grand échec de Gérald Darmanin dont l'origine politique (il était un député LR) pouvait être un atout mais s'est révélée comme un handicap, ses anciens camarades LR voulant lui faire payer ce qu'ils considèrent comme une trahison, son ralliement au Président Emmanuel Macron. Vis-à-vis du Président de la République, il a perdu en crédibilité politique sur la capacité à obtenir une majorité sur ce sujet, comme sa rivale, la Première Ministre Élisabeth Borne n'avait pas réussi à réunir une majorité sur la réforme des retraites au printemps dernier.

Avant de parler des oppositions populistes, évoquons le groupe LIOT qui est un groupe composé de centristes traditionnels et d'élus des Outre-mer, un groupe particulièrement combatif contre le gouvernement à l'époque de la réforme des retraites mais qui, aujourd'hui, a soutenu stoïquement le gouvernement sur l'immigration pour refuser le rejet préalable d'un texte qu'il a jugé équilibré. En effet, 19 députés LIOT ont voté contre la motion (et Charles de Courson s'est abstenu). Emmanuel Ménart, proche du RN mais députée non-inscrite, s'est elle aussi abstenue alors qu'on aurait pu penser qu'elle aurait voté pour la motion de rejet. Et je termine les curiosités individuelles par Delphine Batho, députée EELV (ex-PS), qui a voté contre la motion de rejet.

Au fait, qu'est-ce qu'une motion de rejet préalable ? C'est une refus de débattre. Dans la boîte à outils parlementaire, les députés qui s'opposent à un texte peuvent employer toute sorte de procédure : le vote contre à chaque article et au vote final, mais aussi la motion référendaire (renvoi au référendum du texte) ou encore la motion de rejet préalable qui clôt l'examen en séance publique avant même sa discussion. Cette motion de rejet n'est pas moins démocratique que d'autres outils, ceux-ci constitutionnels, que le gouvernement peut manier, comme l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, mais toutefois, elle signifie un réel refus de débattre du sujet au cœur de la démocratie parlementaire.

Et c'est là la contradiction parmi les rangs de la droite et de l'extrême droite qui ont voté cette motion de rejet (à savoir RN et LR) : ceux-là ont fait de l'immigration leur thème de prédilection, leur fonds de commerce électoral récurrent, insistent pour prendre en compte ces considérations au risque de se tromper de sujet sur les enjeux réels qui attendent la France (l'immigré n'étant qu'un bouc émissaire à droite qui a une fonction électorale identique au riche à gauche). C'est donc curieux que ces députés, qui avaient justement l'occasion de débattre publiquement pendant trois semaines dans l'hémicycle de l'immigration, aient refusé une telle discussion (ce qui contredit le dépôt de milliers d'amendements).


Précisons que le gouvernement ne pouvait pas utiliser l'article 49 alinéa 3 parce qu'il n'a pas eu le temps. Il faut en effet la déclaration générale pour l'utiliser, mais la motion de rejet préalable a été déposée auparavant.

Du côté de l'autre opposition populiste, celle de la Nupès, le discours des socialistes est au moins cohérent : ils ne veulent pas débattre de ce thème populiste qui atteindrait les limites de ce qui leur est acceptable sur le plan républicain. Leur refus de débattre est donc très clair et confirmé. Il faut souligner cependant que ces députés de gauche ne sont pas du tout gênés de mêler leurs voix à celles du RN pour ce sujet sensible alors que leur vote identique est motivé par une raison diamétralement opposée. D'autant plus qu'il s'agit d'une basse manœuvre politique contre le gouvernement.

C'est d'ailleurs cette conjonction des oppositions populistes qui montrent que le texte présenté au vote est un texte équilibré, faisant la part autant à la limitation de l'immigration qu'à l'amélioration de l'intégration.

Le vote de la motion de rejet est donc à la fois une surprise (la conjonction des oppositions populistes peut devenir arithmétiquement majoritaire) et un véritable échec politique du gouvernement. Il peut préfigurer une crise politique importante car toute motion de censure déposée sur ce thème de l'immigration pourrait donc être adoptée avec ce même rapport de force très serré (renversant pour le coup le gouvernement). Présenter un tel texte dans une telle Assemblée était peut-être kamikaze.

Que va-t-il se passer maintenant ? La loi Immigration était le second texte majeur du second quinquennat d'Emmanuel Macron. Il est peu probable que le gouvernement le retire purement et simplement. Ce vote de la motion de rejet, aussi dur soit-il pour le gouvernement, restera surtout un incident de parcours plus qu'une interruption définitive. Le gouvernement devrait le redéposer au Sénat pour une seconde lecture, avec passage en commission mixte paritaire (puisque c'est en procédure accélérée). Les députés de gauche auront perdu par rapport à leurs convictions puisque le texte présenté le 11 décembre 2023 à l'Assemblée a été "gauchisé" par la commission des lois par rapport au texte voté au Sénat.

L'autre solution serait plus habile mais plus cynique : le "en même temps" n'ayant pas tenu en un seul texte, le gouvernement pourrait déposer deux textes. Un premier texte sur l'immigration qui serait LR-compatible, et un second texte sur l'intégration qui serait PS-compatible.

À ce jour, la démonstration reste faite que l'Assemblée, sans majorité absolue, est incapable de construire un texte dans l'intérêt général et sans arrière-pensée politicienne sur des questions électoralement ultrasensibles que sont, entre autres, les retraites et l'immigration. Cela justifie a posteriori tous les outils constitutionnels mis à disposition du gouvernement par les constituants de 1958 pour gouverner efficacement malgré l'absence de majorité d'idée. Par ailleurs, la Nupès a démontré une nouvelle fois (mais on le savait déjà) que ses partis la composant vaguement ne sont plus des partis de gouvernement et n'ont que des postures électoralistes. Quant à LR, seulement 2 députés, qui ont voté contre la motion de rejet (sur 62), pensent que c'est encore un parti de gouvernement...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (11 décembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Loi Immigration : le risque du couperet...
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L'affaire Leonarda, dix ans plus tard...
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L’immigration irlandaise.
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7 décembre 2023 4 07 /12 /décembre /2023 04:54

« Elle songea qu'ils se trompaient probablement tous les uns les autres et qu'ils vivaient dans une illusion. » (Marie Vareille, "Ma vie, mon ex et autres calamités", éd. Charleston, 2019).





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Bien que déposée par le groupe écologiste de l'Assemblée Nationale, l'adoption surprise de la motion de rejet préalable contre le projet de loi Immigration le lundi 11 décembre 2023 a été une grande victoire du Rassemblement national et de sa stratégie pour arriver au pouvoir.

Car il ne faut pas douter d'une chose, et le thème de l'immigration est très clivant sur ce point-là : la France est divisée en deux, et ces deux parties, ces deux camps, quoi qu'en disent les leaderaillons de la Nupès, c'est la majorité présidentielle (Renaissance et alliés) et le RN, à l'exclusion de la gauche nupésienne qui ne reste que périphérique et revendicative.

Bien involontairement, mais de manière complètement prévisible, la gauche a donné au RN une victoire incroyable qui pourrait déboucher sur une crise politique voire des élections législatives anticipées. Pour l'heure, Gérald Darmanin, qui a proposé sa démission au Président Emmanuel Macron qui l'a refusée, a été reconfirmé comme poids lourd de la majorité présidentielle. Son objectif reste le même qu'avant le rejet de son texte qu'il ne considère que comme un incident de parcours. Il souhaite faire adopter la loi Immigration sans utiliser l'article 49 alinéa 3 de la Constitution. Le gouvernement aurait intérêt d'ailleurs à ne pas l'utiliser, car sur ce sujet très sensible qui est propice à toutes les postures électoralistes, l'hypothèse qu'une motion de censure soit adoptée est devenue très probable.

Certains observateurs imaginent une stratégie machiavélique d'Emmanuel Macron : ce dernier serait susceptible de provoquer une dissolution de l'Assemblée Nationale pour en finir avec tant d'impuissance dans l'hémicycle et de s'accommoder de la perspective d'une éventuelle victoire du RN aux élections législatives qui en suivraient. Les sondeurs le disent et le répètent, le RN pourrait gagner ces élections législatives.

Certes, certains commentateurs politiques pensent que ce serait impossible que le RN obtienne une majorité absolue ou même relative. Absolue ou relative, ce serait pourtant une véritable possibilité à ne pas écarter du champ des possibles : le RN a déjà décuplé le nombre de ses députés en juin 2022 (par rapport à juin 2017), et personne ne l'aurait imaginé même la veille du scrutin (tout au plus, le RN aurait pu constituer un groupe, mais de l'ordre de 20 à 30 députés, pas les 88 d'aujourd'hui). Ces 88 sièges, partout en France (pas dans quelques territoires mais répartis dans toute la France), ils ont donné au RN une force de frappe extraordinaire avec une implantation locale généralisée (chose que Renaissance peine à avoir).


Dès lors que le RN apparaît, ce qui semble malheureusement le cas, comme la seule perspective d'alternance à l'actuelle majorité macronienne, ce parti sera bénéficiaire de l'effet mécanique du scrutin majoritaire qui leur permet de poser la question : pour ou contre Emmanuel Macron ? Ou encore : pour ou contre Marine Le Pen ?

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L'objectif d'Emmanuel Macron serait de ne pas laisser dans la postérité un passage de pouvoir à l'Élysée à Marine Le Pen en 2027. Pour cela, il pourrait imaginer un gouvernement de cohabitation dirigé par le RN qui confronterait ce parti populiste aux réalités du pays. Comme c'est le cas du gouvernement italien actuel dirigé par Giorgia Meloni, même si la situation politique est très différente. Aucun gouvernement de cohabitation n'a été approuvé par une élection présidentielle qui le suivait : ni en 1988, ni en 1995, ni en 2002. Être Premier Ministre est un cadeau généralement empoisonné.

Mais pour la postérité, être le premier Président à nommer à Matignon un rejeton d'un parti créé par Jean-Marie Le Pen ne serait tout de même pas joli joli non plus. Sans compter la vie quotidienne dans les institutions, les humiliations au conseil des ministres, les déclarations impuissantes d'un Président de la République alors que les ministres feraient le contraire. Un tel machiavélisme prêté au Président serait presque de l'aliénation mentale. Une dissolution paraît surtout un suicide collectif en perspective, pas seulement pour Renaissance, mais pour toute la classe politique, RN compris.

Cela n'empêche pas l'idée de continuer à faire son chemin. Dans la matinale de ce mardi 12 décembre 2023 sur BFMTV et RMC, le président du RN et tête de la liste RN aux élections européennes du 9 juin 2024, Jordan Bardella, a déjà annoncé la couleur : le RN est prêt à gouverner, et en cas de majorité, il serait lui-même le Premier Ministre d'une cohabitation.

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Après l'autoproclamation à Matignon de Jean-Luc Mélenchon avant les élections législatives de juin 2022, voici l'autoproclamation de Jordan Bardella ! En un qui n'a rien compris au fonctionnement des institutions et à l'esprit de la Constitution : la nomination du Premier Ministre est une prérogative exclusive du Président de la République. Évidemment, ce qui fait tiquer, c'est : pourquoi ne serait-ce pas Marine Le Pen ? Celle-ci, bien sûr, a l'horizon présidentiel de 2027 à l'esprit et elle ne voudrait pas se brûler les ailes dans l'exercice du pouvoir quelques années auparavant. Une sorte de stratégie de Jacques Chirac élaborée en 1993 en laissant Matignon à son alors ami de trente ans Édouard Balladur.

L'un des arguments électoraux du RN pour voter pour lui, ou, du moins, ne pas voter contre lui, ce serait : il n'est jamais arrivé au pouvoir, on peut essayer. La thèse de l'essai est intéressante car elle est peu ambitieuse. En gros, tous ceux qui ont gouverné auraient été incapables de rendre la vie des Français plus confortable, alors, essayons n'importe quoi mais quelque chose de nouveau. Et il y en a même à gauche que se disent : levons l'hypothèque RN ! Voter nécessite pourtant un peu d'esprit de responsabilité.


En fait, le RN n'a rien de nouveau. Il fait partie intégrante du système politique. Il a fêté son cinquantenaire en automne 2022. En cinquante et un ans d'existence, qu'est-ce que ce parti a fait pour le bien des Français ? Rien. Absolument rien. Pas une seule proposition, pas une seule idée qui a abouti pour l'intérêt général. Ce parti a été géré comme une aubaine des situations. Sous Le Pen père, il était une PME prospère mais artisanale, avec un fonds de commerce juteux (l'anti-immigration), au point d'être déstabilisé lorsqu'il a été présent au second tour de l'élection présidentielle de 2002 (il manquait le financement d'une campagne de second tour). Avec Le Pen fille, cela a commencé à devenir une entreprise plus importante, surtout, plus sérieuse, au point de se confondre avec le système (ils sont comme les autres !).

Éric Zemmour, sur leur droite, et Jean-Luc Mélenchon, sur leur gauche, existent et, par leurs outrances, permettent au RN et à ses deux leaders, Marine Le Pen et Jordan Bardella (le pseudo-gendre), de se recentrer et surtout, d'augmenter leur respectabilité, mot d'ordre depuis 2022 à base de cravates et de propos courtois (il y a quand même quelques dérapages quand les chefs ne surveillent pas la meute). L'idéologie qu'ils servent n'a pas changé, mais elle est emballée dans une sorte de politiquement correct qui leur laisse l'espoir de convaincre les Français de leur compétence.

De toute façon, le moment venu, les Français arbitreront. Et jamais comme les sondages l'imaginent.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (12 décembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Rassemblement national : objectif 2027... ou avant !
Jordan Bardella.
Marine Le Pen.

Le nouveau JDD et la récupération des Enzo...
Geoffroy Lejeune.
Attention, un train de violence peut en cacher un autre...
Éric Caliméro Zemmour.
Jean-Marie Le Pen et sa marque dans l'histoire.
La tactique politicienne du RN.
La sanction disciplinaire la plus lourde de la Cinquième.

Louis Aliot.
Le congrès du RN.
Grégoire de Fournas.
Incident raciste : 89 nuances de haine à la veille du congrès du RN ?
Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard...

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2 décembre 2023 6 02 /12 /décembre /2023 04:13

« M'enfin, le pouvoir, il n'y a rien de plus séducteur pour une femme ! » (1981).




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Il y a trois ans, le 2 décembre 2020, l'ancien Président de la République Valéry Giscard d'Estaing est mort, l'une des très nombreuses victimes du covid-19. À deux ou trois semaines de la mise sur le marché français du vaccin contre le covid-19, il l'a raté de peu, hélas, alors qu'il était de constitution robuste et ce n'étaient pas ses presque 95 ans qui l'empêchaient de continuer à lire, à s'intéresser au monde, à académiser ou, le cas échéant, à intervenir dans les médias pour nous faire bénéficier de ses toujours brillantes analyses.

Probablement effondré par la perte récente d'une de ses filles, le chuintant homme politique a été enterré, avec son orgueil, dans la plus grande discrétion selon ses volontés, loin des hommages pompeux de la République et des discours pontifiants de la cour d'honneur des Invalides.

C'est parce qu'il est maintenant mort que l'actrice Carole Bouquet s'est permise de lâcher une vieille anecdote, une anecdote d'il y a une quarantaine d'années. Respecter les vivants, se taire par politesse, mais la mort délie les langues, lève les secrets. Invitée de Brigitte Boucher et Jean-Pierre Montanay dans l'émission gastronomique "Politiques, à table !" diffusée le 31 mars 2023 sur LCP, la grande actrice a donc confié une anecdote qui l'a fait plus sourire que s'indigner.

Ce se passait après la victoire de François Mitterrand, au début du mois de décembre 1981. Elle avait un bébé de trois semaines (son premier fils ; il s'agit du futur producteur Dimitri Rassam), et elle-même n'avait que 24 ans. Elle était chez elle et elle s'occupait du bébé quand on a sonné à la porte.


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Elle a alors raconté, avec sa voix amusée : « Sonne à ma porte un monsieur que je ne connais pas du tout mais que je reconnais en ouvrant. Je suis en robe de chambre, j'ai un enfant qui a trois semaines. Il me dit : "Bonsoir"... et je vois que c'est M. Giscard d'Estaing. Et il me dit : "Est-ce que je peux visiter la maison ? parce qu'elle appartenait à des amis à moi, qui habitent d'ailleurs au fond de la cour là-bas, et je voudrais voir ce que vous en avez fait". Je lui dis : "Je vous en prie". Donc très bien, je lui fais visiter la maison. Il voit même mon fils qui a trois semaines. Je suis toujours en robe de chambre bien évidemment, je lui offre même du champagne. Et puis il s'en va. ».


C'était sa première rencontre un peu insolite avec l'ancien Président de la République à Paris. La deuxième rencontre a eu lieu dans un cadre moins privé : « Vingt ans après, je le rencontre dans [un] dîner à l'AROP [Association pour le rayonnement de l'Opéra de Paris]. Je lui dis "Bonsoir monsieur le Président", étant bien élevé, et il me répond : "Ah !". Je dis : "Pourquoi vous me dites Ah ?". Il me dit : "Parce que vous me dites monsieur le Président". Je fais : "Oui, c'est normal". Il me fait : "Non, vous m'avez maltraité, la première fois où je vous ai vue". Je lui dis : "Comment ça, je vous ai maltraité ? Écoutez, la seule fois où on s'est vus, si mes souvenirs sont bons, vous êtes venu chez moi. Je vous ai ouvert la porte, je vous ai montré toute ma maison, je vous ai offert le champagne, j'avais un bébé que j'étais en train d'allaiter..." Il me dit : "Oui, mais vous n'avez pas été séduite". "Eh bien, non"... Je ne savais plus quoi... Du coup, on s'est assis et on a commencé à discuter. ».

La chute : « Il m'a dit : "Enfin, c'est impossible, le pouvoir, il n'y a rien de plus séducteur pour une femme". Je lui fais "Écoutez, vous tombez très mal, pas pour moi". Il était très bien élevé, mais il s'attendait au contraire à ce que je lui saute dessus ! ».

Elle aurait pu aussi lui répondre que le pouvoir, il venait justement de le perdre ! Du reste, son successeur, François Mitterrand, l'avait mise sous écoute de la cellule présidentielle du GIGN, ses deux lignes téléphoniques, en 1985, des écoutes qui visaient son compagnon, Jean-Pierre Rassam qui est mort la même année. La jeune actrice n'avait pas beaucoup de chance avec les Présidents de la République.

Mais c'est clair qu'à 24 ans, Carole Bouquet était déjà d'un caractère bien trempé. Ce qui est troublant, c'est qu'il ne considérait pas normal qu'elle ne lui cédât pas. En d'autres termes, beaucoup de jeunes demoiselles ont dû "succomber" dans ses bras. Certes, il n'a pas eu des gestes inconvenants, déplacés, il n'a violé personne et il n'a dragué que de manière indirecte, mais c'est toujours dans la position du roi avec ses favorites. C'était une toute autre génération, une toute autre époque. On comprend qu'il a fallu cette vague du MeToo et ces langues qui se sont déliées pour que les femmes soient respectées un peu mieux par certains hommes qui pensent toujours que l'argent ou le pouvoir peuvent appâter ...la beauté. Rideau !


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Sylvain Rakotoarison (02 décembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Carole Bouquet.
Giscard à Carole Bouquet : est-ce que je peux visiter la maison ?
Anne-Aymone Giscard d'Estaing.
François Léotard, l'enfant terrible de Giscard.
Valéry Giscard d’Estaing et son problème, le peuple !
Michel Poniatowski, le bras droit sacrifié de Giscard.
Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
Hommage européen à Valéry Giscard d’Estaing le 2 décembre 2021 au Parlement Européen à Strasbourg (texte intégral et vidéos).
VGE en mai (1968).
Michel Debré aurait-il pu succéder à VGE ?
Le fantôme du Louvre.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron d’hommage à VGE le 3 décembre 2020 (texte intégral et vidéo).
Le Destin de Giscard.
Giscard l’enchanteur.
Valéry Giscard d’Estaing et les diamants de Bokassa.
Valéry Giscard d’Estaing et sa pratique des institutions républicaines.
VGE, splendeur de l’excellence française.
Propositions de VGE pour l’Europe.
Le septennat de Valéry Giscard d’Estaing (1).
Le septennat de Valéry Giscard d’Estaing (2).
Loi n°73-7 du 3 janvier 1973.
La Cinquième République.
Bouleverser les institutions ?









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29 novembre 2023 3 29 /11 /novembre /2023 15:54

« Le garde des Sceaux va pouvoir continuer à mener son action au sein de l'équipe gouvernementale, au service des Français. Je m'en réjouis. » (Élisabeth Borne, le 29 novembre 2023 sur Twitter).




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La Première Ministre Élisabeth Borne avait préalablement annoncé qu'une condamnation valait une démission du gouvernement. Alors, bien sûr, cette annonce du verdict ce mercredi 29 novembre 2023 dans l'après-midi était cruciale non seulement pour l'avenir ou le devenir du Ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti, mais aussi pour le gouvernement lui-même. De retour de l'enterrement de Gérard Collomb, le Président Emmanuel Macron est rentré à l'Élysée pour attendre ce verdict.

La relaxe du ministre est donc, évidemment, un soulagement, même si cela préfigure sans doute d'autres problèmes pour la classe politique en général. L'affaire pour laquelle il fut en procès du 6 au 15 novembre 2023 est assez compliquée, certes, mais sa condamnation aurait été une monstruosité judiciaire car l'ancien avocat serait plutôt ici une victime.

Tentons un rapide résumé de l'affaire. En raison de ses activités professionnelles, Éric Dupond-Moretti avait été mis sous écoute téléphonique par le parquet national financier (PNF), en recherche d'infraction dans une affaire concernant Nicolas Sarkozy. Sur le principe, c'est d'ailleurs scandaleux, surtout pour un avocat dans une affaire en cours. Dès qu'il l'a su, l'avocat écœuré a alors annoncé qu'il allait déposer une plainte en juin 2020 pour atteinte à la vie privée et ne s'est pas privé de faire des commentaires désagréables à l'égard des juges en question.

La Ministre de la Justice de l'époque, Nicole Belloubet, face à la polémique grandissante, a décidé le 1er juillet 2020 de saisir l'Inspection générale de la Justice (IGJ) pour conduire une inspection de fonctionnement sur une enquête préliminaire traitée par le PNF de mars 2014 à décembre 2019. Quelques jours plus tard, le 6 juilet 2020, la ministre a été évincée et Éric Dupond-Moretti lui a succédé. L'inspection de l'IGJ s'est poursuivie alors qu'il était donc impliqué dans cette affaire, comme victime d'écoutes par le PNF (le rapport de l'IGJ a été remis au ministre le 15 septembre 2020). Bien sûr, il a abandonné sa plainte en prenant ses fonctions (sinon, il se serait trouvé dans une situation kafkaïenne ; un ministre s'attaquant lui-même !).


Le 18 septembre 2020, Éric Dupond-Moretti a demandé un complément d'information en commandant une enquête administrative sur les juges du PNF de l'époque après les dysfonctionnements énoncés dans le rapport de l'IGJ. En prenant cette décision, il n'a fait que suivre les recommandations de ceux qui géraient cette affaire. Mais cette enquête a révolté les juges en général et le Syndicat de la magistrature en particulier qui a déposé plainte contre leur ministre le 17 décembre 2020 pour prise illégale d'intérêts. Pourtant, dès le 12 octobre 2020, Éric Dupond-Moretti avait compris le risque et s'était dessaisi du dossier pour le transmettre au Premier Ministre Jean Castex, son supérieur hiérarchique.

Dans un article publié par "Le Point" le 13 janvier 2021, titré "M. Dupond-Moretti est victime et se retrouve accusé, c'est aberrant", le constitutionnaliste Olivier Beaud a déclaré : « M. Dupond-Moretti a hérité de cette affaire en arrivant à la chancellerie. Aurait-il dû démissionner parce qu'il en était l'une des victimes ? Sauf à considérer que les magistrats jouissent d'une impunité totale, il était de son devoir, au contraire, d'enquêter, de tirer au clair les raisons qui ont conduit des magistrats du PNF à faire cette enquête secrète. ».


Malgré cette situation étrange, la mécanique judiciaire a continué impitoyablement son cours : le 16 juillet 2021, le ministre a été mis en examen pour prise illégale d'intérêts par la Cour de Justice de la République (CJR) et le 3 octobre 2022, il a été renvoyé en procès, renvoi confirmé par la Cour de Cassation le 28 juillet 2023.

Présent à son procès, Éric Dupond-Moretti n'a pas mâché ses mots, parlant d'infamie pour un tel procès. La CJR a finalement reconnu l'innocence du ministre pour la raison suivante : certes, Éric Dupond-Moretti était placé dans une situation manifeste de prise illégale d'intérêts, mais l'élément intentionnel n'est pas constitué. Il a donc été acquitté.

Jacqueline Laffont, une des avocats d'Éric Dupond-Moretti, a lourdement insisté sur l'idée que le ministre avait été considéré comme coupable dans les médias et dans la classe politique dès sa mise en cause il y a trois ans. Cette présomption de culpabilité est d'autant plus grave que le prévenu est ensuite jugé innocent et aucune réparation ne peut véritablement avoir lieu pour compenser le préjudice moral voire politique.

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Pour Éric Dupond-Moretti, ce fut en effet trois années difficiles (surtout dans les joutes parlementaires), mais au moins, il pourra dire qu'il connaît quasiment tous les points de vue judiciaires : avocat, certes très médiatique (il a été l'avocat de Patrick Balkany et de Jérôme Cahuzac, aussi d'Yvan Colonna, entre autres), il est devenu Ministre de la Justice, ce qui est finalement assez banal (par exemple, Robert Badinter était aussi un avocat). Avec cette affaire, il est aussi devenu prévenu, ce qui est, dans sa position de Ministre de la Justice, assez inédit dans l'histoire de la République, même si on peut citer aussi, il y a trente ans, le centriste Pierre Méhaignerie qui, en tant que Ministre d'État, Ministre de la Justice, a ordonné une enquête judiciaire sur le financement de Centre des démocrates sociaux, son propre parti qu'il présidait alors !

Les réactions à l'annonce du verdict étaient assez prévisibles. Dans la majorité, il est peu question de triomphalisme et on insiste sur le besoin de continuer l'action gouvernementale. Au Rassemblement national, on évite de parler de l'affaire judiciaire elle-même et on se focalise sur le méchant ministre qui ne fait rien que des mauvaises politiques, bottant ainsi en touche et faisant du hors-sujet. Enfin, chez les insoumis (et aussi les communistes), toujours en destruction des institutions, au lieu de prendre acte de la relaxe, on fustige la Cour de Justice de la République. Pourtant, cette critique est un peu tardive, ils s'étaient bien gardés de la critiquer avant le verdict dans le cas où le verdict irait selon leurs souhaits.


Cette affaire le démontre d'ailleurs plus que jamais : il est essentiel, au nom du principe de séparation des pouvoirs, que les ministres jugés pour des actes faits dans l'exercice de leurs fonctions de ministre, le soient par une cour particulière, par leurs pairs. Toutefois, il n'est pas question d'une instance d'autoblanchiment : la Cour de Justice de la République qui a jugé Éric Dupond-Moretti est composée de trois juges professionnels (du Siège) et de douze parlementaires, cinq de la majorité et sept de l'opposition. Depuis 2012, les candidats à l'élection présidentielle ont tous plus ou moins eu la velléité de changer ce mode de jugement même s'il faut insister sur la spécificité de juger un ministre car la responsabilité de ses actes ne doit relever que de la représentation nationale (c'est le principe de la démocratie). Depuis dix ans, aucun Président n'est parvenu à achever une révision constitutionnelle réformant la procédure.

Avec cette relaxe, la confiance que n'ont jamais cessé de réaffirmer le Président Emmanuel Macron et la Première Ministre Élisabeth Borne à Éric Dupond-Moretti s'en trouve justifiée. Loin de tout triomphalisme, le garde des Sceaux, qui était destiné à un court séjour Place Vendôme en 2020, se voit ainsi confirmer dans ses fonctions et entend bien en profiter pour continuer son action avec détermination.


Quant au Syndicat de la magistrature, son avocat Christophe Clerc est apparu paradoxalement lui aussi joyeux. En effet, il a précisé que l'important n'était pas la relaxe ou la condamnation du ministre, mais la reconnaissance que la situation d'Éric Dupond-Moretti en 2020 constituait effectivement une prise illégale d'intérêts. Désormais, par cette jurisprudence, le juge ne pourra plus retenir l'absence d'intentionnalité dans cette situation après un débat judiciaire très médiatisé de trois ans, même en cas de négligence ou d'ignorance. Avis donc à tous les ministres, tous les maires, tous les chefs d'exécutif, la possibilité de prise illégale d'intérêts sera donc beaucoup plus fréquente à l'avenir et le risque judiciaire amplifié.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (29 novembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Éric Dupond-Moretti relaxé : la justice passe et les chiens aboient !
Éric Dupond-Moretti, le ténor intimidé.

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https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/eric-dupond-moretti-relaxe-la-251776

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25 novembre 2023 6 25 /11 /novembre /2023 04:45

« Avec Cahuzac, l'indécence n'a pas de limite (…). Aujourd'hui Cahuzac a un droit : celui de se faire oublier ! » (Jean-Louis Costes, ancien député et maire LR de Fumel, le 24 novembre 2023 sur RTL).





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Faut-il en pleurer ou en sourire ? C'est comme le verre à moitié vide ou à moitié plein. L'ancien ministre socialiste Jérôme Cahuzac a été repéré dans son ancienne circonscription du Lot-et-Garonne ce jeudi 23 novembre 2023. Avant de serrer quelques mains plutôt bienveillantes le lendemain matin au marché de Monsempron-Libos, il a tenu, dans la soirée, une réunion publique devant quelques dizaines de personnes à la salle des fêtes de la commune : « J’ai commis une immoralité (…) quand j’ai menti à l’Assemblée, sans voir que ce que je disais aller blesser profondément des dizaines de milliers de personnes. Mais j’ai assumé, et en assumant, j’estime avoir eu une attitude morale ! ».

Pour les amnésiques, rappelons que Jérôme Cahuzac fut le premier Ministre du Budget de François Hollande, un personnage très influent qui maîtrisait parfaitement ses sujets souvent très ardus (les finances publiques !), aussi compétent qu'arrogant, et surtout, qui faisait la chasse aux fraudeurs du fisc... pendant que lui-même avait eu un compte numéroté en Suisse.

Poursuivi par les médias pendant plusieurs semaines (depuis l'article publié le 4 décembre 2012 par Mediapart), Jérôme Cahuzac a été le seul responsable politique à avoir reconnu, le 2 avril 2013, ses mensonges (le 8 février 2013 devant Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV, il a utilisé l'expression « les yeux dans les yeux » pour affirmer qu'il n'avait « jamais eu de compte en Suisse »). Le 19 mars 2013, il y a un peu plus de dix ans, il a démissionné du gouvernement et ce fut la descente aux enfers. Au bout d'un mois, il a renoncé à son siège de député (qu'il aurait pu retrouver automatiquement). Après une première condamnation en première instance le 8 décembre 2016, il a été condamné en appel le 15 mai 2018 à deux ans de prison ferme, deux ans de prison avec sursis, 300 000 euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité (parmi ses avocats, maître Éric Dupond-Moretti). La chambre d'appel de la cour d'instruction de Bastia lui a accordé le 10 avril 2019 un aménagement de peine avec port du bracelet électronique pour éviter de séjourner en prison. Sa libération conditionnelle est intervenue le 8 septembre 2020 avec la fin du port obligatoire du bracelet électronique.

S'il a menti à l'Assemblée Nationale le 5 décembre 2012 en réponse à la question d'un député, Jérôme Cahuzac a affirmé le 17 février 2022 sur LCI qu'il n'a jamais menti à François Hollande : « Il aurait fallu pour cela qu'il me pose la question (…) Jamais, à aucun moment, [il ne m'a demandé] : "as-tu oui ou non un compte en Suisse ?" ».


Chirurgien très fortuné pour avoir fondé une clinique spécialisée en chirurgie esthétique et implants capillaires mais aussi pour avoir été un consultant très lucratif de l'industrie pharmaceutique, Jérôme Cahuzac s'est engagé au début des années 1990 au parti socialiste dans les milieux rocardiens. La raison du compte en banque en Suisse n'a jamais été vraiment analysée. Selon lui, il aurait été un trésor de guerre pour l'éventualité de la campagne présidentielle de Michel Rocard à l'élection de 1995. La candidature n'a pas eu lieu et l'argent collecté n'avait donc plus de destination. Sans revenir sur une double faute morale (la fraude fiscale et le mensonge), l'arrogance encore actuelle de Jérôme Cahuzac pourrait s'expliquer par l'idée selon lui qu'il ne serait qu'une victime d'un système politique.

Un autre sujet dans cette affaire, c'est qu'elle a commencé par des indiscrétions de Mediapart provenant de l'ancienne épouse de Jérôme Cahuzac (elle-même aussi médecin) qui s'est vengée ainsi. Dans d'autres affaires politico-financières, il est notable que les indiscrétions journalistiques proviennent souvent d'un conjoint éconduit.


Au moins, il reste du passage de Jérôme Cahuzac au gouvernement une loi sur la transparence de la vie politique, une haute autorité, une obligation de déclarer et de publier ses revenus et patrimoine quand on est ministre ou à d'autres fonctions publiques importantes, des mesures qui ont été adoptées en réaction à la fraude et au mensonge de l'ancien ministre et qui ont probablement découragé certaines personnalités à poursuivre une carrière politique. 2013 a été aussi l'année de la lucidité pour le futur candidat LR à l'élection présidentielle puisque François Fillon a renoncé à employer son épouse comme collaboratrice parlementaire (bien avant 2017, donc).

L'Ordre des médecins a autorisé Jérôme Cahuzac le 20 juin 2019 à exercer à nouveau le métier de médecin. Quatre mois plus tard, il a commencé dans ses fonctions de médecin généraliste à l'hôpital de Bonifacio, en Corse, où il possède une résidence familiale (après avoir fait du remplacement en 2018 à Cayenne !). Sa présence était la bienvenue pendant la pandémie du covid-19.

2023 est une grande année pour Jérôme Cahuzac condamné en 2018 à cinq ans d'inéligibilité. N'ayant donc peur de rien, il considère qu'à 71 ans, ayant payé sa dette à la société, il peut revenir en politique comme s'il était vierge de tout soupçon. Il n'a pas honte (ce qui confirme son arrogance) et surtout, il confond la justice et la morale. Comment peut-on faire encore confiance au menteur professionnel qu'il a été ? Le sujet mérite d'être étudié puisque depuis cette affaire Cahuzac, beaucoup de responsables politiques (parfois certains, plus tard, eux-mêmes en difficulté avec la justice) réclamaient qu'une condamnation pénale entraînât automatiquement une inéligibilité à vie.


À Monsempron-Libos, Jérôme Cahuzac s'est perdu dans des circonvolutions à peine audibles : « J'ai fait du mal. Ai-je voulu faire du mal ? Évidemment pas ! (…) La seule chose que je pouvais et que je peux faire c'est tenter de réparer, de trouver un chemin de rédemption (…). Quand je reviens vous voir, quand j'assume ce que j'ai fait, j'essaie de réparer. Certains m'en voudront toujours. Je le regrette. Peut-être que certains ne croiront plus jamais en rien à cause de moi. Ça me désole. J'aimerais pouvoir tous les rencontrer, leur dire non, c'est pas ça la bonne réaction. Je fais ce que je peux. ».

Et de s'expliquer : « Si je ne m'exprime que maintenant, c'est parce qu'un condamné, ça purge sa peine et ça ferme sa gueule (…). Je récuse le procès qui m'est fait qui consisterait à m'interdire d'aller où je souhaite aller, de rencontrer qui veut me rencontrer et de dire ce que je pense. ».

Apparemment, son retour dans la vie politique locale n'est pas passé inaperçu puisque cela a créé un trouble au sein de la majorité municipale de Villeneuve-sur-Lot, dont Jérôme Cahuzac était le maire de 2001 à 2012. Le maire de centre droit a dû retirer une délégation à un élu de sa majorité pour avoir accompagné l'ancien ministre dans ses pérégrinations. Une association des amis de Jérôme Cahuzac vient d'être créée et certains l'imaginent déjà tenter de reconquérir tant la mairie de Villeneuve-sur-Lot en 2026 que son ancienne circonscription en 2027.

Dans ce déni de faute morale, Jérôme Cahuzac marche dans les pas d'un autre ancien ministre très ambitieux, Alain Carignon, qui a tenté de reconquérir la mairie de Grenoble en 2020 et qui continue à mener l'opposition municipale au maire écologiste. Beaucoup d'autres hommes politiques ont eu ce syndrome Cahuzac, à savoir de s'imaginer redevenus nets de toute faute. C'est le cas aussi de Dominique Strauss-Kahn.

Nous avons la classe politique que nous méritons : ce sont nous, les électeurs, qui sélectionnons ses représentants qui sont aussi les nôtres. À nous de préférer les honnêtes aux malhonnêtes, au risque de Jean Gabin de se faire répliquer par Bernard Blier dans "Le Président" d'Henri Verneuil : « Un crétin comme vous les aimez, honnête ! ».


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (24 novembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le Syndrome Cahuzac.
Jérôme Cahuzac ira-t-il en prison ?
Le procès Cahuzac.
Le scandale Cahuzac.
Le scandale Tapie.
L’affaire Cahuzac.
Faut-il interdire le mensonge ?
Transparence et vie privée…

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231123-cahuzac.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-syndrome-cahuzac-251710

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/11/24/40119426.html





 

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18 octobre 2023 3 18 /10 /octobre /2023 05:18

« Je veux rendre hommage enfin aux victimes des attentats barbares qui ont frappé Israël, des attentats terroristes commis par un groupe terroriste, le Hamas. (…) Pour vous, ce ne sont pas des actes terroristes. Pour moi, vous vous excluez du champ républicain ! » (Élisabeth Borne, le 17 octobre 2023 dans l'hémicycle).




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Ces derniers jours, la France, l'Europe et Israël ont été durement touchés par le retour du terrorisme islamiste qui n'avait jamais disparu. Le massacre des civils commis par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023 a marqué le temps et l'espace par plus de 1 200 personnes tuées et 3 400 personnes blessées, et à ceux-là s'ajoutent les victimes de la riposte israélienne à Gaza qui a fait déjà plus de 3 500 victimes pour la plupart civiles également. Le 13 octobre 2023, la France est en deuil avec l'assassinat de Dominique Bernard, professeur de français au lycée Gambetta d'Arras, commis par un terroriste islamiste. Le 16 octobre 2023, Bruxelles est de nouveau le lieu d'un nouvel attentat islamiste qui a fait deux victimes de nationalité suédoise. Dans le massacre par le Hamas, la France est elle-même endeuillée par la mort de désormais 21 Français et 11 disparitions.

La séance des questions au gouvernement était importante ce mardi 17 octobre 2023 à l'Assemblée Nationale à Paris parce qu'elle permettait de mettre des mots aux horreurs connues depuis vendredi. Une minute de silence a été rendue en hommage aux victimes des attentats d'Arras et de Bruxelles. Du perchoir, Yaël Braun-Pivet a effectivement déclaré : « Plus encore qu’un crime, une profanation a été commise à Arras. Car, en France, l’école est sacrée. Elle est le sanctuaire du savoir, au sein duquel se forme la nation. S’attaquer à l’école à travers un professeur revient à défier notre République tout entière, notre modèle humaniste de société, celui que nous défendrons toujours. (…) Il me paraît important, indispensable même, que la représentation nationale rende à son tour hommage à Dominique Bernard et à Samuel Paty. Je souhaite également que nous exprimions notre solidarité à nos amis belges et suédois, durement frappés hier à leur tour par le terrorisme islamiste. Pour nos deux professeurs, pour toutes les victimes du terrorisme en Europe et ailleurs, je vous demande donc de bien vouloir observer une minute de silence. ».

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La Première Ministre Élisabeth Borne, qui avait décerné le Prix Samuel-Paty le 14 octobre 2023, lui a assuré : « À tous les enseignants de France, à tous les élèves, à tous les parents et à tous ceux qui sont attachés à nos valeurs républicaines, je le dis : nous ne renoncerons pas. Nous ne renoncerons pas à faire vivre la transmission des savoirs, le débat d’idées et la liberté de pensée. Nous ne renoncerons pas à former notre jeunesse, à lui montrer le cap de la République et de la citoyenneté. Nous ne renoncerons pas à porter nos valeurs et à défendre la cohésion nationale. La France et la République sont debout. Si nous sommes unis, personne ne peut nous faire ployer ! ».

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Dès la première question, le sujet portait évidemment sur l'assassinat de Dominique Bernard, tant ce nouvel attentat a ému la représentation nationale. Cette séance était d'ailleurs consacrée presque exclusivement au terrorisme islamiste. C'est Martine Panot, la présidente du groupe FI à l'Assemblée Nationale, qui a commencé en évoquant « l'acte terroriste qui a ôté la vie à Samuel Paty », ce qui a étonné plus d'un député qui ne s'attendaient plus à entendre le mot "terroriste" de la bouche d'un élu insoumis.

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Donneuse de leçon, Mathilde Panot a demandé de recruter encore et encore dans l'Éducation nationale : « Comme le demandent les enseignants, recruterez-vous les personnels essentiels à l’encadrement des élèves et… » (le micro a été coupé car l'oratrice a dépassé son temps de parole).

C'est Élisabeth Borne elle-même qui a proposé la réponse à la mélenchoniste et a ciblé sur la polémique provoquée par les insoumis la semaine dernière : « Je veux rendre hommage enfin aux victimes des attentats barbares qui ont frappé Israël, des attentats terroristes commis par un groupe terroriste, le Hamas. Un groupe que vous refusez de qualifier comme tel, un groupe que certains parmi vous ont même osé qualifier de "mouvement de résistance! Depuis le 7 octobre, les voix de la France insoumise manquent à la condamnation unanime de la barbarie terroriste et à l’unité nationale. Vous avez tenté de justifier vos ambiguïtés, mais la réalité est apparue ce matin au grand jour. La justice est saisie, elle tranchera. En entendant ces propos, je pense aux jeunes tués lors d’une fête techno, aux massacres des kibboutz de Berri et de Kfar Aza, aux femmes, aux hommes, aux personnes âgées et aux enfants enlevés par le Hamas... Pour vous, ce ne sont pas des actes terroristes. Pour moi, vous vous excluez du champ républicain ! ». Et tous les députés sauf ceux de la Nupes se sont levés pour applaudir et approuver longuement la Première Ministre.

L'orateur suivant était un représentant du MoDem, Olivier Falorni, ancien premier secrétaire du PS de la Charente-Maritime, ancien maire de La Rochelle, celui qui avait vaincu Ségolène Royal aux législatives de juin 2012. Lui aussi a attaqué avec fougue l'irresponsabilité des insoumis : « Vendredi dernier, Dominique Bernard est mort d’enseigner, assassiné par la barbarie du terrorisme islamiste. Face aux tragédies et à leur répétition, les mots nous semblent désormais usés et inutiles. Pourtant, je refuse d’y renoncer et je veux, ici, avec vous, dire aux familles des victimes, aux enseignants de France et aux agents de l’éducation nationale, tout notre soutien et toute notre affection. ».

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Et de voir un avertissement terrible dans une phrase d'Albert Camus :
« "On ne prostitue pas impunément les mots", écrivait Albert Camus. Cette phrase résonne aujourd’hui comme un avertissement à tous ceux qui hurlent "offense" quand nous parlons de liberté d’expression, à tous ceux qui hurlent "islamophobie" quand nous défendons simplement la laïcité. Elle résonne comme un avertissement à ceux qui trahissent les mots par bêtise, par fanatisme ou par cynisme, à ceux pour qui il est visiblement plus facile de crier "police fasciste" que de dire "Hamas terroriste". Une fois encore, c’est Mickaëlle Paty qui a su trouver les mots les plus justes, samedi dernier, trois ans après l’assassinat de son frère Samuel. Qu’il s’agisse de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, de terrorisme ou de décapitation, écoutons Mme Paty lorsqu’elle nous dit qu’après ces mots-là, en France, "on ne met pas un 'oui mais', (…) on met un point". ». Olivier Falorni a été ovationné par la plupart des députés (exceptés ceux de la Nupes), notamment quand il s'est indigné des insultes faites à la police (des députés se sont même levés pour l'approuver).

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Le Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse Gabriel Attal lui a répondu avec la même condamnation des insoumis : « C’est la barbarie abjecte du terrorisme islamiste qui frappe à nouveau. Ce que les terroristes ont voulu attaquer, au fond, c’est l’école à la française, car notre école est un obstacle ultime à leurs funestes projets. Je le dis, les islamistes veulent tenir éloignés du savoir le plus grand nombre d’enfants, pour imposer leur obscurantisme ; l’école à la française défend la démocratisation du savoir pour tous. Les islamistes veulent soumettre les femmes ; notre école accueille toutes les petites filles de France, avec tous les petits garçons de France, pour leur transmettre le savoir. Les islamistes veulent imposer le règne de la religion à l’école ; nous imposons celui de la République et de la laïcité dans toutes les écoles de France. Oui, nous continuerons à défendre ces valeurs, qui ne sont pas des concepts abstraits. C’est un combat de tous les jours : elles doivent être défendues par chacune et chacun d’entre nous. Comme vous, monsieur Falorni, je veux dénoncer celles et ceux qui manquent dans ce combat, mais je veux aussi relever que, dans les jours et les semaines qui viennent, les Français continueront, comme hier et aujourd’hui, à faire face et à faire bloc derrière les enseignants et derrière leur école. ».

Un peu plus tard à une autre question, Élisabeth Borne a déclaré, à propos des terroristes : « Le Président de la République l’a dit, nous serons impitoyables. (…) 10 000 policiers et gendarmes sont mobilisés. Le Président de la République a décidé d’engager 7 000 militaires dans l’opération Sentinelle. La sécurité aux abords des écoles a été renforcée, notamment grâce au déploiement de personnels de prévention et de sécurité de l’éducation nationale. Cela s’ajoute à des investissements de long terme réalisés aux côtés des collectivités pour la sécurité des écoles. Nous poursuivons notre lutte intraitable contre le terrorisme. Les services de renseignement sont mobilisés ; leur action est déterminante, et je veux les saluer. Nous accélérons notre action pour expulser les étrangers radicalisés. ».

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À
Olivier Marleix, président du groupe LR, qui regrettait que les juges empêchent l'exécution des ordres d'expulsion, Élisabeth Borne a rappelé aussi que nous étions un État de droit et que la France doit combattre le terrorisme en préservant ses valeurs : « Être à la hauteur, c’est ne rien céder à la haine, faire bloc, faire vivre l’unité et la cohésion nationales. Être à la hauteur, c’est aussi lutter fermement contre le terrorisme. La menace est forte. L’attentat d’hier, à Bruxelles, nous le rappelle. Nous avons pris des mesures immédiates pour assurer la sécurité des Français (…). Nous serons impitoyables. (…) Il n’y a pas de place en France pour ceux qui attaquent la République. (…) Efficacité, fermeté et cohésion nationale : voilà le sens de la politique que nous menons. Voilà comment nous apporterons des réponses aux défis qui se posent à nous, sans jamais rien céder sur nos valeurs. ».

Gabriel Attal, à une députée écologiste, a également évoqué les progrès dans la sécurisation des établissements scolaires : « À la suite de chaque attaque terroriste, les gouvernements qui se sont succédé, y compris avant 2017, ont pris des mesures pour renforcer la sécurité des établissements scolaires. Ce qui a probablement permis d’éviter un carnage absolu à Arras, c’est le fait que l’établissement était équipé d’un plan de mise en sûreté. La réaction de l’équipe de direction et des enseignants a été absolument exemplaire et, parce qu’ils disposaient de cette formation, ils ont pu mettre tous les élèves à l’abri. L’enjeu est désormais de garantir que, partout en France, dans tous les établissements scolaires et dans toutes les écoles, les équipes puissent travailler sereinement en sachant qu’elles sont protégées. ».

Sur la fermeté du gouvernement, Gabriel Attal a ajouté, à l'occasion d'une autre question, qu'il serait intraitable sur toutes les incivilités haineuses dans les établissements scolaires : « Je dois le dire aussi : 179 élèves ont fait un autre choix, celui de perturber ce temps de recueillement, de provoquer l’école et d’insulter la mémoire de nos professeurs. La nation et l’école ne sauraient le tolérer. Conformément aux engagements que j’avais pris devant les Français, 179 saisines seront donc transmises dès aujourd’hui au procureur de la République en vue d’engager des poursuites contre ces élèves et autant de procédures disciplinaires seront enclenchées. Pour les cas les plus graves, plusieurs dizaines d’entre eux, qui relèvent de l’apologie du terrorisme, j’ordonne l’exclusion des élèves concernés dans l’attente des résultats desdites procédures disciplinaires. La tolérance et la bienveillance, ça va un moment, mais le "pas de vagues", c’est fini ! ».

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Même si un tir groupé a eu lieu, de la part de la majorité présidentielle, au début de cette séance de questions au gouvernement, contre l'extrême gauche, la Première Ministre n'a pas non plus épargné Marine Le Pen pour condamner sa récupération politicienne facile de l'attentat d'Arras. La président du groupe RN l'avait interpellée sur un ton polémique : « Pourquoi ne pas expulser tous les étrangers islamistes, qu’ils soient en situation légale ou illégale, car ils sont avant tout des ennemis de la France ? Pourquoi ne pas étendre les expulsions à ceux qui ont commis des crimes et des délits graves à leur sortie de prison ? Islamistes, criminels et délinquants : qu’est-ce qui justifie de garder ces personnes sur notre sol ? ».

Elle lui a donné la réplique : « Madame la présidente Le Pen, depuis 2022, à chaque crise, vous vous êtes illustrée par votre silence. Aujourd’hui, le naturel revient au galop. Alors que la France est en deuil, alors que l’école est touchée, alors qu’un enseignant est mort, vous vous lancez dans des polémiques politiciennes, vous lancez des anathèmes, vous multipliez les mises en cause. Alors que le terrorisme frappe et que la situation internationale est préoccupante, vous refusiez explicitement, ce matin même, l’unité de notre pays. Dans les moments graves, je crois pour ma part en la cohésion nationale et en l’action. Avec mon gouvernement, je suis déterminée. Face aux menaces qui pèsent sur notre pays, nous sommes fermes. Nous sommes fermes dans la lutte contre le terrorisme : depuis 2017, nous avons accordé des moyens inédits aux services de renseignement et à la justice. Ces moyens ont permis de déjouer quarante-trois attentats depuis six ans. Nous avons été fermes dès le 7 octobre et l’attaque terroriste contre Israël en renforçant la sécurité des lieux sensibles et en procédant à l’interpellation de plus de 100 individus en lien direct avec des actes antisémites ou d’apologie du terrorisme. Nous sommes fermes et réactifs pour la sécurité de nos écoles (…). Nous sommes fermes face à l’immigration illégale et aux étrangers radicalisés sur notre territoire. En six ans, madame la présidente Le Pen, plus de 900 étrangers inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ont été expulsés. Quand nous pouvons les expulser, nous le faisons. Être fermes, c’est repenser notre arsenal juridique et lever les freins législatifs à l’expulsion des étrangers qui représentent une menace pour notre pays. C’est l’un des objectifs du projet de loi sur l’immigration, proposé par le ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin. Quand certains pensent polémique, je veux pour ma part témoigner mon soutien aux agents de nos services de renseignements, aux enquêteurs, à nos policiers, à nos gendarmes, à nos militaires mobilisés dans la lutte contre le terrorisme. ».

Enfin, à Boris Vallaud, président du groupe PS, Élisabeth Borne a voulu différencier les socialistes des insoumis : « Monsieur le président Vallaud, je sais les responsabilités que votre groupe a su prendre face au terrorisme. Je connais son attachement aux valeurs républicaines, sa volonté de lutter sans cesse contre toutes les haines. Dans un tel contexte, nous avons besoin d’unité, de cohésion nationale. Nous avons besoin d’envoyer un message clair face au terrorisme, qu’il frappe en France, en Belgique ou en Israël. À de nombreuses reprises, j’ai parlé de l’arc républicain et de celles et ceux qui s’en excluent par leurs propos ou leurs actes. Ce matin, nous en avons vu un terrible exemple. Je connais votre sincérité et celle de votre groupe, et, après les déclarations de ce matin, chacun sait, sans équivoque, qui défend la République et ses valeurs, qui ne les partage pas. ».

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Lutter contre les extrêmes et la haine fait partie de la lutte contre le terrorisme. Si elle avait prévu de batailler ferme pour la réforme des retraites, il y a peu de chance qu'Élisabeth Borne, en acceptant sa nomination à Matignon il y a un an et demi, imaginât que son problème numéro un serait le terrorisme et l'assassinat de civils français, en France comme en Israël, alors que la France avait déjà connu d'autres crises majeures. S'occuper de la sécurité des Français, c'est nécessairement être responsable et efficace. En ce sens, elle s'est transformée, elle est devenue une véritable femme d'État, peut-être même la première dans l'histoire politique de la France.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (17 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Attentats d'Arras et de Bruxelles : tirs groupés contre les insoumis.
L'assassinat de Dominique Bernard au lycée Gambetta d'Arras.
Samuel Paty : faire des républicains.
Nos enseignants sont des héros !
Violence contre une prof et vidéo dans les réseaux sociaux.
N’oublions pas le sacrifice du colonel Arnaud Beltrame !
Les assassinats de Merah (mars 2012).
Horreur en Israël : les massacres du Hamas.
Émotion, compassion et soutien aux victimes du criminel d'Annecy.
L'assassinat de Claude Érignac.
L'attentat contre Salman Rushdie.
L’attentat de la basilique Notre-Dame de Nice le 29 octobre 2020.
Les attentats du 11 septembre 2001 et la naissance du complotisme 2.0.
Les attentats du 11 septembre 2001.
Complot vs chaos : vers une nouvelle religion ?
Nouveau monde.
Qu’aviez-vous fait le 11 septembre 2001 ?
11 septembre, complot ?
Les théories du complot décortiquées sur Internet.
Ben Laden, DSK, même complot ?
L'attentat de Kaboul du 26 août 2021.
Jacques Hamel, martyr de la République autant que de l’Église.
Fête nationale : cinq ans plus tard…

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231017-attentat-arras.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/attentats-d-arras-et-de-bruxelles-251023

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/10/17/40077361.html




 

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13 octobre 2023 5 13 /10 /octobre /2023 05:35

« Ni suspicions, ni divisions entre nous ne doivent exister au sein de la Nation. Gardons à l’esprit que l’antisémitisme a toujours été le prélude à d’autres formes de haine (…). Ne menons pas chez nous des aventures idéologiques par imitation, par projection. N’ajoutons pas, par illusion ou par calcul, des fractures nationales aux fractures internationales. Et ne cédons rien face à toute forme de haine. Dans ce moment que nous vivons mes chers compatriotes, nous devons condamner le terrorisme et défendre nos valeurs fraternelles. » (Emmanuel Macron, le 12 octobre 2023).





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Il faut le répéter et marteler : les massacres terroristes qu'a perpétrés le Hamas en Israël le 7 octobre 2023 sont sans précédent dans toute l'histoire d'Israël. Il s'agit du plus grave massacre de Juifs après la Shoah. La barbarie est d'une telle intensité que l'on découvre des horreurs nouvelles chaque jour depuis près d'une semaine.

C'est tellement indicible que les rescapés de ces crimes contre l'humanité ont du mal à être crus, comme c'était le cas des rescapés des camps d'extermination nazis. Le 7 octobre 2023 marquera à jamais cette singularité nouvelle dans l'histoire du monde. Des massacres de type Bataclan ou "Charlie Hebdo" à un festival musical (rave party), dans des kibboutz (les victimes sont assassinées chez elles, on est venu les trouver pour les assassiner), des bébés ont été assassinés (c'était tellement incroyable que cette information a été initialement peu crue), etc.

Mécaniquement, face à un événement d'une telle ampleur, des enragés idéologues du complotisme remettent en cause la réalité même de la barbarie, ou pinaillent, ou la relativisent en considérant que les agresseurs et les agressés se valent, comme en Ukraine du reste. Ce n'est pas la première fois que le complotisme agit, motivé par la haine des Juifs (car c'est la seule véritable motivation, il ne faut pas se tromper), c'était aussi le cas lors des attentats du 11 septembre 2001.

Parmi les plus de 1 200 victimes, on compte, selon l'Élysée, au moins 13 Français morts, et parmi les centaines d'otages et de disparus, 17 Français dont 4 enfants. Cette tragédie n'est donc pas un événement extérieur de la France. La France, comme Israël, comme aussi les États-Unis, la Thaïlande et le Népal, est durement touchée par cette horreur du Hamas. Ce ne sont pas des Israéliens qui étaient ciblés, c'étaient des Juifs.

Les conséquences sont nombreuses et en premier lieu, la réaction de l'armée israélienne qui bombarde depuis six jours la Bande de Gaza (au moins 1 400 morts et 6 000 blessés) et il y aura encore d'autres victimes car tant que l'État d'Israël ne met pas hors d'état de nuire les terroristes du Hamas, il n'y aura pas de sécurité ni pour les Israéliens, ni pour les Palestiniens. L'armée israélienne vient de faire un ultimatum pour contraindre plus d'un million de Palestiniens du nord de la Bande de Gaza à évacuer les lieux, afin d'isoler les terroristes du Hamas qui, bien entendu, ont supplié les habitants de ne pas les quitter. Cette guerre fera beaucoup de morts et les alliés d'Israël sont présents à ses côtés pour que la réaction ne soit pas une vengeance, qu'elle respecte les droits humains et qu'elle ait pour but la sécurité du pays et le moins de victimes parmi la population civile.

En France, incontestablement, des groupuscules politiques sont incapables d'émotion et de compassion vis-à-vis des horreurs du Hamas. Pourtant, la première des choses, au-delà de l'émotion, c'est de convenir de l'équivalence du Hamas comme mouvement terroriste. Il ne peut pas y avoir de "mais", aucune action d'une telle barbarie ne peut se justifier, aucune. Il faut considérer le Hamas comme Daech, une organisation terroriste qui n'a pour seul but la haine et la destruction, l'élimination des Juifs.

Le tort d'Israël est d'avoir laissé la Bande de Gaza aux mains du Hamas. Refuser de considérer le Hamas comme Daech, c'est croire que les Palestiniens sont le Hamas alors que ce n'est pas le cas. Le Hamas prend en otage autant la population israélienne que la population palestinienne et toutes les conséquences de cette barbarie du 7 octobre 2023, y compris les bombardements sur Gaza, sont de la responsabilité entière et unique du Hamas.

Le 9 octobre 2023, réunis en partie à Munich, certains responsables d'États amis d'Israël ont rappelé ce droit à se défendre. En effet, Emmanuel Macron (France), Joe Biden (États-Unis), Rishi Sunak (Royaume-Uni), Giorgia Meloni (Italie) et Olaf Scholz (Allemagne) ont signé un communiqué commun : « Nous exprimons notre soutien ferme et uni à l'État d'Israël, ainsi que notre condamnation sans équivoque du Hamas et de ses effroyables actes de terrorisme. Nous affirmons clairement que les actions du Hamas n'ont aucune justification, aucune légitimité et qu'elles doivent être universellement condamnées. Rien, jamais, ne justifie le terrorisme. (…) Nos pays soutiennent Israël dans ses efforts pour se défendre et défendre son peuple contre ces atrocités. Nous insistons sur le fait qu'aucun autre acteur hostile à Israël ne doit chercher à tirer avantage de ces attaques. Nous reconnaissons tous les aspirations légitimes du peuple palestinien et soutenons des mesures égales de justice et de liberté pour les Israéliens et les Palestiniens. Mais ne nous y trompons pas : le Hamas ne représente pas ces aspirations et n'offre rien d'autre au peuple palestinien que davantage de terreur et d'effusion de sang. Au cours des prochains jours, nous resterons unis et coordonnés, en tant qu'alliés et amis de l'État d'Israël, afin de garantir qu'Israël soit en mesure de se défendre et pour instaurer les conditions d’un Moyen-Orient pacifique et intégré. ».

En France, le débat politique s'est structuré autour du refus de Jean-Luc Melenchon et de ses sbires à reconnaître le Hamas comme une organisation terroriste et le refus de compassion envers le peuple israélien durement touché par ces crimes effroyables en faisant preuve d'un relativisme puant et arrogant.

Alors, il n'était inutile que les deux premiers personnages de l'État exprimassent la voix de la France de manière haute et claire, sans ambiguïté, sans faux-semblant. C'était d'autant nécessaire que le conflit israélo-palestinienne a tendance à s'exporter en France. Pour preuve, hélas, mais l'enquête précisera si c'est en lien avec les événements au Proche-Orient ou pas, l'assassinat horrible d'un enseignant à Arras ce vendredi 13 octobre 2023 dans la matinée qui a apparemment une caractéristique terroriste.

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C'est pourquoi le Président du Sénat Gérard Larcher a tenu à rendre hommage aux victimes du 7 octobre 2023 au début de la séance du 11 octobre 2023 au Sénat, en présence de l'ambassadeur d'Israël en France : « Pour Israël et les démocraties, à n'en pas douter, il y aura un avant et un après le 7 octobre 2023, comme il y eut un avant et un après le 11 septembre 2001, ainsi qu'un avant et un après cette terrible année 2015 dans notre pays, la France. Rappelons-nous : pour nous, Français, le massacre du Bataclan trouve un écho singulier dans le massacre de jeunes Israéliens que la musique avait réunis. Rappelons-nous : les rues de Paris parcourues par les terroristes s'apparentent étrangement aux rues et aux routes des villes et de certains kibboutz aujourd'hui plongés dans un deuil profond. Rappelons-nous : partout des assassinats, des otages et l'odieux chantage qui pèse sur leur vie. Toutefois, en Israël, c'est toute une armée terroriste qui a déferlé, puissante, organisée et soutenue par des pays étrangers, donnant à cette attaque une ampleur inédite. Les massacres commis dans les kibboutz de Be'eri et de Kfar Aza ont un nom : des crimes contre l'humanité. Rappelons-nous : en 2015, l'État d'Israël était au premier rang des soutiens apportés à la France. Le Président de la Knesset m'avait alors écrit cette lettre : "La France blessée fait saigner le cœur d'Israël". Puisse la France aujourd'hui être la plus fervente aux côtés des Israéliens. ».

Et le Président du Sénat d'exprimer deux souhaits qui sont aussi des exigences : « Nous exigeons la libération immédiate et sans condition de tous les otages. Ceux qui les détiennent seront tenus responsables de leur vie. (…) Je souhaiterais que, d'un seul mouvement, nous puissions ensemble manifester notre détermination à nous tenir auprès du peuple d'Israël, peuple meurtri, traumatisé, affaibli peut-être, mais valeureux, portant haut des valeurs qui sont les nôtres, celles de la démocratie parlementaire et de la liberté, en un mot, un peuple inébranlable. ». Ce que les sénateurs, debout, ont tous fait à l'unanimité, à savoir exprimer leur soutien et leur solidarité à l'État d'Israël. Unanimement. Au contraire de l'Assemblée Nationale.

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Au cours de cette séance au Sénat, l'ancien ministre et par ailleurs actuel président du groupe d'amitié parlementaire France-Israël, Roger Karoutchi, voudrait plus d'engagement de la part de la France : « Nous sommes là pour vous dire qu'il faut utiliser les mots "crimes contre l'humanité", car telle est la réalité. Reprenez cette expression, faites en sorte que l'Europe l'emploie elle aussi. Après ce qui s'est passé, c'est bien le minimum. La légitime défense de l'État d'Israël est un droit incontestable : quand on voit les milliers de missiles qui ont visé ce pays, quand on sait ce qui s'est passé dans les kibboutz, parler de légitime défense, c'est le minimum. Enfin, madame la Première Ministre, faites en sorte que ceux qui, dans notre pays, trahissent les valeurs républicaines et les valeurs de la Nation en refusant de soutenir l'État d'Israël et en faisant l'apologie du terrorisme soient sévèrement punis. ».

Le lendemain, 12 octobre 2023 à 20 heures, après avoir rencontré l'ensemble des chefs des partis représentés au Parlement, le Président de la République Emmanuel Macron a prononcé une allocution télévisée pour mettre les points sur les i et pour exprimer la compassion de la France sur ce « déchaînement de cruauté absolue ». La clarification est bien là. Cela allait sans dire, mais c'était mieux en le disant, surtout quand il s'agit du chef d'un grand État.

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Le caractère terroriste du Hamas : « La France condamne de la manière la plus ferme ces actes atroces. Disons-le clairement. Le Hamas est un mouvement terroriste. Le Hamas cherche avant tout la destruction et la mort du peuple d’Israël. Agissant comme il le fait, il sait par ailleurs à quoi il expose de manière criminelle et cynique la population de Gaza. Ce n’est pas une guerre entre les Israéliens et les Palestiniens. C’est une guerre menée par des terroristes contre une Nation, un pays, une société, des valeurs démocratiques. ».

Le soutien sans faille au peuple d'Israël : « Nous avons assuré Israël et son peuple de notre solidarité sans faille et de notre soutien dans sa réponse légitime aux attaques terroristes. Israël a le droit de se défendre, en éliminant les groupes terroristes dont le Hamas par des actions ciblées, mais en préservant les populations civiles car c’est le devoir des démocraties. Nous savons que la seule réponse au terrorisme, la seule possible, est toujours une réponse forte et juste, forte parce que juste. ».

Cette barbarie touche la France. Emmanuel Macron a hélas annoncé une treizième victime française décédée et a remis en perspective : « Nous sommes aussi liés à Israël par la douleur du deuil. À cette heure, 13 de nos compatriotes sont morts lors de ces attaques. Jamais, depuis l’attentat de Nice en 2016 autant de Français n’ont été assassinés par des terroristes. Et ce sont tous les Français, qui ce soir les pleurent. Comme nous nous inquiétons pour le sort de nos 17 compatriotes, enfants et adultes, portés disparus, et sans doute, pour certains d’entre eux, retenus en otage. ».

À propos des otages, le Président a tenu à réaffirmer son urgence : « Je pense ce soir aux familles. Je veux leur dire que la France met d’ores et déjà tout en œuvre, aux côtés des autorités israéliennes et de nos partenaires, pour les faire revenir sains et saufs dans leur foyer. Car la France n’abandonne jamais aucun de ses enfants. Nous ferons tout pour que ces otages, quelle que soit leur nationalité, soient libérés. Plus largement, nous sommes pleinement mobilisés pour assurer l’information des familles sans nouvelles de leurs proches, pour garantir un rapatriement, pour informer et secourir. ».

L'objectif diplomatique est défini ainsi : « Je me suis entretenu à plusieurs reprises avec le Président israélien Isaac Herzog, avec son Premier Ministre Benyamin Netanyahou. J’ai également longuement échangé avec les principaux dirigeants des pays de la région, ceux de l’Autorité palestinienne, la Jordanie, l’Égypte, le Liban, l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis, comme du Qatar. Avec nos principaux alliés européens et américains, nous partageons les mêmes priorités : apporter un soutien ferme et complet à Israël, éviter toute extension du conflit aux pays voisins, notamment au Liban, et coordonner l’action humanitaire internationale. Nous ne pouvons pas nous résoudre à une guerre sans fin dans cette région. La lutte contre le terrorisme ne peut remplacer la recherche de la paix. Les conditions d’une paix durable sont connues : ce sont des garanties indispensables pour la sécurité d’Israël et un État pour les Palestiniens. C’est la ligne que la France défend avec constance, qu’elle continue à défendre sans varier et continuera de porter. ».

Mais cela ne veut pas dire que le soutien à la cause palestinienne est une caution pour les terroristes : « Je le redis : la sécurité de l’État d’Israël, la lutte résolue pour l’éradication du terrorisme dans la région, et le respect des aspirations légitimes de chacun forment pour nous un ensemble indissociable. Ceux qui confondent la cause palestinienne et la justification du terrorisme commettent une triple faute : morale, politique et stratégique. Forte de sa clarté et de sa constance, la France a la responsabilité d’agir, toujours, pour la paix et le dialogue. Elle le fera. ».

Ce vendredi 13 octobre 2023, Emmanuel Macron et le Ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal devaient se rendre à Arras. Honte au terrorisme islamique et à tous ceux qui font preuve de mansuétude à son égard !


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (13 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Horreur en Israël : les points sur les i de Gérard Larcher et Emmanuel Macron.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 12 octobre 2023 (vidéo et texte intégral).
Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Terreur Al-Aqsa : Israël en guerre contre son agresseur, le Hamas.
Les Accords d'Oslo.
Shimon Peres.

Le retour au pouvoir de Benjamin Netanyahou après sa nouvelle victoire.
Emmanuel Macron à Pithiviers en 2022.
Covid-19 : comprendre la situation épidémique en Israël.
Covid-19 : la France plus vaccinée qu’Israël.
Naftali Bennett, Premier Ministre d’Israël à la place de Benyamin Netanyahou.
Israël 2020 : Benyamin Netanyahou vs Benny Gantz (3e round).
Benyamin Netanyahou a 70 ans.
Les élections législatives israéliennes du 17 septembre 2019.
Poisons et délices de la proportionnelle.
Les enjeux des élections législatives israéliennes du 9 avril 2019.
Golda Meir.
La lutte contre l’antisémitisme est l’affaire de tous !
Les Accords de Camp David.
La naissance de l’État d’Israël.
Massacre à Gaza.
Tentative de paix en 1996.
Un géant à Jérusalem.
L'un des derniers Sages d'Israël.
Israël est une démocratie.
Yitzhak Rabin.
Le Président Peres.
Ariel Sharon.
Ehud Olmert.
Benyamin Netanyahou III.
Yasser Arafat.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231012-france-israel.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/horreur-en-israel-les-points-sur-250919

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/10/12/40071591.html








 

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11 octobre 2023 3 11 /10 /octobre /2023 16:49

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Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231012-france-israel.html






ALLOCUTION DU PRÉSIDENT DU SÉNAT GÉRARD LARCHER
LE 11 OCTOBRE 2023 SUR L'HORREUR EN ISRAËL


 

Hommage aux israéliens victimes d'actes terroristes

M. le président. Madame la Première Ministre, mesdames, messieurs les ministres, monsieur l'ambassadeur d'Israël, qui êtes présent dans notre tribune d'honneur, mes chers collègues, le 7 octobre dernier au matin, le Hamas a déclenché une opération terroriste de grande ampleur sur le sol israélien, semant la désolation et la mort, créant un climat de terreur qui n'a d'égal que la cruauté dont les terroristes islamistes ont fait preuve à l'égard des victimes. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la Première Ministre et Mmes et MM. les ministres, se lèvent.)

Pour Israël et les démocraties, à n'en pas douter, il y aura un avant et un après le 7 octobre 2023, comme il y eut un avant et un après le 11 septembre 2001, ainsi qu'un avant et un après cette terrible année 2015 dans notre pays, la France.

Rappelons-nous : pour nous, Français, le massacre du Bataclan trouve un écho singulier dans le massacre de jeunes Israéliens que la musique avait réunis.

Rappelons-nous : les rues de Paris parcourues par les terroristes s'apparentent étrangement aux rues et aux routes des villes et de certains kibboutz aujourd'hui plongés dans un deuil profond.

Rappelons-nous : partout des assassinats, des otages et l'odieux chantage qui pèse sur leur vie. Toutefois, en Israël, c'est toute une armée terroriste qui a déferlé, puissante, organisée et soutenue par des pays étrangers, donnant à cette attaque une ampleur inédite.

Les massacres commis dans les kibboutz de Be'eri et de Kfar Aza ont un nom : des crimes contre l'humanité.

Rappelons-nous : en 2015, l'État d'Israël était au premier rang des soutiens apportés à la France. Le président de la Knesset m'avait alors écrit cette lettre : « La France blessée fait saigner le cœur d'Israël ».

Puisse la France aujourd'hui être la plus fervente aux côtés des Israéliens.

En cet instant, il convient de penser aux victimes israéliennes comme à celles d'autres nationalités, notamment à nos compatriotes, à leurs familles, à leurs proches, à ceux qui, aujourd'hui encore, sont portés disparus ou qui, enlevés, ont été violentés et pris en otage.

Nous exigeons la libération immédiate et sans condition de tous les otages. Ceux qui les détiennent seront tenus responsables de leur vie.

J'ai exprimé en votre nom à tous – oui, à tous, mes chers collègues – la solidarité du Sénat, en écrivant au président de l'État d'Israël, M. Herzog, et au président de la Knesset, notre collègue, M. Ohana.

Néanmoins, je souhaiterais que, d'un seul mouvement, nous puissions ensemble manifester notre détermination à nous tenir auprès du peuple d'Israël, peuple meurtri, traumatisé, affaibli peut-être, mais valeureux, portant haut des valeurs qui sont les nôtres, celles de la démocratie parlementaire et de la liberté – en un mot, un peuple inébranlable.

Je vous invite à observer une minute de silence. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la Première ministre et Mmes et MM. les ministres, observent une minute de silence.)

Gérard Larcher, le mercredi 11 octobre 2023 à 15 heures à Paris.
 

La parole est à Mme la Première Ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première Ministre. Monsieur le président, monsieur l'ambassadeur d'Israël, mesdames, messieurs les sénateurs, alors que des attaques terroristes effroyables ont touché l'État d'Israël, je veux, au nom de mon gouvernement, dire toute ma solidarité et mon soutien au peuple israélien.

Chaque jour, nous découvrons de nouvelles horreurs commises par les terroristes du Hamas. Chaque jour, le bilan s'alourdit. Je veux redire solennellement, et avant toute chose, que rien, jamais, ne peut justifier le terrorisme.

Aujourd'hui, je pense aux victimes et j'exprime la compassion de la France à leurs familles et à leurs proches.

Alors que le bilan vient une nouvelle fois de s'alourdir, je veux avoir un mot particulier pour nos dix ressortissants décédés et pour les dix-huit autres dont nous sommes sans nouvelles.

En ce moment tragique, je sais l'émotion et l'angoisse qui saisissent les Français vivant en Israël et les Franco-Israéliens. Nous sommes avec eux, et nos services diplomatiques mettent tout en œuvre pour les accompagner.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Président de la République l'a dit avec force : nous sommes aux côtés d'Israël, pays allié de la France, qui vit un drame terrible.

M. le président. Madame la Première Ministre, je vous remercie.
 

Situation en israël (II)

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. Roger Karoutchi. « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde », disait Albert Camus.

Madame la Première Ministre, nous sommes la France, héritière des philosophes des Lumières, de la Révolution de 1789, de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, du Conseil national de la Résistance, de Léon Blum et du général De Gaulle. Nous sommes le pays de la liberté, de la tolérance et de l'universalité.

M. Bruno Sido. Exact !

M. Roger Karoutchi. Nous avons donc une responsabilité éminente.

Nous ne pouvons pas nous contenter de faire des déclarations de type « Quai d'Orsay » – pardon de le souligner, madame la ministre des affaires étrangères –, qu'elles soient sur fiches ou non. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Nous sommes simplement là pour vous dire que l'empathie n'est pas exclusive de l'action politique.

Mme Frédérique Puissat. Tout à fait !

M. Roger Karoutchi. Nous sommes là pour vous dire qu'il faut utiliser les mots « crimes contre l'humanité », car telle est la réalité. Reprenez cette expression, faites en sorte que l'Europe l'emploie elle aussi. Après ce qui s'est passé, c'est bien le minimum.

La légitime défense de l'État d'Israël est un droit incontestable : quand on voit les milliers de missiles qui ont visé ce pays, quand on sait ce qui s'est passé dans les kibboutz, parler de légitime défense, c'est le minimum.

Enfin, madame la Première Ministre, faites en sorte que ceux qui, dans notre pays, trahissent les valeurs républicaines…

M. Bruno Belin. Très juste !

M. Roger Karoutchi. … et les valeurs de la Nation en refusant de soutenir l'État d'Israël et en faisant l'apologie du terrorisme soient sévèrement punis. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, INDEP et SER.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Karoutchi, vous n'avez pas bien entendu les propos de M. le Président de la République et de Mme la Première Ministre, sans même parler des miens, auxquels, il est vrai, je n'ai jamais imaginé que vous puissiez prêter attention… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Pas de polémique !

M. Max Brisson. Ce n'est pas au niveau…

Mme Frédérique Puissat. Un peu de hauteur, madame la ministre !

Mme Catherine Colonna, ministre. Mme la Première Ministre vient de rappeler toute l'horreur que nous inspirent les actes barbares commis par le Hamas. Elle vient de dire et de répéter la condamnation absolue, par la France, de ces attentats terroristes, commis par un groupe terroriste et soutenus par d'autres groupes terroristes.

De plus, les prises d'otages abjectes, les assassinats monstrueux et les massacres perpétrés ne laissent aucun doute quant à la nature terroriste du Hamas. Notre condamnation est donc totale et absolue, et cela depuis le premier jour.

Face à l'horreur, nous sommes solidaires du peuple israélien. Nous disons avec force qu'Israël a le droit de se défendre. Nous l'avons dit publiquement, dès le premier jour. Nous le répétons. Et nous le disons à tous nos interlocuteurs, dans la région comme ailleurs.

Dans le même temps – Mme la Première Ministre le soulignait à l'instant –, la responsabilité diplomatique de la France est aussi d'éviter un embrasement régional. L'Autorité palestinienne a un rôle à jouer à cet égard ; nous continuerons de la soutenir. Le Président de la République s'est exprimé sur ce point, très clairement, hier.

La diplomatie française est aussi active pour que la situation ne s'aggrave pas à la frontière avec le Liban – je ne doute pas que vous suivez avec attention ce qui s'y passe –, comme à la frontière avec la Syrie.

Depuis samedi dernier, le Président de la République et moi-même avons multiplié les contacts avec nos homologues dans la région – je pense notamment aux dirigeants israéliens et palestiniens –, en Europe et bien au-delà.

Bien sûr, comme l'a dit Mme la Première Ministre, quand le calme sera revenu, il faudra se demander comment mieux prendre en compte les aspirations du peuple palestinien et comment mieux répondre au droit absolu d'Israël à la sécurité.

La paix doit rester notre impératif, même si, de toute évidence, ce moment n'est pas venu. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, je préfère ne pas répondre…

 




Source : www.senat.fr

https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20231011-allocution-larcher.html
 

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