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11 octobre 2023 3 11 /10 /octobre /2023 05:08

« Ne vous y trompez pas. Cette guerre est une guerre contre notre civilisation, une guerre entre la civilisation et la barbarie ! Non, ce n’est pas une guerre de territoires. Les colonies ? Israël a évacué Gaza jusqu’au dernier centimètre carré ! Le Hamas veut un État à la place et non à côté d’Israël. Israël est le premier rempart contre l’islamisme qui a défiguré la France, y faisant 271 morts. Ces barbares s’attaquent à notre modèle de société, à nos valeurs, à notre art de vivre, et surtout à notre conception du monde et de la dignité humaine. Si Israël perd cette guerre, c’est le monde libre qui vacille : c’est eux ou nous. N’oubliez jamais Sartre : "Pas un Français ne sera en sécurité tant qu’un Juif, en France et dans le monde entier, pourra craindre pour sa vie". » (Meyer Habib, député LR, le 10 octobre 2023 dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale).





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L'effroyable attentat terroriste du Hamas qui a eu lieu le 7 et 8 octobre 2023 sur le territoire d'Israël n'en finit pas de montrer l'horreur à l'état pur. À ce jour, on "décompte" hélas au moins 1 200 victimes, pour la plupart des civils, des enfants, des vieillards, vous ou moi, au moins 3 400 personnes blessées, et au moins 200 otages humiliés, kidnappés pour servir d'une improbable monnaie d'échange. Chaque jour, de nouvelles victimes sont découvertes.

Parmi ces victimes, il y a eu au moins 10 Français assassinés, et une vingtaine d'autres qui ont disparu. La France n'est donc pas seulement touchée moralement, politiquement, diplomatiquement, mais aussi physiquement, charnellement, dans la chair même de ses propres citoyens. Parmi les pays étrangers à Israël, la Thaïlande, les États-Unis, le Népal et l'Argentine sont également durement touchés. De plus, 200 000 Français vivent en Israël, et la Première Ministre Élisabeth Borne pensait à eux : « Je pense tout particulièrement à nos ressortissants décédés lors des attaques et à ceux dont nous attendons encore des nouvelles. Je pense aussi à la communauté française d’Israël et aux Franco-israéliens. Leur situation est éprouvante. Nous sommes mobilisés et nous sommes avec eux. Je le dis sans ambiguïté : toujours la France défend la démocratie ; rien n’excuse ni le terrorisme ni la barbarie. Comme l’a affirmé dès samedi le Président de la République, nous sommes aux côtés du peuple israélien dans l’épreuve qu’il subit. ».

Cette attaque sans précédent de toute l'histoire d'Israël ne peut malheureusement pas rester sans réponse de la part de l'État d'Israël. Pris en faiblesse, il ne peut pas ne pas réagir et cette réaction, qui s'effectue actuellement, a provoqué et va provoquer encore des victimes et de la souffrance sur la Bande de Gaza. Élisabeth Borne, qui s'exprimait sur le sujet au début de la séance du mardi 10 octobre 2023 à l'Assemblée Nationale, le reconnaissait : « Ne nous trompons pas sur ce qui vient de se passer : l’ampleur de l’opération, mais aussi sa complexité et son exécution, montrent que nous faisons face un changement d’échelle. Cette barbarie et ce niveau de violence inimaginable nous rappellent les pires moments de notre combat contre l’État islamique. (…) Dans ces heures graves, la responsabilité doit guider notre action. Notre message est clair, le Président de la République l’a rappelé ce matin : (…) nous nous tenons aux côtés d’Israël et sa population et les assurons de notre soutien total. Face au terrorisme et à la barbarie des attaques terroristes, ils ont le droit de se défendre : personne ne peut leur dénier ce droit. ».

Ce qui s'est passé ces derniers jours en Israël, c'est l'équivalent des attentats du World Trade Center aux États-Unis, c'est l'équivalent aussi des attentats qui ont endeuillé la France et les Français ces dernières années, ceux de "Charlie Hebdo" en janvier 2015, ceux de Paris le 13 novembre 2015, celui de Nice le 14 juillet 2016... Les terroristes s'en sont pris à des personnes innocentes, civiles, parfois étrangères, qui ne faisaient que vivre, parfois s'amusaient, se détendaient.

Oui, comme l'a expliqué (voir plus haut) le député Meyer Habib (LR), représentant des Français en Israël, au cours de la séance de questions au gouvernement du 10 octobre 2023, ce qui est en jeu est bien notre mode de vie, notre art de vivre. Le Hamas n'a pas seulement une ambition palestinienne, il s'agit de remettre en cause notre manière de manière. La description d'Élisabeth Borne était d'ailleurs très parcellaire : « Ce samedi 7 octobre, l’horreur s’est abattue sur plusieurs villes d’Israël. Quelques heures plus tard, nous allions découvrir l’ampleur, la gravité et la barbarie de l’attaque terroriste commise par le Hamas : des tirs de roquettes massifs visant des civils ; des femmes, des hommes, des personnes âgées, des enfants exhibés, humiliés, pris en otage, tués. Ces images ont été un choc, elles étaient probablement encore en deçà de la réalité. ».

Nous avons été presque surpris, en tout cas rassurés de voir le monde en entier en communion avec les Français lors des attentats de "Charlie Hebdo", cette gigantesque manifestation du 11 janvier 2015, pas seulement celle du peuple mais aussi celle des principaux chefs d'État et de gouvernement du monde. C'était émouvant et c'était le signe que le monde était conscient du danger global qui le guettait. Au même titre que la quasi-totalité des pays du monde (et la Russie de Vladimir Poutine en premier lieu !) avait communié avec le peuple américain après l'horreur du 11 septembre 2001.

C'est pour cette raison que le monde entier doit exprimer sa solidarité envers Israël. Ne pas le faire est montrer son véritable visage. En France, les partis politiques sont au pied du mur. Tous les partis représentés au Parlement ont montré leurs valeurs républicaines... sauf un ! FI a refusé de qualifier le Hamas d'organisation terroriste (les enragés de FI préfèrent parler de "résistants") et, surtout, FI a excusé les actes absolument odieux de ce week-end.

Or, rien ne peut justifier cette barbarie. C'est comme si des responsables politiques de pays étranger expliquaient, après les attentats de Paris, que la France avait conduit une mauvaise politique vis-à-vis des ?? (je ne sais pas, des musulmans ?) et que les victimes françaises des attentats méritaient d'avoir été massacrées. D'autres ont aussi osé dire que les festivaliers qui faisaient la fête à deux pas de la frontière de Gaza étaient inconscients, aveugles du danger, comme si leur massacre était de leur faute, qu'ils l'avaient bien cherché, comme certains pouvaient dire encore récemment (c'est plus dur maintenant) qu'une jeune fille violée l'avait bien cherché parce qu'elle portait une mini-jupe.

Ces réactions d'inhumanité placent ces responsables politiques hors du champ des valeurs républicaines. Pour FI, l'affaire est donc très claire, et il faut souligner par exemple la réaction d'un député socialiste de l'Essonne, Jérôme Guedj, qui était, dans ce département à la fin des années 1990, un petit protégé politique de l'ancien sénateur et premier vice-président du conseil général Jean-Luc Mélenchon, qui a condamné très fermement la position de son ancien mentor (à la limite de l'ingratitude).

À côté de cela, des journalistes pro-palestiniens se sont enfermés dans leur idéologie, piégés par leurs habitudes rhétoriques. Ainsi, Daniel Schneidermann, dont l'observation acide (et lucide) des médias en faisait un être éclairé prêt à s'exprimer contre sa propre chapelle, en est venu à pinailler sur les mots "civils" que les médias attribueraient volontiers aux victimes israéliennes et moins volontiers aux victimes gazaouies, ou même, ce mercredi 11 octobre 2023, sur le nombre, l'âge et la manière dont seraient morts des bébés (décapités ?) dans le kibboutz de Kfar Aza, mais lui-même le reconnaît : « Morts ? Vivants ? Égorgés ? Éventrés ? Décapités ? Et combien ? Vingt ? Trente ? Quarante ? Davantage ? Poser ces questions, en sachant leur caractère dérisoire. Comme si trente ou vingt bébés massacrés, ce n'était exactement pas la même horreur que quarante. ».

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Depuis le début de la semaine, des dizaines d'actes antisémites ont été répertoriés en France. La situation est donc tendue et jamais le conflit israélo-palestinien n'a été aussi prégnant dans le débat politique en France. Selon les vœux de la Présidente de l'Assemblée Nationale Yaël Braun-Pivet, tous les groupes politiques ont pu s'exprimer au début de la séance des questions au gouvernement du 10 octobre 2023, à grands renforts de Jean-Paul Sartre et Albert Camus, avec une réponse globale de la Première Ministre. Cela a permis de bien prendre la mesure de la clarification qui se fait dans le paysage politique français. Les orateurs étaient principalement le président de chaque groupe, sauf pour LR et le PS où c'était le chef du parti qui s'est exprimé. En voici quelques extraits significatifs.

Éric Ciotti (Les Républicains) : « Des massacres de civils ont été perpétrés, des vieillards ont été traqués jusque dans leur domicile, des enfants ont été kidnappés, des femmes ont été violées et les terroristes du Hamas qui ont commis ces exactions menacent maintenant d’assassiner les otages. (…) Notre réaction doit être celle de tous les républicains attachés à la liberté : nous devons condamner sans réserve les terroristes et soutenir totalement Israël en lui exprimant notre fraternité et notre humanité commune. Au-delà de l’affirmation de notre soutien et de l’expression de notre émotion, il est également important de réagir, madame la Première Ministre. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains a déposé une proposition de résolution visant à la suspension de l’aide publique au développement française en Cisjordanie et dans la bande de Gaza : nous ne pouvons plus accorder de financements publics à ceux qui soutiennent ou financent le terrorisme ! (…) Il faut couper toute aide au développement à ceux qui soutiennent le terrorisme. ».

Mathilde Panot (FI) : « Nos pensées se tournent à cette heure vers le Proche-Orient, où les peuples israélien et palestinien souffrent, encore une fois. (…) Nous condamnons tous ces crimes de guerre. Un seul message doit parvenir du concert des nations en cette heure si grave, nullement propice aux polémiques franco-françaises : cessez-le-feu ! Tel est le message du Secrétaire Général des Nations Unies, celui du pape et celui de Lula, dont le pays préside actuellement le Conseil de Sécurité des Nations Unies. (…) Cela fait trop longtemps que la communauté internationale laisse la situation s’envenimer. (…) Il nous faut œuvrer au rétablissement d’un processus de paix qui mène à deux États, sans quoi les horreurs passées s’amplifieront non seulement des atrocités présentes, mais aussi des désastres à venir. (…) Aucune paix durable ne peut voir le jour sans respect du droit international ni sans qu’il ne soit mis fin à la colonisation. Madame la Première Ministre, retrouverez-vous la voix indépendante portée par la France de Charles De Gaulle à Jacques Chirac, cette voix d’une France qui est écoutée quand elle parle, cette voix qui fait entendre la parole de la paix et qui ne s’aligne pas sur les positions va-t-en-guerre d’un gouvernement d’extrême droite, cette voix qui réaffirme que toutes les vies comptent sans exception ? ».

Cette intervention de la chef des insoumis a été beaucoup chahutée par les autres députés, car elle évacuait rapidement les victimes du Hamas et les mettait au même niveau que les victimes de la riposte israélienne. Ainsi, François Cormier-Bouligeon (Renaissance) : « Condamnez le Hamas clairement ! », puis : « Ça suffit, vous êtes la honte de cette assemblée ! ». Un autre député de Renaissance : « Indigne ! ». Bruno Millienne (MoDem) : « C'est honteux, madame Panot ! ». Rémy Rebeyrotte (Renaissance) : « Vous êtes complices du Hamas ! ».

Sylvain Maillard (Renaissance) : « Certains voudraient créer ce climat de terreur sur notre sol, alors qu’une vingtaine d’attaques antisémites ont été relevées en deux jours. Il est du devoir de la représentation nationale de dénoncer avec force ces actes de haine qui sapent nos principes. Toucher à un citoyen juif, c’est toucher à la République. Dans ce combat commun des démocraties contre la terreur, la complaisance aveugle et l’ambiguïté coupable sont intolérables, car rien, absolument rien, ne justifie le terrorisme. ».

Marine Le Pen (RN) : « Ce 7 octobre 2023, nous avons assisté à ce que nous pensions ne plus jamais revoir dans l’histoire de l’humanité : des pogroms, des pogroms sur la terre même d’Israël, au cours desquels on a tué des femmes, des enfants, des hommes, uniquement parce qu’ils étaient juifs. Ces attaques sont un crime contre les humains mais aussi un crime contre la paix, contre cet extraordinaire et lent processus qui, ces derniers mois, semblait progresser et rapprocher Israël et les nations arabes. Nous, Français, avons revécu avec effroi les horreurs du Bataclan ou les tueries d’enfants de Mohamed Merah. Les scènes, d’une violence inouïe, contre des civils ou des militaires blessés ou tués, les prises d’otages, dont des personnes âgées et des enfants, sont d’une inhumanité rare. Je tiens à affirmer que ceux qui soutiennent l’insoutenable, l’excusent ou le relativisent, et dont certains siègent sur ces bancs, attentent aux valeurs humaines. Ils en répondront politiquement, y compris vis-à-vis de leurs alliés, et le cas échéant devant la justice. Je réaffirme solennellement notre soutien au peuple israélien frappé au cœur, aux familles touchées dans leur chair et à tous ceux qui souffrent dans leur âme de ces abominations. (…) Si, sur le plan physique, le gouvernement a annoncé le déploiement de forces de l’ordre, sur le plan moral, comment comptez-vous faire respecter en France l’interdiction de l’apologie du terrorisme, première étape dans la lutte contre l’islamisme ? ».

C'est malheureux à dire, mais il faut bien reconnaître que l'intervention de Marine Le Pen a été excellente, d'autant plus excellente qu'elle n'a pas voulu en rajouter avec l'immigration comme souvent, c'était le cas avec le terrorisme islamique. Elle a même été applaudie par le groupe LR, c'était la première fois !, lorsqu'elle a fustigé ceux qui relativisaient l'horreur (suivez mon regard).

Olivier Faure (PS) : « Le massacre de jeunes à une rave party, l’exécution de bébés, de vieillards, d’innocents, le kidnapping d’otages, y compris d’enfants, n’est pas un acte de résistance, mais un crime terroriste. Les actes du Hamas doivent être condamnés, comme leur projet politique, qui n’est pas la paix et qui exclut toute coexistence avec l’État d’Israël. Notre condamnation est totale. Le terrorisme n’est pas un moyen d’expression. Aucune cause ne le justifie. Aucun contexte ne l’excuse. La fin ne justifie jamais les moyens. (…) Chacun le sait, l’embrasement est désormais possible. Un scénario du pire s’écrit sous nos yeux. La tentation du chaos existe. Elle est portée par tous ceux qui, du Hamas à l’extrême droite israélienne, ont tout fait pour tuer les accords d’Oslo. La riposte ne peut donc pas être la vengeance aveugle. Notre soutien à Israël, comme à toute démocratie frappée par le terrorisme, est indéfectible dans les limites du droit international. Le droit humanitaire doit être respecté. Le siège de Gaza n’est pas acceptable. ».

Laurent Marcangeli (Horizons) : « Le 7 octobre 2023 restera dans l’histoire comme un jour où le genre humain a montré sa face la plus sombre. Le Hamas a lancé une attaque organisée, coordonnée, visant à prendre le maximum de civils israéliens en otage, quand ils n’étaient pas sommairement exécutés, chez eux, parfois par familles entières. Ce ne sont pas des crimes de guerre, une qualification qui s’applique uniquement à des actes commis par une armée régulière. Ici, les méthodes employées ont changé de nature et de degré. Elles sont désormais comparables à ce que l’État islamique a pu faire de pire. (…) La vérité est que la cause palestinienne mérite mieux qu’une organisation islamiste terroriste qui n’hésite pas à prendre des populations civiles, qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes, comme boucliers humains. Plus personne n’ignore que le but ultime du Hamas n’est pas la paix, mais bien la destruction pure et simple de l’État d’Israël. ».

Cyrielle Chatelain (EELV) : « Notre solidarité est totale. Les Israéliens ont le droit absolu de vivre en sécurité. Les écologistes condamnent sans réserve les atrocités commises par les terroristes du Hamas. Aucune lutte ne justifie des tirs de roquettes contre un hôpital. Aucune cause ne justifie la prise d’otages et l’assassinat de civils. Aucun acte de résistance ne justifie le massacre de 260 festivaliers. Les écologistes ne seront jamais du côté de celles et ceux qui sèment la terreur et la mort. (…) Aujourd’hui, les bombardements incessants de Gaza et l’instauration d’un siège total privant 2,3 millions de Gazaouis d’eau, de nourriture et d’électricité nous alarment au plus haut point. (…) Le gouvernement français ne peut se contenter d’apporter un soutien aveugle au gouvernement israélien. La France doit réaffirmer sa position historique pour la coexistence de deux États vivant en paix et en sécurité. Les Palestiniens ont le droit absolu de vivre libres dans un état souverain. ».

Comme pour FI, les écologistes ont mis sur le même plan la sécurité d'Israël et la sécurité de Gaza. Même si le soutien à Israël ne fait pas défaut, c'est le début d'un relativisme qui est très proche de celui des insoumis.

Jean-Paul Mattei (MoDem) : « "Quelle que soit la cause que l’on défend, elle sera toujours déshonorée par le massacre aveugle d’une foule innocente, où le tueur sait d’avance qu’il atteindra la femme et l’enfant", écrivait Albert Camus. Depuis samedi dernier, les populations civiles israéliennes sont victimes d’une attaque terroriste massive et sans précédent de la part du Hamas, qui a causé l’effroi dans la population israélienne. (…) Cette violence nous indigne, nous bouleverse profondément et ne peut laisser place à aucune ambiguïté d’interprétation quant aux motivations de ce groupe terroriste. Face à ces crimes, nous ne pouvons rester silencieux ou, pire, indulgents. Je veux le dire simplement : aucune lutte ne justifie le terrorisme. Aucun conflit territorial n’explique ces horreurs. Au-delà des communautés, c’est bien la dignité et l’humanité qui sont attaquées. ».

Bertrand Pancher (LIOT) : « C’est avec la plus grande fermeté que nous les condamnons, sans aucune réserve. Quelles que soient les causes de leurs actions, les humains ne peuvent en arriver à de tels niveaux d’atrocité contre leurs semblables. Les assassinats et les prises d’otage d’enfants, d’adultes, de femmes ou de personnes âgées sont des actes monstrueux. Nous apportons toute notre solidarité aux familles et aux proches des victimes, des disparus et des otages du Hamas, qui sont pris dans un chantage odieux. Loin de toute querelle politicienne, la représentation française et les responsables politiques que nous sommes doivent s’exprimer avec responsabilité et dignité. Face à un conflit d’une telle complexité, les prises de position sans aucune nuance, qui versent dans la surenchère, et celles cherchant des excuses ou appelant à la vengeance, ne sont décemment pas acceptables. Nul, ici, ne peut régler ses comptes avec d’autres, car ce serait une offense aux victimes et à tous ceux qui continuent de souffrir, ceux qui sont dans l’angoisse d’un enfant ou d’un parent disparu et qui craignent pour leur vie. Je le dis avec solennité : il est essentiel que nous donnions collectivement de l’hémicycle une autre image que celle que nous renvoyons parfois. ».

André Chassaigne (PCF) : « Les députés communistes ont condamné sans réserve l’attaque terroriste perpétrée par le Hamas sur les civils israéliens. Comme tous ici, nous avons exprimé notre plus profonde émotion face à la violence aveugle qui s’est déchaînée sur des femmes, des enfants, des vieillards. Une condamnation s’impose, mais elle ne suffira pas à mettre fin aux violences, à protéger les populations et à trouver le chemin de la paix et de la sécurité. Aujourd’hui, Gaza est sous le feu des bombes, privée d’eau et d’électricité. (…) Une vengeance terrifiante qui s’abat, là encore, sur des femmes, des enfants, des vieillards, des millions de civils innocents. Madame la Première Ministre, la France doit aussi condamner cette opération vengeresse qui plongera un peu plus encore les peuples israélien et palestinien dans le désespoir et le deuil. Elle doit lancer une initiative diplomatique forte pour imposer le respect du droit et mettre fin à soixante-quinze ans de duplicité de la communauté internationale sur la question palestinienne. ».

Là encore, comme pour FI et EELV, l'intervention du représentant des députés communistes a été critiquée car elle plaçait sur le même plan l'horreur commise par le Hamas et la réaction de l'État d'Israël à Gaza, en insistant plus sur ce dernier point. Éric Ciotti s'est permis d'ailleurs de dire : « Avec la gauche, il y a toujours un "mais" ! ». Jean-Pierre Taite (LR) : « Ce ne sont pas vos femmes qui sont violées, ni vos enfants qui sont assassinés ! ». Et la députée Yaël Ménache (RN) : « C'est du clientélisme ! C'est une honte ! ».

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Au moins, il y a eu clarification dans la classe politique devant les citoyens français. Aux partenaires des insoumis dans la Nupes de prendre maintenant leurs responsabilités pour rompre définitivement avec Jean-Luc Mélenchon ou alors pour assumer clairement son islamo-gauchisme : les socialistes, les communistes, les écologistes sont désormais le dos au mur et leurs électeurs les observent avec beaucoup d'attente.

Quant au gouvernement, la Première Ministre Élisabeth Borne a tenu à apporter précision et confirmation de sa politique dans une réponse globale aux orateurs précédents : « Mesdames et messieurs les députés, je veux également être claire sur un point : la France a toujours été l’artisan de la paix, et elle le reste. Malgré l’horreur des événements, ces violences injustifiables ne doivent pas nous détourner de la recherche d’une paix durable au Moyen-Orient et d’une solution politique dans le conflit israélo-palestinien. Le Hamas ne cherche pas à répondre à ces aspirations : il a démontré que son seul objectif était de faire couler le sang. Dans ce contexte, je n’ignore pas les interrogations sur notre aide humanitaire. Sachez qu’elle est versée à des organismes de l’ONU sur place, qui agissent directement pour assurer l’accès à l’eau, la sécurité alimentaire, la santé ou l’éducation. Nous sommes particulièrement vigilants à ce que pas un euro d’aide française ne parvienne à une organisation terroriste, quelle qu’elle soit, ni à Gaza, ni ailleurs. Israël, un pays ami et allié, vit un traumatisme terrible, qui nous replonge cinquante ans en arrière. Notre devoir est d’être aux côtés de la démocratie, de dénoncer sans relâche le terrorisme, de tout mettre en œuvre pour trouver le chemin de la paix grâce à la diplomatie. Ce chemin sera très long, mais nous ne pouvons pas baisser les bras : la France tiendra sa place et fera tout pour trouver une solution politique et mettre fin à ce conflit territorial qui dure depuis des décennies. Dans ces moments tragiques, je trouve choquant et désolant d’entendre des voix dissonantes, jusque sur les bancs de cet hémicycle : c’est par la cohésion nationale et la défense de nos valeurs républicaines que nous pourrons être à la hauteur. ».

En répondant à une autre question, celle de Meyer Habib, Élisabeth Borne a ajouté, notamment sur l'antisémitisme en France : « Je l’ai dit, la première chose qui nous vient à l’esprit, c’est l’horreur : l’horreur du terrorisme, l’horreur des témoignages, l’horreur face à des hommes, des femmes, des enfants massacrés, des hommes, des femmes et des enfants enlevés, dont des fillettes de 4 ans. Le Hamas, groupe terroriste, a agi pour terroriser la population israélienne. Face à ces drames, nous sommes aux côtés d’Israël et du peuple israélien. Israël a droit à la sécurité, droit de se défendre. Rien ne peut excuser le terrorisme. (…) Vous connaissez mon engagement et celui de mon gouvernement dans la lutte contre l’antisémitisme. Aucune ambiguïté n’est possible. J’ai déjà eu l’occasion de le dire : aucun acte ou propos antisémite n’est acceptable. Nous ne les tolérerons ni dans les cortèges, ni sur les réseaux sociaux. Je veux rassurer tous les Juifs de France : nous les protégeons. C’est l’engagement du gouvernement, c’est le devoir de la République. ».

Enfin, le Ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a rappelé ce que risquaient les auteurs d'expression antisémite notamment sur Internet : « Ce qui a frappé Israël samedi dernier, c’est le terrorisme. Derrière ce mot se cache un coupable, le Hamas. L’Union Européenne a dit très clairement que le Hamas était un groupe terroriste. Il n’y a aucune ambiguïté sur cette question. Je veux rappeler que notre pays souffre encore des stigmates de l’attentat du 13 novembre. Certains ont préconisé que le Hamas et les représentants d’Israël se mettent autour d’une table. C’est comme si en 2015, on avait demandé au gouvernement de la France de s’installer autour d’une table avec Daech. (…) La démonstration de soutien à un groupe terroriste, l’apologie du terrorisme, sont des infractions ! Les auteurs de messages incitant à porter un jugement favorable sur le Hamas ou le djihad islamique encourent cinq ans d’emprisonnement. S’ils diffusent leurs discours de provocation sur les réseaux sociaux, ils encourent non plus cinq ans, mais sept ans d’emprisonnement ! Dès samedi, j’ai demandé aux procureurs de la République et aux procureurs généraux, en lien avec les attentats perpétrés en Israël, de poursuivre les auteurs de telles infractions. Dix enquêtes sont en cours. J’ai également signé, il y a quelques minutes, une circulaire demandant un traitement immédiat, ferme et systématique de toutes ces infractions. Le terrorisme n’a rien à voir ici, son apologie non plus ! ».


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (11 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Terreur Al-Aqsa : Israël en guerre contre son agresseur, le Hamas.
Les Accords d'Oslo.
Shimon Peres.

Le retour au pouvoir de Benjamin Netanyahou après sa nouvelle victoire.
Emmanuel Macron à Pithiviers en 2022.
Covid-19 : comprendre la situation épidémique en Israël.
Covid-19 : la France plus vaccinée qu’Israël.
Naftali Bennett, Premier Ministre d’Israël à la place de Benyamin Netanyahou.
Israël 2020 : Benyamin Netanyahou vs Benny Gantz (3e round).
Benyamin Netanyahou a 70 ans.
Les élections législatives israéliennes du 17 septembre 2019.
Poisons et délices de la proportionnelle.
Les enjeux des élections législatives israéliennes du 9 avril 2019.
Golda Meir.
La lutte contre l’antisémitisme est l’affaire de tous !
Les Accords de Camp David.
La naissance de l’État d’Israël.
Massacre à Gaza.
Tentative de paix en 1996.
Un géant à Jérusalem.
L'un des derniers Sages d'Israël.
Israël est une démocratie.
Yitzhak Rabin.
Le Président Peres.
Ariel Sharon.
Ehud Olmert.
Benyamin Netanyahou III.
Yasser Arafat.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231010-france-israel.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/horreur-totale-en-israel-emotion-250874

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/10/10/40069903.html





 

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30 septembre 2023 6 30 /09 /septembre /2023 05:16

« L’ensemble de la gauche progresse sensiblement en sièges, avec un solde positif d’au moins 9 sièges. Cette progression s’effectue pour l’essentiel au profit des écologistes (+5). » (Pierre Martin, politologue grenoblois, Telos le 29 septembre 2023).




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Comme souvent dans des élections multiples, il est très compliqué de dresser des tendances générales alors que des considérations locales et aussi personnelles sont prégnantes. Néanmoins, on peut écrire que le Sénat renouvelé de moitié lors des élections sénatoriales du 24 septembre 2023 est un peu plus à gauche et un peu plus écologiste, mais à peine. C'était prévisible et attendu après la forte progression des écolos bobos dans les grandes agglomérations aux élections municipales de 2020.

Il est encore difficile de donner la composition exacte des différents groupes politiques (il y en a huit) parce que beaucoup d'élus se sont présentés devant leurs grands électeurs comme des divers droite, divers centre ou divers gauche, ou encore, des élus d'outre-mer choisissent leur groupe de manière parfois singulière (les indépendantistes vont chez les communistes, par exemple).

Les socialistes (présidés par l'ancien ministre Patrice Kanner réélu) devrait progresser légèrement, tandis que les écologistes (présidés par Guillaume Gontard réélu) devrait bondir de 12 à 17 sièges. Parmi les nouveaux élus EELV, une jeune femme, Mathilde Ollivier, née le 9 juin 1994, donc elle a 29 ans, elle est la plus jeune élue de ce scrutin, aussi la benjamine du Sénat. Elle est plus jeune de quelques mois que le socialiste Rémi Cardon, mais elle n'est pas la plus jeune élue de l'histoire puisque ce dernier, qui garde le record de jeunesse, a été élu il y a trois ans, donc à 26 ans, et encore auparavant, David Rachline avait aussi obtenu un siège à 26 ans dans le Var. Le groupe communiste (qui change de présidente, Éliane Assassi ne s'étant pas représentée, est remplacée par Cécile Cukierman réélue) a aussi obtenu un ou deux sièges supplémentaires.

Au centre droit, le groupe Les Républicains (présidé par Bruno Retailleau) a perdu quelques sièges mais garde son hégémonie sur la haute assemblée et son allié aussi, l'Union centriste (présidée par Hervé Marseille réélu) dont les effectifs se sont légèrement effrités.

L'intéressant est dans les divers centre et surtout, les divers de la majorité présidentielle qui se répartissent dans plusieurs groupes. Il y a le groupe de Renaissance, appelé RDPI, présidé par François Patriat, qui a perdu quelques sièges, mais le solde de la majorité est positif grâce aux bons scores des candidats de Horizons qui vont dans le groupe présidé par Claude Malhuret (LIRT). Il faut dire que le parti de l'ancien Premier Ministre, très populaire, Édouard Philippe est principalement structuré par des maires, et il était donc normal qu'il fît un bon score aux sénatoriales dont 95% des grands électeurs proviennent des municipalités. Le MoDem a gagné en sièges (le MoDem siège à l'Union centriste) et l'ancienne ministre radicale de gauche Annick Girardin a été élue à Saint-Pierre-et-Miquelon et siège, comme tous les radicaux, au groupe RDSE (ancienne Gauche démocratique). On voit que les partis de la majorité restent ultra-minoritaires au Sénat, mais ils font bon compagnonnage avec la majorité sénatoriale.

De plus, il est logique qu'un nouveau parti mette beaucoup de temps à s'imposer au Sénat, les gaullistes ont mis quarante ans pour avoir l'un des leurs au plateau, Christian Poncelet, et pour Renaissance, ça risque d'être plus long encore vu l'absence récurrente d'implantation locale. À noter également l'échec étonnant de la seule ministre candidate à ces élections, Sonia Backès, Secrétaire d'État chargée de la citoyenneté, dont l'échec en Nouvelle-Calédonie a surpris, elle aurait dû être élue au second tour si on se fiait aux rapports de force, et pour la première fois, un candidat indépendantiste a été élu. Elle a donné sa démission du gouvernement le 27 septembre 2023. Une autre mauvaise surprise pour Renaissance est l'échec de l'ancien ministre rocardien Alain Richard qui se représentait dans le Val-d'Oise (par erreur, j'avais affirmé qu'il ne se représentait pas) et qui a été battu.

Quant aux extrêmes, que le scrutin n'avantage pas, il y a aussi des surprises. Les mélenchonistes font rarement plus de 3% dans quasiment tous les départements, ils ont fait des listes isolées face aux listes de gauche unifiée. Ce n'était pas une surprise, en revanche, le RN a réussi à gagner 3 sièges en réussissant à dépasser les 10% des voix dans trois départements peuplés (Nord, Pas-de-Calais et Seine-et-Marne). Ce qui est instructif, c'est que le RN avait perdu du terrain aux élections municipales de 2020 et donc, au contraire des écologistes, les sièges gagnés ne s'expliquent pas par les élections municipales, mais simplement par des digues qui ont sauté auprès des élus ruraux souvent apolitiques qui ont voté pour le RN plus volontiers que dans les scrutins précédents. Cela marque une nouvelle étape du RN tant dans son implantation locale que dans la respectabilité politique qu'il inspire. Rappelons qu'en 2014, le RN avait étonné la classe politique avec l'élection de 2 sénateurs. Quant à l'unique sénateur zemmourien, Sébastien Meurant (ex-LR), il a été battu car il n'a pas réussi à convaincre ses grands électeurs de son virage à Reconquête.

Un petit mot de la situation de la droite parisienne : LR profondément divisé, c'est la liste soutenue par Rachida Dati qui a gagné la préférence des grands électeurs. Pierre Charon, sénateur sortant sarkoziste, a été ainsi battu. Dans la majorité, Julien Bargeton, qui avait des vues sur la mairie de Paris, a lui aussi été battu, tandis que la gauche s'est profondément renouvelée (au profit de personnalités nationales).

En termes de partis répertoriés par le Ministère de l'Intérieur, ce qui ne préjuge pas de la répartition entre les groupes politiques, les 170 sièges renouvelables sont désormais occupés par 47 LR, 33 PS, 16 divers droite, 13 UDI, 12 divers centre, 11 PCF, 10 divers gauche, 7 EELV, 7 Horizons, 4 Renaissance, 3 RN, 3 radicaux de gauche et 1 régionaliste (soit un total de 167).

Parmi les sénateurs réélus, on peut citer : Gérard Larcher, Philippe Bas, Marc-Philippe Daubresse, Vincent Delahaye, Laure Darcos, Patrick Kanner, Jean-Marie Vanlerenberghe, Guillaume Gontard, Cécile Cukierman, Michel Savin, Ronan Dantec, Joël Guerriau, Jean-François Husson, Olivier Henno, Vincent Capo-Canellas, Muriel Jourda, Béatrice Gosselin, Jean-Raymond Hugonet, Édouard Courtial, Nathalie Goulet, Laurence Rossignol, Bernard Jomier, Rémi Féraud, Marie-Pierre de La Gontrie, Vincent Éblé, Jocelyne Guidez, Roger Karoutchi, Hervé Marseille, Xavier Iacovelli, Fabien Gay, Lauren Lafon, Rachid Temal, Victorin Lurel, Hélène Conway-Mouret.

Et parmi les sénateurs élus : Annick Girardin, David Ros, Olivier Bitz, Francis Szpiner, Yannick Jadot, Ian Brossat, Louis Vogel, Marie-Do Aeschlimann, Isabelle Florennes, Annick Girardin, Mathilde Ollivier, Christopher Szczurek.

Parmi les sénateurs sortants battus : Alain Richard, Pierre Charon, Daphné Ract-Madoux, Julien Bargeton, Sébastien Meurant.

Parmi les candidats battus : Sonia Backès, Patrice Perrot (député Renaissance de la Nièvre).

Enfin, parmi les sénateurs qui ne se représentaient pas : Gérard Longuet, Valérie Létard, Jean-Pierre Sueur, André Vallini, Jean-Louis Masson, Éliane Assassi, David Assouline, Marie-Noëlle Lienemann, Pierre Laurent, Esther Benbassa, Céline Boulay-Espéronnier, Philippe Dominati.

Le Sénat ainsi renouvelé compte désormais 126 femmes (10 femmes en plus), soit 36,2% des 348 membres, ce qui est sans précédent dans l'histoire du Sénat, même s'il y a encore une grande marge de progression pour atteindre la parité arithmétique.

La prise de fonction des sénateurs élus le 24 septembre 2023 a lieu ce lundi 2 octobre 2023 avec comme premier exercice, l'élection du Président du Sénat pour trois ans. Dans les circonstances actuelles, avec une majorité sénatoriales d'au moins 190 sénateurs sur 378, Gérard Larcher, qui a été réélu dans les Yvelines, a tous les atouts pour rempiler jusqu'en 2026 au plateau, nom du lieu où il préside.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (29 septembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Sénatoriales 2023 (3) : les résultats.
Sénatoriales 2023 (2) : les enjeux.
Sénatoriales 2023 (1) : présentation.
Gérard Larcher réélu Président du Sénat en 2020.
Les élections sénatoriales du 27 septembre 2020.
L’Assemblée Nationale en ordre de bataille pour la XVIe Législature.
Les élections législatives des 14 et 21 juin 2022.
L'élection présidentielle des 10 et 24 avril 2022.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230924-senatoriales-2023c.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/senatoriales-2023-3-les-resultats-250579

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/09/24/40052177.html




 

 

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18 septembre 2023 1 18 /09 /septembre /2023 05:36

« La France gouvernée par une assemblée unique ; c’est-à-dire l’océan gouverné par l’ouragan. » (Victor Hugo, le 4 novembre 1848).




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Si, ces dernières semaines, vous avez croisé un ou plusieurs sénateurs au forum des associations de votre commune, quand vous avez inscrit votre enfant à un club de gym ou à un atelier de dessin, ou à l'inauguration du nouveau terrain de boules, ou lors d'autre événement mondial d'importance locale, c'est normal ! Dans la moitié des départements, il y a des élections sénatoriales qui se dérouleront ce dimanche 24 septembre 2023. Cela se passe en général à la préfecture ou dans un autre bâtiment public (cité judiciaire, etc.) du chef-lieu du département concerné.

En général, on voit rarement les sénateurs dans les manifestations très locales, même s'il y a des heureuses exceptions (je connais une sénatrice qui, hors période électorale, vient même un dimanche à 17 heures remettre le prix du meilleur artiste communal, et encore, elle avait encore une autre réunion dans une autre ville du département une heure plus tard). Un mandat parlementaire est très chronophage parce qu'il est à la fois un élu national (il fait les lois, il contrôle le gouvernement, ce sont les deux axes centraux d'un régime parlementaire) et un élu local qui doit rencontrer les élus et les habitants de son département, de sa circonscription, etc.

Et n'allez pas croire que la réputation des sénateurs de ne rien faire est justifiée. Il fut une époque où certains pouvaient se le permettre, six mois de campagne pour neuf ans de mandat avec des grands électeurs au mandat quasi-impératif, selon la consigne politique des maires de leur commune. Maintenant, c'est six ans (depuis la loi organique du 30 juillet 2003), ce qui est sain pour la démocratie, pour respirer, elle doit se renouveler fréquemment, et les maires ont plus de mal à donner des consignes, les grands électeurs, de moins en moins politisés, préfèrent maintenant réfléchir par eux-mêmes, ce qui est également très sain et peut amener à quelques surprises dans certains départements.

Au contraire de l'Assemblée Nationale qui est une assemblée très politique pour ne pas dire politicienne, car les députés sont directement élus par les citoyens, investis par les partis politiques et leur importance sur les sénateurs est constitutionnellement indéniable puisqu'ils ont toujours le dernier mot dans la confection des lois, le Sénat est une chambre beaucoup plus feutrée, très indépendante des partis (très jalouse de cette indépendance) et qui travaille plus efficacement pour la société parce que les sénateurs ne sont pas tributaires des modes, des sondages, de l'esprit du temps et surtout, des postures politiciennes souvent stériles. Les députés, c'est l'unité de temps, c'est du court terme, c'est l'immédiateté, c'est de la posture, c'est de la politique politicienne ; les sénateurs, c'est l'unité de lieu, c'est du long terme, c'est de la réflexion, c'est de la prospective. Pas étonnant que le roi Charles III s'adresse aux sénateurs ce jeudi 21 septembre 2023.

Le Sénat s'est ainsi ouvert beaucoup plus tôt que les députés aux forces vives de la nation, aux apprentis, aux enseignants, aux scientifiques, aux innovateurs, aux entrepreneurs, aux investisseurs (business angels) au cours d'événements annuels qui, depuis plusieurs décennies, sont devenus des rendez-vous nationaux voire internationaux très attendus. C'est aussi au sein de cette assemblée que sont construites les lois les moins clivantes, celles qui voient à long terme (par exemple, les premières lois de bioéthique), c'est au sein de cette assemblée que l'action du gouvernement est la mieux contrôlée (on a pu s'en apercevoir dans les enquêtes sur l'affaire Benalla, par exemple), parce que les sénateurs, même s'ils appartiennent à la majorité gouvernementale, sont soucieux de leur indépendance et du service à leur pays avant tout.

Même Gérard Larcher, dont il faut bien dire qu'il a le look du sénateur, si on pense au tour de taille (!), n'a rien d'un élu endormi. Au contraire, au sein des institutions actuelles, il est une pièce maîtresse entre un gouvernement qu'il ne soutient pas, une majorité sénatoriale bienveillante et un pays en proie aux divisions. Vétérinaire de chevaux, ancien maire de Rambouillet, ancien ministre, Gérard Larcher a été élu pour la première fois Président du Sénat à l'âge de 59 ans, ce n'était pas un vieillard et il ne l'est toujours pas, l'esprit alerte et fin politique sous ses airs sympathiques, très présent dans les médias, probablement (je ne suis pas dans les coulisses) à l'origine du texte final de la réforme des retraites, et probable futur passeur de nouvelles lois dans une configuration où la majorité parlementaire n'est que relative et pas absolue à l'Assemblée Nationale.

On est loin du temps de l'honorable Alain Poher, au demeurant fort sympathique, qui n'existait pas dans les médias ni dans le débat public, et qui semblait gérer un EHPAD de potentats politiques en fin de carrière sinon en fin de vie. Aujourd'hui, le sénateur le plus jeune est le socialiste Rémi Cardon qui a été élu dans la Somme en septembre 2020 à l'âge de 26 ans et 4 mois, battant le record du jeune maire RN de Fréjus David Rachline, élu sénateur du Var en septembre 2014 à l'âge de 26 ans et 10 mois. On est loin d'une maison de retraite, qui plus est initialement réservée aux plus de 35 ans (maintenant, le seuil a été descendu à 24 ans).

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En 2023, les sénateurs renouvelables sont issus des départements allant dans l'ordre alphabétique du 37 (Indre-et-Loir) au 66 (Pyrénées-Orientales), des départements de la région parisienne ainsi que d'une partie des départements et territoires d'outre-mer. Le corps électoral est de plusieurs milliers de grands électeurs par département (selon l'importance démographique), principalement issus de toutes communes ainsi que les autres élus (députés, conseillers départementaux, conseillers régionaux, éventuellement membres d'assemblée territoriale).

Ce sont les délégués des conseils municipaux qui constituent la plus grande part de l'électorat (95% des grands électeurs) : généralement, ce sont les conseillers municipaux, certains seulement (pas tous) pour les communes à faible nombre d'habitants, tous les conseillers municipaux pour les autres et même, à partir d'un certaine population, des délégués supplémentaires élus spécifiquement par les conseils municipaux à la proportionnelle pour cette unique occasion. Ces grands électeurs sont désignés par les conseils municipaux au début du mois de juin. En 2023, ils sont au nombre de 162 000 (il y a donc environ un millier de grands électeurs par siège).

Par le corps électoral, les sénateurs sont indiscutablement les représentants des élus municipaux, et les résultats des élections municipales impactent grandement les résultats des élections sénatoriales, parfois avec un peu de retard. Ainsi, dans les grandes agglomérations, la gauche et les écologistes avaient obtenu de bons scores aux dernières élections municipales de 2020, ce qui a déjà eu un impact lors du renouvellement du Sénat de septembre 2020 et ce renouvellement de 2023 sera également encore impacté.

Le mode de scrutin est la proportionnelle pour tous les départements sauf pour les petits départements qui n'ont qu'un ou deux sénateurs, et dans ce dernier cas, les sénateurs sont élus au suffrage majoritaire, un peu comme les délégués de classe, au premier tour ceux qui ont reçus la majorité absolue et au second tour, à la majorité relative.

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On pourra toujours discuter de la représentativité des sénateurs, mais les constitutionnalistes l'ont voulu ainsi : les députés représentent la population, les gens, les habitants, let les sénateurs représentent les territoires, l'espace, les communes. On sait bien qu'une grande commune est surtout une commune très peuplée, elle est riche car il y a de l'activité sur son territoire. Mais inversement, il existe des communes très peu peuplées, donc pauvres, qui jouissent d'un territoire très étendu ; celles-ci aussi doivent pouvoir avoir leur mot à dire, être entendues dans la définition des lois de la République, c'est ainsi le rôle du Sénat, chambre des territoires.

On comprend ainsi pourquoi les sénateurs vont souvent à la rencontre des élus municipaux, pas seulement en période de renouvellement (la campagne des sénatoriales dure six mois ; cette année, elle a commencé le 1er mars 2023), mais aussi pour venir les aider dans leurs projets, comprendre les difficultés, relayer les demandes à un État toujours plus tentaculaire, et puis, il faut bien le dire, la plupart des sénateurs ont eu d'abord une expérience de maire ou, au moins, de conseiller municipal. L'interdiction du cumul des mandats (loi organique du 14 février 2014) n'empêche donc pas de connaître la situation réelle que vivent les élus locaux.

Pour la campagne, il faut bien comprendre qu'avant la fin des vacances estivales, les grands électeurs ont la tête ailleurs, ils sont rarement politisés (à part les élus des grandes villes), et faire campagne en quatre semaines relève du marathon sénatorial : les départements ont plusieurs centaines de communes à visiter et aller à la rencontre des élus de chaque commune du département nécessite une certaine organisation. Faites le calcul : 20 jours pour 200 communes, cela fait aller à la rencontre de 10 municipalités par jour, dimanche compris. Si vous prenez deux heures de discussion pour vous présenter, présenter vos propositions et pour échanger avec les grands électeurs, cela fait vingt heures par jour sans compter le temps de transports...

Le renouvellement du 24 septembre 2023 va faire élire 170 sénateurs sur les 378 que compte le Sénat actuellement. Sauf erreur de comptage de ma part, 51 sénateurs sortants (sur les 170) ne se représentent pas pour leur renouvellement, soit qu'ils partent à la retraite, soit qu'ils préfèrent diriger une collectivité locale, soit encore que les conditions d'une nouvelle candidature ne sont pas réunies. Parmi eux, on peut citer les anciens ministres Gérard Longuet, André Vallini, Jean-Pierre Sueur, Alain Richard, Marie-Noëlle Lienemann et Valérie Létard, et aussi Jean-Louis Masson, Céline Boulay-Espéronnier, Philippe Dominati, Pierre Laurent, David Assouline, Ester Benbassa, Arnaud de Belenet, Éliane Assassi, etc.

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Actuellement, le Sénat comporte huit groupes politiques : 145 sénateurs (dont 65 renouvelables) chez Les Républicains, 64 sénateurs socialistes (dont 33 renouvelables), 57 sénateurs (dont 29 renouvelables) de l'Union centriste, 24 sénateurs (dont 12 renouvelables) du Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (macronistes de gauche), 15 sénateurs communistes (dont 11 renouvelables), 14 sénateurs (dont 7 renouvelables) du Rassemblement démocratique et social européen (centre gauche), 14 sénateurs (dont 7 renouvelables) chez Les Indépendants – République et territoires (macronistes de droite), et enfin 12 sénateurs écologistes (dont 4 renouvelables). Il faut remarquer qu'à part les communistes (les renouvelables sont principalement de la région parisienne) et les écologistes (peu de renouvelables en 2023 car la plupart ont été élus dès 2020 avec Bordeaux, Lyon, Poitiers, Strasbourg, Marseille, etc.), il y a une homogénéité dans les deux séries de renouvellement puisque les autres groupes sont renouvelables à peu près à moitié de leurs membres.

Mais l'enjeu des élections sénatoriales de 2023 ne se situe peut-être pas exclusivement dans les rapports de forces politiques au sein du Sénat. C'est l'objet de mon prochain article.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (17 septembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Sénatoriales 2023 (2) : les enjeux.
Sénatoriales 2023 (1) : présentation.
Gérard Larcher réélu Président du Sénat en 2020.
Les élections sénatoriales du 27 septembre 2020.
L’Assemblée Nationale en ordre de bataille pour la XVIe Législature.
Les élections législatives des 14 et 21 juin 2022.
L'élection présidentielle des 10 et 24 avril 2022.

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17 septembre 2023 7 17 /09 /septembre /2023 05:55

« Trop de partis, trop d’hommes et de femmes politiques choisissent aujourd’hui de cliver, d’opposer les Français les uns aux autres, de fracturer notre pays, au moment où il a tant besoin d’unité. Nous, nous n'avons aucun adversaire dans le bloc central ; nous pouvons exprimer des désaccords mais nous n’avons aucun adversaire dans le bloc central. » (Édouard Philippe, le 15 septembre 2023 à Angers).





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À
l'occasion des journées parlementaires du parti Horizons (ainsi que de l'assemblée des maires de ce parti) réunies à Angers, ville dont le ministre Christophe Béchu a été le maire, l'ancien Premier Ministre Édouard Philippe a prononcé, ce vendredi 15 septembre 2023, un discours politique important.

Cela fait trois ans qu'il a quitté Matignon et il s'est passé beaucoup de choses depuis ce temps-là, la fin de la crise du covid-19, l'inflation, les prix de l'énergie, la guerre en Ukraine, etc. Il n'a échappé à personne qu'Édouard Philippe n'avait pas beaucoup participé à la campagne présidentielle de 2022 pour la réélection du Président Emmanuel Macron.

Parce qu'il n'est plus au pouvoir, Édouard Philippe jouit d'une extraordinaire popularité, mais le bon politique qu'il est sait bien que cette popularité n'est rien qu'une baudruche quand il faudra cueillir les voix lors d'une véritable campagne : les exemples sont nombreux, en particulier Raymond Barre, Alain Juppé, François Bayrou qui ont montré des hommes populaires sans avoir été capables de traduire cette aura dans les urnes. Il en est de même pour ceux qui, au pouvoir, ont joui d'une étonnante popularité qui ne leur a pas servis, comme Michel Rocard, Édouard Balladur et Lionel Jospin, pour les trois principaux.

Ne rien faire et ne rien dire est le meilleur moyen d'obtenir l'indulgence des futurs électeurs, mais les responsables d'État doivent aussi trancher, proposer, guider, et donc, par nécessité, prendre des risques, ceux de déplaire, choquer, heurter.

Édouard Philippe subit aussi, en deux ou trois ans, une rapide évolution... physique. Il le sait et il a toujours communiqué sur cet aspect finalement bien dérisoire mais pas invisible de sa personnalité, son look ! On pourrait dire que le pouvoir à Matignon (trois ans) l'a complètement ...défiguré, mais c'est aussi la maladie (sans conséquence heureusement) qui lui a fait changer de look. Le poil blanc, il était devenu encore il y a deux ans de ces hommes politiques du début de la Troisième République avec une barbe blanche. Finalement, le look sera sans poil ni sur le menton (ou presque) ni sur le crâne et grosses lunettes pour cacher la calvitie des sourcils (qui le défigure principalement). En d'autres termes, bien que longiligne, Édouard Philippe a maintenant des allures d'un autre chef du gouvernement fort en thème... Edgar Faure !

Mais la comparaison se limite au look (on imagine mal d'ailleurs un match Édouard Philippe vs Bernard Cazeneuve auquel il a succédé !), car sur le plan du positionnement sur l'échiquier politique, il serait plutôt une sorte de François Bayrou, c'est-à-dire un autonomiste loyaliste.

En effet, depuis presque deux ans, le maire du Havre préside son parti Horizons, qui jouit d'un groupe à l'Assemblée Nationale depuis 2022. Un parti politique de la majorité présidentielle avec ses ministres mais aussi sa singularité, et qui voudrait "capitaliser" (je n'aime pas trop ce verbe dans ce sens) aux élections européennes. Comme le MoDem, Horizons est un parti ouvertement favorable à la construction européenne, et c'est rassurant de voir qu'il en existe encore quelques-uns : « Une France souveraine et prospère sans une Europe forte, c’est une vue de l’esprit. Une Europe stable et puissante sans une France solide, c’est une chimère absolue. Être pro-européen, aujourd’hui et plus que jamais, c’est être patriote. Aimer la France, c’est vouloir l’inscrire dans une Europe qui tient la marée dans le monde où se confrontent de plus en plus les États continents que sont les États-Unis, la Chine, l’Inde et la Russie. (…) N’en déplaise aux souverainistes nostalgiques des lignes Maginot, aucun des grands défis contemporains ne respecte les frontières. Tous sont des vertiges d’envergure continentale. Les urgences climatique et sanitaire, les pressions migratoires, le numérique, la sécurité, la démographie appellent des réponses européennes. ».

Horizons était en principe un réceptacle dans anciens de LR, mais beaucoup d'anciens LR venus vers la majorité présidentielle sont carrément passés à Renaissance (ex-LREM) et d'autres sont chez Agir de Franck Riester qui n'a pas voulu fusionner avec Horizons. Quant aux autres LR, ils restent LR, principalement les députés LR actuels qui, souvent, ont été élus contre un candidat de la majorité présidentielle.

Énumérant toutes les personnalités de la majorité venues à ces journées Horizons, notamment Gabriel Attal et Sarah El Hairy, l'édile du Havre a salué Élisabeth Borne en ces termes : « Et puis il y a Élisabeth. Notre Première Ministre. Qui tient. En souriant, même lorsqu’il faut serrer les dents. En essayant d’apporter un peu du rationnel de l’ingénieur au monde politique qui en manque parfois cruellement. Élisabeth, personne dans cette salle ne sait mieux que moi combien ce que tu fais et ce que tu vis est excitant et passionnant et difficile et vertigineux et redoutable. Et tout le monde sait que tu le fais dans des conditions politiques qui sont à ce point particulières qu’elles imposent un supplément d’audace et de rigueur. À Matignon, comme je te l’ai dit dès le début, plus ça dure, moins c’est dur. Il faut s’en convaincre. Tu as tout notre soutien. ».

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Sans doute qu'Horizons, qui repose principalement sur de nombreux maires anciennement Les Républicains (comme Christian Estrosi, maire de Nice), a le vice d'un parti issu de grands élus, sorte de confrérie pour ne pas dire de syndic de grands élus, sans base, sans base militante. Une ambition présidentielle doit se reposer sur un parti de masse, avec des militants acharnés, déterminés, désintéressés, convaincus. Ce travers, qui fut le travers de l'UDF il y a une trentaine d'années, risque d'être un réel handicap au moment de démarrer une campagne nationale, quelle soit présidentielle (en 2027)... ou même européennes (en 2024) si ce parti juge pertinent d'y aller tout seul (ce qui est peu probable).

Car c'est un double piège : celui d'être un syndic de grands élus (déjà écrit) mais aussi celui de n'être qu'une écurie présidentielle pour Édouard Philippe. Certes, son existence politique rassure la majorité présidentielle pour 2027 car de candidats potentiels, s'il y en a beaucoup (Gérald Darmanin, Bruno Le Maire, Gabriel Attal, Élisabeth Borne, etc.), il y en a peu qui sont de véritables "animaux politiques" avec une histoire personnelle qui se confond avec la nation, et Édouard Philippe en fait (timidement) partie.

Intellectuel, Édouard Philippe l'a bien compris et doit donc proposer des thèmes politiques et des propositions politiques. Sa marge de manœuvre est assez étroite puisqu'il faut être original mais ne pas gêner le Président de la République.

Dans un premier temps, l'ancien Premier Ministre a émis un diagnostic sur les inquiétudes des Français, qui ont bien raison d'être inquiets : « Ils ont raison d’être inquiets. Et nous le sommes avec eux : aucune démocratie ne me paraît pouvoir résister durablement à un appauvrissement de la classe moyenne, ou même à une absence de perspectives de la classe moyenne. Lorsque les plus nombreux sont coincés, qu’ils s’écrasent contre les murs de la société, ils finissent toujours par les faire tomber. (…) Rien de plus dangereux qu’une impasse. Rien de plus dangereux que l’absence d’espoir. Rien de plus dangereux que l’idée qu’on ne pourrait plus avoir de prise sur notre avenir et que ce que nous avons en commun est en train de s’effondrer. ».

Et de poursuivre : « Ils ont le sentiment d’être dans un étau. Un étau maléfique qui leur interdit d’espérer, et dont ils doutent que nous puissions les libérer. Ils ont raison. Nous sommes dans un étau. Un étau de pouvoirs impuissants. Un étau de contraintes budgétaires dont les mâchoires vont se serrer de plus en plus. Un étau de contraintes juridiques, de procédures pointilleuses, toujours imaginées pour répondre à un problème, toujours conçues pour encadrer par la norme les appréciations, les décisions, les prises de risque. Un étau de confort intellectuel, qui permet à la gauche extrême, à la gauche morale, de dénoncer le système ultra libéral et le capitalisme effréné dans lequel nous serions vautrés, là où nous sommes le pays dont les écarts de revenus après impôts sont les plus limités et le pays où les prélèvements obligatoires sont les plus élevés : tu parles d’un ultralibéralisme ! ».

Le président d'Horizons a analysé le raison de cet étau : « Je développe cette idée de la sédimentation progressive de notre système politique sous l’effet des normes, des contre-pouvoirs, des jurisprudences, des contraintes de toutes natures que nous avons, pour l’essentiel, acceptées une par une. Cette sédimentation a rigidifié le cadre dans lequel nous vivons, rapetissé l’espace des possibles, et rend bien plus difficile de prendre des décisions de l’ampleur de celles dont nos concitoyens estiment qu’elles seraient nécessaires. La conjugaison du sentiment d’impasse personnelle et du constat d’une impuissance publique produit un mélange explosif. Instable et explosif. Lorsqu'on manipule un mélange de cette nature, on peut aisément être tenté de ne rien faire. De ne pas bouger. De laisser la société française tranquille pour jouer l’apaisement. De ne pas faire grand-chose pour qu’il ne se passe pas grand-chose. La tentation de l’immobilité a toujours été vive dans les périodes de trouble. ».

Donc, il faut bouger pour transformer un système qui prend les gens en étau : « Il y a une "question sociale" dans la France de 2023 comme il y avait une "question sociale" dans celle du XIXe. Celle du XIXe était liée aux ravages d’une industrialisation accélérée, qui créait un nouveau "paupérisme" dans la classe ouvrière. Celle que nous vivons est la conséquence d’un phénomène inverse de désindustrialisation, et aux soubresauts d’une mondialisation dérégulée. Cette nouvelle question sociale touche les classes moyennes et populaires. C’est-à-dire la grande majorité des Françaises et des Français. De plus en plus d’entre eux sont tentés par le vote de rupture. ».

Néanmoins, il y a des raisons d'espérer, selon Édouard Philippe : « Tout n’est pas bloqué, heureusement, parce qu’il demeure, en France, des entrepreneurs imaginatifs et combatifs, des artistes créatifs et exigeants, des responsables d’association lumineux d’initiatives et d’engagement. Parcourir la France comme je le fais, sans caméra, sans tambour ni trompettes, c’est souvent entendre les difficultés et les angoisses, je l’ai dit, mais c’est aussi bien souvent être impressionné par la ressource et l’enthousiasme de nos concitoyens. Je pourrais vous faire une très longue liste des expériences extraordinaires et des réussites trop souvent ignorées qu’il m’a été donné de découvrir. ».

Réaffirmer l'importance du rôle du maire et des élus locaux dans la renaissance de la démocratie est une idée majeure d'Horizons : « Une partie de la solution pour échapper à l’étau qui nous menace tient au rôle que nous souhaitons confier aux collectivités locales. (…) Je pense sincèrement qu’une façon d’échapper à l’étau consiste à donner la possibilité aux maires, et aux autres élus locaux bien sûr, de faire des choses qui leur sont interdites aujourd’hui. Pourquoi ne pas autoriser une période d’expérimentation ambitieuse, où des collectivités seraient autorisées à expérimenter un dispositif impossible aujourd’hui ? (…) Appel à manifestation d’intérêt, définition de l’expérimentation, loi autorisant, évaluation collective ensuite. Pourquoi ne pas considérer que l’accord entre un maire et un préfet pourrait constituer un motif de légalité suffisant dans bien des situations ? Nous pourrions autoriser le préfet et le maire à déroger à des dispositions législatives lorsque les circonstances locales le justifient. Accord motivé bien sûr, pour expliquer que leur décision est conforme aux objectifs et à l’esprit de la loi. ».

L'ancien Premier Ministre a également proposé de revenir sur la loi contre le cumul des mandats « qui n’a pas amélioré le fonctionnement de notre vie démocratique ». Au contraire, elle exclut les maires et chefs d'exécutifs locaux du Parlement, ce qui fait des parlementaires hors sol : « Si ça marchait et que le débat public s’était amélioré, que la perception par nos concitoyens de leurs représentants s’était améliorée, que le sentiment de rupture entre Paris et le reste du pays s’était estompé, je n’en parlerais pas. Mais qui peut dire que cette interdiction du cumul a eu un effet bénéfique ? ».

Édouard Philippe veut en outre combattre tous les extrémismes : « Chez Horizons, nous n’aurons jamais aucune complaisance face aux discours qui attisent la haine de l’étranger, la haine de l’autre religion, la haine du mérite, la haine de la liberté, la haine du succès, la haine du riche ou celle du pauvre. Vous vous souvenez peut-être de ce roman exceptionnel écrit par George Orwell, "1984". Il existe, dans ce pays merveilleux, un Ministère de la Vérité qui organise chaque jour "les Deux minutes de la Haine". Pendant "les Deux minutes de la Haine", quand défilent les visages de ceux qu’il faut haïr, chacun surveille attentivement son voisin pour vérifier qu’il crie assez fort, qu’il hait assez fort. Bien sûr, notre pays n’a rien à voir avec le monde de Big Brother. Quoique certaines images de l’Assemblée Nationale, certaines déflagrations de violence sur les réseaux sociaux pourraient faire penser aux deux minutes réglementaires de la haine que cherchent à imposer tous les partis totalitaires. (…) Nous combattrons toujours l’extrême droite parce qu’elle veut faire de la France un pays moralement rabougri. Nous combattrons toujours l’extrême gauche parce qu’elle veut faire de la France un pays économiquement rabougri. La France doit rester un pays qui insuffle de la grandeur, pas de la haine ; elle doit rayonner, pas rapetisser. ».

Il a ensuite esquissé trois combats à mener "en même temps" : combat pour la démocratie, combat pour la France et combat pour la planète. Et cela passe par une Europe puissance : « Il va falloir que nous arrêtions de nous excuser de constituer un ensemble de plus de 500 millions d’Européens attachés à leur genre de vie, à leurs intérêts et à leur avenir. Nous sommes puissants, et pourtant l’Europe est timide. Forte avec les États européens mais souvent timide avec tous les autres. L’idée d’autonomie stratégique portée par le Président de la République était encore taboue il y a cinq ans. Aujourd’hui, elle est en train de s’imposer car nous prenons conscience de la vulnérabilité dans laquelle nous ont placés nos dépendances : dépendance à la Chine pour les médicaments, à la Russie pour l’énergie, aux États-Unis pour notre sécurité… Nous avons vécu dans l’illusion qu’aucune de ces dépendances ne nous fragiliserait jamais. Aujourd’hui, l’Europe se réveille avec de meilleurs réflexes : elle a su réagir sur les vaccins pendant le covid, elle a su accompagner l’Ukraine depuis le début de la guerre… Mais elle sait aussi qu’il lui reste du chemin à parcourir. Aujourd’hui, maîtriser et diversifier notre approvisionnement en énergie et en matières premières critiques, consolider notre industrie de défense, protéger notre recherche et notre technologie ne sont plus des marottes françaises, comme nos partenaires l’ont cru trop longtemps. Ce sont d’impérieuses nécessités. ».

Son combat pour l'Europe est donc celui pour la France : « Je ne suis ni euro-satisfait, ni euro-béat mais euroexigeant. Nous devons être puissants pour être entendus et pour peser. Une bonne partie de notre influence en Europe tiendra à notre capacité à régler, chez nous, nos problèmes. ».

Ainsi, il faut réformer la politique européenne de la concurrence : « Nous l’avons trop tournée vers les consommateurs, avec l’idée simple, voire simpliste, que moins ils payaient cher, mieux ils se portaient. Ce faisant, nous avons négligé nos intérêts industriels, nos emplois et notre souveraineté. On hésite aujourd’hui encore à subventionner des secteurs stratégiques, au nom du dogme de la concurrence, sans voir qu’ailleurs dans le monde, ni les États-Unis, ni la Chine n’ont nos pudeurs de gazelles. Ils y vont à fond ! Et nous on se fait des nœuds dans le cerveau pour se demander si c’est vraiment poli et bien élevé de penser au moins autant à notre industrie qu’à nos consommateurs ! ».

De même pour le combat pour la planète : « Là encore, l’Europe a commencé par des normes. Elle doit maintenant investir, massivement. Ma conviction est qu’en la matière, on obtiendra de meilleurs résultats en incitant plutôt qu’en interdisant, en investissant plutôt qu’en régulant, en faisant confiance à l’immense inventivité du continent plutôt qu’en contraignant un espace aussi vaste et aussi divers. ».

L'Europe doit être aussi le garant de la souveraineté nationale : « Notre Europe doit savoir parler frontières, protection, Nation. Notre Europe est souveraine. Elle ne va pas chercher à Washington ses cadres, mais elle ne va pas non plus chercher à Moscou ses ordres. Elle est l’exacte opposée de ce que fantasme Marine Le Pen, ce rêve triste et mortifère d’une Europe sous influence et soumise, sans quille, aux tempêtes qui se profilent à ses frontières. ».

À l'évidence, Édouard Philippe a la stature intellectuelle et politique ainsi que l'expérience pour présenter un projet présidentiel dans quelques années. L'enjeu est que si c'est nécessaire, ce n'est pas suffisant. Il l'a d'ailleurs reconnu quand il a rendu hommage à Gérald Darmanin qui voudrait s'adresser aux classes populaires : « Gérald a su trouver les mots justes pour décrire ce que les Français vivent et éprouvent au quotidien. Et il a raison de craindre et donc de lutter contre la segmentation politique qui conduirait à ce que la majorité ne parle plus aux classes populaires, ou pire, à ce qu’elle continue à parler sans être entendue. ». L'enjeu de l'élection présidentielle de 2027 sera évidemment bien là : le candidat qui sera le meilleur porte-voix des classes populaires aura un avantage concurrentiel décisif dans la compétition qui s'engage...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (16 septembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Édouard Philippe prêt à décoller.
De nouveaux Horizons.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230915-edouard-philippe.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/edouard-philippe-pret-a-decoller-250466

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/09/18/40045505.html





 

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14 septembre 2023 4 14 /09 /septembre /2023 05:52

« Dans l’église, tout le monde se retrouve sur les mêmes bancs, mais pas le moindre signe de connivence, une forte indifférence mutuelle qui dit, à sa manière, l’itinéraire compliqué, humainement contrasté, du disparu. » (Laurent Telo, "Le Monde" le 14 septembre 2023).




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L'historien et éditorialiste politique Jacques Julliard est mort vendredi 8 septembre 2023 à l'âge de 90 ans et demi (il est né le 4 mars 1933). Ce passionné de la vie politique biberonné aux louanges du radical socialiste Édouard Herriot, dont l'arrière-grand-père, le grand-père grand ami de Paul Painlevé et le père étaient des élus locaux, était l'un des intellectuels de la deuxième gauche, celle qui espérait en Pierre Mendès France, celle qui admirait De Gaulle.

L'intellectuel de gauche a été enterré ce mercredi 13 septembre 2023 en l'église Saint-Gilles de Bourg-la-Reine accompagné de quelque cent cinquante personnalités de gauche... et de droite et de nulle part, des intellectuels et journalistes comme Pascal Bruckner, Alain Finkielkraut, Alain Minc, Élisabeth Roudinesco, Franz-Olivier Giesbert, Alexis Brézet, Eugénie Bastié, Michel Winock, Frédéric Martel, etc. ; et des politiques et syndicalistes comme Jean-Michel Blanquer, Manuel Valls, Hervé Gaymard, Nicole Notat, etc.

L'ancien ministre Arnaud Montebourg, également présent, a lâché : « Jacques a guidé mes premiers pas. Mais on se demande qui, à gauche, est encore capable de venir aux obsèques de Julliard... » (propos recueillis par "Le Monde"). Sylvie Rocard, veuve de Michel Rocard, était néanmoins présente. Parmi les absences remarquées, celles de François Hollande et de Bernard Cazeneuve. Aucun membre du gouvernement actuel non plus. L'essayiste Frédéric Martel, un peu dépité, a conclu après la messe : « Il restera le dernier d'une gauche qu'on enterre avec lui aujourd'hui. » ("Le Monde").

Au cours de la cérémonie, l'historien Christophe Prochasson, président de l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) où Jacques Julliard était devenu directeur d'études, expliquait la complexité de la pensée de l'intellectuel disparu : « Jacques Julliard disait qu'en son tribunal intérieur, il y avait 50% pour la social-démocratie, 25% pour la fibre conservatrice et 25% pour le sentiment anarchiste. (…) Inclassable, il n'était jamais satisfait du confort des étiquettes. ».

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De mère catholique pratiquante et de père agnostique anticlérical, il ne se disait pas "démocrate chrétien" mais "socialiste religieux". Militant de l'UNEF puis de la CFDT, normalien, agrégé en histoire, chercheur au CNRS, essayiste réputé (il a publié une quarantaine d'ouvrages politiques ou historiques), Jacques Julliard a rimé avec Michel Rocard pendant près d'une cinquantaine d'années. Éditorialiste politique au "Nouvel Observateur" de 1969 à 2010, Jacques Julliard avait viré et certains ont même affirmé qu'il avait viré à droite. En tout cas, il publiait des éditoriaux dans "Marianne" depuis 2010 et dans "Le Figaro" depuis 2017. Il a par ailleurs produit une émission de débat sur France Culture de 1984 à 1989.

Ce qui l'inquiétait le plus dans les dernières années de sa vie (au point de trouver dans Éric Zemmour un début de salut intellectuel), c'était la montée d'une gauche qui a abandonné la laïcité et les valeurs républicaines. Ce sont les attentats terroristes de 2015 et 2016 qui ont définitivement convaincu l'intellectuel rocardien de résister à un islamisme politique conquérant.

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Et à ce titre, il n'était pas tendre avec son ancien ami socialiste Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, dans son éditorial du 3 septembre 2016 dans "Marianne", il était très clair en se référant même au roman de Michel Houellebecq, "Soumisson" :
« Je me demande pourquoi tant d'agnostiques convaincus, de non-conformistes patentés, se sont laissé rassoter, cocufier, embobiner, encabêquer, tartufier par la religion la plus fidéiste, la plus conformiste et aujourd'hui, la plus sanglante de la planète ? (…) C'est le machisme le plus brutal et la réduction de la femme à l'état de propriété privée qui l'emportent, avec la complicité imbécile de quelques Marie-Chantal du féminisme. Et que dire de ces matamores de la révolte en chambre, de ces insoumis de Quartier latin, de ces hors-la-loi de plateaux télé, affichant à longueur de manifeste leur mépris de la légalité bourgeoise, qui se transforment soudain en juristes pointilleux, en avocaillons pinailleurs, dès qu'il s'agit d'excuser l'islamisme ? ».

Un autre éditorial était particulièrement important après la réélection d'Emmanuel Macron. Jacques Julliard ne comprenait pas comment le parti socialiste s'était fait escroquer intellectuellement par les insoumis en rejoignant la Nupes.

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Le 6 mai 2022 dans "Marianne", Jacques Julliard rappelait effectivement les graves dangers d'une désignation fantasmée de Jean-Luc Mélenchon à Matignon à l'issue des élections législatives. Il en énumérait cinq.

L'économique et le social :
« L’application brutale de l’ensemble des propositions du programme de Mélenchon nous conduirait à la catastrophe : la retraite à 60 ans, le SMIC à 1 400 €, le blocage des prix, l’augmentation des salaires. Et j’en passe. (…) Il y a quelque chose de pire que de ne rien faire pour les plus défavorisés : c’est de les payer de fausse monnaie, au risque d’aggraver une situation antérieure. L’inflation n’est pas seulement un problème pour le secteur productif tout entier. Elle est le fléau des revenus fixes, des retraites, des bas revenus, de toutes les personnes assistées. ».

Le nucléaire :
« La diabolisation du nucléaire, la plus propre, la plus décarbonée, la plus écologique des sources d’énergie, est le fait des écolos, en tout cas des plus décervelés d’entre eux. Dans la compétition internationale, dans la concurrence amicale avec les Allemands, le nucléaire est un des rares atouts majeurs de la France. ».

L'islamisme :
« Jean-Luc Mélenchon est, dans ce domaine, l’exemple consternant d’un républicain, d’un laïque devenu par démagogie et électoralisme le sixième pilier de l’islam, ou plutôt de l’islamisme en France. Qu’il ait défilé avec le CCIF en est une manifestation incontestable. Il n’a jamais reconnu son erreur. Pis que cela : sous prétexte de "créolisation", un concept creux, il accorde au cléricalisme islamique ce que la République n’a jamais concédé, avec raison, au cléricalisme catholique de naguère. ».

L'Europe :
« Des socialistes en peau de lapin, comme Olivier Faure, se sont ralliés à l’idée mélenchonienne de désobéir à l’Europe ! Mais nous n’avons pas à désobéir à l’Europe ; nous avons à en prendre la tête ! Dans leur majorité, les Français savent que notre avenir, notre sécurité, notre prospérité, en un mot la paix, sont liés à notre appartenance européenne. L’isolationnisme de Mélenchon est le complément de son islamo-gauchisme et de son refus de la modernité. C’est un homme du passé qui confond la France libre de Charles de Gaulle avec la France seule de Charles Maurras. ».

Et l'Ukraine : « Mettre Mélenchon au pouvoir, c’est rompre avec le sursaut et la détermination des grandes démocraties contre les agissements de plus en plus hitlériens de l’autocrate de Moscou. (…) Il m’est arrivé de dire que l’antiaméricanisme est le socialisme des imbéciles. Mélenchon n’est pas un imbécile, loin de là, et il me semble que cela aggrave son cas. Dans ce contexte, sa proposition de quitter l’Otan, c’est tenir la balance égale entre l’agresseur et l’agressé. C’est totalement inacceptable. ».

Il faut préciser que le 30 août 2023, lors des Rencontres de Saint-Denis, un consensus avait été trouvé sur le soutien sans faille à l'Ukraine par l'ensemble de la classe politique, y compris le parti de Jean-Luc Mélenchon.

La conclusion de Jacques Julliard est prophétique et sans doute qu'elle sera lue et relue par de futurs candidats à l'élection présidentielle à gauche, y compris l'ancien Premier Ministre Bernard Cazeneuve malgré son absence à l'enterrement : « L’avenir de la gauche est, en France, et comme dans la quasi-totalité des pays d’Europe, lié à une renaissance et à une modernisation de la social-démocratie. Qu’est-ce que la social-démocratie ? C’est la seule forme de socialisme qui n’aboutit pas à élever une dictature impitoyable sur des monceaux de cadavres. C’est l’extension de la justice sociale, de toute l’égalité sociale compatible avec un niveau incompressible de liberté. Le mélenchonisme n’est ni l’avenir ni la justice, c’est une construction qui repose sur un homme et sur les branches pourries du mouvement social. Épargnons-nous ce retour en arrière. ».


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (14 septembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Jacques Julliard dans "Marianne" le 6 mai 2022 : "Oui à l’union, non à Mélenchon".
Jacques Julliard.
Gérard Leclerc.

Le nouveau JDD.
Geoffroy Lejeune.
Pap Ndiaye et les médias Bolloré.
Alexandre Adler.
Antone Sfeir.
Anne Sinclair.
Jean-François Kahn.

Victoria Amelina.
Éric Zemmour.
Denise Bombardier.
Pierre Loti.
Laurent Ruquier.
François Cavanna.
La santé à la radio.
Philippe Tesson.
Daniel Schneidermann.
Catherine Nay.
Serge July.
La BBC fête son centenaire.
Philippe Alexandre.
Alain Duhamel.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230908-jacques-julliard.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/jacques-julliard-pourfendeur-de-la-250292

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/09/08/40033807.html










 

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15 juillet 2023 6 15 /07 /juillet /2023 05:23

« Quand vous regardez CNews, quand vous regardez ce qu'est devenu Europe 1, quand vous regardez cet ensemble-là, la conclusion s'impose. (…) CNews, c'est très clairement l'extrême droite. (…) Il font du mal à la démocratie, il n'y a aucun doute. Je considère que lutter contre l'extrême droite est une priorité. Ça peut se faire de toutes les manières possibles. » (Pap Ndiaye, le 9 juillet 2023 sur Radio J).




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Le Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, Pap Ndiaye, se retrouve au centre d'une polémique qu'il a lui-même provoquée en évoquant le caractère d'extrême droite des médias appartenant au groupe Bolloré. Il l'a dit au cours d'une interview accordée à Frédéric Haziza pour Radio J diffusée le dimanche 9 juillet 2023. Comme d'habitude dans le microcosme que constituent les réseaux sociaux mais aussi l'extrême droite, deux minutes des propos du ministériel ont fait réagir beaucoup de monde alors que l'entretien durait près de cinquante minutes.

Ce n'est pas nouveau. Très "bizarrement", Pap Ndiaye a remplacé dans ce gouvernement ce que représentait Christiane Taubira dans les gouvernements de François Hollande pour un certain nombre de personnes. Une haine qui a nettement dépassé le stade politique pour s'installer dans la détestation personnelle, encore que Christiane Taubira était porteuse de propositions politiques qu'on pouvait discuter. Mais qui sait ce que propose Piap Ndiaye ? Car ce défaut du ministre (j'y reviens juste après) est la preuve que la haine dont il est la cible, propagée par l'extrême droite, dépend d'autres éléments, et il faut bien avouer que sa couleur de peau pourrait en être une raison assez convaincante (je mets au conditionnel et je suis ouvert à toute autre explication, bien sûr !). Pap Ndiaye est avant tout un Français, et, aussi étrange que cela puisse paraître, un descendant de paysans de la Beauce par sa mère ; il n'a jamais connu que la France (et la romancière Marie Ndiaye, Prix Femina 2001 et Prix Goncourt 2009, est sa sœur et fait honneur à la France et à la culture française).

Je reviens au handicap de Pap Ndiaye : il est un intellectuel, un vrai, un authentique, un historien, reconnu par ses pairs, fruit de la méritocratie et de l'excellence républicaines que les bas du front, forcément, exècrent (normalien, agrégé d'histoire, docteur, professeur des universités), il n'est pas un intellectuel revendiqué (il ne revendique rien), mais c'est son travail, sa profession, on peut le combattre politiquement, on peut combattre ses idées, on peut combattre ce qu'il dit dans ses bouquins, dans ses conférences (par exemple, je suis opposé à ses positions sur les statistiques ethniques, il est pour, et sur le mot "race" dans la Constitution, il est contre sa suppression), mais encore faudrait-il les lire, les écouter pour avoir une idée de quoi combattre, sans faire de projection sur une sorte de wokisme ou de communautarisme qui n'existe pas chez Pap Ndiaye sinon que justement fantasmé par ses détracteurs qui se situent quand même, "bizarrement", du côté de l'extrême droite (notons que des personnalités de centre droit comme Bernard Stasi et Lionel Stoléru, entre autres, et même Jacques Chirac !, avaient été les pires ennemis de l'extrême droite dans les années 1990 et elles n'étaient pas pour autant ni communautaristes, ni d'extrême gauche, je n'évoque pas le wokisme car pour l'époque, ce serait de l'anachronisme).

La nomination de Pap Ndiaye au gouvernement le 20 mai 2022 n'a pas été acquise à l'initiative du Président Emmanuel Macron, mais de la Première Ministre Élisabeth Borne qui cherchait à "gauchiser" son gouvernement. Contrairement à d'autres personnalités issues de la "société civile" (je n'aime pas cette expression mais je n'en ai pas d'autre) bombardées un jour ministres, Pap Ndiaye n'est décidément pas à l'aise avec le jeu politique commun car au-delà de l'action, il faut aussi le faire-savoir, il faut habilement manœuvrer, prendre date, désamorcer de potentielles bombes médiatiques, répondre aux polémiques, faire attention à sa parole, etc. Frédéric Mitterrand (à la Culture en juin 2009) et Éric Dupond-Moretti (à la Justice en juillet 2020), pour ne prendre que deux exemples, ont, au contraire du Ministre de l'Éducation nationale actuel, excellemment réussi leur transmutation ministérielle et politique.

Pourtant, ce n'est pas faute de travailler. Car Pap Ndiaye est un ministre bosseur. Il suffit de lire son agenda, de suivre ses déplacements pour connaître le nombre impressionnant d'établissements scolaires qu'il a visités depuis un an. Mais il a deux défauts : son premier est d'être un (vrai) intellectuel, je le réécris, c'est-à-dire que sa démarche personnelle a toujours été fondée sur l'honnêteté intellectuelle, la sincérité des débats, je dirais même une certaine candeur, il peut se tromper, il s'est sûrement trompé, comme toute personne qui "pense", on ne "pense" pas toujours avec pertinence et efficacité, mais il n'a jamais cherché à esquiver sa sincérité ; or, en politique, il y a un côté posture qui est important, un coté hypocrisie, un côté mauvaise foi (sans aller jusqu'au côté mensonge, du moins par omission), qui va rarement dans le même sens que l'honnêteté politique. En politique, il faut imposer aux autres qu'on a raison, même si on sait que c'est faux ! Ce n'est pas le mouvement naturel d'un intellectuel.

Son second problème, il ne vient pas de lui mais du Président de la République lui-même : Emmanuel Macron lui donne rarement l'occasion d'exister politiquement car les affaires d'éducation sont l'une des attentions très fortes de l'Élysée. Ainsi, lors de son déplacement à Marseille, Emmanuel Macron a jeté un pavé dans la mare des enseignants en envisageant de réduire la durée des vacances scolaires alors que tout près de lui, son ministre n'avait même pas été mis au courant. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui, aujourd'hui, poussent les journalistes à penser que Pap Ndiaye fait partie des ministres au siège éjectable pour le supposé prochain remaniement (qui n'a jamais été annoncé par l'Élysée mais seulement par des journalistes soi-disant bien informés).

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C'est cette donnée qui pourrait faire comprendre la provocation sur CNews et Europe 1, un peu encouragée par Frédéric Haziza d'ailleurs (cet ex-journaliste de LCP cherche systématiquement le buzz ; il faut bien en convenir, il a réussi cette fois-là). Pap Ndiaye a déclaré : « Il faut évidemment soutenir la mobilisation du personnel du JDD et je comprends bien qu'ils ne veulent pas entrer dans la galaxie des publications ou des médias contrôlés par un personnage qui est manifestement très proche de l'extrême droite la plus radicale. ». Ce n'est qu'après que le journaliste a insisté sur le groupe Bolloré (Pap Ndiaye s'était bien gardé de prononcer son nom).





Je m'explique : quittant son univers studieux et confortable de la technique maîtrisée, Pap Ndiaye vient de faire vraiment de la politique, dans le mauvais sens du terme, à savoir, créer un événement (futile, dérisoire) par une posture (revendiquée). À bon compte, il s'est octroyé un brevet de chasseur d'extrême droite, applaudi par (tous) les partis de gauche.

En soutenant les journalistes de la rédaction du "Journal du dimanche" (contre l'arrivée à la direction de leur rédaction de Geoffroy Lejeune, issu de "Valeurs actuelles"), et en critiquant la posture éditoriale et idéologique de CNews et de la radio Europe 1, Pap Ndiaye n'a fait qu'exprimer son opinion personnelle comme la liberté d'expression le lui permet, tout comme ces médias peuvent exprimer la leur sur son action de ministre : parler de censeur pour sa part est largement abusif. On peut ne pas être d'accord avec lui, avec son appréciation, mais il n'a jamais demandé d'interdire ces médias, il les respecte et il aimerait sans doute que ceux-ci aussi le respectent dans son droit à exprimer sa propre opinion : la défense de la liberté d'expression ne doit pas être à sens unique.

Comme c'est une personne intelligente, Pap Ndiaye devait évidemment imaginer les suites médiatiques qu'il allait provoquer. Maintenant, effectivement, ce genre de buzz est très prévisible et beaucoup en usent et en abusent pour leur propre compte. Ici, on voit bien tout l'intérêt de la chose : en devenant la cible renouvelée de la fachosphère, il devient une figure emblématique qui sera plus difficile à renvoyer au moment du (possible) remaniement.

Au cours de la semaine qui vient de se terminer, Pap Ndiaye a donc été confronté à deux questions sur le sujet aux cours des séances de questions au gouvernement des deux assemblées. Très "bizarrement", les deux parlementaires contradicteurs étaient tous les deux membre du parti Les Républicains (et aucun RN par exemple à l'Assemblée), comme si LR avait une raison particulière de défendre le groupe Bolloré.

Ainsi, le mardi 11 juillet 2023 à l'Assemblée Nationale, Pap Ndiaye a répondu, plutôt assez maladroitement, au député LR Philippe Gosselin (dont j'ai souvent apprécié le travail parlementaire) : « Je serai auditionné dans quelques heures sur les questions scolaires. Si vous avez un quelconque intérêt pour ces questions, ce qui n’est apparemment pas le cas, vous assisterez à cette audition. En ce qui concerne la seconde partie de votre propos, vous êtes membre d’un groupe à la longue tradition républicaine et gaulliste qui a longtemps combattu l’extrême droite. Je m’étonne donc que vous soyez surpris par le constat, somme toute banal, que j’ai fait de l’évolution d’une certaine chaîne de télévision. La liberté de la presse et la liberté d’expression sont deux fondamentaux de la démocratie ; il ne s’agit de censurer ni l’une ni l’autre. Ma collègue, Rima Abdul Malak, a déjà rappelé ici les obligations qui s’imposent aux chaînes à travers la loi de 1986, et l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, l’Arcom, a mis en garde et mis en demeure plus d’une vingtaine de fois la chaîne de télévision que vous mentionnez, je ne suis pas le seul à faire ce constat. Ai-je invité à boycotter, ai-je pointé du doigt tel journaliste ? Non, je n’ai fait que commenter, de manière banale, la ligne politique d’une chaîne de télévision, ce qui est mon droit le plus strict, monsieur le député, et je tiens à ce droit, comme vous-même avez le droit de commenter ce que j’ai pu dire lors d’une interview. (…) Permettez-moi simplement de vous répondre par cette citation du président Jacques Chirac, en 2007, qui me semble, ô combien, d’actualité : "Ne composez jamais avec l’extrémisme, le racisme, l’antisémitisme ou le rejet de l’autre. Tout, dans l’âme de la France, dit non à l’extrémisme". ».

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Le lendemain, mercredi 12 juillet 2023 au Sénat, le ministre Ndiaye a été beaucoup plus habile en répondant en creux au sénateur LR Bernard Fournier (dont c'était la dernière question car il ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat aux élections sénatoriales de septembre prochain). Il en a profité pour, en quelque sorte, faire son bilan de ministre sinon son testament, à coup d'anaphore :
« Monsieur le sénateur Fournier, il y a la liberté de la presse, à laquelle je suis aussi attaché que vous, mais il y a aussi la liberté d'expression. Ces deux libertés sont essentielles. À ce titre, il est de mon droit le plus strict de donner un point de vue sur la ligne éditoriale d'une chaîne de télévision. Il ne s'agit pas de censurer qui que ce soit. Si, monsieur le sénateur, vous aviez écouté mon interview dans son intégralité, si vous m'aviez écouté sur les grands chantiers de l'éducation nationale, vous m'auriez interrogé sur la parentalité et l'implication des parents dans la scolarité des enfants. Vous m'auriez interrogé sur l'orientation des élèves, avec la découverte des métiers. Vous m'auriez interrogé sur la réforme du baccalauréat et sur les pistes de travail pour la réforme du troisième trimestre. Vous m'auriez interrogé sur la question du niveau en français et sur l'introduction de critères formels dans l'évaluation des copies du bac en orthographe et en syntaxe, ce qui passe par un renforcement des disciplines fondamentales, c'est ce que nous faisons en classe de sixième, avec l'heure de renforcement et de soutien en français et en mathématiques. Vous m'auriez interrogé sur l'augmentation des professeurs et des personnels d'orientation et d'éducation à partir de la rentrée, des augmentations significatives inédites depuis trente ans. Vous m'auriez interrogé sur l'autonomie des établissements, avec le Conseil national de la refondation. Voilà, monsieur le sénateur, les sujets sur lesquels vous auriez pu m'interroger, des sujets tout de même plus essentiels que la dérive extrême-droitière d'une chaîne de télévision ! ».


Pap Ndiaye s'est donc bien défendu, après ses déclarations sur Radio J, mais tout seul, sans le soutien d'aucun autre ministre. On imagine d'ailleurs assez bien le sentiment d'Emmanuel Macron sur cette "question" : ce n'est pas par des diktats moraux qu'on combat l'extrême droite, au contraire, on la consolide ainsi. Il devait donc être assez agacé par son ministre et pourtant, paradoxalement, il est venu à sa rescousse (après une évidente absence d'empressement à la solidarité de ses collègues) à l'occasion du conseil des ministres du jeudi 13 juillet 2023.

Répondant à une question sur le sujet lors du compte rendu du conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a en effet déclaré : « S'agissant du Ministre de l'Éducation nationale, le Président de la République a eu l'occasion de s'exprimer sur le sujet en préambule du conseil des ministres, d'abord pour rappeler plusieurs libertés : la liberté de la presse, la liberté de la diversité d'opinions, et aussi la liberté d'expression qui s'applique aussi pour les membres du gouvernement. Et donc, quand on fait de la politique (…), on peut être amené à exprimer une opinion, il faut toujours évidemment avec parcimonie, avec attention, mais on est totalement libre de le faire. Le Président de la République a aussi rappelé que rien ne justifie de s'attaquer à un ministre parfois même à la Première Ministre. », tout en annonçant l'organisation des états-généraux de la presse qui vont être lancés très prochainement.




Il faut effectivement rappeler l'absence de soutien à Pap Ndiaye de la majorité présidentielle pendant ces quatre jours (entre le 9 et le 13 juillet 2023), silence qui a fait enrager Daniel Schneidermann le 12 juillet 2023, fustigeant le manque de solidarité gouvernementale : « Quinze. Ils sont quinze ministres, sollicités hier par "Le Monde", pour prendre position sur la controverse entre le Ministre de l'Éducation nationale Pap Ndiaye et la coalition de toutes les droites, de la modérée à l'extrême, qui ont pris la défense de Vincent Bolloré. "Quinze ministres de plein exercice", souligne "Le Monde". Pas un seul n'a accepté de répondre. (…) Soyons précis. Seul le ministre des transports Clément Beaune a accepté de répondre au "Monde", dans les termes suivants : "Pap Ndiaye est un homme de convictions ; les convictions, cela se respecte". C'est à ce flamboyant courage qu'on reconnaît "l'aile gauche de la macronie". (…) Combien de temps encore acceptera-t-il de siéger aux cotés de collègues dont "le silence des pantoufles" (Max Frisch) manifeste qu'ils ont choisi leur camp ? ».

La parole présidentielle du lendemain, au conseil des ministres, est donc venue précieusement soutenir le ministre Pap Ndiaye, ce qui devait être son objectif principal (mais qui n'empêcherait pas de sauter si celui-ci devait sauter dans les journées ou semaines prochaines !). Il persiste et signe : lui aussi a droit à la liberté d'expression. On peut ne pas être avec d'accord avec lui sur ce sujet précis (les médias Bolloré seraient d'extrême droite, ce que je ne pense pas car c'est un peu plus compliqué), mais on ne peut pas lui retirer le droit de le penser ni de le dire : nous sommes encore en démocratie et un ministre a le droit de s'exprimer autant que n'importe quel citoyen.



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (13 juillet 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
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Les vacances scolaires sont-elles trop longues ?
Nos enseignants sont des héros !
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Violence contre une prof et vidéo dans les réseaux sociaux.
Transgression à Marseille : recruter des profs plus "librement" ?
Samuel Paty : faire des républicains.
Samuel Paty : les enseignants sont nos héros.
La sécurité des personnes.
Lycée Toulouse-Lautrec.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230713-pap-ndiaye.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/medias-bollore-pap-ndiaye-sauve-t-249326

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/07/15/39973984.html




 

 

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17 mai 2023 3 17 /05 /mai /2023 11:13

« Je ne tomberai pas dans le piège d’un combat politique contre une institution que je respecte. » (Nicolas Sarkozy, le 3 mars 2021 sur TF1).




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Ceux qui craignaient un retour dans l'arène politique de l'ancien Président de la République Nicolas Sarkozy avaient tort, forcément tort. Lui-même ne souhaitait pas ce retour et surtout, ne voulait pas les contraintes de son ancienne vie assommante. Ce mercredi 17 mai 2023 en début de matinée, la cour d'appel de Paris a prononcé à son encontre une peine de trois ans de prison dont un ferme et de trois ans d'inéligibilité pour corruption et trafic d'influence.

Comme ses avocats ont annoncé que Nicolas Sarkozy allait se pourvoir en cassation et que la cour d'appel n'a pas assorti la condamnation d'une demande d'exécution provisoire de la peine, l'exécution de celle-ci est donc suspendue le temps d'examiner le pourvoi. Par conséquent, aucun bracelet électronique n'est donc prévu à court terme. Si la décision de la Cour de cassation était prise dans plus d'un an, une confirmation de la peine rendrait Nicolas Sarkozy dans l'incapacité civique de se présenter à l'élection présidentielle de 2027 (il aurait alors 72 ans).

Cette peine est la confirmation de la décision du tribunal judiciaire de Paris du 1er mars 2021. Elle va au-delà des réquisitions du procureur général de la République qui avait requis seulement trois ans avec sursis (sans prison ferme) contre l'ancien Président de la République lors du procès le 13 décembre 2022. Son avocat et ami Thierry Herzog et le juge Gilbert Azibert ont été condamnés aux mêmes peines.

Rappelons le fond de l'affaire : elle a surgi en marge d'une autre affaire, celui d'un éventuel financement libyen. Des moyens énormes ont été mis en œuvre pour tenter de trouver la moindre infraction. Car l'affaire de la condamnation de ce jour concerne uniquement des écoutes téléphoniques qui ont été faites à partir de 2013 sur les lignes de Nicolas Sarkozy, dont une troisième ligne créée le 11 janvier 2014 sous le nom de Paul Bismuth afin d'échanger discrètement avec Thierry Herzog (rappelons que les communications entre un prévenu et son avocat sont en principe totalement confidentielles dans un État de droit).

Ces communications enregistrées ont été entendues lors du procès en appel et laisseraient entendre un possible pacte de corruption pour examiner favorablement un pourvoi en cassation dans l'affaire Bettencourt en échange d'une aide au magistrat pour obtenir un poste honorifique à Monaco (qu'il n'a pas eu ni même demandé). La condamnation ne se base donc que sur des suspicions et des suppositions.

Ce qui a été déterminant pour les juges, alors que Nicolas Sarkozy avait clamé son innocence (en particulier lors de sa première condamnation, le 3 mars 2021 sur TF1), ce sont les compétences juridiques des trois prévenus. La présidente de la cour d'appel Sophie Clément a ainsi constaté : « Messieurs Herzog et Sarkozy sont avocats, monsieur Azibert est un spécialiste de la procédure pénale. Aucun des trois ne peut prétendre d'une méconnaissance des infractions commises. ».

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Mauvais mois de mai 2023 pour Nicolas Sarkozy puisque justement, sur le fond de l'affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, le parquet national financier (PNF) a demandé le 10 mai 2023 son renvoi devant le tribunal correctionnel. Pour cette affaire, Nicolas Sarkozy a été mis deux fois en examen, en mars 2018 puis en 2020 et est poursuivi pour « recel de détournement de fonds publics, corruption passive, financement illégal de campagne électoral et association de malfaiteurs en vue de commettre une infraction punie de dix ans d'emprisonnement ». Nicolas Sarkozy a, dans cette affaire aussi, rejeté toutes les accusations. À ses côtes sont aussi poursuivis douze autres prévenus dont Claude Guéant, Éric Woerth, Brice Hortefeux, Ziad Takiedine, Thierry Gaubert et Alexandre Djouhri avec des chefs d'inculpation différents.

C'est la première fois qu'un ancien Président de la République est condamné en appel à une peine de prison ferme. En revanche, il a été déjà condamné deux fois à la prison ferme en première instance puisqu'il avait été également condamné le 30 septembre 2021, en première instance, à un an de prison ferme dans l'affaire Bygmalion (financement illégal de sa campagne présidentielle de 2012). Le début de son procès en appel, dans cette affaire-là, est fixé au 8 novembre 2023.

Avec cette actualité judiciaire éprouvante, les antisarkozystes forcenés ne seront pourtant pas renforcés dans leur haine contre Nicolas Sarkozy, cette haine-là plus politique que judiciaire, car ils ont déjà déplacé leur haine sur un autre bouc émissaire politique tout trouvé, depuis six ans, Emmanuel Macron (une haine au moins aussi excessive qu'en 2012). Quant aux fidèles sarkozystes, il en existe forcément encore quelques-uns même s'ils sont de plus en plus rares (certains n'ayant pas compris ni digéré l'absence de soutien à la candidature de Valérie Pécresse en 2022), cela fait depuis longtemps qu'ils s'étaient accommodés des risques judiciaires encourus par leur mentor.

Sur cette affaire de trafic d'influence de Paul Bismuth, la question se pose véritablement sur la réalité des faits, même si l'intention de faire a pu être vaguement comprise (une conversation téléphonique n'engage pas réellement). Pourtant, la confirmation en appel rend l'innocence de Nicolas Sarkozy plus délicate à défendre, à moins de considérer que les juges sont tous politiquement partiaux (ce qui relèverait du complotisme). La décision de la Cour de cassation sera donc très importante puisqu'elle relèvera, ou pas, des vices de procédure qui ont amené à ces deux condamnations.

Je terminerai en paraphrasant Bernadette Chirac en 2001 quand son époux a été mis en cause dans des affaires financières (bien avant sa condamnation post-élyséenne), sur le fait que, dans tous les cas, Nicolas Sarkozy a été « un homme qui a donné l'essentiel de son existence au service de l'État, au service des autres, avec une très grande générosité et beaucoup de rigueur ».


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (17 mai 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Sale temps pour Nicolas Sarkozy !
La justice harcèle-t-elle la classe politique ?
Carla Bruni.
La sagesse de Nicolas Sarkozy.
Pour qui votera Nicolas Sarkozy au premier tour ?
Bygmalion : Éric Zemmour soutient Nicolas Sarkozy.
Injustice pour Nicolas Sarkozy ?
Sarko et ses frères...

_yartiSarkozy2022B03





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https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/sale-temps-pour-nicolas-sarkozy-248381

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30 avril 2023 7 30 /04 /avril /2023 05:19

« Moi qui vous parle, la seule vue d'un évier, même terne, m'embrase les sens au plus haut point, me noue le gosier, m'assèche la luette et m'irradie la sous-ventrière des mille flammes dévorantes du désir le plus fou. Je vois bien ce que mon discours peut avoir d'incongru auprès d'une portée de contribuables plus ou moins vivipares. » (Pierre Desprogres, 1986).





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Parfois, il faut avoir la victoire modeste. Certes, il n'y a aucune modestie à avoir pour avoir gagné la finale de la coupe de France de football qui s'est déroulée ce samedi 29 avril 2023 au Stade de Paris, à Saint-Denis. Au contraire, l'équipe de Toulouse a mené le match du début à la fin, détrônant son solide adversaire, l'équipe de Nantes, détentrice du titre en 2022, avec un score sans ambiguïté de 5 à 1. Avec un tel score, c'est vrai qu'il n'y avait pas à être modeste et qu'il fallait fêter la victoire.

D'ailleurs, il était amusant d'entendre un journaliste dire à un joueur de l'équipe victorieuse : "Cela fait soixante-six ans que vous attendiez cette victoire". Le joueur devait avoir une vingtaine d'années et n'existait pas, probablement même ses parents n'existaient encore pas lorsque que Toulouse avait gagné pour la dernière fois la coupe de France, en 1957 face à Angers, c'était plutôt ses grands-parents qui avaient dû attendre soixante-six ans !

Mais il était un autre match qui s'était agrégé dans la coupe de France, ou plutôt, que la CGT et les médias voulaient voir en filigrane : celui des opposants à la réforme de retraites versus le Président de la République Emmanuel Macron lui-même.

En effet, la tradition veut que le Président de la République honore de sa présence la finale de la coupe de France de football qui est, me semble-t-il, la manifestation sportive nationale la plus importante de l'année. C'était donc aussi l'occasion, comme c'est le cas depuis deux semaines lors de chaque sortie publique d'Emmanuel Macron, d'exprimer bruyamment (et sans délicatesse) son opposition au Président et à la réforme des retraites.

Évidemment, pas de casserole dans l'enceinte du Stade de France, pour des raisons de sécurité, mais la CGT a trouvé mieux, le sifflet (également interdit dans le règlement du Stade de France) et le carton rouge (arme de dissuasion massive). Pour la CGT qui s'est mobilisée pour l'occasion, il n'y a pas de petit événement qui ne pourrait donner l'occasion d'exprimer sa colère et fort des sondages d'impopularité élyséenne, la centrale syndicale voulait montrer la force de ses positions. Certes, c'était un peu puérile (et vain) mais on lutte comme on peut (faute d'électeurs mais aussi de syndiqués).


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La chaîne d'information continue BFM-TV s'est également mobilisée pour l'occasion (afin de concurrencer sa rivale LCI devenue une chaîne ukrainienne, BFM-TV cherche de nouvelles obsessions ; il y a deux mois, c'était Pierre Palmade, mais cela n'a pas duré plus de quelques semaines). Pendant quarante-huit heures, elle n'a fait que disserter sur les risques d'Emmanuel Macron à se faire huer, à se faire siffler, sur est-ce qu'il ira assister au match ? Sur est-ce qu'il ira descendre sur la pelouse pour saluer les joueurs ? Sur faut-il interdire la CGT dans le stade ? etc. (non, j'exagère, cette dernière question n'était pas à l'étude).

Bref, tout le dispositif était en place, on a même envoyé des correspondants spéciaux au Stade de France (qui, je le rappelle pour les provinciaux, est situé en bordure du périphérique parisien !). On a mobilisé des équipes pour accompagner les militants de la CGT, que ce fût aux abords du Stade de France (ils distribuaient leur matériel de colère, un sifflet et un carton rouge) ou à côté de leur téléviseur.

Le rassemblement à côté du Stade de France que la préfecture de police avait interdit a été finalement autorisé par le tribunal administratif. Il faut insister sur notre système : nous sommes bien en démocratie et lorsque le pouvoir exécutif, un peu trop trouillard, prend des mesures un peu trop disproportionnées, le pouvoir judiciaire est là pour l'arrêter. C'est cela l'État de droit, c'est cela la démocratie et bien des pays et des peuples au monde nous envient ce système, à commencer par le peuple russe qui est dans l'incapacité d'exprimer une éventuelle colère contre son dirigeant Vladimir Poutine (par ailleurs fossoyeurs de centaines de milliers de personnes).

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BFM-TV avait également déployé tous ses éditorialistes maison pour disserter de l'éventuel camouflet que recevrait Emmanuel Macron à l'occasion de cette finale. De sa difficulté à être, de l'historique des Présidents de la République, de Jacques Chirac qui a quitté le stade lorsque la Marseillaise a été sifflée par des supporters, de François Hollande qui n'a pas jamais le courage de descendre sur le terrain, du bisou de François Mitterrand à Jean-Pierre Papin, etc.

Alors, évidemment, quand il s'est passé ce qui s'est passé, c'est-à-dire que le Président de la République n'a pas été victime de la colère des supporters, on a entendu seulement quelques sifflets ou vu seulement quelques cartons rouges à la quarante-neuvième minute et trois secondes (pour faire 49 alinéa 3) ou à la soixante-quatrième minute (pour les 64 ans de la réforme), non seulement les militants de la CGT ont été déçus (on les comprend bien), mais l'armée de journalistes de BFM-TV aussi a été déçue : il ne s'était RIEN passé ! Tout ça pour ça !

La moralité revient à un supporter à qui on avait proposé un carton rouge et un sifflet et qui a répondu à l'activiste frustré : laissons la politique à la politique, et le football au football (c'est beau de paraphraser des grandes phrases). La finale de la coupe de France est une fête sportive, et rien que sportive, également nationale, et le feu d'artifice qui a détoné par la suite dans la nuit du Stade a rappelé que l'heure était à la fête et pas à la colère. Et d'ailleurs, le discret Emmanuel Macron était-il vraiment là ? En tout cas, bravo les Toulousains !


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (29 avril 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
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La France et le football.
Objectifs à cours terne !
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Réforme des retraites : feu vert (sans surprise) du Conseil Constitutionnel.
Grève des éboueurs à Paris.
Renouveau à la CGT.
Laurence Rossignol.
Olivier Véran souligne l'hypocrisie de la Nupes (22 mars 2023).
Aurore Bergé fustige les oppositions (20 mars 2023).

Le maître des horloges et sa montre.
Emmanuel Macron : "J'assume ce moment !"
Interview du Président Emmanuel Macron le 22 mars 2023 à 13 heures sur TF1 et France 2 (vidéo).

295 députés refusent de censurer le gouvernement pour sa réforme des retraites.
La tactique politicienne du RN.

Les gens sérieux et les gens du cirque.
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Le choix du vote bloqué (article 44 alinéa 3 de la Constitution).
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Réforme des retraites 2023 : le Sénat évitera-t-il l'obstruction ?
Réforme des retraites 2023 : après les enfants terribles, les sages.
Discours de la Première Ministre Élisabeth Borne dans la nuit du 17 au 18 février 2023 à l'Assemblée Nationale (texte intégral).

Réforme des retraites 2023 : chemin de Croix à l'Assemblée.
Olivier Dussopt.

Assemblée Nationale : méthode de voyou !
Sauver nos retraites par répartition.
Réforme des retraites 2023 : le projet du gouvernement est-il amendable ?
Dossier des retraites du gouvernement publié le 10 janvier 2023 (document à télécharger).
Conférence de presse de la Première Ministre Élisabeth Borne le 10 janvier 2023 à Matignon (texte intégral et vidéo).
Comprendre la réforme des retraites présentée par Élisabeth Borne ce mardi 10 janvier 2023.
Le non-totem d'Élisabeth Borne sur les retraites.
Le coronavirus supplante la réforme des retraites de 2019-2020

_yartiMacronCoupeDeFrance84



https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230429-macron-football.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/coupe-de-france-de-football-2023-248114

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/04/30/39894282.html





 

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14 avril 2023 5 14 /04 /avril /2023 05:25

« La seule autocritique que vous nous concédez est celle d'une défaillance pédagogique. Vous voulez apaiser le pays ? Je le crois sincèrement. Mais il n'y a qu'une solution : rendez aux Français les deux ans de vie que vous leur volez ! » (Laurence Rossignol, le 22 mars 2023 au Sénat).




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Depuis le débat sur la réforme des retraites, l'esprit populiste de la Nupes est entré jusqu'au Sénat, qui n'a pourtant pas de
"sénateurs insoumis". Ce court extrait ci-dessus, c'est la fin de la question (qui n'en était pas une) de la sénatrice Laurence Rossignol, lors de la séance des questions au gouvernement du mercredi 22 mars 2023 au Sénat.

Il est assez stupide, franchement illusoire, foncièrement démagogique et grossièrement simpliste de parler de
"deux ans de vie volés" alors qu'une année de travail n'est pas une année de vie et rien de volé, au contraire, mieux rémunérée qu'une pension de retraite. Et rappelons toujours qu'avant 1981, selon les directives du CNR, la retraite était à 65 ans à une époque où l'on mourait beaucoup plus tôt et où l'on protégeait très peu les travailleurs des risques sanitaires majeurs (genre amiante) qui écourtait réellement la vie de bien des travailleurs. Et on ne parlait alors pas "d'années volées".

Cette séance, alors présidée par Gérard Larcher, se tenait deux heures après le début de l'intervention du Président de la République Emmanuel Macron à la télévision. C'était donc l'occasion pour cette représentante de l'opposition d'en faire un rapide résumé... polémique bien sûr, sans omettre d'interpréter abusivement quelques paroles présidentielles. Sa question avait donc plutôt valeur de commentaire personnel. Elle s'adressait à la Première Ministre Élisabeth Borne mais elle n'a eu en réponse
"que" le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran.

Avant d'évoquer la réponse du ministre, rappelons qui est Laurence Rossignol, vice-présidente du Sénat depuis le 6 octobre 2020 (elle allait d'ailleurs présider la séance dès la fin des questions au gouvernement).

C'est une sénatrice de l'Oise de 65 ans (âge dépassé de départ à la retraite). Issue de la LCR et journaliste au journal de la CGT, Laurence Rossignol a rejoint le parti socialiste en 1981 et s'est retrouvée membre de plusieurs cabinets de ministres ou de responsables socialistes (Pierre Joxe, Laurent Fabius, Frédérique Bredin, etc.) et entre deux missions de cabinet, elle s'est retrouvée bombardée responsable à la MNEF. Élue locale de Compiègne et de l'Oise depuis la fin des années 1990, membre du Conseil Économique et Social (tremplin pour sa carrière), après plusieurs défaites aux élections législatives, elle est élue sénatrice de l'Oise en septembre 2011 et réélue en septembre 2017.

Le plus important a été qu'elle a été nommée membre du gouvernement sous le quinquennat de François Hollande, sous la houlette de Marisol Touraine, d'abord comme Secrétaire d'État chargée de la Famille, des Personnes âgées, de l'Autonomie et de l'Enfance, du 9 avril 2014 au 11 février 2016, puis Ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes du 11 février 2016 au 10 mai 2017. Dans la majorité socialiste se trouvait un jeune député socialiste de Grenoble, par ailleurs neurologue, du nom de ...Olivier Véran.

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C'est sans doute la raison pour laquelle Élisabeth Borne a laissé répondre son porte-parole. Car ce dernier n'a pas la mémoire courte et a rappelé que Marisol Touraine avait aussi défendu une réforme des retraites, et plutôt une réforme dure puisqu'il s'agissait d'augmenter la durée de cotisation jusqu'à 43 annuités, ce qui revient, pour ceux, entre autres ceux qui ont fait des études, qui ont démarré tardivement leur vie active, à ne pas pouvoir prendre leur retraite avant l'âge de 67 ans ! L'âge légal est l'arbre qui cache donc la forêt. Le plus important est la durée de cotisation (d'où d'ailleurs les revendications justifiées pour les carrières longues).

Olivier Véran a donc rappelé à Laurence Rossignol ce passé commun pourtant pas si lointain, 2014 : « En 2014, vous étiez ministre déléguée auprès de Marisol Touraine. J'ai été député socialiste et vous et moi, nous avons eu le courage de soutenir en 2014 une réforme des retraites portée par le gouvernement auquel vous apparteniez, qui a, pardonnez du peu, allongé la durée de cotisation pour tous les Français qui travaillent. Vous l'avez fait dans un souci de justice, avec pour objectif d'équilibrer un système de retraite qui, dans la durée, aurait été déficitaire. ».

Et aussi un autre rappel, la loi Travail adoptée avec l'article 49 alinéa 3 de la Constitution : « Permettez-moi aussi de vous rappeler, madame la sénatrice, qu'à l'époque, lorsque vous faisiez partie du gouvernement, un texte important, courageux et nécessaire pour l'économie de notre pays, a été adopté en ayant recours à l'article 49 al. 3. Pour autant, vous n'avez pas alors démissionné du gouvernement, pas plus que je n'ai quitté le groupe socialiste. Vous avez sans doute la mémoire sélective, moi pas ! ».

Le ministre a conclu : « Surtout, madame la sénatrice, nous venons du même bord. Quand nous disons que nous allons augmenter les petits salaires, qui sont inférieurs du SMIC, vous devriez dire oui ! Quand nous disons que nous allons améliorer les fins de carrière pour les salariés, vous devriez dire oui ! Quand nous disons que nous allons lever une contribution exceptionnelle sur les grands groupes qui rachètent des actions, vous devriez dire oui ! Et, quand nous proposons de mettre en formation les bénéficiaires du RSA qui sont loin de l'emploi, ou même de les employer, vous devriez applaudir avec nous, madame la sénatrice. C'est cela, avoir de la mémoire, du courage et de la conviction dans la continuité ! ».

Bien entendu, l'ancienne ministre Laurence Rossignol, désormais dans l'opposition, n'a pas été convaincue par son ancien partenaire de la majorité parlementaire. Ce n'est pas étonnant, une question qui n'en était pas une, c'est une séance de posture, montrer son positionnement à ses amis, à ses (grands) électeurs. Un ministre n'a jamais convaincu un membre de l'opposition lors des questions au gouvernement. Et réciproquement, évidemment.

Simplement, il faut parfois rappeler la réalité : quand ils sont au pouvoir, les membres de la Nupes savent prendre des décisions responsables et courageuses. Mais maintenant, dans l'opposition, avec une forte concurrence, sous l'emprise du gourou Mélenchon, plus aucun socialiste n'est prêt à gouverner la France et le PS est devenu juste un groupuscule démago et populiste, à l'instar du grand chef. Triste fin de parti qui se termine en eau de boudin.


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Sylvain Rakotoarison (22 mars 2023)
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28 mars 2023 2 28 /03 /mars /2023 05:41

« En vérité, la question de la peine de mort est simple pour qui veut l'analyser avec lucidité. Elle ne se pose pas en termes de dissuasion, ni même de technique répressive, mais en termes de choix politique ou de choix moral. » (Robert Badinter, le 17 septembre 1981 dans l'hémicycle).



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Celui qui a réalisé l'abolition de la peine de mort en France, mesure ô combien symbolique de la morale républicaine, Robert Badinter fête son 95e anniversaire ce jeudi 30 mars 2023. Avocat de grande réputation, érudit, meurtri par la Shoah, icône de la gauche morale (et pas seulement de la gauche, aussi de la droite morale), Robert Badinter, pour avoir convaincu François Mitterrand, pour l'avoir défendu dans quelques affaires, pour avoir été un ami fidèle, a été associé à son aventure politique.

Ainsi Robert Badinter a été Ministre de la Justice du 23 juin 1981 au 18 février 1986. Il a présenté le projet de loi abolissant la peine de mort le 17 septembre 1981 et la loi a été promulguée le 9 octobre 1981. En fait, ce n'était pas lui qui aurait dû la défendre. À l'origine, c'était le radical de gauche Maurice Faure, vieil ami de Cahors de François Mitterrand, qui devait le faire, nommé Ministre de la Justice dès le 22 mai 1981. Mais ce dilettante amoureux de la belle vie ne se voyait pas coincé place Vendôme et laissa la place un mois plus tard. Les deux hommes se sont retrouvés ensemble au Conseil Constitutionnel entre mars 1989 et mars 1995.

Une autre opportunité, effectivement, pour Robert Badinter : François Mitterrand l'a nommé Président du Conseil Constitutionnel du 4 mars 1986 au 4 mars 1995. Là encore, habileté institutionnelle du grand maître socialiste pour peser personnellement au maximum sur les institutions : il avait nommé en mars 1983 Daniel Mayer à ce poste pour neuf ans, mais a demandé à celui-ci de démissionner de la présidence (tout en restant membre) en 1986 pour pouvoir renommer un autre président pour encore neuf ans (son mandat s'achevant en 1988, celui de Robert Badinter en 1995 !).

En mars 1995, juste avant de quitter le pouvoir (à la fin de son second septennat), François Mitterrand a répété son coup de maître en y nommant pour neuf ans un autre ministre avocat, Roland Dumas, pesant ainsi (en principe) sur les institutions jusqu'en mars 2004 (alors qu'il est mort en janvier 1996 !). Mais Roland Dumas (qui va vers ses 101 ans) a dû quitter ses fonctions avant la fin de ces neuf ans (le 29 février 2000) à cause d'un scandale judiciaire.

Revenons à Robert Badinter. Dans une sorte d'optimisation politique, après son mandat au Conseil Constitutionnel ont lieu des élections sénatoriales : candidat à la proportionnelle sur la liste socialiste qui lui avait réservé une place éligible (donc sans risque de perdre), Robert Badinter fut élu deux fois sénateur des Hauts-de-Seine, du 24 septembre 1995 au 30 septembre 2011 (réélu le 26 septembre 2004).

Trois fonctions, cumulant près de trente années de vie politique... et pourtant, Robert Badinter ne s'est jamais considéré comme un homme politique. Pire, il a toujours été rétif à tout ce qui pouvait porter à la politique politicienne, aux jeux d'appareil, aux motions du PS, aux courants, aux petites manipulations, aux coups bas... comme les adorait François Mitterrand. Lui poisson dans l'eau et Robert Badinter comme un éléphant dans un aquarium.

Pourtant, il a toujours compté au parti socialiste et de tous les ministres de François Mitterrand, de tous les membres du parti socialiste, vivants ou morts, Robert Badinter est probablement l'un des rares, sinon le seul à ne pas avoir été "démonétisé", c'est-à-dire, à avoir gardé son aura malgré les temps, comme une conscience morale, une référence pour la gauche mais aussi (je le répète ici), pour une certaine droite morale (celle de Philippe Séguin et de Jacques Chirac, qui ont voté l'abolition de la peine de mort en 1981). Probablement que la précédente personnalité politique de gauche ayant eu une aussi grande aura morale, une conscience, c'était Pierre Mendès France. Ah si ! J'ai oublié Jacques Delors, lui aussi conscience politique hors paire, qui va vers ses 98 ans.

Une anecdote qu'a racontée François Bayrou aux journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Lorsqu'il a annoncé son soutien à la candidature du futur Président Emmanuel Macron le 22 février 2017, il avait indiqué qu'il ne marchanderait rien (sauf des circonscriptions pour les législatives). Rien pour lui-même ou ses proches, aucun ministère. Pour lui, le seul poste était possible, c'était Matignon, bien sûr, mais lorsqu'il fut acquis que le Premier Ministre serait Édouard Philippe, François Bayrou n'a pas insisté pour être membre du gouvernement.

Emmanuel Macron lui a proposé toutefois le Ministère de la Justice avec un argument massue : depuis Robert Badinter, il n'y avait plus eu de grand Ministre de la Justice, donc sa présence rétablirait le poids moral de la fonction. Si on sait bien s'y prendre, on arrive toujours par faire accepter ce qui aurait pu, dû être refusé initialement. Mais le mois suivant, François Bayrou a été contraint de démissionner pour l'affaire des assistants parlementaires du MoDem, une affaire qu'il a trouvée arriver très opportunément.

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Cette anecdote montre à quel point la présence de Robert Badinter hante la classe politique depuis une quarantaine d'années au moins. Ce n'est pas un hasard si Emmanuel Macron a voulu célébrer en grandes pompes le quarantième anniversaire de l'abolition de la peine de mort dans un cadre prestigieux, le Panthéon, en pleine pandémie de covid-19, le 9 octobre 2021, en honorant bien sûr Robert Badinter (on notera d'ailleurs qu'Emmanuel Macron adore honorer les "grands anciens", comme Daniel Cordier, Hubert Germain, Pierre Soulages, Edgar Morin, Philippe De Gaulle, etc.).

Que Robert Badinter soit apprécié à droite n'est pas une surprise : en plein gouvernement socialo-communiste du début des années 1980, il s'était opposé (en vain) aux nationalisations à 100% (51% suffisaient), il refusait le grand système public laïc unifié de l'éducation qui a mis 2 millions de Français dans la rue en juin 1984, et même il militait contre la loi contre les concentrations des groupes de presse, visant expressément le groupe de Robert Hersant (lui-même député de l'ancienne UDSR comme son ami François Mitterrand sous la Quatrième République). Pour lui, une loi ciblant une personne particulière n'est jamais bonne, et il pressentait que les groupes de presse devaient s'élargir face à la concurrence internationale.

Il hante la vie politique et il l'a hantée aussi il y a trente ans. Lors du renvoi de Michel Rocard de Matignon, en mai 1991, il était question de choisir un nouveau Premier Ministre. Dans leur livre sur Robert Badinter (sorti chez Tallandier en 2021), Dominique Missika et Maurice Szafran évoquent certains conseillers du Président Mitterrand lui proposer le nom de Robert Badinter pour Matignon, car il était resté populaire à gauche. François Mitterrand a écarté alors l'idée avec ce commentaire définitif : « Badinter ? Pas assez politique ! ». Robert Badinter lui-même l'aurait dit à son ami : « J'ai dit à Mitterrand que je n'avais pas la pointure. ». Édith Cresson fut nommée, avec le succès que l'on sait.

Mais le personnage hantait toujours la gauche quelques années plus tard. En décembre 1994, le PS n'avait plus de candidat "naturel" : Laurent Fabius était hors-jeu à cause de l'affaire du sang contaminé, Michel Rocard s'était fait dégommer par Bernard Tapie aux européennes de juin 1994, Jacques Delors avait annoncé son abandon pour manque de motivation. Il ne restait en boutique que Lionel Jospin. D'autres, sous la houlette de Laurent Fabius, auraient vu d'un bon œil Robert Badinter être ce candidat impossible à l'élection présidentielle de 1995, censée, selon les sondages, départager seulement Jacques Chirac et Édouard Balladur. Il fallait donc une présence morale sans risquer d'être élu ! François Mitterrand n'aurait pas trouvé cela inapproprié, mais selon les deux biographes déjà cités, Robert Badinter aurait rejeté résolument l'idée, en rappelant tous ses handicaps insurmontables : « Je suis riche, je suis Juif et j'ai aboli la peine de mort. ».

Contesté par les anti-abolitionniste comme le prototype de la gauche caviar, ce haut bourgeois, aussi mystérieux soit-il, a gardé ce trait qui fait de ses analyses politiques les plus écoutées du pays : il est d'une limpide lucidité. Merci pour la France !


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (26 mars 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Robert Badinter, l'anti-politique.
7 pistes de réflexion sur la peine de mort.
Une conscience nationale.
L’affaire Patrick Henry.
Robert Badinter et la burqa.
L’abolition de la peine de mort.
La peine de mort.
François Mitterrand.
François Mitterrand et l’Algérie.
Roland Dumas.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230330-robert-badinter.html

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