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17 mars 2009 2 17 /03 /mars /2009 12:20

(verbatim)


Assemblée nationale
XIIIe législature

Session ordinaire de 2008-2009

Compte rendu intégral
Première séance du mardi 17 mars 2009

Débat et vote sur la déclaration du Gouvernement relative à la politique étrangère

M. le président. L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, faite en application de l’article 49, alinéa 1, de la Constitution sur la politique étrangère, le débat et le vote sur cette déclaration.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, durant ces derniers mois, notre politique étrangère et notre politique de défense ont fait l'objet de plusieurs débats au sein de cette assemblée. Nous avons débattu à trois reprises de la question afghane, et vous avez dû, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, vous prononcer sur la prolongation de nos opérations militaires extérieures.

Sous l'impulsion du Président de la République, le domaine dit autrefois « réservé » est devenu plus ouvert et plus partagé. Nous l'avons voulu ainsi parce que les frontières entre les affaires intérieures et extérieures sont de plus en plus imbriquées.

Je rappelle respectueusement à l'opposition que par le passé le pouvoir régalien du Président s'affirmait pleinement, et François Mitterrand l'a utilisé sans réserve. De son soutien à l'installation des missiles Pershing américains en République fédérale d’Allemagne à l'interruption brutale de nos essais nucléaires en 1992, de l'intervention au Tchad en 1983 à celle en ex-Yougoslavie en 1992, jamais le vote de votre assemblée ne fut sollicité.

M. Henri Emmanuelli. Vous oubliez la guerre du Golfe !

M. François Fillon, Premier ministre. Seul notre engagement en Irak, en 1990, fit l'objet d'un vote de confiance, mais, vous le reconnaîtrez, il intervint alors même que les hostilités étaient déjà engagées.

M. Henri Emmanuelli. C’est faux !

M. François Fillon, Premier ministre. Mesdames, messieurs les députés, ce bref rappel du passé nous dispense d’avoir à écouter les leçons de démocratie que certains se plaisent à nous donner aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Parce que notre politique étrangère et de défense est l'affaire de la nation, me voilà devant vous,…

M. Henri Emmanuelli et M. Jean-Paul Lecoq. Mal à l’aise !

M. François Fillon, Premier ministre. … sollicitant la confiance de la majorité pour servir une certaine idée de la France dans le monde. Car oui, ce débat ne peut se résumer à la seule question de l'OTAN, qui ne constitue qu'un des volets de notre diplomatie et de notre sécurité.

Si l'Alliance atlantique était autrefois une réponse des démocraties face à la menace soviétique, et de ce fait l'un des symboles idéologiques et militaires de la guerre froide, elle n'est désormais qu'une structure parmi d'autres. Elle n'est plus et elle n'est pas l'expression d'une politique globale !

En 1966, notre retrait de l'organisation, au paroxysme des tensions entre l’Est et l’Ouest, constitua un choc. Mais en 2009, notre retour ne constitue qu'un ajustement qui, de ce fait, ne provoque aucun émoi dans le concert des nations.

Notre pleine participation aux structures de l'Alliance n'est qu'un moyen parmi d'autres de placer notre pays en capacité de répondre aux défis de notre temps.

La France n'est grande, mesdames et messieurs les députés, que lorsqu'elle est grande pour le monde. C'est ainsi : notre nation s’est toujours investie d'une responsabilité universelle et les circonstances géopolitiques en élargissent aujourd’hui les horizons.

L'interdépendance des enjeux sécuritaires, économiques, écologiques constitue la césure historique avec le XXe siècle. Elle est la conséquence de la disparition de la bipolarité d'hier, de l'extension de l'économie de marché et du développement accéléré des technologies de l'information et de la communication. Cette interdépendance signe la fin du monopole de la puissance et du progrès si longtemps détenu par les seuls Occidentaux. La spectaculaire émergence de la Chine et de l'Inde est le point saillant de ce rééquilibrage politique et économique.

Ce monde globalisé et complexe ne rend que plus légitime et plus nécessaire notre vocation internationale. En son nom, nous croyons à l'égale dignité des nations et à la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Face aux tyrannies, nous sommes l'avocat des droits de l'homme.

Devant l'uniformité rampante, nous défendons de Dakar à Québec la diversité des héritages culturels et linguistiques.

Face aux tentations hégémoniques, nous opposons la légalité internationale et le multilatéralisme.

Devant les grands enjeux actuels, nous militons en faveur d'une mondialisation réorganisée, plus équilibrée et mieux maîtrisée.

Cet universalisme français prolonge la défense de nos intérêts nationaux.

N'en déplaise aux esprits angéliques qui négligent les rapports de forces et aux idéalistes qui prophétisent la fin des nations, la France demeure une puissance qui a des objectifs propres.

Ces objectifs, nous les orchestrons de façon collective. Nos intérêts se conjuguent avec ceux de l'Europe. Ils s'articulent avec ceux de nos alliés les plus fidèles dont font partie les États-Unis, mais aussi avec ceux de nos partenaires qui entretiennent des relations de confiance avec nous.

Au Maghreb, au Proche-Orient, en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie, en Russie, il y a des grands peuples avec lesquels nous partageons une estime réciproque qui s'enracine dans les profondeurs de nos mémoires et de notre histoire.

La promotion de nos valeurs et de nos intérêts constitue notre permanence politique. Elle est servie, mesdames, messieurs les députés, par notre indépendance. Notre nation ne reçoit d'ordre de personne ! (Approbations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Elle doit être libre de décider par elle-même et pour elle-même. L'autonomie de notre politique est complète tant sur le plan stratégique, avec notre force de dissuasion nucléaire qui protège nos intérêts vitaux, que sur le plan diplomatique.

M. Jean-Paul Lecoq. Jusqu’à quand ?

M. François Fillon, Premier ministre. De notre engagement armé en Yougoslavie à celui en Afghanistan, de notre refus catégorique de nous associer à la seconde guerre en Irak à l'initiative franco-égyptienne en faveur de Gaza, la France agit et agira toujours selon ses convictions.

Lorsque nous relançons le dialogue avec la Syrie, tant critiquée sur certains de ces bancs, ou avec la Libye, lorsque nous demandons, avant la conférence de Bali, des engagements contraignants de réduction des émissions de CO2, lorsque nous prenons l'initiative d'intervenir dans la crise entre la Russie et la Géorgie, nous décidons et œuvrons selon nos vues.

Cette indépendance de ton et d'action qui est la marque de la France, s'inscrit dans notre choix résolu de la solidarité.

Solidarité d'abord avec l'Union Européenne pour laquelle tous les présidents de la République se sont engagés de façon continue, avec un objectif identique : faire de l'Europe, non pas seulement un espace économique, mais une véritable force politique.

Sous la conduite de Nicolas Sarkozy, la présidence française de l'Union aura révélé l'Europe sous un jour nouveau. Oui, mesdames et messieurs les députés, l'Europe peut influer et peser sur les affaires du monde ! L’Europe a un destin singulier dès lors qu'elle s'en saisit avec courage. L'Europe mérite, avec le traité de Lisbonne, une organisation institutionnelle plus stable. La France a la conviction que l'Europe ne peut rester un géant économique sans prétendre au premier rang diplomatique et militaire.

Solidarité ensuite avec nos alliés, notamment nos alliés américains. De la crise de Cuba à la première guerre en Irak, de la crise des euromissiles au 11 septembre 2001, la France ne s'est jamais départie de son amitié à l'égard du peuple américain.

La France, alliée mais pas vassale, fidèle mais insoumise, toujours fraternelle mais jamais subordonnée : voilà la nature de notre relation avec l'Amérique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

L'Amérique est une puissance globale, et la sagesse comme les réalités géopolitiques nous commandent de juger sa diplomatie sur ses actes et non pas sur ses intentions. L'amitié ne se confond pas avec la naïveté. L'élection du président Obama ouvre pourtant des perspectives que nous devons saisir. Je note d’ailleurs que la gauche a applaudi à tout rompre cette élection américaine, mais qu’elle n'hésite pas à marquer sa défiance vis-à-vis de l'Amérique dès lors que l'on évoque l'Alliance atlantique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Roland Muzeau. C’est vous qui regrettez Bush !

M. François Fillon, Premier ministre. Entre fascination et appréhension, il existe pourtant une voie pragmatique pour renouveler les instruments et les objectifs de la relation franco-américaine et de la relation euro-américaine.

Plusieurs sujets cruciaux réclament une nouvelle dynamique commune.

Il y a d'abord l'Iran.

Notre devoir absolu est d'éviter la contagion nucléaire. Pour cela, nous devons défendre le régime international de non-prolifération.

Nous avons renforcé les sanctions du Conseil de sécurité et poursuivi notre offre de dialogue avec Téhéran. Aujourd'hui, les États-Unis nous rejoignent sur cette approche ferme mais ouverte. Il semble qu'ils convergent vers l'idée que nous défendons depuis longtemps d'un dialogue franc et direct avec Téhéran.

Avec la Corée du nord, la crise iranienne a fait ressurgir la question nucléaire qui est aggravée par le développement des missiles balistiques de moyenne portée.

La question nucléaire doit être résolue par le partage encadré du nucléaire civil. Elle doit l'être aussi par une attitude responsable de la part de ceux qui détiennent la dissuasion. Dans cet esprit, nous demandons aux États-Unis comme à la Chine de ratifier le traité d'interdiction complète des essais nucléaires, comme nous l'avons fait nous-même il y a onze ans.

Nous soutenons la relance d'une négociation entre les États-Unis et la Russie, afin d'aboutir, de part et d'autre, à une dissuasion strictement minimale.

Nous souhaitons enfin l'ouverture sans délai de la négociation d'un traité d'interdiction de la production des matières fissiles pour les armes nucléaires.

Il y a aussi l'Afghanistan.

J'ai défendu ici même la nécessité de l'engagement de la France dans ce pays, qui fut la base arrière du terrorisme international.

M. Roland Muzeau. On voit ce que cela donne !

M. François Fillon, Premier ministre. Je veux ici saluer la mémoire du caporal Belda, du 27e bataillon de chasseurs alpins, qui a trouvé la mort au cours d'un accrochage dans la province de Kapisa, samedi dernier.

Mesdames, messieurs les députés, le courage et le professionnalisme de nos soldats font l'honneur de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Sécuriser l'Afghanistan, reconstruire ses infrastructures, réconcilier le peuple afghan, transmettre aux autorités légitimes les moyens d'exercer la pleine souveraineté de cet État : voilà notre stratégie. Pour tout cela, nous voulons rompre avec une gestion exclusivement militaire de la crise afghane. Il faut une approche politique d'ensemble et il semble que les États-Unis y soient désormais sensibles.

II y a enfin, avec nos partenaires américains, le sujet central de la lutte contre le changement climatique.

Sous l'impulsion de la France, l'Union européenne est parvenue à un accord très ambitieux. Mais l'Europe ne peut agir seule. Les États-Unis semblent enfin prendre, avec la nouvelle administration, la mesure de leurs responsabilités vis-à-vis des prochaines générations. Avec le sommet de Copenhague, il va falloir passer cette année aux décisions et aux actes.

Cette solidarité de la France s'exprime aussi avec l'espace méditerranéen.

Le projet de l'Union pour la Méditerranée marque notre ambition de dessiner les contours d'une étroite collaboration euro-méditerranéenne. Nous voulons désavouer et désarmer ceux qui en appellent au choc des civilisations. Nous refusons la logique des fanatiques. Nous refusons de nous laisser enfermer dans des schémas manichéens. Entre l'Occident et l'Orient, la France est et restera une médiatrice.

M. Jean-Paul Lecoq. C’est mal parti !

M. François Fillon, Premier ministre. En toute indépendance et malgré les critiques, nous avons repris le dialogue avec Damas, parce que nous croyons que la Syrie peut apporter une contribution importante à la paix dans la région.

Elle l'a montré au Liban, avec la conclusion de l'accord de Doha. Elle peut nous aider à convaincre le Hamas de faire le choix de la raison, c’est-à-dire celui de la réconciliation interpalestinienne et de la négociation avec Israël.

Dès le premier jour de la crise de Gaza, le Président de la République française a cherché une issue au conflit, dans un esprit d'équilibre et de justice. Cette crise et son bilan dramatique montrent qu'il n'y aura pas de solution militaire à ce conflit.

La France affirme qu'Israël doit pouvoir vivre en paix, dans des frontières reconnues, et que la Palestine doit pouvoir vivre libre, en jouissant de sa pleine souveraineté.

M. François Sauvadet. Très bien.

M. François Fillon, Premier ministre. Dans cette région, seul le courage des compromis politiques permettra de sortir de l'impasse. C’est dans cet esprit que le Président de la République a proposé de tenir au printemps un sommet de relance du processus de paix.

Solidarité aussi de la France avec l'Afrique.

Nous croyons en l'avenir de cet immense continent meurtri. C'est pourquoi nous demeurons l'un des principaux pourvoyeurs d'aide publique au développement.

Nous nous sommes engagés au Darfour en sécurisant les camps à l'est du Tchad. Nous avons amené, avec Bernard Kouchner, nos partenaires européens à nous appuyer dans la mise en œuvre de l'EUFOR, la plus grande opération militaire de l'Union européenne. Signe de son succès, les Nations unies viennent de prendre le relais de cette force européenne.

Solidarité enfin avec l'Organisation des Nations unies.

Pour la France, le droit international est l'expression d'une morale universelle. II est la source d'un ordre légal face à la violence.

En l'espace d'un demi-siècle, les interventions successives de l'ONU ont couvert les échecs de la Société des nations. Pour autant, la France estime que la gouvernance internationale, issue de l'après-guerre, ne répond que très partiellement aux enjeux d'aujourd'hui.

Nous soutenons le processus de réforme du Conseil de sécurité des Nations unies et militons en faveur de son élargissement. Nous avons proposé les premiers l'extension du G8 en G14. Nous avons joué un rôle moteur dans la réforme des droits de vote au sein du FMI.

Enfin, nous nous faisons sans cesse les avocats d'une meilleure représentation de l'Afrique au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale.

Avec l'Union européenne, la France a pris la tête des efforts pour bâtir une véritable régulation financière internationale.

M. Pierre Forgues. Hors sujet !

M. François Fillon, Premier ministre. Nous voulons corriger les causes de la crise actuelle. Le Conseil européen du 19 mars définira une position européenne pour le sommet du G20 à Londres le 2 avril.

La France exigera des changements clairs en matière financière : régulation des hedge funds et des agences de notation, encadrement des rémunérations, réforme des normes comptables, lutte contre les centres offshore.

Mesdames, messieurs les députés, s'il est une leçon que nous devons retenir du général de Gaulle, c'est bien celle qui consiste à ne jamais regarder l'avenir avec les yeux du passé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

La politique étrangère, c'est une action pour un idéal à travers des réalités. Ces réalités sont changeantes. Dès lors, rien n'est plus contre-productif et plus dangereux que de sacraliser le statu quo. Nous ne devons jamais hésiter à ajuster et rénover nos politiques dès lors que les faits et nos buts nous le recommandent.

À cet égard, la gauche a l'art d'être en retard d'une révolution stratégique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En 1966, elle s'opposa violemment à la décision du général de Gaulle de nous retirer des structures intégrées de l'OTAN. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.) Cette décision trahissait aux yeux de l'opposition d'alors : « une position hargneuse à l'égard de nos alliés américains et une sorte de poujadisme aux dimensions de l'univers ».

M. Roland Muzeau. Précisez qui vous citez !

M. François Fillon, Premier ministre. Ce prétendu « poujadisme » d'hier est devenu votre code de bienséance d'aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Henri Emmanuelli. Vous n’êtes pas dans votre rôle !

M. François Fillon, Premier ministre. Puis, la gauche s'opposa frontalement à notre force de frappe, et ce n'est qu'en 1978 que les socialistes acceptèrent du bout des lèvres notre dissuasion nucléaire, et cela après le parti communiste. (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP.) Enfin, je n'ose citer les terribles hésitations de certains de nos hauts responsables devant la chute du mur de Berlin et la réunification allemande.

M. Jean-Louis Bianco. C’est honteux !

M. François Fillon, Premier ministre. À cet instant, l'Europe échappait à l'ordre binaire auquel ils s'étaient accoutumés, mais auquel de Gaulle n'avait pu, lui, se résoudre.

M. Henri Emmanuelli. Guignol !

M. François Fillon, Premier ministre. Il est toujours piquant de voir l'opposition faire appel aux mannes du gaullisme, elle qui le combattit sans relâche !

Quarante ans après les faits, voir la gauche célébrer un héritage qu'elle a tellement contesté, c’est assez heureux mais finalement très conformiste. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Henri Emmanuelli. C’est dur de trahir !

M. François Fillon, Premier ministre. Atlantiste quand il fallait être gaulliste, attentiste lorsqu'il convenait d'être réactif, nostalgique lorsqu'il s'agit d'être pragmatique : la gauche ne s'est jamais distinguée par son audace stratégique. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Il y a dix-huit ans de cela,...

M. Roland Muzeau. Vous étiez alors séguiniste !

M. François Fillon, Premier ministre. ...je publiais dans un journal du soir une tribune, peut-être un peu provocante, en faveur du retour de la France dans l'OTAN.

Avec la chute du mur Berlin, j'estimais que nous devions profiter de l'occasion pour rééquilibrer l'Alliance au profit de l'Europe et convaincre nos partenaires de renoncer à la tutelle américaine.

À la lecture de cette tribune, le Président Mitterrand m'invita à venir m'entretenir de ce sujet avec lui.

Je garde en mémoire son verdict : «Vous voyez, me dit-il, nous avons eu tellement de mal à faire venir les Américains en Europe, qu'il ne faut rien faire qui puisse les en faire partir. » À l’évidence, François Mitterrand ne voulait pas d'une initiative qui aurait risqué d'entraîner le désengagement des Américains.

II ne m'appartient pas de juger de l’analyse d'un homme dont la pensée reflétait toute une époque, mais aussi toutes les ambivalences d'une posture oscillant entre indépendance et alliance, défiance et attirance à l’égard des États-Unis.

M. Henri Emmanuelli. Vous utilisez les morts !

M. François Fillon, Premier ministre. En revanche, il me revient de souligner que les termes du débat ont radicalement changé. Notre sécurité ne se joue plus à nos frontières et le spectre de la destruction mutuelle assurée ne pèse plus sur notre continent. La bipolarité d'antan a laissé place à la multiplicité des acteurs et à la dissémination des risques. La France et l'Europe ne sont plus menacées d'envahissement. Leur sécurité n'est pas pour autant acquise.

De nouvelles menaces exacerbées par les conflits en cours au Proche et Moyen-Orient ont surgi : le terrorisme global qui instrumentalise et détourne l'islam, la prolifération des armes de destruction massive.

L'URSS est devenue la Russie et s'est ralliée à l'économie de marché. L'empire soviétique disloqué, ses États satellites se sont libérés et ont rejoint l'Union européenne et, pour certains d'entre eux, l'Alliance atlantique.

Les États-Unis ont retiré 80 % de leurs forces de notre continent qu'ils ne jugent plus comme une priorité au regard des intérêts que recouvrent l'Asie et le Moyen Orient.

L'ONU, je l'ai dit, s'est renforcée et l'Europe s'est affermie. À la lisière de toutes ces transformations, l’OTAN n'est plus l'organisation dont certains parlent.

Il y a quarante ans, le général de Gaulle se retirait d'une organisation compacte, dressée face au pacte de Varsovie, et exclusivement dirigée par les États-Unis. Depuis, c'est la notion de coalition d'États volontaires à participation variable qui s'est imposée au détriment des schémas rigides de la guerre froide.

En 1966, mesdames et messieurs les députés, la logique des blocs réglait la géopolitique mondiale.

Rester dans les structures intégrées de l'OTAN, c'était aliéner les choix politiques de la France à cette logique binaire que le général de Gaulle voulait justement transcender.

En 1966, les États-Unis imposaient la doctrine de la riposte graduée à l'OTAN et ils n'y prévoyaient aucun partage des responsabilités. Rester dans les structures intégrées, c'était prendre le risque de nous retrouver engagés dans des conflits qui n'étaient pas les nôtres.

En 1966, il y avait 26 000 soldats américains sur le sol français, et aucune perspective de réorganisation de l'Alliance.

En 1966, la France disposait, depuis deux ans, d'armes nucléaires opérationnelles et notre stratégie de dissuasion et d'action nous portait à repenser les termes de notre autonomie.

Cette autonomie ne fut cependant jamais conçue comme une marque de neutralité ou de défiance vis-à-vis de l'Alliance atlantique dont nous sommes toujours restés membres.

Du reste, à peine le retrait décidé, nous confirmons par plusieurs accords notre volonté de continuer à travailler avec l'OTAN – l'accord Ailleret-Lemnitzer en 1967 et l'accord Valentin-Ferber en 1974.

En 1983, se tient à Paris un Conseil atlantique, ce qui constituait une première depuis 1966. En 1991, la France participe à la rédaction du nouveau concept stratégique de l'Alliance. Dans les années 1990, nous sommes de toutes les opérations en Bosnie, où la France, pour la première fois, participe à une opération de l'OTAN.

À partir de 1993, toujours sur décision de François Mitterrand, le chef d'état-major des armées est autorisé pour la première fois à intervenir au comité militaire de l'OTAN, sur les questions de maintien de la paix. À partir de 1994, il y est autorisé sur l'adaptation des structures de l'Alliance, sur la coopération avec l'Est et sur la non-prolifération.

Mme Élisabeth Guigou. Pourquoi changer, alors ?

M. François Fillon, Premier ministre. En 2004, plus d'une centaine de Français sont affectés aux commandements de Mons et Norfolk. Aujourd'hui, nos troupes sont engagées avec l'OTAN au Kosovo et en Afghanistan. Nous sommes le quatrième contributeur de l'OTAN en termes de forces et nous sommes présents dans quasiment tous les comités de l'OTAN.

M. Jérôme Lambert. Cela suffit.

M. François Fillon, Premier ministre. Insensiblement, les faits et la volonté politique recréaient donc notre participation croissante aux structures de l'OTAN. II s'agit aujourd'hui de franchir une dernière marche.

Cette dernière marche, prétend l'opposition, affaiblira notre indépendance, ce qui est naturellement faux. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il faut avoir peu confiance en la France pour penser un instant qu'elle puisse être ligotée par sa présence dans un comité.

M. Jean Michel. Si !

M. François Fillon, Premier ministre. Et c'est, au surplus, bien mal connaître le fonctionnement de l'OTAN.

Depuis la déclaration d'Ottawa de 1974, rien ni personne ne vient contester l'autonomie de notre stratégie nucléaire qui n'est pas négociable.

Chacun sait que la participation à l'OTAN n'entraîne aucune automaticité politique et que les décisions du Conseil atlantique sont prises à l'unanimité.

M. Roland Muzeau. Dans ces conditions, pourquoi changer ?

M. François Fillon, Premier ministre. Dois-je rappeler que l'Allemagne a refusé de s'engager en Irak aux côtés des Américains et que la Turquie a refusé de leur servir de base arrière pour ce même conflit ?

Dois-je souligner que même dans le cadre de l'Article V de l'Alliance, qui concerne la défense collective en cas d'agression d'un de ses membres, chaque nation décide des moyens qu'elle entend employer ?

M. Henri Emmanuelli. Dans ces conditions, pourquoi revenir dans le commandement intégré ?

M. François Fillon, Premier ministre. Nous conserverons l'indépendance de notre dissuasion nucléaire et notre liberté d'appréciation sur l'envoi de nos troupes. Nous ne placerons pas de contingent en permanence sous commandement allié en temps de paix.

Ces trois principes sont du reste posés par le livre blanc, et personne au sein de l'Alliance n'a trouvé à les contester.

Et puis j'invite ceux qui jouent sur la corde nationale à aller dire, les yeux dans les yeux, à Angéla Merkel, Gordon Brown ou José Luis Zapatero, que leurs nations ne sont pas souveraines dans leurs choix ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est pourtant la vérité !

M. François Fillon, Premier ministre. En réalité, la question de l'indépendance et de l'autonomie qu'agite l'opposition n'en est pas une. La vraie question, me semble-t-il, est la suivante : pourquoi prendre cette décision maintenant et pour quoi faire ?

Pourquoi maintenant ?

Nous sommes là au cœur d'un des principes clés de la politique étrangère : l'art d'utiliser les circonstances. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Quatre événements nous poussent à réinvestir l'OTAN : premièrement, la présidence française de l'Union européenne, qui a redonné du sens à l'action politique et à l'autonomie diplomatique de l'Europe, comme l'a montré la crise géorgienne ; deuxièmement, l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, qui doit servir de levier pour accentuer l'efficacité et le rayonnement de l'Union européenne ;…

M. Daniel Garrigue. Il n’y a aucun lien !

M. François Fillon, Premier ministre. …troisièmement, l'arrivée d'une nouvelle administration américaine, dont il faut saisir au plus vite les potentialités, avant que les habitudes ne reprennent le dessus ; (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) quatrièmement, la redéfinition du concept stratégique de l'OTAN, qui date de 1999.

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas sérieux.

M. François Fillon, Premier ministre. Voilà les circonstances qui militent en faveur d'une initiative française.

Que voulons-nous faire dans l'OTAN et que voulons-nous faire de l'OTAN ?

M. Maxime Gremetz. La Guerre ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. François Fillon, Premier ministre. C'est la seconde question qui importe.

Notre nation entend faire partager ses convictions. Pour la France, l'OTAN doit d'abord être un instrument de défense destiné à la protection de ses membres. Elle doit être avant tout une alliance militaire, fondée sur des valeurs communes, et non une sorte de fer de lance occidental agissant partout et sur tout.

M. Maxime Gremetz. Un bloc !

M. François Fillon, Premier ministre. En dehors de cela, elle est au service du droit international et ne peut être l'outil d'un interventionnisme unilatéral.

Un député du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. C’est ridicule !

M. François Fillon, Premier ministre. Nous voulons défendre la règle du consensus au Conseil atlantique dont dépend la prise en compte de nos positions. Nous voulons alléger et simplifier les structures actuelles. Nous voulons, dans le cadre des accords Berlin Plus, donner à l'Union européenne le pouvoir d'utiliser réellement les moyens de l'Alliance. Nous voulons, en réinvestissant l'OTAN, permettre à notre pays d'influer plus largement sur la définition des stratégies et la conduite des opérations. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Nous voulons en particulier, mesdames et messieurs les députés, que la Russie soit traitée en partenaire. C'est à Paris, en mai 1997, que fut signé, à l'initiative de la France et de l'Allemagne, l'acte fondateur sur la coopération et la sécurité mutuelles entre l'OTAN et la Russie.

La France, avec son partenaire allemand, croit à la nécessité de respecter la Russie.

M. Jean-Paul Lecoq. En plaçant des missiles en Pologne ?

M. François Fillon, Premier ministre. Cette grande nation européenne doit être amenée à contribuer aux équilibres du monde. Depuis le XVIIIe siècle, ce pays immense a toujours été au centre des équilibres européens. Comme avec les États-Unis, nous avons des liens particuliers avec le peuple russe qui, par deux fois, en août 1914 et en 1944, contribua à sauver la France. Le dialogue et la collaboration avec Moscou sont parfois difficiles mais ils sont indispensables. Ils ne peuvent en aucun cas se limiter au seul face à face avec les États-Unis. La France et l'Europe doivent y prendre toute leur place.

Nos relations avec la Russie ne doivent pas être bousculées par des élargissements précipités de l'Alliance atlantique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) C’est du reste dans cet esprit que nous nous sommes opposés, avec l’Allemagne, aux décisions qui prévoyaient ces élargissements lors du dernier Conseil atlantique. En retour, la Russie doit respecter l'indépendance des pays qu'elle a elle-même acceptée. Nous avons en partage la stabilité et la sécurité de notre continent. Nous sommes communément menacés par les risques de dissémination nucléaire et par le développement des armes balistiques de moyenne portée. Face à cette menace potentielle, c'est ensemble, c'est-à-dire avec la Russie, que nous pourrions imaginer un système de défense anti-missile compatible, étant entendu que, pour la France, cela ne saurait jamais être qu'un complément à la dissuasion nucléaire et en aucun cas une alternative.

De l'Atlantique à l'Oural, c'est ensemble que nous devons définir un nouveau pacte de sécurité continental !

Mesdames et messieurs les députés, la France prend toute sa place dans l'OTAN pour donner à l'Europe de la défense sa véritable dimension.

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas sérieux !

M. François Fillon, Premier ministre. Pourquoi l'Europe reste-t-elle encore en ce domaine, et malgré les progrès accomplis, bien en deçà de ce qu'elle devrait être ?

La raison en est simple, et elle n'est pas nouvelle – chacun la connaît – : pour nos principaux partenaires européens, un pas de plus vers l'Europe de la défense a toujours été considéré comme un pas en arrière dans l'OTAN. Les Européens ne veulent pas avoir à choisir entre l’Europe de la défense et la protection que les Américains, à travers l’Alliance atlantique, leur apportent. Cette crainte inhibe les initiatives. Nous voulons la dissiper.

Nous voulons stopper ce jeu à somme nulle qui consistait à monter l'Europe de la défense contre l'OTAN et l'OTAN contre l'Europe de la défense. Nous voulons sortir l'Europe de cette impasse en allant convaincre nos partenaires là où ils sont, c'est-à-dire à l'OTAN ! Et il est difficile de dire, comme je l’ai entendu tout au long de cette matinée, que notre pleine participation à l’OTAN va affaiblir l’Europe de la défense alors même que l’ensemble des pays de l’Union européenne salue la décision que nous venons de prendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mme Élisabeth Guigou. Cette décision, au contraire, va tuer l’Europe de la défense !

M. Maxime Gremetz. Quelle arrogance !

M. François Fillon, Premier ministre. Pour audacieuse qu'elle soit, cette décision n'est pas totalement inédite.

En 1990, alors que le débat sur l'architecture européenne post-guerre froide battait son plein, François Mitterrand s'interrogea sur la façon de résoudre la triple équation que nous avons décidé de trancher : comment réconcilier le statut particulier de la France et sa participation croissante dans les activités de l'Alliance ? Comment peser sur les évolutions de l'institution atlantique ? Enfin, comment, du même coup, faire émerger une défense européenne digne de ce nom ? Le Président Mitterrand tenta de résoudre cette équation, sans y parvenir.

Entre 1995 et 1997, Jaques Chirac lança, très officiellement, une initiative destinée à replacer la France dans l'OTAN avec, pour contrepartie, l'attribution du commandement de la zone sud et le renforcement du pilier européen de défense. L'initiative, on le sait, échoua.

Aujourd'hui, le Président de la République renouvelle les termes de cette ambition, avec la conviction que les conditions s'y prêtent et qu'il faut agir maintenant.

Elles s'y prêtent car les États-Unis reconnaissent enfin l'utilité et la légitimité d'une Europe de la défense plus solide.

M. Roland Muzeau. Tu parles !

M. François Fillon, Premier ministre. Elles s'y prêtent car l'Europe prend chaque jour un peu plus ses responsabilités.

M. Jean-Louis Bianco. Sans rien obtenir en échange !

M. François Fillon, Premier ministre. Sous la présidence française de l'Union européenne plusieurs décisions ont été actées sous l’impulsion d’Hervé Morin. Une direction de la planification civile et militaire sera créée au mois de juin prochain. Elle disposera d'une composante déployable. Des projets capacitaires à géométrie variable, tels que la création d'une flotte de transport aérien stratégique et le lancement d'un programme de satellites d'observation militaire, sont lancés.

Les vingt-trois opérations civiles ou militaires, que nous menons avec les autres pays de l’Union européenne en ce moment même, prouvent que l'Europe est en mesure de faire entendre sa voix et sa force.

C'est le cas dans le Golfe d'Aden face aux pirates. Je tiens à noter que ce sont la France et l’Europe qui, les premiers, ont pris l’initiative d’intervenir pour mettre un terme aux pratiques moyenâgeuses qui rendent le trafic maritime dangereux dans cette région. C'est le cas au Tchad où nous avons permis le retour de 40 000 réfugiés.

M. Jean-Paul Lecoq. Démonstration est donc faite qu’il n’y a pas besoin de l’OTAN !

M. François Fillon, Premier ministre. C'est le cas en Géorgie où l'Europe surveille la situation. Et ce pourrait être enfin le cas pour sécuriser les frontières de Gaza.

Au cœur de toutes ces opérations, il y a la France, qui est bien décidée à donner à l'Union européenne l'audace qui lui fit, par le passé, trop souvent défaut.

M. Henri Emmanuelli. Pourquoi changer, alors ?

M. François Fillon, Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, je connais les critiques de l'opposition et je les crois peu convaincantes.

Notre indépendance et notre autonomie, dit-elle, seront réduites.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est vrai.

M. François Fillon, Premier ministre. J'ai répondu à cette contre-vérité qui ignore le fonctionnement de l'Alliance atlantique.

En toute hypothèse, le destin de la France ne se décide pas dans des comités !

M. Pierre Gosnat. Ni à Paris !

M. François Fillon, Premier ministre. D'autres dans l'opposition prétendent que notre réintégration, dont ils conviennent qu'elle est déjà très largement engagée, serait inutile. Mais si elle est, comme ils le disent, inutile, notre pleine participation à l'OTAN n'a donc pas la gravité qu'ils tentent par ailleurs de démontrer ! J'ai répondu qu'il fallait sortir du statu quo pour provoquer au sein de l'Alliance et de l'Europe une nouvelle donne.

En mal d'arguments solides, l'opposition évoque enfin la question du symbole. C'est un argument que je ne balaye pas d'un revers de main. Notre histoire est traversée de symboles.

Quarante ans après la décision de 1966, que nous soyons encore là à évoquer l'héritage du général de Gaulle soulève en moi une fierté et une immense gratitude pour l'homme du 18 juin. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Maxime Gremetz. Mais vous l’enterrez une deuxième fois !

M. François Fillon, Premier ministre. Mais toute sa vie, le Général s'est défié des situations acquises. Les circonstances dictent les actes. Les actes doivent anticiper les situations de demain et non reproduire celles d'hier. Seuls comptent le rang et l'intérêt de la France. Or rien n'est plus contraire à notre rayonnement que la nostalgie.

M. Henri Emmanuelli. Vous confondez nostalgie et trahison !

M. François Fillon, Premier ministre. La donne géopolitique ayant changé, nous prenons l'initiative ! Nous la prenons en Europe, à l'ONU, au G20 et dans l'Alliance atlantique. Nous sommes en mouvement, l'opposition est à l'arrêt. Nous regardons le monde, l'opposition s'observe. Nous tentons de saisir le cours de l'Histoire, l'opposition tente vainement de la freiner.

Pour tous les peuples qui se font une certaine idée de notre République, la France reste la France, avec son exigence de vérité et son exigence de grandeur ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Maxime Gremetz. Soumission !

M. Henri Emmanuelli. Vous vous couchez !

M. François Fillon, Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, en son nom, et selon les termes de l'article 49, alinéa 1, de la Constitution, j'invite le Parlement à honorer le Gouvernement de sa confiance. (Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent le Premier ministre.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Copé, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

(M. Marc Laffineur remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président
M. Jean-François Copé. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, après le vote sur l’envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan en septembre 2008, après le vote sur le maintien de nos soldats en opérations extérieures en janvier 2009,…

M. Pierre Gosnat. Au service des Américains !

M. Jean-François Copé. …nous voici appelés une nouvelle fois à voter en conscience sur une décision dont la dimension symbolique – et probablement historique – n’a échappé à personne. D’abord parce qu’elle est une nouvelle illustration du changement institutionnel en cours.

M. Maxime Gremetz. Vous ne respectez même pas la Constitution !

M. Jean-François Copé. Pour s’en convaincre, il suffit de penser à 1966. Lorsque le général de Gaulle a décidé le retrait de la France du commandement intégré de l’OTAN, il l’a fait par une lettre au président américain, le Parlement français n’ayant eu son mot à dire que parce que l’opposition avait déposé une motion de censure.

En 2009, la représentation nationale est totalement impliquée dans le long processus de rénovation de nos relations avec l’OTAN. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Henri Emmanuelli. Nous n’avons pas le choix !

M. Jean-François Copé. Il y a eu l’élaboration du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, avec un débat ici même en juin, puis des consultations parlementaires nombreuses et approfondies – le groupe UMP ayant par exemple reçu le conseiller diplomatique et le chef d’état-major particulier du Président de la République. Enfin, nous en débattons ici même avant d’émettre un vote décisif. (« Mais non ! » sur de nombreux bancs du groupe GDR.)

J’étais un partisan résolu d’un engagement de la responsabilité du Gouvernement devant notre Assemblée.

M. Maxime Gremetz. Pas sur cette question !

M. Jean-François Copé. Je salue donc cette décision car elle marque, selon la formule que vous avez employée le 22 septembre dernier, monsieur Fillon, « la fin du domaine réservé ». Ce geste correspond à l’esprit et à la lettre de notre nouvelle Constitution.

M. Maxime Gremetz. Vous avez peur du peuple et de votre majorité !

M. Jean-François Copé. Ce n’est pas la IVe République non plus que la VIe, mais la Ve bis : un régime dans lequel le Président de la République est chargé de l’essentiel mais dans lequel le Parlement, expression de la souveraineté nationale, prend toute sa part aux grands débats et, le cas échéant, par un vote.

M. Jean-Paul Lecoq. C’est faux !

M. Jean-François Copé. C’est dire, mes chers collègues, que ce vote, aujourd’hui, est de très grande importance, qu’il crée un précédent.

M. Jean-Paul Lecoq. Pas un précédent démocratique en tout cas !

M. Jean-François Copé. Cette nouvelle responsabilité nous oblige et commande que nous parlions franchement. Aussi, au nom du groupe UMP, vous livrerai-je ma conviction et mon cheminement personnel sur cet enjeu majeur.

D’abord, notre retour dans le 39e comité de l’OTAN, celui des plans de défense, est souvent présenté comme une pièce d’un puzzle cohérent et à juste titre.

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas le sujet !

M. Jean-François Copé. Je concentrerai mon propos sur cette décision. Ne tournons pas autour du pot : l’OTAN est le cœur du débat qui nous mobilise aujourd’hui. (« Mais non ! » sur quelques bancs du groupe GDR.) Comme en toutes circonstances, la seule question qui vaille est celle de l’intérêt de la France. En conscience, ma réponse est simple.

M. Henri Emmanuelli. Parlons-en, de votre conscience !

M. Jean-François Copé. Il est dans notre intérêt de reprendre toute notre place dans le commandement de l’OTAN. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Maxime Gremetz. De Gaulle avait fait une erreur ?

M. Jean-François Copé. Nous sommes aujourd’hui dans la situation ubuesque…

M. Henri Emmanuelli. Nous n’avons pas le choix !

M. Jean-François Copé. …où nous subissons tous les inconvénients d’un engagement de poids dans les structures de l’Alliance sans en avoir aucun avantage.

Prenons l’exemple de l’Afghanistan : 3 400 de nos soldats sont engagés dans cette mission, sur le terrain. Nous avons même le commandement de la région de Kaboul. Pourtant, ne participant pas au commandement militaire au niveau stratégique, la France n’est pas associée à la préparation de décisions essentielles destinées à assurer le succès de l’opération. Qui peut soutenir que c’est normal ? (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Qui peut dire sérieusement qu’il trouve normal que nous soyons le quatrième contributeur en hommes, le cinquième en moyens financiers, sans être partie prenante de la définition de la stratégie au plus haut niveau ?

M. Gérard Bapt. Ça ne changera rien !

M. Jean-François Copé. Rien que pour cette raison, je suis partisan d’assumer toutes nos responsabilités. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Ma conviction est claire : si nous acceptons d’envoyer des soldats lorsque notre intérêt est en jeu, nous devons avoir le droit de participer aux décisions stratégiques sur leur emploi. C’est pour moi un devoir à l’égard des hommes et des femmes qui risquent leur vie pour la France.

Je le dis avec d’autant plus de vigueur que, comme mes collègues, j’ai étudié cette question sans a priori.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-François Copé. Je me suis forgé une conviction : comme pour beaucoup de Français, le 7 mars 1966 faisait pour moi figure de date mythique.

M. Maxime Gremetz. Vous faites preuve d’atlantisme !

M. Jean-François Copé. À l’école, on nous présentait presque cet événement comme la naissance de l’indépendance nationale. Nous finissions d’ailleurs par apprendre, par un raccourci, que la France était sortie de l’OTAN. La vérité est que nous ne l’avons jamais quittée. En effet, dès 1967, nous avons entamé une longue marche pour affirmer davantage notre participation à l’Alliance.

Je vous invite à lire l’ouvrage de Pierre Lellouche (Exclamations ironiques sur les bancs des groupes SRC et GDR), très documenté, qui montre très justement ce qu’il en est de l’histoire des relations entre la France et l’OTAN. Ainsi, dans l’intérêt de la France, François Mitterrand puis Jacques Chirac ont travaillé à un rapprochement progressif. Si Jacques Chirac avait finalement refusé que la France revienne pleinement dans le commandement de l’Alliance, c’est parce qu’il estimait que deux conditions n’étaient pas remplies.

La première concernait le partage des responsabilités au sein du commandement. Il y avait à l’époque un blocage de nos alliés américains. Les temps ont changé et bien des réticences sont tombées. La seconde condition, c’était l’avancée de la défense européenne. Là aussi, la situation a évolué et le malentendu est levé puisque, pour la première fois, il y a un an, les États-Unis ont reconnu explicitement cette avancée au sommet de l’OTAN à Bucarest.

Quant aux Européens, ils ont très clairement exprimé, dans le traité de Lisbonne, que défense européenne et OTAN constituaient les deux piliers d’une même stratégie.

Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse et de vous faire part de notre surprise en apprenant que les députés socialistes avaient choisi Laurent Fabius comme porte-voix pour ce débat. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – « Et alors ? » sur de nombreux bancs du groupe SRC.) Vous grognez, mais au moins, cette fois, c’est pour quelque chose. Surprise aussitôt transformée en impatience ! M. Fabius va sans doute nous dire, comme il l’a fait dans les médias, que la défense européenne est sa nouvelle obsession et que notre implication renforcée dans l’OTAN la rendrait impossible. Nous brûlons d’impatience, à droite, de comprendre comment il va l’expliquer sans rire, lui qui s’est opposé à toutes les avancées récentes de la défense européenne,…

M. Jean-Louis Bianco. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-François Copé. …en votant d’abord « non » au traité constitutionnel puis « non » au Traité de Lisbonne. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Au demeurant, soyons justes, cette incapacité à surmonter les clivages partisans pour reconnaître l’intérêt de la nation est un problème constant à gauche depuis plusieurs années. En effet, à gauche, vous êtes systématiquement contre et, dans le meilleur des cas, nous avons droit à l’abstention. Cela, même quand le consensus serait possible : « non » au traité de Lisbonne, « non » à la réforme des institutions, « non » à l’envoi de renfort en Afghanistan,…

M. Henri Emmanuelli. « Non » au paquet fiscal !

M. Jean-François Copé. …et, aujourd’hui, je crains que vous ne soyez défavorable à la réintégration du commandement intégré de l’OTAN.

Quand, à droite, nous nous trouvions dans l’opposition, nous avions une autre conception de l’intérêt national et nous avions voté, avec la majorité de gauche, en faveur de l’envoi de troupes en Afghanistan et de l’ensemble des décisions européennes. Il est des moments où nous assumons le fait que l’intérêt de la France est bien supérieur aux clivages partisans dont vous ne savez jamais vous défaire. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Sans vouloir aggraver mon cas, j’ai tout de même constaté que vous avez enfin accepté le principe de la dissuasion nucléaire en 1978. Je ne désespère donc pas de vous voir un jour nous rejoindre sur les positions que nous défendons aujourd’hui qui répondent à l’intérêt de la France.

M. Jean-Marc Roubaud. Il serait temps !

M. Jean-François Copé. Si la décision sur l’OTAN était incompatible avec le renforcement de la défense européenne, je l’affirme en conscience : je ne l’aurais pas acceptée. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Vingt-trois États membres de l’Union européenne sont membres de l’OTAN, dont l’ensemble des anciens pays de l’Est sans lesquels nous ne pourrons pas construire de défense européenne. Eux qui ont vécu le traumatisme de l’histoire ont quelques bonnes raisons de trouver dans l’OTAN une première explication de leur présence au sein de l’Europe. Nous devons nous montrer pragmatiques et constants. La réintégration de l’OTAN est une étape essentielle dans la construction de la défense européenne de demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Pierre Gosnat. Où est l’ennemi ?

M. Jean-François Copé. J’en viens rapidement aux objections à la démarche que nous appelons de nos vœux. Au sujet de l’indépendance de la France, je trouve vraiment choquant d’entendre que notre pays remettrait en cause son indépendance face aux États-Unis, alors même que le système de décision est individuel et qu’un pays comme l’Allemagne a refusé de participer à la guerre en Irak,…

M. Henri Emmanuelli. Parce que nous étions là !

M. Jean-François Copé. …tout en étant présent au sein des instances de l’OTAN. De la même manière, l’approche de la gauche est choquante car cette même gauche qui nous explique qu’Obama est l’homme de la situation,…

M. Roland Muzeau. Pour vous, c’était Bush, n’est-ce pas ?

M. Jean-François Copé. …passe son temps à expliquer – posture bien française à gauche et parfois ailleurs – que si les États-Unis sont contents, c’est mauvais, et s’ils sont mécontents, c’est bien. Cette approche n’est ni juste ni fausse mais totalement décalée par rapport à la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Enfin, la France perdrait sa vocation diplomatique spécifique...

M. Pierre Gosnat. C’est déjà le cas !

M. Jean-François Copé. …en intégrant le 39e comité de l’OTAN. Je me fais pour ma part une autre idée du message universel de la France. Il ne se banalisera pas parce qu’elle entrera au sein du 39ecomité.

M. Roland Muzeau. Le message de la France est déjà banalisé !

M. Jean-François Copé. Ce sera en revanche le cas si elle renonce à ce à quoi elle croit profondément depuis des décennies. Nous sommes convaincus, à l’UMP, que la France a bien des messages à délivrer au monde.

En outre, notre présence au sein de l’OTAN permettra justement la rénovation de cette institution qui en a bien besoin, et nous permettra d’assumer, partout où le monde l’exige, les valeurs universelles de notre pays.

M. Jérôme Bignon. Très juste !

M. Jean-François Copé. Il est donc dans l’intérêt de la France d’intégrer le 39ecomité de l’OTAN et de montrer par là que nous sommes pragmatiques, que nous savons regarder l’avenir – première condition de l’aptitude d’un homme d’État au commandement.

Tant pis si la gauche a du retard,…

M. Henri Jibrayel. Hou !

M. Jean-François Copé. …mais nous devons assumer cette décision dans l’intérêt de la France et des valeurs universelles que nous servons. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Fabius.

M. Laurent Fabius. Monsieur le président, mes chers collègues, je souhaite, monsieur le Premier ministre, commencer mon propos en formulant à votre égard un compliment. Je trouve qu’il faut beaucoup de talent – et vous en avez – pour exposer pendant une demi-heure les raisons qui justifient, selon vous, la réintégration de la France dans le commandement militaire de l’OTAN, sans aborder les trois contradictions majeures qui faussent ce débat.

La première, évidente, est chronologique. Vous affirmez que ce débat est décisif ; sauf que la décision a déjà été prise et rendue officielle par le Président de la République la semaine dernière. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Jean-Michel Boucheron. Eh oui !

M. Jean-François Copé. Sauf si l’on ne vote pas la confiance !

M. Laurent Fabius. Je relève une contradiction de procédure ensuite. On nous dit que nous appliquons la Constitution, le Gouvernement engageant sa responsabilité. Il y aurait eu d’autres possibilités. Certains pensent que sur une affaire aussi essentielle, il aurait fallu consulter la population. Depuis la révision constitutionnelle, aux termes de l’article 50-1, il aurait également été possible, pour le Gouvernement, de faire une déclaration pouvant donner lieu à un vote mais sans que sa responsabilité ne soit engagée. Or, si vous choisissez d’engager aujourd’hui la responsabilité du Gouvernement, monsieur le Premier ministre, nous avons bien compris que ce n’était pas seulement sur la question de la réintégration de l’OTAN mais, plus généralement, sur votre politique étrangère.

M. Frédéric Lefebvre. Les deux sont liées !

M. Laurent Fabius. Vous auriez ainsi quelque difficulté à assumer votre attitude – troisième contradiction. En effet, si je vous ai bien entendu, vous soutenez, comme le Président de la République, que cette décision, au fond, ne change rien. Ne faisons-nous pas déjà partie de 38 comités sur 40 ? Ne nous contenterions-nous pas d’interpréter une partition qui existe déjà ?

Mais si c’était le cas, mes chers collègues, alors pourquoi ces déclarations officielles du Président de la République ? Pourquoi cet engagement de responsabilité ? Pourquoi la nouvelle position de la France est-elle la question centrale du soixantième anniversaire de l’OTAN ? Pourquoi, dans tellement de chancelleries à travers le monde, qui jusqu’ici n’avaient pas été particulièrement enclines à aider l’indépendance de la France, se réjouit-on de cette nouvelle position ?

Et surtout, mes chers collègues qui vous en prenez à la gauche, pourquoi un Premier ministre issu de vos rangs fustige-t-il cette décision en disant – le terme est peut-être excessif, mais c’est le sien – qu’elle risque de nous faire passer « sous les fourches caudines d’un pays étranger » ? C’est un Premier ministre UMP qui parle ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Et si l’on m’objecte que ce point de vue reflète une tendance particulière, je rappellerai qu’un autre Premier ministre, qui a plus de retenue,…

M. Henri Emmanuelli. À Bordeaux !

M. Laurent Fabius. …s’interroge publiquement, avec une retenue qui n’a d’égale que sa cruauté.

M. Bernard Deflesselles. Il y a d’autres Premiers ministres. Pourquoi ne les citez-vous pas ? Il y a M. Raffarin, par exemple.

M. Laurent Fabius. Comme vous sentez très bien cela, monsieur le Premier ministre, vous changez de registre et vous nous dites en substance : c’est une décision fondamentale, et j’en apporte les justifications. Je voudrais me situer sur ce terrain, car c’est effectivement la question principale.

Mais auparavant, une précision, tout de même. Vous nous avez parlé de politique étrangère, et c’est normal : les choses sont liées. Je n’ai pas le temps, à cette tribune, de dresser le bilan détaillé de la politique étrangère de M. Sarkozy. Mais enfin, si j’en av

ais le temps, je distinguerais ce qui, incontestablement est bon, c’est-à-dire l’énergie dont fait preuve le Président de la République ;…

Mme Françoise de Panafieu. C’est déjà beaucoup !

M. Laurent Fabius. …ce qui, incontestablement, est moins bon, je pense aux palinodies absolument incompréhensibles sur nos relations avec la Chine ; ce qui est proprement incongru, je pense aux déclarations sur le Québec ; et ce qui est carrément mauvais, je pense au scandaleux discours de Dakar sur « l’homme africain » (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR), je pense à la difficulté d’établir des relations stables avec nos voisins européens, je pense aussi, et ce n’est pas une petite affaire, à notre absence de ce continent du futur qu’est l’Asie et du Pacifique, alors que c’est là que se jouera l’avenir dans bien des domaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J’en viens aux justifications que vous avancez, monsieur le Premier ministre.

La première, nous l’avons tous entendu, c’est le contexte international, et ce à partir d’un raisonnement qui relève d’une pratique que M. le Président de la République affectionne, celle des fausses évidences. On nous dit : écoutez, la décision prise par le Général de Gaulle, c’était il y a quarante-trois ans ; depuis, le monde a changé ; donc, il faut changer.

C’est vrai que le monde a changé. Personne ici n’ira contester que l’URSS n’existe plus, que le Pacte de Varsovie n’existe plus,…

M. Pierre Lellouche. Et vous étiez pour le désarmement unilatéral, rappelez-vous !

M. Laurent Fabius. …que l’Europe s’est développée, que les pays émergents sont apparus. Bien sûr, le monde a changé. Mais il ne s’agit pas de disserter sur les changements du monde, il s’agit de savoir si l’occurrence de ces changements et la vision qu’en a la France doivent nous amener ou pas à changer de position sur nos relations avec l’OTAN.

Et là, nous sommes en complet désaccord. Vous avez évoqué la décision du Général de Gaulle, à laquelle il est tout à fait exact que les socialistes – et d’autres, d’ailleurs – étaient opposés. Mais quels sont les fondements de la décision qu’il a prise en 1966 ? Ils résident en ceci que, dans un regard anticipateur, il était opposé au monde bipolaire, et appelait de ses vœux un monde multipolaire. C’est ce que nous, socialistes, groupe SRC, nous voulons faire aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Et vous êtes complètement à contre-courant, alors même que ce monde multipolaire est en vue, de vous raccrocher à la logique des blocs et de faire en sorte que l’alpha et l’oméga de votre position soit la défense de l’OTAN, la défense de « l’Occident ». Nous n’acceptons pas ce concept, qui est dangereux, parce qu’il est à la base de tensions dans le monde. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Pierre Lellouche. C’est n’importe quoi !

M. Laurent Fabius. Le contexte international, c’est la première justification. Elle ne vaut pas.

La deuxième, ce sont les fameuses « contreparties ». Je veux m’y arrêter un instant, si toutefois on veut bien, sinon m’entendre, du moins m’écouter.

Vous nous dites, monsieur le Premier ministre : il y a des contreparties militaires. Les ministres nous ont parlé en commission, et j’imagine que vous n’allez pas le démentir, du fait que nous seraient « promis », si nous réintégrons le commandement militaire, un commandement à Norfolk, en Virginie, et un autre à Lisbonne. Et je vois le ministre des affaires étrangères qui approuve.

Tous les spécialistes de ces questions, et il y en a de nombreux dans cet hémicycle, savent que ces commandements – comment dire, pour ne vexer personne ? – ne sont pas les commandements majeurs.

M. Bernard Deflesselles. C’est faux ! C’est une contrevérité !

M. Laurent Fabius. Et d’ailleurs, si je devais avancer une preuve irréfutable de ce que j’avance, je rappellerais que le Président Chirac, qui avait lui-même examiné la possibilité de réintégrer le commandement militaire de l’OTAN,…

M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées. Mitterrand aussi.

M. Laurent Fabius. …avait exigé des contreparties. Mais celles proposées, les commandements de Norfolk et Lisbonne, ne pouvaient suffire.

M. Bernard Deflesselles. Non ! Vous mélangez tout !

M. Patrick Ollier. C’est faux !

M. Laurent Fabius. Si vous contestez cela, M. le Premier ministre pourra nous répondre tout à l’heure.

Je voudrais savoir si ces commandements sont bien les mêmes qu’avait demandés – en vain – le Président Chirac, ou bien si vous avez simplement abaissé les demandes de la France.

Il y a un domaine fort important que vous n’avez pas abordé, monsieur le Premier ministre, et qui pourtant devrait tous nous intéresser, mes chers collègues, je veux parler des contreparties industrielles. Ce sujet est très souvent abordé dans les milieux spécialisés. On nous dit : si nous réintégrons le commandement militaire, nous allons obtenir des marchés qui, jusqu’à présent, étaient réservés aux Américains.

J’aimerais que ce raisonnement soit exact, mais je crains qu’il ne le soit pas. La France détient un certain nombre de marchés, qui représentent beaucoup d’emplois, et ce non seulement parce que ses matériels sont excellents, mais aussi parce que sa diplomatie est spécifique. À partir du moment où nous serons banalisés dans l’OTAN, je crains fort que nous cesserons de les obtenir.

Et puis, il y a une troisième contrepartie, qui n’est pas la moins importante. On nous dit : actuellement, vous ne pesez pas dans la définition du futur de l’OTAN ; réintégrez le commandement militaire, et vous pèserez. C’est une contrepartie en termes d’efficacité.

Je crois qu’il y a là une erreur complète dans la logique. Vous ne nous dites pas : d’abord, pesons sur le futur de l’OTAN, définissons la stratégie, et ensuite nous verrons comment nous devrons réintégrer. Vous nous dites : d’entrée de jeu, soyons à 100 % dans l’OTAN, et nous verrons ensuite quel sera le futur.

Dans votre exposé, monsieur le Premier ministre, il y avait beaucoup de questions précises dont les réponses ne l’étaient pas. Nous aimerions tous savoir quels sont les pays nouveaux que vous accepterez ou que vous n’accepterez pas comme pays membres. Vous avez cité l’Ukraine, la Géorgie. Combien de temps votre position durera-t-elle ? Mais l’on parle d’autres pays, situés en Asie ou ailleurs.

M. Bernard Deflesselles. Ce n’est pas une logique de bloc, alors ! Il faudrait savoir !

M. Laurent Fabius. Nous aurions aussi aimé que vous nous disiez quelle gouvernance vous prévoyez. Nous aurions aussi aimé que vous nous disiez, au-delà d’une pétition de principe, ce que vous acceptez en termes de localisation géographique. Car enfin, la réalité, c’est que le pacte atlantique et l’action de l’OTAN, initialement conçus d’une manière strictement défensive, et uniquement sur l’Europe, nous font agir aujourd’hui jusqu’en Afghanistan, et jusqu’à nous préoccuper de l’environnement.

Bref, nous avons le sentiment que votre deuxième justification, celle qui met en avant les contreparties, n’est pas pertinente, elle non plus.

Et la troisième, on y a fait allusion en souriant, c’est tout simplement la question de la défense européenne.

M. Frédéric Lefebvre. Ah ? Ça vous intéresse ?

M. Laurent Fabius. Mais bien sûr ! Ça nous intéresse tous !

Et là, il est un mot que vous n’avez pas employé, monsieur le Premier ministre, mais vos ministres l’ont fait en commission. Il nous ont dit : il faut faire un « pari ». Si la défense européenne n’avance pas, c’est parce que nous n’avons pas réintégré le commandement de l’OTAN. Donc, parions, et les choses vont avancer.

D’abord, je vous mets en garde : en matière de sécurité, je me demande s’il faut faire des paris. C’est une première question.

M. Roland Muzeau. Les paris, ils les perdent tous !

Mais la deuxième question est la suivante. Il y a un juge de paix, pour ceux qui connaissent ces sujets, un juge de paix absolu. Cela fait des années et des années que nous avons une controverse avec les Américains, avec les Britanniques, sur la question d’un état-major massif au niveau européen. Avez-vous avancé sur ce point ? Pouvez-vous nous dire que vous avez des garanties qui vous permettraient d’engager ce pari avec une chance de le gagner ?

D’autre part, lorsque vous parlez de la défense européenne, le raisonnement s’inverse totalement. On sait que dans toute une série de pays de l’Est, on est opposé à la constitution d’une défense européenne. À partir du moment où la France – qui défend, jusqu’ici, un pilier européen – se sera elle-même ralliée à une intégration de l’OTAN, croyez-vous sincèrement, monsieur le Premier ministre, que les pays de l’Est, et d’autres, vont défendre ce concept que la France elle-même aura d’une certaine manière, à leurs yeux, abandonné ? Croyez-vous qu’ils engageront les dépenses militaires nécessaires ? Nous ne le croyons en aucun cas. Vous nous dites que la réintégration dans le commandement militaire va encourager la défense européenne, vous risquez au contraire de la tuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je veux ajouter deux ou trois arguments qui mériteraient d’être examinés.

D’abord, une question absolument incontestable se pose, celle du consensus. Il n’y a pas beaucoup de terrains de consensus, en France, et vous-même, monsieur le Premier ministre, vous brocardez la gauche en disant : il faudrait le consensus, il faudrait le consensus. Mais alors que le consensus existait jusqu’ici sur ce terrain, et depuis des décennies, c’est vous-même, monsieur le Premier ministre, et vous, mesdames et messieurs de l’UMP, qui faites en sorte qu’il ne puisse plus exister. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous nous dites : l’Amérique change. Et vous, comme M. Copé, avez cité M. Obama. Nous sommes, comme vous, j’en suis sûr, ravis de l’élection de M. Obama, et très admiratifs de ces premiers pas. Mais enfin, nous devons à l’histoire de rappeler que ce n’est pas avec M. Obama que M. Sarkozy a décidé la banalisation de la position de la France, c’est avec le peu regretté Président Bush. Et il ne faudrait pas réinterpréter l’histoire aux fins de justification d’une décision contestée. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Frédéric Lefebvre. C’est vraiment n’importe quoi !

M. Laurent Fabius. Il y a bien sûr la question très importante de l’indépendance. Pour qu’il n’y ait pas de faux débat, j’écarte tout de suite la question de savoir si, oui ou non, nous abandonnons notre indépendance nucléaire. Il n’en est pas question. Et dans les textes, juridiquement, nous conservons totalement notre indépendance nucléaire, de même que nous conservons la possibilité d’engager ou non nos troupes.

Mais l’indépendance, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs de l’UMP, ce n’est pas simplement une question juridique. C’est une question de volonté, et une question pratique. Au moment de la deuxième guerre d’Irak, qui peut croire que si nous avions réintégré le commandement militaire de l’OTAN, la France aurait pu – car si l’on parle de l’Allemagne, elle n’était pas à la tête de ce mouvement –, avec la vigueur qu’elle a suscitée, prendre la tête d’un mouvement qui était juste et qui a fait école partout dans le monde ? Nous aurions été dans l’incapacité pratique et politique de le faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Dominique Dord et M. Patrick Ollier. Ce n’est pas vrai !

Mme Claude Greff. Mensonge !

M. Laurent Fabius. Bien sûr que si ! Vous le contestez parce que cela vous touche. Je le répète, l’indépendance n’est pas simplement une question juridique, c’est une question pratique. Et si la France avait été banalisée et alignée sur la décision des Américains, il aurait été absolument impossible de prendre la tête de ce juste combat. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Reste, évidemment, la question de l’influence. Comme cela a été souligné, l’influence, c’est une question de symboles. On peut dire : les symboles, ça ne compte pas. Si, ça compte énormément. Nous savons tous que les hommes et les femmes agissent, et parfois même donnent leur vie pour des symboles.

M. Franck Gilard. Ça ne risque pas de vous arriver ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Laurent Fabius. Ne vous rapetissez pas, monsieur. C’est suffisant, comme vous êtes.

Parmi les symboles qui expliquent que la France soit plus que la France, qu’elle soit plus grande que sa population et que sa superficie, il y a le fait qu’à travers l’histoire, et depuis des décennies, quelle que soit la diversité de ses gouvernements, elle a toujours défendu un certain nombre de causes, un certain nombre de valeurs, a toujours été fidèle à un certain nombre de principes. Et parmi ces principes, il y a le fait que si nous avons toujours été fidèles en amitié avec les Américains, nous avons toujours refusé d’être alignés sur les décisions américaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Que vous le vouliez ou non, au Proche et au Moyen-Orient, en Amérique du Sud, en Russie, en Afrique, si l’on sait demain que la France est rentrée dans le rang, et c’est ainsi que votre décision sera considérée (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP. – « Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC), cela portera tort à son influence. Vous aurez beau le contester, nous le verrons dans les faits.

Dès lors, nous vous demandons, monsieur le Premier ministre, que le Parlement de la République soit saisi chaque annéed’un rapport exposant aussi précisément que possible ce que nous aura rapporté ou ce que nous aura coûté, en termes de défense européenne et de défense nationale, de politique étrangère et de politique de sécurité, la décision que vous vous apprêtez à prendre.

M. Jean-François Copé. Mais enfin !

M. Laurent Fabius. Ainsi, nous aurons un état précis qui mettra fin aux querelles que je suis en train d’entendre.

M. Dominique Dord. Les faire naître plutôt !

M. Frédéric Lefebvre. Et comme cela, M. Fabius aura son rapport !

M. Laurent Fabius. Pour terminer, je ferai, comme chacun d’entre nous, référence au général de Gaulle, avec qui je n’ai pas eu de conversation, à la différence de vous qui en avez eue avec le Président Mitterrand. En 1958, le général de Gaulle a écrit un mémorandum au Président Eisenhower et au Premier ministre McMillan. En homme qui aimait les mots et qui connaissait leur force,…

M. Henri Emmanuelli. Il savait écrire, lui !

M. Jean-François Copé. Quelle comparaison scandaleuse !

M. Laurent Fabius. …il dit, un peu plus tard, dans ses « Mémoires d’espoir », à propos de ce texte : « Dès 1958, je hisse les couleurs ». Aujourd’hui, la question est de savoir si nous pourrons continuer à hisser les couleurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Pas simplement les couleurs des Français, mais les couleurs des Européens et celles de tous les peuples du monde qui sont attachés, comme nous, comme vous, mes chers collègues, à la liberté, à l’égalité, à la paix, au développement et à l’indépendance des peuples.

Avec le Président de la République, vous nous dites que cette décision nous apportera un plus : nous pensons que c’est illusoire. Qu’il n’y a aucun risque : nous pensons qu’il y a des risques. Que ce sera autant d’indépendance et plus d’influence : nous vous mettons en garde, nous pensons que ce sera vraisemblablement moins d’indépendance et, en tout cas, moins d’influence.

M. Jean-François Copé. Faux !

M. Laurent Fabius. C’est la raison pour laquelle, monsieur le Premier ministre, nous ne pouvons pas vous suivre, car ce serait contraire à notre conception de l’intérêt de la France. (Mmes et MM. les députés du groupe SRC et quelques députés du groupe GDR se lèvent et applaudissent longuement. – Les autres députés du groupe GDR applaudissent.)


à suivre...

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11 mars 2009 3 11 /03 /mars /2009 22:15

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Publié le 11-03-09 à 15:03   
 
Discours lors du colloque de la Fondation pour la recherche stratégique « La France, la défense européenne et l’OTAN au XXIème »   
 
 Paris - Mercredi 11 mars 2009


Monsieur le Premier ministre, Cher François,
Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Secrétaire général de l’OTAN,
Monsieur le Secrétaire général, Haut Représentant de l’Union européenne,
Monsieur le Président de la Fondation pour la recherche stratégique,
Mesdames et Messieurs,

Je veux d’abord remercier Bruno RACINE, d’avoir pris l’initiative de ce colloque. Parce qu’il est étonnant, que l’on soit partisan de l’OTAN, que l’on soit adversaire ou réservé, il y a une chose que l’on devrait avoir en commun, c’est le souci d’éclairer l’opinion et d’en débattre. Qu’est-ce que sont ces responsables politiques qui affirmeraient des convictions, par ailleurs extrêmement légitimes, quelles qu’elles soient, sans débat ? Ce qui est illégitime, c’est  de ne pas aller jusqu’au bout de sa logique et de ne pas informer les Français sur la réalité de l’OTAN et la réalité de la participation de la France au sein de l’OTAN. Cela, c’est un point qui doit éclairer tout le monde.
Et ce que j’ai découvert avec le Premier  ministre et avec le gouvernement, c’est qu’alors que nous sommes dans l’OTAN, car nous y sommes, il y a bien peu de personnes qui le savent.
Y-a-t-il donc des activités si secrètes qu’on doive s’abstenir d’expliquer aux Français ce que l’on y fait ? On a souvent parlé du mot « rupture », s’il y a bien une rupture, c’est celle de ce Gouvernement, dans la transparence des décisions qu’il assume. J’y reviendrai.
C’est un débat qui doit être mené et donc, Monsieur le Président, vous avez eu raison.

Et puis, vous nous réunissez dans l’amphithéâtre Foch, ce qui est tout un symbole : il fut le premier Commandant en chef des forces alliées européennes et américaines pendant la 1ère guerre mondiale. Le concept d’allié et d’ami ne date pas du début de mon quinquennat. Parfois j’ai le sentiment que c’est tout nouveau. Donc, vous m’avez facilité la tâche dans l’amphithéâtre Foch. 

Bruno RACINE a bien présenté les conclusions de votre débat, avec la capacité de synthèse inégalable qui est la sienne et avec la courtoisie – il faut que je traduise – pour dire différence de sensibilités ou violence de confrontation des opinions.

En tant que Chef des armées et donc garant de la défense des intérêts vitaux et de la sécurité de la France, je porte la responsabilité des choix stratégiques de la Nation. Et je voudrais affirmer une première idée, c’est que notre réflexion stratégique ne peut pas rester [...]

http://elysee.fr/download/?mode=press&filename=11.03__Conclusion_colloque_Defense_Otan.pdf
 

En tant que Chef des armées et donc garant de la défense des intérêts vitaux et de la sécurité de laFrance, je porte la responsabilité des choix stratégiques de la Nation. Et je voudrais affirmer unepremière idée, c’est que notre réflexion stratégique ne peut pas rester figée dans un monde où lesconditions de notre sécurité ont radicalement changé. Ce n’est insulter personne que de le dire, c’estappeler l’ensemble des responsables à réfléchir. Un concept stratégique n’est pertinent que s’il estadapté à la situation non pas que connaît notre pays, mais qu’il va connaître. Car, non seulement on nedoit pas avoir de retard dans la définition d’un concept stratégique, mais, de préférence, il faut avoir del’avance.
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2/12J’ai souhaité il y a 18 mois, que s’engage un débat lucide, serein et transparent, associant nosresponsables politiques et militaires, les parlementaires, les chercheurs. Cela a abouti à un nouveau« Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale », 14 ans après celui de 1994 – et il faut rendre icihommage à Edouard BALLADUR qui en avait alors pris l’initiative.Il fallait remettre en cause nos certitudes et, plus difficile, nos habitudes. Car j’observe que nous avonsdes habitudes qui ne correspondent pas forcément à des certitudes et parfois des complaisances. Et, cen’est pas tout de remettre en cause des certitudes. Ce sont les complaisances et les habitudes qu’il fautremettre en cause et c’est souvent ce qu’il y a de plus difficile en France.La France n’est plus aujourd’hui menacée d’une invasion militaire, et cela peut-être pour la premièrefois dans son histoire.D’autres menaces se sont substituées, elles sont liées à la mondialisation : terrorisme, prolifération,attaques contre les systèmes spatiaux et attaques de systèmes informatiques dont nos sociétéstechnologiques sont profondément dépendantes.Les crises qui frappent le monde affectent nos valeurs, nos intérêts et la sécurité des Français.Les compétitions pour l’accès à l’eau, à l’énergie, aux matières premières, la dégradation del’environnement, les pandémies, les migrations non maîtrisées, sont lourdes de conséquences pournotre sécurité.Et demain, une surprise stratégique peut venir bouleverser littéralement les conditions de notresécurité. La crise financière mondiale illustre bien à quel point le monde peut changer radicalement etpas forcément en bien.Ces menaces peuvent paraître lointaines. Mais ne nous y trompons pas : le territoire national peut êtrefrappé demain, comme celui de nos Alliés. La distinction sur laquelle nous nous reposions entresécurité intérieure et sécurité extérieure, on peut dire qu’elle s’efface totalement. Et la défense de laFrance se joue désormais tout autant sur notre territoire qu’à des milliers de kilomètres, dans l’espace,ou sur les réseaux informatiques.Pour y répondre, il nous faut trois choses : une diplomatie forte, une défense forte, une Europe forte.J’ajoute des alliés sûrs.La diplomatie forte, c’est une France qui assume ce qu’elle est et qui s’engage. Dans le monde des« puissances relatives », aucun Etat ne peut imposer seul son point de vue. Aucun. Et la coopération etla solidarité sont les fondements de l’action. Un Etat seul, une nation solitaire, c’est une nation qui n’aaucune influence. Et si l’on veut peser, il faut savoir agréger à nous des alliés et des amitiés. On l’atrès bien vu en Europe.La France s’engage, la France parle à tout le monde, la France fait bouger les lignes, la France proposeet la France innove. Elle le fait en étant fière d’être ce qu’elle est, une démocratie libre, une démocratieeuropéenne et une démocratie occidentale. La France veut la paix, la France veut la liberté. Et laFrance sait, aussi, qui sont ses alliés et qui sont ses amis : et je n’ai pas peur de dire que nos alliés etnos amis, c’est d’abord la famille occidentale.
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3/12Je ne crois pas que le rôle d’une grande puissance responsable comme la France soit d’être à mi-chemin entre tout le monde, parce que cela veut dire une France nulle part. J’accepte bien volontiersque ce point crée débat, mais je pense que la condition de son indépendance, c’est d’abord de savoiroù est sa famille et que sa famille ne doute pas de vous.Ensuite une défense forte, ce sont des forces armées et de sécurité modernes, adaptées aux menacesactuelles. Ecoutez, cela fait tant d’année qu’en France, on se prépare à la guerre précédente. Là encore,je ne critique personne, mais enfin, il y a des références historiques à cela.Nos forces armées doivent avoir l’assurance, dans la durée, de disposer de moyens à la hauteur denotre ambition. En dépit de la crise actuelle, avec le Premier ministre et le ministre de la Défense, nousavons maintenu l’effort de défense de la France. 377 Mds d’euros pour la défense d’ici 2020.Nous avons demandé la réforme des armées. Elle sera menée à son terme. La mission des armées, jeveux le dire devant nombre de parlementaires, c’est la sécurité. Ce n’est pas l’aménagement duterritoire. Alors, continuons à vouloir faire les deux et nos armées ne feront pas l’aménagement duterritoire et ne seront pas en état d’assurer la sécurité de notre pays. Notre défense ne se mesure plusaux effectifs qu’elle emploie.Là encore, je ferai très exactement ce que j’ai dit.Pour être forte, notre défense doit être indépendante : nous nous doterons donc de capacités autonomesde renseignement et d’alerte, de capacités de cyber défense et de forces de projection dont leséquipements ne datent pas, comme c’est parfois le cas, des années 80, pour ne pas dire des années 70.Il nous faut une Europe forte. Construire l’Europe de la défense et de la sécurité, c’est une prioritéabsolue. L’Europe doit s’affirmer comme elle l’a fait l’été dernier dans la crise géorgienne. A ceux quidéfendent l’indépendance nationale – et j’en suis – je voudrais comparer ce qui s’est passé pourl’Europe avec la Géorgie et ce qui s’est passé il y a quelques années, en Europe, avec la Bosnie.Monsieur le Secrétaire général, ce n’est pas faire injure à qui que ce soit que de dire que le problèmebosniaque a d’abord été réglé par les forces américaines et que le problème de la Géorgie a d’abord étéréglé par la politique de l’Europe. Et cela, me semble-t-il, c’est quelque chose qui compte.A Munich, j’ai dit que c’était un test pour l’Europe : l’Europe est devant un choix très simple : est-ceque l’Europe veut qu’on la laisse en paix ou est-ce que l’Europe veut la paix ? Le choix est clair et onsait ce qu’il advient des continents et des pays qui ont juste comme ambition qu’on les laisse en paix :un jour, c’est la guerre qui les retrouve. Et la France a fait l’expérience cuisante de la théorie du« qu’on nous laisse tranquille ».Et nous sommes, me semble-t-il, informés par l’Histoire : nous ne pouvons pas adopter cette stratégie.Car qu’est-ce qu’une grande puissance économique qui n’aurait pas les capacités militaires dedéfendre ses intérêts? Et comment parler d’une voix de l’Europe si celle-ci se tait quand les armesparlent ?Les Européens doivent pouvoir agir par eux-mêmes si c’est nécessaire, et avec leurs alliés s’ils ledécident. Et je sais qu’avec nos alliés américains, nous sommes d’accord pour dire qu’il faut renforcerles moyens militaires européens. Et les Américains ont parfaitement compris qu’avoir des alliésfaibles, cela ne sert à rien.Mais on peut quand même se demander une chose, c’est pourquoi le concept d’Europe de la défenseavance si lentement, comme si tout était dans le meilleur des mondes. Et qu’est ce qui fait que cela nes’est pas développé ? J’ai une idée précise sur la situation.
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4/12En 1995, après le Livre blanc de 1994, Jacques CHIRAC avait engagé avec courage une premièremodernisation de notre politique de défense. Il avait alors tiré les conséquences de la fin de la guerrefroide, de la guerre du Golfe et de la Bosnie.Des décisions majeures ont été prises : la professionnalisation de nos armées, le développement decapacités de projection, la modernisation de notre dissuasion et la volonté de pleine participation auxstructures de l’OTAN. Je n’étais pas au gouvernement à cette époque, mais j’ai approuvé ce choix. Etcomme chacun sait, si la procédure engagée par Jacques Chirac pour réintégrer l’OTAN n’a pas étéjusqu’à son terme, c’est parce que nos alliés américains n’ont pas accepté un meilleur partage desresponsabilités au sein de la structure militaire d’alors. Ce que je dis n’est pas un jugement de valeurs,c’est l’expression d’une vérité qui n’est contestée par personne.Alors, en 2009, il s’agit de tirer les conséquences de la construction européenne, de nouvelles menaceset de nouvelles priorités stratégiques. Mais avec le même objectif historique : assurer la sécurité etl’influence de la France, dans le respect de notre indépendance nationale et de notre autonomiestratégique.Que serait une politique de défense française isolée, repliée sur elle-même ? Une ligne Maginotnouvelle contre les défis du monde moderne.On a deux piliers de notre défense, l’Union européenne et l’Alliance atlantique.Un mot sur l’ambition française, et je vais mettre un peu les pieds dans le plat parce qu’il faut éclairerl’opinion. L’ambition française pour la défense européenne a longtemps suscité la méfiance aux Etats-Unis et en Europe, les deux. Aux yeux de beaucoup, en Europe, comme aux Etats-Unis, la France – enpoussant l’Europe de la défense - cherchait à affaiblir le lien transatlantique et l’Alliance. Un anti-américanisme stérile renforçait trop souvent cette perception.Depuis l’accord de Saint Malo, voulu par Jacques CHIRAC, entre la France et le Royaume-Uni en1998, la défense européenne a connu des progrès considérables. L’Union européenne a développé desinstruments et des procédures, une capacité. Elle a conduit plus de vingt opérations civiles etmilitaires, pour assurer la stabilisation en profondeur des régions en crise.Et pourtant, Mesdames et Messieurs, j’ai découvert en 2007 une situation totalement bloquée. Onentend parfois dire que c’était le fait de tel ou tel pays, hostile par principe à l’Europe, partisanfarouche d’un atlantisme intégriste. C’est faux. Si la situation était bloquée, c’est d’abord la Francequi, par le non au référendum de 2005, avait contribué à précipiter la construction européenne dansl’ornière. C’est pourquoi notre première initiative, avec le Gouvernement, fut de l’en sortir, parce que,franchement, nous n’étions pas sorti du référendum dans une situation qui nous permettait derassembler toute l’Europe autour de nous. L’Europe était en panne, mais la France n’était pas ensituation de montrer le chemin pour en sortir. Et, parlant sous le contrôle de Bernard KOUCHNER etde François FILLON, on s’est donné beaucoup de mal pour relancer les choses.Avec le traité de Lisbonne, nous aurons un cadre cohérent en matière de défense. Quand il entrera envigueur, le cadre institutionnel de la PESD sera consolidé pour de nombreuses années. Et c’est trèsbien ainsi.Le traité créera une obligation d’assistance mutuelle en cas d’agression armée et une obligation desolidarité en cas d’attaque terroriste. Mais ce traité, le traité de Lisbonne, ce ne sont pas les« atlantistes » qui l’ont repoussé : c’est l’Irlande, un pays neutre ! Et certains en France qui m’accusentd’abandonner l’ambition européenne se sont opposés au traité de Lisbonne ! C’est la vérité.
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5/12Mais force est de constater que derrière les progrès institutionnels, la réalité militaire n’est pas encoreau rendez vous. Qui le conteste ? En tout cas, pas moi. La priorité absolue, comme je le disais en juindernier, à la veille de la présidence française de l’UE, c’est de construire en Europe des capacitésmodernes, robustes et interopérables. C’est beaucoup plus difficile que de développer des institutionset des procédures ou d’embaucher des fonctionnaires.Si nous ne développons pas ces capacités, l’Europe de la défense sera une défense de papier. Et tout lemonde y perdra, l’Europe d’abord, mais aussi nos alliés au sein de l’OTAN.Cet objectif était au cœur de la Présidence française de l’UE. Je remercie tous nos partenaires parcequ’ils ont compris à quel point nous avions besoin d’une vraie relance de la défense européenne,centrée cette fois sur du concret.Alors quels sont ces engagements ?Nous allons mettre en place un nouveau niveau d’ambition pour nos opérations. Il sera adapté à dessituations de crise variées, à l’intérieur de l’objectif global de 60 000 hommes.Nous aurons une capacité renforcée de planification, combinant les aspects militaires et civils – ce queseule l’UE sait faire aujourd’hui. Nous comptons sur Javier Solana pour mettre ceci sur pied, dans unesprit renouvelé.Nous allons renforcer nos capacités militaires : des projets ont été approuvés, ouverts à ceux qui lesouhaitent, pour la projection et la protection des forces, l’information et le renseignement spatial,l’interopérabilité.Nous avons acté que pour construire ces capacités, le cadre national n’était plus suffisant : il faut desméthodes nouvelles, mutualiser, partager les coûts et les équipements, nous spécialiser.Nous allons créer un « Erasmus » militaire, pour la formation commune des officiers européens.Nous avons acté qu’il faudra restructurer la base industrielle de défense, pour constituer des groupesde taille mondiale. Nous développerons les capacités clefs en Europe pour renforcer notre sécuritéd’approvisionnement. Et nous allons faciliter les transferts intra-européens et l’accès aux marchéspublics : je me réjouis que le Parlement européen ait adopté les deux directives dont on discutaitdepuis bien trop longtemps.Nous allons stimuler l’effort de recherche de défense, c'est-à-dire l’avenir même de notre industrie,avec un objectif collectif de 2% de l’effort de défense et un Fonds pour alimenter les projets. Lessynergies entre technologies civiles et militaires seront partout recherchées.Enfin, l’UE va s’engager dans les domaines les plus urgents de notre sécurité : des plans ont étéadoptés pour la lutte contre le terrorisme, la prolifération, renforcer la sécurité spatiale, ledésarmement…Ceci, c’est le plan pour l’avenir. Mais les évènements de l’année dernière ont montré l’urgence d’agirtout de suite.Face à la crise en Géorgie, nous avons déployé une opération d’observation civile qui consolide l’arrêtdes hostilités. Et, avec Bernard KOUCHNER, on a été bien content de pouvoir le proposer.Contre les pirates dans le golfe d’Aden qui attaquaient nos navires, nous avons lancé l’opération« Atalante » : c’est la première opération navale de l’UE, la première opération qui défend des intérêts
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6/12proprement européens, et plus, la première opération militaire de l’UE commandée par le Royaume-Uni.Et l’on voit que, petit à petit, des tabous s’effacent et que les choses se débloquent.Ce résultat, nous le devons à l’effort de chacun, mais aussi, disons le et regardons la situation tellequ’elle est, nous le devons au nouvel esprit qui a soufflé en Europe depuis que la France a annoncé sonrapprochement avec l’OTAN. Le rapprochement avec l’OTAN conforte l’indépendance nationale.Notre éloignement proclamé et non réalisé avec l’OTAN limite notre indépendance nationale et nosmarges de manœuvre.J’avais dit l’année dernière que ce mouvement vers l’Alliance passait d’abord par une relance de ladéfense européenne. Qui peut contester que c’est une réalité ?J’en arrive donc à l’OTAN. Je savais bien que sur ce sujet, nous allions susciter un débat en France.Quoi de plus normal dans une grande démocratie ?Mais il faut un débat fondé sur les faits. Parce que s’il n’est pas fondé sur les faits, Monsieur RACINE,ce débat n’est plus un débat, c’est une polémique.Votre colloque a rappelé les faits qui sont trop souvent méconnus. Tout se passe comme si on cachaitles faits aux Français ; des faits que j’avais mis en avant pendant la campagne présidentielle, je neprends personne en traitre. J’ai toujours pensé profondément que l’intérêt national de la France devaitnous conduire à ce rapprochement.Mais rappelons les faits aux Français qui les ignorent, parce qu’on leur a caché les faits délibérément.Nous sommes membres fondateurs de l’Alliance atlantique, née il y a 60 ans. Membres fondateurs etnous n’avons jamais quitté l’Alliance atlantique. Elle est et elle reste un élément central de notrepolitique de défense et de sécurité, avec un engagement fondamental : celui de l’assistance mutuelle encas d’agression et ce ne sont certainement pas les Français qui vont s’inquiéter d’avoir un accord avecles Etats-Unis d’Amérique au cas où nous serions agressés, alors que nos amis américains sont venusnous aider, nous sauver deux fois.Alors, que ceux qui veulent la polémique aillent jusqu’au bout de la polémique. S’ils ne veulent plusd’alliance, en cas d’agression, avec les Etats-Unis d’Amérique, qu’ils le disent ! En tout cas moi, encharge des intérêts supérieurs de la nation, je vous le dis, ce serait folie.L’Alliance atlantique est aussi le symbole de la communauté de valeurs et d’intérêts transatlantiques.Le Général de GAULLE lui-même définissait notre Alliance en 1966 comme « celle des peuples libresd’Occident ».Mais l’Alliance est aussi, on ne le dit jamais, un traité d’alliance entre les nations européennes elles-mêmes. 21 des 27 nations membres de l’UE sont membres de l’Alliance. Et on voulait que j’attende laPrésidence française pour annoncer, dans un grand élan de solidarité européenne, qu’on n’avait aucunintérêt avec l’OTAN. 21 démocraties européennes dans l’OTAN sur 27.Depuis 1966, la France s’est rapprochée de l’OTAN par étapes, le plus souvent sans le dire.Ainsi, des accords ont tout de suite été passés pour coordonner l’emploi de nos forces.Dans le contexte de la crise des euromissiles, en juin 1983, le Président de la République d’alors étaitFrançois MITTERRAND. Un Conseil atlantique s’est tenu à Paris pour la première fois depuis leretrait français. A la fin des années 80, le Président était François MITTERRAND, alors que la guerrefroide allait prendre fin, nous avions atteint un niveau sans précédent de cohérence avec le dispositifde l’OTAN en Europe.
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7/12Depuis 1992, le Président était François MITTERRAND, tirant les conséquences du nouvel état dumonde, nous sommes allés avec l’OTAN en Bosnie puis au Kosovo, après avec l’OTAN avoir faitplier la Serbie de Milosevic, et enfin avec l’OTAN nous nous sommes rendus en Afghanistan. Noussommes devenus, nous la France, à cette époque là, parmi les principaux contributeurs en troupes auxopérations de l’Alliance atlantique. Personne ne le sait en France, il est venu le moment de dire lavérité. En 1993, Président François MITTERRAND, nous avons recommencé à assister au Comitémilitaire, et en 1996, Président Jacques CHIRAC, nous y avons repris pleinement notre place.Depuis le concept stratégique de 1999, nous avons soutenu et participé à la transformation del’Alliance, qui a abouti en 2002 à d’importantes transformations. Nous participons notamment à laForce de réaction rapide de l’OTAN.En 2004, Président Jacques CHIRAC, rompant avec le tabou de 1966, nous avons commencé à insérerdes militaires français dans la structure intégrée : depuis lors, 2004, le drapeau français, Monsieur leSecrétaire général, flotte de nouveau devant le QG de l’OTAN. On veut des symboles, j’en livre un. Etnous avons déjà trois états-majors français, à Lille, à Lyon, à Toulon, certifiés pour les opérationsalliées.Quant aux normes en matière d’armement, cela fait bien longtemps que toute l’industrie européenne, ycompris la nôtre, applique les normes définies en commun entre les Alliés.Il s’agit donc d’un processus continu à travers tous les gouvernements successifs, de droite ou degauche ; un processus, Mesdames et Messieurs, qui n’a connu aucun recul. C’était donc notre choixcollectif, et j’approuve les décisions d’alors du Président MITTERRAND et du Président JacquesCHIRAC, nous avions raison de le faire.Avec tout cela, nous sommes à l’écart de la structure militaire. Pourquoi ? J’avoue ne pas entendred’argument convaincant pour le justifier.En revanche, les inconvénients sont évidents. Ils étaient d’ailleurs tellement évidents, que c’est ce quia conduit Jacques CHIRAC et Alain JUPPE à tenter l’opération de rapprochement de 1995-1996.Les inconvénients sont d’abord les suivants : notre position n’est pas comprise de nos Alliés. Notreincapacité à assumer au grand jour notre position dans l’Alliance jette le doute sur nos objectifs.Résultat, nous avons une Alliance qui n’est pas assez européenne, Monsieur le Secrétaire général, etune Europe de la défense qui ne progressait pas comme nous l’espérions.Présentons l’Europe de la défense comme une alternative à l’Alliance avec les Etats-Unis et on est sûrque l’on tue l’Europe de la défense. Présentons l’Europe de la défense comme une actioncomplémentaire de l’Alliance avec les Etats-Unis et on pousse en avant l’Europe de la défense.Deuxième inconvénient : nous n’avons aucun poste militaire de responsabilité. On trouve biend’envoyer nos soldats sur le terrain, mais on trouve trop engageant de mettre nos généraux dans lescomités militaires. Nous n’avons pas notre mot à dire quand les Alliés définissent les objectifs et lesmoyens militaires pour les opérations ! On envoie des soldats sur le terrain, on engage la vie de nossoldats, et on ne participe pas au comité qui définit les objectifs de l'OTAN. Qui peut comprendre unetelle politique ?Et tout ceci de notre propre fait, car nous nous excluons nous-mêmes. L’OTAN est donc la seuleorganisation internationale du monde où la France ne cherche pas à être présente et influente ! Pasd’autre exemple. En général quand il y a une organisation internationale dont on est membrefondateur, on cherche à y être présent et influent. L’OTAN jusqu’à présent …Non non, on est présentsur le terrain, on envoie nos soldats, mais excusez-nous on ne veut pas être influent, donc on ne veutpas être présent.
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8/12L’intérêt de la France et de l’EuropeLe moment est donc venu de mettre fin à cette situation, car c’est l’intérêt de la France et c’est l’intérêtde l’Europe.En concluant ce long processus, la France sera plus forte, la France sera plus influente. Pourquoi ?Parce que les absents ont toujours tort. Parce que la France doit codiriger plutôt que subir. C’est l’idéeque je me fais de la France.Parce que nous devons être là où s’élaborent les décisions et les normes, plutôt qu’attendre dehorsqu’on nous les notifie. Je suis partisan de l’indépendance nationale, mais mon idée de l’indépendancenationale, ce n’est pas une France à la porte qui attend qu’on lui notifie des normes parce qu’elle n’apas voulu participer à l’élaboration, parce qu’elle n’a pas voulu siéger à la place qu’on lui tendait.Parce qu’une fois rentrés, nous aurons toute notre place dans les grands commandements alliés.Parce que, alors que l’Alliance va redéfinir son rôle et ses missions, nous voulons que la France pèsede tout son poids dans cette réforme. Il faut en finir avec l’illusion qu’en nous mettant la tête dans lesable, nous nous protégeons de quoi que ce soit.L’Europe elle-même sera plus forte dans l’Alliance. Mais on dit l’OTAN est dominée par les Etats-Unis. Mais comment veut-on que les Européens y jouent tout leur rôle si la France reste en dehors ?Quel drôle d’argument ? Il faut renforcer le poids de l’Europe dans l’OTAN et s’interdire derapprocher la France de l’OTAN. Qui peut comprendre une affaire pareille ?Si la France prend toutes ses responsabilités dans l’OTAN, c’est l’Europe qui sera plus influente dansl’OTAN. Et donc, l’OTAN ne sera pas une organisation exclusivement dominée par les Etats-Unis.Le traité de Lisbonne lui-même établit le lien entre la défense européenne et l’Alliance atlantique. Ilstipule que c’est dans l’Alliance que s’exerce la défense collective des alliés. Et ce lien, je le rappelle,il a été acté en 2003, par la Convention sur l’avenir de l’Europe puis par les ministres des Affairesétrangères réunis en Conférence intergouvernementale. Je n’étais pas Président de la République àcette époque.Enfin la Défense européenne sera plus forte. Car en mettant fin à une ambiguïté sur nos objectifs, nouscréons la confiance nécessaire pour développer une défense européenne forte et autonome. Je croisplus que jamais dans la défense européenne. Croit-on que sans le mouvement que j’ai initié, nospartenaires européens nous auraient soutenus pendant la Présidence française ? Moi je pense quejamais. Et croit-on que les Etats-Unis nous apporteraient leur appui, comme George BUSH l’a fait àBucarest et comme Barak OBAMA le fait aujourd’hui ? Jamais.S’il y a une rupture dans ce choix, elle n’est donc pas tant dans le fond, qui est l’aboutissement d’unlong processus de maturation. Elle est dans la méthode.J’aurais pu comme en d’autres temps, prendre une décision solitaire, puis l’annoncer lors d’uneconférence de presse. J’aurais pu ne consulter ni les parlementaires, ni nos grands partenaires etconduire une diplomatie secrète. Le domaine réservé.J’ai fait le choix inverse, avec le Premier ministre, celui de la transparence et du débat.Avec l’ouverture de la Commission du Livre blanc à toutes les sensibilités, un Livre blanc qui a validéaprès des débats nourris la démarche de rapprochement avec l’OTAN.Avec les questions que nous avons posées depuis 18 mois.
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9/12Avec le dialogue qui s’est établi entre le gouvernement et les Assemblées, mais aussi au sein de lamajorité elle-même. Je remercie les Présidents des commissions, cela n’était pas si évident. Chacun afait un chemin.Mais à l’heure de conclure, je dois assumer mes responsabilités de Chef de l’Etat et de Chef desArmées, pour le bien de notre pays et de sa sécurité.Ceci posé, j’ai entendu les interrogations qui ont été exprimées. Si l’on met de côtés les polémiques,une question centrale a été mise en avant : celle de notre indépendance nationale.Sur ce point, je voudrais revenir sur les motifs exposés en 1966 par le Général de GAULLE, dans lecontexte qui était celui de l’Alliance atlantique de cette époque. Il s’agissait de « rendre leur caractèrecomplètement national à nos armées », dans la ligne affirmée en 1954 quand il s’était opposé à laCommunauté européenne de défense. Quand on me dit : « Infidèle à l’héritage du général deGAULLE, il s’est opposé à la communauté européenne de défense ». Aujourd’hui je plaide pourl’Europe de la défense. Est-ce que l’on on est infidèle à l’idéal gaulliste de plaider aujourd’hui pourl’Europe de la Défense alors que l’on était contre la CED ? Les choses ont changé.Et partant, de ne plus avoir de troupes étrangères en France et il ne fallait plus mettre de troupesfrançaises sous le commandement allié. C’était ça la décision qu’il a prise en 66.Aujourd’hui nos forces armées sont et resteront nationales, car nos forces armées sont l’expressionultime de notre souveraineté. Nos forces armées ne seront intégrées dans aucune armée supranationaledont la responsabilité nous échapperait. Et d’ailleurs, personne n’en veut, pour dire les choses. On estvraiment dans le fantasme car je n’ai pas vu, après d’innombrables voyages, d’innombrablesrencontres, de gouvernement qui demande une armée supranationale. Je n’ai pas vu un gouvernementqui à la table du Conseil européen demande que cela ne soit pas l’unanimité pour déciderl’engagement des troupes nationales, c’est une évidence, mais c’est l’intérêt de la France d’être aucœur d’un réseau dense de solidarités et d’alliances.Naturellement nous allons conserver notre dissuasion nucléaire indépendante.Nous conserverons notre liberté d’appréciation sur l’envoi de nos troupes.Et nous ne placerons pas de contingent en permanence sous commandement allié en temps de paix.Ces principes posés par le Livre blanc, je les ai faits miens. Et rien dans l’OTAN d’aujourd’hui ne lescontredit.Notre indépendance stratégique est reconnue par les Alliés dans le « concept stratégique » de 1999.Personne n’imagine que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni mettront jamais leurs armes nucléairessous les ordres d’un comité. C’est une plaisanterie, la menace, franchement s’il n’y a que celle-ci quenous devons affronter, on peut dormir tranquille. On peut avoir un dialogue sur la dissuasion, on doitavoir un dialogue sur le désarmement, mais la décision nucléaire ne se partage pas.Aucun processus de décision à l’OTAN ne peut nous contraindre contre notre volonté. Aucun. Toutesles décisions du Conseil atlantique sont prises à l’unanimité et cela restera ainsi. A Bucarest en 2008,la France et l’Allemagne ont dit non à une accélération de l’adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie,honnêtement on a bien fait, hors, cette accélération de la demande d’adhésion était soutenue par lesEtats-Unis. L’Allemagne et la France ont dit non, cela a été non.Et s’il fallait encore une preuve de notre indépendance, la révision constitutionnelle a donné despouvoirs sans précédent au Parlement sur l’envoi de nos troupes en opération.
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10/12Je le dis solennellement : ceux qui prétendent que notre indépendance serait en question trompent lesFrançais. J’ajoute qu'en disant cela ils insultent et ils choquent nos partenaires européens, nos alliés, enlaissant entendre qu’ils ne sont pas indépendants. Felipe GONZALEZ, un grand Européen qui a amenél’Espagne dans l’OTAN, l’a dit avec force il y a quelques jours.Alors, légitimement, d’autres s’interrogent sur ce que l’OTAN sera demain, lorsque nous y occuperonstoute notre place.Avec Angela MERKEL, nous avons proposé le 4 février dernier une approche franco-allemande. Nousdemandons à nos Alliés de lancer les travaux d’un nouveau « concept stratégique », dix ans après celuide 1999. J’attire votre attention, quelle serait la logique d’une France qui demande un nouveau conceptstratégique, d’une alliance qu’elle a créée, et qui ne participerait pas pleinement à l’élaboration dunouveau concept stratégique ? Décidez tout seul dans votre coin du nouveau concept stratégique, onvous rejoindra si cela nous plait. Franchement, est-ce que c’est une méthode de gouvernement en2009 ?Nous voulons que l’Alliance s’adapte aux nouvelles menaces. Qu’elle soit un vrai lieu de débat entreAlliés.Nous voulons une OTAN plus réactive et plus efficace.Nous voulons qu’elle assure autant la défense collective, l’article 5, que les missions que nousconduisons dans le monde au service de notre sécurité et de la paix, conformément à la Charte desNations-Unies.Nous voulons renforcer le partenariat stratégique entre l’Union européenne et l’OTAN.Nous voulons une Alliance ouverte aux nations de l’espace euro-atlantique. Mais notre Alliance n’estpas une auberge : y entrer, cela implique de partager nos valeurs, de pouvoir en assumer lesresponsabilités et de contribuer effectivement à la sécurité des alliés et à la stabilité du continent.Nous voulons d’ailleurs construire, je devrais dire reconstruire, une relation de partenariat avec laRussie, si celle-ci le souhaite, et débattre avec elle de la sécurité de notre continent. Autre argument,Monsieur le Premier ministre, pour revenir pleinement. On ne va pas laisser les Etats-Unis et la Russiediscuter tranquillement tous les deux dans leur coin des conditions de la sécurité sur notre continent !Certains me disent que ce choix serait une trahison du Général de GAULLE. Un « alignement surWashington ». Une remise en cause de notre vocation à dialoguer avec la Russie ou les pays du sud.Ou encore que la France s’engagerait dans une « guerre des civilisations », rien que cela, contre lesMusulmans. Et même que si nous avions été dans le commandement intégré, nous aurions été forcésde participer à la guerre contre l’Irak en 2003 ! Mensonges ! Mensonges ! Contre-vérités ! Onn’informe pas une grande nation démocratique par des mensonges.Qui peut prétendre savoir ce que ferait aujourd’hui le Général de GAULLE ? Est-ce que vous pensezque le Général de GAULLE, ce qu’il a fait en 1966, c’était, dans son esprit, la politique de 1923,quand il a pris sa décision ?Oui, nous sommes les alliés des Etats-Unis, nous sommes des amis, mais des amis debout, des alliésindépendants et des partenaires libres.Et j’assume que dans le monde moderne, on doit pouvoir changer des décisions prises il y aura bientôt50 ans. Faudrait-il au nom de l’héritage gaulliste, renoncer au Traité de non-prolifération que deGAULLE rejetait ? Car le Général de GAULLE a rejeté le traité de non prolifération. Faudrait-il
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11/12refuser que nos amis allemands stationnent un régiment en France, comme nous l’avons demandé,Cher Hervé MORIN, à Angela MERKEL ? Faudrait-il ne rien toucher à nos accords de défense avecl’Afrique et y conserver des bases parfaitement obsolètes ?Nous poursuivrons avec tous les pays du monde un dialogue spécifique, conforme à nos intérêts. LaFrance le fait avec la Russie et j’ai cru comprendre, Cher Bernard KOUCHNER, que lorsque nousdiscutions à Moscou cet été, ce n’était pas exactement le souhait des Etats-Unis. Et quand nous avonsinvité, Monsieur le Premier ministre, la Syrie en renouant le dialogue, est-ce que la France a faitpreuve d’indépendance ? Et je vois avec intérêt les Etats-Unis d’Amérique suivre le chemin de laFrance aujourd’hui. Et s’agissant de la Libye ? Et s’agissant de l’Iran ? Et s’agissant du Venezuela ? Ets’agissant de Cuba ? La France est-elle indépendante ? Et ce sont parfois les mêmes qui s’opposent auretour dans l’OTAN et qui m’accusent de « pactiser avec des dictatures ».Franchement, si la France ne devait parler qu’avec des démocraties, franchement, mon bilan carbones’en trouverait amélioré de façon considérable.Quant à l’Alliance atlantique, elle ne fait pas la « guerre des civilisations ». C’est l’OTAN qui a voléau secours des musulmans de Bosnie et du Kosovo, c’est une vérité, elle est historique, chacun peut laconstater, contre l’agression de Milosevic. Et c’est l’OTAN qui défend le peuple afghan contre leretour des Talibans et d’Al Qaïda. On peut discuter, Cher Pierre LELLOUCHE, sans fin de lastratégie : est-elle bonne ou pas ? Faut-il qu’elle évolue ? Oui, elle doit évoluer. Mais qui défend-elle ?Et la guerre d’Irak n’a rien à voir avec l’OTAN. Avant même que la France le fasse, l’Allemagne s’yétait opposée. L’Espagne et l’Italie y ont participé et en sont parties quand elles l’ont décidé. Quant àla Turquie, membre de l’OTAN, elle a refusé le passage aux troupes américaines. Et des pays qui nesont pas dans l’OTAN y ont suivi les Américains. Dire que le rapprochement de la France avecl’OTAN aurait conduit l’armée française en Irak est un mensonge honteux qui ne grandit pas ceux quile profèrent. On peut avoir toutes les convictions que l’on veut, et elles sont parfaitement défendables,mais mentir, c’est le contraire de la démocratie.La semaine prochaine, le 17 mars, notre débat national va se conclure au Parlement.La rénovation de nos relations avec l’OTAN n’est pas une question isolée. Elle est un élément, parmid’autres, d’une politique étrangère et européenne, et d’une politique de défense et de sécurité.Je souhaite que la représentation nationale s’exprime sur les choix qui ont été faits depuis le printemps2007. C’est pourquoi le Premier ministre a été autorisé, ce matin, par le Conseil des ministres àengager la responsabilité du gouvernement sur l’ensemble de notre politique étrangère. Car, vous avezbien compris que ce processus de rapprochement avec l’OTAN n’est qu’une pierre dans un processusplus vaste qui vise à conforter et à développer l’indépendance de la nation.Nos Alliés et nos partenaires européens y seront attentifs. Je suis convaincu que ce débat sera digne denotre pays et des enjeux de notre défense, comme celui qui a porté sur le Livre blanc en juin dernier.Et je fais toute confiance au Premier ministre, François FILLON, pour porter les éléments de lapolitique étrangère de la France.Après avoir pris connaissance du résultat du débat, j’écrirai à nos Alliés pour les informer de madécision. Nous nous retrouverons ensuite à Strasbourg et Kehl, sur le Rhin. Le Rhin fût longtempssymbole d’affrontement, il sera symbole de la réconciliation franco-allemande. Angela MERKEL etmoi y accueillerons le sommet du 60èmeanniversaire de notre Alliance.Ce sera, j’en suis convaincu, un grand moment d’amitié franco-allemande, d’unité européenne et departenariat transatlantique. Il y a beaucoup de gens qui m’interrogent sur la réalité du partenariatfranco-allemand, qui m’appellent à défendre l’amitié franco-allemande. Eh bien, je vais vous dire que
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12/12le rapprochement de la France avec l’OTAN, croyez bien, c’est un grand élément de l’amitié franco-allemande et que nos partenaires, nos amis, nos alliés allemands sont bien heureux de ce mouvementqui va renforcer l’Europe.Et la France, parce que c’est son intérêt et parce que c’est son choix, occupera toute sa place dans cepartenariat transatlantique. Allié libre, allié solidaire, allié indépendant et allié engagé.Mesdames et Messieurs, j’espère que vous l’avez compris, cette décision sera l’aboutissement d’unprocessus et je suis très fier de l’action de la diplomatie française menée par Bernard KOUCHNER, del’action du ministre de la Défense, Hervé MORIN, du secrétaire d’Etat aux Affaires européennes,Monsieur LE MAIRE et ce processus permettra une autre chose : c’est de mieux informer les Français.Et finalement, si l’on s’est donné tant de mal avec le Premier ministre sur cette question, ce n’est pasparce que nous doutions, c’est parce qu’il a fallu faire face à un grand retard de pédagogie etd’information. La démocratie a son exigence et cette exigence c’est la vérité. Et il était temps de direaux Français quelle était la vérité sur notre situation dans nos rapports avec l’organisation atlantique.

Je vous remercie.

Nicolas Sarkozy, 11 mars 2009



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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 15:44

(dépêche)



L'hyperprésidence de Nicolas Sarkozy suscite des critiques grandissantes dans son camp

LE MONDE | 27.02.09 | 14h04  •  Mis à jour le 27.02.09 | 14h04

C'est off." Ministres ou conseillers, ils ne veulent pas être cités. Mais le constat est sur toutes les lèvres : le système de gouvernance de Nicolas Sarkozy s'essouffle. L'hyperprésidence atteint ses limites. La méthode devait permettre d'aller plus vite, en menant de front toutes les réformes à partir de l'Elysée. Au bout de deux ans, la machine semble se gripper. En attestent la multiplication des reculs (réforme des lycées, enseignement supérieur, travail du dimanche) et la chute de la cote du président dans les sondages.

 
L'Elysée ne parvient pas à assurer la mise en oeuvre effective des mille et une réformes annoncées à grand renfort médiatique. L'intendance ne suit pas. "Une fois qu'on a décidé, on n'est pas capable de suivre les réformes. C'est humainement, administrativement, impossible", affirme un conseiller de l'Elysée.

Enfin, l'équipe gouvernementale est laminée, inaudible. Plusieurs ministres appellent à un changement d'équipe et de méthode, alors que le chef de l'Etat s'expose à tout propos, sans parvenir à montrer un cap. "Il faut reconstituer un gouvernement, un vrai, et placer un écran entre le président et les événements", exhorte un ministre. "Nicolas Sarkozy doit faire ce qu'il ne sait pas faire : travailler en équipe et valoriser ses ministres. La question est de savoir s'il est capable de se remettre en question après deux ans de pouvoir", estime un second. " Il faut accepter d'avoir des ministres qui soient des personnalités et qui peuvent dans une certaine limite mener une politique autonome", demande une troisième.

Le chef de l'Etat, qui attribue son impopularité et sa prudence accrue à la seule crise économique, dit ne rien vouloir changer. "Il est d'une sérénité absolue", estime un conseiller. Tout juste ce dernier concède-t-il qu'"il lui manque un Dominique Strauss-Kahn, qui occuperait le ministère de la parole économique avec talent". Il lui manque aussi une Martine Aubry, une Elisabeth Guigou, un Jean-Pierre Chevènement, bref l'équipe qui avait fait le succès des débuts du gouvernement de Lionel Jospin. Mais à écouter l'entourage du président, aucune personnalité de poids ne serait à l'extérieur. Jean-Pierre Raffarin ? Il ne s'entend pas avec le président. Alain Juppé ? C'est un "vieux monsieur", ose-t-on.

Le manque de personnalités s'explique en partie par l'évolution des institutions. M. Jospin gouvernait sous un régime parlementaire, celui de la cohabitation, tandis que M. Sarkozy tire les conséquences d'institutions devenues quasi présidentielles avec l'introduction du quinquennat. "Un ministre m'a dit : "si tu revenais au gouvernement, tu ne reconnaîtrais par le job", raconte Jean-François Copé, président du groupe UMP de l'Assemblée nationale.

Le système est déséquilibré par la faiblesse des contre-pouvoirs : les ministres sont en bail précaire alors que la désignation des secrétaires américains est confirmée par le Sénat, en général pour quatre ans, tandis que le Parlement n'exerce pas encore les pouvoirs dévolus par la Constitution révisée. "Le défi, c'est d'avoir en face de l'"hyperprésident" un "hyperparlement" sur lequel les ministres doivent s'appuyer", estime M. Copé.

M. Sarkozy bloque le système par son activisme et sa propension à s'entourer de personnalités qui lui doivent tout, comme l'analyse l'eurodéputé UMP Alain Lamassoure, grand déçu du sarkozysme : les fidèles historiques (Patrick Devedjian, Brice Hortefeux), ceux qu'il a tirés de l'anonymat (Rachida Dati, Rama Yade) et les transfuges, qui n'ont pas de possibilité de retour en arrière (Eric Besson, Bernard Kouchner). "Le seul type non humilié, c'est l'"ami" du président, Brice Hortefeux. Sinon, vous n'êtes rien. Ce système détruit l'idée de gouvernement", tranche l'ancien eurodéputé centriste Jean-Louis Bourlanges.

M. Sarkozy malmène ses ministres, les fait recadrer par Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée : la ministre des finances, Christine Lagarde, en a fait les frais à l'automne 2007, puis ce fut le tour, fin 2008, de la secrétaire d'Etat aux droits l'homme, Rama Yade. Mais la colère présidentielle vaut thérapie. "Sarkozy ne vire pas", constate une ministre.

Les remaniements au fil de l'eau sont anxiogènes et ne permettent pas de se débarrasser des maillons faibles. "Ce n'est pas très bon pour l'ambiance gouvernementale. On attend toujours le coup d'après", confie un secrétaire d'Etat qui, comme tous les secrétaires d'Etat, rêve de devenir ministre. "Ce ne sont pas les gens qui sont faibles, c'est l'organisation", résume-t-il.

Les membres du gouvernement sont soumis aux grands féodaux que sont les conseillers de l'Elysée (Raymond Soubie pour le social ; François Pérol, hier, Xavier Musca demain pour les finances ; Jean-David Levitte pour les affaires étrangères). "Les conseillers sont infiniment plus importants que les ministres", poursuit M. Copé.

La situation est compliquée pour Michèle Alliot-Marie (intérieur), Bernard Kouchner (affaires étrangères), Rachida Dati (justice), dont la mésentente avec leurs interlocuteurs respectifs (Claude Guéant, Jean-David Levitte, Patrick Ouart) est de notoriété publique. Quant aux ministres dont le "référent" n'est pas présent à la réunion décisive de 8 h 30, présidée par M. Guéant, ils se retrouvent sans relais fiable à l'Elysée. C'est le cas des pôles environnement (Jean-Louis Borloo, Chantal Jouanno) et éducation (Xavier Darcos, Valérie Pécresse). Leur seul recours est le lien direct avec M. Sarkozy, vers qui tout ramène.

Les annonces incessantes du président donnent l'illusion d'une équipe de choc qui ferait bouger la France. Mais l'administration résiste. Plutôt que de repenser leur propre organisation, l'Elysée mais aussi Matignon s'en prennent au conservatisme de la haute fonction publique. "Elle a du mal à changer rapidement de politique, suivre le train des réformes qu'on lui impose. Régulièrement, il faut rappeler à l'ensemble des structures que la volonté politique doit primer", déclarait le premier ministre François Fillon dans un entretien au Monde du 3 février.

Les esprits critiques n'osent pas aborder ces sujets avec le chef de l'Etat. "Les ministres ne disent rien, ils s'occupent de rester ministre", affirme un conseiller mécontent de la situation. On chuchote, on fait passer un message, en espérant que l'information remontera. Les réunions dites du G7, qui rassemblaient les ministres les mieux à même de vendre l'action du gouvernement, ne sont plus ce qu'elles étaient. "La dernière fois, nous avons été reçus par Claude Guéant", pour accorder la communication sur le sommet social, se lamente un participant. Et les réunions de travail ne prêtent pas à la critique. "Sarkozy ne s'exprime pas sur ses difficultés, confie une ministre. Les débats sont assez francs, mais tournés vers l'action."

Arnaud Leparmentier
Article paru dans l'édition du 28.02.09


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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 13:55

(dépêche)


Xavier Musca remplace François Pérol à l'Elysée

27 févri 2009 - il y a 2 heures 55 min

Xavier Musca, un autre fidèle de Nicolas Sarkozy, devient secrétaire général adjoint de l'Elysée à la place de François Pérol nommé dans la contestation à la tête du futur deuxième groupe bancaire français.

Xavier Musca, 49 ans, occupait jusqu'à présent les fonctions de directeur du Trésor.

Deux arrêtés publiés vendredi au Journal officiel mettent fin aux fonctions de François Pérol, qui va diriger l'ensemble Banques populaires/Caisses d'épargne, et scellent la nomination attendue de Xavier Musca.

Fils d'un postier corse, Xavier Musca fut directeur de cabinet de Francis Mer à Bercy, un poste qu'il a conservé quand Nicolas Sarkozy a été nommé ministre de l'Economie, en 2004.

Son retour au statut de conseiller est peu ordinaire pour un directeur du Trésor, d'habitude nommé à la tête d'une grande administration.

Né à Bastia le 23 février 1960, Xavier Musca a un autre lien avec le chef de l'Etat : il est originaire du village de Vico, comme Marie-Dominique Culioli, la première épouse de Nicolas Sarkozy.

Il était présenté en novembre 2008 par L'Express comme "un beau spécimen de la méritocratie française, jamais passé au privé".

Le "sherpa" Xavier Musca présidait aussi à Bruxelles le Comité financier européen, instance stratégique qui rassemble les directeurs du Trésor des pays de l'Union européenne.

Avec Stéphane Richard, directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy, il a ainsi eu à gérer la crise financière avec François Pérol, dont il est proche.

Xavier Musca devrait être remplacé au Trésor par son numéro deux, Ramon Fernandez, un énarque de 41 ans.

Fils de l'écrivain Dominique Fernandez, qualifié de très proche de Nicolas Sarkozy par Libération, Ramon Fernandez avait travaillé sous les ordres de Xavier Musca à Bercy, puis de François Pérol à l'Elysée.

Il avait été promu directeur de cabinet de Xavier Bertrand au ministère des Affaires sociales en 2008 avant de retourner au Trésor.

Service France, édité par Sophie Louet



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24 février 2009 2 24 /02 /février /2009 15:53

(dépêches)



http://www.lepoint.fr/actualites-politique/nadine-morano-veut-le-mammouth/917/0/319412
Politique
Publié le 21/02/2009 à 10:40 - Modifié le 21/02/2009 à 10:43 Le Point.fr

Nadine Morano veut le mammouth
Par Sylvie Pierre-Brossolette
Nadine Morano a fait part de ses ambitions à Nicolas Sarkozy, qui ne l'a pas dissuadée de se préparer © AFP PHOTO / STEPHANE DANNA
Nadine Morano est toujours aussi allante : la voilà qui souhaite voir adjoindre à son secrétariat à la Famille le ministère de l'Éducation, un vieux rêve, lorsqu'il se libérera. "Cela aurait de la gueule, affirme-t-elle. J'ai envie d'un job difficile, d'un ministère de mission." Xavier Darcos trouverait l'idée séduisante et l'encouragerait à briguer ce poste impossible dont il ne veut plus. Nadine Morano a fait part de ses ambitions à Nicolas Sarkozy, qui ne l'a pas dissuadée de se préparer. Elle est en train d'écrire une note pour le chef de l'État défendant l'idée d'une fusion des deux portefeuilles de la Famille et de l'Éducation. Quand elle a vu le président en tête à tête le 17 janvier à l'Élysée, il l'a complimentée pour son travail, après lui avoir expliqué pourquoi il n'avait pas pu la nommer secrétaire générale adjointe à l'UMP, en raison des multiples équilibres internes à respecter. "J'irai où cela te conviendra", lui a répondu cette militante à 100 %. Une fidélité qu'elle espère voir récompensée, à l'Éducation, à l'Intérieur ou ailleurs...

http://www.20minutes.fr/article/303596/Politique-Nadine-Morano-lorgne-sur-le-ministere-de-l-Education.php
Nadine Morano lorgne sur le ministère de l'Education
Créé le 21.02.09 à 11h30 | Mis à jour le 23.02.09 à 11h24  | 103 commentaires
POLITIQUE - Son idée: adjoindre la rue de Grenelle à son secrétariat d'Etat à la Famille...

Nadine Morano n'est pas rasasiée. Secrétaire d'Etat à la Famille, placée sous la coupe de Brice Hortefeux, le ministre des Affaires Sociales, elle souhaite maintenant s'émanciper et obtenir un grand ministère à elle toute seule.

>>Pour lire ce qu'en dit notre blogueur prof et militant, cliquez ici<<

D'après lepoint.fr, Nadine Morano envisage carrément d'adjoindre le ministère de l'Education à son secrétariat d'Etat. Une idée qui pourrait faire son chemin. Il faut dire que le poste est quasiment vacant: Xavier Darcos ne fait pas mystère de son envie de quitter la rue de Grenelle.

Retour en grâce

Nadine Morano prépare le terrain pour le remaniement ministériel qui s'annonce pour juin après les élections européennes. Selon lepoint.fr, la secrétaire d'Etat est en train d'écrire une note à Nicolas Sarkozy pour expliquer comment elle pourrait fusionner les portefeuilles de la Famille et de l'Education.

Après une défaite humiliante aux municipales dans son fief de Toul, Nadine Morano a su regagner la confiance de Nicolas Sarkozy grâce à son travail de connaisseuse au secrétariat d'Etat à la Famille.
V.G.


http://www.lepoint.fr/actualites/a-l-ump-morano-se-verrait-bien-en-haut-de-l-affiche/1331/0/295136
Le Point de la semaine
Publié le 27/11/2008 N°1889 Le Point

A l'UMP, morano se verrait bien en haut de l'affiche
Anna Bitton
«Je n'y pense pas seulement en me maquillant... » C'est par cette allusion explicite à la célèbre déclaration de candidature de Nicolas Sarkozy à la présidentielle que Nadine Morano évoque son intérêt pour le poste de secrétaire général de l'UMP. La secrétaire d'Etat chargée de la Famille ne se dit aucunement effrayée par une telle responsabilité, pas davantage par la concurrence : jusqu'à présent, Xavier Bertrand, son ministre de tutelle, faisait figure de candidat unique, quoique non déclaré, à la succession de Patrick Devedjian. Morano, seule femme du « G7 » des ministres préférés de Sarkozy, ne voit pas pourquoi les dés seraient jetés d'avance. Convaincue que le président aura besoin d'un vrai fidèle à la tête du parti (Bertrand ne le serait-il pas ?), cette ministre militante, qui fut porte-parole de l'UMP et qui tient ses auditoires en haleine dans les réunions publiques, s'estime « faite pour le parti ». Serait-elle pour autant prête à quitter le gouvernement ? « Non ! » répond-elle. Elle n'a pas oublié que le chef de l'Etat lui-même est parvenu, en son temps, à être ministre tout en dirigeant l'UMP...

http://www.lepoint.fr/actualites-politique/nadine-morano-reve-toujours-d-etre-ministre/917/0/187311
Politique
Publié le 10/06/2007 à 23:07 - Modifié le 10/06/2007 à 23:10 Le Point.fr

Nadine Morano rêve toujours d'être ministre
Nicolas Bastuck - Rubrique coordonnée par Valérie Peiffer
Écartée de la « firme Sarkozy » durant la campagne présidentielle pour avoir indisposé le patron et candidat de l’UMP au cours d’une émission de télévision, Nadine Morano, qui rêve de devenir ministre - à tout le moins secrétaire d’État - s’était mis une pression d’enfer dans la circonscription de Toul (en Meurthe-et-Moselle) où elle brigue un nouveau mandat. La bouillante candidate de l’UMP y réalise un résultat tout à fait honorable (47,6 %) sans parvenir, toutefois, à atteindre son objectif : se faire élire dès le premier tour. Une performance qui aurait permis à cette sarkozyste de la première heure de se faire remarquer au « château », dans la perspective d’un retour en grâce ardemment désiré. Las ! Contrairement à sa collègue Marie-Jo Zimmermann - qu’elle n’apprécie guère -, réélue dès ce dimanche en Moselle, Nadine Morano, si elle jouit d’une (très) confortable avance, devra encore s’offrir quelques jours de campagne. Députée, Nadine Morano est sûre de l’être dans une semaine. Pour le reste…



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5 février 2009 4 05 /02 /février /2009 23:55

« Dictateur : n. m. 1. antiq. rom. Magistrat suprême investi temporairement de tous les pouvoirs politiques et militaires, en cas de crise grave. 2. Mod. Chef d’État qui, s’étant emparé du pouvoir, gouverne arbitrairement et sans contrôle démocratique ; autocrate. Par ext. Personne très autoritaire. » (Petit Larousse 1992).



Quand on lit, sur Internet, et en particulier sur Agoravox, un certains nombre d’articles laissant croire que la France est devenue une dictature, et ce depuis le 6 mai 2007, on a de quoi tomber de haut. En particulier cet article rédigé par un auteur pour qui j’ai de l’estime et qui reprend beaucoup d’arguments véhiculés ici ou là.


Complotisme… ou antiparlementarisme ?

Il est de bon ton d’avoir une certaine paranoïa, d’imaginer des complots partout, des lobbies manipulateurs tapis derrière un rideau de théâtre, ici contre la démocratie. En dénonçant ce qu’on croit s’y tramer, on se sent supérieur, on se sent au-delà des masses qui gobent tout, qui avalent tout, sans réagir. C’est en quelques sortes se sentir révolutionnaire. C’est sans doute un bon exercice thérapeutique.

Que cela alimente l’antiparlementarisme diffus et latent que beaucoup d’extrémismes expriment semble ne pas inquiéter ceux qui jugent que, n’ayant pas gagné un combat politique, se croient obligés de contester la légitimité politique du vainqueur à une élection.


Dictature du dictionnaire

Il n’est pas question d’être le défenseur acharné du Président de la République Nicolas Sarkozy (d’autres sont bien meilleurs que moi dans cet art), mais de rétablir quelques éléments pour participer au débat.

Comme toujours, les mots ont un sens, propre et parfois figuré. Il est facile donc, vu la définition tant du mot "dictateur" que du mot "dictature" de les mettre à toutes les sauces, tant dans la vie professionnelle (des "petits chefs" autoritaires au grand patron paternaliste) que dans la vie politique. Donc, je laisserai à l’appréciation des lecteurs leur propre définition de ces mots en n’oubliant pas que l’excessif est insignifiant, à savoir, que de nombreux pays dans le monde envient notre démocratie française (certes loin d’être exempte de défauts).


Libre dictature

C’est toujours amusant de lire des articles librement rédigés, librement publiés, librement lus et librement commentés dénonçant l’existence de la dictature ! Le dictateur d’une telle dictature me paraît bien faible et bien imprudent pour laisser tant d’oppositions s’exprimer.

Mais la vraie erreur de diagnostic, c’est d’être convaincu que la dictature avance depuis mai 2007, ou même depuis mai 2002 (puisque c’est à cette date que Nicolas Sarkozy a été nommé Ministre de l’Intérieur). Sans se rendre compte que rien n’a vraiment changé, sinon en bien, depuis une quarantaine d’années (j’exclus la Présidence du général De Gaulle dont la stature et la sincérité vis-à-vis de l’intérêt général sont incontestables aujourd’hui).


Monarque républicain

Le terme même de « monarchie » audacieusement introduit le 8 janvier 2008 par Laurent Joffrin relève d’une affligeante banalité pour décrire le pouvoir actuel (monarchie impériale ou royale) car rien n’est nouveau. La personnalisation du pouvoir depuis De Gaulle a conduit les journalistes à souvent qualifier la VeRépublique de « monarchie républicaine », certains caricaturistes peignant De Gaulle en Louis XIV (voir les dessins de Moisan dans le Canard enchaîné, ici et ), Giscard d’Estaing ou encore Chirac en rois (parfois arabe), sans parler de François Mitterrand qui, mieux que ses prédécesseurs, devenait carrément Dieu le père.

La seule différence depuis que Nicolas Sarkozy est à l’Élysée, c’est que ce dernier, refusant ce qu’il appelle une hypocrisie, montre sans complexe, sans discrétion et sans doute avec une certaine vulgarité proche du fanfaron (« qui vante exagérément ses qualités, ses réussites, réelles ou supposées », Petit Larousse) toute l’étendue du pouvoir que tous ses prédécesseurs exerçaient avant lui avec la même application et le même soucis du détail mineur.

C’est, à mon avis, une véritable erreur de communication de Nicolas Sarkozy, qu’il semble d’ailleurs avoir comprise puisque sa communication a quand même évolué depuis vingt mois.

Mais revenons aux éléments de fond, et passons-les en revue :


1. La démocratie représentative

Une des clefs du succès de la campagne des primaires de Ségolène Royal (le succès est mitigé puisqu’elle n’a pas été élue), c’est son thème des débats participatifs. Expression sans doute creuse mais qui révèle un véritable doute sur la démocratie représentative.

Démocratie participative contre démocratie représentative : étrangement, le clivage droite/gauche s’est inversé sur ce thème en 2007. Rappelez-vous en 1962 où toute la classe politique (et en premier lieu la gauche) s’opposait résolument à l’élection au suffrage universel direct du Président de la République, une mesure qui reprenait la Constitution de 1848. À l’époque, on ne parlait pas de "dictature" mais de "forfaiture". Les référendums de De Gaulle, que ce soit sur l’Algérie ou encore sur la participation, étaient considérés tant par lui que par ses opposants comme autant de plébiscites qui devaient le légitimer à nouveau dans son pouvoir.

Avec l’accession au savoir et à la connaissance de plus en plus de monde, notamment grâce à Internet et grâce à une meilleure instruction (contrairement à ce qu’on pourrait ressentir, le niveau monte au fil des décennies), il est de plus en plus dur de cacher des informations, de laisser opaques certaines procédures.

Mais il n’en demeure pas moins qu’un pays à forte population ne peut éviter de déléguer l’exercice de la démocratie à des représentants. Même les parlementaires s’organisent dans différentes commissions pour approfondir les sujets qu’ils connaissent le mieux.

La représentation parlementaire peut être contestée (c’est notamment le cas du Sénat), le mode de scrutin lui aussi (c’est un vieux serpent de mer avec des variantes comme la fameuse loi sur les apparentements qui cassa définitivement le RPF gaulliste sous la IVe République), mais le mode de scrutin sert avant tout à désigner des députés censés former une majorité à l’Assemblée Nationale pour pouvoir agir sans instabilité.

Et le choix du scrutin majoritaire uninominal à deux tours a été fait en 1958 et pas en 2007 ! (avec une exception en mars 1986 pour des raisons très politiciennes : Mitterrand voulant empêcher la constitution d’une majorité UDF-RPR en faisant élire 36 députés du FN).

D’ailleurs, un Parlement ne sert pas forcément à représenter toutes les tendances politiques du pays (même si ce serait mieux), mais à légiférer, et pour cela, il faut dégager une majorité. Ceux qui, de toutes façons, refuseront toute alliance pour constituer une majorité n’ont pas vocation à participer à celle-ci et donc ne pourraient de toutes façons pas légiférer (c’est pourquoi les communistes ont toujours un groupe à l’Assemblée Nationale car ils restent dans une perspective d’un gouvernement socialo-communiste comme sous Mauroy ou Jospin alors que le MoDem, ayant refusé toute alliance, n’a pas de groupe, idem pour le FN qui refuse également toute alliance).

Cette logique se retrouve également dans les conditions de candidature à l’élection présidentielle. À ce sujet, maître Éolas, dans un article de son célèbre blog, n’était pas choqué par le fait que le système puisse empêcher Jean-Marie Le Pen de se présenter dans la mesure où, dans tous les cas, il était sûr qu’il ne serait jamais élu (but de l’élection), l’élection de 2002 montrant à l’évidence le rejet définitif de l’électorat contre Jean-Marie Le Pen.

Si je comprends bien les arguments des promoteurs du scrutin proportionnel (intégral ou partiel), il me paraît en revanche logique qu’un parti, pour être utile au Parlement, soit il a une capacité à être majoritaire seul (c’est le cas de l’UMP et du PS, mais c’est aussi l’ambition du MoDem) et dans ce cas, il n’a pas besoin d’alliance, soit il doit s’allier pour former une majorité (c’est le cas du Nouveau centre, du Parti radical de gauche, du PCF, des Verts).

C’est d’ailleurs la grande différence entre le FN et le MoDem : le FN n’a aucune vocation ni volonté à s’intégrer à une majorité, alors que le MoDem oscille paradoxalement entre la volonté d’une large alliance allant de l’UMP au PS (exemple, les municipales de mars 2008) et l’absence totale d’alliance (législatives de juin 2007) dans le but d’être à son tour, un jour, majoritaire à lui tout seul.



Je poursuivrai avec d’autres éléments de fond dans un prochain article.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (5 février 2009)


Pour aller plus loin :

La dictature soft à la française.

Les institutions.

Où est le monarque ?


(Illustration : caricature de Plantu d’après Tabary et Peyo).





http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=51184

http://fr.news.yahoo.com/13/20090206/tot-sarkozy-dictateur1-89f340e.html

http://www.lepost.fr/article/2009/02/07/1415367_sarkozy-dictateur-1.html



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29 janvier 2009 4 29 /01 /janvier /2009 22:11

(dépêche)




Afflux de candidatures pour succéder à Dati

Anne Rovan
28/01/2009 | Mise à jour : 15:57 | Commentaires  81 | Ajouter à ma sélection .

Les noms de Valerie Pécresse, Jean-Louis Borloo, Xavier Darcos et Jean-Michel Darrois sont avancés pour le ministère de la Justice.

Le départ de la garde des Sceaux est prévu après les européennes de juin.
 
Le conseil national de l'UMP a mis fin au suspense. Oui, Rachida Dati va bien se lancer dans la bataille des européennes en Ile-de-France et sera numéro deux de la liste UMP conduite par son collègue de l'Agriculture Michel Barnier. Oui, Rachida Dati quittera bien le gouvernement, probablement en juin, au lendemain des élections. Son poste de garde des Sceaux suscite déjà l'appétit de certains de ses collègues. Xavier Darcos, Valérie Pécresse, Jean-Louis Borloo, Christine Boutin avancent leurs pions pour lui succéder à la Chancellerie. Chacun à sa manière songe à changer d'horizon ministériel.

Darcos veut quitter l'Éducation

On le donnait premier ministrable il y a encore quelques mois. Mais le report de la réforme de la classe de seconde est passé par là. Xavier Darcos aimerait maintenant quitter l'Éducation. «Je vais rester cinq ans ministre, confiait-il la semaine dernière en privé. Mais peut-être pas à l'Éducation. L'idée du président est que j'aille ailleurs. Où ? Je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, l'Élysée souhaite que je tienne encore un peu ici». De fait, Xavier Darcos semble désormais un peu coincé dans son portefeuille. «S'il parvient à remettre la réforme de la classe de seconde sur les rails, on dira que c'est grâce à Richard Descoings et à Martin Hirsch. S'il n'y parvient pas, on dira que c'est de sa faute», décrypte un conseiller ministériel. Xavier Darcos vise un ministère régalien. Ce que confirme son entourage. «Xavier Darcos estime que le ministère de la Justice est intéressant parce qu'il est au cœur des préoccupations immédiates des Français», explique un de ses conseillers qui, lucide, admet que quitter l'Éducation «ne serait pas une solution de repli puisque la Chancellerie n'est pas un ministère calme». Une fois nommé, le successeur de Rachida Dati devra en effet renouer le dialogue avec les magistrats et les avocats. Il lui faudra aussi mener à bien les réformes pénitentiaire, du Code de procédure pénale et de l'ordonnance de 1945. À lui surtout la mort programmée des juges d'instruction. Curieusement, les difficultés qui attendent le successeur de Rachida Dati pèsent moins que le prestige du poste de la Place Vendôme.

Ambitions à la baisse

Des rumeurs récentes donnent Jean-Louis Borloo, ministre du Développement durable et numéro deux du gouvernement, possible pour le poste. «Aujourd'hui, le ministre est sur le Grenelle 1 qu'examine le Sénat. Il défendra avant l'été le Grenelle 2 au Parlement. Et puis, le rendez-vous majeur de l'après-Kyoto l'attend en fin d'année», explique son entourage qui se refuse à démentir cette rumeur. Valérie Pécresse est plus ouverte sur le sujet. «La Justice intéresse la ministre», admet un de ses conseillers. Son ambition pourrait être contrariée par le calendrier des Régionales.

Christine Boutin a pu aussi penser pendant plusieurs mois qu'elle était la femme de situation. «J'ai beaucoup travaillé sur les prisons et j'aimerais avoir la Chancellerie», répétait la ministre du Logement à ses visiteurs il y a quelques semaines encore. Au point d'agacer jusqu'à Rachida Dati. Virage à 180 degrés : la ministre du Logement continue à rêver de la Chancellerie, mais parle dorénavant de l'Agriculture. Après tout, c'est bien ce poste qui devrait se libérer en premier, en mai lorsque Michel Barnier commencera la campagne pour les européennes. Et comme Christine Boutin a pu se sentir fragilisée ces derniers mois au point de sabrer le champagne pour fêter son maintien au sein du gouvernement lors du dernier miniremaniement, elle a revu ses ambitions à la baisse. La «fille d'arboriculteur», qui a «débuté au Crédit agricole» et a tissé des «liens avec la FNSEA» estime être la candidate idoine. Elle ne sera pas seule. Laurent Wauquiez, Luc Chatel, Christian Estrosi sont sur les rangs.

Rien n'est joué. Nicolas Sarkozy pourrait aussi porter son choix sur une personnalité non politique. Le profil de l'avocat d'affaires Jean-Michel Darrois, ami du chef de l'État, mais aussi proche de Laurent Fabius et d'Alain Minc, pourrait retenir son attention. Sarkozy lui a confié en juillet une mission sur la «grande profession du droit». Est également cité le nom de Jean-Claude Magendie, premier président de la cour d'appel de Paris, favorable à la suppression du juge d'instruction.

» VIDEO - Barnier salue le courage de Rachida Dati



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28 janvier 2009 3 28 /01 /janvier /2009 08:50

Entendu ce matin sur France Inter un possible remaniement ministériel pour mai 2009. Objectif : remplacer au moins la Ministre de la Justice Rachida Dati et le Ministre de l'Agriculture Michel Barnier, tous les deux candidats éligibles aux élections européennes de juin 2009.

Parmi les "postulants" pour devenir Ministre de la Justice, il n'y a plus Patrick Devedjian pourtant imaginé à ce poste en mai 2007 mais d'autres ministres : Jean-Louis Borloo, Xavier Darcos et Valérie Pécresse ; ou encore : Jean-Michel Darrois, avocat d'affaires proche de Laurent Fabius et d'Alain Minc et Jean-Claude Magendie, président de la Cour d'Appel de Paris favorable à la suppresion du juge d'instruction.

Quant à Christine Boutin, elle souhaiterait devenir Ministre de l'Agriculture.

France Inter évoque aussi "Le Canard Enchaîné" qui parle de la conversation qu'auraient eue Nicolas Sarkozy et Rachida Dati. NS lui aurait dit qu'elle quitterait le gouvernement par la grande porte tandis que RD lui aurait répondu qu'elle avait un bébé et que la fonction de députée européenne l'obligerait à quitter souvent Paris. NS lui aurait alors fait connaître l'existence de... crêches.

Sylvain Rakotoarison



http://www.lepost.fr/article/2009/01/28/1402987_bientot-des-nouveaux-ministres.html




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15 janvier 2009 4 15 /01 /janvier /2009 17:16

(dépêches)

Nomination au gouvernement   

Publié le 15-01-09 à 11:58   
 
Sur la proposition du Premier ministre, le Président de la République a mis fin aux fonctions de M. Xavier BERTRAND, ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité.

Il a nommé :
- M. Brice HORTEFEUX, ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville.

- M. Eric BESSON, ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire.

- Mme Christine BOUTIN, ministre du Logement.

- Mme Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, secrétaire d’Etat chargée de la Prospective et du Développement de l’Économie numérique, auprès du Premier ministre.

La secrétaire d’État chargée de la Solidarité,  la secrétaire d’État chargée de la Politique de la ville et la secrétaire d’État chargée de la Famille sont déléguées auprès du ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville.


Remaniement : les nouvelles nominations

Réforme des institutions  15-01-2009 12:16 

Sur la proposition du Premier ministre, le président de la République a modifié, le 15 janvier, la composition du Gouvernement. Éric Besson remplace Brice Hortefeux au portefeuille de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, lequel est nommé ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville en remplacement de Xavier Bertrand, qui quitte le Gouvernement pour prendre la direction de l’UMP. Nathalie Kosciusko-Morizet est nommée secrétaire d’Etat à la Prospective et à l’Economie numérique.

Plusieurs membres du Gouvernement voient leurs attributions modifiées : 

Éric Besson, ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire 

Brice Hortefeux, ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville 

Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat chargée de la Prospective et du Développement de l’économie numérique, auprès du Premier ministre 

Christine Boutin, ministre du Logement. 

Valérie Létard, Fadela Amara et Nadine Morano sont déléguées auprès du ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville.

Ces changements interviennent après la nomination de Martin Hirsch, le 12 janvier, au poste de haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté et haut commissaire à la Jeunesse.



Sarkozy fait son mini-remaniement et promeut Hortefeux, Besson, NKM

à la une
PARIS (AFP) - 15/01/09 14:45

L'Elysée a procédé jeudi au mini-remaniement gouvernemental attendu depuis plusieurs semaines en nommant, comme prévu, Brice Hortefeux au Travail, Eric Besson à l'Immigration et, surprise, en confiant à Nathalie Kosciusko-Morizet l'Economie numérique.

Considéré comme l'un des collaborateurs les plus proches du chef de l'Etat, Brice Hortefeux quitte le poste très controversé de l'Immigration pour rejoindre le ministère du Travail, où il prend la place de Xavier Bertrand, qui part prendre la tête de l'UMP.

Il est remplacé dans ses anciennes fonctions par Eric Besson, transfuge du Parti socialiste et figure de "l'ouverture" sarkozyenne, considéré comme l'incarnation du "traître" par ses anciens camarades.

Sa tâche sera d'autant plus délicate que son ministère, accusé par la gauche d'organiser les reconduites d'immigrés clandestins à la frontière en faisant un maximum de "chiffre", cristallise la colère de l'opposition.

La principale surprise dans ce jeu de chaises musicales, dont les grandes lignes étaient connues, vient de la nomination de Nathalie Kosciusko-Morizet au secrétariat d'Etat à l'Economie numérique auprès du Premier ministre, en remplacement d'Eric Besson.

Etoile montante de l'UMP, cette jeune femme de 35 ans occupait jusqu'à présent les fonctions de secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo, où elle a été l'une des principales chevilles ouvrières du Grenelle de l'environnement. Son frère, Pierre, est le créateur et directeur d'un important site de vente en ligne.

D'après l'Elysée, une décision sera prise "dans quelques jours" pour savoir s'il convient de la remplacer à son ancien poste.

Jean-Louis Borloo "va proposer un ou une remplaçante à la secrétaire d'Etat à l'Ecologie", a-t-il déclaré à l'AFP. "C'est une fille de grande qualité. Je suis très content de l'avoir entendue heureuse lorqu'elle m'a appelé après sa nomination".

Christine Boutin, jusqu'ici ministre du Logement et de la ville, perd ce dernier secteur, au profit de Brice Hortefeux qui a désormais dans ses attributions le travail, les relations sociales, la famille, la solidarité et la ville.

Fadela Amara, secrétaire d'Etat à la Ville, entretenait des relations notoirement houleuses avec Mme Boutin. En janvier, quelques jours avant la présentation par Fadela Amara de son plan banlieue, Christine Boutin affirmait "ne pas y croire" préférant "une autre politique de la Ville".

Et il y a peu, la secrétaire d'Etat d'ouverture confiait qu'elle cherchait directement les arbitrages à l'Elysée et qu'elle se contentait de "tenir" sa ministre de tutelle "au courant".

Ce mini-remaniement, attendu depuis plusieurs semaines, précède de peu une remise en ordre du parti présidentiel, l'UMP, qui doit tenir le 24 janvier un conseil national pour entériner l'arrivée de Xavier Bertrand à sa tête.

Privilégiant, dans un contexte de crise économique difficile, des ajustements par petites touches de l'équipe gouvernementale, Nicolas Sarkozy avait nommé début décembre Patrick Devedjian au nouveau portefeuille de la Relance économique, et élargi en début de semaine le périmètre des fonctions de Martin Hirsch, désormais haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté mais aussi à la Jeunesse.

Il avait aussi remplacé le 12 décembre le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet par Bruno Le Maire, un proche de Dominique de Villepin, son ancien adversaire au sein la majorité.




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4 janvier 2009 7 04 /01 /janvier /2009 16:00

(dépêches-blogs)


Stanislas Lefebvre de Laboulaye

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Stanislas François Jean Lefebvre de Laboulaye dit « Stan[1] » (Beyrouth, le 12 décembre 1946 - ) est un diplomate français. Il assure de 2002 à 2006 un poste clé du Ministère des Affaires étrangères : directeur général des affaires politiques et de sécurité[1]. Philippe Douste-Blazy le remplace par Gérard Araud[1]. Il est ambassadeur au Vatican depuis 2008.

Biographie [modifier]
Etudes secondaires au Collège Stanislas et au Lycée Henri-IV à Paris.
Etudes supérieures à la Sorbonne et à Vincennes : Licence de lettres modernes (1968), Maîtrise en anglo-américain (1969), Agrégation de lettres modernes (1970).
1970-1972 : Enseignant au Lycée de Garçons de Sfax (Tunisie).
1972-1976 : Assistant à l’Université de Manchester (Royaume-Uni).
1976-1977 : Cycle préparatoire de l’ENA.
1978-1980 : École nationale d'administration promotion « Voltaire ».
1980 : Secrétaire des Affaires étrangères.
1980-1981 : Direction Asie.
1981-1984 : Direction économique, service de coopération économique : questions budgétaires et institutionnelles européennes.
1984-1987 : Premier secrétaire, puis deuxième conseiller à la Représentation permanente auprès des Communautés européennes : questions institutionnelles, d’environnement et de recherches (Bruxelles).
1987-1991 : Deuxième conseiller à l’Ambassade de France à Madrid.
1991-1995 : Directeur de la communication, puis de l’action audiovisuelle extérieure à la Direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques du Ministère des Affaires étrangères.
1996-1999 : Consul général à Jérusalem.
2000-2002 : Ambassadeur de France à Madagascar.
2002-2006 : Secrétaire général adjoint, directeur général des affaires politiques et de sécurité.
2006 : Ambassadeur de France en Russie.
2008 : Ambassadeur de France auprès du Saint-Siège.

Décorations [modifier]
Officier de l’ordre national du Mérite
Officier Légion d'honneur (2008)[2] 

Portail de la France
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JORF n°0163 du 13 juillet 2008 page 11280
texte n° 4

DECRET
Décret du 11 juillet 2008 portant promotion et nomination

NOR: PREX0813584D

Par décret du Président de la République en date du 11 juillet 2008, pris sur le rapport du Premier ministre et des ministres et visé pour son exécution par le grand chancelier de l'ordre national de la Légion d'honneur, vu les déclarations du conseil de l'ordre portant que les présentes promotions et nominations sont faites en conformité des lois, décrets et règlements, sont promus ou nommés, pour prendre rang à compter de la date de réception dans leur grade :

Ministère des affaires étrangères et européennes
PERSONNEL

Au grade d'officier
M. Lefebvre de Laboulaye (Stanislas, François, Jean), ambassadeur de France auprès de la Fédération de Russie. Chevalier du 8 novembre 1999.





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