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6 avril 2025 7 06 /04 /avril /2025 19:23

« Ce n'est pas une décision de justice, c'est une décision politique. » (Marine Le Pen, le 6 avril 2025 à Paris).



 


Meeting du RN à Paris ce dimanche 6 avril 2025. Étrange réflexe de vouloir faire un rassemblement pour protester contre la condamnation très lourde de Marine Le Pen en première instance (quatre ans de prison dont deux ferme, 100 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité avec exécution provisoire). Réponse de l'ancien Premier Ministre Gabriel Attal : « Tu voles, tu paies ! », en remarquant : « Le RN, c'est le parti qui demande de la fermeté pour tous, sauf pour lui ! ». D'autres, à l'Assemblée, se contentaient de rétorquer : « Rends l'argent ! ».

Ce ne sont pas quelques milliers de militants du RN venus soutenir Marine Le Pen (dans sa condamnation pour détournement massif de fonds publics ?) qui changeront les choses : Marine Le Pen a été reconnue par le tribunal judiciaire de Paris comme la responsable de tout un système de financement de son parti sans lequel le RN aurait certainement eu moins d'audience électorale. Le texte du jugement est accablant.

Le mot d'ordre "Sauvons la démocratie" est du langage orwellien, ou, du moins, du trumpisme de bas étage : la démocratie, c'est le suffrage universel (les urnes, et pour l'instant, le RN n'a jamais gagné une élection nationale, il faut le rappeler), mais c'est aussi l'État de droit, c'est-à-dire les valeurs de la République : la majorité doit gouverner dans le cadre de nos valeurs précisées dans notre Constitution, elle ne peut pas tout.

 


La réaction colérique de Marine Le Pen, qui, soit dit en passant, n'est pas approuvée par ceux qui, au RN, voudraient conquérir le pouvoir et préféreraient donc un autre cheval un peu plus présentable, c'est le refus de la règle commune, c'est le refus de la justice, c'est surtout le refus de la démocratie qui est d'accepter (même sans l'approuver) une décision de justice car elle s'impose à tous (y compris au gouvernement).

Fuite en avant insensée, voire suicidaire, que vouloir à tout prix rester candidate. Elle a déjà perdu la bataille de "l'opinion publique" qui est aux deux tiers favorables au principe de sa condamnation sévère, selon l'adage de Gabriel Attal, tu voles, tu paies. C'était du reste le discours du RN/FN depuis cinquante ans, pestant contre le laxisme des juges, pestant contre la libération de délinquants, et pour les affaires politico-judiciaires, prônant une peine d'inéligibilité à vie (ce qui me paraissait d'ailleurs complètement disproportionnée). Marine Le Pen va avoir du mal à justifier les deux poids deux mesures : je suis pour la sévérité des juges... sauf pour moi ! C'est trop gros, et pour l'instant, nous ne sommes pas des citoyens américains prêts à avaler n'importe quoi.

J'ai relu ce que j'en disais... le 22 février 2017. Nous étions en pleine campagne présidentielle, l'affaire Fillon venait d'éclater, et les juges ont perquisitionné les locaux du FN/RN. Marine Le Pen, au contraire de François Fillon, avait alors déclaré par anticipation qu'elle resterait candidate à l'élection présidentielle même si elle était mise en examen. Concrètement, elle a même eu le temps d'être candidate aux deux élections présidentielles qui ont suivi ces perquisitions, 2017 et 2022. La justice ne l'a donc jamais "empêchée".

Car ces perquisitions, il s'agissait bien d'une démarche provenant de l'affaire qui l'a condamnée le 31 mars 2025 : non seulement ce sont trois juges, et pas une seule, qui ont condamné lourdement Marine Le Pen le 31 mars 2025, mais c'est près d'une centaine de juges différents qui ont dû se prononcer, tout au long de cette longue procédure, toujours en défaveur du RN et de Marine Le Pen, en raison des 45 recours faits à l'initiative des Le Pen.

 


On ne s'étonnera donc pas de sa faible considération pour la justice en politisant elle-même la justice (elle aurait pu dire aussi que la justice était misogyne puisqu'elle a condamné une femme). Effectivement, dans "Le Monde" du 2 février 2017, Marine Le Pen disait déjà : « Un juge pourrait décider qui est candidat et qui n’est pas candidat. C’est la fin de la démocratie. ». À l'époque, il s'agissait juste d'une possible mise en examen, ce qui est très différent d'une condamnation à quatre ans de prison dont deux ferme. Elle bénéficiait encore de la présomption d'innocence.

L'un des arguments employés par le RN aujourd'hui est de dire que la justice aurait volé l'élection présidentielle de 2027 en empêchant Marine Le Pen d'être candidate à cette élection. L'affirmation est totalement dénuée de raison ! D'une part, en raison d'un favoritisme qui devrait aussi en faire bénéficier tous les justiciables, Marine Le Pen a, semble-t-il, bénéficié d'une accélération pour la tenue de son procès en appel. Tant mieux et c'est la porte étroite qui lui fait dire qu'elle pourrait être candidate malgré tout. Mais pourquoi les juges en appel renieraient-il les faits établis en première instance qui seraient accablants ? D'autre part, c'est factuellement faux : même si Marine Le Pen est empêchée, le RN aura naturellement un candidat pour le représenter à l'élection présidentielle, et le plan B qui se précise, à savoir Jordan Bardella, fait déjà jeu égal avec Marine Le Pen dans les sondages d'intentions de vote. Donc, non seulement l'empêchement de Marine Le Pen n'est pas un empêchement du RN (et c'est tant mieux), mais le fait qu'il y ait un autre candidat n'handicaperait pas ce parti électoralement à ce jour.
 


C'est surtout l'illustration d'une vanité monstrueuse de l'ex-présidente du RN. Moi moi moi. Sans moi, la démocratie serait en danger ! J'aurais plutôt tendance à penser le contraire quand elle fustige ainsi les juges et la justice, au point de devoir mettre une protection rapprochée auprès de certains juges dont les coordonnées ont été divulguées dans les réseaux asociaux et qui ont reçu des menaces de mort.

L'idée de se croire irremplaçable n'est pas réservée à Marine Le Pen, bien entendu, et je crois que les grands candidats à l'élection présidentielle ont tous eu ce sentiment sans lequel ils ne se battraient pas. En revanche, l'idée que c'est uniquement Marine Le Pen qui est empêchée par la justice est complètement fausse.

D'une part, les peines d'inéligibilité prononcées avec exécution provisoire en première instance sont très nombreuses. François Fillon a été ainsi interdit de se présenter pendant dix ans dès sa condamnation en première instance en 2020. Pareil pour les époux Balkany en 2019. Un petit schéma propose dix exemples, et on constate que Marine Le Pen n'a pas eu l'inéligibilité la plus sévère.

 


D'autre part, elle pourrait répliquer en disant qu'elle est la seule candidate à l'élection présidentielle en capacité de gagner à être empêchée par la justice. Là encore, c'est complètement faux. Si l'on regarde les dernières élections présidentielles, je note au moins quatre élections présidentielles dont on pourrait dire, avec la même logique, qu'elles auraient été "volées".

Pour l'élection de 1995, Lionel Jospin a été le candidat socialiste un peu par défaut, mais au-delà de Michel Rocard, un autre candidat évident était voulu et préparé par François Mitterrand, à savoir Laurent Fabius. C'est sa mise en examen dans l'affaire du sang contaminé qui l'a empêché politiquement (et pas juridiquement) d'être candidat à 1995.

Pour l'élection de 2007, Nicolas Sarkozy a emporté assez facilement l'investiture de l'UMP pour sa candidature, mais à l'origine, le dauphin de Jacques Chirac était plutôt Alain Juppé qui, condamné en 2004, a dû renoncer à la candidature présidentielle.

Pour l'élection de 2012, c'est la justice américaine qui a empêché, là encore politiquement, la candidature de Dominique Strauss-Kahn, pourtant le favori des sondages et quasi-sûr de gagner le scrutin.

Enfin, pour l'élection de 2017, la campagne de François Fillon, également le favori du scrutin, a été freinée par sa mise en examen à quelques semaines du premier tour, empêchant son parti de choisir un candidat de remplacement (et c'esit été cocasse que ce candidat de remplacement aurait pu s'appeler Alain Juppé !).


Bref, bien sûr que l'empêchement de Marine Le Pen aura des conséquences sur le déroulement de l'élection présidentielle de 2027, mais pas plus que toutes les élections présidentielles précédentes où des faits d'actualité ont changé le cours normal des choses. Si ma tante en avait... À la différence de la plupart des candidats empêchés que je viens de citer, Marine Le Pen a été condamnée, et pas seulement mise en examen, ce qui est beaucoup plus grave. Le responsabilité n'incombe pas aux juges qui aurait dû être plus laxistes, mais à Marine Le Pen elle-même qui aurait dû éviter de détourner massivement et durablement l'argent public des contribuables.

Alors, il faut raison garder : comme certains, on peut penser qu'il est regrettable qu'une candidate avec ce niveau très élevé d'intentions de vote dans les sondages soit inéligible, mais il est regrettable avant tout qu'elle soit elle-même à l'origine de ce système de détournement massif de fonds publics, car de ce fait, elle a contribué à la défiance des citoyens vis-à-vis de la classe politique. Comment imaginer une personne élue Présidente de la République avec de telles casseroles ? Comme Patrick Cohen dans sa chronique du 3 avril 2025 sur France Inter, je soupirerais ainsi : « Fatigue. On a le sentiment parfois depuis trois jours que le débat public a perdu pied, ballotté par les outrances et les mensonges du RN et de ses puissants porte-voix médiatiques. ».


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (06 avril 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Marine Le Pen, est-elle si clean que cela ? (22 février 2017).
Condamnation Le Pen : la justice vole-t-elle l'élection présidentielle de 2027 ?
Le fond accablant de l'affaire Le Pen.
Texte intégral du jugement délibéré du 31 mars 2025 sur l'affaire Le Pen (à télécharger).
Affaire Le Pen : ne confondons pas victime et coupable !
Marine Le Pen : voler l'argent des Français !
Marine Le Pen et la sérénité d'une future condamnée ?
L'avenir judiciaire de Marine Le Pen dans une décision du Conseil Constitutionnel ?
Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...
Mort de Jean-Marie Le Pen : la part de l'héritage.
Procès de Marine Le Pen : surprise de gazelles et cynisme de vieux loups.
Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
Jean-Marie Le Pen, retour aux sources du RN.
Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
Le débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella du 23 mai 2024.
Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
Sondage secret : en cas de législatives anticipées, une victoire du RN ?
FN/RN : fais-moi peur ! (27 octobre 2015).
Marine Le Pen en tête dans un sondage : attention au buzz !
Christine Boutin.
André Figueras.
Patrick Buisson.

Rassemblement national : objectif 2027... ou avant !
Jordan Bardella.
Le nouveau JDD et la récupération des Enzo...
Geoffroy Lejeune.
Attention, un train de violence peut en cacher un autre...
Éric Caliméro Zemmour.
Jean-Marie Le Pen et sa marque dans l'histoire.
La tactique politicienne du RN.
La sanction disciplinaire la plus lourde de la Cinquième.

Louis Aliot.
Le congrès du RN.
Grégoire de Fournas.
Incident raciste : 89 nuances de haine à la veille du congrès du RN ?

Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard...



 



https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250406-condamnation-le-pen.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/condamnation-le-pen-la-justice-260346

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/06/article-sr-20250406-condamnation-le-pen.html


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30 mars 2025 7 30 /03 /mars /2025 20:48

« Je comprends que des gens ne soient pas sereins, mais moi, je le suis. » (Marine Le Pen, le 30 mars 2025 sur TF1).





 


Il est des jours plus cruciaux que d'autres. On peut penser que le jour le plus crucial pour une personnalité politique, qui ne pense qu'à la politique depuis des décennies, c'est le jour de l'élection, mais maintenant, il faut être moderne : le jour crucial, c'est désormais le jour de l'annonce du jugement. Pour Marine Le Pen, candidate putative à l'élection présidentielle de 2027 (après déjà trois échecs cinglants !), ce jour-là, c'est ce lundi 31 mars 2025. Suspense dramatique. D'une tragédie, ou d'une comédie.

En jeu, son avenir judiciaire, et donc, son agenda politique. Le réquisitoire du procureur dans l'affaire des assistants parlementaires du RN au Parlement Européen était d'une très grande sévérité le 13 novembre 2024 : il a requis, entre autres, une peine complémentaire de cinq années d'inéligibilité assortie d'une exécution provisoire. C'est cette "exécution provisoire" qui fait polémique, car cela rendrait l'ancienne présidente du RN inéligible malgré un recours en appel, c'est-à-dire alors qu'elle ne serait pas encore condamnée définitivement. De quoi rater le train électoral de 2027.

On le comprend bien : l'exécution provisoire est une forme d'exécution tout court. Marine Le Pen l'a d'ailleurs vu ainsi dans une interview le 30 mars 2025 sur TF1 : « Je ne peux pas imaginer un tel trouble à l'ordre démocratique, on parle d'une mise à mort, d'une guillotine judiciaire. ». Même si cela pourrait faire plaisir à beaucoup de monde, serait-ce judicieux d'un point de vue démocratique ?

 


Les autres peines requises par le parquet sont cinq ans de prison dont deux ans ferme et 300 000 euros d'amendes. Revenons aux fondamentaux, c'est-à-dire ici au contexte. La justice reproche à Marine Le Pen quelque chose de très grave : on parle d'un préjudice évalué entre 5,0 et 7,5 millions d'euros de détournement d'argent public. En utilisant l'enveloppe budgétaire prévue pour les collaborateurs des députés européens pour des individus qui avaient un autre emploi, comme garde-du-corps. Cela concernerait une vingtaine de personnes. Rien à voir avec l'affaire du MoDem, où il était de seulement quelques centaines de milliers d'euros. Un des supposés assistants parlementaires était, à l'époque, le compagnon de la présidente du FN ; une autre son (ancienne) belle-sœur.
 


On peut comprendre que les juges pourraient considérer qu'une personnalité incapable de respecter le droit et la loi (et du reste incapable de gérer correctement les finances de son parti) ne devrait pas pouvoir postuler à un poste aussi important que Président de la République où il faudrait gérer le budget de l'État. Mais on pourrait aussi rétorquer, a contrario, que ceux qui ont géré l'argent public depuis une cinquantaine d'années ont creusé collectivement un trou de 3 305 milliards d'euros au 31 décembre 2024 !

Marine Le Pen veut garder sa sérénité parce qu'elle ne peut pas imaginer un autre sort que celui d'une future candidate. La méthode Coué est-elle efficace ? Il faudra, pour le savoir, attendre le jugement de lundi : « Je pense que les magistrats ne décideront pas de l'exécution provisoire parce que je ne peux imaginer qu'ils le fassent. ».

Ce qui est intéressant dans le discours de Marine Le Pen, c'est que, dans son esprit, sa condamnation ne fait l'objet d'aucune incertitude, et même, une peine d'inéligibilité contre elle ne fait aucun doute. Ce qui reste incertain, pour elle comme pour les observateurs de la vie politique, c'est si cette peine d'inéligibilité est assortie d'une exécution provisoire, ce qui aurait pour effet de rendre impossible sa candidature à l'élection présidentielle pour 2027. Du moins, en théorie, car elle aurait, dans ce cas-là, d'autres types de recours comme une QPC sur le sujet.

Je rappelle que la décision du Conseil Constitutionnel prise le 28 mars 2025 n'avait pas l'effet de la rassurer puisqu'elle confirmait que l'exécution provisoire d'une peine d'inéligibilité était conforme à la Constitution sous réserve qu'il y ait un débat contradictoire, que les motivations soient écrites et qu'il n'y ait pas atteinte à la proportionnalité de la peine (ce dernier point est essentiel dans le cas de Marine Le Pen). Mais le Conseil Constitutionnel, qui n'a donc pas montré une grande empathie pour le cas de Marine Le Pen, lui a laissé une porte de sortie, ou plutôt, une sortie de secours : cette décision du Conseil Constitutionnel ne concerne que le cas des élus locaux, et pas des parlementaires. Par conséquent, cette décision ouvre bien la voie possible d'une QPC sur le sujet pour les parlementaires, ce qui est le cas de Marine Le Pen.


 


D'un point de vue politique, l'inéligibilité effective de Marine Le Pen serait quand même un énorme coup de semonce sur la vie politique. Elle serait regrettable en ce sens que sa candidature est aujourd'hui créditée d'un score assez élevé dans les sondages d'intentions de vote, autour de 30%. Cette décision de justice remettrait en cause le jeu normal des candidatures, mais pas plus qu'avec la mise en examen, en plein campagne présidentielle, de François Fillon en mars 2017.

Ce qui est sûr, malgré tous les soupçons qu'on pourrait avoir (avec l'existence d'un mur des c@ns dans le local d'un syndicat de juges, par exemple), c'est que le juge n'aura pas un raisonnement politique mais juridique. En clair, il devra déterminer si l'exécution provisoire de la peine d'inéligibilité remet en cause ou pas le droit des électeurs (en l'occurrence ici du RN).


Rappelons que Marine Le Pen a longtemps été favorable à la sévérité des peines, et même à leur automaticité, estimant les juges beaucoup trop laxistes vis-à-vis des délinquants. La tolérance zéro ne doit-elle pas s'appliquer aussi à la classe politique ? Moins convaincante, Marine Le Pen avait pourtant fait de la moralité en politique son cheval de bataille en 2012 et souhaitait renforcer l'inéligibilité des responsables politiques qui auraient commis des délits.
 


L'exécution provisoire de l'éventuelle peine d'inéligibilité de Marine Le Pen serait évidemment un coup dur pour elle, pour sa carrière politique et pour le RN, mais la nature a toujours horreur du vide et il y a une véritable vanité de se croire indispensable (au parti, à la nation).
 


Jordan Bardella serait-il à Marine Le Pen ce qu'a été Édouard Balladur à Jacques Chirac ? Car au RN, tout est déjà acquis avec un "candidat de remplacement" en la personne de Jordan Bardella. La candidature de ce dernier aurait même la préférence de certains élus RN car il serait le plus apte à faire un rassemblement des droites là où Marine Le Pen voudrait encore surfer sur le ni droite ni gauche.

Cette analyse néglige cependant le facteur très personnel d'une élection présidentielle. Certes, on vote pour une tendance, un courant politique, un projet présidentiel, mais aussi pour une personnalité qu'on croit apte, ou pas, aux fonctions de Président de la République. Ce serait difficile de faire confiance en un jeune homme de 28 ans qui, certes, communique bien sur les réseaux sociaux, mais qui n'a jamais travaillé autrement que dans un appareil politique, qui ne connaît pas la vraie vie des Français, fainéant en n'allant jamais au Parlement Européen pour lequel il est élu, et qui n'a jamais bossé ses dossiers.

 


Ainsi, les électeurs de Marine Le Pen pourraient se détourner du RN pour un autre candidat qui serait, selon eux, aussi sérieux voire plus sérieux que l'ancienne présidente du RN. Aujourd'hui, ce candidat de substitution n'est pas au RN mais... au gouvernement : Bruno Retailleau, candidat actuel à la présidence de LR !


Il pourrait toutefois y avoir une solution médiane pour le juge. Ce serait de prononcer une peine d'inéligibilité d'un ou deux ans assortie d'une exécution provisoire. Cela n'empêcherait pas Marine Le Pen de se porter candidate en avril 2027, mais cela montrerait la gravité du délit reconnu le cas échéant.
 


Ah, au fait... On a appris par un article de Laurent Léger, publié le 28 mars 2025 dans "Libération", que Jean-Luc Mélenchon aurait lui aussi des poursuites judiciaires pour la même raison (emploi fictif d'assistants parlementaires européens)... depuis 2017 ! L'information, pourtant connue depuis le 18 juillet 2017, était bien cachée et l'avancée de l'enquête judiciaire est restée fort discrète...


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (30 mars 2025)
http://www.rakotoarison.eu


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3 septembre 2024 2 03 /09 /septembre /2024 20:21

« Il ne faut jamais désespérer de notre pays, nous avons des ressources, des talents, des énergies, des compétences ! Je pense sincèrement que si nous cessons de nous bercer d'illusions et si nous nous rassemblons, nous pouvons construire une France plus prospère, plus juste, plus forte et plus libre. » (Édouard Philippe, "Le Point", le 3 septembre 2024).


 


L'ancien Premier Ministre Édouard Philippe a annoncé très clairement et très officiellement sa candidature à la prochaine élection présidentielle dans une interview publiée ce mardi 3 septembre 2024 dans la soirée (peu avant 20 heures) dans l'hebdomadaire "Le Point" : « Je serai candidat à la prochaine élection présidentielle. (…) J'ai créé un parti politique, Horizons, pour continuer à être un acteur de la vie politique nationale. (…) On dit souvent que pour une présidentielle il ne faut avoir envie de rien d'autre. J'y souscris. ».

Il est même allé plus loin, puisqu'à la dernière question des journalistes Mathilde Siraud et Valérie Toranian qui l'ont interviewé, à savoir : « Vous êtes prêt ? Y compris en cas de présidentielle anticipée ? », le maire du Havre a répondu sobrement : « Je vous le confirme ! ».

Édouard Philippe a une image publique très singulière : barbu avec encore quelques cheveux foncés et sans lunettes à Matignon, le voici, pour cause de maladie, imberbe, quasi-chauve (pas tout à fait, et ce qui reste de cheveux est blanc), presque à la manière d'un Edgar Faure (mais en longiligne), sans sourcils mais lunettes à grosse monture noire qu'il a troquée pour une fine monture, comme l'ont décrit les deux journalistes qui l'ont rencontré à son bureau de la mairie du Havre : « On le retrouve fidèle à lui-même, teint hâlé et fine monture de lunettes, boutons de manchette en forme de sablier, toujours prêt à faire montre de ses épatants talents d'imitateur. ».

Je dois avouer que j'apprécie beaucoup Édouard Philippe, tant lorsqu'il a été Premier Ministre que comme responsable politique en général, la personnalité comme son positionnement politique, son souci de la rigueur dans l'expression, sa grande intelligence, sa prudence, sa compréhension de la France des territoires que le Président de la République a toujours eu du mal à comprendre, et même son autodérision... mais depuis 2022, je peine à bien comprendre ses initiatives ou non initiatives.


Qu'il ait fondé son propre parti Horizons pour garder son autonomie politique vis-à-vis du camp présidentiel était tout à fait justifié, et il a fait ce que François Bayrou avait fait bien avant Emmanuel Macron avec le MoDem. En revanche, j'ai été très étonné de la grande passivité d'Édouard Philippe lors de la campagne présidentielle de 2022 car il n'a pris quasiment aucune part active audible dans le soutien à Emmanuel Macron.

J'ai également été très étonné par son attitude lors de la dissolution du 9 juin 2024. Certes, comme tous les autres responsables de la majorité présidentielle, il a été ulcéré par cette décision troublante, et il a aussi expliqué au début de la campagne des élections législatives anticipées qu'il ne fallait pas disserter sur les raisons de la dissolution mais qu'il fallait aller au combat pour faire gagner son camp, comme il l'a affirmé entre autres le 17 juin 2024 sur BFMTV.





Mais j'ai été étonné qu'il ne fût pas candidat lui-même aux élections législatives alors que le centre de gravité de la vie politique française allait se situer, au moins pour un an, dans l'hémicycle du Palais-Bourbon, et d'ailleurs, d'autres responsables politiques l'ont bien compris, de Marine Le Pen à Laurent Wauquiez, et évidemment Gabriel Attal, Gérald Darmanin et Élisabeth Borne. Non seulement il n'a pas voulu redevenir député, mais il a parfois présenté des candidats Horizons contre des candidats de la majorité présidentielle à un moment particulier de la vie politique où le RN était en possibilité favorable d'emporter une majorité absolue à l'Assemblée.

Alors, je m'étonne ce mardi soir de cette annonce de candidature à la prochaine élection présidentielle, alors que le nouveau Premier Ministre n'est toujours pas désigné après presque deux mois du second tour des élections législatives. Nous sommes, qu'on le veuille ou pas, dans une crise politique puisqu'on n'a pas de gouvernement, et Édouard Philippe se permet de penser au temps t+1 voire t+2. Car la situation politique à la prochaine élection présidentielle aura assurément beaucoup évolué depuis cette fin d'été.


D'ailleurs, des adversaires politiques l'ont bien compris comme cela. Ainsi Olivier Faure, l'insipide premier secrétaire du PS, a considéré que cette annonce montrait à quel point Édouard Philippe ne croyait plus à la seconde moitié du second quinquennat d'Emmanuel Macron puisqu'il souhaite passer tout de suite à la séquence suivante.

Ce qui est très étrange, c'est qu'Édouard Philippe a fait dans la même interview ce qu'il reprochait tant à Laurent Wauquiez qu'à Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et quelques autres, se préoccuper de la future élection présidentielle et oublier l'intérêt national et le pays qui doit être gouverné d'ici là, en l'exprimant dès le début de l'entretien : « Quand il s'agit de la France, je recommande vivement de n'être ni aveuglé par le passé, ni obsédé par le futur. ».

 


Édouard Philippe a démarré l'interview avec une charge singulière contre Emmanuel Macron : « J'ai déjà eu l'occasion de dire tout le mal que je pensais de la façon dont cette décision de dissoudre avait été pensée et exécutée. Mais avant la décision de dissoudre, il y a eu, en janvier, la décision de changer de Premier Ministre. J'avais recommandé au Président de la République de conserver Élisabeth Borne, qui me paraissait accomplir sa mission avec loyauté et abnégation, jusqu'aux européennes. Après le 9 juin, il aurait pu, s'il l'estimait nécessaire, changer de Premier Ministre pour changer de politique. Ce ne fut pas la décision du Président de la République. ».

Édouard Philippe fait partie des quelques personnalités politiques qui sont aujourd'hui populaires dans les sondages de popularité. Mais il ne l'avait pas été lorsqu'il était à Matignon. Grand connaisseur de notre histoire politique, l'ancien Premier Ministre devrait savoir qu'une forte popularité ne signifie pas forcément, pour ne pas dire jamais, à une élection à la Présidence de la République : avant lui, nombreux candidats l'ont compris à leurs dépens, Raymond Barre en 1988, Édouard Balladur en 1995, Lionel Jospin en 2002, François Bayrou en 2007, Ségolène Royal en 2007, Alain Juppé en 2016, Manuel Valls en 2017, etc. Car souvent, la popularité tient à ce que des sondés du camp adverse trouvent le personnage sympathique mais pour qui, dans l'isoloir, il ne serait pas question de voter.

Sa lecture des élections législatives est la suivante : « Trois sentiments ont prévalu : la déception des électeurs RN, le soulagement dans le bloc central (…), et l'enthousiasme de la gauche, qui prétend avoir gagné. Pour ma part, j'ai surtout vu le caractère ingouvernable d'une Assemblée sans aucune majorité nette. Le RN est le premier parti, mais le bloc le moins important ; le NFP rassemble 193 députés ; et entre le NFP et le RN, il y a un bloc central de 235 députés en incluant l'ex-majorité, les LIOT et la Droite républicaine, dont 47 députés LR qui affirment ne pas vouloir participer à ce bloc, mais qui votent avec lui… ». Et de le répéter plus tard : « Je redis que le bloc du NFP est plus restreint que le bloc central. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le NFP n'a pas réussi à faire élire monsieur Chassaigne à la Présidence de l'Assemblée. ».


Pour Édouard Philippe, la situation est dangereuse car il y a de nombreux dangers dont le premier est le sentiment de s'être fait voler l'élection avec la frustration des électeurs du RN qui n'ont pas gagné ces élections, mais aussi celle des électeurs de gauche qui croient, avec plus ou moins de bonne foi, qu'ils les ont gagnées. L'autre risque est bien sûr ce qu'il a appelé « le péril budgétaire que je crois sous-estimé » avec une absence grandissante de crédibilité de la parole de la France : « Mon sentiment c'est que nous sommes au bord de la falaise. Que l'instabilité politique perdure, ou qu'un gouvernement prenne des mesures directement contraires à nos engagements, et nous risquons l'accident majeur. ». Le troisième danger est l'immobilisme : « On ne parle plus des sujets importants qui ne se régleront pas si nous ne faisons rien : l'Éducation devrait être notre priorité et on n'en parle plus ; l'Écologie devrait nous obnubiler, plus personne n'en parle. C'est désastreux. Nous vivons une crise terrible du logement, qui limite les perspectives d'un grand nombre de nos concitoyens. (…) L'immobilisme a un coût considérable sur ces sujets notamment. ». Enfin, le quatrième danger est l'ordre public, la sécurité et la justice (il est notamment favorable aux peines planchers en matière de récidive).
 


Malgré ces quatre dangers, Édouard Philippe reste très optimiste pour l'avenir de la France : « Très souvent, quand je suis à Paris, je m'inquiète. Et quand je suis dans le pays, je me rassure. Je vois partout des initiatives incroyables dans une multitude de domaines. J'ai l'impression que, partout où je vais en France, je suis à 15 kilomètres d'une pépite. ». Sans oublier les Jeux olympiques et paralympiques : « Qu'est-ce qu'on a entendu avant ! La vérité, c'est que les organisateurs ont fait un travail remarquable, que les pouvoirs publics ont été à la hauteur, que les athlètes nous ont fait rêver et que l'ambiance était exceptionnelle. Et je dois dire que dans un pays qui doute, cela a fait du bien ! Qu'en restera-t-il ? J'espère un peu plus d'humilité pour ceux qui critiquent toujours tout avant… ».

Par ailleurs, le Normand est résolument opposé au scrutin proportionnel : « Je suis très attaché au scrutin majoritaire. Notamment parce qu'il impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire. Je me demande parfois si on ne devrait pas, pour les élections législatives, instituer la même règle que pour l'élection présidentielle, c'est-à-dire qu'au deuxième tour restent seulement les deux premiers. ». Et d'ajouter : « Méfions-nous d'un mode de scrutin qui laisserait la possibilité aux états-majors de partis politiques parisiens de construire des listes de candidats sans aucun lien avec les réalités politiques locales. ».

Dans les discussions actuelles pour la formation du gouvernement, Édouard Philippe a confirmé son désaccord avec Laurent Wauquiez : « La droite doit s'engager ! En refusant de participer à ce bloc central, elle précipite l'ensemble vers la gauche. J'observe d'ailleurs qu'il y a un certain nombre de gens, au sein de cette Droite républicaine, qui seraient prêts à prendre leurs responsabilités, parce qu'ils pensent que c'est nécessaire pour le pays. J'en connais ! Tous les partis de gouvernement devraient avoir pour objectif principal de favoriser la stabilisation de la vie politique. ».


D'ailleurs, sa logique actuelle est claire : « Je soutiendrai tout Premier Ministre choisi dans un espace politique qui va de la droite conservatrice à la social-démocratie et qui inscrira son action dans cet espace politique en construisant les compromis pour avancer. ». C'est valable notamment pour Bernard Cazeneuve, autre Normand, auquel il a succédé à Matignon en 2017 : « Entre des maires de grandes villes portuaires normandes, il y a toujours une amitié qui fait fi des logiques partisanes. Et je ne suis pas non plus insensible à son sens de la fidélité, de la nuance et de l'humour, qualités rares par les temps qui courent. ». Et pour Xavier Bertrand : « Nous partageons la même culture d'élu local de territoires populaires et ouvriers, le même engagement contre les extrêmes. ».

Il n'en reste pas moins que l'esprit d'Édouard Philippe est ailleurs, dans la future campagne présidentielle : « Je me prépare pour proposer des choses aux Français. Ce que je proposerai sera massif. Les Français décideront. ». En quelque sorte, ses déclarations du 3 septembre 2024 sont la déclaration de Rome [17 janvier 1969] de l'ancien Premier Ministre. Mais n'est pas Georges Pompidou forcément qui veut...



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 septembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Édouard Philippe massivement candidat à la succession d'Emmanuel Macron !
Édouard Philippe prêt à décoller.
De nouveaux Horizons.

 




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240903-edouard-philippe.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/edouard-philippe-massivement-256609

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/03/article-sr-20240903-edouard-philippe.html


 

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22 avril 2024 1 22 /04 /avril /2024 03:26

« L’équipe du député de la Somme a fait réaliser une enquête d’opinion dans laquelle il apparaît plus fort que Mélenchon si la gauche s’unit pour 2027. » ("Libération", le 21 avril 2024).


 


Décidément, la campagne des élections européennes parle de tout sauf de l'Europe, et plus préférentiellement, parle de l'élection présidentielle de 2027. C'est le problème avec la course aux petits chevaux de la Cinquième République, la campagne présidentielle démarre dès la fin de la précédente. Avec le quinquennat, inutile de dire qu'on ne vit que des supputations préprésidentielles, mais même avec le septennat, c'était pareil !

L'information provient d'un article de Charlotte Belaïch publié dans "Libération" la matinée du dimanche 21 avril 2024 et a valeur de coup de tonnerre : François Ruffin pourrait se qualifier au second tour d'une élection présidentielle et ferait jeu égal avec Marine Le Pen.

Avec cette information, il y a de quoi disserter sur beaucoup de sujets mais il faut bien rappeler que, hors contexte, les sondages d'intentions de vote à des élections ne valent quasiment rien : il y a d'abord l'identité de tous les candidats qui n'est pas connue (une élection, c'est avant tout une compétition entre plusieurs personnalités), et ensuite, il y a une campagne, avec des candidats qui tentent de montrer qu'ils seraient les meilleurs, et qui peuvent même convaincre des indécis et des hésitants.

La seule réelle information du sondage est un enfonçage de porte ouverte : les Français de gauche aimeraient mieux François Ruffin que Jean-Luc Mélenchon. À part cette très grande découverte, il n'y a pas trop à supputer sur ce sondage même si je vais en proposer quelques commentaires.

La première chose à savoir, c'est que c'est un sondage secret, ce qui veut dire que c'est un sondage qu'un candidat finance dans le but de connaître la faisabilité d'une candidature. C'est fréquent dans la perspective d'une élection municipale dans une grande ville (ne serait-ce que pour sonder déjà la notoriété du candidat potentiel). Autant que ça vaille le coup. Il n'y a que des exceptions comme Anne Hidalgo pour, après des premiers tests catastrophiques, se convaincre qu'on ferait un bon candidat. Les autres y renoncent sauf s'ils veulent faire du témoignage (comme les trotskistes). Mais avant l'élection de 2017, on trouvait déjà ce genre de résultats avec Benoît Hamon préféré à Jean-Luc Mélenchon, puis avant l'élection de 2022, avec Yannick Jadot préféré à Jean-Luc Mélenchon, et dans les dernières semaines de campagne, Jean-Luc Mélenchon a explosé et dépassé tous ses concurrents de gauche dans les urnes parce qu'il reste excellent tribun.

Pour le dire franchement, François Ruffin, certes, a l'air sympa, mais est-ce suffisant pour diriger la sixième (ou septième) première puissance mondiale ? Quelle est sa doctrine militaire ? Sa vision à long terme de l'Europe ? Sa stratégie industrielle ? À part : il faut faire payer les riches ? Il y a le contenu du programme politique, mais il y a aussi le tempérament, et, ma foi, je ne le vois pas du tout dans le rôle du candidat. Oui, dans le rôle du candide, mais dans le rôle du candidat, celui qui doit promettre, faire rêver, avoir de l'aplomb et à la fin (et aucun grand candidat n'y échappe), dire n'importe quoi car réussir à convaincre la majorité absolue des électeurs d'une France si éclatée à voter sur son nom, forcément, il y aura des malentendus, voire de la tromperie (on se souvient de la guerre contre la finance internationale en 2012 !). Je ne le vois pas sombrer dans une surenchère de démagogie, et cela plus par naïveté que par bonne conscience morale.

L'institut de sondages sollicité par les proches de François Ruffin est Cluster17. Il a proposé aux sondés deux hypothèses de premier tour : l'une avec François Ruffin comme unique candidat de la gauche, l'autre avec Jean-Luc Mélenchon à sa place. Le reste est inchangé, à savoir Marine Le Pen candidate de RN, Édouard Philippe représentant les couleurs macronistes, Laurent Wauquiez pour LR, sans oublier Éric Zemmour et Nicolas Dupont-Aignan. Le sondage a été réalisé sur Internet du 2 au 5 avril 2024.

Dans l'hypothèse Ruffin, c'est un coup de tonnerre : il se qualifierait pour le second tour en dépassant Édouard Philippe de 4 points avec 29% d'intentions de vote, à 1 point derrière Marine Le Pen. Le coup de tonnerre n'est pas interne à la gauche mais laisserait entendre que le candidat macroniste pourrait être éjecté dès le premier tour de la compétition. Ce serait une douche froide pour tous les électeurs modérés favorables à la construction européenne et aux valeurs républicaines de progrès.

 


Dans l'hypothèse Mélenchon, on retrouverait le rapport de forces de l'élection présidentielle de 2022 : Jean-Luc Mélenchon serait exclu du second tour avec seulement 18%, derrière Édouard Philippe 31% et Marine Le Pen 32%.
 


La comparaison des deux hypothèses de premier tour se suffisent à elles-mêmes et ce qu'il fallait démontrer serait ainsi démontré : François Ruffin obtiendrait 11 points de plus que Jean-Luc Mélenchon et dans le package, pourrait concourir pour le second tour face à Marine Le Pen. Et pourrait même être élu !

Deux hypothèses de second tour ont été testées, mais pas celle la plus probable, Marine Le Pen versus Édouard Philippe, ce qui aurait été intéressant (mais l'association de François Ruffin n'avait sans doute pas assez d'argent pour faire ce troisième test).

La première hypothèse est Marine Le Pen versus François Ruffin, et ils seraient tous les deux avec le même niveau de voix, à 50% (ce qui fait qu'on ne peut pas conclure).
 


Dans la seconde hypothèse, Marine Le Pen versus Jean-Luc Mélenchon, ce dernier s'effondrerait à 35% face à 65% pour la leader du RN. Là encore, la démonstration serait faite que François Ruffin tiendrait bien mieux face à Marine Le Pen que le gourou vieillissant des insoumis.
 


Si on osait aller plus loin dans l'analyse, on dirait qu'il y aurait une réelle incohérence entre ces deux hypothèses. En gros, 30% (15%/50%) des électeurs qui auraient voté pour François Ruffin au second tour voteraient pour Marine Le Pen si elle était opposée à Jean-Luc Mélenchon. De même, en comparant les deux hypothèses du premier tour, 38% (11%/29%) des électeurs qui auraient voté pour François Ruffin au premier tour ne voteraient pas pour Jean-Luc Mélenchon si c'était le candidat de la gauche et se reporteraient majoritairement sur Édouard Philippe (6 points sur les 11 points perdus par Jean-Luc Mélenchon), également sur Marine Le Pen (2 points), Nicolas Dupont-Aignan (1 point) et 1 point seulement à gauche (Philippe Poutou).

Cela montre que le sondage est foireux car il ne prend pas en compte les programmes. Or, que ce soit François Ruffin ou Jean-Luc Mélenchon, c'est bien le programme des insoumis qui serait identique et en vitrine et qui paraît assez incompatible avec un vote Édouard Philippe (par exemple).


Bien entendu, l'analyse devrait tenir compte de l'abstention, car dans l'hypothèse d'un second tour RN versus FI, beaucoup d'électeurs (ceux du pôle central) n'y retrouveraient plus leurs petits (ce serait mon cas). Mais ce serait aussi le cas entre les deux hypothèses du second tour adoptées : ainsi, 33% des sondés s'abstiendraient dans le cas d'un duel Marine Le Pen versus François Ruffin, tandis que 42% des sondés s'abstiendraient dans le cas d'un duel Marine Le Pen versus Jean-Luc Mélenchon. Cela montrerait surtout que François Ruffin est capable de mieux rassembler la gauche que Jean-Luc Mélenchon, réussissant à préserver l'électorat extrémiste insoumis tout en séduisant la partie plus modérée de la gauche non macroniste, à savoir écologiste et socialiste.
 


L'abstention observée au premier tour serait nettement moindre, ce qui est logique dans la mesure où l'offre politique serait plus large : dans le cas d'une candidature de François Ruffin, 23% seraient abstentionnistes, et dans le cas d'une candidature de Jean-Luc Mélenchon, 27% seraient abstentionnistes, ce qui confirmerait qu'une partie des électeurs de gauche rejetteraient absolument Jean-Luc Mélenchon mais seraient prêts à voter François Ruffin. L'ordre de grandeur de l'abstention est compatible avec l'abstention habituellement constatée dans la réalité des élections présidentielles passées.
 


Cependant, deux biais gigantesques remettent en question l'intérêt et les conclusions d'un tel sondage (sauf, je le répète, de conclure que les électeurs de gauche, dans leur globalité, préféreraient François Ruffin à Jean-Luc Mélenchon).

Le premier biais est valable dans tous les sondages, et c'est pour cela qu'au-delà de la simple mesure photographique d'un état de l'opinion qui pourrait évoluer au cours du temps, il y a aussi la marge d'erreur, très importante lorsque les scores se rapprochent de 50%. Dans les mentions officielles, il est dit et répété (notamment sur les slides des résultats) que le sondage est réalisé par Cluster17
« auprès d'un échantillon de 1 713 personnes représentatif de la population française ». 1 713, c'est déjà pas mal quand souvent d'autres prennent à peine 1 000 personnes.

Mais il faut aussi lire le détail technique de ce sondage, qui est pourtant clairement expliqué à qui veut le lire précisément. Et ce nombre de 1 713 n'est pas celui qu'il faut prendre pour calculer les intervalles d'incertitude : il est en fait bien plus faible. En effet, il faut prendre en compte ceux, parmi les 1 713 personnes, qui ne sont pas inscrits sur une liste électorale et par conséquent, qui ne voteront de toute façon pas, puis retrancher encore ceux qui n'ont aucune intention de voter, puis pondérer par ceux qui hésiteraient à voter (dont la probabilité de vote est entre 0 et 1).
 


Et cela donne nettement moins : seulement 1 238 personnes pour l'hypothèse Ruffin du premier tour. Et 1 063 personnes pour l'hypothèse Marine Le Pen versu François Ruffin au second tour. Inutile d'évoquer les deux hypothèses avec Jean-Luc Mélenchon car la différence des résultats obtenus est trop grande (relativement aux insoumis ou par rapport aux autres candidats) pour que le calcul de la marge d'erreur puisse avoir un intérêt (même si cette marge est plus grande car les personnes sont moins nombreuses à vouloir se plier à ces choix).

Pour le premier tour avec François Ruffin, l'intérêt est de connaître le niveau d'avance avec Édouard Philippe, 29% par rapport à 25%, c'est important puisque cela préfigurerait le second tour. Cela donnerait ainsi Édouard Philippe à 25% +/- 2,45%, tandis que François Ruffin serait à 29% +/- 2,6% soit : Édouard Philippe entre 22,5% et 27,5% tandis que François Ruffin entre 26,4% et 31,6%. Donc conclure avec ce sondage que François Ruffin dépasserait Édouard Philippe est une grossière erreur puisque les intervalles d'incertitude se chevauchent, d'où, avec les mêmes résultats, la possibilité que le score soit en fait inversé, avec une avance de 1 point, par exemple, de l'ancien Premier Ministre. Mais dans cette même logique, Marine Le Pen, qui serait à 30% +/- 2,6%, c'est-à-dire entre 27,4% et 32,6%, pourrait donc être dépassée par François Ruffin (dans l'incertitude haute pour les insoumis), ce qui reviendrait à dire que le candidat FI serait premier du premier tour (résultat qui, politiquement, a tout de même peu de chance de survenir). Je n'ai pas fait le calcul pour l'hypothèse Mélenchon du premier tour, car ce n'était pas l'objet du sondage, mais il est clair que Marine Le Pen et Édouard Philippe seraient au coude-à-coude et cela pourrait bien sûr être Édouard Philippe au premier rang, dépassant la candidate du RN.
 


Dans l'hypothèse du second tour avec François Ruffin, comme les scores seraient de 50% chacun, l'intervalle donné par la fiche technique explique qu'en fait, ils seraient compris entre 47% et 53%. Bref, à peu près l'écart de tous les candidats au second tour sauf en 1965, 1969, 2002, 2017 et 2022. Bref, le sondage dit surtout que tout est possible, nous voilà bien avancés !

Mais au-delà de ces calculs d'apothicaires de la vie électorale, le sondage de Cluster17 commandé par François Ruffin pêche par un second biais bien plus grave, celui de figer l'ensemble des candidats du premier tour. Si Marine Le Pen, Éric Zemmour, et, dans une moindre mesure, Laurent Wauquiez, ont une forte probabilité de participer au scrutin de 2027, il n'en est pas de même pour les autres. La présence de Nicolas Dupont-Aignan devient moins évidente depuis qu'il s'est retiré des élections européennes (ce qui avantagerait l'extrême droite). De même, le candidat du camp macroniste est loin d'être connu et Gabriel Attal pourrait aussi créer la surprise.

Toutefois, de toutes ces hypothèses, le biais principal reste l'hypothèse que le candidat insoumis soit le candidat unique de la gauche, de Lutte ouvrière aux radicaux de gauche, en passant par le PS, le PCF, EELV, et FI, ce qui n'est absolument pas crédible alors qu'ils ne s'entendent sur rien ! D'autant plus que l'hypothèse de garder un candidat du NPA, avec Philippe Poutou, est plutôt fantaisiste car ce parti est ruiné (par l'effet attractif de FI) et plutôt unitaire, alors que LO a toujours été autonomiste (refusant même de voter lors du second tour en 2002).


Toute cette mousse médiatique sur ce sondage est donc assez stérile mais elle prouve deux choses : François Ruffin a envie d'y aller, à la présidentielle de 2027, et il aura des soutiens, de ceux qui veulent que Jean-Luc Mélenchon prennent définitivement sa retraite. L'autre chose est moins agréable pour la gauche : les électeurs de gauche modérés, qui ne supportent pas Jean-Luc Mélenchon et pensent trouver dans le vote pour Raphaël Glucksmann aux élections européennes une voie raisonnable, se trompent complètement : voter Glucksmann, c'est voter PS et donc, à terme, voter pour FI lors des choses sérieuses, en 2027.

Car si j'explique juste avant que la réunion de toute la gauche à l'élection présidentielle n'est pas crédible dans la situation actuelle, et c'est vrai surtout dans le cas d'une candidature de Jean-Luc Mélenchon (il suffit de voir en 2017 et 2022), ce genre de sondages pourrait, par leur fonction autoréalisatrice, conduire les appareils partisans de gauche à renoncer à se présenter à la présidentielle derrière une figure incontestée parce que peu politique comme celle de François Ruffin, mais, je le répète, derrière François Ruffin restera toujours le programme de FI qui est anti-européen, pro-Poutine, pro-palestinien et qui considère le Hamas comme faisant des actes de résistance légitimes.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 avril 2024)
http://www.rakotoarison.eu

Pour aller plus loin :

Sondage secret : le tour de chauffe de François Ruffin !
Sondage secret : en cas de législatives anticipées, une victoire du RN ?
Marine Le Pen en tête dans un sondage : attention au buzz !





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240421-francois-ruffin.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/sondage-secret-le-tour-de-chauffe-254289

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/04/22/article-sr-20240421-francois-ruffin.html




 

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9 décembre 2023 6 09 /12 /décembre /2023 04:53

« Elle songea qu'ils se trompaient probablement tous les uns les autres et qu'ils vivaient dans une illusion. » (Marie Vareille, "Ma vie, mon ex et autres calamités", éd. Charleston, 2019).





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Bien que déposée par le groupe écologiste de l'Assemblée Nationale, l'adoption surprise de la motion de rejet préalable contre le projet de loi Immigration le lundi 11 décembre 2023 a été une grande victoire du Rassemblement national et de sa stratégie pour arriver au pouvoir.

Car il ne faut pas douter d'une chose, et le thème de l'immigration est très clivant sur ce point-là : la France est divisée en deux, et ces deux parties, ces deux camps, quoi qu'en disent les leaderaillons de la Nupès, c'est la majorité présidentielle (Renaissance et alliés) et le RN, à l'exclusion de la gauche nupésienne qui ne reste que périphérique et revendicative.

Bien involontairement, mais de manière complètement prévisible, la gauche a donné au RN une victoire incroyable qui pourrait déboucher sur une crise politique voire des élections législatives anticipées. Pour l'heure, Gérald Darmanin, qui a proposé sa démission au Président Emmanuel Macron qui l'a refusée, a été reconfirmé comme poids lourd de la majorité présidentielle. Son objectif reste le même qu'avant le rejet de son texte qu'il ne considère que comme un incident de parcours. Il souhaite faire adopter la loi Immigration sans utiliser l'article 49 alinéa 3 de la Constitution. Le gouvernement aurait intérêt d'ailleurs à ne pas l'utiliser, car sur ce sujet très sensible qui est propice à toutes les postures électoralistes, l'hypothèse qu'une motion de censure soit adoptée est devenue très probable.

Certains observateurs imaginent une stratégie machiavélique d'Emmanuel Macron : ce dernier serait susceptible de provoquer une dissolution de l'Assemblée Nationale pour en finir avec tant d'impuissance dans l'hémicycle et de s'accommoder de la perspective d'une éventuelle victoire du RN aux élections législatives qui en suivraient. Les sondeurs le disent et le répètent, le RN pourrait gagner ces élections législatives.

Certes, certains commentateurs politiques pensent que ce serait impossible que le RN obtienne une majorité absolue ou même relative. Absolue ou relative, ce serait pourtant une véritable possibilité à ne pas écarter du champ des possibles : le RN a déjà décuplé le nombre de ses députés en juin 2022 (par rapport à juin 2017), et personne ne l'aurait imaginé même la veille du scrutin (tout au plus, le RN aurait pu constituer un groupe, mais de l'ordre de 20 à 30 députés, pas les 88 d'aujourd'hui). Ces 88 sièges, partout en France (pas dans quelques territoires mais répartis dans toute la France), ils ont donné au RN une force de frappe extraordinaire avec une implantation locale généralisée (chose que Renaissance peine à avoir).


Dès lors que le RN apparaît, ce qui semble malheureusement le cas, comme la seule perspective d'alternance à l'actuelle majorité macronienne, ce parti sera bénéficiaire de l'effet mécanique du scrutin majoritaire qui leur permet de poser la question : pour ou contre Emmanuel Macron ? Ou encore : pour ou contre Marine Le Pen ?

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L'objectif d'Emmanuel Macron serait de ne pas laisser dans la postérité un passage de pouvoir à l'Élysée à Marine Le Pen en 2027. Pour cela, il pourrait imaginer un gouvernement de cohabitation dirigé par le RN qui confronterait ce parti populiste aux réalités du pays. Comme c'est le cas du gouvernement italien actuel dirigé par Giorgia Meloni, même si la situation politique est très différente. Aucun gouvernement de cohabitation n'a été approuvé par une élection présidentielle qui le suivait : ni en 1988, ni en 1995, ni en 2002. Être Premier Ministre est un cadeau généralement empoisonné.

Mais pour la postérité, être le premier Président à nommer à Matignon un rejeton d'un parti créé par Jean-Marie Le Pen ne serait tout de même pas joli joli non plus. Sans compter la vie quotidienne dans les institutions, les humiliations au conseil des ministres, les déclarations impuissantes d'un Président de la République alors que les ministres feraient le contraire. Un tel machiavélisme prêté au Président serait presque de l'aliénation mentale. Une dissolution paraît surtout un suicide collectif en perspective, pas seulement pour Renaissance, mais pour toute la classe politique, RN compris.

Cela n'empêche pas l'idée de continuer à faire son chemin. Dans la matinale de ce mardi 12 décembre 2023 sur BFMTV et RMC, le président du RN et tête de la liste RN aux élections européennes du 9 juin 2024, Jordan Bardella, a déjà annoncé la couleur : le RN est prêt à gouverner, et en cas de majorité, il serait lui-même le Premier Ministre d'une cohabitation.

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Après l'autoproclamation à Matignon de Jean-Luc Mélenchon avant les élections législatives de juin 2022, voici l'autoproclamation de Jordan Bardella ! En un qui n'a rien compris au fonctionnement des institutions et à l'esprit de la Constitution : la nomination du Premier Ministre est une prérogative exclusive du Président de la République. Évidemment, ce qui fait tiquer, c'est : pourquoi ne serait-ce pas Marine Le Pen ? Celle-ci, bien sûr, a l'horizon présidentiel de 2027 à l'esprit et elle ne voudrait pas se brûler les ailes dans l'exercice du pouvoir quelques années auparavant. Une sorte de stratégie de Jacques Chirac élaborée en 1993 en laissant Matignon à son alors ami de trente ans Édouard Balladur.

L'un des arguments électoraux du RN pour voter pour lui, ou, du moins, ne pas voter contre lui, ce serait : il n'est jamais arrivé au pouvoir, on peut essayer. La thèse de l'essai est intéressante car elle est peu ambitieuse. En gros, tous ceux qui ont gouverné auraient été incapables de rendre la vie des Français plus confortable, alors, essayons n'importe quoi mais quelque chose de nouveau. Et il y en a même à gauche que se disent : levons l'hypothèque RN ! Voter nécessite pourtant un peu d'esprit de responsabilité.


En fait, le RN n'a rien de nouveau. Il fait partie intégrante du système politique. Il a fêté son cinquantenaire en automne 2022. En cinquante et un ans d'existence, qu'est-ce que ce parti a fait pour le bien des Français ? Rien. Absolument rien. Pas une seule proposition, pas une seule idée qui a abouti pour l'intérêt général. Ce parti a été géré comme une aubaine des situations. Sous Le Pen père, il était une PME prospère mais artisanale, avec un fonds de commerce juteux (l'anti-immigration), au point d'être déstabilisé lorsqu'il a été présent au second tour de l'élection présidentielle de 2002 (il manquait le financement d'une campagne de second tour). Avec Le Pen fille, cela a commencé à devenir une entreprise plus importante, surtout, plus sérieuse, au point de se confondre avec le système (ils sont comme les autres !).

Éric Zemmour, sur leur droite, et Jean-Luc Mélenchon, sur leur gauche, existent et, par leurs outrances, permettent au RN et à ses deux leaders, Marine Le Pen et Jordan Bardella (le pseudo-gendre), de se recentrer et surtout, d'augmenter leur respectabilité, mot d'ordre depuis 2022 à base de cravates et de propos courtois (il y a quand même quelques dérapages quand les chefs ne surveillent pas la meute). L'idéologie qu'ils servent n'a pas changé, mais elle est emballée dans une sorte de politiquement correct qui leur laisse l'espoir de convaincre les Français de leur compétence.

De toute façon, le moment venu, les Français arbitreront. Et jamais comme les sondages l'imaginent.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (12 décembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Rassemblement national : objectif 2027... ou avant !
Jordan Bardella.
Marine Le Pen.

Le nouveau JDD et la récupération des Enzo...
Geoffroy Lejeune.
Attention, un train de violence peut en cacher un autre...
Éric Caliméro Zemmour.
Jean-Marie Le Pen et sa marque dans l'histoire.
La tactique politicienne du RN.
La sanction disciplinaire la plus lourde de la Cinquième.

Louis Aliot.
Le congrès du RN.
Grégoire de Fournas.
Incident raciste : 89 nuances de haine à la veille du congrès du RN ?
Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard...

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7 mai 2022 6 07 /05 /mai /2022 03:18

« Nous défendons l’idée de progrès, scientifique, technique, et intellectuel. Nous défendons la liberté comme condition première de toute évolutin et de chaque avancée, économique comme sociale. (…) La France est porteuse d’un modèle de société et de développement humain qu’il faut accepter de réformer pour faire face aux défis qui nous attendent, pour en conserver l’ambition et la force. » (Extrait de la Charte des valeurs d’Ensemble, majorité présidentielle, novembre 2021).





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Ce samedi 7 mai 2022 à 11 heures, le Président de la République Emmanuel Macron procède à sa nouvelle investiture au palais de l’Élysée. Cérémonie plus courte qu’il y a cinq ans en raison de l’absence de la passation des pouvoirs avec son prédécesseur et de la remise du cordon de grand-croix de la Légion d’honneur.

En revanche, on regardera avec attention qui a été invité, même s’il ne faut pas compter sur cette journée pour connaître le nom du prochain Premier Ministre. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait indiqué le 4 mai 2022 que Jean Castex resterait en fonction jusqu’au 13 mai 2022, date de la fin officielle du premier quinquennat (à minuit).

On peine cependant à comprendre pourquoi la fin du premier quinquennat ne concorde pas avec le début du second quinquennat. Une tentative de réponse peut être la fête de l’Europe, le 9 mai 2022. En effet, il est de tradition que le nouveau chef de l’exécutif, investi ou réinvesti, en France et en Allemagne, fasse son premier déplacement international chez l’autre, en Allemagne et en France. Olaf Scholz avait ainsi réservé sa première visite diplomatique en rendant visite au Président français Emmanuel Macron. Ce dernier va donc rendre la pareille après sa seconde investiture de ce week-end.

Le mauvais procès de venir chercher ses ordres à Berlin est stupide puisque c’est une tradition amicale systématiquement réciproque. Angela Merkel avait fait de même en 2018 lorsqu’elle a été confirmée à la tête de son quatrième gouvernement. Toutefois, Emmanuel Macron a été habile puisqu’en se rendant à Berlin le jour de la fête de l’Europe, le 9 mai 2022, il prononcera un discours pro-européen tant en qualité de Président français nouvellement réélu qu’en celle de Président du Conseil de l’Unions Européenne qu’il est toujours jusqu’au 1er juillet 2022.

Évacuons aussi le mauvais procès du Président de la République le plus mal élu, ce qui est faux, une assertion fausse martelée par Jean-Luc Mélenchon. Avec 58,5% des voix, Emmanuel Macron ferait bien des envieux, d’abord parmi les candidats ayant échoué (dont Jean-Luc Mélenchon dès le premier tour), ensuite parmi les élus de la Cinquième République qui, à l’exception de Jacques Chirac en 2002, n’ont jamais eu un aussi bon score (pas même le Général De Gaulle !).

Et ne venons pas parler des inscrits, car d’une part, en prenant en compte les abstentionnistes et en les supposant comme des opposants, on fait de la très grossière manipulation politique, et d’autre part, même pris en tant que tel, Georges Pompidou a eu, avec 37,5% des inscrits, moins de pourcentage par rapport aux inscrits qu’Emmanuel Macron et François Hollande, avec 39,1% des inscrits, a eu un pourcentage sensiblement égal. Emmanuel Macron, avec 38,5% des inscrits, n’est donc pas "mal élu". Ou alors, que dire, le 18 juin 2017, de l’élection de Jean-Luc Mélenchon, député de la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône, avec seulement 20,0% des inscrits ? ou encore de Marine Le Pen avec seulement 24,0% des inscrits ?

En revanche, oui, on peut parler de "flottement" au plus haut niveau de l’État. À ma connaissance, aucun Président de la République n’a mis aussi longtemps pour désigner un Premier Ministre et un gouvernement à la suite d’une élection présidentielle. On peut imaginer qu’Emmanuel Macron attendait justement de voir comment les choses évolueraient du côté socialiste et du côté LR pour se faire une idée du prochain quinquennat.

Les nombreuses supputations sur l’identité du prochain Premier Ministre (à ceux déjà cités, il faut rajouter en particulier : Valérie Rabault, Véronique Bédague, Carole Delga, Pascal Canfin, Olivier Dussopt, Christelle Morençais, Nicolas Notat, Catherine Vautrin, Marisol Touraine, etc.) ont laissé un parfum d’indécision assez étonnant pour celui qui se fait régulièrement qualifié de Président "autocrate".

Ce flottement du côté de la majorité présidentielle et une désertion politique du côté de Marine Le Pen (qui est en vacances !) ont laissé pendant dix jours le terrain médiatiquement vide au profit de Jean-Luc Mélenchon qui a réussi à imposer, avec humiliation, la reddition du parti socialiste et à laisser croire qu’une majorité de gauche est possible à l’Assemblée Nationale (alors que le premier tour de l’élection présidentielle du 10 avril 2022 a montré qu’elle était au contraire ultraminoritaire).

Ce flottement a pris fin le jeudi 5 mai 2022 avec la conférence de presse de quatre des grands responsables de la majorité présidentielle en cours de restructuration. Effectivement, le mouvement Ensemble Citoyens créé le 29 novembre 2021 à la Mutualité de Paris est devenu le 5 mai 2022 Ensemble (tout court), comprenant tous les partis et formations ayant soutenu Emmanuel Macron dès le premier tour.

À savoir : LREM (qui a été renommé Renaissance, comme le nom de la liste aux élections européennes de 2019), le MoDem de François Bayrou, Horizons de l’ancien Premier Ministre Édouard Philippe, le parti radical de Laurent Hénart, Agir issu de LR et l’UDI de Franck Riester (avec Claude Malhuret, Fabienne Keller, Laure de La Raudière, Frédéric Lefebvre, Pierre-Yves Bournazel, etc.), et aussi des mouvements issus du parti socialiste, Territoires de progrès mené par Olivier Dussopt (avec Jean-Yves Le Drian, Olivier Véran, Clément Beaune, Émilie Chalas, Florence Parly, Élisabeth Borne, Emmanuelle Wargon, Agnès Pannier-Runacher, Brigitte Bourguignon, Stéphane Travert, Anne-Christine Lang, Francis Chouat, François Pupponi, etc.), En commun regroupé autour de Barbara Pompili (avec Hugues Renson, Jacques Maire, Cécile Rilhac, etc.), et la Fédération progressiste créée très récemment par François Rebsamen (avec Juliette Méadel, Thierry Repentin, Pascal Terrasse, etc.).

La construction de cette majorité présidentielle a été laborieuse, en particulier parce qu’il y aurait eu une "crise" entre Édouard Philippe et Emmanuel Macron en janvier 2022. Le Président de la République aurait refusé la fusion d’Agir dans Horizons, fusion qui aurait été logique (ce sont surtout d’anciens LR ou UDI devenus macronistes) mais dont la puissance aurait présenté un danger pour LREM.

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Dans cette conférence, quatre personnalités ont pris la parole : Richard Ferrand, président d’Ensemble, Édouard Philippe et François Bayrou, vice-présidents d’Ensemble, et Stéphane Guérini, secrétaire général d’Ensemble, ce dernier annonçant la transformation de LREM en Renaissance. Ces responsables ont également annoncé que le programme électoral d’Ensemble était le projet présidentiel d’Emmanuel Macron (là encore, c’est logique).

Bien entendu, le plus important était les investitures aux élections législatives. Regardons d’abord l’existant : dans la législature sortante, 346 députés sortants se réclament de la majorité présidentielle (il en faut au moins 289 pour avoir la majorité absolue), dont 267 de LREM, 57 du MoDem et 22 d’Agir. Le principe de cette coalition Ensemble, c’est qu’il n’y ait qu’une seule candidature de la majorité présidentielle dans chaque circonscription, et que les candidats élus députés s’engagent à s’inscrire à l’un des trois groupes de la majorité : LREM, MoDem et Horizons. Cela signifie aussi qu’Agir et le parti radical ne devront pas créer de groupe autonome à l’Assemblée Nationale. Et cela signifie enfin qu’un intergroupe sera créé pour rassembler toute la majorité présidentielle. Il ne faut pas négliger tout l’enjeu d’une cohésion de la majorité présidentielle à l’Assemblée Nationale. Entre 1974 et 1981, ce fut une épine pour Valéry Giscard d’Estaing qui avait confié à Olivier Guichard cette tâche.

Une première liste de 187 noms des candidats investis par Ensemble a été publiée le 5 mai 2022. En tout, LREM se réservera 400 circonscriptions, le MoDem entre 101 et 110, et Horizons 58. Ne seront pas candidats Ensemble notamment : Bruno Le Maire, Éric Dupond-Moretti, Jean-Jacques Bridey, Pacôme Rupin, Pierre Person, Mounir Mahjoubi.

Sont notamment candidats (sont indiquées les circonscriptions seulement pour ceux qui n’étaient pas élus en 2017 ou qui changent de circonscription) : Gérald Darmanin, Richard Ferrand, Jean-Michel Blanquer (4e circonscription du Loiret), Emmanuelle Wargon (8e circonscription du Val-de-Marne), Clément Beaune (7e circonscription de Paris), Élisabeth Borne (6e circonscription du Calvados), Gabriel Attal, Amélie de Montchalin, Olivier Dussopt, Manuel Valls (dans la 5e circonscription des Français de l’étranger : Espagne, Portugal, Andorre et Monaco, mais le député sortant LREM Stéphane Vojetta maintient sa candidature), Thierry Benoit (ex-UDI), Éric Woerth (ex-LR), Laurent Saint-Martin, Florian Bachelier, Marie Guevenoux, Paul Midy, directeur général de LREM (5e circonscription de l’Essonne, celle de Cédric Villani, ex-LREM), Astrid Panosyan (4e circonscription de Paris), Benjamin Haddad (14e circonscription de Paris), Thomas Cazenave (1e circonscription de Gironde), Violette Spillebout (9e circonscription du Nord), Julien Bargeton (6e circonscription de Paris), Élise Fajgeles (5e circonscription de Paris), Mohamad-Lamine Gassama (15e circonscription de Paris), Yanis Bacha (16e circonscription de Paris), Kolia Benié (17e circonscription de Pairs), Pierre-Yves Bournazel, Jeanne Dromard (1e circonscription de Seine-Saint-Denis), Anaïs Brood (2e circonscription de Seine-Saint-Denis), Nabil Aït Akkache (5e circonscription de Seine-Saint-Denis, celle de l’UDI Jean-Christophe Lagarde), Stéphane Testé, Sylvie Charrière, Frédéric Descrozaille, Jean-François Mbaye, Maud Petit, Philippe Hardouin (10e circonscription de Sainte-Saint-Denis), etc.

De ces 187 candidats déjà investis par Ensemble, 94 sont des femmes et 93 des hommes, 101 députés sortants et 86 nouveaux candidats, dont 43 déjà élus locaux. Les investitures complémentaires seront annoncées d’ici au 10 mai 2022 (le dépôt de candidature doit se faire officiellement entre le 16 et 21 mai 2022). Dans certaines circonscriptions, Ensemble ne devrait pas présenter de candidat pour aider certains députés sortants, comme Damien Abad (LR) et David Habib (PS), écarté de l’accord avec FI dans les Pyrénées-Atlantiques. Ancien député du MoDem, Jean Lassalle fait aussi l’objet d’un traitement particulier de la part de François Bayrou.

Le prochain Premier Ministre aura du mal à devenir le chef de la majorité et le chef de la campagne de la majorité présidentielle pour les élections législatives parce qu’il aura été complètement absent de ce long et minutieux processus sur les investitures. La semaine qui vient a des chances d’être cruciale pour les cinq prochaines années.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (06 mai 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Élysée 2022 (50) : Macron II succède à Macron I.
Élysée 2022 (49) : vers une quatrième cohabitation ?
Élysée 2022 (48) : qui sera le prochain Premier Ministre d’Emmanuel Macron ?
Élysée 2022 (47) : la victoire historique d’Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron réélu Président de la République le 24 avril 2022.
Discours du Président Macron le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris (texte intégral et vidéo).
Interview d’Emmanuel Macron le 22 avril 2022 sur France Inter.
Résultats du second tour de l’élection présidentielle du 24 avril 2022 (Ministère de l’Intérieur).

_yartiMacron2022AM02




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25 avril 2022 1 25 /04 /avril /2022 03:38

« Je sais que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi, non pour soutenir les idées que je porte, mais pour faire barrage à celles de l’extrême droite. Je veux ici les remercier et leur dire que j’ai conscience que leur vote m’oblige pour les années à venir. (…) Je ne suis plus le candidat d’un camp, mais le Président de toutes et de tous. (…) Nous avons tant à faire ! (…) Nul ne sera laissé au bord du chemin. (…) Cette ère nouvelle ne sera pas la continuité du quinquennat qui s’achève. » (Emmanuel Macron, le 24 avril 2022 à Paris).



_yartiMacron2022AM01

Ouf ! Soulagement et joie en France mais aussi en Europe à l’annonce des résultats du second tour de l’élection présidentielle de ce dimanche 24 avril 2022. La réélection du Président sortant Emmanuel Macron est historique à plus d’un titre (du reste, celle de son adversaire l’aurait été aussi). En effet, c’est la première fois dans l’histoire de notre République qu’un Président de la République est réélu au suffrage universel direct hors périodes de cohabitation, c’est-à-dire hors responsabilité du gouvernement sortant. Effectivement, François Mitterrand et Jacques Chirac ont été réélus, mais en tant que chef de l’opposition, il n’avait pas à défendre un bilan gouvernemental, et De Gaulle a été certes réélu mais il n’avait pas été élu au suffrage universel direct, l’élection de 1965 était sa première (et unique) consécration par l'onction du peuple à titre personnel (les référendums étant sur un sujet déterminé).

Ce mandat qui commence aura bien de problèmes, bien des enjeux, bien des responsabilités, mais il faut aussi savoir goûter à sa juste valeur cette victoire historique. D’après le Ministère de l’Intérieur, Emmanuel Macron a obtenu 18,8 millions de voix, soit 58,5% des suffrages exprimés, tandis que son opposante Marine Le Pen 13,3 millions de voix, soit 41,5%. C’est donc une large victoire du Président sortant, surtout si l’on prend aussi en fonction du nombre des votants : 53,5% des votants, soit plus de la majorité absolue des électeurs qui se sont déplacés. Sa légitimité populaire ne peut pas être mise en doute, pas plus qu’en 2017, même par ceux de ses opposants qui considèrent qu’une élection est légitime seulement si elle les fait élire (ce qui donne une définition très étrange de la démocratie).

Je m’en réjouis naturellement, soulagé et heureux que les Français aient choisi la poursuite de la modernité et de l’ouverture contre le repli sur soi et la haine, mais cela reste tout de même un résultat alarmant face à l’extrême droite.

Au second tour d’une présidentielle, le parti d’extrême droite est passé de 5,5 millions d’électeurs en 2002 à 10,6 millions en 2017 et 13,3 millions en 2022. Le plafond de verre a très largement explosé, depuis longtemps d’ailleurs, le seuil de 40% des exprimés a été franchi par Marine Le Pen. Celle-ci, comme prévu et comme l’ont fait avant elle de nombreuses personnalités politiques, celle qui avait affirmé qu’elle renoncerait à la vie politique en cas d’échec en 2022 a changé de position et a annoncé la poursuite de son engagement politique. Il est vrai que la perspective de 2027 est plutôt dégagée pour elle, car Emmanuel Macron ne pourra plus se représenter et son supposé héritier politique aura forcément moins de génie politique et surtout moins d’expérience de campagne présidentielle que lui, et il reste peu de survivants parmi les partis gouvernementaux d’avant Macron, LR et le PS. Mais c’est trop tôt pour y songer quand on sait tous les bouleversements et les crises qu’il y a eus entre 2017 et 2022.

Emmanuel Macron a perdu un peu moins de 2 millions d’électeurs, ce qui, après l’usure de cinq ans de mandat, est finalement assez faible. En nombre de voix, il est en cinquième position dans l’histoire des présidentielles, derrière Jacques Chirac avec 25,5 millions de voix en 2002, lui-même avec 20,7 millions en 2017, Nicolas Sarkozy avec 19,0 millions de voix en 2007 et François Hollande avec 18,0 millions en 2012, ce qui est un score quasiment identique.

Lors de sa venue à France Inter dans la matinale du vendredi 22 avril 2022, Emmanuel Macron comptait sur 58,5% des voix, ce qui donne une approche assez pertinente de son analyse électorale. Valéry Giscard d’Estaing aussi avait approché assez bien son résultat de 1974 en comptant sur 51% des voix.

Si l’on regarde par rapport aux électeurs inscrits, avec 38,5% des inscrits, Emmanuel Macron a une légitimité équivalente à celle de François Hollande qui avait obtenu 39,1% des inscrits. Le procès en illégitimité ne devrait jamais avoir lieu, sinon par des mauvais joueurs de réflexe typiquement trumpiste qui refusent le principe de la démocratie. C’est d’ailleurs, là aussi, une grande émotion d’avoir eu la possibilité de choisir en toute liberté, sans pression, par vote secret et sincère, le Président de la République de son pays, quand on regarde un certain nombre de pays à l’étranger dont les peuples n’ont pas cette chance.

Emmanuel Macron revient de loin. Il y a exactement un an, en avril 2021, en plein dans la troisième vague pandémique, qui aurait misé qu’il allait être réélu avec presque trois électeurs sur cinq ? C’est sa capacité à gérer les crises, à s’adapter aux fluctuations géantes de notre monde actuel qui lui a apporté le soutien nécessaire. C’était le candidat de la raison, face aux pulsions, face aux passions, face aux émotions parfois les plus négatives du peuple français.

Cette victoire historique n’empêchera pas une analyse détaillée du scrutin, une France éclatée en deux, celle des personnes âgées et celle des actifs inquiets, celle des urbains et celle des ruraux, celle des diplômés et celle des sans diplôme, etc. Emmanuel Macron l’a bien compris quand il est venu au Champ-de-Mars à Paris, derrière la Tour Eiffel mais aussi en face du Trocadéro, ce dimanche soir. Sa phrase la plus importante est sans nul doute : « Nul ne sera laissé au bord du chemin. ». Cela ressemble à un vœu pieux et le challenge du nouveau quinquennat, c’est que cela devienne réalité (il n’est pas le premier à avoir émis un tel vœu).

_yartiMacron2022AM03

Malgré le large écart entre les deux candidats du second tour, il ne faut pas se bercer d’illusions : ce second tour a été un choc de deux haines, une détestation quasi-idéologique contre le candidat du réel, et un refus de l’extrême droite au pouvoir. À l’étranger, personne ne comprend vraiment cette détestation contre la personnalité d’Emmanuel Macron. Elle est forte et aurait pu l’emporter sur le rejet de l’extrême droite dès lors qu’il n’y a plus de front républicain.

Je crois qu’on peut considérer qu’il y a un front républicain quand il y a plus de participation au second tour qu’au premier tour lorsque le candidat de l’extrême droite est présent au second tour. C’était le cas en 2002 (20,3% d’abstention au second tour, bien moins que les 28,4% du premier tour), mais pas en 2017 (25,4% au second tour, plus que les 22,2% du premier tour), ni en 2022 (28,0% au second tour, plus que les 26,3% du premier tour).

Dans mon bureau de vote, qui a voté à 75,5% pour Emmanuel Macron, j’ai pu voir qu’il y avait des électeurs qui n’étaient pas venus voter au premier tour voter au second tour, mais aussi l’inverse, qui ont voté au premier tour et ne sont pas venus voter au second tour. Cela dit, il faut se méfier des interprétations trop rapides car les vacances scolaires (dans cette commune) ont commencé à Pâques et le premier tour n’était pas en période de vacance au contraire du second tour situé au milieu des vacances (même s’il reste la possibilité des procurations).

_yartiMacron2022AM02

On va évidemment scruter les premiers gestes du Président réélu. Sa présence au Champ-de-Mars a été accompagnée (de sa femme et d’enfants) au lieu d’être seule au Louvre qui symbolisait terriblement l’exercice solitaire du pouvoir, pour reprendre une expression giscardienne. En 2017, il avait aussi voulu fêter sa victoire au pied de la Tour Eiffel, mais la maire de Paris, Anne Hidalgo, le lui avait refusé pour d’obscures raisons techniques. Son repos ensuite à la Lanterne à Versailles doit moins porter sur la symbolique que ce besoin de souffler après une campagne épuisante et avant un nouveau mandat qui se révélera sans doute aussi sportif.

Il s’agit de ne pas aller trop vite et de bien choisir les mesures du nouveau quinquennat. Il y a deux enjeux : commencer un nouveau mandat présidentiel mais terminer une législature. Car tous les esprits sont désormais à la préparation des élections législatives des 12 et 19 juin 2022.

Pour Emmanuel Macron, la nomination d’un nouveau gouvernement est donc le premier enjeu de cette nouvelle ère : il devra être celui qui mènera la majorité présidentielle aux législatives tout en étant suffisamment consensuel pour représenter l’ensemble de son électorat du second tour. Une attention que n’avait pas eue Jacques Chirac en 2002 et qui a été une erreur que la France paie peut-être encore aujourd’hui par cette colère quasiment permanente ressentie par une partie des Français depuis 2002. Là est le travail présidentiel à venir : « Je sais que pour nombre de nos compatriotes qui ont choisi l’extrême droite, la colère et les désaccords qui les ont conduits à voter pour ce projet doivent aussi trouver une réponse. C’est ma responsabilité et celle de ceux qui m’entourent. ».

Bravo l’artiste !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (24 avril 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Élysée 2022 (47) : la victoire historique d’Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron réélu Président de la République le 24 avril 2022.
Discours du Président Macron le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris (vidéo).
Interview d’Emmanuel Macron le 22 avril 2022 sur France Inter.
Résultats du second tour de l’élection présidentielle du 24 avril 2022 (Ministère de l’Intérieur).
Rien n’est joué !
Duel Emmanuel Macron vs Marine Le Pen du second tour du 20 avril 2022.
Emmanuel Macron, le candidat de la puissance française et européenne.
Avec Marine Le Pen, l’État de droit en peine.
La révolution verte du candidat Emmanuel Macron.
Discours d’Emmanuel Macron au Pharo à Marseille le 16 avril 2022 (vidéo et texte intégral).
Discours d’Emmanuel Macron à la Porte de Versailles de Paris La Défense le soir du 10 avril 2022 (vidéo et texte intégral).
Discours d’Emmanuel Macron à Arena de Paris La Défense le 2 avril 2022 (vidéo et texte intégral).
Marine Le Pen : ne nous trompons pas de colère !
Tout sauf Macron : pourquoi tant de haine ?
Élysée 2022 (45) : le naufrage du parti Les Républicains.
Élysée 2022 (44) : la consécration du mélenchonisme électoral.
Élysée 2022 (43) : le sursaut républicain !
Résultats du premier tour de l’élection présidentielle du 10 avril 2022 (Ministère de l’Intérieur).
Gestion de la crise du covid : la France au tableau d’honneur !
Emmanuel Macron et son rapport à l’imprévisible.
13 raisons de voter pour Emmanuel Macron : pouvoir d’achat, santé, école, écologie…
Projet du candidat Emmanuel Macron pour 2022 (à télécharger).
Élysée 2022 (42) : Emmanuel Macron en danger !
Élysée 2022 (41) : Emmanuel Macron descend dans l’arène.
Élysée 2022 (37) : Emmanuel Macron n’est pas (encore) réélu !
Élysée 2022 (36) : pour qui votera Nicolas Sarkozy au premier tour ?
Élysée 2022 (35) : le projet présidentiel du candidat Emmanuel Macron.
Élysée 2022 (33) : Emmanuel Macron à 30% ?
Élysée 2022 (32) : Emmanuel Macron candidat !
Élysée 2022 (29) : Emmanuel Macron sera-t-il candidat un jour ?
Enfin, une vision européenne !

_yartiMacron2022AM04





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220424-presidentielle-second-tour.html

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24 avril 2022 7 24 /04 /avril /2022 21:46

Les résultats du second tour de l'élection présidentielle du 24 avril 2022 en France sont les suivants, validés par le Conseil Constitutionnel le mardi 26 avril 2022 :

Résultats au 2d tour
Liste des candidats Voix % Inscrits % Exprimés
M. Emmanuel MACRON 18 768 639 38,50 58,55
Mme Marine LE PEN 13 288 686 27,26 41,45


 

  Nombre % Inscrits % Votants
Inscrits 48 752 339    
Abstentions 13 655 861 28,01  
Votants 35 096 478 71,99  
Blancs 2 233 904 4,58 6,37
Nuls 805 249 1,65 2,29
Exprimés 32 057 325 65,76 91,34


En raison des arrondis à la deuxième décimale, la somme des pourcentages peut ne pas être égale à 100%.








Résultats avant la validation du Conseil Constitutionnel :

10 et 24 avril 2022

 
France Entière
Résultats au 2d tour
Liste des candidats Voix % Inscrits % Exprimés
M. Emmanuel MACRON 18 779 641 38,52 58,54
Mme Marine LE PEN 13 297 760 27,28 41,46
 
  Nombre % Inscrits % Votants
Inscrits 48 752 500    
Abstentions 13 656 109 28,01  
Votants 35 096 391 71,99  
Blancs 2 228 044 4,57 6,35
Nuls 790 946 1,62 2,25
Exprimés 32 077 401 65,80 91,40

En raison des arrondis à la deuxième décimale, la somme des pourcentages peut ne pas être égale à 100%.
France Entière
 
Rappel des Résultats au 1er tour
Liste des candidats Voix % Inscrits % Exprimés
M. Emmanuel MACRON 9 783 058 20,07 27,85
Mme Marine LE PEN 8 133 828 16,69 23,15
M. Jean-Luc MÉLENCHON 7 712 520 15,82 21,95
M. Éric ZEMMOUR 2 485 226 5,10 7,07
Mme Valérie PÉCRESSE 1 679 001 3,44 4,78
M. Yannick JADOT 1 627 853 3,34 4,63
M. Jean LASSALLE 1 101 387 2,26 3,13
M. Fabien ROUSSEL 802 422 1,65 2,28
M. Nicolas DUPONT-AIGNAN 725 176 1,49 2,06
Mme Anne HIDALGO 616 478 1,26 1,75
M. Philippe POUTOU 268 904 0,55 0,77
Mme Nathalie ARTHAUD 197 094 0,40 0,56
 
  Nombre % Inscrits % Votants
Inscrits 48 747 876    
Abstentions 12 824 169 26,31  
Votants 35 923 707 73,69  
Blancs 543 609 1,12 1,51
Nuls 247 151 0,51 0,69
Exprimés 35 132 947 72,07 97,80

En raison des arrondis à la deuxième décimale, la somme des pourcentages peut ne pas être égale à 100%.



 
Résultats incomplets calculés sur la base de 94% des électeurs inscrits
Résultats au 2d tour
Liste des candidats Voix % Inscrits % Exprimés
M. Emmanuel MACRON 16 977 656 37,64 56,97
Mme Marine LE PEN 12 824 397 28,43 43,03
 
  Nombre % Inscrits % Votants
Inscrits 45 103 778    
Abstentions 12 445 536 27,59  
Votants 32 658 242 72,41  
Blancs 2 100 949 4,66 6,43
Nuls 755 240 1,67 2,31
Exprimés 29 802 053 66,07 91,25

En raison des arrondis à la deuxième décimale, la somme des pourcentages peut ne pas être égale à 100%.
France Entière
 
Rappel des Résultats au 1er tour
Liste des candidats Voix % Inscrits % Exprimés
M. Emmanuel MACRON 9 783 058 20,07 27,85
Mme Marine LE PEN 8 133 828 16,69 23,15
M. Jean-Luc MÉLENCHON 7 712 520 15,82 21,95
M. Éric ZEMMOUR 2 485 226 5,10 7,07
Mme Valérie PÉCRESSE 1 679 001 3,44 4,78
M. Yannick JADOT 1 627 853 3,34 4,63
M. Jean LASSALLE 1 101 387 2,26 3,13
M. Fabien ROUSSEL 802 422 1,65 2,28
M. Nicolas DUPONT-AIGNAN 725 176 1,49 2,06
Mme Anne HIDALGO 616 478 1,26 1,75
M. Philippe POUTOU 268 904 0,55 0,77
Mme Nathalie ARTHAUD 197 094 0,40 0,56
 
  Nombre % Inscrits % Votants
Inscrits 48 747 876    
Abstentions 12 824 169 26,31  
Votants 35 923 707 73,69  
Blancs 543 609 1,12 1,51
Nuls 247 151 0,51 0,69
Exprimés 35 132 947 72,07 97,80

En raison des arrondis à la deuxième décimale, la somme des pourcentages peut ne pas être égale à 100%.


Source : Ministère de l'Intérieur


Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220424-presidentielle-second-tour.html

RAPPEL : Résultats du premier tour du 10 avril 2022 :

https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220410-presidentielle-premier-tour.html

https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20220410-resultat-presidentielle.html


SR
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20220424-resultat-presidentielle.html
 

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24 avril 2022 7 24 /04 /avril /2022 21:00

(verbatim et vidéo)


Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220424-macron.html












Discours du Président Emmanuel Macron le 24 avril 2022 à Paris


Merci !

Merci chers amis, chers compatriotes ici à Paris et partout à travers le territoire, en hexagone, dans nos Outre-Mer et à l’étranger, oui, avant toute chose, merci.

Après cinq années de transformations, d’heures heureuses et difficiles, de crises exceptionnelles aussi, ce jour du 24 avril 2022, une majorité d’entre nous a fait le choix de me faire confiance pour présider notre République durant les 5 années à venir.

Je veux remercier l’ensemble des militants, des volontaires, des compagnons de route et élus qui depuis le début m’accompagnent et ont rendu cette élection possible.

Je sais que vous n’avez pas ménagé vos efforts, avez donné tant d’énergie, partagé tant de convictions. C’est en frappant au cœur que vient la vérité. Merci.

Je sais ce que je vous dois. Merci !

Je veux remercier l’ensemble des Françaises et des Français qui au premier puis au deuxième tour m’ont accordé leur confiance afin de faire advenir notre projet pour une France plus indépendante, une Europe plus forte, et par des investissements et des changements profonds, continuer d’assurer des progrès concrets pour chacun en libérant la créativité, l’innovation dans notre pays, et pour faire de la France une grande Nation écologique.

Je sais aussi que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi non pour soutenir les idées que je porte mais pour faire barrage à celles de l’extrême droite.

Je veux ici les remercier et leur dire que j’ai conscience que ce vote m’oblige pour les années à venir.

Je suis dépositaire de leur sens du devoir, de leur attachement à la République et du respect des différences qui se sont exprimées ces dernières semaines.

Je pense aussi à tous nos compatriotes qui se sont abstenus. Leur silence a signifié un refus de choisir auquel nous nous devrons aussi de répondre.

Je pense enfin à ceux qui ont voté pour Madame le Pen dont je sais la déception ce soir.

(Sifflets du public)

EMMANUEL MACRON

Non, ne sifflez personne. Depuis le début je vous ai demandé de ne jamais siffler.

Parce que, dès à présent, je ne suis plus le candidat d’un camp, mais le Président de toutes et tous.

Je sais aussi que pour nombre de nos compatriotes, qui ont choisi aujourd’hui l’extrême droite, la colère et les désaccords qui les ont conduits à voter pour ce projet, doivent trouver une réponse.

Ce sera ma responsabilité et celle de ceux qui m’entourent.

Car le vote de ce jour nous impose de considérer toutes les difficultés des vies vécues et de répondre avec efficacité aux colères qui se sont exprimées.

Mes chers compatriotes, mes chers amis.

Aujourd’hui vous avez fait le choix d’un projet humaniste, ambitieux pour l’indépendance de notre pays, pour notre Europe, un projet républicain dans ses valeurs, un projet social et écologique, un projet fondé sur le travail et la création, un projet de libération de nos forces académiques, culturelles, entrepreneuriales.

Ce projet, je veux le porter avec force dans les années qui viennent, en étant dépositaire aussi des divisions qui se sont exprimées, et des différences, et en veillant chaque jour au respect de chacun, et en continuant d’œuvrer à une société plus juste et à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pour cela, il nous faudra être exigeants et ambitieux.

Nous avons tant à faire et la guerre en Ukraine est là pour nous rappeler que nous traversons des temps tragiques où la France se doit de porter sa voix, de montrer la clarté de ses choix, et de bâtir sa force dans tous les domaines, et nous le ferons.

Il nous faudra aussi, mes amis, être bienveillants et respectueux, car notre pays est pétri de tant de doutes, de tant de divisions.

Alors il nous faudra être fort. Mais nul ne sera laissé au bord du chemin.

Il nous reviendra ensemble d’œuvrer à cette unité par laquelle seule nous pourrons vivre plus heureux en France et relever les défis qui nous attendent, les années à venir à coup sûr, ne serons pas tranquilles. Mais elles seront historiques ! Et, ensemble, nous aurons à les écrire pour nos générations.

Mes chers compatriotes, c’est avec ambition et bienveillance pour notre pays, pour nous tous, que je veux pouvoir à vos côtés aborder les cinq années qui viennent.

Cette ère nouvelle ne sera pas la continuité du quinquennat qui s’achève.

Mais l’invention collective d’une méthode refondée pour cinq années de mieux, au service de notre pays, de notre jeunesse.

Chacun d’entre nous y aura une responsabilité.

Chacun d’entre nous aura à s’y engager.

Car chacun d’entre nous compte plus que lui-même.

C’est ce qui fait du peuple français cette force singulière que j’aime si profondément, si intensément, et que je suis si fier de servir à nouveau.

Vive la République ! Et vive la France !

Emmanuel Macron, le dimanche 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris.

Source : AvecVous.

https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20220424-discours-macron.html


 

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22 avril 2022 5 22 /04 /avril /2022 09:02

Emmanuel Macron a été l'ultime invité de la campagne présidentielle à la matinale de France Inter pendant une heure dix. Interrogé par Léa Salamé et Nicolas Demorand, il l'est également par les auditeurs et a pu prendre le temps d'expliquer son projet. On peut écouter sur Internet cet entretien.

Cliquer sur le lien pour télécharger l'interview (fichier .mp3) :
https://rf.proxycast.org/d4e94853-ae84-4387-aacb-0d3d0766bacd/22994-22.04.2022-ITEMA_23003395-2022F46888S0112-22.mp3

Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220424-macron.html

SR
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20220422-interview-macron.html






 

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