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12 janvier 2024 5 12 /01 /janvier /2024 04:19

« J'ai envie de répondre aux attentes de nos concitoyens avec humilité, je me sens armé pour le faire. (…) Ce que je veux, c'est de l'action et des résultats. (…) Ma méthode, c'est de dire la vérité, d'être lucide sur le constat. » (Gabriel Attal, le 11 janvier 2024, au journal de 20 heures sur TF1).





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Le nouveau Premier Ministre Gabriel Attal n'est pas resté inactif depuis sa nomination le 9 janvier 2024 vers 12 heures. Dès 14 heures 30, arrivant à pied, passation des pouvoirs à Matignon ; en fin d'après-midi, visite avec Christophe Béchu aux sinistrés des inondations dans le Pas-de-Calais (en brûlant de nombreux feux rouges et en franchissant de nombreuses lignes blanches ; il me semble qu'à son arrivée à Matignon, Élisabeth Borne respectait les feux rouges) ; dîner à l'Élysée ; lendemain, visite avec Gérald Darmanin dans un commissariat de police en région parisienne ; déjeuner et dîner à l'Élysée ; le surlendemain, redéjeuner à l'Élysée, etc. et enfin, l'annonce de la composition du nouveau gouvernement (non, ce n'est pas un remaniement !), juste avant le journal télévisé de 20 heures sur TF1, tradition politique ancestrale d'un nouveau Premier Ministre d'aller à son oral de démarrage devant les Français.

Les petits discours de passation sont toujours instructifs. Ils sont à peine préparés, à peine griffonnés, et pourtant, ils donnent un aperçu de l'avenir... et aussi du passé pour la personne qui s'en va. Élisabeth Borne a fait sans doute l'un de ses meilleurs discours, venant du cœur, et se montre une grande politique, ultracompétente techniquement. Elle a donné la recette de sa méthode : « J'ai mis toute mon énergie à les servir. J'ai travaillé sans relâche, sans chercher les coups d'éclat. Et partir du réel vécu par nos concitoyens, partir de leur quotidien et chercher à apporter des résultats rapides et tangibles, c'est ma méthode d'action et je l'assume ! ». Elle a aussi annoncé qu'elle ne quitterait pas la vie politique (elle exercera son mandat de député), elle a déjà refusé la proposition de rester au gouvernement aux Armées (à quoi cela rimerait, à part pour avoir un poste ?), on reparlera certainement d'elle dans quelques années, et probablement pas en mal.

Gabriel Attal a plutôt étonné par sa raideur et son stress : « Cela a été dit, ces dernières heures, j'ai pu le lire ou l'entendre : "le plus jeune Président de la République de l'histoire nomme le plus jeune Premier Ministre de l'histoire". Je ne veux y voir qu'un seul symbole : celui de l'audace et du mouvement. Le symbole aussi, et peut-être surtout de la confiance, celle accordée à la jeunesse, cette génération qui mérite que l'on se batte pour elle sans relâche. (…) Avec le Président de la République, j'aurai donc un objectif : garder le contrôle de notre destin et libérer notre potentiel français. ». Presque endimanché dans son manteau noir, il n'a fait que lire ses papiers, qu'il tenait de deux mains un peu fébriles, il avait l'air submergé par la grandeur de sa nouvelle fonction. Son sourire efface la perception du malaise. Il est dans l'action, pas le temps de psychoter !


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La nouvelle étape, c'est bien sûr la composition du nouveau gouvernement avec les habituelles marronniers : cela se fera vite, mais ça dure dans la rapidité car finalement, ce n'est pas évident de boucler une équipe au complet. Même topo pour le gouvernement resserré ! Comme à chaque nomination de nouveau gouvernement, on parle d'une équipe resserrée qui, finalement, n'est jamais si resserrée que cela, quitte à rajouter des ministres délégués et des secrétaires d'État en cas de réduction du nombre de ministres plein, ce qui est le cas ici.

Le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier a évoqué, dans son blog le 10 janvier 2024, cette tarte à la crème du resserrage d'équipe : « Souvent présenté comme un gage d’efficacité, un tel nombre traduit au contraire un renfort d’autorité… et il n’est jamais respecté. Il renforce l’autorité car moins l’on est nombreux, plus la décision du chef s’impose facilement : il est plus facile de diriger une équipe d’une dizaine de personnes que d’une vingtaine ou d’une quarantaine. Il renforce encore l’autorité car les directions administratives réparties en une vingtaine de ministères sont alors concentrées dans une dizaine. ».


Dans son discours d'arrivée à Matignon, Gabriel Attal a dit aussi : « J'emmène avec moi, à Matignon, la cause de l'école ! ». Et en fait, non, il n'a pas emmené l'Éducation nationale avec lui, il l'a laissée à Amélie Oudéa-Castéra, devenue Ministre de l'Éducation nationale, de la Jeunesse, des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques. Un très gros ministère qui pourrait ravir le médecin et animateur de télévision Michel Cymès qui souhaite redonner l'habitude du sport chez les plus jeunes, qui sont beaucoup trop collés devant un écran et qui ne bougent plus.

Il faut se souvenir d'un discours de Michel Rocard avant d'avoir été nommé à Matignon : il proposait, lui qui considérait que l'école était un élément majeur de la cohésion sociale, que le Premier Ministre s'occupât aussi de l'Éducation nationale. Quand il est devenu Premier Ministre, il n'a pas eu les mains libres pour la composition, et devait intégrer dans son équipe Lionel Jospin, le premier secrétaire du PS, un peu l'œil de Moscou, euh, de Mitterrand dans son gouvernement, qui a eu le Ministère de l'Éducation nationale et était classé en numéro deux du gouvernement, donc, un peu dans la philosophie rocardienne de l'éducation. La réalité, c'est qu'on ne peut pas être un Premier Ministre à temps plein (avec l'ambition de faire un déplacement par jour !) et assurer les fonctions de Ministre de l'Éducation nationale en même temps.

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Revenons à la composition du nouveau gouvernement. Bien entendu, la surprise du jour, c'est la nomination de Rachida Dati comme Ministre de la Culture à la place de Rima Abdul-Malak. C'est une recrue de choix dans le phagocytage consciencieux de LR par la Macronie depuis 2017. Très logiquement, dès l'annonce de cette nomination, elle a été exclue de LR, ce qui, à mon avis, va au-delà des simples statuts mais ce qui paraît néanmoins normal politiquement. Ministre de la Justice de 2007 à 2009, députée européenne de 2009 à 2019, maire du 7
e arrondissement de Paris depuis 2008, elle est surtout la chef de l'opposition à Anne Hidalgo au conseil de Paris (ses joutes sont très suivies sur Internet), et cette dernière doit avoir quelques frissons de savoir qu'elle devra travailler avec son opposante devenue une ministre fonctionnellement très parisienne. Anne Hidalgo a assez mal réagi dans la soirée : « Je souhaite bon courage aux acteurs du monde de la culture compte tenu des épreuves qu'ils vont traverser. » (elle aurait dû écrire : "compte tenu des épreuves que je vais traverser" !).

Cela fait des années que Rachida Dati critiquait la direction de LR et demandait un véritable contrat de gouvernement entre la majorité présidentielle et LR afin de construire une majorité absolue à l'Assemblée Nationale. Jusqu'à maintenant, Emmanuel Macron et Gabriel Attal n'ont pu faire que du débauchage individuel, mais, finalement, le nouveau gouvernement est composé de sept ministres sur quatorze qui proviennent de LR !

Peu de surprise pour les autres ministres. Les grands ministres sont conservés : Bruno Le Maire à l'Économie et aux Finances, Gérald Darmanin à l'Intérieur et aux Outre-mer, Éric Dupond-Moretti à la Justice et Sébastien Lecornu aux Armées.

Stéphane Séjourné, patron de Renaissance, député européen et ancien compagnon de Gabriel Attal (dont l'homosexualité a été ouvertement déclarée), va remplacer Catherine Colonna au Quai d'Orsay (Europe et Affaires étrangères). À un moment, il a été question d'Amélie de Montchalin pour ce ministère.

Autre prise de guerre, Catherine Vautrin, présidente du Grand Reims, qui était première-ministrable en 2022, est revenue par la porte ministérielle à la tête d'un grand Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités. Elle sera secondée, lors de la nomination du reste du gouvernement, par Agnès Pannier-Runacher. Catherine Vautrin remplace donc à la fois Olivier Dussopt, dont l'incertitude sur le jugement qui sera prononcé le 17 janvier 2024 incitait Gabriel Attal à ne pas le reconduire, Agnès Firmin-Le Bodo, soupçonnée par la justice d'avoir reçu, comme pharmacienne, des cadeaux illicites de la part d'un laboratoire pharmaceutique (entendue le jour même par la justice), et Aurore Bergé appelée à une autre fonction ministérielle.

Marc Fesneau, à l'Agriculture, et Christophe Béchu, à la Transition écologique, ont aussi sauvé leur ministère, mais de manière assez humiliante puisqu'ils sont les uniques représentants de leur parti respectif, le MoDem et Horizons (alors que deux nouveaux ministres LR ont été nommés ; en fait, Catherine Vautrin est aussi considérée comme une ministre Horizons).


Enfin, parmi les onze "ministres pleins", l'ancienne présidente de l'Université Paris-Saclay Sylvie Retailleau est, elle aussi, une rescapée du changement de gouvernement en restant Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle avait pourtant émis ses réticences sur la loi Immigration, notamment sur la caution que les étudiants étrangers devraient apporter en début d'année et la fin des aides au logement.

Parmi les trois ministres déléguées auprès du Premier Ministre nommées le 11 janvier 2024, la députée Marie Lebec prend la succession de Franck Riester aux Relations avec le Parlement, Prisca Thevenot celle d'Olivier Véran comme porte-parole du gouvernement (ainsi que chargée du "Renouveau démocratique") et Aurore Bergé est rétrogradée, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les Discriminations.

Sur ces quatorze nominations, il y a quatre entrants : Catherine Vautrin (ancienne secrétaire d'État entre 2004 et 2007), Rachida Dati (ancienne ministre entre 2007 et 2009), Stéphane Séjourné et Marie Lebec. Pour les sortants, il est difficile d'être très fixé car certains ministres qui n'ont pas été reconduits à ce jour pourraient être repêchés parmi les ministres délégués et secrétaires d'État qui seront nommés la semaine prochaine, ce sera le cas d'Agnès Pannier-Runacher.


Pour l'instant, hors de cette hypothèse de repêchage, sont sortants : Catherine Colonna, Olivier Dussopt, Rima Abdul-Malak, Agnès Firmin-Le Bodo, Stanislas Guérini (où est-il passé ? probablement sera-t-il nommé la semaine prochaine), Olivier Véran, Franck Riester et Bérangère Couillard. Le sort de Clément Beaune et de Patrice Vergriete (ministres délégués respectivement des Transports et du Logement dans le précédent gouvernement) sera à observer car ils se sont opposés à la loi Immigration, leur éviction est donc probable.

Concernant la parité, si effectivement il y a sept hommes et sept femmes parmi les quatorze nominations, les femmes y perdent quand même beaucoup en influence car il n'y a que quatre ministres pleins femmes, les autres sont déléguées, et par rapport au précédent gouvernement, "les femmes" ont "perdu" Matignon et les Affaires étrangères. Rappelons qu'au début du nouveau quinquennat, en juin 2022, il y avait trois femmes aux postes les plus importants de la majorité : Élisabeth Borne Première Ministre, Yaël Braun-Pivet Présidente de l'Assemblée Nationale et Aurore Bergé présidente du groupe Renaissance. Désormais, il ne reste plus que Yaël Braun-Pivet comme femme parmi ces trois postes stratégiques.

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On évoque une sarkozysation du gouvernement ; est-ce exact ? L'idée est de marquer politiquement et tous les ministres nommés ce 11 janvier 2024 sont des politiques. Il n'y en a plus qui sont des touristes perdus de la société dite civile. Le besoin d'une communication forte sur les réalisations du gouvernement est important. Élisabeth Borne était dans le savoir-faire, Gabriel Attal dans le faire-savoir. Le dircab de Gabriel Attal était l'ancien directeur de cabinet de Bruno Le Maire à Bercy, cela donne une idée aussi de l'encadrement du nouveau jeune Premier Ministre.


Quant aux contours de la majorité, pour l'instant, rien ne change mais l'idée générale serait de convaincre un certain nombre de députés LR de rejoindre la majorité présidentielle afin d'obtenir une majorité absolue. Même si Éric Ciotti a réagi très rapidement par la négative, les rangs LR sont divisés et Franck Louvrier, maire LR de La Baule et ancien conseiller en communication de Nicolas Sarkozy à l'Élysée, a d'ores et déjà déclaré son intérêt pour cette nouvelle architecture : selon lui, LR ne peut pas refuser les responsabilités et s'enfermer dans une opposition systématique qui la détruirait progressivement, en laissant au seul RN la volonté d'agir (il est même favorable à une liste commune Renaissance/LR aux élections européennes de juin 2024).

Rendez-vous donc la semaine prochaine, avec le complément du gouvernement, une allocution d'Emmanuel Macron et un discours de politique générale de Gabriel Attal. En raison de la majorité relative, Gabriel Attal ne devrait pas demander la confiance des députés mais les députés FI ont déjà annoncé qu'ils déposeraient une motion de censure, ce qui ferait que le gouvernement serait donc adoubé par l'Assemblée Nationale, en absence de majorité pour le renverser. Par leur opposition forcenée, les députés FI ne se rendent pas compte qu'ils aident le gouvernement à conquérir sa légitimité démocratique ! À suivre...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (11 janvier 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
Élisabeth Borne remerciée !
Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240111-gouvernement-attal.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-gouvernement-de-gabriel-attal-252500

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2024/01/10/40170518.html





 

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