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16 septembre 2021 4 16 /09 /septembre /2021 03:54

« L’exercice intellectuel auquel elle se livrait était bien éloigné de la réalité d’une existence où l’on attend toujours la prochaine paie et où une facture de vétérinaire ou une hausse imprévue du loyer peut déclencher un effet domino et menacer de détruire la vie qu’on s’est bâtie. » (Greer Hendricks et Sarah Pekkanen, "Anonymat garanti", 2018).



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En annonçant formellement sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 le dimanche 12 septembre 2021 à Rouen, la maire socialiste de Paris Anne Hidalgo n’a fait que confirmer ce qu’elle disait tout bas depuis plusieurs mois. À 62 ans (l’âge de Jacques Chirac quand il a été élu Président de la République au bout de la troisième tentative), Anne Hidalgo se découvre donc une vocation de candidate.

Le fait qu’elle soit une femme ou qu’elle soit d’origine espagnole ne me paraît pas de nature à modifier l’opinion qu’auront d’elle ses éventuels futurs électeurs. Ce ne sont ni des avantages (une femme à l’Élysée, une représentante d’une intégration réussie), ni des inconvénients (la misogynie diminue au fil du temps, la diversité devient plus indifférente). On vote pour une personne donnée, pas pour un sexe ni une origine, plutôt pour ce qu’elle représente et ce qu’elle propose.

On se demandait si le PS existerait encore en 2022, après être descendu bien bas en 2017. Alors que les candidats à la candidature socialiste étaient nombreux dans les précédents scrutins, le scrutin de 2022 est un désert socialiste. Il est loin le temps où François Mitterrand, Michel Rocard, Pierre Mauroy, Jean-Pierre Chevènement et Laurent Fabius s’affrontaient pour un vrai enjeu, un parti en ordre de marche, un parti voué à être un parti de gouvernement, avec ses élus, ses experts, son programme, et même son trésor de guerre.

En 2021, c’est morne plaine. Que fait Stéphane Le Foll ? Que fait Bernard Cazeneuve ? Que fait Olivier Faure ? Que fait Manuel Valls ? Que fait Martine Aubry ? Que fait Ségolène Royal ? Que fait François Hollande ? Tous ont renoncé. Tous ont capitulé avant de combattre. Tous ceux-là ont le sens du ridicule. Il en fallait donc bien un, une, c’est encore mieux, pour maintenir une présence du PS à l’élection présidentielle, dans ce cadre d’acharnement thérapeutique.

Il faut dire que l’épisode de 2017 en a refroidi plus d’un. Choisir à la primaire de janvier 2017 le plus mauvais des candidats possibles, Benoît Hamon, qui, malgré le désistement avant le premier tour du candidat écologiste Yannick Jadot, a laborieusement récolté 6% des voix. Rappelons qu’au moment où il a été choisi à la primaire, les sondages lui attribuaient 18% d’intentions de vote contre 9% à Jean-Luc Mélenchon. Un mauvais candidat, c’est celui qui dilapide de 18% à 6% son capital électoral. Un mauvais candidat, c’est aussi celui qui, choisi par son parti pour concourir, le quitte quelques jours après l’avoir conduit dans l’impasse.

Anne Hidalgo sera-t-elle une mauvaise candidate ? Pourra-t-elle faire pire que Benoît Hamon ? En tout cas, après toutes les défections du PS, elle avait un boulevard pour imposer sa candidature aux socialistes qui sont bien contents qu’elle existe, faute de mieux. Pour l’instant, sa déclaration de candidature ne change aucune donne dans les sondages, elle reste autour de 7% d’intentions de vote.

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Lors des précédentes primaires socialistes, Anne Hidalgo a toujours misé sur les mauvais "chevaux" : en 2006 pour Dominique Strauss-Kahn, en 2011 pour Martine Aubry, en 2017 pour Vincent Peillon. Finalement, à la dernière élection présidentielle, elle a soutenu loyalement au premier tour le candidat socialiste Benoît Hamon dont elle ne soutenait pas le programme, et au second tour, le candidat indépendant Emmanuel Macron.

On oubliera les très nombreuses contradictions de cette dame qui a toujours raté de se faire élire députée et qui n’a d’expérience que de gérer d’une main de fer la mairie de Paris à faire fuir tout le peuple dans les banlieues. Contradiction d’avoir assuré ses électeurs de 2020 qu’elle resterait maire de Paris et qu’elle ne se présenterait pas à l’élection présidentielle (heureusement, ces mêmes électeurs ont toujours la mémoire courte). Contradiction de vouloir représenter la France alors qu’elle représente très mal Paris, et qu’elle ne connaît pas beaucoup le reste de la France. Pas étonnant de vouloir s’entourer d’élus territoriaux, mais dont la notoriété nationale est si faible qu’ils ne vont pas beaucoup l’aider dans cette aventure hasardeuse.

Gérer Paris depuis sept ans n’est certes pas une mince affaire. La plus puissante collectivité territoriale. Budget (12 milliards d’euros), employés (55 000 agents), population (2,2 millions d’habitants)… et endettement (7,2 milliards d’euros !). On n’en fera pas d’analyse ici car l’élection présidentielle n’est pas une élection municipale et de toute façon, on n’est jamais élu sur son bilan mais sur son projet d’avenir. On peut néanmoins observer que la dette a augmenté de 71% depuis 2014, depuis qu’Anne Hidalgo est maire (l’endettement doit être comparé à la recette fiscale qui est de 6,5 milliards d’euros en 2021 !). Une propension à dépenser sans compter (beaucoup de travaux peu urgents et pas nécessaires) qui pourrait faire froid dans le dos si elle arrivait à la tête de l’État (on le verra avec ses propositions).

La seule chose que je retiendrai de sa gestion de la ville de Paris, c’est la circulation à Paris, inspiré par un écologisme mal compris. En voulant à tout prix décourager l’utilisation de l’automobile à Paris, elle a renforcé la pollution et les bouchons. On ne s’improvise pas expert en mécanique des fluides (méca flotte pour les connaisseurs).

Ce qui est certain, c’est que les automobilistes qui roulent dans Paris, s’ils le font, c’est qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Ce n’est pas juste pour chercher le pain à 300 mètres de chez eux. S’ils utilisent leur voiture, avec les promesses d’embouteillages, c’est à contre-cœur. Généralement, c’est parce qu’il n’y a pas l’offre de transport en commun avec la bonne unité de lieu et la bonne unité de temps. D’ailleurs, ce sont rarement des Parisiens mais des Franciliens, qui doivent traverser Paris faute de liaison adaptée à leurs nécessités, des lignes souvent en étoile et rarement périphériques.

C’est sûr que pour celui qui habite à Paris et qui travaille à Paris (quand il travaille encore), vouloir bouter les automobiles à l’extérieur du boulevard périphérique est très populaire et à la limite de la démagogie pour se faire réélire. Mais comment faire pour ramener ou chercher des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, ou simplement des personnes qui doivent transporter des choses lourdes si on ne peut plus passer à Paris en voiture ?

Oui, la ville ne doit plus être offerte aux automobiles comme cela a été le cas au début des années 1970. Il faut que la ville soit pour les piétons avant tout. Pourquoi pas 30 kilomètres par heure, en vitesse limite, quand on sait que la vitesse moyenne ne dépasse pas la moitié, de toute façon (même si la nuit, quand il n’y a personne, c’est dur de ne pas dépasser, mais on disait déjà cela pour le périph avec la limitation à 70 kilomètres par heure). Il faut donc effectivement proposer des liaisons principales pour les voitures et limiter les petites rues aux déplacements très locaux.

Cette gestion de la circulation parisienne par Anne Hidalgo montre une évidence : elle se limite à l’intérêt des seuls résidents à Paris (ses électeurs) mais pas à l’intérêt général, dans la mesure où Paris est la ville des 10 millions de Franciliens, pas seulement des 2 millions de Parisiens. Il me paraît donc stupide de laisser encore l’attribution de la circulation automobile dans Paris à la seule ville de Paris alors qu’elle devrait revenir, exceptionnellement, à la région-agglomération de Paris, l’Île-de-France et à une grande partie des communes qui la composent.

Bref, tout cela pour dire : si Anne Hidalgo n’est pas capable de coopérer avec tous les acteurs de la région parisienne pour la circulation à Paris, comment peut-on imaginer qu’elle soit capable de coopérer en situation diplomatique, pour raffermir l’Europe, pour amener des pays belligérants à se réconcilier, etc. ? La coopération est un élément majeur dans le processus politique. Coopération et concertation.

Plus intéressant, c’est d’avoir une partie de son programme. Le peu qu’il en ressort est de la franche rigolade. Anne Hidalgo propose par exemple de doubler le salaire des enseignants. Mesure intéressante mais ô combien clientéliste. L’enseignement fut un secteur fort du socle électoral du PS. Enfin, dans les temps anciens. Une mesure qui coûterait 300 milliards d’euros sur un quinquennat !

C’est sûr que raser gratis a encore ses adeptes, mais les Français sont-ils si stupides que cela quand on connaît le niveau d’endettement et le niveau d’imposition de la France ? Il n’y a pas beaucoup de marges de manœuvre. Même Jean-Luc Mélenchon trouve cette proposition irréaliste et démagogique, lui qui en est pourtant très friand !

Ce qui m’étonne, c’est que beaucoup de journalistes et d’éditorialistes ont pris au sérieux cette proposition et plus généralement, la candidature d’Anne Hidalgo. Peut-être en sont-ils encore restés à ce parti socialiste puissant auquel il faut faire allégeance, ce parti hégémonique, majoritaire dans toutes les allées du pouvoir comme cela avait été le cas en 2012. Mais les temps ont changé et cette petite élite qui est composée de faiseurs d’opinions devrait remettre à jour son logiciel d’analyse.

Avec cette proposition démagogique, qui ne s’intègre pas dans un programme d’ensemble, une vision cohérente de la France dans vingt ans, des valeurs, des exigences, des principes, on voit bien que cette dame ne cherche pas à se faire élire (elle n’a pas le niveau et le sait très bien) mais cherche simplement à sauver financièrement le PS. À sauver les meubles et les apparences.

En effet, des mesures aussi démagogiques que cela ne permettent généralement pas de gagner une élection présidentielle (les électeurs ont du bon sens), mais permet de faire le plein des voix dans certaines niches électorales. L’objectif du PS, c’est de faire au moins 5%, voire plus, car toute voix correspond à une dotation publique pour le parti pour les cinq prochaines années. L’enjeu financier est colossal quand l’existence même de ce parti, qui a dû revendre son siège historique de la rue de Solferino, est en cause malgré encore une bonne implantation électorale dans tous les territoires.

Dès lors qu’elle ne cherche pas à faire des propositions réalistes, Anne Hidalgo fait clairement savoir qu’elle n’a aucune intention de gouverner et qu’elle veut simplement racoler des voix sur la place publique. Après tout, Florian Philippot, à  une plus petite échelle, en fait autant en choisissant de se servir dans le vivier électoral des antivax, une niche qui ne lui permettrait jamais de gagner une élection mais qui pourrait lui offrir des militants et un petit trésor de guerre pour les cinq prochaines années…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (12 septembre 2021)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La catastrophe bobo de Paris.
Anne Hidalgo.
Michel Jobert.
Arnaud Montebourg.
Roland Dumas.
Bernard Tapie.
Laurent Fabius.
Louis Mermaz.
Marie-Noëlle Lienemann.
Jean-Luc Mélenchon.
Danièle Obono.
François Ruffin.
François Mitterrand.
François de Grossouvre.
Le congrès de la SFIO à Tours du 25 au 30 décembre 1920.
Le congrès du PS à Épinay-sur-Seine du 11 au 13 juin 1971.
Le congrès du PS à Metz du 6 au 8 avril 1979.
Le congrès du PS à Rennes du 15 au 18 mars 1990.
Le congrès du PS à Reims du 14 au 16 novembre 2008.
Édith Cresson.
Pierre Joxe.
Patrick Roy.
Raymond Forni.
Georges Frêche.
Michel Delebarre.
Pierre Moscovici.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20210912-anne-hidalgo.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/elysee-2022-4-anne-hidalgo-235758

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2021/09/14/39135087.html








 

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