Bayrou donne le coup d'envoi de la campagne législative du MoDem

Lâché par la grande majorité des députés UDF ralliés à Nicolas Sarkozy, l'ex-candidat à la présidentielle sera entouré des rares parlementaires centristes qui lui sont restés fidèles, de Corinne Lepage, présidente du mouvement écologiste Cap 21, et surtout de nouveaux visages.
Dans cette salle pouvant accueillir jusqu'à 6 400 personnes, nouveaux adhérents et candidats du MoDem prendront la parole en début de soirée, avant le discours de M. Bayrou.
Dès le soir du 6 mai, le leader centriste avait souligné la nécessité de construire un "contre-pouvoir" à l'Assemblée nationale, pour éviter de laisser le "pouvoir absolu" au nouveau président de la République.
Le "troisième homme" de la présidentielle sait que cette nouvelle bataille sera "rude". Mais il se félicite de s'être clairement "émancipé" de l'UMP et de pouvoir construire sur du neuf, portant ses espoirs notamment sur les municipales de 2008, selon un de ses proches.
Le MoDem, qui revendique "70 000 adhérents" et présente 535 candidats aux législatives, est crédité d'un score de 8,5% au premier tour, selon un sondage Ipsos publié mercredi.
Mais en l'absence d'alliance avec l'UMP ou avec le PS, les projections en sièges effectuées par d'autres instituts (BVA et TNS Sofres) ne lui donnent qu'entre zéro et dix députés, pas assez pour constituer un groupe parlementaire.
Une nouvelle traversée du désert pourrait donc s'ouvrir pour M. Bayrou, qui a pourtant réalisé un score de 18,57% au premier tour de la présidentielle.
"En 1951, De Gaulle avait fait élire près de 120 députés, un an après il ne lui en restait plus un", rappelle un proche.
A partir de la semaine prochaine, le député des Pyrénées-Atlantiques sera chaque jour dans sa circonscription, avant d'aller, dans l'après-midi et en soirée, soutenir les autres candidats du MoDem.
Ceux-ci sont pour la plupart des inconnus au niveau national, à l'exception de sept députés sortants (5 investis, 2 soutenus), de six députés européens comme Marielle de Sarnez, vice-présidente de l'UDF, et de quelques personnalités comme l'ancien ministre Azouz Begag et l'ex-judoka Djamel Bouras.
Et encore, trois députés sortants mènent leur campagne en solo. "Je ne suis pas aux ordres d'un mouvement politique, quel qu'il soit", a ainsi déclaré à La Croix le député de Seine-Saint-Denis Jean-Christophe Lagarde, précisant qu'il n'ira pas au Zénith et que "travailler avec la nouvelle majorité ne lui posera aucun problème".
De leur côté, les 22 députés sortants ralliés à Nicolas Sarkozy, emmenés par le nouveau ministre de la Défense Hervé Morin, se présenteront en juin sous le label "majorité présidentielle".
Ils ont annoncé la future création d'un nouveau parti de centre-droit - qualifié de "succursale de l'UMP" par les proches de M. Bayrou - qui aura plus de 80 candidats aux législatives, inscrits sous l'étiquette PSLE (parti social libéral européen).
"Personne n'est dupe de toutes ces manoeuvres" et "pratiques politiques du passé", seulement "destinées à recueillir un financement public", a affirmé jeudi le député Gilles Artigues, candidat du MoDem, alors que plusieurs membres de la famille et collaborateurs de M. Morin sont candidats PSLE.
Par Pascale Juilliard, le jeudi 24 mai 2007, 16h22
François Bayrou lance sa "longue marche" vers 2012
PARIS (AP) - Abandonné par la quasi-totalité de ses députés sortants, à quelques semaines de législatives qui s'annoncent "rudes" pour le MoDem, François Bayrou a engagé jeudi ses partisans réunis au Zénith dans une "longue marche" qui, l'espère-t-il, le conduira jusqu'à la présidentielle de 2012.
D'ici là, le candidat UDF à la présidentielle risque de trébucher sur les législatives des 10 et 17 juin, à l'issue desquelles il n'est guère crédité pour l'heure que de dix députés au mieux.
Devant quelque 5 000 de ses partisans, François Bayrou, lui-même candidat aux législatives dans le Béarn, s'est donc déjà projeté vers les municipales de 2008, puis vers les régionales et les européennes. Les 535 candidats UDF-MoDem aux législatives "livrent là pour beaucoup leur premier combat. Mais ce combat sera suivi de bien d'autres, plus faciles, plus encourageants", a-t-il assuré.
"Nous avons commencé une longue marche", et "ce que nous allons commencer à ces élections législatives, nous allons le couronner aux élections municipales, régionales et européennes", a-t-il affirmé.
Dans les prochaines années, François Bayrou entend "défendre les Français", "face à cette immense entreprise de communication" qu'est selon lui la présidence de Nicolas Sarkozy. "Qui leur dira la vérité?", a-t-il lancé. Car "l'UMP va avoir tous les pouvoirs en France, toutes les majorités, toutes les situations d'influence".
François Bayrou a ainsi dénoncé "la nomination à la tête de TF1, annoncée par l'Elysée et non pas par l'entreprise, de l'un des plus proches collaborateurs de Nicolas Sarkozy".
S'il a approuvé la proposition de "traité simplifié" défendu par Nicolas Sarkozy pour sortir de l'impasse institutionnelle européenne, il a en revanche déjà évoqué "deux motifs d'inquiétude", dont le projet de franchise sur les soins médicaux, non remboursée par la Sécu, qui attendrait 75 euros. "Il y a beaucoup de familles pour qui 75 euros, c'est beaucoup d'argent", a-t-il rappelé. Le béarnais a aussi jugé "dangereux d'avoir annoncé hier qu'on allait mettre désormais entre parenthèses la lutte contre les déficits et la dette".
Quant à la politique de "ralliement" de Nicolas Sarkozy, avec l'entrée au gouvernement de ministres UDF ou socialistes-, c'est "exactement le contraire" de son projet de "rassemblement" droite-gauche, a-t-il assuré. "Derrière le ralliement, il y a le désenchantement et puis l'effacement. Derrière le rassemblement, il y a le courage et le succès".
Evoquant le départ de 22 de ses 29 députés sortants, ralliés à la majorité, il a reconnu que, "affectivement comme politiquement, ces moments n'ont pas été des moments faciles". Mais "les changements de camp préparent toujours des déceptions d'abord et des disparitions ensuite", a-t-il prévenu. Il a tout de même souhaité que le futur MoDem se dote d'une "charte éthique" contre les "changements de camp".
Face à la perte annoncée de ses députés, François Bayrou compte sur ses quelque 7 millions d'électeurs du premier tour de la présidentielle, le 22 avril, et sur les 75.000 nouveaux adhérents que revendique le MoDem. "Ce n'est pas une oeuvre solitaire qui commence", a-t-il assuré alors que ses détracteurs l'accusent d'être surtout préoccupé par ses ambitions présidentielles. "J'ai voulu ce nouveau mouvement, mais il n'est pas le mien. Je le porterai avec une équipe", a promis François Bayrou. Il a annoncé des "grandes assises de la démocratie" qui se tiendront "probablement la dernière semaine du mois d'août" pour définir les statuts du MoDem.
Et il s'est pris à rêver: "en 1951, De Gaulle avait réussi à constituer un groupe parlementaire fort de plus de 100 députés" et "en quelques mois (...) presque tous ses députés ont rejoint le pouvoir de l'époque", a-t-il rappelé. Le général De Gaulle était finalement arrivé au pouvoir en 1958, à l'occasion de la crise algérienne.
François Bayrou s'apprête à lancer sa "longue marche" par un marathon: d'ici le 10 juin, il compte faire campagne tous les jours dans sa circonscription, puis consacrer l'après-midi et la soirée au soutien aux autres candidats MoDem.
Jeudi 24 mai 2007, 22h57