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10 septembre 2021 5 10 /09 /septembre /2021 09:55

« On ne peut pas avoir été et être et j’ai la ferme intention de léguer cet héritage de courage, de passion, de travail à tous les Guadeloupéens qui veulent œuvrer pour l’avenir de ce pays, loin des querelles intestines. » (Lucette Michaux-Chevry, Facebook le 5 octobre 2011).



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L’ancienne ministre chiraquienne Lucette Michaux-Chevry, qui était malade depuis quelque temps, est morte ce jeudi 9 septembre 2021 à l’âge de 92 ans (née le 5 mars 1929). Parmi les premières femmes politiques à avoir pris des responsabilités politiques locales et nationales, elle en a même pris les travers des hommes par son autorité de fer (certains l’ont appelée la "dame de fer"), ses cumuls de mandats, et même quelques affaires judiciaires et politico-financières (qui lui ont valu une récente condamnation). Elle a "régné" des décennies en Guadeloupe, engagée derrière Jacques Chirac sous l’étiquette gaulliste du RPR, puis UMP et LR, qu’elle a toujours refusé de structurer dans son île.

Avocate de profession, elle a commencé sa carrière politique en étant élue en mars 1959 conseillère municipale de sa ville natale, Saint-Claude (en Guadeloupe). Elle s’est fait ensuite élire conseillère générale de mars 1976 à mars 1994, d’abord à Saint-Claude puis, à partir de mars 1985, à Gourbeyre dont elle fut élue maire de 1987 à juin 1995. Elle a multiplié les mandats dans les exécutifs guadeloupéens.

Lucette Michaux-Chevry a été élue présidente du conseil général de la Guadeloupe de mars 1982 à mars 1985, elle fut à ce titre la première femme à avoir présidé un conseil général. Elle fut aussi parmi l’une des deux premières femmes à présider un conseil régional (avec l’écologiste Marie-Christine Blandin dans le Nord-Pas-de-Calais) avec son élection comme présidente du conseil régional de la Guadeloupe de mars 1992 à mars 2004 (réélue en mars 1998). Elle fut aussi élue maire de Basse-Terre de juin 1995 à mars 2001 et de mars 2008 à mars 2014, également présidente de la communauté d’agglomération Grand Sud Caraïbe de janvier 2012 à janvier 2019.

Devenue la "Guadeloupéenne de service" de la droite parlementaire, Lucette Michaux-Chevry, parallèlement à sa forte carrière antillaise, a poursuivi aussi une carrière politique nationale faite de mandats nationaux, comme ce mandat de membre du Conseil Économique et Social. Elle fut élue députée en mars 1986, réélue en juin 1988 et en mars 1993. Elle fut membre des deux premiers gouvernements de cohabitation, d’abord nommée Secrétaire d’État chargée de la Francophonie par Jacques Chirac du 20 mars 1986 au 10 mai 1988, et à ce titre, elle fut la première femme issue de l’Outre-mer à entrer au gouvernement, puis nommée Ministre déléguée chargée de l’Action humanitaire et des Droits de l’homme par Édouard Balladur du 30 mars 1993 au 16 mai 1995 (son ministre de tutelle était Alain Juppé).

Après sa sortie du gouvernement en 1995 (elle est devenue conseillère du Président de la République), elle s’était fait élire maire de Gourbeyre en juin 1995, puis sénatrice de la Guadeloupe de septembre 1995 à septembre 2011 (réélue en septembre 2004), tout en restant présidente du conseil régional de la Guadeloupe. Lucette Michaux-Chevry a été battue aux régionales de mars 2004 par son adversaire socialiste Victorin Lurel, élu député deux ans plu tôt, et qui resta à la tête du conseil régional jusqu’à sa défaite en décembre 2015 (par la droite michaux-chevryenne), sauf pendant les deux années où il était au gouvernement. En effet, Victorin Lurel fut nommé Ministre des Outre-mer par François Hollande du 16 mai 2012 au 31 mars 2014. Son prédécesseur à ce ministère était une femme, Marie-Luce Penchard, nommée Ministre de l’Outre-mer par Nicolas Sarkozy du 23 juin 2009 au 10 mai 2012.

Ancienne conseillère du Président de la République de 2007 à 2009, Marie-Luce Penchard n’est autre qu’un des deux enfants de Lucette Michaux-Chevry à laquelle elle a succédé à la mairie de Basse-Terre de mars 2014 à juillet 2020. Élue conseillère régionale de la Guadeloupe depuis mars 2010, Marie-Luce Penchard reste sur les traces de sa mère puisqu’elle est la deuxième vice-présidente du conseil régional de la Guadeloupe depuis décembre 2015 (réélue en juin 2021).

Une autre élue RPR, Gabrielle Louis-Carabin, encore maire du Moule (depuis 1989) et conseillère générale (depuis 1985 avec des interruptions), conseillère régionale de 1992 à 2002, députée de juin 2002 à juin 2017, lui a disputé le leadership de la droite guadeloupéenne. Ce conflit s’est transformé dans les années 2000 en conflit entre chiraquiens (Lucette Michaux-Chevry) et sarkozystes (Gabrielle Louis-Carabin). Cette dernière a d’ailleurs quitté l’UMP en 2009 en signe de protestation contre la nomination de la fille de Lucette Michaux-Chevry, Marie-Luce Penchard, dans le gouvernement de François Fillon, et ce départ a eu des conséquences politiques puisqu’elle a soutenu la candidature de François Hollande en 2012 et a été réélue députée mais cette fois-ci en intégrant le groupe socialiste, où elle a été l’une des rares élues à s’être opposée au mariage pour tous.

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En septembre 2011 (elle avait alors 82 ans), Lucette Michaux-Chevry a décidé de ne pas se représenter au sénatoriales (de toute façon, les trois sièges furent remportés par le PS), ni non plus au poste de maire en mars 2014 (elle avait toutefois mené la liste), mais elle a gardé encore son mandat de présidente d’agglomération (qu’elle avait depuis 2008) jusqu’à sa démission, en janvier 2019, soit à quelques semaines de son 90e anniversaire ! En outre, elle avait encore gardé un autre mandat jusqu’en juillet 2020, celui de maire-adjointe aux finances de Basse-Terre de la municipalité dirigée par sa fille.

Mais c’était dès mars 2004 qu’elle avait perdu beaucoup d’influence politique en Guadeloupe, repliée ensuite à Basse-Terre, elle avait en effet été "détrônée" par la victoire socialiste aux élections régionales, dans un mouvement de fond où d’autres potentats RPR s’étaient aussi fait battre en Outre-mer quelques années plus tard, c’était le cas notamment de Gaston Flosse en Polynésie française en 2005 et de Jacques Lafleur en Nouvelle-Calédonie en 2007. Une perte d’influence largement confirmée par la suite puisque sa candidature a été balayée lorsqu’elle a tenté de revenir au conseil départemental de la Guadeloupe en mars 2015.

Lucette Michaux-Chevry aura donc marqué l’histoire politique de la Guadeloupe mais sa postérité risque surtout de garder les éléments obscurs de sa trajectoire digne des hommes politiques les plus chevronnés des années 1970. À l’heure de la transparence et de la fin du cumul des mandats, elle ne pouvait que susciter de l’incompréhension sinon de la contestation sur sa manière d’agir. Elle a néanmoins toujours su défendre l’intérêt des Guadeloupéens dans tous ses mandats nationaux, au risque de donner prise à la critique de Pierre Mazeaud sur l’intérêt général qui doit s’élever au-delà de l’intérêt des territoires qu’on peut représenter électoralement.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (10 septembre 2021)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Lucette Michaux-Chevry.
Michel Jobert.
Pierre Mazeaud.
Michel Debré.
Bernard Pons.
Pierre Juillet.
Philippe Mestre.
Henry Chabert.
Olivier Dassault.
Éric Raoult.
Yvon Bourges.
Christian Poncelet.
René Capitant.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20210909-lucette-michaux-chevry.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/la-reine-mere-lucette-michaux-235683

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2021/09/10/39128495.html











 

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