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26 mai 2008 1 26 /05 /mai /2008 01:31

Prescrite par le Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007, la suppression de la présidence administrative tournante du Conseil européen au profit d’une véritable présidence politique de l’Union européenne est l’une des innovations majeures des nouvelles institutions de l’Union Européenne.


Alors que la construction européenne peine à trouver une nouvelle relance et que le Traité de Lisbonne cherche à doter l’Union Européenne d’institutions capables de digérer l’adhésion des nouveaux pays d’Europe centrale et orientale depuis mai 2004, la personnalité du premier Président du Conseil européen va devenir essentielle.

En fait, l’appellation change en Président de l’Union Européenne.

Fonction actuellement liée à un pays membre, en rotation tous les six mois, et qui sera assumée par Nicolas Sarkozy du 1er juillet au 31 décembre 2008, la Présidence du Conseil européen est l’un des centres de décision phare de l’Union Européenne.


Rendons à Giscard…

On se le rappelle peut-être moins, mais cette disposition (sommets européens et leur organisation) avait été proposée par… Valéry Giscard d’Estaing, alors Président de la République française qui avait dû d’ailleurs argumenter face aux européanophiles de l’époque qui voyaient, dans l’officialisation des rencontres des chefs d’États et de gouvernements européens, un retour à l’Europe des États. Or, l’expérience a montré que les seules avancées possibles dans la construction européenne l’ont été grâce à ces réunions des dirigeants des États européens.

En aparté, Valéry Giscard d’Estaing a également la paternité du système monétaire européen (qui préfigurera la monnaie unique européenne) et de l’élection au suffrage universel direct des députés européens, avancées pour lesquelles il faudra bien un jour lui rendre hommage.


La recherche du premier visage de l’Europe

La prise de fonction d’un véritable Président de l’Union Européenne, représentant l’Europe notamment dans les grandes rencontres internationales, dépend de la ratification du Traité de Lisbonne et donc plus particulièrement du résultat du référendum prévu le 12 juin 2008 en Irlande, seul État à organiser un référendum.

En principe, cette prise de fonction devrait avoir lieu le 1er janvier 2009 et donnerait au nouveau Président de l’Union une longévité nouvelle, déjà prévue dans le Traité Constitutionnel Européen qui a été rejeté par la France et les Pays-Bas en 2005, à savoir un mandat de deux ans et demi renouvelable une fois.

C’est donc sous la Présidence française que les discussions devront aboutir à un accord unanime sur une personnalité pour assumer cette nouvelle fonction, très importante symboliquement puisque, pour la première fois depuis le Traité de Rome, en mars 1957, elle permettrait de donner un visage à l’Europe.

Jusqu’à maintenant, certains hommes seulement ont incarné l’Europe, dans certaines fonctions parfois bien différentes, comme, pour rester avec des Français, Robert Schuman, Jean Monnet ou encore Jacques Delors qui avait réussi, entre 1985 et 1995, à faire de sa fonction de Président de la Commission Européenne une fonction importante de la représentation européenne (en imposant sa présence dans les Conseils européens notamment).

Mais pour sa succession en 1995, l’échec de la candidature du Premier Ministre belge Jean-Luc Dehaene, européen convaincu, au profit du Premier Ministre luxembourgeois Jacques Santer à la personnalité moins affirmée (Jacques Delors avait aussi succédé en 1985 à un autre Premier Ministre luxembourgeois, Gaston Thorn, récemment disparu) qui avait ramené la fonction à une responsabilité plus administrative que politique.


Qui sont en lice pour cette nouvelle fonction d’importance ?

Le Président Nicolas Sarkozy avait longtemps soutenu la candidature de l’ancien Premier Ministre britannique, Tony Blair, actuellement disponible et ayant encore beaucoup de dynamisme à revendre. Cependant, beaucoup d’Européens lui contestent ses choix internationaux, en particulier un alignement systématique sur la position des États-Unis qui lui a fait s’engager à leurs côtés dans la guerre en Irak, et un euroscepticisme qu’il n’a pas réussi à réduire dans son pays, notamment en refusant la Charte des droits fondamentaux prévue par le TCE avorté et en rejetant toute idée d’adhésion de la Grande-Bretagne aux accords de Schengen et à la zone euro. Les socialistes européens auraient vite écarté sa candidature.

La candidature du Premier Ministre danois Anders Fogh Rasmussen (plus exactement, ‘Ministre d’État’), socialiste, avait été aussi souvent évoquée parce qu’il avait réussi à faire supprimer les dérogations accordées au Danemark lors du Traité de Maastricht. Mais ce dernier aurait décliné l’hypothèse et se verrait plutôt nommer dans une haute responsabilité à l’OTAN.

L’ancien Premier Ministre irlandais Bertie Aherm avait aussi des soutiens pour cette fonction, reconnu pour son autorité et ses qualités, mais sa démission précipitée le 6 mai 2008 en raison d’une affaire politico-financière rend désormais non seulement impossible sa candidature à la Présidence de l’Union mais aussi facilite le débat référendaire du 12 juin 2008 qui aurait pu être occulté par des considérations intérieures irlandaises.


Jean-Claude Juncker ?

Finalement, le dernier candidat possible pour la Présidence de l’Union aurait la capacité de rassembler la plupart des pays européens, à l’exception de la Grande-Bretagne : il s’agit de Jean-Claude Juncker, Premier Ministre luxembourgeois (depuis que son successeur Jacques Santer prenait la Présidence de la Commission Européenne en 1995).

Jean-Claude Juncker a toutes les qualités pour renforcer l’Europe, par sa personnalité et son expérience diplomatique, économique et politique.

Il est en effet celui qui a le plus d’autorité politique en étant le plus ancien des dirigeants européens (plus de treize ans) et donc, en étant un signataire (le dernier des dirigeants européens actuels) du Traité de Maastricht dont il a été parmi les rédacteurs cruciaux comme Ministre des Finances.

Étudiant le droit à Strasbourg, homme politique précoce et avocat théorique (il n’a jamais exercé), Jean-Claude Juncker est aussi l’un des jeunes loups du Luxembourg qui a vite gravi les échelons : il est nommé membre du Gouvernement luxembourgeois dès l’âge de 28 ans, en décembre 1982, responsable du Travail et de la Sécurité sociale, puis dès 1984, il s’occupe du Budget et à partir de 1989, est l’indéboulonnable Ministre des Finances du Luxembourg (poste qu’il occupe encore aujourd’hui avec ses fonctions de Premier Ministre). Parallèlement à ses fonctions politiques, il a aussi été gouverneur de plusieurs fonds ou banques.

En juin 2004, après le succès de son parti aux élections européennes, à la fin du mandat de Romano Prodi, Jean-Claude Juncker est pressenti pour devenir Président de la Commission Européenne, poste qu’il refuse pour rester à la tête du Luxembourg. Il est cependant nommé au Sommet de Scheveningen de septembre 2004 (puis reconduit) président de l’Eurogroupe du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2008, premier président permanent.

Nicolas Sarkozy, qui devra dégager un consensus entre les 27 États européens avant le 31 décembre 2008, semble désormais considérer que le choix de Jean-Claude Juncker serait le plus pertinent à la Présidence de l’Union Européenne.

Mais encore bien des discussions devront avoir lieu d’ici là, car les Britanniques, selon l’Élysée, jugent inacceptable la désignation de Jean-Claude Juncker. C’était ce même veto qui valu à l’ancien Premier Ministre belge Guy Verhofstadt son rejet en novembre 2004 pour la Présidence de la Commission Européenne (au profit du Premier Ministre portugais José Manuel Barroso).


Les plans européens de l’Élysée

L’Élysée verrait ainsi d’un bon œil la désignation de Jean-Claude Juncker au poste de Président de l’Union Européenne et le renouvellement du mandat de José Manuel Barroso à la Présidence de la Commission Européenne, mais cette dernière désignation ne peut avoir lieu qu’après les élections européennes de juin 2009 (le Parlement européen jouant un rôle maintenant important dans cette désignation).

Le souci d’équilibre reste que dans une telle perspective (Juncker et Barroso), tous les deux du côté du Parti Populaire Européen (pour simplifier, issus de la ‘droite européenne’), les socialistes européens (PSE) devront obtenir d’autres postes, et notamment celui de Ministre des Affaires Étrangères de l’Union Européenne (dont l’appellation est devenue après le rejet du TCE : « Haut représentant de l’Union Européenne pour les Affaires Étrangères et la politique de sécurité »).

Poste qui pourrait revenir au socialiste espagnol Javier Solana qui occupe actuellement une partie de ce poste, mais dont la candidature serait combattue par Nicolas Sarkozy.



Ouverture eurosarkozyenne ?

On pourrait alors aisément imaginer que la candidature de Hubert Védrine, Ministre français des Affaires Étrangères du gouvernement Jospin (1997-2002) serait d’autant mieux envisagée qu’elle permettrait à Nicolas Sarkozy de poursuivre sa stratégie d’ouverture politique (ou de récupération politique, comme cela a été le cas pour la nomination de Dominique Strauss-Kahn à la direction générale du FMI) et de placer un Français parmi les plus hauts responsables européens.

Une autre rumeur laisse entendre que Michel Barnier, ancien commissaire européen et actuel ministre français, pourrait reprendre des responsabilités dans les institutions européennes (il sera une des têtes de liste UMP aux européennes de 2009), comme nouveau commissaire européen ou même, selon le Figaro, comme Président du Parlement européen (s’il arrive à avoir un nouvel accord entre PPE et PSE).


Et les anciens du bloc communiste ?

Toutes ces supputations rendent totalement inaudibles les pays d’Europe centrale et orientale qui ont adhéré ces quatre dernières années et en particulier, laisse de côté la Pologne dont l’importance démographique est patente.

On pourrait alors rêver que pour ce poste hautement politique que sera cette Présidence de l’Union Européenne, on penserait plutôt à un Bronislaw Geremek, homme politique polonais historique, européen convaincu, francophile et personnalité dont les qualités sont reconnues internationalement.

Il était déjà ultra-minoritaire lorsqu’il avait tenté de conquérir la Présidence du Parlement européen en juillet 2004 car il se positionnait en dehors des deux grands blocs politiques (PPE et PSE qui ne cessent de se partager les responsabilités depuis plusieurs décennies). Et son âge ne l’aiderait pas non plus (76 ans).


Chiche pour Geremek !

Mais malgré tout, lançons l’idée : au lieu de Jean-Claude Juncker (dont les compétences sont incontestables), pourquoi ne pas introniser Bronislaw Geremek à la première Présidence de l’Union Européenne ?

Cela aurait beaucoup de panache et aussi, beaucoup de sens pour le reste de la planète.

L’idée européenne vaut bien cette part de symbolique, détachée des contingences politiciennes et partisanes.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (26 mai 2008)


Pour aller plus loin :

Texte du Traité de Lisbonne (13 décembre 2007).






http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=40307


http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20080526/tot-qui-sera-le-premier-president-de-l-e-89f340e.html





http://www.lepost.fr/article/2008/06/05/1203346_qui-sera-le-premier-president-de-l-europe.html




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commentaires

P
Juste pour info: la présidence tournante ne sera pas supprimée avec le traité de Lisbonne. Ses pouvoirs seront limités. Trois pays se partageront la présidence pendant 18 mois. Ils pourront soit  présider 6 mois chacun, soit se partager la tâche pendant les 18 mois.
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