Des tableaux de maîtres, des meubles anciens, des objets de luxe dans un des plus beaux hôtels de Paris qui part en ruines. La longue succession de Félix Houphouët-Boigny.
Le 29 juin 2008 à l’hôtel des ventes de Fontainebleau, une toile sur huile de Pierre-Auguste Renoir a été adjugée à un million et demi d’euros. Estimée à 1,8 millions d’euros, "La Femme au fagot" avait été peinte vers 1882 puis acquise par le baron Élie de Rothschild. La dernière exposition du tableau date du 30 mai 1969 à la Galerie Wildenstein à New York.
Renoir avait peint cette jeune et jolie femme en idéalisant la vie campagnarde, loin de la rudesse de l’effort et de la chaleur. Il écrivait en effet : « Un tableau doit être une chose aimable, joyeuse et jolie. (…) J’aime les tableaux qui me donnent envie de me balader dedans. ».
Mais que faisait donc ce Renoir à Fontainebleau au début de l’été ?
Il s’agissait en fait de vendre aux enchères tous les meubles (une centaine de lots) de l’Hôtel Masseran (appelé aussi Hôtel de Beaumont). Un bel hôtel particulier de trois mille mètres carré construit par Brongniart en 1787 pour un cousin de Louis XVI, le Prince Masserano, près des Invalides. Ses façades et son jardin sont classés monument historique. Ses riches meubles inspirèrent le jeune écrivain Raymond Radiguet pour son "Bal du comte d’Orgel".
L’hôtel a été acheté dans les années 1970 aux Rothschild par l’ancien Président de la République ivoirienne Félix Houphouët-Boigny (qui fut aussi un ancien ministre du Général De Gaulle avant l’indépendance de la Côte d’Ivoire) et lui servait d’hôtel particulier où il recevait ses invités avec faste et luxe.
Depuis la mort du chef d’État il y a quinze ans (le 7 décembre 1993), l’hôtel est dans un état désastreux et tombe en ruine.
Au total, 7,5 millions d’euros ont été récoltés à Fontainebleau par l’État ivoirien pour restaurer le bâtiment et en faire, selon le souhait du Président ivoirien actuel Laurent Gbagbo, la résidence des Présidents ivoiriens pour leurs séjours à Paris.
Huit à dix millions d’euros avaient cependant été prudemment estimés pour cette vente aux enchères (vente contestée par les héritiers de Houphouët-Boigny, voir lien en fin d’article).
Parmi les pièces les plus valorisées, une paire de très riches bas d’armoires en marqueterie du XVIIIe siècle, d’après un modèle d’André-Charles Boulle, adjugée à un million d’euros (estimés entre 600 000 et 800 000 euros). Sur les battants médians, un médaillon représente Atlas et Hercule soutenant le Monde avec la devise latine : « His tuto concredere possum » (Je peux me confier à eux en toute sécurité).
Aussi une commode en placage d’acajou moucheté de Saint-Domingue (estimée entre 200 000 et 300 000 euros et adjugée à 380 000 euros) et un lot de canapé et fauteuils à la Reine d’époque Louis XVI (estimé entre 200 000 et 300 000 euros et adjugé à 390 000 euros).
Parmi les tableaux, on remarque aussi une toile de Pierre Bonnard "Arbres en fleurs dans le Dauphiné" de 1909 qui représente un paysage autour du Grand-Lemps, petite commune iséroise au nord-ouest de Grenoble, et qui n’a pas, semble-t-il, été vendue, estimée entre 120 000 et 180 000 euros).
Ainsi qu’une toile d’Alexis Simon Belle "Portrait de Marie Leszczynska", fille du roi Stanislas et épouse de Louis XV, qui est une réplique partielle du tableau conservé à Versailles et répétée quatre fois, dont une qui se trouve à la préfecture de Nancy en Meurthe-et-Moselle (adjugée à 95 000 euros).
Les acquéreurs du Renoir et du Belle ne se sont pas fait connaître publiquement (sauf erreur de ma part).
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (26 août 2008)
Pour aller plus loin :
Liste complète des lots de collection de l’Hôtel Masseran mis en vente le 29 juin 2008 à Fontainebleau.
Sur la succession de Félix Houphouët-Boigny et l’hôtel Masseran (vente contestée par les héritiers).
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=43650
http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20080827/tot-un-renoir-de-la-cote-d-ivoire-pour-1-89f340e.html
http://www.lepost.fr/article/2008/09/09/1261462_un-renoir-de-la-cote-d-ivoire-pour-1-5-millions-d-euros.html
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