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16 décembre 2024 1 16 /12 /décembre /2024 03:56

« En tout temps et dans toute tribulation, le Christ est présent, le Christ est la source de notre joie. Il est avec nous dans la tribulation pour nous faire avancer et nous donner la joie. Gardons toujours cette joie dans nos cœurs, cette assurance que le Christ est avec nous, qu’il marche avec nous. Ne l’oublions pas ! Ainsi, avec cette joie, avec cette sécurité que Jésus est avec nous, nous serons heureux et nous rendrons les autres heureux. Tel doit être notre témoignage. » (le pape François, le 15 décembre 2024 à Ajaccio).



 


Le pape François a fait une visite éclair en Corse ce dimanche 15 décembre 2024, à Ajaccio où il a reçu de nombreux évêques de France. Petite compensation pour la France qui l'avait invité à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris la semaine dernière. Le pape avait alors décliné l'invitation, ne se voyant pas aux côtés des autres chefs d'État et de gouvernement, dans un luxe qui aurait affligé sa modestie (et par ailleurs, il n'était pas libre, il n'avait pas piscine, mais un consistoire le 7 décembre 2024, à savoir, la création de 21 nouveaux cardinaux dont 20 électeurs, aucun Français).

Ce n'est plus beaucoup évident pour le pape de se déplacer. Il a effectué un voyage très épuisant en Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Timor oriental en septembre, avant un voyage plus court en Belgique et Luxembourg. Il est désormais la plupart du temps en fauteuil roulant (il se réserve la position debout dans certaines occasions) et surtout, il est âgé, très âgé, il va d'ailleurs fêter son 88e anniversaire ce mardi 17 décembre 2024. Il est le pape en exercice le plus âgé que le monde a connu depuis plus de cent vingt ans, depuis Léon XIII, qui est mort à 93 ans le 20 juillet 1903. Benoît XVI, qui est mort à 95 ans le 31 décembre 2022, il y a deux ans, avait renoncé à ses fonctions pontificales peu avant ses 86 ans, le 28 février 2013.

Le pape François, en un peu moins de douze ans de pontificat, est venu très peu souvent en France, et jamais à Paris. Ajaccio est sa troisième destination française, et encore, à condition que la première soit française alors qu'elle était plutôt européenne, au Parlement Européen de Strasbourg le 25 novembre 2014. La deuxième destination fut les 22 et 23 septembre 2023 à Marseille, l'an dernier. Il aime bien la Méditerranée et sans doute y a-t-il vu une allusion avec le drame des migrants. Mais la Corse est aussi assez proche de l'Italie, pas très loin de Rome. C'est donc évidemment une marque d'estime historique que le pape a eue envers les Corses.

Dans son court déplacement à Ajaccio, le pape François a eu l'occasion de s'exprimer en public à trois reprises. La première fois dans la matinée à 10 heures 15 au Palais des Congrès et d'Exposition d'Ajaccio, pour la clôture du congrès "La religiosité populaire en Méditerranée". Un contexte intellectuel pour le Saint-Père de confirmer son grand intérêt pour la Méditerranée : « Les terres baignées par la mer Méditerranée sont entrées dans l’histoire et ont été le berceau de nombreuses civilisations ayant connu un développement exceptionnel. Rappelons notamment les civilisations gréco-romaine et judéo-chrétienne qui témoignent de l’importance culturelle, religieuse et historique de ce grand “lac” situé entre trois continents, cette mer unique au monde qu’est la Méditerranée. N’oublions pas que dans la littérature classique, tant grecque que latine, la Méditerranée a été souvent le cadre idéal de la naissance de mythes, de contes et de légendes. De même, la pensée philosophique et les arts, avec les techniques de navigation, ont permis aux civilisations de la Mare nostrum de développer une haute culture, d’ouvrir des voies de communication, de construire des infrastructures et des aqueducs, et plus encore des systèmes juridiques et des institutions d’une grande complexité dont les principes de base sont encore valables et pertinents aujourd’hui. ».

 


Si, dans son discours, le pape François n'avait aucune intention politique en venant à Ajaccio (au contraire de Marseille), il n'a pas reparlé du drame des migrants à ma connaissance (je peux me tromper), il a quand même évoqué un sujet qui lui tenait très cœur, le risque de dérive identitaire de la foi : « Nous devons veiller à ce que la piété populaire ne soit pas utilisée, instrumentalisée par des groupes qui entendent renforcer leur identité de manière polémique, en alimentant des particularismes, des oppositions, des attitudes d’exclusion. Tout cela ne répond pas à l’esprit chrétien de la piété populaire et appelle chacun, en particulier les pasteurs, à la vigilance, au discernement et à la promotion d’une attention constante aux formes populaires de la vie religieuse. ». L'allusion était relativement transparente d'une certaine extrême droite qui utilise la foi chrétienne pour se replier dans un trip identitaire alors que la foi est avant tout une ouverture au monde et aux autres.

Il a aussi évoqué la laïcité : « Sur le terrain commun de cette audace de faire le bien, de demander la bénédiction, les croyants peuvent se retrouver sur un chemin commun avec les institutions laïques, civiles et politiques, pour travailler ensemble à la croissance humaine intégrale et à la sauvegarde de cette “île de beauté”. D’où la nécessité de développer un concept de laïcité qui ne soit pas statique et figé, mais évolutif et dynamique, capable de s’adapter à des situations différentes ou imprévues, et de promouvoir une coopération constante entre les autorités civiles et ecclésiastiques pour le bien de l’ensemble de la communauté, chacune restant dans les limites de ses compétences et de son espace. ».

C'était l'occasion de citer le pape Benoît XVI sur une "saine laïcité" qui signifie, selon son prédécesseur : « libérer la croyance du poids de la politique et enrichir la politique par les apports de la croyance, en maintenant la nécessaire distance, la claire distinction et l’indispensable collaboration entre les deux. (…) Une telle saine laïcité garantit à la politique d’opérer sans instrumentaliser la religion, et à la religion de vivre librement sans s’alourdir du politique dicté par l’intérêt, et quelquefois peu conforme, voire même contraire, à la croyance. C’est pourquoi la saine laïcité (unité-distinction) est nécessaire, et même indispensable aux deux. ». Et d'ajouter : « De cette manière, plus d’énergie et plus de synergies peuvent être libérées, sans préjugés et sans opposition de principe, dans le cadre d’un dialogue ouvert, franc et fructueux. ».





Inutile de dire que ce concept de "saine laïcité" sera certainement fustigé par les uns et les autres, et pourtant, rappelons-nous que la "laïcité" signifie avant tout neutralité de l'État dans une société vivante qui rassemble des croyants de toutes religions, des athées, des agnostiques, etc. et l'idée du pape que chacun, là où il est, peut enrichir la société est une grand pas (ce n'est pas nouveau, cela fait très longtemps que les papes soutiennent la laïcité à la française, même si ce n'était pas le cas au moment du vote de la loi du 9 décembre 1905).

Le deuxième rendez-vous corse du pape était avec les évêques et les prêtres français (ainsi que les diacres, les séminaristes, etc.) rassemblés dans la cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption à Ajaccio à 11 heures 20. En plus de son 88e anniversaire, le pape a rappelé, à cette occasion, qu'il a fêté son 55e anniversaire de sacerdoce deux jours auparavant, le 13 décembre : « Et je vous fais une confidence : j'ai déjà cinquante-cinq ans de sacerdoce, oui, avant-hier j'ai fait cinquante-cinq ans, et je n'ai jamais refusé l'absolution. Et j’aime confesser, tellement. J’ai toujours cherché le moyen de pardonner. ».






Car son message portait surtout sur le pardon, au moment de la confession : « S’il vous plaît, ne torturez pas les gens dans le confessionnal : où, comment, quand, avec qui... Toujours pardonner, toujours pardonner ! Il y a un bon frère capucin à Buenos Aires que j’ai fait cardinal à 96 ans. Il a toujours une longue file de gens, parce qu’il est un bon confesseur, j’allais aussi chez lui. Ce confesseur m’a dit un jour : "Écoute, j'ai parfois le scrupule de trop pardonner" "Et que fais-tu ?" "Je vais prier et je dis : Seigneur, excuse-moi, j’ai trop pardonné. Mais tout de suite, il me vient à l’esprit de lui dire : Mais c’est Toi qui m’as donné le mauvais exemple !". Pardonner toujours. Pardonner tout. Et je le dis aussi aux religieuses et religieux : pardonner, oublier, quand on nous fait quelque chose de mal, les luttes ambitieuses de la communauté... Pardonner. Le Seigneur nous a donné l’exemple : pardonner tout et toujours ! Tous, tous, tous. ». En gros, son message était : pardonnez-leur tous, Dieu reconnaîtra les siens !!
 


Enfin, le grand moment populaire était à 15 heures 30 pour une grand-messe Place d'Austerlitz, à Ajaccio, au pied de la statue de Napoléon Ier, devant environ 9 000 pèlerins privilégiés (qui ont pu avoir une place). Beaucoup de ferveur, beaucoup de joie dans cette célébration aux prélats vêtus de chasubles blanches et roses.

Le moment le plus important était évidemment son homélie, courte, avec deux tonnerres d'applaudissements de la foule.

 


La première ovation a été pour approuver le pape lorsqu'il leur a demandé de s'occuper des personnes âgées, et pas seulement à Noël : « Puissent nos communautés grandir dans leur capacité d’accompagner tout le monde, en particulier les jeunes (…) ; et, d’une manière particulière, les personnes âgées, les anciens. Les personnes âgées sont la sagesse d’un peuple. Ne l’oublions pas ! Et chacun d’entre nous peut se demander : comment je me comporte face aux personnes âgées ? Est-ce que je vais les chercher ? Est-ce que je perds du temps avec elles ? Est-ce que je les écoute ? Oh non, ils sont ennuyeux, avec leurs histoires ! Est-ce que je les abandonne ? Combien d’enfants abandonnent leurs parents dans les maisons de retraite. Je me souviens qu’une fois, dans un autre diocèse, je me suis rendu dans une maison de retraite pour visiter les gens. Il y avait là une dame qui avait trois ou quatre enfants. Je lui ai demandé : "Comment vont vos enfants ?" – "Ils vont très bien ! J’ai beaucoup de petits-enfants" – "Et ils viennent vous rendre visite ?" – "Oui, ils viennent toujours". Quand je suis sorti, l’infirmière a dit : "Ils viennent une fois par an". Mais la mère couvrait les défauts de ses enfants. Beaucoup laissent les personnes âgées seules. Ils leur souhaitent Noël ou Pâques au téléphone ! Prenez soin des personnes âgées, qui sont la sagesse d’un peuple ! ». Est-ce le sens de la famille en Corse qui a fait tant applaudir ?

En tout cas, c'est certainement le sens de la famille qui a rendu fiers ces Corses remerciés, félicités d'avoir fait participer tant d'enfants à la messe. Certains ont même chanter ou lu un texte : « En Corse, Dieu merci, ils sont nombreux ! Et félicitations ! Je n’ai jamais vu autant d’enfants qu’ici ! C’est une grâce de Dieu ! Et je n’ai vu que deux petits chiens. Chers frères, ayez des enfants, ayez des enfants, qui seront votre joie, votre consolation dans l’avenir. C’est la vérité : je n’ai jamais vu autant d’enfants. Il n’y a qu’au Timor oriental qu’il y en avait autant, mais dans les autres villes, il n’y en avait pas autant. C’est votre joie et votre gloire. ». On pourrait croire à une sortie un peu populiste, mais le pape n'est pas de ce genre-là, il a simplement été étonné de cette jeunesse et de ces enfants si fervents et si vivants.
 


S'il n'a fait aucun commentaire politique, le pape a néanmoins évoqué la souffrance d'enfants ukrainiens : « Nous savons malheureusement bien que de grands motifs de souffrance ne manquent pas parmi les nations : la misère, les guerres, la corruption, la violence. Je vais vous dire une chose : il arrive que des enfants ukrainiens, qui ont été amenés ici à cause de la guerre, viennent aux audiences. Vous savez quoi ? Ces enfants ne sourient pas ! Ils ont oublié le sourire. S’il vous plaît, pensons à ces enfants dans le pays en guerres, à la douleur de tant d’enfants. ».

La citation que j'ai placée en tête de l'article sur la joie était la conclusion de l'homélie du François. Il ne faut pas croire que prêcher la joie est une béatitude un peu candide. C'est plutôt prêcher une puissante force. Le pape a ainsi affirmé très lucidement : « Il n’est pas facile d’avoir de la joie. La joie chrétienne n’est en aucun cas une joie insouciante, superficielle, une joie de carnaval. Non. Elle n’est pas ainsi. Il s’agit au contraire d’une joie du cœur reposant sur un fondement très solide que le prophète Sophonie, en s’adressant au peuple, exprime ainsi : réjouis-toi, car "le Seigneur ton Dieu est un puissant Sauveur au milieu de toi" (So 3, 17). Cette confiance dans le Seigneur qui est au milieu de nous. Bien souvent, nous ne nous en souvenons pas : il est au milieu de nous lorsque nous faisons une œuvre bonne, lorsque nous éduquons nos enfants, lorsque nous prenons soin des personnes âgées. Au contraire il n’est pas au milieu de nous quand nous faisons des bavardages, en parlant toujours mal des autres. Là, il n’y a pas de Seigneur, il n’y a que nous. La venue du Seigneur nous apporte le salut : elle est donc un motif de réjouissance. Dieu est "puissant", dit l’Écriture : Il peut racheter nos vies car Il est capable de réaliser ce qu’Il dit ! Notre joie n’est donc pas une consolation illusoire pour nous faire oublier les tristesses de la vie. Non, elle n’est pas une consolation illusoire. Notre joie est le fruit de l’Esprit Saint par la foi en Christ Sauveur qui frappe à notre cœur, le libérant de la tristesse et de l’ennui. ».





La célébration eucharistique a duré plus de deux heures. Le soleil a laissé place à la nuit, sur une foule enchantée par un pape qui a montré, tout au long de son voyage apostolique, une grande simplicité et un contact facile.
 


Le pape François a terminé sa journée corse en rencontrant le Président de la République Emmanuel Macron qui l'attendait à l'aéroport d'Ajaccio. Ce dernier a accompagné le souverain pontife jusqu'à son avion.

 


Ceux qui ont pensé que le pape était en froid avec le Président français en seront pour leurs frais. Seuls les caricaturistes ont pu s'amuser à bon escient, car dans tous les cas, l'humour a toujours été libre pour les chrétiens, et aucun pape n'a jamais condamné à mort un seul dessinateur pour manque de respect ou impertinence. Le sens de l'humour, lui aussi, est ...d'origine divine !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (15 décembre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le pape François en Corse : la vie en rose !
Le voyage du pape François en Corse (Ajaccio) en direct live ce dimanche 15 décembre 2024 (vidéo).
Autonomie de la Corse : y a-t-il un risque de séparatisme ?
Notre-Dame de Paris, capitale du monde !
Pourquoi a-t-on assassiné le père Popieluszko ?
Les 98 ans de Sœur Marguerite.
Le scandale bouleversant de l'abbé Pierre.
Assomption : pourquoi le 15 août est-il férié ?
Le pape François à Marseille (1) : ne pas légiférer sur l'euthanasie.
Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
Mgr Jacques Gaillot.
Mgr Albert Decourtray.

Maurice Bellet.
Lucile Randon (Sœur André).
François : les 10 ans de pontificat du pape du bout du monde.
Santé et Amour.
Le testament de Benoît XVI.
Célébration des obsèques du pape émérite Benoît XVI le 5 janvier 2023 (vidéo).

L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
Sainte Jeanne d'Arc.
Sainte Thérèse de Lisieux.
Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
L’Église de Benoît XVI.
Saint François de Sales.
Le pape François et les étiquettes.
Saint  Jean-Paul II.
Pierre Teilhard de Chardin.
La vérité nous rendra libres.
Il est venu parmi les siens...
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Le ralliement des catholiques français à la République.
L’abbé Bernard Remy.

 






https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241215-pape-francois.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/le-pape-francois-en-corse-la-vie-258183

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/15/article-sr-20241215-pape-francois.html



 

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15 décembre 2024 7 15 /12 /décembre /2024 10:46

(vidéo)


Pour en savoir plus :
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241215-pape-francois.html






SR
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20241215-pape-francois-corse.html







 

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25 octobre 2024 5 25 /10 /octobre /2024 03:47

« Et je vous le dis ce soir avec force, nous sommes ce peuple de bâtisseurs. Nous avons tant à reconstruire. Alors oui, nous rebâtirons la cathédrale Notre-Dame plus belle encore, et je veux que cela soit achevé d’ici cinq années. Nous le pouvons, et là aussi, nous mobiliserons. Après le temps de l’épreuve viendra celui de la réflexion, puis celui de l’action, mais ne les mélangeons pas. » (Emmanuel Macron, allocution télévisée du 16 avril 2019).


 


Pari tenu ! Au lendemain de l'incendie qui a détruit une grande partie de Notre-Dame de Paris, le Président de la République Emmanuel Macron avait donné un délai très court et audacieux pour tout rebâtir. La cathédrale restaurée sera en principe inaugurée en grandes pompes le 7 décembre 2024. La flèche a été reconstruite et redevenue visible le 19 février 2024, et les huit cloches réinstallées le 12 septembre 2024. La réouverture au grand public de la cathédrale monumentale dans six semaines, après sa fermeture et restauration depuis cinq ans, attise bien des convoitises.

Dans l'interview accordée à Claire Bommelaer et Yves Thréard pour "Le Figaro" du 23 octobre 2024, la Ministre de la Culture Rachida Dati, également chef de l'opposition municipale à la Ville de Paris, a jeté un pavé dans la mare avec cette proposition de rendre payante l'entrée de la cathédrale Notre-Dame de Paris, l'un des joyaux de Paris et de la France : « Faire payer l'entrée de Notre-Dame sauverait toutes les églises de France. ». Son premier objectif étant d'en discuter, elle l'a largement atteint en provoquant la polémique (ce qui a de triste dans ce genre de sujet, c'est que tout le monde a son avis, les uns pour, les autres contre, et ça conduit à faire un monde clivé à un moment où nous aurions bien besoin de rassemblement). Le second objectif, celui de tous les ministres, à savoir trouver des sous, c'est moins sûr de l'atteindre !

Tout est bon pour rassembler des sous, évidemment. Mais attention ! À mon sens, cette proposition est assez inquiétante de l'état de la société actuelle et plus encore de l'état de la classe politique qui semble être en perte de valeurs fondamentales.

Rappelons d'abord les arguments de la ministre et les avantages d'une telle proposition, puis insistons sur sa difficile mise en œuvre et enfin, expliquons pourquoi cela me paraît complètement scandaleux.

L'argument principal de Rachida Dati, c'est de dégager 75 millions d'euros par an pour restaurer les églises, parfois petites, de France. Sur les 50 000 lieux de culte catholiques que compte la France, 5 000 sont dans un état très grave qui nécessite une restauration pour ne pas mettre en danger ses visiteurs. Avant 2019, il y avait 12 millions de visiteurs de Notre-Dame chaque année. Rachida Dati voudrait ainsi faire porter le chapeau à ces visiteurs de la cathédrale de Paris pour sauver les églises de tout le territoire français, à la fois l'idée d'apporter des fonds et l'idée aussi d'une solidarité territoriale : « Avec 5 euros seulement par visiteur, on récolterait 75 millions d’euros par an. Ainsi, Notre-Dame de Paris sauverait toutes les églises de Paris et de France (…) Ce serait un magnifique symbole. ».

Soyons clairs, 5 euros, c'est vrai, c'est symbolique, avec probablement l'exonération pour les enfants (pour une famille nombreuse, ça peut monter très vite pour le porte-monnaie). D'où mon problème avec la calcul de la ministre : 5 x 12 millions moins les enfants (admettons un enfant pour trois adultes), je ne trouve que 45 millions d'euros et pas 75, mais je me tais, sinon, le tarif va augmenter ! Qu'importe, l'idée à discuter pour moi est plus de faire payer que de savoir combien. Il faudrait 700 millions d'euros pour restaurer les 5 000 églises vétustes, en dix ou quinze ans, ou vingt ans, ce programme serait totalement financé : intéressant donc, pour les responsables de la conservation du patrimoine. Rappelons aussi que le loto du patrimoine (organisé par Stéphane Bern) apporte chaque année entre 25 et 30 millions d'euros, soit 118 projets de restauration (de monuments historiques, pas seulement des édifices religieux).

Après tout, le principe de l'usager payeur est meilleur que le principe du tout gratuit pour les services publics, par exemple, pour les transports en commun. Qui dit gratuits dit en fait payants pour les contribuables, y compris les non usagers. C'est vrai pour les écoles (ceux qui n'ont pas d'enfants les financent aussi), mais il s'agit de solidarité comme de payer la sécurité sociale lorsqu'on n'est pas malade (le coût d'une maladie étant monstrueux). Mais dans l'exemple de la cathédrale, ce principe s'entrechoque avec le principe de la laïcité et de la neutralité de l'État.

"À cause" de la liberté du culte, seuls les visiteurs, c'est-à-dire les touristes devraient payer, et pas les fidèles, ceux qui voudraient venir prier ou assister aux messes. Déjà, rien que cette dernière phrase est bancale tant d'un point de vue théorique (inégalité face à la taxe, qu'en dit la Constitution ?) que d'un point de vue pratique (comment faire la différence ?). Et puis, je me regarde moi : j'ai visité des milliers d'églises pendant mes voyages à travers la France, et chaque fois, je m'y suis recueilli, mais aussi, je m'y suis cultivé, j'ai parfois admiré un beau vitrail, ou un autre truc. D'ailleurs, une des rares fois où je suis entré à Notre-Dame de Paris, il y avait une messe à laquelle je n'allais pas assister, prenant résolument ma casquette de touriste (bien que francilien). De toute façon, c'est tellement bruyant Notre-Dame qu'il est bien difficile de se recueillir en silence. Mais ce bruit est aussi joyeux, une église, ça vit, c'est l'animation du village. L'église est toujours vivante, par définition.

Rachida Dati a pris aussi exemple sur l'étranger : « Partout en Europe, l’accès aux édifices religieux les plus remarquables est payant. J’ai proposé à l’archevêque de Paris une idée simple : mettre en place un tarif symbolique pour toutes les visites touristiques de Notre-Dame et consacrer totalement cet argent à un grand plan de sauvegarde du patrimoine religieux. ».


Le partout est exagéré, mais c'est vrai en partie. Pour visiter la Sagrada Familia, c'est 26 euros l'entrée (qui vaut le coût !), l'Abbaye du Mont-Saint-Michel, c'est 13 euros, l'Abbaye de Westminster, c'est 36 euros (selon le cours de la livre sterling). J'ai payé aussi pour entrer à la cathédrale de Cracovie, celle de Jean-Paul II. Et en France, même si l'entrée est gratuite, certaines visites sont payantes : les dômes, les tours, les cryptes, les baptistères, les salles du trésor, etc. sont parfois à entrée payante. En revanche, les plus belles églises, celles de Rome, sont gratuites.

Entre parenthèses, la Ministre de la Culture a mis aussi sur le chantier l'idée de faire payer plus cher les touristes hors Union Européenne que les autres : « Est-il par exemple normal qu’un visiteur français paie son entrée au Louvre le même prix qu’un visiteur brésilien ou chinois ? (…) [Les] Français n’ont pas vocation à payer tout, tout seuls. (…) C’est une vraie rupture dans la politique tarifaire de nos établissements culturels. Nous sommes en train d’y travailler, pour une mise en place au 1er janvier 2026. ». Remarquons que la Russie a déjà adopté depuis longtemps cette politique tarifaire : les Russes paient beaucoup moins cher leurs musées que les étrangers. Mais revenons à Notre-Dame.

Dans cette controverse, la position est relativement simple : les croyants sont scandalisés par l'idée de faire payer l'entrée dans une cathédrale, car cela entrave la liberté du culte et empêche les plus pauvres à aller à Notre-Dame ; ceux qui ne sont pas croyants, n'y voient que les vieilles pierres et trouvent logique de faire payer comme on fait payer pour entrer dans n'importe quel monument "païen". En somme, la question est de savoir si Notre-Dame de Paris est un monument, auquel cas elle s'insère dans le patrimoine de la France sous la responsabilité du Ministère de la Culture, ou si Notre-Dame de Paris est une cathédrale, lieu de culte par excellence des catholiques français, auquel cas elle doit être en libre service et sa gestion dépend du ministère du culte, à savoir le Ministère de l'Intérieur. J'aimerais donc connaître l'avis de
Bruno Retailleau sur le sujet. Mgr Michel Aupetit, l'ancien archevêque de Paris, avait en effet bien rappelé la destination de Notre-Dame juste après son incendie : « C’est un lieu de culte qui doit être rendu au culte. Notre-Dame n’est pas un musée. ». Cela a le mérite de la clarté.

La mise en pratique de proposition de Rachida Dati est en outre très difficile car comment seront choisies les églises à restaurer une fois que les sommes seront acquises ? Où ira l'argent ? Comment sera-t-il géré et avec quels frais de gestion ? La journaliste spécialiste du Vatican Caroline Pigozzi est très pessimiste sur la manière de gérer ce nouvel argent. Pour Alexandre Giuglaris, directeur général de la Fondation du Patrimoine, au contraire, ce n'est pas un problème. La Fondation du Patrimoine est prêt à s'en occuper et elle est même très alléchée par la proposition, car, évidemment, elle ne s'occupe que du matériel et pas du spirituel. Elle gère déjà l'argent obtenu par le loto du patrimoine.

En tant que croyant, je serais très choqué de voir un péage à l'entrée d'une église et plus encore d'une cathédrale. Déjà, la différence avec il y a trente ans, c'est que les églises sont souvent fermées car faute de bonnes âmes de permanence, elles ne peuvent plus rester ouvertes sans surveillance à cause des vols (ce qui n'était pas le cas dans mon jeune temps). J'ai déjà eu ce sentiment quand je voulais visiter la cathédrale de Brou, à l'entrée de Bourg-en-Bresse, dont l'entrée est payante (mais justement, l'église ou plus précisément l'abbatiale n'est plus consacrée et cet ensemble est un musée et pas un édifice religieux même s'il l'a été).


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La reconstruction de Notre-Dame de Paris n'a pas eu de problème de fonds : les nombreux dons, en particulier des familles les plus riches de France, ont permis de rassembler près de 900 millions d'euros (selon les promesses de 2019, je ne sais pas si cette somme a été effectivement recueillie : selon certaines sources, 840 millions d'euros auraient été collectées et le coût des travaux auraient été de 700 millions d'euros, d'où un surplus de 140 millions d'euros qui va servir à... ?). Ce grave incendie a montré que les Français (les plus riches) pouvaient rapidement mobiliser beaucoup d'argent quand le cœur leur parlait. Inciter aux dons et ne pas taxer, ne pas imposer, c'est peut-être la clef du problème. On critique les niches fiscales mais celle qui permet d'avoir moins d'impôts parce qu'on donne à des associations caritatives ou d'intérêt public me paraît une bonne niche fiscale, peut-être faudrait-il en inventer une spécifiquement pour les dons destinés à restaurer le patrimoine religieux de la France ?

Cette collecte de dons (au final bénéficiaire) montre aussi que faire payer l'entrée de Notre-Dame alors que sa reconstruction a été totalement financée par des dons serait une grosse arnaque intellectuelle. Pour ne pas être trop polémique, la destination du surplus de 140 millions d'euros a fait beaucoup réfléchir au sommet de l'État et le Président de la République a choisi de ne pas les consacrer à la restauration d'autres églises (car ce n'était pas la destination de ces dons) et cette somme resterait toujours consacrée à l'entretien de Notre-Dame de Paris, hors travaux dus à l'incendie.


C'est cela qui est important : Jésus-Christ avait viré les marchands du temple et on voudrait les y réinstaller ? On payait déjà pour monter dans les tours, et il va y avoir un musée de Notre-Dame qui sera naturellement payant. Faire payer un lieu de culte est d'ailleurs contraire à l'article 17 de notre loi si chérie du 9 décembre 1905 : « La visite des édifices et l'exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance. » (ce qu'a rappelé avec pertinence sur Twitter un internaute bien documenté).
 


Le débat de rendre payante l'entrée de Notre-Dame de Paris semble de toute façon mort-né car l'État doit impliquer une institution essentielle, le diocèse de Paris, qui a déjà réagi ainsi le 24 octobre 2024 : « Nous souhaitons rappeler la position inchangée de l'Église catholique en France s'agissant de la gratuité du droit d'entrée dans les églises et les cathédrales. ».

Cette gratuité est la garantie à tout le monde de pouvoir visiter la cathédrale. Et même si le visiteur n'est pas croyant, se moque de prier ou d'assister à une messe, le simple fait d'entrer dans la cathédrale, de s'y imprégner, d'admirer son architecture, sa lumière, son atmosphère, est déjà un rapprochement vers Dieu, que le visiteur le veuille ou pas. Lui mettre la barrière de l'argent signifierait que le Dieu honoré dans la cathédrale serait l'argent. Je sais que dans certains pays étrangers, on fait payer (il me semble, pas en Allemagne, mais quand on est croyant, on paie dans ses impôts l'équivalent du denier du culte à la religion déclarée).

L'État a voulu confisquer les biens de l'Église avec sa loi de séparation des Églises et de l'État, et aujourd'hui, il n'est pas capable d'assumer l'entretien de ce patrimoine volé. Il faut savoir ce qu'on veut. La loi du 9 décembre 1905 s'est montrée pertinente et moderne car elle rend l'État impartial et neutre. C'est une façon de voir très rare (nos voisins s'en étonnent régulièrement), mais il faut l'assumer jusqu'au bout. Et surtout, voulue pour l'Église catholique, elle anticipait les liens entre l'islam et la République. En quelque sorte, en instaurant un péage à l'entrée de la cathédrale de Paris (d'abord symbolique, puis on l'augmenterait et on l'étendrait aux autres cathédrales, aux autres églises et chapelles de France), on remettrait en cause cette loi du 9 décembre 1905, du moins son esprit (car on peut toujours trouver un arrangement juridique), qui nous est, nous Français, si précieuse et si irrévocable pour donner des arguments face aux partisans de l'islamisation à outrance de la société.

C'est donc philosophiquement, politiquement et surtout spirituellement que la proposition de Rachida Dati me paraît scandaleuse. Et cela n'empêche pas de faire des dons, même minimes de 5 euros, pour aider à la restauration des édifices religieux. Mais dans le seul cadre de la générosité "volontaire". Il y a trente-cinq ans environ, j'avais envoyé un don, très faible (je ne sais plus combien mais peu, et c'était en francs) pour la construction de la seule cathédrale du XXe siècle en France,
celle d'Évry. Non seulement j'étais fier d'avoir participé (très modestement) à cette très belle cathédrale, mais j'avais en plus reçu un authentique brevet de bâtisseur de cathédrale ! (que j'ai perdu depuis longtemps). Bref, arrêtons de taxer encore et encore les Français !

Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (24 octobre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
Jean-Louis Georgelin.
Eugène Viollet-le-Duc.
Notre-Dame de Paris : la flèche ne sera pas remplacée par une pyramide !
La Renaissance de Notre-Dame de Paris : humour et polémiques autour d’une cathédrale.
Allocution du Président Emmanuel Macron du 16 avril 2019 (texte intégral).
Notre-Dame de Paris, double symbole identitaire.
Maurice Bellet, cruauté et tendresse.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241023-notre-dame-de-paris.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/5-euros-pour-visiter-notre-dame-de-257351

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/10/24/article-sr-20241023-notre-dame-de-paris.html




 

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8 septembre 2024 7 08 /09 /septembre /2024 03:52

« Elle a le visage d'un ange prêté pour trop peu de temps à la Terre. » (Jacques Séguéla, 2006).


 


Ce dimanche 8 septembre 2024, je voudrais rendre hommage à une femme superbe, Sœur Marguerite, qui fête son 98e anniversaire. Tant d'années et autant de foi dans la vie, dans l'espérance d'un avenir meilleur, cela réconforte quand on lit tellement de mauvaises nouvelles, tellement de déclinisme, de pessimisme. Et puis, il est quand même quelques personnes charitables qui se sont engagées auprès de Dieu qui ne devraient pas décevoir, même après leur mort.

Dans le petit monde des religieuses, il y a beaucoup de sœurs Marguerite. La Sœur Marguerite que je veux honorer ici s'appelle pour l'état-civil Marguerite Tiberghien, née le 8 septembre 1926 à Roubaix, dans le Nord. Elle s'est engagée en 1948 dans les ordres chez les Filles de la charité de saint Vincent de Paul. Après avoir enseigné dans l'agglomération de Lille, Sœur Marguerite est partie en 1972 au Congo-Brazzaville pour enseigner également (le régime de ce pays africain était communiste de 1969 à 1992). Elle avait alors 46 ans.

Sa grande réalisation, ce fut d'avoir fondé l'École spéciale de Brazzaville en octobre 1975 qui permet de scolariser gratuitement les exclus, des enfants très pauvres ou en situation de handicap, des enfants déscolarisés, des adultes illettrés, etc. sur le programme de l'enseignement primaire en langue française. Elle y a enseigné la lecture et l'écriture pendant près de trente années, jusqu'en septembre 2004 où elle a pris sa retraite et est retournée vivre à Paris comme l'y conviait sa congrégation (elle avait 78 ans !). Cette école a essaimé et a fait des petites. En tout, 30 000 Congolais ont bénéficié de cette école très singulière et ont échappé à l'illettrisme. Sœur Marguerite a su trouver des financements tout au long de ces années, soit des pouvoirs publics (notamment congolais et français) soit d'origine privée (donateurs, etc.).

Au-delà de l'enseignement primaire, cette école assure aussi une formation professionnelle (menuiserie, jardinage, couture) et des activités d'éveil pour les élèves (enfants et adultes) atteints d'un handicap mental. Ces derniers restent à la charge de leur famille mais avec cette formation, ils ont progressé dans leur ouverture au monde, ce qui a renforcé leur intégration sociale. Les effectifs de l'école sont passés de 80 en 1975 à 2 500 en 2011. À partir du début des années 2000, en effet, c'est tout un réseau d'écoles qui a été mis en place pour instruire les exclus.

Toutes ces structures se basent sur les quatre principes suivants : accueil des exclus de l'école primaire, coexistence des trois sections pédagogiques (A : adultes de plus de 20 ans pour alphabétisation et préparation au CEP ; J pour enfants de moins de 14 ans pour atteindre le niveau CM2 ; T pour enfants de plus de 14 ans pour alphabétisation et préparation au CEP) et des ateliers professionnels ; gratuité avec participation financière libre des familles ; gestion d'un comité d'entraide.

Le 6 octobre 2021 (dans un entretien accordé à Marie Alfred Ngoma pour l'Agence d'information d'Afrique centrale), Sœur Marguerite a raconté ses débuts : « Nous avons commencé dans une salle qui n’était pas une classe. (…) Notre travail était d’assurer l’apprentissage de la lecture par la méthode syllabique mimée avec des gestes. Nous avions, pour chaque lettre de l’alphabet, une histoire accolée. Par exemple, celle de la lettre A, c’est l’histoire d’une jeune fille qui s’appelle Anne qui s’émerveille et exprime sa joie avec un énorme sourire devant la robe achetée par sa mère. La classe s’interroge : pourquoi Anne est contente ? Elle est contente parce que sa mère lui a acheté une belle robe. S’en suit l’exclamation Ah ! ».

Et de résumer l'essentiel pour les enfants congolais : « Tout comme les cinq doigts de la main : en premier, disposer d’un bon professeur ; ensuite, avoir le courage de travailler ; entretenir l’amitié dans la classe, éviter les moqueries ; veiller à la propreté dans l’école et enfin, lutter pour la vérité, admettre ses faiblesses au lieu de les cacher, pas d’évolution si on ne sait pas lire. (…) Plus, il y aura de femmes et d’hommes conscients de la richesse de la lecture, mieux ça ira ! C’est par l’apprentissage de la lecture pour tous que le Congo rendra la fierté aux populations, ôtant, au passage, le mépris de l’autre. ».

Malgré la guerre civile qui a sévi au Congo-Brazzaville entre le 10 mai et le 25 octobre 1997 et qui a fini par le retour au pouvoir de l'ancien autocrate communiste Dens Sassou-Nguesso (toujours au pouvoir aujourd'hui), la religieuse a préféré restait courageusement sur place, malgré les dangers, pour continuer à mener sa lutte contre l'illettrisme, car ses élèves avaient besoin d'elle.

En avril 2006, Sœur Marguerite a fait la connaissance du publicitaire Jacques Séguéla et ce fut le coup de foudre pour l'homme de communication qui l'a appelée Sœur Courage. Ce dernier lui a consacré un livre-interview où elle a nappé sa vie auprès des exclus. Un livre, publié en octobre 2006, dont les droits d'auteur ont été versés à l'Association des amis de l'École spéciale de Brazzaville.
 


La notoriété de l'ancien conseiller en communication politique de François Mitterrand lui a permis également de créer, avec l'aide notamment du père Alain de La Morandais (qui avait fait connaître Sœur Marguerite à Jacques Séguéla), le Fonds de dotation Sœur Marguerite le 20 août 2010 pour financer toutes les initiatives locales visant à concrétiser la gratuité et l'universalité de l'enseignement primaire en langue française (apprendre à lire, écrire et compter). Ce fonds a été reconnu à l'UNESCO au cours d'une journée sous le haut patronage de Carla Bruni, épouse du Président de la République, le 12 avril 2011.

Pierre Chausse, président de ce fonds, a expliqué : « [Ce fonds] a pour objet de pérenniser et de développer le modèle des Écoles Spéciales (qui combine enseignement primaire francophone pour tous et formations professionnelles) ainsi que de développer un réseau d’écoles dans le monde entier. En une décennie, l’action de soutien du Fonds de dotation en faveur de projets éducatifs s’est étendue auprès de nombreuses communautés francophones, qu’elles soient congolaises, indiennes ou libanaises. Aujourd’hui via ses partenariats avec d’autres ONG, les équipes enseignantes sur place et des acteurs locaux partageant ces mêmes valeurs d’universalité de l’éducation. Le Fonds de dotation réfléchit à différents projets d’infrastructures, notamment en faveur des personnes handicapées. ».


Quant à la religieuse, voici ce qu'elle disait, le 13 février 2011 sur RFI, à la journaliste Geneviève Delrue (vice-présidente de l'Association des journalistes d'information religieuse) : « Cela me donne un grand bonheur, parce que je suis de plus en plus persuadée que les questions de sous-développement de pays en retard, c'est avant tout une question d'instruction. Alors, maintenant, il y a l'École spéciale à soutenir, mais il y aurait aussi l'ensemble des jeunes mal instruits ou pas scolarisés du tout. Mon idée-là, toujours dans la tête : pas savoir lire à 80 ans, ce n'est pas grave, parce qu'on a encore toute l'oralité avec les contes, les proverbes, enfin, toute la belle poésie de cette oralité. Pas savoir lire à 50 ans, ce n'est pas grave, il y a des écoles qui sont prévues pour ça. Mais pas savoir lire à 15 ans, c'est inacceptable ! Surtout à notre époque. Parce que les analphabètes qui n'ont que la force de leurs bras, et qui, ayant grandi dans des villes immenses, n'ont pas bénéficié de la culture orale de leurs ancêtres, on est devant un orphelinat mental. (…) Maintenant, avec les avancées techniques et les robots, les analphabètes qui n'ont que la force de leurs mains, petit à petit, on n'en a pas besoin, c'est grave ! Voyez les chantiers de construction, et j'ai vu de grandes grues, des grosses pelleteuses, mais il y a deux trois ouvriers, pas plus, ce n'est pas la peine, la machine est là. C'est vrai, il faut savoir la diriger la machine, donc, il faut avoir fait des études ».

Effectivement, Sœur Marguerite a souvent parlé du « miracle de l'amitié » qui a sorti tant de ses élèves, enfants congolais, de « l'orphelinat mental ». Elle leur a souhaité joyeux Noël 2021 avec ces mots : « Qu’ils soient dans la posture où, avec peu, se multiplient les bonheurs à partager (…). [Je leur souhaite] d’avoir souvent l’occasion de dire, d’entendre : c’est bien, c’est bon, c’est beau ! ».
 


Elle a décrit la honte de l'exclusion scolaire : « Le premier point commun, c'est une espèce de honte. L'analphabète de 15 ans a honte de ne pas savoir lire. Et l'écriture pour lui, c'est des dessins. (…) Ils savent qu'ils n'ont pas d'avenir. Alors, vous les retrouvez où ? Vous les retrouvez dans les bandes armées, soit simplement des bandits, soit des bandes armées des milices dont s'entoure chaque personnage important. ».

Jusqu'au bout, jusqu'à son dernier souffle, Sœur Marguerite se consacrera donc à l'éducation, après avoir vu les massacres de la guerre civile en 1997 : « Au moins l'éducation primaire. D'abord, c'est marqué dans la Déclaration des droits de l'homme, article 26 : l'homme a droit à l'éducation gratuite, au moins la primaire. On ne peut pas se contenter de nourrir. On ne peut pas se contenter de vacciner. Ça va vite, un vaccin ; une minute, l'enfant est vacciné. Mais après ? Moi, je disais à un papa qui est tout fier d'aller annoncer à la mairie que sa femme lui a fait cadeau du plus beau bébé du monde, est-ce qu'il a pensé qu'il en avait jusqu'en 2030 à suivre la scolarité de son fils ? Maintenant, il faut compter vingt ans. Et là-bas, on trouve normal de les laisser comme ça parce que, c'est vrai, il y a un effort à faire. Quand je vois les belles écoles en France, et qu'on n'est pas contents, on a encore trop d'enfants qui arrivent en Sixième en ânonnant la lecture, bon, mais là-bas, chaque fois, je suis triste, je suis contente parce qu'on reçoit de bonnes aides des écoles françaises, ces jeunes sont généreux, les professeurs aussi, les directeurs sont très accueillants, mais chaque fois, quand je vois la différence avec les écoles du Congo que je connais (…), je dis : non, ça ne va pas, ils ne vont pas se rattraper. Et je supplie de tout mon cœur les chefs d'État de prendre ça en main. » (13 février 2011).

Le 28 mars 2013, Sœur Marguerite a suggéré pour l'hebdomadaire chrétien "La Vie" que Dieu avait laissé quatre graines dans le cœur des humains, et des seuls humains, la bonté qu'il faut cultiver, la science et l'intelligence, la beauté, et ce grand appel de l'infini : « Qu'est-ce qu'il y aura après la mort ? L'éternité qui nous attend, c'est la grande question qui se pose. ». Et de conclure : « Dieu, on l'a vu. C'était un homme ! ». Très bon anniversaire, ma sœur !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (08 septembre 2024)
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Pour aller plus loin :
Jacques Séguéla.
Les 98 ans de Sœur Marguerite.
Le scandale bouleversant de l'abbé Pierre.
Assomption : pourquoi le 15 août est-il férié ?
Le pape François à Marseille (1) : ne pas légiférer sur l'euthanasie.
Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
Mgr Jacques Gaillot.
Mgr Albert Decourtray.

Maurice Bellet.
Lucile Randon (Sœur André).
François : les 10 ans de pontificat du pape du bout du monde.
Santé et Amour.
Le testament de Benoît XVI.
Célébration des obsèques du pape émérite Benoît XVI le 5 janvier 2023 (vidéo).

L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
Sainte Jeanne d'Arc.
Sainte Thérèse de Lisieux.
Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
L’Église de Benoît XVI.
Saint François de Sales.
Le pape François et les étiquettes.
Saint  Jean-Paul II.
Pierre Teilhard de Chardin.
La vérité nous rendra libres.
Il est venu parmi les siens...
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Le ralliement des catholiques français à la République.
L’abbé Bernard Remy.







https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240908-soeur-marguerite.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/la-foi-de-soeur-marguerite-qui-256608

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14 août 2024 3 14 /08 /août /2024 03:47

« Enfin, la Vierge immaculée, préservée de toute tache de la faute originelle, au terme de sa vie terrestre, fut élevée à la gloire du ciel en son âme et en son corps et elle fut exaltée par le Seigneur comme Reine de l'univers afin de ressembler plus parfaitement à son Fils, Seigneur des seigneurs et vainqueur du péché et de la mort. » (Paul VI au Concile Vatican II, "Lumen Gentium" le 21 novembre 1964).




 


Paradoxe de la République française, la loi qui instaure la laïcité, c'est-à-dire la neutralité de l'État vis-à-vis de la religion, de toutes les religions, permet également de rendre fériés des jours considérés comme des fêtes religieuses, plus précisément des fêtes chrétiennes (la France étant la "fille aînée" de l'Église). Cette tradition remonte parfois à l'Ancien Régime et est désormais traduite dans le code du travail d'une France bien républicaine. Exemple estival : le 15 août.

Que fête-t-on à l'Assomption ? La montée aux cieux de la Vierge Marie, la mère de Jésus Christ. Ce dernier, après sa mort et sa résurrection (Pâques), est remonté aux cieux (auprès du Père) le jour de l'Ascension (du verbe latin ascendere, s'élever), à une date différente chaque année en fonction du jour de Pâques (le jeudi, quarante jours après Pâques). Pour la Vierge Marie, il ne s'agit pas d'une Ascension mais d'une Assomption (du verbe assumere, assumer, enlever). Elle est montée aux cieux selon la volonté de Dieu. C'est Dieu qui a assumé la perfection de Marie et l'a enlevée pour la placer auprès de son Fils.

Marie est élevée corps et âme dans la gloire de Dieu : il s'agit là d'un dogme de l'Église catholique, assez récent puisqu'il a été proclamé par le pape Pie XII seulement le 1er novembre 1950 ("Munificentissimus Deus"). Un dogme, pour les catholiques, est une vérité révélée de Dieu, considérée comme contraignante pour la foi. Ce jour est aussi célébré par les orthodoxes (Domition), sans qu'il ne soit un dogme (fêté le 15 août ou le 28 août pour les orthodoxes selon le calendrier utilisé). Les protestants se référant exclusivement à la Bible ne croient pas à l'Assomption et considèrent les dévotions mariales des catholiques comme de la "mariolâtrie".


L'idée est que Marie, préservée du péché originel, a pu entrer au royaume de Dieu après sa vie terrestre avec son enveloppe charnelle sans attendre la résurrection des corps à la nuit des temps. C'est la conséquence directe du dogme de l'Immaculée Conception (voir plus loin).
 


Je reviens sur cette proclamation de ce dogme qui veut que Marie soit montée au ciel avec son corps : c'est la seule proclamation (à ce jour) qui a fait usage de l'infaillibilité papale, sachant que l'infaillibilité papale (qui n'est pas permanente mais très précise et, comme je viens de l'indiquer, n'a été utilisée qu'une seule fois) est elle-même un dogme proclamé le 18 juillet 1870 par le pape Pie IX au cours du Concile Vatican I ("Pastor aeternus").

Sur le fond, croire que Marie s'est élevée aux cieux avec son corps (c'est-à-dire que son corps n'aurait pas subi l'effet du temps), comme du reste le Christ, est une question de foi et pas de science, de même que croire que Jésus Christ a été conçu mais sans relation entre Marie et Joseph (Marie est fêtée comme la Vierge). Là encore, il y a la foi (on y croit ou on n'y croit pas). Néanmoins, les choses sont peut-être plus compliquées qu'imaginables dans ce monde si diversifié et si sophistiqué. Par exemple, aujourd'hui, parler d'une femme vierge devenue enceinte et accouchant d'un enfant n'est pas vraiment le résultat de la magie ou d'une quelconque sorcellerie. En effet, la possibilité de fécondation in vitro et d'insémination artificielle donne une autre vision des possibles. Il est peu probable que ces techniques de procréation artificielle aient pu être envisagées il y a 2 000 ans, évidemment, mais finalement, elles ne sont pas impossibles.

Je note en passant que les Juifs ne s'interdisent que ce que leur texte biblique (l'Ancien Testament) leur interdit, et donc s'autorisent tout ce qui n'est pas interdit, en particulier tous les procédés novateurs dans tous les domaines, ce qui fait de l'État d'Israël un pays très performant sur le plan des sciences et de l'innovation (notamment dans le domaine génétique).


Toujours sur ce point, il faut enfin se rappeler la réflexion très poussée du pape Benoît XVI qui avait insisté pour mettre la raison à côté de la foi, les deux étant de nature différente et indispensable l'une de l'autre. Ce qu'on pouvait appeler miracles ne le sont peut-être pas d'un point de vue strictement scientifique, et avec notre progression des sciences dures, combien de phénomènes magiques pourraient-on proposer à des personnes d'un ancien temps ? Il y a une part de mystère qui pourrait sans doute être levée un jour ou l'autre avec les sciences, et, pour les chrétiens au moins, qui sera a priori levée le jour de notre mort (du moins, je l'espère !).

Revenons à l'Assomption qui n'est pas intégrée dans la Bible mais dont la célébration est très ancienne, remontant au Ve siècle. Elle est fêtée le 15 août car ce serait ce jour-là où la première église dédiée à la Vierge a été consacrée à Jérusalem. C'est l'évêque Cyrille d'Alexandrie (375-444) qui l'a introduite avec la christianisation de l'empire romain pour en faire une fête chrétienne qui a remplacé les Feriae Augusti, célébrant les victoires de l'empereur Auguste en mi-août (le mois d'Auguste), journées déjà fériées à l'époque. Théodore Ier (pape de 642 à 649) l'a généralisée et l'Assomption fut citée en 813 par le Concile de Mayence comme une fête d'obligation.


En France, la fête a connu une tournure plus politique et institutionnelle, puisqu'en 1637, le roi Louis XIII, marié depuis vingt-deux ans sans avoir pu encore donner naissance à un enfant (seulement des fausses couches), et qui devait avoir un héritier pour assurer sa succession sur le trône de France, a solennellement demandé au Parlement de Paris que chaque 15 août les sujets (et les fidèles) fassent une procession dans leur paroisse en l'honneur de Marie. Ça a marché puisque le futur Louis XIV est né le 5 septembre 1638 ! La grossesse de la reine Anne d'Autriche fut interprétée comme la réponse divine à cet hommage pour Marie (Notre-Dame) de la part du roi. C'est à partir de cette date que le 15 août est férié en France, pour permettre aux sujets du roi de se consacrer à Dieu et à Marie au cours de cette journée par des prières et des processions. L'une des plus importantes processions, de nos jours, a lieu à Lourdes (15 000 personnes en 2022), devenu un lieu de pèlerinage pour célébrer les apparitions de la Vierge faites à sainte Bernadette Soubirous en 1858.
 


Quelques années avant les apparitions à Lourdes, le pape Pie IX avait publié une bulle papale le 8 décembre 1854 ("Ineffabilis Deus") pour établir le dogme de l'Immaculée Conception (c'est-à-dire que la conception de la Vierge Marie a été faite "sans péché originel"). Entre 1854 et 1945, des millions de chrétiens, fidèles mais aussi des prêtres et des évêques, ont demandé par pétitions au Vatican que l'Assomption soit reconnue comme un dogme également, ce qui fut proclamé à la Toussaint 1950 (comme indiqué plus haut).

La fête de l'Assomption en France est donc un héritage à la fois de l'Église catholique et du Royaume de France mis sous la protection de Notre-Dame de l'Assomption par Louis XIII. À la Révolution, cette fête fut supprimée mais restaurée par Napoléon III au Second Empire... et maintenue dans les républiques suivantes, à la grande joie des vacanciers qui peuvent prolonger leurs vacances sans augmenter leurs CP ou des juillettistes qui peuvent faire le pont (cette année, jeudi 15 août 2024, est propice au pont pour anticiper le week-end !). La force de l'anticléricalisme républicain s'arrête aux jours fériés du calendrier chrétien reconnu par le code du travail. Étonnant, non ?


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (14 août 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Trois illustrations de l'Assomption :
1. "L'Assomption de la Vierge" par Michel Sittow, vers 1500 (National Gallery of Art à Washington).
2. "L'Assomption de la Vierge" par Guido Reni, en 1637 (Musée des Beaux-Arts de Lyon).
3. "L'Élévation de Marie vers les cieux" par Francesco Botticini, XVe siècle (National Gallery à Londres).


Pour aller plus loin :
Assomption : pourquoi le 15 août est-il férié ?
Le Jeudi de l'Ascension.
Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
Le génie olympique français !
Rose cendre.
Il est venu parmi les siens.
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Les messes à l’épreuve du covid-19.
Il regarde le soleil dans tes yeux !
Pâques 2020, le coronavirus et Dieu…
Réflexions postpascales.
La Passion du Christ (1) : petites réflexions périphériques.
La Passion du Christ (2) : quel est le jour de la mort de Jésus ?
Noël à la télévision : surenchère de nunucheries américaines.

Le Messie, c'est tout de suite !
La Passion du Christ selon saint Matthieu (texte intégral).

 




https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240815-assomption.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/assomption-pourquoi-le-15-aout-est-256280

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9 mai 2024 4 09 /05 /mai /2024 03:11

« Quand on est citoyen européen, je pense qu'il y a quelque chose de très important, c'est de se demander ce que l'Europe peut faire pour nous. Mais il faut toujours se poser la question de ce qu'on peut faire pour l'Europe aussi. » (Emmanuel Macron, le 9 mai 2024).


 


Cette année 2024, la Fête de l'Europe est un jour férié ! J'ai un peu la flemme de vérifier mais il me semble bien que c'est la première fois que cela arrive (non, en fait, c'est la quatrième fois, voir plus loin). Il n'y a pas de miracle et cette fête n'est en général pas un jour férié (ce qui est regrettable), mais cette année, par les coïncidences du calendrier, le 9 mai (qui est donc la fête de l'Europe) correspondant aussi au Jeudi de l'Ascension, fête religieuse que même les athées les plus irréductibles se satisfont de "célébrer" parce qu'il est un jour férié. Et la date correspond également au 150e anniversaire de la naissance du célèbre égyptologue Howard Carter.

Avec la fête de l'Armistice le 8 mai, cela nous donne, nous les Français, un week-end (8-9 mai) en plein milieu d'une semaine. Certains veulent la semaine à quatre jours, les hasards du calendrier proposent ainsi la semaine à trois jours, ou plutôt, la semaine aux trois week-ends ! Notons au passage que le 9 mai est chômé également en Russie dont c'est la principale fête nationale dans l'année, parce qu'il célèbre l'Armistice de 1945 (le décalage avec le 8 mai, c'est que la signature a eu lieu la nuit, et c'était déjà le 9 mai 1945 à l'heure de Moscou).

Le Jeudi de l'Ascension est une fête chrétienne importante puisqu'il célèbre l'élévation au Ciel de Jésus-Christ, qui était ressuscité. Cet événement a lieu quarante jours après Pâques (le jour de sa résurrection), cette année le 31 mars. Il ne s'agit pas du ciel au sens cosmique du terme, mais du Royaume de Dieu, invisible et présent. Dans les Actes des Apôtres, il est dit qu'au cours d'un repas, le Christ ressuscité annonce aux apôtres qu'ils vont recevoir une force nouvelle, « celle du Saint-Esprit » : « Alors, vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la Terre. ».


Et le texte continue ainsi : « Après ces paroles, ils le virent s’élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée. Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en allait, voici que deux hommes en vêtements blancs se tenaient devant eux et disaient : "Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel". ». Et saint Luc ajoute que les apôtres « retournèrent à Jérusalem, remplis de joie ». L'esprit Saint-Esprit "arrive" sur les apôtres le jour de la Pentecôte, dix jours plus tard, donc un dimanche.

J'ai finalement vérifié (j'ai des scrupules à ne pas être rigoureux) et l'Ascension le 9 mai a été finalement assez fréquente ces dernières décennies puisque cela a été le cas en 1991, en 2002 et en 2013. Au XXe siècle, il y a eu encore en 1907, en 1918 en en 1929, et il n'y en aura plus d'autre cas jusqu'en 2050 au moins. Mais ce qui compte, c'est à partir du 1985 puisque c'est seulement le 9 mai 1985 qu'on a fêté pour la première fois l'Europe.

Pourquoi cette date ? Parce qu'elle commémore le grand discours de Robert Schuman qui a jeté les bases, le 9 mai 1950, de l'Europe actuelle, un discours qui allait construire l'Europe du charbon et de l'acier et qui avait pour objectif : dès lors que l'Allemagne et la France produisaient en commun le charbon et l'acier, il serait impossible matériellement de se faire la guerre. Par la suite, on a très vite proposé la Communauté Européenne de Défense (CED), bien avant le Traité de Rome et la Communauté Économique Européenne, mais elle ne s'est pas concrétisée à cause des députés français, si bien qu'aujourd'hui encore, on manque de cette fameuse Europe de la Défense qui commence à se faire, les pays européens prenant conscience de son importance stratégique avec la guerre qu'a déclarée la Russie à l'Ukraine et le probable désengagement militaire américain de l'Europe.

Plutôt que de parler de Fête de l'Europe (qui, par ailleurs, se trouve à un mois des élections européennes du 9 juin 2024), il vaut mieux parler de Semaine de l'Europe et de la France. En effet, avec l'Europe, la veille, on fêtait bien sûr le 79e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Plus personne n'a parlé de la der des der en 1945, et pour cause. Et la situation actuelle n'est pas particulièrement ouverte à l'optimisme (mais soyons optimiste quand même !).


Le 7 mai 2024, les amateurs de musique et de l'Europe ont célébré à Vienne le 200e anniversaire de la création de la Neuvième Symphonie de Beethoven dont l'Union Européen a repris l'Hymne à la joie pour en faire un très émouvant hymne européen, tout à fait dans l'esprit du célèbre compositeur. Le texte de cette symphonie provient du poète allemand Schiller et est joyeux : « Joyeux, comme ses soleils volant à travers le somptueux dessein du ciel, hâtez-vous, frères, sur votre route, joyeux comme un héros vers la victoire ! ». Un hymne toujours vibrant et émouvant.

L'Europe est présente aussi dans les fiertés françaises de cette semaine. La première fierté est dans la réception du Président chinois Xi Jinping par la France et son Président Emmanuel Macron qui a, une fois encore, bien assuré pour les intérêts français et européens. Une importante visite d'État de deux jours, les 6 et 7 mai 2024, avec une visite aux Invalides le lundi, et dans les Pyrénées le mardi (il neigeait !). Au-delà du dialogue franco-chinois, il y a aussi le dialogue euro-chinois. Ce n'est pas un hasard si le Président chinois a choisi la France pour rencontrer aussi l'Europe, en ce sens que la Président de la Commission Européenne Ursula von der Leyen s'est rendue à Paris le lundi matin pour une réunion de travail à trois, Chine, France et Union Européenne. Il y a de quoi être fier d'être Français, car Emmanuel Macron est devenu l'interlocuteur incontournable du monde moderne, le leader incontesté de l'Europe.

 


Certes, au-delà des sourires diplomatiques, la réalité politique et économique est certainement moins rose et Xi Jinping s'est rendu ensuite en Hongrie, afin aussi de diviser l'Europe, et de faire un clin d'œil à Vladimir Poutine qui, lui, le 7 mai 2024, était investi pour un cinquième mandat de Président de la Fédération de Russie pourtant limité à deux dans la Constitution de la Fédération de Russie. Néanmoins, la Chine est dans une géopolitique de plus grands ensembles et souhaite avant tout détourner l'Europe des États-Unis. À ce propos, lors de la visite du numéro un chinois à Paris, où étaient donc les manifestants pour protester contre la répression des Ouïghours, ceux-là même si prompts à s'indigner, parfois violemment, pour les Palestiniens parfois au prix de la perception d'un soutien implicite aux terroristes du Hamas ?
 


Je garde pour la fin la matière à d'autres fiertés françaises jusqu'à la fin de l'été : les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) qui se tiendront à Paris cet été. La première étape des festivités a eu lieu ce mercredi 8 mai 2024 dans le port de Marseille : le Belem a accosté avec la flamme olympique ! On pourra dire ce qu'on veut, dénigrer les JOP parce qu'on est râleur professionnel (jamais content) ou parce qu'on déteste Emmanuel Macron (je doute que les sportifs français qui vont participer aux JOP aient tous voté pour Emmanuel Macron !), la fête de mercredi fut une très belle fête.

Au-delà de la France, il y a Marseille et on sait l'attention soutenue que porte le Président de République à la deuxième ville de France. Ce n'est pas Marseille mais les Marseillais qui sont en fête, et qui apportent le sourire à tout ce qu'ils touchent. Ce n'est pas nouveau et les Marseillais sont joyeux de voir que leur ville est enfin citée dans les actualités autrement que pour un règlement de compte entre deux bandes rivales. Cette bonne humeur devrait être le standard de la France de l'été 2024, la joie devrait l'emporter sur la politique politicienne parce que fêter le sport n'est pas si fréquent. Certes, il y a eu quelques aventures footballistiques au plus haut niveau, qui ont incarné la communion nationale, mais ces moments de liesse restent très rares. Les Marseillais, dans les rues, partout, dans les stations de métro, etc., avaient déjà montré leur bonne humeur lors de la visite du pape François le 23 septembre 2023, parce que Marseille est prise en considération comme une métropole elle aussi incontournable dans le monde moderne.
 


La fête du Belem, c'était donc la fête du sport, la fête des Jeux Olympiques et Paralympiques, la fête de la France bien sûr, mais aussi la fête de la beauté. On croirait presque à un tableau de Turner, en voyant le Belem arriver avec ses parures tricolores. Le journaliste Renaud Pila ne cachait pas son enthousiasme, partagé par de nombreux autres de ses confrères : « Quelle idée magnifique de faire arriver la flamme sur le Belem, à Marseille. Les images de la journée vont être dingues. Ça ne vous met pas de bonne humeur ? » (Twitter).

Notons d'ailleurs que c'est bien le drapeau tricolore qui a accompagné la flamme olympique sans y voir de couleur de l'Europe. Jamais l'Europe n'a eu l'intention de diluer la nation française.
 


C'est le sens du message d'Emmanuel Macron, présent à Marseille ce 8 mai 2024 : « Je veux que nos compatriotes se représentent que c'est un moment d'unité et qu'on en est capables, et qu'on peut en être fiers. Et se représenter à nous-mêmes, nous représenter à nous-mêmes, que nous savons organiser cela, que quand on se met tous ensemble autour de la table, qu'on mêle nos énergies, le sport, la culture, les plus grands artistes, les plus grands sportifs, la sécurité, la gastronomie, l'art, nos paysages, nos élus, on fait ce qu'il y a de plus beau au monde. Et ça, on doit être fiers. Vous savez, j'ai cette petite pièce dans les mains, je voulais vous la montrer aujourd'hui à Marseille. C'est une pièce qu'on a fait avec la Monnaie de Paris, spécialement. Il y a 24 millions de ces pièces qui ont été battues, et elle a été offerte à nos enfants. (…) Il y a 4 millions d'enfants à l'école primaire qui l'ont eue avec un petit kit qu'on a fait sur les Jeux Olympiques et Paralympiques. Et vous avez représenté la Tour Eiffel qui court, Notre-Dame qui est là, représentant Marseille, la fleur de Tahiti. C'est ça, la France, qui unit sa première, sa deuxième ville, même si parfois elles sont en compétition ou divisées, sur un terrain de foot ou ailleurs, la France métropolitaine et ultramarine, derrière ces Jeux et les soixante-treize villes qui vont accueillir des épreuves et des athlètes. C'est notre force, cette unité, c'est l'esprit des Jeux. Et c'est aussi pour ça qu'on a voulu cette trêve olympique autour des Jeux Olympiques et Paralympiques. Et ce sera l'initiative diplomatique qu'on va déployer : des Jeux pour la paix. ».

Jamais la France n'a été aussi divisée qu'aujourd'hui, il y a la France des rigolus et la France des tristus. Il y a une façon de s'unir. Soyons des rigolus ! Soyons fiers de notre Nation, de notre pays !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (09 mai 2024)
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Pour aller plus loin :
L'hymne à l'Europe.
Le Jeudi de l'Ascension.
Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
Le Tunnel sous la Manche.
Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
La convergence des centres ?
Élections européennes 2024 (1) : cote d'alerte pour Renaissance.
Valérie Hayer, tête de la liste Renaissance.
Charles Michel et Viktor Orban : l'Europe victime d'une histoire belge !
Jacques Delors : il nous a juste passé le relais !
Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
Le 8 mai, l'émotion et la politique.
Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
L’inlassable pèlerin européen Emmanuel Macron.
Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
Enfin, une vision européenne !
Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !

 





https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240509-ascension.html

http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/10/article-sr-20240509-ascension.html




 

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13 février 2024 2 13 /02 /février /2024 04:41

« Mais toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. » (Jésus dans l'Évangile selon saint Matthieu, Mt 6, 1-6.16-18).



 

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Le hasard des calendriers fait que cette année, le jour de la Saint-Valentin, le mercredi 14 février 2024, se trouve être également le mercredi des Cendres, ce qui est plutôt rare. Une sorte d'association un peu paradoxale. Une autre année, ça pourrait être le jour du Mardi-Gras (la veille), ce qui aurait plus de signification. Mardi-Gras et Saint-Valentin riment plutôt avec joie. Pour les Cendres, c'est un peu différent.

D'abord, rappelons ce qu'est le mercredi des Cendres. Nous sommes dans un pays catholique, et même, la France est la fille aînée de l'Église depuis Clovis, mais dans cette société quasi-totalement déchristianisée, où l'on préfère annoncer le début du Ramadan au début du Carême, on se demande de quelles origines on vient. Il y a quelques années déjà, des sondages trottoirs (donc, pas représentatifs mais quand même) montraient une totale ignorance de la signification non pas des Cendres ou du Vendredi Saint, mais de Pâques, qui est la principale fête chrétienne (même plus importante que Noël). Je n'ose donc voir les réponses que dirait un sondage sur la signification des Cendres.

Les Cendres est le premier jour du Carême. C'est une période qui retrace la fameuse traversée du désert de Jésus-Christ pendant quarante jours avant ce qu'on appelle la Passion (la Semaine Sainte, des Rameaux à Pâques). Le Carême est l'occasion d'un jeûne, mais le jeûne ne signifie pas mettre en danger sa santé (même si c'est finalement plutôt le non-jeûne qui mettrait en danger la santé dans cette société du trop-manger). Il s'agit plutôt d'une période de privation, de donation, de méditation, de contemplation.

En somme, de faire un effort pour mieux vivre, mais surtout, mieux vivre avec les autres, c'est-à-dire que la privation n'a pas un but narcissique (être en meilleure santé, par exemple) mais un but altruiste, d'amour du prochain. Les privations qu'on pourrait faire (ne pas manger de viande, par exemple) n'a du sens que si les dépenses liées à la viande, par exemple, amèneraient à donner l'équivalent à ceux qui en ont le besoin. C'est un exemple, mais il n'est pas seulement matériel, il peut être relationnel ou psychologique ou autre (faire des efforts pour ne plus s'énerver, par exemple, ou prendre plus de temps pour les autres, etc.). À chacun son Carême.


Dans la liturgie, l'Évangile lu au Cendres cette année reprend cette parole connue : « Que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite ! ». Quand j'étais petit, je m'amusais à la mettre en relation avec la gifle, si on te gifle une joue, présente l'autre joue, et je me disais : la main gauche ignore que la main droite a giflé. Trêve de souvenir, disons que cette parole est surtout une parole d'humilité. Il n'y a pas de don qui soit narcissique, d'autant plus qu'il est connu que donner fait plaisir (sur les petites boîtes de distributeurs automatiques de la foire attractive que je fréquentais, était indiquée l'expression "plaisir d'offrir").

Le vrai don est donc secret, ce qui peut être commode : on ne peut juger personne puisqu'on ne sait pas à quel point cette personne peut avoir donné, peut s'être donnée. Cela va un peu à l'opposé des temps actuels quand des émissions de télévision étalent les stars pour encourager à donner (pour diverses causes, toutes bien sûr louables). Quand un chanteur ou un acteur fait un gros chèque sous les flashs des projecteurs, je pense toujours à cette phrase écrite de l'Évangile, en sachant en plus que jamais un acte public est gratuit pour la réputation d'une star, il y a toujours une arrière-pensée commerciale (pour une personnalité politique, remplacez "commerciale" par "électorale"), même si cela n'empêche pas la sincérité et la générosité (la main sur le cœur). Cela dit, la star est aussi un modèle, un exemple, et son don pourrait encourager ceux qui aiment la star à donner, eux aussi, dans un réflexe un peu moutonnier sinon pavlovien.

Aux Cendres, il y a aussi une première lecture avec un extrait du livre de Joël (Jl 2, 12-18) qui commence ainsi : « Parole du Seigneur : "Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil !". Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d'amour, renonçant au châtiment. ». Suivie de ce psaume (Ps 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14-17) : « Lave-moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense. (…) Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. Ne me chasse pas loin de ta face, ne me reprends pas ton esprit saint. Rends-moi la joie d'être sauvé ; que l'esprit généreux me soutienne. ».

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Déchirer son cœur, laver son cœur, c'est cela, le principe du Carême. Pendant les Cendres, on appose sur le front de chaque fidèle une petite croix faite en cendres (des cendres issues des branches de rameaux de l'année précédente), histoire de rester humble et de se rappeler qu'on est poussière et qu'on redeviendra poussière.


Mais on parle aussi de purifier son cœur. Ce qui est une bonne transition pour évoquer la Saint-Valentin le même jour en 2024. C'est la fête des cœurs. C'est la fête des amoureux, et donc, c'est un peu stupide toutes ces publicités qui proposent de déclarer sa flamme à la Saint-Valentin : c'est trop tard, il faut le faire avant. Bon, c'est vrai, c'est d'abord une fête commerciale, mais j'ai l'impression que la pression commerciale est moins forte que les années précédentes (ou je me trompe, juste une impression).

Les gens aimants n'ont pas besoin de Saint-Valentin, ou alors, ils ont besoin d'une Saint-Valentin chaque jour. C'est lorsque l'amour est naissant que cette journée est un test, test pour connaître l'élégance de l'attention portée à l'autre. Évidemment, cela peut finir en un gueuleton, quelques fleurs, et plus si affinités, mais c'est une sorte de journée en rose pour cœurs en pleine espérance (le rose, revoir l'excellent film "Drôle de frimousse" de Stanley Donen, sorti le 13 février 1957, avec l'inégalable Audrey Hepburn dansant et chantant dans Paris sur une musique de Gershwin).

Je conçois que les personnes isolées, qui n'ont plus d'amour dans la vie, peuvent ronchonner contre ce type de fête qu'elles diraient artificielle, et elles peuvent avoir raison, artificielle et commerciale, mais cette journée montre aussi que l'amour n'est pas réservé à une élite (heureusement, même les pauvres y ont droit !! et l'argent ne remplacera jamais le verbe aimer), car il s'adresse à tout le monde, à tout âge (j'oserais écrire aussi tout sexe), et surtout, à tout physique, même ingrat (car il n'y a pas que la beauté extérieure, n'est-ce pas ?).


Pas étonnant de fêter les amoureux en février : c'est généralement aussi la période de fécondité, qui n'a pas eu ou entendu des chats qui miaulent drôlement en cette période ? Maintenant que le Président de la République (lui et ses prédécesseurs) s'est enfin inquiété de la baisse de la natalité (à l'instar de Michel Debré depuis le début des années 1970), peut-être que l'État pourrait faire de la Saint-Valentin un jour férié ? Bon, c'est vrai, ce serait comme si on "aimait" un seul jour dans l'année.

Concomitance. On peut retomber sur ses pattes en retrouvant l'origine de la fête de la Saint-Valentin. Car c'est une origine religieuse, bien sûr, catholique. Valentin de Terni était un prêtre du IIIe siècle, sous le règne de l'empereur romain Claude II le Gothique. Valentin célébrait des mariages d'amour clandestinement. Quand l'empereur l'a su, il l'a arrêté (car il préférait amener les hommes à la guerre qu'à l'amour), mais en prison, Valentin a fait la connaissance de Julia, la fille de son gardien, qui était aveugle de naissance, et à qui il a rendu la vue, ce qui a décidé l'empereur, de rage, à l'exécuter par décapitation le 14 février 269 à Rome. La famille de la miraculée s'est alors convertie au christianisme pour rendre hommage à Valentin.


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À la chute de l'empire romain, Valentin fut canonisé en 495 par le pape Gélase Ier pour son sacrifice et célébré comme fête de l'amour le 14 février dans un but particulier. En effet, à la même époque (milieu du mois de février) se déroulaient les Lupercales qui étaient une fête romaine de la fertilité. Une fête terrible pour les jeunes filles célibataires puisque les hommes couraient après elles pour faire l'amour et enfanter (c'était en fait plutôt la fête du viol, la fête des gros dégueulasses).


Le pape ne voulant pas cautionner une telle fête païenne a créé sa propre fête chrétienne qui est devenue la fête des amoureux avec le pape Alexandre VI en 1496. Comme Noël (début de l'hiver) et Pâques (début du printemps et de l'année), une fête chrétienne a remplacé une fête païenne, mais finalement, ce sont les mêmes. La tradition commerciale commença vers 1840 aux États-Unis avec l'envoi de poèmes, cartes de vœu et messages d'amour. Elle s'est amplifiée après la Seconde Guerre mondiale.

Épilogue morbide (que je cite car je suis allé visiter les deux premier lieux suivants) : la tête de saint Valentin aurait été transférée au Xe siècle à la très belle abbaye de Saint-Michel de Cuxa, dans les Pyrénées, puis aurait été déplacée sous la Révolution à l'église Saint-Pierre de Prades (drôle de coïncidence, le maire de Prades a longtemps était... Jean Castex, de 2008 à 2020 !). D'autres reliques ont été transférées en 1868 à la collégiale Saint-Jean-Baptiste de Roquemaure et en 1874 à l'église Saint-Remy de Montignies-sur-Sambre (en Belgique).

Avec la Saint-Valentin et les Cendres le même jour, c'est donc l'occasion, dans un couple, de faire un peu plus d'effort d'attention à l'autre pour nourrir un amour qui a toujours besoin de création permanente pour durer. L'amour est un feu, il faut l'alimenter... et ça donne des braises puis de la cendre !


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (11 février 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Rose cendre.
Il est venu parmi les siens.
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Les messes à l’épreuve du covid-19.
Il regarde le soleil dans tes yeux !
Pâques 2020, le coronavirus et Dieu…
Réflexions postpascales.
La Passion du Christ (1) : petites réflexions périphériques.
La Passion du Christ (2) : quel est le jour de la mort de Jésus ?
Noël à la télévision : surenchère de nunucheries américaines.

Le Messie, c'est tout de suite !
La Passion du Christ selon saint Matthieu (texte intégral).


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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240214-cendres-saint-valentin.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/rose-cendre-252744

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2024/02/12/40202994.html
















 

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31 octobre 2023 2 31 /10 /octobre /2023 04:46

« La Toussaint est le jour où les morts de demain visitent ceux d'hier. » (Henri Duvernois, écrivain mort en 1937).




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Et voici qu'arrive Halloween avec son cortège d'enfants déguisés en quête de friandises. Disons-le clairement, je suis né trop tôt et si j'avais eu quelques années (enfin, quelques décennies !) de moins, j'aurais adoré me déguiser en vieux sorcier et aller sonner à la porte de mes voisins pour y faire l'aumône de quelques sucreries (même si mon cerveau a du mal à trouver un intérêt intellectuel à Harry Potter, toujours ce problème de génération, sans doute). Dans les magasins, on passe au noir et à l'orange et j'ai même vu un magasin très connu d'électroménager qui a imposé à ses vendeurs de se déguiser eux-mêmes en vampires (les pauvres ! Je comprends pour les magasins de jouets, mais les autres ?). Avant de passer au rouge et vert, les couleurs de Noël.

Bref, je trouve cette fête d'Halloween plutôt bon enfant et sympathique. À cause du niveau de vigilance accrue pour risque terroriste, les rassemblements doivent être très sécurisés (par les forces de l'ordre), mais je considère comme un devoir de continuer ce petit rite social sans conséquences : continuer absolument à vivre normalement, à s'amuser, à rester insouciants. Les terroristes n'attendent qu'une chose, qu'on se terre et qu'on ait peur. Dans ma commune, les enfants se rassemblent à 18 heures puis se dispersent pour aller visiter seulement les maisons qui ont indiqué qu'elles avaient des bonbons pour eux (ainsi, ils ne gênent personne).

Halloween n'est-il pas une invasion de la culture américaine ? Bien sûr, oui, c'est sûr, même si, en y regardant de plus près, cette fête était à l'origine européenne, celte, irlandaise, gauloise. C'est la grande émigration irlandaise à la suite de la famine de 1845 qui a apporté cette coutume aux États-Unis. Qu'elle nous revienne en France à partir des années 1990 après avoir retraversé l'Atlantique n'est donc ni très exceptionnel ni très scandaleux, surtout si l'on comprend qu'elle est avant tout un événement commercial (il faut bien s'équiper pour la fête). Même en Russie, elle fait une percée malgré les réticences de l'Église orthodoxe (la fête est désormais interdite dans les écoles à Moscou).

La diffusion massive de téléfilms américains nunuches sur la période de Noël à la télévision française me paraît beaucoup plus grave pour notre santé mentale qu'une petite fête censée s'amuser à se faire peur. Halloween concurrence-t-elle la Toussaint ? Là encore, pourquoi opposer des torchons et des serviettes ? La Toussaint est l'un des jours fériés (et fêtes religieuses) les plus meurtriers sur les routes de France avec la Pentecôte. Malgré la déchristianisation de la société, ces fêtes se sont laïcisées et sont devenues des références majeures dans le calendrier civil.

À l'origine, la Toussaint était fêtée le 13 mai à partir de 610, entre Pâques et la Pentecôte ; le pape Boniface IV voulait célébrer tous les martyrs de l'Église catholique. Par la suite, la date a changé en 1er novembre et le pape Grégoire IV l'a généralisée. Attention à ne pas faire de contresens : la Toussaint n'est pas la fête des morts, mais la fête des saints, pas seulement les personnes canonisées, nombreuses mais d'une proportion très faible, aussi tous les anonymes, tous les inconnus qui ont vécu comme des saints, dans la charité, la piété et la bonté (selon l'ancien archevêque de Toulouse, Mgr Robert Le Gall, ceux qui sont « dans la béatitude divine »).

Dans la liturgie, au cours de la messe, tous les saints sont célébrés, dans une longue litanie. Quand j'étais enfant, j'attendais mon prénom et je ne l'attendais jamais en vain. Je doute maintenant que tous les enfants y trouvent le leur aujourd'hui, car le nombre de prénoms, outre le fait que beaucoup ne sont plus chrétiens, voire sont musulmans (ce qui ne me gêne pas du tout, c'est le choix intime des familles), est devenu beaucoup plus important, les prénoms sont beaucoup trop diversifiés pour pouvoir citer tout le monde (il y a cinquante ans, le prénom le plus répandu dans une génération correspondait à 30% des naissances, maintenant, à peine à 5%).

La fête des défunts a lieu le lendemain, le 2 novembre, célébrée à l'origine par les moines de Cluny et leur abbé, saint Odilon de Cluny, en 998 comme fête des trépassés. Le pape Léon IX approuva cette initiative et l'encouragea. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, même cette fête des défunts n'est pas une fête de la mort mais une fête de la vie, parce que pour les chrétiens, les défunts ont franchi une étape mais sont toujours en vie : « Ceux qui sont passés sur l'autre sont aussi, et davantage, vivants que nous. » explique le Missel de la vie chrétienne.

Personnellement, j'ai toujours été un peu étonné de la forte fréquentation des cimetières pendant la Toussaint. Je pense à "mes" morts tous les jours. Et en tout lieu, certainement pas dans les cimetières dont j'adore la fréquentation mais pour d'autres raisons, pour les tombes, les inscriptions historiques. Les êtres, les âmes, selon ce qu'on croit, s'ils sont toujours là, ou simplement leurs souvenirs pour être plus factuel, sont assurément hors de ce qui reste de leur corps qui n'est plus qu'une simple écorce sans vie (il suffit de voir un corps sans vie pour s'en convaincre ; la flamme, si flamme il y a encore, est ailleurs).

Le poète Tristan Maya (mort en 2000) avait cette formule : « Un cimetière un jour de Toussaint ressemble à une exposition un jour de vernissage. ». Tandis que Jean Cocteau, plus cynique : « Le vrai tombeau des morts, c'est le cœur des vivants. ». La liturgie, elle, propose à la Toussaint le très beau texte des Béatitudes : « (…) Heureux les affligés, car ils seront consolés (…) ; heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu (…). ». Texte que beaucoup interprètent mal, plus ou moins volontairement (« heureux les pauvres en esprit »).

En effet, la Toussaint, c'est la fête de tous les saints ; il faut comprendre que tout le monde peut être saint, que tous les humains peuvent l'être s'ils ont, pour règles de vie, amour, bonté, justice, pardon et paix : « Cette fête est donc aussi l’occasion de rappeler que tous les hommes sont appelés à la sainteté, par des chemins différents, parfois surprenants ou inattendus, mais tous accessibles. La sainteté n’est pas une voie réservée à une élite : elle concerne tous ceux et celles qui choisissent de mettre leurs pas dans ceux du Christ. » explique le site catholique.fr.

Justice, pardon et paix : pas de paix sans justice et pardon. C'est sans doute ce qui manque le plus de nos jours, dans nos petits conflits ou dans les conflits actuels les plus meurtriers, que l'on pense à l'Ukraine ou à Israël et à la Palestine, entre autres...


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (28 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Toussaint vs Halloween ?
Apocalypse à la Toussaint ?
Joyeux Noël !
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Noël à la télévision : surenchère de nunucheries américaines.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20231031-toussaint-halloween.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/toussaint-vs-halloween-250949

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26 septembre 2023 2 26 /09 /septembre /2023 05:22

 

« Le véritable mal social n'est pas tant l'augmentation des problèmes que le déclin de la prise en charge. » (pape François, le 23 septembre 2023 à Marseille).



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Je consacrerai plusieurs articles sur la venue du pape François à Marseille les 22 et 23 septembre 2023, une venue historique à bien des égards qui rappelle aux chrétiens que la foi déplace toujours des montagnes, que l'émotion qui était au rendez-vous n'est pas sans rapport avec une communion très large, rappelons que catholique veut dire universel, et qui rappelle aussi aux aigris de droite comme de gauche qu'un message de foi n'a pas grand-chose à voir avec un message politique ; vouloir mélanger les deux, c'est confondre ce qui est du temporel et ce qui est du spirituel. Rends à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu.

Le pape est venu pour un jour et demi sur le sol français, c'est bien peu et en même temps, il a eu le temps de parler publiquement à près d'une dizaine d'occasions. Trois temps forts : le recueillement œcuménique à Notre-Dame de la Garde le vendredi après-midi, la clôture des Rencontres Méditerranéennes le samedi matin et, enfin, la grande messe au stade Vélodrome, une fierté des Marseillais, le samedi après-midi.

Impossible de parler du pape sans évoquer quelques aspects politiques : le Président de la République Emmanuel Macron était là le 23 avec le pape ; la veille, la Première Ministre Élisabeth Borne l'a accueilli à l'aéroport de Marignane. La clôture des Rencontres Méditerranéennes se faisait en présence non seulement du couple présidentiel, mais aussi du maire de Marseille Benoît Payan (PS), de son prédécesseur Jean-Claude Gaudin, qui avait tant voulu accueillir le pape lorsqu'il était en fonction, aussi du président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier, etc. À la messe étaient présents également le couple présidentiel (Emmanuel Macron a tenu à ne pas communier, et il a tenu à le faire savoir), la présidente de la BCE Christine Lagarde, et beaucoup d'autres responsables politiques dont Gérald Darmanin, Muriel Pénicaud, Sabrina Agresti-Roubache, François-Xavier Bellamy, Valérie Boyer, etc.

J'évoquerai ultérieurement les propos du pape sur les réfugiés et leur accueil, ainsi que sur la laïcité. Le message du pape sur l'immigration n'est pas nouveau mais a hystérisé la classe politique française, parfois à contre-sens : le bouffe-curés Jean-Luc Mélenchon applaudissait tandis que certains identitaires d'extrême droite qui se revendiquent une supposée origine chrétienne nient la légitimité du pape puisqu'il ne va pas dans leur sens ! Quelle paradoxe de devoir admettre que le chef de l'Église catholique, institution doublement millénaire, va à l'inverse d'une pensée supposée catho... mais d'extrême droite.

Le message du pape n'a jamais varié sur l'accueil des réfugié, même du temps de Jean-Paul II. Les identitaires (je les appelle comme ça) sont ainsi face à leurs propres contradictions et ils ont beau affirmer que le clergé est gauchiste (voire bobo), c'est bien mal connaître nos évêques (et notre pape) dont la neutralité politique est aussi sensible que la neutralité religieuse chez les politiques.

Le message du Christ a toujours été dérangeant, en particulier pour les institutions. Tant qu'existeront la misère humaine et l'horreur humaine, les pouvoirs seront malmenés par ceux qui défendent les humains et en particulier les plus faibles, les plus démunis.

Ce qui faut bien noter aujourd'hui, et c'est un vrai signe d'évolution idéologique depuis une trentaine d'années (je ne saurai dire si c'est positif ou négatif), c'est que si la venue du pape en France a toujours été un sujet à discussion politique, voire à polémiques, les thèmes sensibles ont assurément changé de rives. Dans les années 1990, on reprochait à Jean-Paul II d'être contre l'avortement mais aussi contre la peine de mort, et le mariage des prêtres, les femmes prêtres restaient des marronniers qui faisaient le succès des médias, même si cela représentait une toute petite part des messages du pape. Aujourd'hui, ces sujets (qui n'ont pas varié) sont relégués derrière le sujet du moment (qui était pourtant déjà d'actualité dans les années 1970), l'immigration. À aucun moment le pape François n'a voulu donner des leçons de morale, il a simplement donné des leçons de bonté et de bienveillance. Le contraire de la haine si présente aujourd'hui dans le débat public.

La présence du Président Emmanuel Macron avait son intérêt : certes, pour sa communication personnelle, il était évident, surtout lorsque le pape l'a publiquement placé parmi les personnes de bonne volonté qui recherchent la paix (parmi d'autres, donc), mais cela permettait aussi au pape de s'adresser directement à lui en marquant date.

Si l'immigration était le thème majeur de ces Rencontres Méditerranéennes, c'est bien sûr qu'elle est l'un des sujets majeurs de cette mer cimetière, mais cela ne signifiait pas que d'autres messages ne pouvaient pas être transmis. En particulier sur la fin de vie et l'euthanasie.

Dans son discours de clôture de ces Rencontres, le pape François a évoqué implicitement d'autres sujets qu'il considère comme majeurs sans pour autant les développer. Évoquant les trafics et les mafias dans une des villes les plus "torrides", François a constaté : « Là où il y a précarité il y a criminalité : là où il y a pauvreté matérielle, éducative, professionnelle, culturelle, religieuse, le terrain des mafias et des trafics illicites est déblayé. L'engagement des seules institutions ne suffit pas, il faut un sursaut de conscience pour dire "non" à l'illégalité et "oui" à la solidarité, ce qui n'est pas une goutte d'eau dans la mer, mais l'élément indispensable pour en purifier les eaux. ».


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C'est à cette solidarité que le pape a appelé pour accompagner les personnes, nos aînés généralement, en fin de vie. Sa question (laissée sans réponse et sans développement) n'en est pas moins crûe : « Qui écoute les gémissements des personnes âgées isolées qui, au lieu d'être valorisées, sont parquées dans la perspective faussement digne d'une mort douce, en réalité plus salée que les eaux de la mer ? ». Une critique à peine "voilée" des conditions souvent scandaleuses des personnes âgées dans les EHPAD et la volonté majoritaire d'une société à vouloir les faire disparaître jusqu'à physiquement.

Ce thème de la fin de vie et de l'euthanasie est majeur et aujourd'hui, le risque est grand que l'équilibre fragile mais précieux de la loi Claeys-Leonetti du 2 février 2016 soit cassé définitivement par une nouvelle loi plus démagogique que sage.

Car l'euthanasie est d'abord une demande de gens bien-portants. En effet, les personnes malades en fin de vie demandent rarement (il en existe, mais c'est rare) d'en finir avec la vie, il suffit de se renseigner auprès des médecins qui vivent ces moments douloureux de leurs patients, d'autant plus qu'aujourd'hui, il y a des solutions, principalement chimiques, pour empêcher ce qui doit être à tout prix évité, la souffrance.

C'est même plus que cela : les personnes en fin de vie qui sont aimées, accompagnées par des proches, n'invoquent jamais cette volonté d'être aidées à mourir parce qu'elles se sentent aimées, et donc, en quelque sorte, utiles. L'euthanasie, c'est quand on arrive à la conclusion, monstrueuse, que la vie ne vaut plus d'être vécue. À quel moment, à quel seuil une vie ne doit plus être vécue ? Dès lors qu'on fixe un seuil, les abus afflueront parce que c'est la loi humaine de dériver : la levée des interdits, c'est une digue qui s'ouvre et qui ensuite lâche, malgré toutes les précautions juridiques ou sociales qu'on inventera.

La loi interdit la souffrance et l'obligation de soins : depuis plus de vingt ans, le patient n'est soigné que s'il a donné son accord. Et la loi oblige les médecins à traiter la souffrance ; la plupart du temps, celle-ci peut être traitée.

Il existera toujours des cas où ce n'est pas possible d'éviter la souffrance. L'euthanasie peut s'avérer une solution ultime et si elle est choisie, elle doit se faire dans le secret des consciences, pas seulement de la famille et des soignants, mais cela arrive même que dans la "boucle", il y ait aussi un prêtre.

Pourquoi dans le secret des consciences et pas dans la loi ? C'est là, je crois, l'enjeu du choix de société. Le secret des consciences serait une hypocrisie ? Certains lobbyistes de l'euthanasie vont même jusqu'à dire que légiférer éviterait les dérives. Mais quelles dérives ? Celles que connaît aujourd'hui la Belgique où des personnes atteintes de déficience mentale, sans leur avis, sont euthanasiées parce que "ne servant plus à rien" (l'utilité d'une vie, un sujet à méditer), ou alors des enfants en pleine dépression ?


Les dérives existent et aujourd'hui, lorsque c'est illégal, cela passe par la justice. Il n'y a pas de généralité à faire sur la mort : il y a autant de fins de vie que d'humains, toutes sont différentes et légiférer, c'est de faire des généralisations qui ne doivent pas avoir lieu. Comment éviter l'infirmière meurtrière qui "aidait" ou plutôt accélérait ses patients à mourir pour des questions d'héritages et de legs si la loi le permettait officiellement ? L'illégalité de l'euthanasie permet un retour à la justice lorsque les situations ne sont pas claires, lorsqu'un proche s'étonne voire s'y oppose : aucun juge n'a condamné un soignant qui avait fait preuve d'humanité en précipitant la mort d'un patient en situation très difficile. Le juge, par son enquête approfondie, peut apprécier la sincérité de l'acte, le désintéressement aussi des personnes en cause, car une légalisation ouvrirait une boîte de Pandore sur l'économique : les héritiers pressés, comme les assureurs, les caisses de retraites, les caisses d'assurance maladie, toute la société ferait des économies énormes si les gens mouraient six mois plus tôt !

Les fins de vie dans la douleur, ce n'est pas de supprimer la personne qui souffre, c'est de supprimer la douleur. C'est cela la solidarité et l'accompagnement, au sens de ce que disait le pape ce samedi. Ne pas laisser les personnes âgées isolées, dans leur torpeur du couloir de la mort, les remettre dans le cercle des vivants, et heureusement, certains établissements le font et ce sont des initiatives très encourageantes, notamment lorsqu'on demande aux personnes âgées de s'occuper des petits enfants... et réciproquement.


En évoquant en outre la fausse dignité (« faussement digne »), le pape s'offusque également de cette expression pourrie de "mourir dignement", comme si, en laissant l'heure arriver à son terme, on n'était pas digne, plus digne, que des personnes en vie n'étaient plus dignes de vivre et que leur dignité se résumait à les faire mourir.

Oui, ce pape, comme tous les papes, du moins depuis qu'ils communiquent au monde grâce à leurs voyages et aux technologies, secoue les consciences parce que son job, ce n'est pas de rechercher des voix, de faire du clientélisme, de brosser dans le sens du poil toutes nos petites lâchetés. C'est de rappeler les fondamentaux (le fondamental, c'est "aimez-vous les uns les autres"), et dans un monde en crise multiple, où l'inquiétude du lendemain l'emporte souvent sur la sagesse et l'optimisme, un référent est un point d'ancrage salutaire pour une société à la dérive.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (23 septembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Le pape François à Marseille (1) : ne pas légiférer sur l'euthanasie.
Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
Mgr Jacques Gaillot.
Mgr Albert Decourtray.

Maurice Bellet.
Lucile Randon (Sœur André).
François : les 10 ans de pontificat du pape du bout du monde.
Santé et Amour.
Le testament de Benoît XVI.
Célébration des obsèques du pape émérite Benoît XVI le 5 janvier 2023 (vidéo).

L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
Sainte Jeanne d'Arc.
Sainte Thérèse de Lisieux.
Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
L’Église de Benoît XVI.
Saint François de Sales.
Le pape François et les étiquettes.
Saint  Jean-Paul II.
Pierre Teilhard de Chardin.
La vérité nous rendra libres.
Il est venu parmi les siens...
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Le ralliement des catholiques français à la République.
L’abbé Bernard Remy.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20230923-pape-francois.html

https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/le-pape-francois-a-marseille-1-ne-250576

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2023/09/24/40052175.html



 

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16 septembre 2023 6 16 /09 /septembre /2023 05:41

« Qui est le responsable de ce sang ? (…) Qui est le responsable du sang de ces frères et sœurs ? Personne ! Tous nous répondons ainsi : ce n’est pas moi, moi je ne suis pas d’ici, ce sont d’autres, certainement pas moi. (…). Aujourd’hui personne dans le monde ne se sent responsable de cela ; nous avons perdu le sens de la responsabilité fraternelle ; nous sommes tombés dans l’attitude hypocrite du prêtre et du serviteur de l’autel, dont parlait Jésus dans la parabole du Bon Samaritain : nous regardons le frère à demi mort sur le bord de la route, peut-être pensons-nous "le pauvre", et continuons notre route, ce n’est pas notre affaire ; et avec cela, nous nous mettons l’âme en paix, nous nous sentons en règle. La culture du bien-être, qui nous amène à penser à nous-même, nous rend insensibles aux cris des autres, nous fait vivre dans des bulles de savon, qui sont belles, mais ne sont rien ; elles sont l’illusion du futile, du provisoire, illusion qui porte à l’indifférence envers les autres, et même à la mondialisation de l’indifférence. Dans ce monde de la mondialisation, nous sommes tombés dans la mondialisation de l’indifférence. Nous sommes habitués à la souffrance de l’autre, cela ne nous regarde pas, ne nous intéresse pas, ce n’est pas notre affaire ! » (le pape François, le 8 juillet 2013 à Lampedusa).




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Décidément, le pape François, qui va sur ses 87 ans (en décembre), a une santé d'enfer (ou de fer). À la fin du mois de mars, il souffrait d'une grave infection respiratoire, le 26 avril, il était hospitalisé pour une « forte pneumonie aiguë dans la partie inférieure des poumons » (selon l'intéressé le 30 avril 2023 de retour d'un voyage en Hongrie), et le 7 juin, il était hospitalisé pour une opération délicate à l'abdomen... et malgré cela, à la fin de l'été, il a quand même réussi à tenir le coup pour participer aux JMJ (Journées mondiales de la jeunesse) au Portugal du 2 au 6 août 2023 et aussi pour effectuer une visite en Mongolie du 31 août au 4 septembre 2023, un voyage qu'il considérait très important pour s'adresser aux catholiques chinois depuis Oulan-Bator. Dans quelques jours, il inaugurera l'automne en se rendant à Marseille, invité par le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille.

La venue du pape à Marseille, dans le cadre des Rencontres Méditerranéennes 2023 qui démarrent ce week-end, a été officiellement annoncée le 31 mars 2023 par l'archevêché de Marseille. Au fil des mois, elle a été confirmée malgré les pépins de santé. À l'origine, le pape ne devait venir qu'une petite journée, celle du samedi 23 septembre 2023, la participation à la clôture de la semaine de rencontres et une grande messe. Cette messe aura bien lieu au stade Vélodrome samedi après-midi, 67 000 fidèles y sont attendus (deux jours après un match de la Coupe du monde de rugby, France vs Namibie), mais le programme pontifical à la cité phocéenne s'est entre-temps étoffé.

Le pape François arrivera en effet la veille, le vendredi 22 septembre après-midi à l'aéroport de Marignane. Il sera accueilli par le Président de la République française Emmanuel Macron qui a par ailleurs confirmé qu'il serait présent à la messe pontificale. En outre, les deux hommes s'entretiendront le 23 septembre en fin de matinée au Palais du Pharo.

Faut-il s'indigner que le chef de l'État participe à une messe ? Il fut un temps où chaque Président de la République assistait aux messes dominicales, c'était le cas des trois premiers Présidents de la République De Gaulle, Georges Pompidou et Valéry Giscard d'Estaing. C'était le cas aussi de Jacques Chirac. Même François Mitterrand a eu "sa" messe à Notre-Dame-de-Paris ! Au fur et à fur que la religion musulmane est entrée dans la société française, certains zélateurs de la laïcité se sont crus autoriser à fustiger la pratique religieuse des chefs de l'État. Ils ont bien le droit de faire ce qu'ils veulent. Quant à représenter la France auprès du pape, qui est également un chef d'État (du Vatican), qui le reprochera à Emmanuel Macron ? Ne pas vouloir le faire aurait été au contraire critiquable et on ne s'en serait d'ailleurs pas privé...

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La première destination du pape durant son séjour marseillais est Notre-Dame de la Garde, pour un temps de prière avec les prêtres du diocèse puis, vendredi en fin d'après-midi, un temps de recueillement interreligieux devant la stèle dédiée aux marins et aux migrants noyés en mer où le pape prendra la parole.

Le lendemain en début de matinée, le pape rencontrera à l'archevêché des personnes en situation de précarité économique avant de prendre part à la clôture des Rencontres Méditerranéennes au palais du Pharo où il prendra la parole pour la conclusion. Il quittera Marseille pour Rome à l'issue de la grande messe au Vélodrome.

Les Marseillais ont de quoi se réjouir de cette visite papale, car c'est extrêmement rare qu'un pape vienne séjourner à Marseille. Le précédent remonte au 5 novembre 1533 avec Clément VII (1478-1534), il y a presque cinq siècles ! Cela change de l'actualité souvent très négative et terrible qu'on entend généralement de Marseille : la dernière en date est certainement l'une des actualités les plus scandaleuses, la mort de Socayna, cette étudiante de 24 ans en seconde année de droit qui étudiait ses cours tranquillement dans sa chambre, chez elle, et qui a été mortellement blessée le 10 septembre 2023 par un tir de kalachnikov.

Les Français peuvent aussi être fiers de la venue du pape. On lui a reproché d'avoir précisé qu'il venait à Marseille et pas en France. Effectivement, lorsqu'il est arrivé au Vatican, le pape François avait souhaité ne visiter aucun des grands pays d'Europe, afin de se concentrer sur les "petits" pays. En dix ans de pontificat, il n'est donc jamais allé en France, pourtant "fille aînée de l'Église" selon une terminologie ancienne (qui date du roi Charles VIII en référence au baptême de Clovis) et qui est un tantinet datée depuis qu'elle est l'une des nations les plus laïques au monde.

Plus exactement, le pape a dit le 5 février 2023, dans l'avion de retour de son voyage au Soudan du Sud : « Le critère est le suivant : j'ai choisi de visiter les plus petits pays d'Europe. Vous me direz : "Mais vous êtes allé en France". Non, je suis allé à Strasbourg, j’irai à Marseille, pas en France. Les plus petits, les plus petits, pour connaître un peu l'Europe cachée, l'Europe qui a tant de culture mais qui n'est pas connue de tout le monde, pour accompagner des pays, par exemple l'Albanie, qui a été le premier, qui est le pays qui a souffert de la dictature la plus cruelle de l'histoire. Mon choix est un peu le suivant : essayer de ne pas tomber moi-même dans la mondialisation de l'indifférence. ».

Il a récidivé le 6 août 2023, dans l'avion de retour de Lisbonne, pour expliquer les raisons profondes de sa venue à Marseille : « Je suis allé à Strasbourg, j'irai à Marseille, mais en France non !... Il y a un sujet qui me préoccupe, c'est le sujet de la Méditerranée. C'est pour ça que je vais en France. L'exploitation des migrants est criminelle. Pas ici en Europe, parce que nous sommes plus cultivés, mais dans les camps d'Afrique du Nord... Je recommande la lecture : il y a un petit livre, petit, qu'un migrant a écrit, qui pour venir de Guinée en Espagne a passé je crois trois années parce qu'il a été capturé, torturé, réduit en esclavage. Les migrants dans ces camps du nord : c'est terrible. En ce moment, la semaine dernière, l'association Mediterranea Saving Humans, travaillait pour récupérer des migrants qui se trouvaient dans le désert entre la Tunisie et la Libye, parce qu'ils les avaient abandonnés là, à mourir. Ce livre s'appelle "Hermanito", en italien, il a pour sous-titre "Petit frère", il se lit en deux heures, ça en vaut la peine. Lisez-le et vous verrez le drame des migrants avant leur embarquement. Les évêques de la Méditerranée feront cette rencontre, avec aussi quelques responsables politiques, pour réfléchir sérieusement sur le drame des migrants. La Méditerranée est un cimetière, mais ce n'est pas le cimetière le plus grand. Le plus grand cimetière, c'est l'Afrique du Nord. C'est terrible, lisez-le. Je vais à Marseille pour cela. ».

Effectivement, le pape François a déjà foulé le sol français le 25 novembre 2014 mais pour s'exprimer au Parlement Européen de Strasbourg et à l'Assemblée du Conseil de l'Europe, il n'était donc pas exactement en France mais en Union Européenne et au Conseil de l'Europe. Le choix des voyages de pape (lieux et dates) est crucial, d'autant plus aujourd'hui où sa santé est diminuée, son âge très avancé, le plus avancé depuis Léon XIII (1810-1903), et donc, forcément, son temps compté. Le pape le remarquait le 4 septembre 2023 à son retour de Mongolie : « Je vais vous dire la vérité, pour moi faire un voyage maintenant n’est pas aussi facile qu’au début, il y a des limitations dans la marche et cela conditionne. Mais nous verrons. ».

C'est donc pour la France et pour Marseille une heureuse exception que le pape a accepté de faire afin de participer aux Rencontres Méditerranéennes 2023. C'est ce qu'a déclaré l'archevêque de Reims, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, devant ses confrères évêques réunis le 31 mars 2023 à Lourdes en assemblée plénière : « Le pape, nous en sommes conscients, vient pour la Méditerranée, nous lui sommes reconnaissants d’avoir accepté de rencontrer au moins le temps d’une messe le peuple de Marseille et les Français. (…) Cette rencontre sera pour notre Église en France un moment de joie. ».

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Il avait réservé son premier voyage hors du Vatican à Lampedusa, le 8 juillet 2013 afin de prier pour les réfugiés noyés dans la Méditerranée, et comme une sorte de cercle vicieux permanents, l'actualité est retournée à cette île italienne qui reçoit encore un grande nombre de réfugiés partis des côtés nord-africaines, toujours au péril de leur vie. La situation n'a guère évolué même si les raisons géopolitiques ont peut-être un peu changé. Pendant ces dix ans de pontificat, le pape François a sillonné la Méditerranée, se rendant à Naples, Malte, Chypre, Jérusalem, Le Caire, Tirana, Lesbos, etc.

Il y a dix ans à Lampedusa, le pape François protestait déjà contre l'indifférence des souffrances, l'absence de compassion : « Qui a pleuré pour la mort de ces frères et sœurs ? Qui a pleuré pour ces personnes qui étaient sur le bateau ? Pour les jeunes mamans qui portaient leurs enfants ? Pour ces hommes qui désiraient quelque chose pour soutenir leurs propres familles ? Nous sommes une société qui a oublié l’expérience des pleurs, du "souffrir avec: la mondialisation de l’indifférence nous a ôté la capacité de pleurer ! (…) Demandons au Seigneur la grâce de pleurer sur notre indifférence, de pleurer sur la cruauté qui est dans le monde, en nous, aussi en ceux qui dans l’anonymat prennent les décisions socio-économiques qui ouvrent la voie à des drames comme celui-ci. » (8 juillet 2013). Il est probable qu'il renouvellera à Marseille son appel salutaire contre la mondialisation de l'indifférence avec ce genre de paroles.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (16 septembre 2023)
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Pour aller plus loin :
Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
Mgr Jacques Gaillot.
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Santé et Amour.
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L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
Sainte Jeanne d'Arc.
Sainte Thérèse de Lisieux.
Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
L’Église de Benoît XVI.
Saint François de Sales.
Le pape François et les étiquettes.
Saint  Jean-Paul II.
Pierre Teilhard de Chardin.
La vérité nous rendra libres.
Il est venu parmi les siens...
Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Dis seulement une parole et je serai guéri.
Le ralliement des catholiques français à la République.
L’abbé Bernard Remy.

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