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2 septembre 2008 2 02 /09 /septembre /2008 09:50

Le texte sur l’audiovisuel est bouclé. Il réforme de fond en comble la publicité à la télévision. Des mesures qui ne seront peut-être pas toujours clairement expliquées. Les chaînes privées, par exemple, pourront diffuser un tunnel publicitaire de… 18 minutes !


Le mercredi 24 septembre 2008, la Ministre de la Culture et de la Communication, Christine Albanel, présentera au Conseil des Ministres le projet de loi qui va réformer profondément l’audiovisuel public.

Elle s’est inspirée pour cela du travail de la Commission chargée de ce sujet et présidée par le député-maire de Meaux Jean-François Copé (rapport remis à Nicolas Sarkozy le 25 juin 2008) à la suite des déclarations inattendues du Président de la République Nicolas Sarkozy lors de ses vœux à la presse le 8 janvier 2008.


Qu'y aura-t-il dans ce projet de loi ?

Essentiellement l’interdiction de la publicité dans la télévision publique de 20 heures à 6 heures à partir du 1er janvier 2009 (puis l’interdiction totale à partir de 2012). La loi devra donc être votée en automne et la loi de finances s’adapter aussi au nouveau mode de financement.

Le gouvernement a déjà concédé une subvention de 150 millions à France Télévisions pour que la holding (qui n’en sera plus après le vote de la loi) puisse s’adapter, mais cette somme est dérisoire par rapport aux besoins.

Pour anticiper ces mesures, France Télévisions a déjà bouleversé sa grille de programmation. Le journal télévisé du soir sera plus court, et le ‘prime time’ commencera bien plus tôt, à 20 heures 30 au lieu de 21 heures.

En gros, une heure vingt de programmation par jour pour les quatre chaînes publiques seront à ajouter à la grille actuelle, soit environ un coût de 70 millions d’euros supplémentaires (à rajouter au manque à gagner).


Taxer pour compenser

La suppression de publicité est évaluée à une perte de 450 millions d’euros.

Pour les compenser, l’État instaurera deux nouvelles taxes (la multiplication des taxes montre à l’évidence que l’action gouvernementale n’est évidemment pas d’inspiration libérale).

Une de 0,9% sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications (téléphonie et internet) qui devrait recueillir 378 millions d’euros.

Et une autre de 3% sur les recettes publicitaires des chaînes de télévision privée qui devrait rapporter 80 millions d’euros.

Soit un total de 458 millions, le compte devrait donc être bon.

La redevance sera, quant à elle, indexée sur l’inflation (donc augmentera de 3 à 3% chaque année) et payée mensuellement par les contribuables. Tous ceux qui possèderont des équipements pour regarder la télévision seront taxés, non seulement une télévision mais aussi un ordinateur.


Retour à l’ORTF ?

La holding France Télévisions deviendra une société de diffusion et les chaînes ne seront plus des sociétés mais seulement des antennes. Le cahier des charges avec l’État deviendra global et plus chaîne par chaîne (notamment pour ses obligations envers la création : 19% du chiffre d’affaires doivent être investis pour la création française et européenne).

Les dirigeants de l’audiovisuel public seront désormais nommés par le Conseil des Ministres (avec la nouvelle procédure constitutionnelle des nominations) au lieu du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (les dirigeants actuels finiront régulièrement leur mandat : Jean-Paul Cluzel jusqu’en mai 2009 à la présidence de Radio France et Patrick de Carolis jusqu’en août 2010 à la présidence de France Télévisions).

Jean-François Copé avait suggéré que le président de France Télévisions soit nommé par le conseil d’administration de France Télévisions, mais Nicolas Sarkozy lui a donné tort.

Ces deux dernières mesures semblent indiquer un vague retour à l’ORTF que le Président Valéry Giscard d’Estaing avait pourtant supprimée par la loi du 7 août 1974.


18 minutes de pub sans interruption ?

Mais le plus troublant, dans ce projet de loi sur la publicité dans l’audiovisuel public, c’est ce qui est prévu pour la publicité sur les chaînes privées de télévision, et principalement, donc, sur TF1 et M6.

Le plafond des temps de publicité est passé de six à neuf minutes par heure de diffusion. Cet élargissement du marché publicitaire n’est pas anodin puisqu’il contribue aussi au financement de l’audiovisuel public avec la nouvelle taxe (de 3%).
Par ailleurs, deux coupures de publicité seront autorisées (au lieu d’une) lors de la diffusion d’un film ou d’un téléfilm. Petite attention à TF1 et M6, selon Le Figaro, pour leur faire avaler la pilule du séisme de la zone de programmation entre 20 heures et 21 heures.

Mais la révolution la plus profonde et la plus discrète, rarement évoquée dans la presse mais qui bouleversera les habitudes, c’est que le décompte du nombre de minutes de publicité ne sera pas en "heure glissante" (comme maintenant) mais en "heure d’horloge", heure d’horloge comme on dit "année civile".

C’est-à-dire que la disposition de ces minutes publicitaires pourra être décidée sans restriction dans une heure pleine, par exemple, entre 19 heures et 20 heures.

Si bien qu’il sera possible, par exemple, dans le cas extrême, qu’une chaîne privée programme dix-huit minutes de publicité en un seul bloc, en utilisant la fin d’une heure pleine et le début de l’heure pleine qui suit.


Un plus pour la création ?

Ce projet de loi sera-t-il bénéfique ou pas en ce qui concerne le contenu de la programmation ?

C’est clair que les changements pour France Télévisions imposeront aux grandes chaînes privées de s’adapter également : si le ‘prime time’ est programmé plus tôt pour les chaînes publiques, la concurrence pourra être rude. C’est d’ailleurs pourquoi les chaînes privées étaient contre une telle réforme (même si elles verront leur budget publicitaire grossir).

De plus, en supprimant la publicité, les programmes de la télévision publique ne devraient en principe plus être tributaires de l’audimat, puisqu’il n’y a plus de valorisation de la minute d’antenne.

Il n’en reste pas moins que le succès d’une émission, comme d’un livre, d’un film au cinéma ou d’un disque, reste bien axé sur l’audience. Mais les pressions seront peut-être moins fortes et on donnera peut-être plus de temps à une émission pour s’imposer.


Résultat d’une audace présidentielle peu préparée, cette profonde réforme de l’audiovisuel va accentuer la différence entre public et privé.

Peut-être au bénéfice de l’offre aux téléspectateurs.
Bilan dans quelques années.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (2 septembre 2008)


Pour aller plus loin :

France Télévisions dans l’attente de son financement (Le Monde du 29 août 2008).

Audiovisuel : la future loi sera prête à la rentrée (Le Figaro du 18 août 2008).

Sarkozy bouleverse les soirée à la télévision (Le Figaro du 26 juin 2008).

Branle-bas de combat à la programmation des chaînes (Le Figaro du 27 juin 2008).

Rapport de Jean-François Copé (remis le 25 juin 2008).




http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=43937

http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20080902/tot-pub-la-tele-la-revolution-silencieus-89f340e.html


http://www.lepost.fr/article/2008/09/09/1261465_pub-a-la-tele-la-revolution-silencieuse.html

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