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23 février 2018 5 23 /02 /février /2018 02:10

« Le baccalauréat est une grande institution républicaine à laquelle nous sommes tous attachés. Cependant, l’échec trop important en licence l’a peu à peu fragilisé car il n’est plus suffisamment un tremplin vers la réussite dans l’enseignement supérieur. (…) Avec un baccalauréat remusclé et un lycée plus simple, plus à l’écoute des aspirations des lycéens, nous allons leur donner les moyens de se projeter vers la réussite dans l’enseignement supérieur et de vivre leurs années de lycée avec bonheur. » (Jean-Michel Blanquer, le 14 février 2018). Première partie.


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Le mercredi 14 février 2018, la très importante et ambitieuse réforme du baccalauréat et du lycée a été adoptée par le conseil des ministres. Cette réforme, très marquante car elle aura des effets sur la vie quotidienne d’une grande partie des Français et de leurs enfants, est à la fois originale, audacieuse, courageuse et rationnelle. Comme avec d’autres réformes, celle-ci s’inspire avant tout d’un état des lieux et des pistes pour améliorer une situation de plus en plus catastrophique (voir le classement PISA), situation issue notamment d’un certain "dogmatisme pédagogique" ou "idéologisme" récurrent.


Jean-Michel Blanquer, le ministre qu’il fallait

Le superviseur de la réforme est le Ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer (53 ans) dont la personnalité semble consensuelle. Au contraire d’un provocateur, style éléphant dans un magasin de porcelaines, comme le mammouth Claude Allègre, Jean-Michel Blanquer est un délicat et agit avec une grande habileté politique. Il ne s’est mis à dos ni les lycéens, ni les enseignants, ni les chefs d’établissement, ni les parents d’élèves (les électeurs). Pour l’instant (je l’écris par prudence).

Jean-Michel Blanquer est un ultra-compétent de la chose éducative. Après de brillantes études (IEP Paris, maîtrise de philosophie, DEA en sciences politiques, docteur en droit et agrégation de droit public), il a suivi une carrière d’universitaire chercheur, puis est devenu directeur adjoint du cabinet du Ministre de l’Éducation nationale Gilles de Robien de 2004 à 2007, recteur de l’académie de Créteil de 2007 à 2009 où il a pris des initiatives d’expérimentation de certaines mesures novatrices (vous souvenez-vous de la prime à l’assiduité en octobre 2009 ?), il fut nommé directeur général de l’enseignement scolaire par le ministre Luc Chatel de 2009 à 2012, et enfin directeur général de l’ESSEC (une des meilleures écoles de commerce avec HEC) de 2013 à 2017.


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Souvent considéré comme "de droite", marqué par sa très grande amitié (quasi-fraternelle) avec François Baroin (son camarade de promotion à Sciences Po Paris), proche d’Alain Juppé et de l’Institut Montaigne, Jean-Michel Blanquer est aussi très apprécié à gauche, notamment par son prédécesseur Jean-Pierre Chevènement qui l’a même invité, lors d’un colloque de son think tank, la Fondation Res Publica, à venir discuter du "moment républicain en France" à la Maison de la Chimie, à Paris, le 11 décembre 2017 aux côtés de l’ancien Premier Ministre Bernard Cazeneuve, du président du groupe LREM à l’Assemblée Nationale Richard Ferrand, du physicien Étienne Klein et du philosophe Marcel Gauchet (en absence de journalistes !).

Pourtant, ce n’est pas le premier Ministre de l’Éducation nationale à être très compétent, habile politiquement, intelligent, sympathique, sans idéologie car pragmatique, et même courageux. Ce n’est pas le premier et pourtant, il semble se détacher de ses très nombreux et illustres prédécesseurs par deux points particuliers de sa personnalité qui encourage les gens à adhérer à sa méthode sinon à sa politique : il écoute ses interlocuteurs, et il efface sa personnalité derrière son action. Il part en effet de l’existant, du réel et il essaie de trouver les moyens pour amener la situation au but fixé. Il est, en quelques sortes, l’anti-Vincent Peillon.

L’idéologue Vincent Peillon vivait sur une autre planète et toutes ses propositions, qui ont miné le quinquennat de François Hollande sur l’éducation et que ses successeurs socialistes Benoît Hamon et Najat Vallaud-Belkacem ont reprises et assumées, a abouti à des catastrophes que la jeunesse française va payer encore longtemps.

Mais si la nécessité de changer l’organisation actuelle de l’enseignement scolaire est comprise, il n’était pas question, pour Jean-Michel Blanquer, de revenir à une organisation plus ancienne qui avait été efficace à l’époque. Pas question de revenir sur le collège unique comme le préconisaient certains ultras de LR. Ni évidemment de revenir aux uniformes scolaires comme l’avait proposé très stupidement François Fillon dans son programme présidentiel qui prenait ainsi le goût assez rance d’un retard de plus d’un demi-siècle.

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Jean-Michel Blanquer veut en effet revenir aux fondamentaux, mais sans revenir au passé. Car la situation a complètement changé, des années 1970 par exemple, tant sur le plan social (d’autres modes de vie se sont développés) que sur le plan technologique (télécommunications, numérique, etc.). Il fallait donc imaginer, créer, innover une nouvelle organisation qui s’adapterait le mieux à la modernité du monde nouveau.

Cela me fait assez sourire que les contradicteurs professionnels cherchent à coller à cette réforme du baccalauréat l’étiquette "de droite" ou encore l’étiquette du "libéralisme" (le libéralisme est d’ailleurs plutôt une valeur "de gauche" si l’on connaît un peu l’histoire des idées politiques). Comment parler de libéralisme quand l’État entend restructurer son organisation scolaire ?

Le vrai libéralisme (auquel je m’opposerais évidemment le cas échéant), ce serait plutôt de supprimer carrément tous les examens, tous les diplômes, et de laisser faire le marché : que les entreprises recrutent ses employés sans diplômes qui n’apportent d’ailleurs aucune garantie de compétences. Toute intervention de l’État, et l’existence même d’un diplôme national comme le baccalauréat (qui n’est pas remis en cause) en est une, va à l’encontre du principe du libéralisme.

Quant à l’étiquette "de droite", elle fait un peu sourire car finalement, la fin des séries au baccalauréat général, ce "lycée unique", est l’aboutissement du collège unique, réalisé par la réforme Haby lors du septennat de Valéry Giscard d’Estaing. Avant cette réforme qui a une quarantaine d’années, il existait une Quatrième C par exemple. La réforme Haby a rendu le collège unique et ainsi que la classe de Seconde générale. Les réformes suivantes ont "détruit" la "Terminale C" (définie comme la sacro-sainte élite) en "Terminale S". Et la réforme Blanquer achève ainsi la Terminale S en série générale avec options.

Or, comme pour l’abaissement de la majorité à 18 ans ou la loi sur l’IVG, le collège unique, bien qu’institué par un gouvernement "de droite" (que je qualifierais plutôt de "centre droit"), était plutôt une mesure "de gauche" dans le sens d’une plus grande égalité entre les élèves. Cette réforme Blanquer va au bout de cette logique et ce serait au contraire une réforme qui accroîtrait les inégalités ? Cette étiquette ne serait donc pas très cohérente. D’ailleurs, s’il y a une chose que le Président Emmanuel Macron a réussie depuis 2017, c’est d’avoir fait valser les étiquettes !

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En fait, la situation actuelle a accru les inégalités sociales. Ne rien faire est donc la meilleure de solution pour ne rien améliorer du tout. Personne, aucun ministre, n’a jamais osé toucher au baccalauréat mais tout le monde voulait réformer l’enseignement du collège et du lycée (avec de nouveaux programmes), ce qui, sur le plan de la méthode, était illogique. Le sociologue François Dubet, qui avait remis un rapport sur "Le Collège de l’an 2000" à la ministre Ségolène Royal en 1999, a expliqué à la matinale de France Inter le 15 février 2018 que la méthode était judicieuse : pour réformer efficacement l’enseignement, il fallait d’abord réformer le but à atteindre, à savoir le baccalauréat.


Quelle est cette situation ?

Il y a eu 641 688 bacheliers admis en 2017, soit un taux de réussite de 87,9%, en légère baisse par rapport à 2016 (88,6%), mais en constante progression sur le long terme (74,9% en 1995). Il y a quarante ans, ce taux était inférieur à 60%. Parmi ces bacheliers, 176 104 proviennent de bacs professionnels. La part des bacheliers dans une génération est de 78,9%, ce qui est considérable. Près de la moitié des candidats ont obtenu une mention (moyenne générale supérieure à 12/20) : 53,4% pour le bac général, dont 13,0% ont obtenu la mention très bien (moyenne générale supérieure à 16/20), 15,5% pour les seules séries S.

Le baccalauréat ouvre en principe la porte des études supérieures. S’il est réjouissant d’observer la progression d’une génération par rapport au niveau d’instruction (même si on peut toujours critiquer le "bac" qui "ne serait plus ce qu’il était", ce qui est un peu vrai, mais pas tout à fait), on peut en revanche s’inquiéter de son rôle de ticket d’entrée à l’université. Ou plutôt, regretter que son rôle de ticket de sortie soit si mauvais.

En effet, malgré un taux de réussite d’environ 90% au baccalauréat général et technologique, « 61% des étudiants ne parviennent pas au terme des études dans lesquelles ils se sont initialement engagés », selon le ministre. Et « seulement 27% des étudiants obtiennent leur licence [niveau bac+3] en trois ans ».

De plus, la fonction de ticket d’entrée à l’université du baccalauréat est très hasardeuse puisque la plupart des établissements supérieurs recrutent leurs étudiants avant même l’obtention du bac qui reste évidemment une condition nécessaire d’admission, mais pas suffisante. Le ministre constate donc : « Actuellement, compte tenu de son calendrier, le baccalauréat n’est pas pris en compte pour l’entrée dans l’enseignement supérieur. ».

Dans le prochain article, je présenterai les trois points les plus importants de la réforme Blanquer.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (23 février 2018)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La présentation complète de la réforme Blanquer du 14 février 2018 (à télécharger).
Le rapport de Pierre Mathiot sur le baccalauréat remis le 24 janvier 2018 (à télécharger).
La réforme du baccalauréat.
Jean-Michel Blanquer.
Prime à l’assiduité.
Notation des ministres.
Les internats d’excellence.
L’écriture inclusive.
La réforme de l’orthographe.
La dictée à  l’école.
La réforme du collège.
Le réforme des programmes scolaires.
Le français et l’anglais.
La patriotisme français.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20180214-jean-michel-blanquer.html

https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/le-baccalaureat-blanquer-1-2-201810

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2018/02/23/36168468.html



 

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commentaires

L
TOUT semble indiquer que cette réforme (assez compliquée)soit une usine à gaz,la réforme inutile de trop risquant de provoquer une sévère fronde d’une communauté éducative déjà mal traitée.Le gouvernement entend imposer de façon autoritaire (LBD + gardes à vue + répression administrative)un lycée appauvri,au rabais sans aucune concertation avec les personnels éducatifs.Le principal effet de cette réforme néolibérale,particulièrement néfaste (probablement la pire depuis des décennies)sera une amplification des inégalités socio-spatiales dans notre pays.Cette réforme bâclée,peu réfléchie dont le contenu est particulièrement OPAQUE s'annonce donc comme un affaiblissement substantiel de notre système public d’enseignement.En réalité cette réforme est le prolongement logique de « Parcoursup » et de sa sélection ubuesque.Quand les Français,les familles françaises vont comprendre les effets concrets de ces bouleversements malfaisants & injustes (= tri socio-spatial)de la « réforme Blanquer » la contestation sera d'ampleur.
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