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7 janvier 2018 7 07 /01 /janvier /2018 01:04

« La nouveauté, selon le mot de Stravinski, ne saurait être que la recherche d’une place fraîche sur l’oreiller. La place fraîche se réchauffe vite et la place chaude retrouve sa fraîcheur. » (Jean Cocteau, 1941). Première partie.


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Ce jeudi 17 mai 2018, cela fait maintenant cinq ans que les couples français ont la possibilité juridique de se marier même s’ils sont homosexuels. Le "mariage pour tous", manière par euphémisme de désigner le mariage pour les couples homosexuels, est sorti de la cuisse de …François Hollande.

La promulgation de la loi n°2013-404 du 17 mai 2013 par François Hollande a ouvert une nouvelle "possibilité" pour la société française. Cette promulgation a été faite quelques heures après la publication de l’avis conforme du Conseil Constitutionnel présidé par Jean-Louis Debré (décision du Conseil constitutionnel n°2013-669DC en date du 17 mai 2013 qu'on peut lire ici dans son intégralité), le jour même de la "journée mondiale de lutte contre l’homophobie" le 17 mai (un petit clin d’œil des membres du Conseil Constitutionnel ?).

Cette loi a connu beaucoup de résistance auprès d’une partie non négligeable de la population, certes, minoritaire, donnant l’occasion de discussions parlementaires houleuses (4 999 amendements ont été défendus en séance plénière à l’Assemblée Nationale, ce fut l’une des sept lois les plus discutées de l’histoire de la Ve République), de débats publics pas moins houleux dans les médias ou même dans la rue avec de nombreuses manifestations, souvent avec des slogans créatifs (pour ou contre) et des fortes mobilisations (notamment pour la "manif pour tous").

Cette loi est devenue irréversible, bien que simple loi (donc, susceptible d’être modifiée ou abrogée par une autre simple loi). Cette irréversibilité a été comprise même par les responsables politiques les plus opposés à cette loi, et c’est normal car la France est un État de droit. Or, il y a plusieurs choses qu’un État de droit ne peut pas faire. Il ne peut pas faire des lois rétroactives. Donc, tous les couples homosexuels qui ont été mariés depuis 2013 ne peuvent pas être "démariés", ou du moins, sans leur consentement, car certains couples, comme pour les couples hétérosexuels d’ailleurs, ont déjà été défaits, par la possibilité du divorce (par chance, le législateur a prévu aussi le "divorce pour tous" !). Par ailleurs, un État de droit permet l’égalité en droits de tous les citoyens. Or, interdire de nouveau le mariage des couples homosexuels à partir de la promulgation d’une nouvelle loi, cela signifierait qu’il y aurait des couples homosexuels qui ont pu se marier et d’autres qui ne pourraient plus se marier. Cette inégalité est anticonstitutionnelle.

Donc, de fait, la loi sur le mariage pour tous est une loi irréversible. Comme elle n’allait pas de soi pour de nombreuses personnes, il aurait donc été intéressant d’en faire un sujet de référendum (dans les sondages, environ deux tiers des sondés étaient partisans d’un référendum sur le sujet). Probablement qu’un tel référendum aurait approuvé le mariage pour tous, car les sondages ont régulièrement montré que les gens y étaient plutôt favorables même si un clivage assez fort était marqué (les sondages ne sont toutefois que des sondages). Ce référendum aurait apaisé car il aurait donné le dernier mot au peuple et pas à une majorité socialiste déjà politiquement discréditée (bien que légitime) depuis longtemps (malgré sa fraîcheur électorale).

Dans la première partie de cet article, j’évoquerai les arguments émis par les uns et les autres, en tentant d’être le plus objectif possible, ensuite, dans la deuxième partie, je présenterai quelques considérations historiques et statistiques, et dans la troisième partie, je ferai part de mes commentaires personnels, réflexions, réticences et propositions.


Les arguments pour

Le mariage pour tous a été présenté par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault avec trois arguments martelés.

Un argument historique : l’adoption du mariage pour tous serait une avancée sociétale dans le sens de l’histoire, un progrès social et sociétal dans les traces de la légalisation des contraceptifs (1967), puis de l’avortement (1975), puis l’abolition de la peine de mort (1981), également de l’abaissement de l’âge de la majorité à 18 ans (1974), de la création du PACS (1999), etc. Cet argument ne tient pas beaucoup intellectuellement et politiquement : avec ce genre d’argument, on peut faire adopter tout et n’importe quoi. En mélangeant tout, non seulement on voulait politiser le débat (c’était voulu : le clivage entre les forces progressistes et les forces conservatrices), ce qui gauchisait un gouvernement trop soupçonné (à tort !) de faire la part trop belle aux entreprises, mais on en faisait aussi un sujet à enjeu national qui n’avait pas de raison d’être. Il n’y avait pas à mobiliser autant d’énergie, à déchaîner autant de passion pour une disposition relativement mineure dans la vie sociale (cela concerne quelques milliers de couples par an pour une population de 67 millions d’habitants, soit environ 0,01% de la population !). Ce si grand investissement médiatique et politique était d’autant moins pertinent que le pays restait plongé dans un chômage de masse et dans une crise d’identité que le débat sur le mariage pour tous a même renforcée (en amplifiant par exemple les agressions exprimant une certaine homophobie).

Un argument juridique : l’adoption du mariage pour tous serait la traduction d’une égalité des droits, tous les citoyens égaux devant le mariage, y compris les homosexuels. Cet argument, plutôt sympathique et recevable, a provoqué des débordements parmi certains opposants forcenés au mariage pour tous en imaginant l’évolution après cette loi (reprenant le premier argument) et en extrapolant pour dire n’importe quoi, craignant ensuite l’adoption du mariage zoophile (entre humains et animaux), du mariage pédophile (entre adultes et enfants), voire du mariage polygame (à plus de deux), ce dernier reprenant d’ailleurs ce que certains pourraient appeler l’islamophobie récurrente d’une certaine franche de la population. Tout cela "au nom de la liberté de tous". Cet argument a donc été, à mon sens, plutôt contre-productif.

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Enfin, un argument idéologique sinon philosophique : celui qui s’oppose au mariage pour tous serait un homophobe. Ce qui est, là aussi, un argument assez faible intellectuellement. Car cela signifierait qu’avant les années 2010, la quasi-unanimité de la population était homophobe puisque ce mariage pour tous était défendu seulement par une partie très infime de la population.

Dans l’argument juridique de l’égalité des droits, il a été également dit que cela donnait des droits à certaines personnes (les couples homosexuels qui veulent se marier), mais cela n’en retirait à personne. Ce qui est presque vrai, mais un peu faux quand même, car d’un point de vue juridique, le mariage ne concerne pas seulement l’union entre deux personnes libres et consentantes, il concerne aussi les enfants appelés à être élevés par ce couple, enfants biologiques ou adoptés.


Les arguments contre

Pour les opposants au mariage pour tour, c’est justement le principal argument pour dénoncer le projet, celui de l’adoption d’enfants par les couples homosexuels. Avec l’argument, qui ne tient d’aucune étude scientifique, selon lequel la vie d’un enfant dans un foyer homoparental serait perturbant pour son développement personnel.

Cet argument est facilement battu en brèche par la réalité de l’adoption possible déjà par les personnes seules, et donc, par des personnes capables d’être, également, homosexuelles. De plus, le développement harmonieux d’un enfant dépend essentiellement de l’amour que lui donne son entourage, et donc, ses parents avant tout, et cet amour n’est pas l’exclusivité des couples hétérosexuels. Et l’on peut toujours imaginer qu’il vaut mieux qu’un enfant vive avec deux parents de même sexe qu’avec un seul parent, alors que les foyers monoparentaux sont de plus en plus nombreux aujourd’hui.

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Peu d’opposants au mariage pour tous ont émis une opposition de principe sur l’union elle-même de personnes de même sexe, considérant qu’il serait plus difficile d’expliquer le pourquoi de cette opposition. Ce qui démontre une véritable évolution des consciences si l’on se remémore les débats publics concernant le PACS. C’est pourquoi toute l’argumentation est mise sur le fait que si un nouveau droit est créé pour les couples homosexuels, c’est au détriment des droits de l’enfant qui, lui, a le droit d’avoir de "vrais" parents, à savoir une mère et un père.

Dans le même ordre d’idée, les opposants prennent l’argument du progrès sociétal comme un argument qui conforte leurs craintes sur les enfants. En effet, s’il est adopté dans le cadre d’une avancée sociétale, le mariage pour tous ne pourrait n’être qu’une étape pour aller encore plus loin : la PMA autorisée pour les couples homosexuels femmes, même si elles n’ont pas de problème de stérilité. Ce qui signifierait que ce serait aussi le cas pour les couples hétérosexuels, ce qui risquerait rapidement d’aboutir à une société eugénique dans le sens où la PMA s’accompagne souvent de la préparation de plusieurs embryons et du choix de ceux-ci pour faire les tentatives. C’est cette sélection qui pourrait encourager les dérives eugéniques. D’ailleurs, la réflexion du Premier Ministre Édouard Philippe exposée dans "L’émission politique" le 28 septembre 2017 sur France 2 montre à l’évidence des évolutions dans les positions des uns et des autres. Autrefois fermement hostile, Édouard Philippe a dit clairement "faut voir" pour ne pas dire "pourquoi pas ?". Résultat dans quelques mois.

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Et comme on peut aller toujours plus loin dans les avancées sociétales, avec l’argument massue de l’égalité des droits, si les couples homosexuels femmes ont la possibilité de faire des enfants, pourquoi pas les couples homosexuels hommes ? Et ainsi, l’autorisation de la GPA sera l’étape suivant (probablement pas ultime), rompant ainsi un nouveau tabou, celui de monnayer la conception d’un enfant.

Sur les risques de poursuite de l’évolution sociétale, il y a quelques raisons d’être lucides : lors de l’adoption de PACS en 1999, ses promoteurs ont assuré la main sur le cœur qu’il n’était pas question d’ouvrir le mariage aux couples homosexuels (Élisabeth Guigou, porteuse du PACS en tant que Ministre de la Justice, déclara ainsi : « Il n’est pas question (…) que deux personnes physiques de même sexe (…) puissent se marier. ». Il a fallu moins de quinze ans pour que cette ouverture soit devenue une réalité juridique sinon une évidence sociale.

En extrapolant ainsi les risques d’avancées sociétales, les opposants au mariage pour tous, préjugeant du futur (avec sans doute pertinence), préfèrent stopper le plus tôt possible cette évolution, au risque de se retrouver "vieux jeu" en défendant la structure de la famille traditionnelle : un papa, une maman, des enfants.

Il y a eu également une série d’arguments anti-mariage pour tous qui se voulaient défenseurs des personnes homosexuelles elles-mêmes. J’en citerai deux.

Le premier est tout à fait recevable. En permettant aux couples homosexuels de se marier, on dresse à l’état-civil, de fait, un fichier des personnes homosexuelles. Or, si jamais un dictateur venait à prendre le pouvoir (tout est toujours possible) et s’il était ouvertement homophobe, alors la répression contre les personnes homosexuelles déjà fichées serait rapide.

Deux voire trois réponses à cet argument. D’une part, avec les réseaux sociaux sur Internet, il est certainement assez facile, aujourd’hui, de "ficher" les personnes qui revendiquent leur homosexualité (pas qui "avouent", car il n’y a d’aveu que lorsqu’il y a faute, or l’homosexualité, jusqu’à preuve du contraire, n’est pas une faute). Donc, pas besoin de l’état-civil pour en faire la "liste" la plus exhaustive. D’autre part, il est maintenant acquis que la nature de la sexualité n’est pas intégrée dans les fichiers d’état-civil (les prénoms peuvent porter à confusion, comme Claude, Camille, Alix, Yann, Dominique, etc., et ne suffisent pas à déterminer l’orientation sexuelle d’un couple). Ainsi, les statistiques des divorces ne permettent pas (à ce jour) de déterminer le nombre des couples homosexuels qui divorcent par rapport au nombre des couples hétérosexuels qui divorcent au cours de la même période. Aucune indication n’est fournie à ce sujet. Enfin, dernière réponse plus sociale et éducative : c’est justement en "dédramatisant" l’homosexualité, en la normalisant par le mariage pour tous que l’homosexualité sera acceptée par toute la société et qu’un apprenti dictateur, même homophobe, n’aura plus les bases pour réprimer l’homosexualité sans mettre une grande partie de la population contre lui, au risque de menacer son propre pouvoir politique.

Le second argument de ce type, c’est de dire que les couples homosexuels sont vraiment "vieux jeu". Maintenant, quand on vit en couple, on ne se marie plus, c’est le cas des hétérosexuels et voici que les homosexuels veulent faire comme les hétérosexuels il y a trente ou cinquante ans alors qu’ils sont généralement des modernes porteurs des modes du futur. La ringardise ne leur sied pas ! Ou encore, en considérant que le mariage pour tous est du "conformisme bourgeois", comme l’a soutenu Benoît Duteurtre qui a écrit deux tribunes, une titrée "Noce gay pour petits-bourgeois" (dans "Libération" le 2 juin 2004), et une autre titrée "Pourquoi les hétéros veulent-ils marier les homos ?" (dans "Libération" le 10 octobre 2012). Argument qui s’auto-oppose par un simple : "et alors ?".


Grande effervescence

Comme je l’ai indiqué en introduction, les arguments avancés par les uns et les autres n’ont pas beaucoup de valeur universelle. Ils sont plus basés sur des éléments circonstanciels.

La loi sur le mariage pour tous propose de donner un droit supplémentaire aux personnes dont l’orientation sexuelle peut être différente. Mais elle n’ôte pas forcément un droit aux enfants. Les décisions concernant les enfants restent tributaires d’un juge ou d’une autorité publique, seule capable d’apprécier une situation concrète, particulière.

Le 17 mai 2013, le Conseil Constitutionnel a indiqué précisément : « Le Conseil a vérifié le respect de cette exigence [l’exigence de conformité de l’adoption à l’intérêt de l’enfant prévue par le dixième aliéna du Préambule de la Constitution de 1946 qui a toujours valeur constitutionnelle] par les dispositions applicables tant aux couples de personnes de même sexe qu’à ceux formés d’un homme et d’une femme. Ces couples sont soumis, en vue de l’adoption, à une procédure d’agrément. Le Conseil Constitutionnel a jugé que, pour tous les couples, les dispositions relatives à cet agrément ne sauraient conduire à ce que celui-ci soit délivré sans que l’autorité administrative ait vérifié, dans chaque cas, le respect de l’exigence de conformité de l’adoption à l’intérêt de l’enfant. Par ailleurs, la loi déférée ne déroge pas à l’article 353 du code civil qui impose au tribunal de grande instance de ne prononcer l’adoption que si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant. ». Cela exprimé après avoir constaté que « la loi contestée n’a ni pour objet, ni pour effet, de reconnaître aux couples de personnes de même sexe un "droit à l’enfant" ».

Ainsi, on préférera toujours confier un enfant à un couple homosexuel plein d’amour, équilibré psychologiquement et capable de subvenir matériellement aux besoins de l’enfant pendant une vingtaine d’années, plutôt qu’à un couple hétérosexuel un peu dérangé psychologiquement, un peu porté sur l’alcool et sans emploi…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (15 mai 2018)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Rapport 2018 de SOS Homophobie (à télécharger).
Les 5 ans du mariage pour tous.
Bientôt la PMA ?
Christiane Taubira.
Pierre Bergé.
L’avis du Conseil Constitutionnel du 17 mai 2013 (texte intégral).
La manif pour tous.
À quand l’apaisement ?
Et si l’on pensait plutôt aux familles recomposées ?
Deux papas ?
Le premier mariage lesbien.
L’homosexualité malmenée en Afrique.
Mariage gris.
Mariage nécrophile.
Mariage annulé pour musulman.
Le coming out d’une star de la culture.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20171014-mariage-homosexuel.html

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2018/05/17/36411401.html


 

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28 octobre 2017 6 28 /10 /octobre /2017 05:14

« On ne dit pas "un petit directeur", on dit "un chef de rayon". On ne dit pas "un grand directeur", on dit "un chef de diamètre". (…) Le féminin de "directeur" est "la femme du directeur". » (au mot "directeur" du "Dictionnaire superflu à l’usage de l’élite et des bien nantis" de Pierre Desproges, éd. du Seuil, 1985).


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Ah, il est loin le temps où le regretté Pierre Desproges pouvait impunément provoquer les féministes ! Il serait aujourd’hui peut-être mis à l’index, dénoncé pour machisme déplacé, écartelé sur la place publique, démembré par les réseaux sociaux…

La société française adore se jeter, comme les habitants d’un petit village gaulois, dans des bagarres aux enjeux que l’on pourrait croire dérisoires. Pourtant, dans la nouvelle polémique sur l’écriture inclusive, il y a des enjeux essentiels, et le principal est sans doute la survie de la langue française dans un monde globalisé et anglicisé.

Cette polémique n’est pas nouvelle mais elle a été "rafraîchie" par la publication d’un manuel scolaire pour des écoliers de CE2 par les éditions Hatier en septembre 2017 écrit entièrement en écriture inclusive, et devant l’agitation médiatique, l’Académie française a même cru devoir intervenir par un communiqué alarmiste publié le 26 octobre 2017.

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D’abord, de quoi s’agit-il ? J’avais déjà lu quelques textes ainsi écrits (surtout en titre ou très courts) et cela m’avait fortement agacé par leur illisibilité. On ne prend pas plaisir à lire de telles lourdeurs.

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L’écriture inclusive (l’expression me paraît inadéquate) tend à supprimer dans le langage écrit toute forme de… de quoi ? J’allais écrire de "machisme" mais en écrivant "machisme", je me disais que je faisais le "jeu" des promoteurs d’une telle écriture. Alors, écrivons plutôt, l’écriture inclusive tend à éliminer la domination du masculin sur les mots. Oui, je sais, ce n’est pas très satisfaisant non plus. En fait, j’ai du mal à l’exprimer car, avouons-le tout net, je trouve cette idée complètement stupide, d’autant plus stupide qu’elle me paraît inutile. On aurait pu croire qu’on était le premier avril, mais ceux (et celles) qui promeuvent ce type d’écriture sont hélas le plus sérieux du monde.

En clair, il s’agit d’arrêter la suprématie du masculin sur le féminin dans l’expression écrite. Cela oblige alors de rajouter des lourdeurs d’écriture avec un nouveau caractère (le point central) qu’il m’est impossible de proposer ici (je me réduirais donc au simple point sur le sol). Ainsi, au lieu de parler des agriculteurs en général, je devrais écrire, selon ces dictateurs de cette pensée sectaire, des agriculteurs.rices. Comme ça, pas de jaloux, ou plutôt, pas de jalouse ! Sauf que c’est complètement illisible. Et inesthétique (oui, j’aime l’esthétique d’un texte, même si ce n’est pas son élément le plus important). Comment lire un tel mot ? C’est lourd, très lourd.

Heureusement, même s'ils se sont montrés prudents, les deux ministres en charge de la langue française, la Ministre de la Culture Françoise Nyssen et le Ministre de l'Éducation nationale Jean-Michel Blanquer ont désapprouvé l'utilisation de l'écriture inclusive.

Le pire est évidemment pédagogique. Cela va créer de nouvelles discriminations intellectuelles (comme avec la nouvelle orthographe). Le principe de l’écriture inclusive est encore admissible pour des personnes qui sont à l’aise avec l’expression française, mais pour ceux qui apprennent, les écoliers d’abord, les étrangers ensuite ? Cela ne peut que perturber leur acquisition de la langue française qui n’est pas des plus faciles : « On voit mal quel est l’objectif poursuivi et comment il pourrait surmonter les obstacles pratiques d’écriture, de lecture, visuelle ou à voix haute, et de prononciation. Cela alourdirait la tâche des pédagogues. Cela compliquerait plus encore celle des lecteurs. » (Académie française).

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Ce qui est délirant, c’est que ce n’est pas le résultat d’un problème posé et de sa résolution, mais que ce sont les suites d’un véritable délire dogmatique voire sectaire. C’est croire que le genre des mots est assimilable au genre des personnes. Pierre Dac n’aurait jamais osé autant de loufoquerie !

Déjà que je m’agace d’entendre les discours des personnalités politiques (je n’ose plus dire "hommes politiques" !) qui commencent souvent par "Françaises et Français" et qui continuent souvent par "les Françaises zet les Français" ("les Trifouilleuses et les Trifouilleux", etc.), comme si en s’adressant aux seuls Français, on pouvait exclure les Françaises. Comme si les "droits de l’homme" étaient réservés aux seuls "mâles" (les étrangers, d’ailleurs, préfèrent parler des "droits humains", ce qui évite toute contestation sexuée).

Certes, dans certains cas, ces précisions sont nécessaires et heureuses, comme lors des offres d’emploi, domaine où il faut absolument lutter contre toutes les formes de discrimination. Donc souvent, dans les annonces d’offre, on lit, suivie de la fonction, la mention "(h/f)" pour préciser que le recruteur recherche aussi bien un homme qu’une femme (mention juridiquement inutile car il est interdit de ne vouloir recruter que des femmes ou que des hommes, mais sociologiquement heureuse, car cela va mieux en le disant). Nécessairement, si l’on recherche "un agriculteur" (pris dans le sens générique), alors on privilégiera une pseudo-écriture inclusive comme "recherchons agriculteur/trice" pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté.

Dans sa condamnation ferme de l’écriture inclusive, l’Académie française (qui n’est pas opposée aux évolutions de la langue, même quand elles sont douteuses), dans son unanimité, a lancé un véritable cri d’alarme : « Devant cette aberration "inclusive", la langue française se trouve désormais en péril mortel, ce dont notre nation est dès aujourd’hui comptable devant les générations futures. Il est déjà difficile d’acquérir une langue, qu’en sera-t-il si l’usage y ajoute des formes secondes et altérées ? Comment les générations à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre patrimoine écrit ? Quant aux promesses de la francophonie, elles seront anéanties si la langue française s’empêche elle-même par ce redoublement de complexité, au bénéfice d’autres langues qui en tireront profit pour prévaloir sur la planète. » (26 octobre 2017).

On pourrait d’ailleurs imaginer que l’utilisation de cette écriture inclusive aurait peut-être progressé depuis l’éclatement du scandale sexuel du producteur américain Harvey Weinstein le 10 octobre 2017 et que bien des "hommes", qui auraient un peu quelque chose à se reprocher, joueraient le jeu pour se montrer proches et soucieux des femmes… Mais ce ne sont que de vilaines supputations, et les agressions sexuelles voire les viols ne sont en rien comparables à de simples tournures sémantiques qui ne traumatiseront jamais personne dans sa chair ou son âme.

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C’est sûr qu’en apparence, le français ne propose pas un troisième genre, le neutre. En allemand, on peut ainsi l’utiliser à bon escient, en disant par exemple "das Mädchen" au lieu de "die" (sauf au pluriel) car on considère que les "petites filles" ne sont pas encore des femmes, ne sont pas encore "formées", pas vraiment "féminines", même si la pratique tend, en parlant d’elle, à utiliser le pronom "sie" plutôt que "es" (neutre). Du reste, le russe donne aussi cette forme neutre au même mot.

Ce serait intéressant d’imaginer les doctrinaires antisexistes avec l’allemand : ils pourraient s’offusquer que la "petite fille" est neutre et pas féminine, mais ils devraient alors s’offusquer aussi que l’article au pluriel pour tous les genres (en français "les") est "die", soit le même article que celui du féminin singulier ("la"). Idem pour le pronom personne au pluriel, "sie" et le voussoiement ("Sie") qui est le même pronom que le féminin singulier "sie".

En français, d’ailleurs, le masculin ne l’emporte pas systématiquement quand on veut parler des deux sexes de manière générique. Aucun féministe ou aucune féministe (je n’ose indiquer de genre ici) ne serait capable de proposer une solution pour supprimer le féminin systématique lorsqu’on veut parler d’un homme comme d’une personne, comme d’une victime, comme d’une recrue, comme d’une star, comme d’une vedette, comme d’une sentinelle, comme d’une silhouette, comme d’une vigie, comme d’une dupe, comme d’une fripouille, comme d’une estafette, comme d’une b*rne (ou tout autre gros mot du genre p*te), etc. Il doit sûrement y avoir encore d’autres mots féminins pour désigner aussi des hommes.

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On pourrait même imaginer que l’expression des professions au genre indéterminé pourrait se décliner au féminin pour certaines d’entre elles, en disant (pour inclure les hommes et les femmes travaillant ainsi) "les infirmières", "les puéricultrices", etc. reprenant ainsi le contexte socio-culturel actuel ou historique (mais on dira toujours "les professeurs" même si une majorité d’entre eux sont des femmes). Cette idée pourrait cependant conforter au contraire le sexisme dans les professions et ne pas être logique avec le principe du "neutre générique" qui veut que l’indétermination du genre se décline au masculin et pas au féminin.

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C’est d’ailleurs la meilleure "défense" des opposants à cette dogmatique écriture inclusive : le neutre existe en français et se décline comme le masculin. Le meilleur exemple, c’est le pronom impersonnel. Le "on" (qui est singulier et pas pluriel, souvent utilisé à tort au pluriel par confusion avec le pronom "nous"), ou encore le "il" dans "il pleut" ou "il faut", on imagine mal dire "elle pleut" ou "elle faut"…

On n’aurait pas cette confusion mentale entre le genre des mots et le genre des personnes si la grammaire française s’enseignait comme en allemand, en russe, en latin ou en grec ancien, à savoir avec des tableaux de déclinaisons au lieu des appellations très françaises de COD (complément d’objet direct) et COI (complément d’objet indirect), qui font office, en français, d’accusatif et de datif.

Lorsque j’étais en sixième, j’ai mieux compris la grammaire française dès lors que j’apprenais parallèlement la grammaire allemande pour cette raison-là. Les tableaux de déclinaisons sont beaucoup plus logiques et rationnels. Car le français aussi a des déclinaisons, mais on ne le présente pas sous cette forme. Les pronoms personnels, par exemple, sont déclinables.

Nominatif : je, tu, il/elle, nous, vous, ils/elles.
Accusatif : me, te, se, nous, vous, leur/se.
Datif : me, te, se, nous, vous, leur/se.

Cette présentation serait évidemment "révolutionnaire" (ce qui n’est pas mon genre !) et nécessiterait avant de l’enseigner une évaluation fiable. Mais je pense que les esprits rationnels et logiques y gagneraient. Et cette présentation aurait épargné aux locuteurs de la langue française cette stupidité sans nom que représente l’écriture inclusive.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (28 octobre 2017)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Communiqué de l’Académie française du 26 octobre 2017.
L’écriture inclusive.
La réforme de l’orthographe.
La dictée à  l’école.
La réforme du collège.
Le réforme des programmes scolaires.
Le français et l’anglais.
La patriotisme français.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20171026-ecriture-inclusive.html

https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-declinaison-non-inclusive-198154

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2017/10/28/35813041.html






 

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17 avril 2014 4 17 /04 /avril /2014 07:47

Lamartine : « On n’a pas deux cœurs, un pour les animaux et un pour les humains. On a un cœur ou on n’en a pas .»
Gandhi : « On reconnaît le degré de civilisation d’un peuple à la manière dont il traite ses animaux. »


yartiSensible01Ceux qui ont déjà eu à remplir le long questionnaire pour le recensement auront pu s’étonner : l’État leur pose beaucoup de questions parfois très précises sur eux, voire indiscrètes, les personnes qu’ils hébergent, leur profession, leur patrimoine, leurs habitudes de vie, leur lieu de travail, d’habitation, leur mode de transports, etc. et pourtant, malgré toutes ces cases, il manque une rubrique, leurs animaux de compagnie. On n’en parle pas !

Pourtant, en terme à la fois économique et sanitaire, la vision que peut avoir l’État sur les animaux de compagnie n’est pas sans conséquence. En France, il y a désormais un net avantage du chat sur le chien. En 2012, il y avait 7,4 millions de chiens domestiques, en légère diminution ; et en 2008, il y avait 10,7 millions de chats domestiques, en constante progression. Et bien sûr, il y a d’autres animaux de compagnie que le chat et le chien.


Un amendement adopté la nuit

Dans la troisième séance du mardi 15 avril 2014 à l’Assemblée Nationale, celle qui fut ouverte à vingt et une heures, les députés discutaient du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures déposé le 27 novembre 2013 par la Ministre de la Justice Christiane Taubira et qui a déjà été adopté en première lecture le 23 janvier 2014 par le Sénat.

Dans ce texte dont la procédure accélérée a été demandée par le gouvernement, et qui fera l’objet d’ordonnances, on y a mis un peu tout et n’importe quoi.

C’est donc presque sans vraiment grande surprise qu’un amendement (l’amendement n°59) déposé le 11 avril 2014 à la commission des lois par l’ancien Ministre de l’Agriculture Jean Glavany (PS), par Cécile Untermaier (PS), et par la rapporteure du projet Colette Capdevielle (PS), avocate de Bayonne, et adopté le matin du 15 avril 2014 par cette même commission, a provoqué une petite révolution sémantique dans le droit français.

En effet, durant cette séance nocturne qui a suivi, les députés ont adopté cette modification du code civil à insérer avant le titre Ier du livre II en tant qu’article 515-14 : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens corporels. ».

Évidemment, on ne définira pas juridiquement ce que signifie "sensibilité" ni ce que signifie "êtres vivants" ou "animaux", est-ce qu’un virus est vivant ? est-ce que le texte s’appliquera aussi aux insectes, aux poissons ?

Le texte est symbolique puisque les animaux resteront des "biens corporels" en cas de succession ou de séparation.


Ne pas en faire un cavalier

En fait, ce texte est seulement une simplification et une harmonisation avec le code rural et le code pénal qui considèrent déjà les animaux comme des êtres sensibles, alors que le code civil, jusqu’à maintenant, ne les considèrent que comme des "biens meubles" ou des "immeubles par destination".

Jean Glavany a été très clair sur ses intentions : « Le statut de l’animal existe dans notre droit grâce aux mesures adoptées en 1976 [loi Nungesser] et en 1999 [loi du 6 janvier 1999] ; malheureusement, il y a une lacune. Nous pourrions opter pour de nouvelles avancées (…), mais nous tenons à rester dans le cadre du texte qui nous est présenté aujourd’hui (…). Aller plus loin (…), ce serait risquer de créer un cavalier législatif. ».

yartiSensible02

Certains députés de l’opposition, comme Philippe Gosselin (UMP), juriste de la Manche, et Daniel Gibbes (UMP), notaire à Saint-Martin, se sont inquiétés de ce changement sans concertation avec les professionnels de l’élevage qui y voient une remise en cause de leur savoir-faire en matière de bien-être animal. Ils craignent aussi qu’on ouvre une boîte de Pandore qui ferait de cet amendement un "cavalier", terme qui désigne un petit texte à la remorque d’un projet de loi qui est un peu hors sujet, c’est parfois l’occasion pour les parlementaires d’adopter des réformes très importantes de façon très discrète, mais le Conseil Constitutionnel tend de plus en plus à les rejeter en cas de saisine.


Aller plus moins ?

Boîte de Pandore démontrée au cours même de la discussion puisque le groupe écologiste a déposé au dernier moment trois sous-amendements, qui n’ont finalement pas été adoptés, dont un qui en profite pour interdire la corrida et il serait disposé à interdire tout ce qui nuit inutilement aux animaux, en particulier la chasse à courre, et même, la chasse tout court.

Car les écologistes, eux, sont plutôt furieux de cet amendement qui, pourtant, va dans leur sens, celui d’une plus grande attention portée aux animaux. Laurence Abeille (EELV), adjointe de Fontenay-sous-Bois, mais aussi sa collègue socialiste Geneviève Gaillard (PS), vétérinaire et maire sortante de Niort battue, reprochent justement au gouvernement de passer rapidement cet amendement pour enterrer définitivement toute discussion ultérieure sur le statut juridique de l’animal, alors que Geneviève Gaillard dirige justement un groupe de travail sur la question et va très bientôt déposer une proposition de loi.

Jean Glavany a donc eu beau jeu de dire que cette micro-modification ne servait qu’à prendre date : « Ce que je propose avec l’amendement n°59, c’est de mettre le pied dans la porte de sorte qu’elle reste ouverte. », ce qui n’a pas rassuré évidemment les députés défendant les professionnels qui s’occupent des animaux.


Inquiétude des éleveurs

Philippe Gosselin l’a expliqué sans détour : « Le risque est très grand de stigmatiser les professionnels et de les mettre en difficulté, de voir se multiplier les procédures judiciaires à leur encontre. Quid de l’expérimentation médicale ? Qui de l’évolution du bien-être animal et des possibilités de recours à l’abattoir ? La question est de savoir si l’on ne va pas bloquer nos agriculteurs et l’agriculture française. ».

Et de poursuivre : « Cet amendement ouvre la boîte de Pandore et vous le savez. Son auteur (…) avoue lui-même que le but est de mettre le pied dans la porte. Ensuite, il n’y aura plus qu’à pousser pour qu’elle cède, et que nous ayons une vraie révolution, et pas seulement la reconnaissance d’une évolution qui, à certains égards, pouvait s’envisager. Mais elle ne saurait s’envisager ainsi, pas sous cette forme et pas ce soir. ».


Mécontentement des écologistes

Dans une logique diamétralement opposée, Laurence Abeille, au contraire, s’est inquiétée du risque inverse, avec cet amendement : « Certains élevages font encore appel à des pratiques interdites, ce que l’on peut regretter : les reportages que nous avons pu voir à la télévision ont d’ailleurs choqué beaucoup de Français. (…) Ma crainte (…), c’est que cette porte reste simplement entrouverte et que l’on n’aille pas jusqu’au bout. La mesure est symbolique, mais en termes de portée réelle (…), le compte n’y est malheureusement pas. Il est permis de le regretter, parce que notre ambition, en ce qui concerne le statut de l’animal, va bien au-delà de ce qui a été indiqué ici. ».

Et elle-même de rappeler ses motivations : « Reste que la question est d’importance, qu’elle est suivie par des millions de Français soucieux de la condition animale. Nous voulons en finir avec la cruauté envers les animaux, nous voulons le bien-être des animaux, de tous les animaux, et nous voulons que ce soit inscrit dans la loi. ».

Sa collègue Geneviève Gaillard a également conforté cette position : « Nous ne sommes pas très nombreux ce soir dans l’hémicycle, et pourtant ce sujet n’est pas loin de déchaîné les passions… C’est dire à quel point il est nécessaire (…) que nous puissions aller au fond de ces problématiques. Il est possible de faire évoluer le statut juridique de l’animal sans porter atteinte ni à la commercialisation, ni à la production animale, ni à la chasse, ni aux pratiques sportives. Et, au regard de celle de notre société, cette évolution du statut juridique de l’animal nous paraît pouvoir être admise. ».

Comme on le voit, la discussion nocturne a été assez animée malgré le faible nombre de protagonistes. En seconde lecture, les sénateurs pourraient cependant revenir sur cette innovation assez anodine du code civil.


Y aura-t-il un grand débat sur le statut juridique de l’animal ?

Ce n’est qu’un embryon de débat, mais tout laisse penser qu’un vrai débat parlementaire sera accepté par le gouvernement avec la future proposition de loi que présentera Geneviève Gaillard. En tout cas, c’est ce que souhaite Christiane Taubira.

Mais les écologistes ont peut-être raison de douter de la détermination du gouvernement, car cet amendement a été adopté malgré la réticence du Président de la République François Hollande qui avait affirmé le 21 février 2014, à la veille du Salon de l’Agriculture : « Dans le code rural notamment, l’animal est déjà considéré comme un être sensible. Pourquoi ajouter d’autres considérations ? Beaucoup d’efforts ont été réalisés pour le bien-être animal sans qu’il soit nécessaire de les traduire dans une loi. ».

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Les amis des animaux peuvent donc se réjouir discrètement de l’adoption de cet amendement, qui ne sera qu’un petit symbole dans le droit français, mais ils attendront fermement le véritable débat de société que nécessite cette question.

Tant qu’il n’y aucune utilité, il ne faut pas faire souffrir les animaux. Ni dans les salles de classe où il n’est pas nécessaire d’écorcher vif une pauvre grenouille ou une pauvre tortue pour savoir qu’il y a des influx nerveux, ni dans les arènes pour le bon plaisir d'une foule insensible, ni dans les élevages intensifs, ni dans les abattoirs, ni enfin dans la recherche cosmétique.


L’animal n’est pas une chose

Avez-vous déjà offert un chien ou un chat à un proche ? Si oui, c’est une grave erreur. Un animal n’est pas un jouet, n’est pas un téléphone portable, n’est pas un objet. S’occuper d’un animal est une responsabilité personnelle importante. C’est aussi un coût parfois important. L’idée d’avoir un animal doit provenir de la personne qui s’en occupera elle-même.

Le considérer comme objet de consommation, c’est forcément en retrouver plus tard abandonnés. Les refuges sont nombreux qui essaient de gérer cette détresse animale fondée uniquement sur l’irresponsabilité des humains.

On pourra toujours dire qu’il y a des combats plus importants que la vie des animaux, en commençant par les humains, qu’il est insupportable d’imaginer que des êtres humains puissent mourir de faim, de froid. Pourtant, cela forme un tout.

Comme le confortent les deux citations du début, de Lamartine et de Gandhi, rappelées à l’occasion du débat parlementaire par Jean Glavany, ceux qui sont capables de cruauté vis-à-vis des animaux n’auront aucun mal à être cruels avec des êtres humains lorsqu’ils leur auront nié leur propre humanité.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (17 avril 2014)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Les chasseurs…
La vie dans tous ses états.

yartiSensible04



 
http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/les-animaux-sont-des-etres-vivants-150796

 

 

 

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5 décembre 2013 4 05 /12 /décembre /2013 07:38

Bonnet d’âne pour les adolescents français ? Le classement des pays de l’OCDE en matière éducative semble donner une piètre image de la France. Et pourtant, si les inégalités sociales continuent à croître (comme dans tous les autres domaines, en temps de crise), la France n’a pas à rougir de ses performances intellectuelles.


yartiPISA01Comme "prévu" depuis plusieurs jours, la France se retrouve en très mauvaise place dans le classement PISA réalisé par l’OCDE à partir d’une étude qui évalue le niveau de connaissances des adolescents de 15 ans. PISA signifie : Programme international pour le suivi des acquis des élèves.

Bien que CNN avait connaissance du classement dès le 1er décembre 2013, c’est deux jours plus tard que les médias français ont eu l’information.

Il est toujours très difficile pour la France d’accueillir des classements internationaux (c’est aussi le cas pour les meilleures universités du monde avec pour critère la notoriété des travaux de recherche) car elle est restée dans sa tradition arc-boutée sur son principe d’égalité de tous les élèves devant l’école. Égalité théorique.

Je me souviens qu’il était même interdit de faire des classements trimestriels dans les classes, savoir qui étaient les meilleurs élèves de la classe. Mais cette interdiction n’empêchait nullement lesdits élèves de le faire eux-mêmes en collectant les différentes moyennes générales. Quoi de plus motivant, pour un élève classé deuxième de travailler encore plus dur pour atteindre la première place le trimestre suivant ? C’est la saine émulation des compétitions où l’enjeu est peut-être narcissique mais néanmoins moteur.

Dès la veille de la publication (le 2 décembre), le Ministre de l’Éducation nationale Vincent Peillon dramatisait lourdement ces résultats "inacceptables" et en profitait pour vendre sa "refondation de l’école" dont on se demande vraiment à quoi cela peut correspondre sinon à ce changement des rythmes scolaires qui place les municipalités, le personnel enseignant et les parents d’élèves dans la plus grande perplexité. Pas sûr que les occupations périscolaires soient à même de redresser le tir d’ici trois ans. Le gouvernement semble s’être trompé sur les priorités. Cela dit, Vincent Peillon annoncera une nouvelle série de mesures pour "refonder l’école" le 12 décembre 2013 ; nous verrons bien ce qu’il proposera.

D’après les informations parcellaires qui ont été mises en avant dans le "service après-vente" du classement, la France pêcherait justement par son manque d’égalité. L’un des premiers marchés des cours particuliers, le pays laisserait à l’abandon les élèves les moins privilégiés de ses classes.

Les meilleurs élèves seraient toutefois encore meilleurs par rapport aux autres pays que dans la précédente étude publiée il y a trois ans.

En mathématiques, la France se situe ainsi à la 18e place sur les 34 pays membres de l’OCDE, mais à la 13e place pour les élèves issus de milieux favorisés et à la 33e place pour ceux issus de milieux défavorisés. L’écart est immense (la fracture sociale ?). Pourtant, il n’y a pas de fatalité à une sorte d’aristocratie intellectuelle ; une récente étude avait conclu par exemple que seulement 5% des élèves de l’ENA avaient des parents issus de la haute fonction publique.

yartiPISA02

Évidemment, il faut savoir raison garder et prendre un peu de recul.

Déjà, parce que la France n’est pas en si mauvaise place dans l’excellence intellectuelle. La France est par exemple classée première ex-æquo avec les États-Unis pour la Médaille Field (la plus prestigieuse distinction pour les mathématiques, délivrée seulement tous les quatre ans à des chercheurs de moins de 40 ans), avec 11 lauréats. Parmi les derniers lauréats de 2010, il y a deux Français, Cédric Villani et Ngô Bao Châu (ainsi que Wendelin Werner en 2006 et Laurent Lafforgue en 2002). Depuis 1994, il y a toujours eu un Français parmi les lauréats à chaque attribution.

Pour le Prix Nobel de Physique, la France est classée quatrième (13 lauréats dont Serge Haroche en 2012 et Albert Fert en 2007) derrière les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Allemagne. Pour le Prix Nobel de Chimie, en quatrième position aussi (8 lauréats dont Yves Chauvin en 2005) derrière les mêmes pays, tout comme pour le Prix Nobel de Médecine (13 lauréats dont Jules Hoffmann en 2011, Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi en 2008). Quant au Prix Nobel de Littérature, la France est classée première, avec 14 lauréats (dont Jean-Marie Le Clézio en 2008 et Gao Xingjian en 2000), devant les trois autres pays du peloton de tête.

Il faut ensuite relativiser, parce que le classement PISA se fait avec une fenêtre d’indétermination de 10 places (erreur de plus ou moins 5 places !), c’est dire si l’étude est précise et si les changements dans le classement d’une étude à l’autre sont significatifs.

Enfin, parce que la France est comparée à des pays asiatiques dont les Français refuseraient nettement le système éducatif hyper-élitiste, en particulier en Corée du Sud et en Chine (en tête du classement). Certains élèves travaillent 50 heures par semaine, avec des cours très tard en début de nuit, et sont poussés psychologiquement pour préparer les concours et les examens afin d’atteindre les plus hauts niveaux. Dans ces pays, on est loin du débat un peu dérisoire des rythmes scolaires (le pendant éducatif des 35 heures ?).

Pour autant, la situation française n’est évidemment pas satisfaisante, surtout parce que l’étude pointe du doigt la grande disparité entre les élèves les plus favorisés et les élèves les moins favorisés socialement.

Ce qui semblait rarement commenté, pour analyser le classement PISA, c’est la grande différence d’atmosphère au sein même des classes selon les pays : lorsqu’un enseignant est obligé de passer 50% de son temps à faire la police pour obtenir un peu de discipline, il est sûr qu’il y a perte de capacité dans l’acquisition des connaissances. De même, lorsqu’on réduit le nombre total d’heures de cours dans une année, on ne s’étonnera pas que les programmes (bien que sans cesse allégés) ne soient pas achevés à la fin de l’année.

Au lieu de s’agiter assez inefficacement avec ce classement, les ministres du gouvernement de Jean-Marc Ayrault feraient mieux d’abord de ne pas continuer à détricoter le lien social et notamment, de ne pas supprimer des initiatives socialement heureuses, comme les internats d’excellence.

Lors de sa campagne présidentielle, le Président François Hollande avait placé la jeunesse comme priorité de son quinquennat. Visiblement, comme pour sa lutte contre le chômage, les mots ne paient plus…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (4 décembre 2013)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
François Hollande.
Jean-Marc Ayrault.
Vincent Peillon.
Les internats d’excellence.

yartiPISA03



http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/pisa-on-se-calme-144622

 

 

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25 mai 2013 6 25 /05 /mai /2013 21:32

Né le 6 novembre 1922 à Saint-Menehould (Marne), Michel Crozier fut un diplômé de HEC et a passé un doctorat en droit sur les syndicats aux Etats-Unis. Il a fait toute sa carrière au CNRS où il est devenu directeur de recherches, en particulier sur le phénomène bureaucratique en France. Il fut le principal concepteur de l'analyse stratégique en sociologie des organisations. Parmi plus d'une vingtaine d'essais, il a écrit "Le Mal américain" en 1980.

SR

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15 mai 2013 3 15 /05 /mai /2013 21:17

Plusieurs rapports ont été publiés sur l'évaluation des internats d'excellence au bout de quelques années. Je mets les liens pour se les procurer ainsi qu'un lien pour télécharger une étude de 2006 sur l'effet d'une réduction des effectifs des classes.

Cliquer sur le lien pour télécharger les rapports (sous forme de fichiers .pdf).


Rapport de Patrick Rayou, oct 2012 :
http://centre-alain-savary.ens-lyon.fr/CAS/internats/rapport-sur-les-internats-dexcellence-octobre-2012


Rapport des inspections générales de l'éducation nationale, juin 2011 :
http://media.education.gouv.fr/file/2011/56/5/2011-057-IGEN-IGAENR_215565.pdf


Présentation officielle des internats d'excellence, 2011 :

http://cache.media.eduscol.education.fr/file/dossiers/27/7/InternatExcellence-extrait-VF_171277.pdf


Rapport d'évaluation sur Sourdun, 11 avril 2013 :
http://www.povertyactionlab.org/sites/default/files/documents/Rapport-sourdun-jpal.pdf


Résumé du rapport sur Sourdun, 11 avril 2013 :
http://www.povertyactionlab.org/sites/default/files/documents/n1-JPAL-IPP-avril2013.pdf


Etude sur les effectifs dans les classes, mars 2006 :
http://cache.media.education.gouv.fr/file/48/4/2484.pdf


SR

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 21:39

(verbatim)


Circulaire d'orientation et de préparation de la rentrée 2013

NOR : MENE1309444C
circulaire n° 2013-060 du 10-4-2013
MEN - DGESCO


Texte adressé aux rectrices et recteurs d'académie ; aux directrices et directeurs académiques des services de l'éducation nationale ; aux inspectrices et inspecteurs chargés des circonscriptions du premier degré ; aux inspectrices et inspecteurs de l'éducation nationale enseignement technique, enseignement général et d'orientation ; aux inspectrices et inspecteurs d'académie-inspectrices et inspecteurs pédagogiques régionaux ; aux chefs d'établissement ; aux directrices et directeurs d'école ; aux personnels enseignants, d'éducation, d'orientation, administratifs, techniques, sociaux et de santé

Sommaire 

  • I - Les cinq grandes priorités de la rentrée 2013
  • I.1. Reconstruire la formation professionnelle des métiers du professorat et de l'éducation
  • I.2. Rénover en profondeur l'enseignement du premier degré
  • I.3. Faire entrer l'École dans l'ère du numérique
  • I.4. Atteindre des objectifs ambitieux de réduction du décrochage scolaire
  • I.5. Développer l'éducation artistique et culturelle (EAC)
  • II - Une année de transition pour le collège et le lycée
  • II.1. Rénover le collège unique : offrir des réponses pédagogiques différenciées pour garantir à tous les élèves l'acquisition du socle commun
  • II.2. Permettre à tous les élèves du lycée de réussir pour favoriser leur poursuite d'études dans l'enseignement supérieur et leur insertion dans la vie professionnelle
  • II.3. Relancer la mission de formation continue de l'éducation nationale
  • III - Favoriser la réussite éducative
  • III.1. Relancer l'éducation prioritaire
  • III.2. Faire en sorte que les dispositifs favorisant la réussite éducative bénéficient d'abord à ceux qui en ont le plus besoin
  • III.3. Mieux scolariser les élèves en situation de handicap et les élèves à besoins éducatifs particuliers
  • III.4. Installer un cadre protecteur et citoyen pour les élèves et les personnels
  • III.5. Améliorer le dialogue entre l'École, ses partenaires et les familles
  • III.6. Mettre l'innovation au service de la refondation

 

 

La refondation de l'École de la République est une politique globale qui comprend la loi d'orientation et de programmation, actuellement examinée par le Parlement, et toutes les autres mesures relevant de réformes et de dispositions non législatives. Dès la rentrée scolaire 2013 et tout au long des prochaines années, il s'agit d'accomplir les évolutions souhaitées pour renouer avec la promesse républicaine de la réussite pour tous.

 

Confrontée à de profondes inégalités sociales et territoriales, l'École ne parvient pas à assurer pleinement ses missions. Les résultats des élèves sont, dans certains domaines, inférieurs à ce qu'ils devraient être. Les écarts se creusent entre les élèves ayant les meilleurs résultats et ceux, de plus en plus nombreux dans les familles les plus défavorisées, qui obtiennent les résultats les plus faibles.

 

L'effort collectif doit donc porter sur les fondements mêmes du système éducatif, dans toutes ses composantes.

 

Après des années de réduction des emplois, la refondation de l'École consiste d'abord à réinvestir significativement dans les ressources humaines. Pour cela, il est mis un terme aux suppressions d'emplois : tous les départs définitifs d'enseignants seront remplacés et 60 000 postes seront créés sur la durée du quinquennat. Ces nouveaux moyens permettront, d'une part, de rétablir une véritable formation initiale pour les enseignants et, d'autre part, de servir la priorité donnée au premier degré. Ils permettront également, dans les collèges, de mettre en place des dispositifs pédagogiques adaptés à l'hétérogénéité des publics accueillis. Enfin, des créations d'emplois d'autres personnels sont prévues, notamment pour mieux accompagner les élèves en situation de handicap et ceux présentant des besoins éducatifs particuliers. S'agissant de la rentrée 2013, ce sont 6 770 équivalents temps plein (ETP) d'enseignement qui seront créés dans les écoles et les établissements scolaires publics.

 

Mais des moyens supplémentaires ne peuvent produire leurs effets que s'ils coïncident avec une évolution en profondeur des pratiques professionnelles et une amélioration significative du bien-être à l'école. La refondation est donc bien, dans sa définition même, une réforme pédagogique majeure, qui fait de la qualité le cœur de ses enjeux : qualité de la formation des personnels, qualité du contenu des enseignements, qualité des organisations et des dispositifs scolaires, qualité des pratiques pédagogiques, qualité des apprentissages, qualité de vie des élèves durant leur scolarité, qualité de la relation avec les familles et l'ensemble des acteurs de la réussite éducative.

 

Enfin, la refondation de l'École est aussi une méthode, fondée sur la concertation, le dialogue social et la confiance. Elle repose sur la mobilisation des équipes de terrain et l'accompagnement du changement autour des grands axes qui fourniront le plan de cette circulaire :

- mettre en place une nouvelle formation initiale et continue aux métiers du professorat et de l'éducation et faire évoluer les pratiques pédagogiques ; donner la priorité à l'école primaire pour assurer l'apprentissage des fondamentaux et réduire les inégalités ; faire entrer l'École dans l'ère du numérique ; faire évoluer le contenu des enseignements ; assurer la progressivité des apprentissages de la maternelle au collège (I) ;

- permettre à tous de réussir dans le second degré et de s'insérer dans la vie professionnelle dans les meilleures conditions (II) ;

- favoriser la réussite éducative et améliorer le climat scolaire, notamment en installant pour chacun des acteurs - élèves, familles et personnels - un cadre protecteur et citoyen dans tous les territoires (III).

I - Les cinq grandes priorités de la rentrée 2013

I.1. Reconstruire la formation professionnelle des métiers du professorat et de l'éducation

La formation des personnels d'enseignement et d'éducation est la clef de voûte de la refondation de l'École. Le projet de loi d'orientation et de programmation pose les bases d'un nouveau système de formation qui permettra l'acquisition, de manière progressive et intégrée, d'un haut niveau de compétence professionnelle, tant disciplinaire que pratique. Dans cette optique, la mise en place, dès la rentrée, des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE), placées sous la responsabilité de l'ensemble des universités d'une académie, associera pleinement les services académiques comme les praticiens de l'éducation nationale.

 

La création des ESPE et la mise en œuvre des masters à vocation professionnelle « Métier de l'enseignement, de l'éducation et de la formation » (MEEF) requièrent la participation active des personnels de l'éducation nationale pour compléter l'équipe pédagogique des ESPE et assurer une partie des activités de formation (enseignement, tutorat, etc.). Les interventions des formateurs de terrain, inspecteurs, professeurs, personnels de direction, sont à ce titre essentielles. Une convention annuelle entre les ESPE et l'académie formalisera les actions et les moyens qui concourent conjointement à la formation des enseignants (organisation des stages, échanges de services, moyens mis à disposition, formation continue, etc.). Par ailleurs, les académies s'attacheront à offrir les meilleures conditions de stage possibles aux étudiants des masters MEEF afin qu'ils puissent profiter pleinement de la formation alternée, tant à l'ESPE qu'au contact de professionnels confirmés.

Favoriser l'accueil, l'accompagnement et la formation des futurs professeurs

La qualité des dispositifs d'accueil, d'accompagnement et de formation des futurs professeurs est indispensable pour restaurer l'attractivité du métier d'enseignant. Ainsi, en lien avec la semaine d'accueil des professeurs stagiaires lors de la rentrée, les académies organiseront un accueil spécifique pour les étudiants admissibles aux concours qui exerceront une activité d'enseignement durant leur deuxième année de master. Leur accompagnement et leur formation professionnelle feront l'objet d'une attention d'autant plus grande de la part des académies, en association avec les ESPE, qu'ils n'auront pas pu bénéficier de la réforme de la formation initiale des enseignants. Un accueil spécifique devra également être réservé aux étudiants relevant du dispositif des emplois d'avenir professeur. La mobilisation des personnels accompagnant les futurs professeurs sera déterminante, qu'il s'agisse des maîtres-formateurs, des conseillers pédagogiques, des tuteurs, mais aussi des directeurs d'école, des chefs d'établissement, des inspecteurs territoriaux et l'ensemble des équipes pédagogiques. Cet accueil doit aussi mobiliser l'ensemble des équipes pédagogiques.

Relancer la formation continue des personnels

Pilotée par les services académiques, la formation continue des enseignants associera l'ESPE comme opérateur privilégié, de façon à renforcer les liens entre les enseignants-chercheurs et les praticiens et à faire bénéficier les personnels de l'éducation nationale des apports de la recherche. Les ESPE participeront notamment à la formation d'un vivier de formateurs académiques qui sera élargi et renouvelé au cours des prochaines années. Ces personnes-ressources seront mobilisées pour favoriser le déploiement d'actions de formation au plus près des lieux d'exercice des enseignants (circonscriptions, bassins, établissements). Des formations communes entre enseignants du premier et du second degrés seront encouragées, dans le cadre d'un plan académique global intégrant les deux niveaux, afin de renforcer le pilotage, la cohérence et la lisibilité de l'offre de formation sur l'ensemble de l'académie.

 

Parmi les différentes modalités de formation continue et dans le cadre des plans académiques et départementaux de formation, comme le prévoit la circulaire n° 2013-019 du 4 février 2013, les professeurs des écoles suivront neuf heures de formation professionnelle continue dans le cadre de leurs obligations réglementaires de service, effectuées, pour tout ou partie, sous la forme de sessions de formation à distance sur des supports numériques.

Développer les formations en ligne

Un « Campus numérique » donnera accès, dès la rentrée, à toutes les ressources et à tous les parcours de formation disponibles qui pourront être utilisés par les acteurs impliqués dans les animations et les formations comme par les personnels eux-mêmes. La formation en ligne, associant accompagnement en présentiel et formation à distance, permettra de renouveler et d'élargir les modalités de formation, d'offrir un nombre accru de ressources et de resserrer les liens entre formation initiale et formation continue. Aux côtés des ESPE qui développeront leurs modules et leurs ressources de formation en ligne, les académies auront recours au dispositif Pairform@nce pour produire leurs propres parcours et surtout pour déployer les formations en ligne dans le cadre de la formation continue des enseignants, et plus particulièrement des professeurs des écoles. Ces derniers pourront accéder, dès le mois d'octobre, à des modules de formation à distance spécialement conçus à leur intention et offrant un large éventail de ressources.

 

I.2. Rénover en profondeur l'enseignement du premier degré

Redéfinir les missions de l'école maternelle

Prochainement redéfinie comme un cycle unique, spécifiquement centrée sur le développement affectif, social, sensoriel, moteur et cognitif de l'enfant, l'école maternelle proposera une pédagogie adaptée à l'âge des enfants pour les préparer de manière progressive aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire et jouer le rôle majeur qui doit être le sien dans la prévention des difficultés scolaires et la réduction des inégalités. À ce titre, les enseignants de grande section et de cours préparatoire auront des échanges sur les acquis des élèves à l'issue de l'école maternelle et sur les besoins spécifiques des élèves bénéficiant d'aménagements particuliers de scolarité.

 

En favorisant un meilleur accès au langage pour les enfants qui en sont le plus éloignés dans leur cadre de vie quotidien, la scolarisation avant l'âge de trois ans (circulaire n° 2012-202 du 18 décembre 2012) peut constituer une chance pour l'enfant, lorsqu'elle correspond à ses besoins et se déroule dans des conditions adaptées. Elle sera développée en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales et de montagne, comme dans les départements et régions d'outre-mer. 3 000 emplois seront consacrés à cette priorité durant la mandature.

 

Faire évoluer les pratiques pédagogiques à l'école primaire

L'acquisition des savoirs fondamentaux reste l'objectif premier de l'école primaire. Il s'agit de conduire chaque élève à la maîtrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Au total, 7 000 emplois seront consacrés au renforcement de l'encadrement pédagogique dans les écoles difficiles et participeront ainsi à l'amélioration des résultats scolaires à l'école élémentaire au cours des quatre prochaines années.

 

Comme le prévoit la circulaire n° 2012-201 du 18 décembre 2012, le dispositif « plus de maîtres que de classes » permettra, dès la rentrée 2013, dans les secteurs les plus fragiles, d'accompagner des organisations pédagogiques innovantes, afin de prévenir les difficultés et d'aider les élèves à effectuer les apprentissages fondamentaux indispensables à une scolarité réussie. L'action des enseignants spécialisés exerçant dans les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) ne se confond pas avec celle du dispositif « plus de maîtres que de classes », mais pourra développer des complémentarités avec ce dernier.

 

Particulièrement précieuse, l'expertise des enseignants spécialisés doit être mieux valorisée. Une concertation sur l'aide aux élèves en difficulté est menée pour améliorer la coordination, la cohérence et l'efficacité des interventions des différents professionnels. Dans ce cadre, le rôle des Rased, qui retrouveront toute leur place auprès des équipes pédagogiques des écoles, sera amené à évoluer.

 

Pour tenir compte de l'évolution des effectifs d'élèves, améliorer le remplacement ainsi que les dispositifs « scolarisation des enfants de moins de trois ans » et « plus de maîtres que de classes », 3 000 équivalents temps plein seront créés dans le premier degré dès la rentrée scolaire 2013.

 

Au-delà même de ces créations d'emplois, les directeurs académiques des services départementaux de l'éducation nationale s'attacheront à améliorer la cohérence entre les objectifs pédagogiques et la gestion des ressources humaines. Les IEN veilleront, en concertation avec les équipes pédagogiques, à la prise en charge des classes de cours préparatoire par des professeurs expérimentés.

 

Enfin, dès son installation, le nouveau Conseil supérieur des programmes s'attachera en priorité à réécrire les programmes de l'enseignement élémentaire en cohérence avec le nouveau socle de connaissances, de compétences et de culture.

 

Respecter les rythmes des enfants

La réussite des élèves à l'école primaire dépend aussi des conditions dans lesquelles se déroulent les apprentissages. Il est donc nécessaire d'instaurer un équilibre entre le temps scolaire et le temps périscolaire. Le projet éducatif territorial (PEDT) est l'outil de collaboration locale qui peut rassembler l'ensemble des acteurs et permettre ainsi d'organiser des activités périscolaires prolongeant  le service public d'éducation et en complémentarité avec lui (circulaire interministérielle du 20 mars 2013). Le temps scolaire est, tout particulièrement pour les plus jeunes, un temps d'éveil progressif à la connaissance et à la culture, à l'épanouissement de la personnalité, qui doit s'articuler avec d'autres temps éducatifs pour construire, dans l'intérêt de l'enfant et de l'élève, un parcours éducatif cohérent et de qualité. La nouvelle organisation du temps scolaire à l'école primaire (décret n° 2013-77 du 24 janvier 2013 et circulaire n° 2013-017 du 6 février 2013) vise précisément à mieux respecter les rythmes d'apprentissage et de repos des enfants, en instaurant une semaine scolaire plus équilibrée, organisée sur neuf demi-journées, avec un allègement de la journée d'enseignement. Les activités pédagogiques complémentaires (APC) seront organisées dans toutes les écoles. Elles se substituent à l'aide personnalisée, et visent soit à aider les élèves lorsqu'ils rencontrent des difficultés dans leurs apprentissages, soit à les accompagner dans leur travail personnel ou leur proposer toute autre activité prévue par le projet d'école. Dans les écoles qui n'ont pas choisi la semaine de quatre jours et demi à la rentrée prochaine, on veillera à regrouper les APC sur des plages horaires suffisamment longues pour assurer leur efficacité pédagogique, sans amputer le temps de pause méridienne.

 

Préparer de nouveaux dispositifs d'évaluation

La présente année scolaire est une année de transition dans l'attente de la réorganisation des cycles d'enseignement et de la mise en place de nouveaux dispositifs d'évaluations nationales. Pour cette année 2013, les évaluations de fin de CE1 et de fin de CM2 sont des outils pédagogiques utilisés librement par les maîtres, destinés à aider les écoles dans leurs choix pédagogiques pour mieux faire réussir les élèves. Ces évaluations seront utilisées uniquement dans les écoles et ne donneront pas lieu à une remontée des résultats. Pour l'année scolaire 2013-2014, de nouvelles modalités seront fixées, une fois que la structure des cycles aura été décidée, sur la base des propositions du Conseil supérieur des programmes et du Conseil national d'évaluation.

 

I.3. Faire entrer l'École dans l'ère du numérique

Dans une société où la production et la transmission des connaissances sont radicalement bouleversées par les technologies numériques, l'École doit prendre la mesure de ces transformations et accompagner tous les élèves dans l'acquisition et la maîtrise des compétences numériques. Elle doit aussi, grâce aux outils numériques, développer des pratiques pédagogiques attractives, innovantes et efficaces, offrant au système éducatif un véritable levier d'amélioration.

 

Le développement des formations au numérique constituera un moyen essentiel pour favoriser le déploiement des usages dans les classes ; il devra faire partie de la formation initiale et continue dispensée par les ESPE.

 

Pour favoriser ces évolutions, un service public du numérique éducatif est instauré afin de créer les conditions d'une action globale, concrète et durable en faveur du développement des usages par les élèves.

 

À moyen terme, il s'agira de mettre en place de nouveaux services numériques. À la rentrée 2013, ils concerneront les apprentissages fondamentaux et l'accompagnement personnalisé. Le développement des téléservices et la poursuite de la généralisation des espaces numériques de travail (ENT) dans les académies, en étroite collaboration avec les collectivités locales, assureront notamment une implication plus forte des parents dans le cadre des établissements.

 

Partenaires du service public du numérique éducatif, les collectivités devront être pleinement associées à la définition et à la mise en œuvre académique de la stratégie numérique. À cet effet, une instance de dialogue réunira dans chaque académie les acteurs départementaux et régionaux en charge du numérique.

 

La mise en œuvre de la stratégie numérique reposera sur la mobilisation des académies qui coordonneront leurs actions dans un projet numérique académique et créeront ainsi une dynamique auprès des écoles, des établissements et des personnels.

 

I.4. Atteindre des objectifs ambitieux de réduction du décrochage scolaire

La lutte contre le décrochage scolaire constitue un enjeu majeur pour la cohésion sociale et l'équité du système éducatif. Une politique volontariste et efficace dans ce domaine repose sur un pilotage fort, aux niveaux national et académique comme dans les établissements. La mobilisation de toute la communauté éducative, en lien avec les collectivités locales et les représentants du monde professionnel, devra permettre, à terme, de proposer une solution à chaque jeune en situation de décrochage.

 

Pour la rentrée 2013, ce sont 20 000 jeunes décrocheurs que l'on devra aider à s'inscrire dans un parcours de réussite et, ainsi, à reprendre une formation ou à construire un projet professionnel. Le partenariat noué avec l'Agence du service civique y contribuera. Un  réseau « formation qualification emploi » (FOQUALE) doit être constitué sur le territoire de chaque plateforme de suivi et d'appui aux décrocheurs pour fédérer l'offre de solutions de l'éducation nationale. Parmi les ressources susceptibles d'être mobilisées, les possibilités d'accès aux structures innovantes de raccrochage (micro-lycée, lycée nouvelle chance, collège-lycée élitaire pour tous, pôle innovant lycéen, etc.) seront développées, avec l'objectif de proposer au moins une structure par académie.

 

Pour faire reculer le phénomène du décrochage, il convient de répondre à un double impératif : développer les solutions proposées aux jeunes décrocheurs et prévenir en amont les risques du décrochage. L'ensemble des personnels des collèges, des lycées et des CIO doivent être sensibilisés à leur rôle déterminant pour favoriser la persévérance scolaire et le bien-être à l'école. Il s'agit de redonner aux élèves les plus en difficulté le goût de l'école et de mieux les accompagner dans la préparation de leurs choix en matière d'orientation, en leur proposant éventuellement un tutorat. Les enseignants devront être mieux associés au repérage des signes annonciateurs du décrochage, notamment l'absentéisme. Dès la rentrée scolaire, un référent « décrochage scolaire » sera désigné dans chaque établissement public local d‘enseignement connaissant un fort taux d'absentéisme. Sous l'autorité du chef d'établissement, il sera chargé de la coordination des actions de prévention du décrochage, des relations avec les parents des élèves concernés et, le cas échéant, de l'aide au retour des décrocheurs dans les établissements.

 

Pour les élèves en rupture plus profonde avec les exigences de la vie scolaire, en risque de déscolarisation ou en voie de marginalisation, une démarche d'aide et d'accompagnement personnalisé sera proposée dans le cadre des dispositifs relais (classes, ateliers, internats). Ceux-ci permettront une prise en charge éducative plus globale, au sein d'un établissement scolaire (voir aussi III. 4). 

 

Afin d'améliorer la transition entre le collège et le lycée, les processus d'orientation seront revisités pour faciliter la construction de parcours individuels d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel. L'orientation, notamment en fin de troisième, devra être améliorée pour n'être plus vécue comme une orientation subie mais comme un choix réfléchi et assumé. La possibilité de laisser aux parents le choix de la voie d'orientation en fin de troisième sera expérimentée dans quelques académies à la rentrée 2013.

 

I.5. Développer l'éducation artistique et culturelle (EAC)

Puissant levier d'émancipation et d'intégration sociale, l'éducation artistique et culturelle participe pleinement de la lutte contre les inégalités sociales, culturelles et territoriales. La mise en place d'un parcours d'éducation artistique et culturelle pour chaque élève, tout au long de la scolarité, de l'école primaire au lycée, lui permettra, grâce aux enseignements et aux actions éducatives, de faire l'expérience de pratiques artistiques de plus en plus riches, d'acquérir des repères culturels de plus en plus complexes et de se familiariser avec les œuvres d'art pour devenir un spectateur averti et critique. Pour garantir la cohérence d'un tel parcours, notamment entre l'école et le collège, les approches pédagogiques devront être diversifiées, en recourant davantage à la démarche de projet et aux partenariats. Une circulaire précisera le contenu et les modalités d'organisation de ce parcours.

II - Une année de transition pour le collège et le lycée

Sous réserve des choix que fera le Parlement, la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'École de la République devrait renvoyer à des dispositions réglementaires la définition des cycles d'enseignement, celle du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, ainsi que les conditions de certification à la fin du collège. Le Conseil supérieur des programmes émettra des avis et fera des propositions sur ces points fondamentaux pour une organisation cohérente de l'ensemble de la scolarité obligatoire. Il se prononcera aussi sur l'évolution des programmes de l'ensemble du cursus scolaire.

 

Compte tenu du temps nécessaire à l'élaboration de ces dispositions nouvelles, les choix qui présideront à l'évolution du collège ne pourront être arrêtés qu'en 2014.

 

S'agissant du second cycle, un bilan des réformes engagées en 2009 (lycée professionnel) et 2010 (lycée d'enseignement général et technologique) sera réalisé à la fin de l'année 2013, avant de mettre à l'étude les transformations nécessaires.

 

Pour le collège comme pour le lycée, l'année scolaire 2013-2014 sera donc une année de transition qui devra être mise à profit pour approfondir l'analyse des difficultés rencontrées et pour amorcer, de façon cohérente et concertée, les évolutions souhaitables.

 

Dès cette année, un effort de création d'emplois sera réalisé dans le second degré, en priorité pour le collège, à hauteur de 3 770 équivalents temps plein (ETP). Il sera en partie consacré au renforcement des moyens de remplacement.

 

II.1. Rénover le collège unique : offrir des réponses pédagogiques différenciées pour garantir à tous les élèves l'acquisition du socle commun

Chargé de garantir à tous les élèves, à l'issue de la scolarité obligatoire, la maîtrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, le collège unique devra renforcer ses liens avec l'école élémentaire pour favoriser la progressivité des apprentissages et améliorer la transition entre l'école et le collège.

 

Prévu dans le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'École de la République, un conseil école-collège, à vocation exclusivement pédagogique, sera progressivement mis en place au cours de la prochaine année scolaire. Il permettra de préfigurer le futur cycle d'apprentissage associant le CM2 et la 6ème, disposition également présente dans l'annexe du projet de loi. 

 

Dans l'attente des prochaines décisions, les établissements veilleront à poursuivre l'évaluation des acquis du socle, grâce à une nouvelle version simplifiée du livret personnel de compétences, pour l'école comme pour le collège. Les conditions d'attribution du diplôme national du brevet (DNB) demeurent inchangées. Le bilan des acquis du socle pourra aussi s'appuyer sur les évaluations en classe de cinquième, qui seront poursuivies, exclusivement pour les collèges qui le souhaitent. Elles permettent d'établir très tôt un diagnostic pour chaque élève et, ainsi, de déclencher ou ajuster des modalités d'accompagnement jusqu'à la troisième.

 

Proposer des réponses pédagogiques différenciées, en fonction des besoins des élèves, est une exigence à laquelle le collège doit répondre. Chaque élève doit pouvoir trouver en son sein une solution adaptée à sa situation personnelle, notamment s'il est en situation de difficulté scolaire : il s'agit d'accorder une attention bienveillante à chaque élève et de mobiliser toute l'équipe pédagogique et éducative, notamment dans le cadre du conseil pédagogique pour l'accompagner sur un chemin personnalisé de réussite et lui permettre de révéler son potentiel. Il convient d'écarter toute forme de relégation et d'orientation précoce. C'est la raison pour laquelle toutes les formes d'alternance sont à présent proscrites pour les élèves de collège de moins de 15 ans, et notamment les dispositifs d'alternance en classe de quatrième qui avaient été introduits par la circulaire n° 2011-127 du 26 août 2011. Le « dispositif d'initiation aux métiers en alternance » (Dima) doit être réservé exclusivement aux élèves ayant 15 ans révolus.

 

Les chefs d'établissement et les équipes pédagogiques accorderont la plus grande attention au suivi des élèves en grande difficulté. Les dispositions du projet de loi en cours d'examen au Parlement ne modifient en rien la situation des sections d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa) comme des établissements régionaux d'enseignement adapté (Erea), dont les fondements juridiques, l'organisation et les missions sont maintenus.

 

Pour accompagner tous les élèves et lutter efficacement contre les inégalités sociales, culturelles et territoriales, le collège devra redonner du sens à la notion de parcours et l'inscrire dans un cadre renouvelé. À partir de la rentrée 2013, outre le parcours d'éducation artistique et culturelle (voir I. 5.), sera progressivement construit le « parcours d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel ». Ce parcours permettra aux élèves, dans une approche d'éducation à l'orientation dynamique et cohérente sur l'ensemble de leur scolarité, d'élaborer progressivement un projet personnel, fondé sur une connaissance du monde économique et professionnel, ainsi que des voies de formation et des métiers. Une circulaire précisera le contenu de ce parcours.

 

Les classes de troisième préparatoires aux formations professionnelles, dites « Prépa-pro », qui se sont substituées depuis la rentrée 2011 aux troisièmes à module de découverte professionnelle 6 heures, sont conservées. Les aménagements particuliers du parcours des élèves déjà mis en place, au titre du premier alinéa de l'article D. 332-6 du code de l'éducation, de type « dispositifs relais » ou « parcours individualisés », pourront aussi être maintenus, dans l'attente d'un nouveau cadrage de ces aménagements.

 

La maîtrise des langues vivantes est aussi un facteur de la réussite scolaire. Elle sera facilitée par le lien renforcé entre l'école et le collège et le recours aux outils numériques. L'expérimentation visant à laisser davantage de liberté aux établissements volontaires dans la répartition des heures d'enseignement de langues se poursuivra.

 

II.2. Permettre à tous les élèves du lycée de réussir pour favoriser leur poursuite d'études dans l'enseignement supérieur et leur insertion dans la vie professionnelle

Les réformes engagées en 2009 et 2010 vont permettre d'appréhender, à la session 2013 du baccalauréat, les résultats des élèves sur la totalité d'un cycle de formation. Le premier trimestre de l'année scolaire 2013-2014 devra donc être l'occasion de dresser un bilan quantitatif et qualitatif, aux niveaux national et académique, des premiers effets de ces réformes pour envisager ensuite les axes sur lesquels la refondation devra porter.

 

Une attention particulière devra être portée à la valorisation des parcours de formation professionnelle afin de rendre ceux-ci plus attractifs et de diminuer sensiblement les sorties en cours de cursus. Des parcours pédagogiques personnalisés spécifiques doivent être mis en œuvre afin d'accompagner les jeunes jusqu'à l'obtention d'un diplôme professionnel. Dans ce cadre, les résultats au baccalauréat, qui ont notamment connu une baisse en voie professionnelle à la session 2012, doivent d'ores et déjà être améliorés dans toutes les séries et spécialités. Les observations sur la mise en œuvre de l'accompagnement personnalisé et des stages (passerelles ou de remise à niveau) soulignent la nécessité de veiller à la cohérence entre ces dispositifs et les besoins des élèves. Les recteurs devront s'assurer que les inspecteurs pédagogiques (IA-IPR et IEN ET-EG) sont mobilisés aux côtés des enseignants des lycées pour les aider dans ce travail. Ces efforts doivent permettre une amélioration des résultats aux examens, dans l'attente de mesures de simplification des modalités de certification au baccalauréat professionnel, dans le cadre des concertations à venir. Dans ce cadre, il convient de ne pas oublier les résultats au diplôme intermédiaire dans les cursus de baccalauréat professionnel, qui permet d'assurer à tous un diplôme minimum et de lutter contre les sorties sans diplôme.

 

Les dispositifs de personnalisation des parcours devront également être conçus pour favoriser une meilleure transition vers l'enseignement supérieur et permettre de mieux y réussir pour les élèves des séries générales et technologiques comme pour ceux des séries professionnelles. Parmi ces derniers, des aménagements dans la scolarité de terminale pourront être envisagés. À cet effet, l'accompagnement personnalisé notamment pourra être consacré à préparer à l'enseignement supérieur et les rythmes des périodes de formation en milieu professionnel pourront être aménagés. L'inscription des titulaires de baccalauréats professionnels et de baccalauréats technologiques, respectivement en STS et en IUT, sera favorisée sur la base de quotas d'accès fixés par les recteurs, selon des modalités qui seront ultérieurement précisées. 

 

Chaque académie devra engager une action forte pour faire mieux connaître et valoriser la voie professionnelle, en partenariat avec les conseils régionaux. Cette action pourrait notamment se traduire par l'identification, à terme, d'au moins un campus des métiers et des qualifications par académie, qui donnera lieu à un appel à projet spécifique. Symboles de la qualité des enseignements et des formations et de la compétitivité économique de la région, les campus des métiers regrouperont sur un lieu unique et autour de lui des acteurs divers, dans un partenariat renforcé de formation : les lycées professionnels ou polyvalents (qui peuvent être des lycées des métiers), des centres de formation d'apprentis, des établissements d'enseignement supérieur, des organismes de formation initiale et continue, des entreprises et des laboratoires de recherche.

 

Les travaux sur la carte des formations professionnelles, en anticipation des modifications introduites par le projet de loi sur la refondation de l'École de la République, devront donner lieu à un travail de concertation renforcée et permanente avec les Régions.

 

Sous la responsabilité des recteurs, la mise en œuvre en classe terminale des séries STMG et ST2S rénovées devra se dérouler dans un cadre permettant de favoriser la réussite des élèves et d'accompagner les professeurs, sur le plan de l'organisation des enseignements, des programmes et de la réussite aux nouvelles épreuves. L'attention portée aux classes de STI2D et aux classes de STL ces dernières années, et qui a permis une progression des effectifs à la rentrée 2012, devra être maintenue compte tenu du manque d'étudiants dans les filières de l'enseignement supérieur technologiques et scientifiques.

 

Enfin, une nouvelle dynamique doit être insufflée à la participation des élèves à la vie de leur établissement. Le rôle des conseils de la vie lycéenne devra notamment être mieux reconnu, et leur consultation sur des aspects importants de la vie de l'établissement (emplois du temps, accompagnement personnalisé et tutorat, gestion du foyer, etc.) devra être assurée, conformément aux textes officiels en vigueur.

 

II.3. Relancer la mission de formation continue de l'éducation nationale

Garantir à chaque élève le droit à la formation et à l'éducation tout au long de la vie : telle est l'ambition formulée par la refondation. L'École de la République doit offrir à tous les jeunes la possibilité d'acquérir une formation initiale de qualité et, ainsi, de s'insérer dans la vie économique et sociale. Mais il lui appartient aussi de relever les défis nouveaux du monde socio-économique, en lien étroit avec les collectivités territoriales : au premier chef, celui de faire évoluer les qualifications et de développer de nouvelles compétences, pour lutter efficacement contre le chômage et l'exclusion.

 

Acteur majeur de la formation des adultes, le ministère de l'éducation nationale doit prendre toute sa part dans l'accompagnement des évolutions professionnelles. Le pilotage de la mission de formation continue sera renforcé et permettra ainsi au réseau des Greta de se développer en s'adaptant aux nouvelles conditions économiques, juridiques et sociales, en complémentarité de la formation initiale, dans une logique d'éducation et de formation tout au long de la vie.


III - Favoriser la réussite éducative

III.1. Relancer l'éducation prioritaire

Malgré les efforts des personnels exerçant dans les écoles et les établissements de l'éducation prioritaire, les écarts entre les élèves qui y sont scolarisés et les élèves des écoles et établissements hors éducation prioritaire tendent à se creuser. Pour répondre à un impératif de justice sociale et faire en sorte que la réussite des élèves soit une réalité dans tous les territoires, la politique d'éducation prioritaire doit être repensée de manière ambitieuse. Elle fera donc l'objet d'une évaluation nationale qui associera l'ensemble des acteurs et partenaires concernés. Des assises de l'éducation prioritaire seront réunies à l'automne 2013.

 

Pour autant, l'éducation prioritaire devra bénéficier d'une attention particulière dès la rentrée 2013. Les établissements les plus en difficulté devront continuer à être soutenus par des moyens importants. L'affectation de personnels expérimentés et motivés est un objectif prioritaire. La mise en place de modalités de travail individuelles et collectives et d'organisations pédagogiques adaptées aux besoins des élèves devra être encouragée, notamment pour faciliter l'articulation entre l'école et le collège, puis l'ouverture sur le lycée. Les équipes d'inspecteurs et des correspondants académiques éducation prioritaire (Éclair et RRS) seront mobilisées pour favoriser le soutien et l'accompagnement des équipes de terrain.

 

III.2. Faire en sorte que les dispositifs favorisant la réussite éducative bénéficient d'abord à ceux qui en ont le plus besoin

Depuis 2008, des dérogations peuvent être demandées à la règle de l'affectation au collège ou au lycée correspondant à la zone de desserte, dans la limite des places disponibles, après avis d'une commission et sur décision du DASEN, lesquels se prononcent sur le fondement de sept critères énumérés dans la circulaire n° 2008-42 du 4 avril 2008.

 

Afin d'introduire dès à présent plus d'équité dans l'affectation des élèves, les directeurs académiques des services de l'éducation nationale ne traiteront plus prioritairement les demandes de dérogation formulées sur la base du motif « parcours scolaire particulier », qui servent trop souvent à éviter l'établissement de secteur. Les demandes à examiner en priorité restent, d'une part, celles des élèves en situation de handicap et nécessitant une prise en charge médicale importante, d'autre part, celles émanant de boursiers au mérite ou de boursiers sociaux. Les demandes liées à des rapprochements de fratrie ou de proximité de l'établissement seront désormais examinées elles aussi avant celles relatives à des « parcours scolaires particuliers ». Cette modification de l'ordre des critères de dérogation ne doit toutefois pas s'opérer au détriment de la continuité des parcours pédagogiques linguistiques entre l'école et le collège.

Ces dérogations font d'ailleurs actuellement l'objet d'une réflexion globale, afin de garantir la mixité sociale des établissements, en particulier ceux les plus exposés aux phénomènes d'évitement.

 

De la même manière, pour favoriser la réussite de chacun, tous les internats, dans leur diversité, doivent proposer l'excellence scolaire et éducative aux élèves accueillis. Ils sont accessibles prioritairement aux élèves relevant de l'éducation prioritaire et de zones urbaines sensibles (ZUS). Les établissements qui ont un internat doivent inclure dans leur projet d'établissement un projet pédagogique et éducatif pour les élèves internes.

 

III.3. Mieux scolariser les élèves en situation de handicap et les élèves à besoins éducatifs particuliers

La loi du 11 février 2005 a permis de développer rapidement la scolarisation en milieu ordinaire d'une majorité des enfants et des adolescents en situation de handicap. C'est à présent une approche plus qualitative qui doit être privilégiée pour construire une École inclusive, ouverte à tous, en améliorant l'accueil et l'accompagnement des élèves et la formation des acteurs.

 

Les projets personnalisés de scolarisation (PPS), proposés par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), seront déclinés au plan pédagogique au sein des écoles et des établissements scolaires. L'évaluation des besoins des élèves en situation de handicap s'appuiera sur le GEVA-Sco, outil dématérialisé d'échange avec les équipes pluridisciplinaires des MDPH. Un dialogue raisonné entre les MDPH et les départements, à partir d'indicateurs partagés, permettra d'améliorer l'équité territoriale en matière d'accompagnement. 350 emplois d'auxiliaires de vie scolaire (AVS) supplémentaires seront créés à cet effet à la rentrée de septembre 2013.

 

Les projets des classes pour l'inclusion scolaire (Clis) et des unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) feront partie intégrante du projet de l'école ou de l'établissement qui les accueille. Plus largement, chaque projet d'école ou d'établissement devra consacrer un volet à l'inclusion des élèves en situation de handicap.

 

Le troisième plan autisme devra favoriser, le plus tôt possible, la scolarisation des élèves présentant des troubles envahissants du développement, pour mieux adapter leur parcours scolaire à leurs besoins. Pour ce faire, des unités d'enseignement seront progressivement déployées au sein de certaines écoles maternelles, afin de favoriser un accompagnement éducatif et comportemental précoce, en partenariat avec les établissements et services médico-sociaux. Trente de ces unités d'enseignement pilotes seront installées pour la rentrée 2014.

 

Les enfants allophones nouvellement arrivés et les enfants issus des familles itinérantes et de voyageurs devront aussi pouvoir être progressivement intégrés en classe ordinaire. Trois circulaires relatives aux nouvelles missions des centres académiques pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus des familles itinérantes et de voyageurs (CASNAV) précisent les modalités de cet accueil.

 

Enfin, une attention particulière devra être accordée aux élèves intellectuellement précoces (EIP), pour qu'ils puissent également être scolarisés en milieu ordinaire. À cet effet, dès la rentrée 2013, chaque enseignant accueillant dans sa classe un élève intellectuellement précoce aura à sa disposition sur Éduscol un module de formation à cette problématique.

 

III.4. Installer un cadre protecteur et citoyen pour les élèves et les personnels

Élément central du pacte républicain, l'École est non seulement un lieu d'apprentissage mais aussi un lieu de vie qui doit préparer les élèves à leur vie de citoyen et favoriser le « vivre ensemble » par l'acquisition des valeurs républicaines.

 

En complément des enseignements, en particulier d'histoire-géographie, d'éducation civique et d'éducation civique, juridique et sociale, les actions éducatives mises en œuvre dans ce domaine doivent contribuer à développer chez les élèves l'engagement et l'autonomie nécessaires à la construction d'une citoyenneté responsable. Les référents académiques « mémoire et citoyenneté », récemment désignés par les recteurs, assureront la coordination et le suivi, dans les académies, des différentes actions menées par l'éducation nationale et ses partenaires dans ce domaine, et encourageront le développement d'initiatives locales.

 

La politique éducative s'inscrit dans le cadre global et cohérent de la politique gouvernementale mise en œuvre depuis la rentrée 2012 et doit combattre toutes les formes de discriminations, qui nuisent à la cohésion sociale et à l'épanouissement de chacun comme individu et comme citoyen. En la matière, trois priorités ont été identifiées : la lutte contre le racisme et l'antisémitisme, la lutte contre l'homophobie et la promotion de l'égalité entre les filles et les garçons.

 

L'École doit trouver des solutions adaptées et mesurées pour lutter contre l'absentéisme scolaire, dans le cadre des nouvelles conditions fixées par la loi n° 2013-108 du 31 janvier 2013 abrogeant les dispositions législatives relatives à la suspension des allocations familiales et au contrat de responsabilité parentale. Pour ce faire, l'accent devra être mis sur l'accompagnement des familles. Il s'agit d'améliorer le dialogue entre les parents d'élèves et l'ensemble de la communauté éducative, dans une approche de coéducation, et de renforcer la réactivité de tous les services dans la mise en œuvre des mesures de soutien aux parents et des mesures éducatives et pédagogiques. En cas de persistance du défaut d'assiduité, un personnel d'éducation référent sera désigné par le directeur d'école ou le chef d'établissement pour suivre les mesures mises en œuvre au sein de l'établissement d'enseignement au bénéfice de l'élève concerné.

Un climat scolaire serein est indispensable au bon déroulement des apprentissages et, plus largement, au bien-être des élèves et des personnels. Face à des problématiques complexes, il est donc nécessaire d'apporter des réponses diversifiées, de manière à avoir une action à la fois rapide et de long terme. Les équipes d'établissement, renforcées pour certaines par la mise en place des assistants de prévention et de sécurité, devront se mobiliser autour de certains axes de travail en particulier : la gestion de situations de crise, la prévention du harcèlement et des violences sexistes entre élèves, l'action sur le climat scolaire.

Des documents d'appui seront diffusés aux écoles et des outils proposés aux établissements du second degré afin de favoriser une réflexion sur les punitions et les sanctions, et de prévenir les exclusions.

Les dispositifs relais de l'académie seront enrichis par des internats relais (voir aussi I. 4.) destinés à des élèves relevant de l'obligation scolaire, dont le comportement (absentéisme persistant, exclusions par mesure disciplinaire, etc.) signale un risque de décrochage. La scolarisation en internat devra leur permettre de bénéficier d'un accompagnement individualisé jusqu'à la reprise d'un parcours de formation. Ces nouveaux internats ont vocation à se substituer aux établissements de réinsertion scolaire (ERS).

 

Favoriser la réussite éducative, c'est envisager l'enfant ou l'adolescent dans sa globalité. C'est pourquoi l'École a aussi pour responsabilité la promotion et l'éducation à la santé et l'éducation aux comportements responsables. Elle contribue au suivi de la santé des élèves et a également vocation à réduire les inégalités. Les questions sociales et de santé doivent donc pouvoir être traitées en son sein et en lien avec ses partenaires, si nécessaire ; des solutions doivent pouvoir y être amorcées et un suivi réalisé. Les professionnels sociaux et de santé, de même que les enseignants et l'équipe éducative dans son ensemble, disposeront d'outils pour identifier les signes de mal-être chez les jeunes. Cette sensibilisation de tous les personnels au sein des établissements permettra, d'une part, de prévenir le décrochage scolaire et, d'autre part, d'œuvrer en faveur du bien-être des élèves à l'École. Dans cette perspective, 50 emplois d'assistants sociaux seront créés à la rentrée 2013. Les missions des personnels de santé (médecins et infirmiers), et des assistants sociaux vont faire l'objet d'une actualisation concertée pour garantir un meilleur suivi social et de santé des élèves en cohérence avec les politiques de santé publique et de prévention mises en place au plan national. 

 

Pour contribuer à la lutte contre les violences et les stéréotypes de genre et, plus largement, permettre à chacun de se forger une attitude responsable, l'École doit promouvoir dès l'école primaire l'éducation à la sexualité, qui fait partie des programmes. Pour cela, un groupe de travail a été mis en place sur le sujet. Il fera des propositions pour améliorer cet enseignement indispensable.

 

La généralisation de l'éducation au développement durable est renforcée par l'inscription des thèmes et des enjeux du développement durable dans les programmes d'enseignement et dans l'offre de formation, la production de ressources pédagogiques et les projets d'écoles et d'établissements. Les politiques nationales issues de la Conférence environnementale sont prises en compte par l'éducation nationale, en particulier grâce à la multiplication des partenariats nationaux et régionaux. Les « démarches globales de développement durable des écoles et des établissements » feront l'objet d'une grande attention dans les académies, en raison de leur dimension territoriale.

 

Au-delà de ses bénéfices en matière de santé, le sport scolaire joue aussi un rôle fondamental dans l'accès des jeunes aux sports et, plus largement, à la vie associative et au développement du lien social, notamment dans les zones ou quartiers défavorisés. En favorisant le dépassement de soi, l'esprit d'équipe, la confiance en soi et la responsabilisation, en valorisant des valeurs de fraternité et de respect, le sport scolaire contribue à la cohésion des écoles et des établissements scolaires. Le sport scolaire est le trait d'union entre l'éducation physique et sportive et le sport fédéral. Il est la continuité de l'enseignement de l'EPS, il devra être encouragé.

 

III.5. Améliorer le dialogue entre l'École, ses partenaires et les familles

1) Renforcer les partenariats 

L'éducation revêt bien d'abord un caractère national, mais les collectivités territoriales, qui financent 25 % de sa dépense, jouent aussi un rôle déterminant dans le bon fonctionnement du système éducatif.

 

Le projet de loi d'orientation et de programmation prévoit que les contrats d'objectifs des établissements pourraient devenir tripartites, en associant la collectivité de rattachement si celle-ci le souhaite. Ainsi, chacun pourrait préciser ses engagements pour améliorer la réussite des élèves d'un établissement et l'action menée gagnerait en cohérence, au service d'une École plus performante dans ses missions et plus ouverte sur ses territoires.

 

Dans le même esprit, le dialogue de gestion et de performance avec chaque académie organisé tous les ans au niveau national permettra de mettre en perspective les premières mesures de refondation de l'École en tirant un bilan de la rentrée 2013.

 

Les contrats d'objectifs entre l'administration centrale et les académies seront signés et évalués périodiquement. Ils permettront de mieux apprécier, sur une période de quatre ans, les résultats des élèves et, plus largement, l'ancrage des mesures nouvelles dans les écoles et les établissements.

 

Outre les collectivités territoriales, de nombreuses associations contribuent à la mise en œuvre de la politique éducative grâce à leur expertise dans certains domaines pédagogiques et éducatifs. Le système éducatif doit pouvoir continuer à s'appuyer sur ces partenariats.

 

2) Mieux associer les parents à la réussite scolaire et éducative 

Renforcer le lien entre l'École et les familles et mieux prendre en compte notamment les situations de vulnérabilité et de grande pauvreté constituent des leviers efficaces pour lutter contre les inégalités et construire l'École de la réussite de tous les élèves, dans une perspective de coéducation.

 

Pour cela, des « espaces parents », lieux dédiés aux rencontres individuelles et collectives, seront progressivement mis à leur disposition dans les locaux scolaires, en lien avec les collectivités territoriales. Des actions de soutien à la parentalité seront conduites au sein des établissements ou à l'extérieur, avec le concours des membres des équipes éducatives, pour renforcer les partenariats avec les parents et leurs associations.

 

Conduites en partenariat avec l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI), les actions éducatives familiales (AEF) seront développées, en faveur des parents en situation d'illettrisme ou de grande fragilité linguistique. Lancé en janvier 2013, leur déploiement dans 50 départements devra permettre à ces adultes de se rapprocher de l'écrit, d'acquérir des compétences de base et de changer

leur regard sur l'École, tandis qu'il offrira dans le même temps à leurs enfants la possibilité de prendre confiance en eux et de se sentir soutenus et accompagnés dans leur travail scolaire. Plus largement, ce déploiement est en cohérence avec la « grande cause nationale 2013 » : en attribuant ce label à la lutte contre l'illettrisme, le Premier ministre marque la volonté du Gouvernement de faire en sorte que chacun puisse acquérir les compétences fondamentales nécessaires pour accéder au savoir, à la culture, à l'emploi, à la formation professionnelle et à l'épanouissement personnel, et pour participer pleinement à la vie démocratique.

 

Enfin, la lutte contre les inégalités et la construction d'une École ouverte à tous exige de réaffirmer certains principes. Ainsi, l'accès à la restauration scolaire, quand celle-ci existe, est un droit. Il ne peut être établi aucune discrimination selon les situations familiales, géographiques ou de revenus.

 

Plus largement, il s'agit d'accorder une attention particulière aux parents les plus éloignés de l'institution scolaire. La crise économique qui touche durement de nombreuses familles en situation de grande précarité doit conduire les équipes pédagogiques des écoles et des établissements à limiter la demande de fournitures individuelles au strict nécessaire.

 

3) Construire une École ouverte sur le monde

L'ouverture de l'École doit dépasser le seul cadre national pour se tourner vers l'échelon européen et international. L'École crée les conditions d'intégration des élèves, citoyens et futurs professionnels, dans le monde qui les entoure. En ce sens, chaque élève devrait pouvoir réaliser au cours de sa scolarité une mobilité dite « apprenante » dans le cadre d'un partenariat scolaire, d'un stage ou d'un séjour à l'étranger. La mobilité virtuelle sera favorisée, notamment dans le cadre de la généralisation de l'apprentissage d'une langue vivante dès le cours préparatoire. Toute action permettant de valoriser notre système éducatif ou de s'inspirer des pratiques innovantes des partenaires étrangers sera encouragée. Sur ces questions, les délégués académiques aux relations européennes, internationales et à la coopération (DAREIC) sont des interlocuteurs privilégiés.

 

III.6. Mettre l'innovation au service de la refondation

La refondation implique des évolutions profondes du système éducatif ; pour réussir, celles-ci doivent être accompagnées. L'innovation, démarche de conduite du changement et d'accompagnement des nouvelles organisations et des nouvelles pratiques, peut y contribuer. Il s'agit d'aider les acteurs de l'École, à tous les niveaux, dans leur développement professionnel, de mutualiser les expériences et de développer des ressources sur les grandes thématiques de la refondation.

 

Dans ce cadre, les conseillers académiques en recherche-développement, innovation et expérimentation (CARDIE), grâce à leur position transversale au sein de l'académie, assistent les recteurs pour le pilotage pédagogique renouvelé qu'appelle la refondation, notamment dans le premier degré. Ils sont des interlocuteurs privilégiés des équipes d'école et d'établissement.

 

Un Conseil national de l'innovation pour la réussite éducative est créé auprès du ministre de l'éducation nationale et de la ministre déléguée, chargée de la réussite éducative. Composé notamment de représentants des services académiques (recteurs, DASEN) et d'acteurs de terrain, il a pour mission d'impulser l'esprit d'innovation en matière de réussite scolaire et éducative et de proposer des orientations en ce sens, de faire recenser, évaluer et diffuser les pratiques innovantes de terrain les plus pertinentes. Il animera, avec la Direction générale de l'enseignement scolaire qui le pilote, le réseau des CARDIE. Il remettra aux ministres un rapport annuel sur ses travaux et propositions.

 

*****

La refondation de l'École repose sur une stratégie ambitieuse et dispose des moyens humains nécessaires à sa mise en œuvre. Cet effort global est un investissement pour l'avenir de notre pays. Pour produire tous ses effets, cette réforme appelle la mobilisation de tous, dans un esprit d'unité autour d'objectifs partagés, de confiance en la capacité de notre système éducatif à évoluer, et d'action au service de la jeunesse et de la Nation tout entière.

 

 

Le ministre de l'éducation nationale,
Vincent Peillon

La ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale,
chargée de la réussite éducative,
George Pau-Langevin



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6 décembre 2012 4 06 /12 /décembre /2012 00:01

Né le 15 décembre 1907, Oscar Niemeyer fut l'un des plus grands architectes du XXe siècle et l'initiateur de l'architecture moderne. Il a réalisé en 70 ans de carrière 600 bâtiments : siège de l'ONU à New York, ville de Brasilia, siège du PCF place du Colonel Fabien à Paris, le Volcan au Havre, la cathédrale de Brasilia, le Congrès National du Brésil, la Bourse du Travail à Bobigny, le siège de "L'Humanité" à Saint-Denis, le Musée d'art contemporain de Niteroi, l'auditorium de Sao Paulo, etc. Réfugié en France à l'époque de la dictature au Brésil, il parlait un très bon français. Communiste, il a eu des relations de proximité avec des dictateurs comme Fidel Castro et Hugo Chavez. Très amoindri ces dernières années, Oscar Niemeyer s'est éteint dix jours avant son 105e anniversaire. Il rejoint sa fille unique Anna Maria qui est morte le 6 juin 2012 à 82 ans mais lui avait laissé une grande descendance jusqu'à des arrière-arrière-petits-enfants.

SR


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2 août 2012 4 02 /08 /août /2012 07:01

Faut-il en finir avec les jeux olympiques ? Étrange interrogation qui se poserait peut-être par volonté de ne pas faire comme les autres ? Quelques petites réflexions sur le sujet…


yartiJO01Depuis le vendredi 27 juillet, et jusqu’au dimanche 12 août 2012, l’actualité quotidienne est tributaire d’un événement mondial prévu depuis 2005, à savoir les Jeux Olympiques de Londres.

Lorsque que j’étais en Troisième, en classe d’histoire, dans une interrogation écrite, mon professeur nous avait demandé ce que signifiait le sigle "JO". Je crois avoir été le seul à avoir écrit "journal officiel" et j’ai été le seul à avoir mis la bonne réponse car nous étions dans le programme en pleine instruction civique, nous étudions alors le fonctionnement des institutions (mais je n’avais rien appris de nouveau). Beaucoup de mes camarades avaient répondu "jeux olympiques" et cela avait amusé l’enseignant.

Mais ils n’avaient peut-être pas tort, car si l’on faisait aujourd’hui un sondage pour savoir ce que signifieraient ces deux lettres, nul doute que la très grande majorité des sondés répondraient la même chose.

J’avoue que je ne suis pas un grand sportif (c’est un euphémisme !), j’essaie juste péniblement, comme citadin sédentaire, à en pratiquer un peu, même si c’est encore trop peu, et surtout, j’avoue que je ne suis pas intéressé par l’actualité sportive (sauf si elle a des implications politiques).

Déjà parce que je considère qu’il y a bien plus important dans les informations à connaître ; je me souviens avoir dit à un collègue avec qui je déjeunais un lundi midi que je préférais bien plus m’inquiéter des résultats de la cantonale partielle qui venait de se dérouler la veille en Languedoc-Roussillon, où le candidat du Front national avait obtenu un score très élevé, à énumérer benoîtement les résultats des matchs de football du week-end.

Ensuite parce que j’ai du mal à concevoir l’esprit de compétition pour le sport. Je me dis que si le mental peut effectivement se travailler, le physique est souvent un don de la nature, et donc, très inégalement transmis à la naissance. Je ne conçois l’exploit sportif que par rapport à soi-même, être meilleur qu’avant, se surpasser, aller jusqu’à ses limites, mais pas vraiment par rapport aux autres.

Certes, j’admets l’esprit de compétition pour les études, pour les emplois, pour l’intellectuel, pour le commercial aussi : les concours des grandes écoles, les concours de recrutement, d’ailleurs, la moindre embauche est une compétition quand le marché de l’emploi est si tendu, les élections aussi sont des compétitions saines pour la respiration démocratiques, et cela ne me choque pas, alors que l’intelligence, finalement, tout comme le physique, il faut bien le reconnaître, est très inégalement répartie à la naissance. Tout comme la convivialité, la sympathie, l’honnêteté etc. Disons qu’il y a une part d’inné et une part d’acquis et que le mérite ne provient que de l’acquis, c’est cela qui devrait être récompensé.

Claude Debussy avait d’ailleurs la formule pour être impeccable : « Être supérieur aux autres n’a jamais représenté un grand effort si l’on n’y joint pas le beau désir d’être supérieur à soi-même. ». Belle formule !

Alors, oui, ma faible implication personnelle dans le sport, ma détestation des manifestions de masse, le côté aussi électron libre, oui, tout aurait pu me conduire à vouloir détester ces jeux olympiques, à vouloir cracher dessus, par dépit, peut-être par envie ? par ronchonnement, sans aucun doute.

Et pourtant, non ! Je trouve que c’est une très bonne manifestation de ce que l’âme humaine est capable de faire. Réunir deux cent quatre nations est une sorte de communion cosmopolite plutôt rassurante malgré les vicissitudes de la géopolitique (par exemple, on s’entretue encore en Syrie, vingt mille morts depuis un an). C’est aussi un exploit sur les capacités humaines à trouver ce qui nous unit et pas ce qui nous divise.

Certes, je ne suis pas naïf, j’imagine les enjeux financiers, parfois diplomatiques, de ces jeux, que les grandes valeurs affichées ne sont pas forcément celles pratiquées. Et puis, ces belles valeurs du sport, qui sont la loyauté, le goût de l’effort, l’acceptation des règles du jeu, le mérite, etc., sont des valeurs humanistes qui devraient se retrouver partout dans le monde, dans tous les métiers, dans toutes les activités, pas seulement dans le sport.

Ceux qui crachent sur ces jeux oublient à l’évidence ces plus de dix mille athlètes qui se sont entraînés depuis quatre ans, depuis dix ans parfois, avec une discipline draconienne, avec une endurance longue et pénible, avec un moral oscillant. Il faut respecter au moins ces personnes très méritantes, et refuser ces jeux, cela serait leur refuser un sens à leur entraînement, peut-être à leur vie, ce serait un peu comme interdire le passage du baccalauréat aux lycéens. Tout le monde a le droit de recueillir les fruits de son labour, y compris les sportifs de haut niveau.

Regarder les jeux à la télévision, je ne le fais pas, mais j’admets qu’il peut y avoir un certain plaisir à voir des nageuses nager, des gymnastes faire leurs mouvements, des équipe de volley sur sable (beach volley ?) jouer… en tout cas, pas moins grand qu’à voir des footballeurs courir sur le gazon après un ballon.

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Les JO, ce sont aussi un spectacle, ou plusieurs spectacles. La cérémonie d’ouverture, de fermeture. Oui, bien sûr, je suis tenté, comme d’autres, de dire panem et circenses (du pain et des jeux) pour faire oublier les soucis de la vie. Mais pourquoi serait-ce plus que pour les coupes de football, les tournois de tennis, ou le Tour de France ? Pourquoi cracher sur des milliers de gens qui se sont donné du mal à faire un spectacle dont je ne suis pas capable de juger la valeur esthétique ? Faudrait-il aussi vilipender les concerts de musique classique de la Salle Pleyel ou du Châtelet ? tous les ballets et les opéras, toutes les pièces de théâtre ? Et puisqu’on y est, faudrait-il vouer aux gémonies le cinéma ? et toutes sortes de divertissements, et commençons par la littérature, et aussi, la peinture ? Après tout, le Louvre est tellement inutile aux personnes qui meurent de faim… Faudrait-il cracher sur les près de neuf millions de téléspectateurs français qui ont regardé la cérémonie d’ouverture sur TF1 ? Après tout, neuf millions de personnes, peu de candidats ou de partis politiques peuvent se vanter d’avoir autant d’électeurs…

Et dans ce spectacle, c’est aussi la confirmation que Élisabeth II est une reine adorable, capable d’autodérision par sa participation à un court-métrage avec James Bond (cela ne m’empêcherait cependant pas d’être républicain au Royaume-Uni).

Le coût de ces jeux serait de onze milliards d’euros. Ce n’est même pas le double de la loi de finances rectificative que le gouvernement Ayrault a fait définitivement adopter par le Parlement le 31 juillet 2012 (sept milliards deux cent millions). Après tout, ce montant peut être comparé à certains films, comme "Avatar", un budget de quatre cent millions de dollars et près de trois milliards de dollars de recettes (le dernier Batman, c’est un budget d’un quart de milliard de dollars, c’est, là aussi, énorme, juste pour un film !). Il y a les dépenses, mais l'économie londonienne en profite bien aussi, il suffit de chercher un hôtel en août pour s'en convaincre.

On pourrait aussi évoquer la Grèce qui s’était beaucoup s’endetter pour les JO d’Athènes en 2004 et on pourrait bien sûr estimer que les JO n’ont pas aidé le pays à sortir de la corruption et de la faillite, au contraire...

Et puisque je parle de la Grèce, faudrait-il que les athlètes grecs renoncent à jouer parce que leur pays est ultra-endetté ? Faudrait-il que les Grecs n’aient plus le droit de s’entraîner, de faire du sport, et même, de rire, de vivre ? Qu’en diraient les habitants des (nombreux) pays pauvres ? Faudrait-ils qu’ils gardent une tête d’enterrement jusqu’à une improbable prospérité qu’ils ne connaîtraient de toute façon pas car ils auraient déjà disparu de cette planète ? La gravité des situations interdirait-elle la futilité de la vie ? Faudrait-il ainsi culpabiliser à tout bout de respiration ?

Enfin, dernière réflexion que j’ai lue ici ou là, les jeux olympiques seraient une manifestation des puissances occidentales, ou des puissances de l’argent, ou encore du monde capitaliste. Cette idée, issue d’un cheminement idéologique arc-bouté sur un dogme dépassé de deux siècles, est complètement erronée puisque justement, les jeux olympiques réunissent l’ensemble des nations du monde (sauf le Vatican).

Et si l’on en juge par le nombre de médailles d’or (prenons un critère comme un autre), c’est la Chine qui en a obtenu le plus grand nombre la dernière fois, en été 2008 (certes à Pékin), mais elle était déjà deuxième en été 2004 (à Athènes), avec respectivement 51 et 32 médailles d’or. La Russie a été également bien classée (troisième à Pékin et à Athènes), respectivement avec 23 et 27 médailles d’or. À Athènes, Cuba a même eu 9 médailles d’or (classé onzième) et le Brésil 5. Le trio de deux derniers jeux, c’était donc Chine/États-Unis/Russie. Entre 1936 et 2004, le premier pays a toujours la Russie ou les États-Unis. L’argument du caractère capitaliste de l’événement ne tient vraiment pas longtemps la route.

Il y a donc un certain snobisme à vouloir contester les JO par le simple fait que c’est un événement médiatique qui occupe un long temps d’antenne. Si vous êtes agacés par tant de brouhaha (je peux vous comprendre), alors, faites comme moi, ne tombez pas dans le piège, éteignez votre téléviseur et profitez de l’été. D’autres sont passionnés, et c’est aussi leur droit.

Bref, vous l’avez compris, je n’aime pas vraiment le sport mais vivent les JO !
Et que les meilleurs gagnent !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (2 août 2012)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
La Grèce.
Le Royaume-Uni.

yartiJO05
 


http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/les-jo-2012-de-londres-et-le-beau-120733



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20 mars 2012 2 20 /03 /mars /2012 18:32

(dépêche)




Tuerie de Toulouse : tragédie nationale, réflexion nationale
LE MONDE | 20.03.2012 à 16h37 • Mis à jour le 20.03.2012 à 16h38

Une "tragédie nationale". Le président de la République a eu les mots justes pour qualifier la tuerie survenue, lundi 19 mars, dans une école juive de Toulouse. Trois enfants et un enseignant, rabbin, exécutés de sang-froid, par un homme seul, jusque dans l'entrée de l'établissement. Avec la même arme qui, déjà, à Montauban le 11 mars et à Toulouse le 15 mars, avait servi à tuer, méthodiquement, trois militaires français.

Une tragédie nationale dont l'onde de choc a pétrifié, dans l'instant, une ville, une région, le pays tout entier. Avant de répercuter son écho dans le monde, de Jérusalem à Washington. Une tragédie nationale qui plonge chacun dans l'effroi et la consternation, dans l'incompréhension devant l'absurde, dans la révolte contre l'injustifiable.

Les candidats à l'élection présidentielle ont eu la réaction qui s'imposait. Ils ont suspendu leur campagne, leurs polémiques, leurs empoignades, leurs petites phrases, annulé leurs émissions, reporté leurs réunions publiques, participé, à Toulouse, à Paris ou ailleurs, à des moments de recueillement. L'heure est, évidemment, à la douleur partagée, oecuménique autant que républicaine. Le temps du deuil. Celui des quatre tués de Toulouse comme celui des trois militaires, à qui les honneurs seront rendus, mercredi, en présence du chef de l'Etat.

Tant il est évident que l'unité nationale est la seule réponse possible face à un drame de cette nature. Un drame d'autant plus symbolique qu'il atteint trois composantes de l'identité républicaine : l'école, son creuset, l'armée, qui le fut longtemps, et la protection due à tout citoyen, sans distinction d'origine ou de religion.

Chacun l'a compris, pesant ses mots pour échapper à tout soupçon de vouloir récupérer la compassion à son avantage. Ou à afficher trop ostensiblement sa solidarité avec la communauté juive, odieusement frappée, une nouvelle fois. Saluons cette dignité. Souhaitons qu'elle ne s'efface pas trop vite.

Mais ce temps de silence, comme la minute du même nom qui a été observée, mardi, dans toutes les écoles du pays, ne peut être que le prélude à une "réflexion nationale". La formule est de François Bayrou, à Grenoble, où il a maintenu le meeting prévu lundi soir. Cela a pu choquer. A tort.

Car le candidat centriste a posé, gravement, des questions fortes. Quels que soient les motivations du meurtrier de Toulouse, les ressorts de sa folie barbare, "ce type de folie s'enracine dans l'état d'une société", d'une société française, en l'occurrence, où "le degré de violence et de stigmatisation est en train de grandir", a déclaré M. Bayrou. Et d'ajouter : "Les hommes publics ont le devoir de veiller à ce que les tensions, les passions, les haines ne soient pas à chaque instant entretenues. Le fait de montrer du doigt les uns et les autres, c'est faire flamber les passions, et on le fait parce que dans ce feu-là il y a des voix à prendre."

La charge est violente. Elle vise une responsabilité collective.

Tant il est clair que le rejet de l'Autre - plus encore : la haine de l'Autre - est un poison mortel pour la République.

"Le Monde" daté du 21 mars 2012






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